Notes
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[1]
Les American Depositary Receipts (ADR) sont des certificats émis par des banques américaines en échange du dépôt d’actions d’entreprises étrangères. La banque gère les flux de dividendes et le registre des détenteurs de certificats.
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[2]
L’indice boursier du marché mondial mesure la performance des marchés boursiers du monde entier, cet indice est calculé par MSCI (Morgan Stanley Capital International) d’où sa nomination (MSCI world index). Le MSCI mondial est composé par les titres de 23 pays les plus développés, ainsi que les valeurs cotées dans la zone d’Amérique latine, d’Europe de l’Est, d’Afrique (Afrique du Sud, Égypte, Maroc), du Moyen-Orient (la Turquie), et la région asiatique.
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[3]
Marché i (pays développé) vis-à-vis du marché international (mondial)
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[4]
Selon le théorème de séparation, tous les investisseurs, quelles que soient leurs richesses initiales et leurs préférences pour le risque, construisent leurs portefeuilles optimaux par combinaison entre le titre sans risque et le portefeuille de marché.
1La diversification internationale constitue un outil crucial d’amélioration de la performance des portefeuilles des investisseurs. Elle permet de réaliser des gains importants et ce, en affectant une partie de la richesse de l’investisseur à des actifs étrangers et en réduisant le risque total du portefeuille ainsi diversifié. Certes, les vertus de la diversification des risques sont largement tributaires de l’interdépendance des marchés. En effet, la théorie moderne du portefeuille montre que les gains de diversification internationale sont inversement liés au niveau d’intégration des marchés financiers, intégration qui a progressé significativement du fait de la libéralisation des échanges, du démantèlement des barrières à l’investissement international et aux mouvements des capitaux entre les marchés. En l’occurrence, les mouvements de libéralisation ont favorisé le rapprochement des comportements et des réactions des indices boursiers. Cela s’est traduit par une augmentation des corrélations entre les marchés, un accroissement de la variation de la volatilité des actifs dans le temps. Or, une forte corrélation entre les indices boursiers entraîne une réduction des gains et pourrait compromettre son efficacité comme outil d’amélioration de la performance. C’est ainsi que King et al. (1994) constatent que la similarité des réactions des marchés aux événements s’explique par l’augmentation de leur intégration, intégration qui conduit à une allocation sous-optimale des portefeuilles, et réduit la performance de la diversification internationale.
2La littérature sur l’intégration financière des marchés de capitaux, et de son effet sur la diversification, est assez abondante. Cependant, peu nombreux sont les travaux qui étudient l’impact de cette intégration sur les gains attendus des stratégies de diversification internationale des portefeuilles (Gilmore et McManus, 2002, 2003 ; Serrano et Rivero, 2002 ; Vo et Daly, 2005 ; Laopodis, 2004 ; Aggarwal et Kyaw, 2005 ; Arouri, 2003 ; Lagoarde et Lucey, 2006). De plus, les travaux ayant étudié la dynamique des gains de la diversification internationale, en fonction du degré d’intégration des marchés, se sont le plus souvent limités au cas du l’investisseur américain.
3La suprématie donnée à l’analyse de l’investisseur américain s’explique par deux facteurs. D’une part, la question de la modélisation du risque de change est évitée. D’autre part, cela permet de mettre en avant les bénéfices de la diversification internationale par rapport à une diversification nationale, le marché boursier américain représentant 50 % de la capitalisation boursière mondiale. Remarquons que certaines entreprises étrangères cotées sur le marché américain par le biais des American Depositary Receipts (ADR) permettent à l’investisseur américain d’atteindre des objectifs en termes de rentabilité liée à une diversification internationale de son portefeuille [1]. L’analyse de l’investisseur américain ne fait donc que conforter la supériorité d’une diversification internationale par rapport à une diversification nationale en termes de rentabilité et de risque, et ceci même en présence de risque de change.
4Notre analyse vise à étendre l’analyse des gains liés à la diversification des portefeuilles à davantage de pays. En utilisant une approche empirique basée sur la technique du MEDAF conditionnel international, nous essayons, économétriquement, de capter la variation dynamique de la corrélation, la volatilité, et leurs effets sur les gains de diversification, à partir d’un échantillon de pays développés et émergents, représentant 70 % de la capitalisation boursière.
1 – Intégration financière et diversification internationale : une revue de la littérature
5Les effets de l’intégration financière sur les gains liés à la diversification internationale sont ambigus. D’un côté, l’intégration des marchés financiers rend la diversification internationale plus efficace et plus performante, et ceci à travers l’élimination et/ou la réduction des barrières aux mouvements de capitaux et aux facteurs de segmentation. Mais, d’un autre côté, cette intégration aurait augmenté les corrélations entre marchés financiers, ce qui réduirait les bénéfices des stratégies de diversification internationale. Ainsi, l’interdépendance et l’intégration des marchés financiers peuvent remettre en cause les bénéfices tirés d’une diversification internationale du portefeuille. Cependant, les indices boursiers des marchés financiers n’étant pas parfaitement corrélés, les opportunités de diversification sur ces marchés ne sont pas totalement supprimées, notamment en termes de réduction des risques.
6Le MEDAF (ou modèle d’évaluation des actifs financiers) a été introduit par Sharpe (1964) et Lintner (1965). Il se situe dans la continuité de la théorie moderne du portefeuille de Markowitz (1952,1959). La réalisation de l’équilibre du marché par l’offre et la demande permet de déterminer la rentabilité espérée des titres en fonction de leur sensibilité au risque du marché ou risque systématique. Il s’appuie sur le fait que les investisseurs, quelle que soit leur aversion pour le risque, choisissent des portefeuilles efficients en termes de moyenne-variance. Une conséquence du MEDAF est que seul le risque systématique est rémunéré. Un investisseur supportant le risque individuel associé à un titre n’en est pas récompensé car ce risque pourrait être diversifié. Ainsi, la relation fondamentale du MEDAF établit que la rentabilité attendue à l’équilibre sur un titre donné est une fonction linéaire de la rentabilité du marché. Le coefficient d’ajustement linéaire, appelé bêta, représente la sensibilité des mouvements du titre à ceux du marché. Le MEDAF repose ainsi sur deux éléments principaux : le portefeuille de marché et la notion de bêta.
7Les études empiriques fondées sur des approches non-conditionnelles du MEDAF (Solnik, 1974 ; Korajczyk et Viallet, 1989) ne permettent pas de tirer de conclusions définitives sur la structure des marchés financiers internationaux. En effet, ces études considèrent que les primes de risque et les corrélations ne varient pas dans le temps et réagissent d’une manière identique et constante aux différents chocs qui les affectent. Par ailleurs, ces études suscitent de nombreuses critiques portant notamment sur le caractère statique de la relation entre les rentabilités espérées et les bêtas. Autrement dit, elles supposent que les opportunités d’investissement et de consommation sont constantes dans le temps. Cette hypothèse permet d’éviter les problèmes relatifs à l’acquisition et au traitement d’informations et donc de modéliser le comportement de l’investisseur par le biais d’un programme d’optimisation classique. En outre, les approches non-conditionnelles ne prennent pas en considération le problème de variation de la volatilité. Or, de nombreuses études empiriques montrent que les moments d’ordre deux (variances et covariances) varient au cours du temps. Enfin, une abondante littérature a récemment montré que les rentabilités boursières des marchés des pays émergents sont partiellement prévisibles.
8L’ensemble de ces éléments justifie le recours à une approche dynamique tenant compte des changements dans la sphère économique, financière et réglementaire, de leur impact sur l’intégration des marchés financiers et sur les gains escomptés de la diversification internationale des portefeuilles.
9Dans cet esprit, plusieurs types de travaux peuvent être distingués. Par exemple, Fraser et Oyefeso (2002) et Heimonen (2002) ont testé l’existence d’une relation de co-intégration entre les marchés européen et américain, la présence d’une augmentation du nombre de vecteurs de co-intégration entre les marchés s’interprétant comme le signe d’une intégration évolutive croissante. D’autres, comme Colm Kearney, Brian M. Lucey, (2004) ont examiné les valeurs prises par la matrice de corrélation, l’augmentation des coefficients au cours du temps prouvant la présence d’une forme d’intégration à long terme. Dumas et Solnik (1995) utilisent la méthode des moments généralisés (GMM) pour tester une version conditionnelle du modèle international d’équilibre des actifs financiers (MEDAFI). Leurs travaux valident le MEDAFI et l’hypothèse d’intégration des quatre plus grands marchés boursiers (États-Unis, Japon, Allemagne et le Royaume-Uni). Cependant, la méthode des GMM ne spécifie pas la dynamique des seconds moments, ce qui prive l’analyste d’un bon nombre d’indicateurs de premier intérêt pour l’investisseur, tels que les corrélations conditionnelles, les bêtas conditionnels, le ratio optimal de couverture, etc.
10Pour pallier cette limite, De Santis et Gérard (1997) étudient l’intégration financière de 8 marchés boursiers de pays développés (Canada, Japon, France, Allemagne, Italie, Suisse, le Royaume-Uni et États-Unis). Dans le cadre d’une extension du modèle GARCH multivarié d’Engle et Kroner (1995), ils testent une version conditionnelle du MEDAFI. Leurs résultats confirment l’hypothèse d’intégration des marchés financiers pour les pays qu’ils étudient. En outre, les auteurs mesurent les gains espérés de la diversification internationale pour un investisseur américain. Ils estiment ces gains à 2,11 % par an et montrent que les gains n’ont pas été réduits avec l’intégration observée des marchés étudiés. Cependant, le modèle de DeSantis et Gérard (1997) repose explicitement sur l’hypothèse d’intégration parfaite des marchés financiers. Or, plusieurs travaux prouvent la présence d’une forme de segmentation entre les marchés et qu’ils sont partiellement segmentés (Karolyi et Stulz, 2002).
11Ainsi, Gérard et al. (2003) développent un MEDAFI à segmentation partielle et étudient l’intégration des pays asiatiques par rapport à l’indice mondial. Les résultats avancés rejettent l’hypothèse de segmentation totale et soutiennent la présence d’une intégration modérée. Dans le même esprit, Adler et Qi (2003) montrent que le marché mexicain est intégré au marché américain. Carrieri et al. (2006) testent une version conditionnelle du MEDAFI à segmentation partielle pour plusieurs marchés émergents d’Asie et d’Amérique du Sud. Leurs résultats montrent que ces marchés émergents sont partiellement segmentés et que leur degré d’intégration varie sensiblement au cours du temps avec la prime de risque de change.
12Il convient aussi de noter que le modèle GARCH multivarié de De Santis et Gérard (1997) n’est pas adapté pour prendre en compte les effets d’asymétrie dont l’existence fut confirmée dans le cas univarié et bivarié par de nombreux travaux (Black, 1976 ; Glosten et al. 1993 ; Kroner et Ng, 1998 ; Harvey et Siddique, 2001 ; Engle et Sheppard, 2003). Ces travaux montrent que les volatilités et les interdépendances entre marchés boursiers sont non seulement plus importantes en période de crise mais aussi qu’elles réagissent différemment selon le signe du choc qui les affecte. Tenir compte de ces effets d’asymétrie est très important, notamment lorsque la dynamique des gains attendus de la diversification est étudiée. Notre article intègre cet aspect pour mieux étudier l’impact des chocs passés sur la variation conditionnelle de la volatilité, de la corrélation et sur les gains de diversification.
13En prolongement de cette littérature, nous étudions dans le cadre du MEDAFI l’effet de l’augmentation de l’intégration des marchés sur les gains attendus de la diversification. En outre, nous analysons l’impact des chocs affectant les marchés sur l’évolution de cette intégration et, par la suite, sur les bénéfices de la diversification à travers la présence d’une variation dans le temps de la volatilité et des corrélations.
2 – Modèle et méthodologie
14Solnik (1974) présente une extension internationale du MEDAF. Ce MEDAFI permet de réaliser une évaluation internationale d’un actif ou d’un portefeuille, et simultanément, de l’intégration entre les marchés financiers au travers des indices boursiers. Ce modèle se présente sous la forme suivante :
16où Rit est la rentabilité d’un actif risqué (ou d’un portefeuille) i entre (t – 1) et t, Rwt celle du portefeuille de marché mondial et Rft, le taux de rentabilité de l’actif sans risque.
17La relation (1) établit qu’à l’équilibre des marchés de capitaux, l’excès de rentabilité attendu sur un titre i quelconque est proportionnel à l’excès de rentabilité attendu sur le portefeuille du marché mondial.
18Cependant, les précédentes études empiriques ont montré que les rentabilités boursières sont très volatiles et que cette volatilité varie dans le temps. Ces propriétés ont rendu difficile l’estimation des primes de risque et seraient à l’origine du rejet empirique des modèles internationaux non conditionnels.
19Ainsi, en réponse aux différentes critiques des modèles non conditionnels d’évaluation des actifs financiers, de nouvelles présentations théoriques sont apparues. Une version internationale conditionnelle du modèle de Sharpe (1964) peut être formalisée ainsi :
21Avec
22qui mesure la sensibilité, variable suivant les dates, du titre (ou du portefeuille) i au portefeuille du marché mondial w. Notons que toutes les anticipations sont faites conditionnellement au vecteur informationnel Ωt-1 disponible à l’instant (t – 1).
23L’équation (2) peut être réécrite comme suit :
25Avec qui désigne le prix du risque.
26Cette dernière formulation du MEDAFI conditionnel est couramment utilisée dans les études empiriques (Bekaert et Harvey, 1995 ; De Santis et Gérard, 1997 ; Arouri, 2005). La relation suppose implicitement que les marchés financiers sont intégrés, i.e. le prix du risque de marché est le même pour tous les actifs financiers et pour tous les investisseurs. Ainsi, dans une optique d’appréciation de l’intégration financière, la relation (3) permet de passer de la logique d’identité des facteurs à une logique d’identité des prix du risque.
2.1 – Spécification économétrique
27La relation (3) est utilisée dans la littérature pour tester le MEDAFI. Cette relation est valide pour tous les actifs financiers y compris le portefeuille du marché mondial. Donc, pour une économie à N actifs risqués, le système d’équations suivant doit être satisfait en chaque point du temps :
29où Rt désigne le vecteur de taille (N × 1) contenant les rentabilités des actifs risqués, τ un vecteur unitaire de dimension (N × 1), Ht la matrice de taille (N × N) de variances-covariances conditionnelles des excès de rentabilité et hNt la Nème colonne de Ht contenant la covariance conditionnelle de chaque actif avec le portefeuille de marché.
30Ainsi, l’équation (4) implique l’estimation simultanée de la variance conditionnelle du marché mondial et de la covariance de chacun des autres actifs financiers avec ce marché. Étant donné le succès des spécifications GARCH dans la modélisation des séries boursières, nous allons vérifier la validation d’un processus GARCH (1,1) multivarié. En fait, la plupart des études empiriques suggèrent qu’une spécification GARCH (1,1) est suffisante pour rendre compte des propriétés des séries financières (De Santis et Gérard, 1997,1998 ; Nilsson, 2002 ; Hardouvelis et al., 2005). Nous présenterons dans la partie empirique quelques résultats justifiant ce choix.
31L’extension au cadre multivarié des modèles GARCH implique que les termes d’erreur ont une distribution conditionnelle gaussienne de moyenne nulle et de matrice de variances-covariances Ht. Engle et Kroner (1995) ont proposé la spécification suivante (modèle BEKK) :
33Où C est une matrice triangulaire inférieure de taille (N × N), A et B sont deux matrices de taille (N ×N).
34La spécification (5) est couramment employée dans les travaux empiriques. Elle garantit que la matrice des variances-covariances est définie positive. Toutefois, le nombre de paramètres à estimer dans Ht est très élevé. Il est de l’ordre de
36À ce stade, il faut noter que les travaux empiriques utilisant des processus GARCH multivariés limitent le nombre d’actifs étudiés et/ou imposent des restrictions sur le processus générant Ht. Ainsi, Bollerslev (1990) suppose que les corrélations sont constantes. Cette spécification est très restrictive. En effet, Longin et Solnik (1995,2001), Arouri (2005), Carrieri et al.(2005) ont montré que les corrélations entre les actifs financiers varient au cours du temps et, par suite, que le modèle à corrélation constante ne peut prendre en compte cette dynamique conditionnelle. De plus, De Santis et Gérard (1997) imposent la condition de diagonalité des matrices A et B. Cela implique que les variances dans Ht ne dépendent que du carré des résidus passés et d’un terme autorégressif, alors que les covariances ne dépendent que du produit croisé des résidus passés et d’un terme autorégressif. Nous concluons ainsi que la spécification donnée par la relation (5) permet aux corrélations de varier au cours du temps. Toutefois, elle peut également paraître restrictive dans le sens où elle ne rend pas compte de la dépendance des volatilités conditionnelles entre les marchés, mise en évidence notamment par Chan et al. (1992) sur données quotidiennes.
37En outre, l’incorporation d’un effet d’asymétrie est très importante dans le cadre d’une analyse de l’impact de l’intégration sur la dynamique des gains attendus de la diversification. Cette dynamique, autorise aux variances et covariances conditionnelles de réagir différemment selon les signes et la taille des chocs qui affectent les marchés boursiers. Formellement, nous proposons l’extension ci-dessous de la spécification BEKK pour capter les réponses asymétriques des variances et covariances conditionnelles aux chocs :
39avec :
40Harvey (1991), Bekaert et Harvey (1995) et De Santis et Gérard (1997) ont montré que le prix du risque varie dans le temps. De plus, selon Merton (1980), Adler et Dumas (1983), le prix du risque est l’agrégation des aversions au risque de tous les investisseurs. Or, ces derniers sont supposés adverses au risque : le prix du risque doit donc être positif en chaque point du temps. À l’instar de Harvey (1991), De Santis et Gérard (1997,1998), De Santis et al. (2003) et Gérard et al. [2003], nous modélisons le prix du risque comme une fonction exponentielle de certaines variables d’information liées au cycle économique et financier mondial :
42où κw représente les pondérations associées aux variables d’information globales.
43Enfin, notons que dans le but de vérifier si la condition théorique de positivité du prix du risque du marché mondial est respectée a posteriori par les données, nous estimerons et comparerons le prix du risque avec et sans la contrainte de positivité, i.e. prix du risque exponentiel versus prix du risque linéaire. Nous testerons également l’hypothèse selon laquelle le prix du risque est constant.
44Le système formé des équations (4), (6) et (7) constitue notre modèle de base. Sous l’hypothèse d’une distribution conditionnelle multivariée normale, la fonction de vraisemblance peut être écrite comme suit :
46où φ est le vecteur des paramètres inconnus et T est le nombre d’observations.
47Puisque l’hypothèse de normalité est souvent rejetée dans le cas des séries boursières, nous utilisons la méthode du quasi-maximum de vraisemblance (QMV) de Bollerslev et Wooldridge (1992). Sous certaines conditions de régularité, l’estimateur QMV est valide et asymptotiquement normal. D’abord, l’algorithme de simplex est utilisé pour initialiser le processus. Ensuite, l’estimation du vecteur φ est réalisée par l’algorithme BHHH développé par Berndt et al. (1974).
48Dans cette approche, l’utilisation de la méthode du QMV est particulièrement intéressante pour les modèles GARCH multivariés car elle est valide, asymptotiquement, pour tout processus GARCH strictement stationnaire (sous des conditions de régularité mineures), sans hypothèse de moments sur le processus observé. Par conséquent, la fonction de vraisemblance définissant l’estimateur du maximum de vraisemblance sous l’hypothèse de normalité et la fonction de pseudo-vraisemblance de l’estimateur QMV sont les mêmes. En fait, Les conditions de régularité sont toujours de trois types :
- des conditions de stationnarité forte du processus ;
- des conditions d’existence des dérivées et des moments apparaissant dans les diverses formules ;
- des conditions d’identifiabilité des paramètres θ, qui doit pouvoir être retrouvée, sans ambiguïté à partir des deux premiers moments conditionnels.
3 – Analyse et données
49Cette étude porte sur neuf marchés financiers qui représentent plus de 70 % de la capitalisation boursière mondiale, répartie de la manière suivante : cinq marchés développés (Japon, France, Allemagne, Royaume-Uni et les États Unis d’Amérique) et quatre marchés émergents (Mexique, Argentine, Hong-Kong et Singapour), en plus du marché mondial [2].
50Les observations utilisées sont des cours journaliers de fin de période de janvier 2002 à janvier 2014. Les cours boursiers, calculés avec réinvestissement des dividendes, sont issus de Morgan Stanley Capital International (MSCI) et DataStream. Les rentabilités sont toutes exprimées en dollars américains et calculées en excès du taux des euros-dollars.
51Les statistiques descriptives des rendements quotidiens des indices boursiers, ainsi que les tests de normalité, sont résumés dans les tableaux 1 et 2 ci-dessous. Les autocorrélations sont présentes dans les tableaux 3 et 4.
Statistiques descriptives des rendements des indices boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)*
Statistiques descriptives des rendements des indices boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)*
* USA : États-Unis, DEU : Allemagne, FRA : France, GBR : Royaume-Uni, JPN : Japon, HKG : Hong Kong, SGP : Singapour, ARG : Argentine, MEX : Mexique, MM : Marché mondial.Matrice des corrélations non-conditionnelles*
Matrice des corrélations non-conditionnelles*
* USA : États-Unis, DEU : Allemagne, FRA : France, GBR : Royaume-Uni, JPN : Japon, HKG : Hong Kong, SGP : Singapour, ARG : Argentine, MEX : Mexique, MM : Marché mondial.Autocorrélations simples des séries de rentabilité des différents marchés (janvier 2002 – janvier 2014)*
Autocorrélations simples des séries de rentabilité des différents marchés (janvier 2002 – janvier 2014)*
* USA : États-Unis, GBR : Royaume-Uni, FRA : France, DEU : Allemagne, JPN : Japon, ARG : Argentine, MEX : Mexique, HKG : Hong Kong, SGP : Singapour, MM : Marché mondial.Autocorrélation des carrés des séries de rentabilité boursière (janvier 2002 – janvier 2014)
Autocorrélation des carrés des séries de rentabilité boursière (janvier 2002 – janvier 2014)
USA : États-Unis, GBR : Royaume-Uni, FRA : France, DEU : Allemagne, JPN : Japon, ARG : Argentine, MEX : Mexique, HKG : Hong Kong, SGP : Singapour, MM : Marché mondial.* significatif au seuil de 10 %, ** significatif au seuil de 5 %, *** significatif au seuil de 1 %
52Le test de Jarque et Bera (JB, 1984), fondé sur la notion du Skewness (asymétrie) et du Kurtosis (aplatissement), permet de vérifier la normalité de la distribution statistique des rendements.
53Skewness (S) :
54Kurtosis, (K) :
55Avec est le moment centré d’ordre k.
57Donc, si alors, on rejette l’hypothèse (H0) de normalité des résidus au seuil (α).
58Cette hypothèse est validée par les résultats du test de pour tous les indices financiers. En effet, toutes les statistiques de sont très largement supérieures à χ2(2). D’ailleurs, toutes les Prob(JB) sont nulles et inférieures au seuil (α = 5 %).
59Le tableau 1 montre que le rendement moyen le plus faible est attribué au Royaume-Uni avec une moyenne journalière de 0,4 % alors que le plus élevé est enregistré pour le marché mondial avec un taux de 75,8 %, suivi du marché argentin avec un rendement de 15,2 %. En termes de risque, le marché mondial est le plus volatile, suivi du marché argentin puis japonais. Le risque le plus faible dans notre étude est attribué à Singapour avec un écart-type de 1,13, suivi par le marché mexicain.
60De plus, les valeurs de la statistique de Kurtosis indiquent que les séries d’indices boursiers présentent un caractère épais ou leptokurtique. En effet, la Kurtosis centrée est positive (K > 3) pour toutes les séries. L’excès de Kurtosis témoigne d’une forte probabilité des points extrêmes, donc d’une distribution à queues épaisses. Ceci suggère que chacune des équations des moyennes doit être testée pour la présence d’hétéroscédasticité conditionnelle. Les coefficients de Skewness généralement significativement négatifs, indiquent que la distribution des séries est étalée vers la gauche, ce qui illustre bien le fait qu’un choc négatif a plus d’impact qu’un choc positif. Cela indique aussi que ces marchés boursiers ont subi plus de chocs négatifs que de chocs positifs durant la période analysée.
61La matrice de corrélation non-conditionnelle (tableau 2) montre que les coefficients les plus faibles sont observés entre les marchés émergents et développés. Cette faible corrélation est synonyme de possibles gains de diversification.
62De plus, les valeurs prises par les corrélations sont en moyenne positives, ce qui indique que les marchés boursiers varient dans le même sens et partagent une tendance commune. Le tableau 2 montre aussi qu’il y a une forte corrélation entre les marchés financiers des pays développés de notre échantillon (en générale supérieure à 33 %), ce qui corrobore les travaux antérieurs suggérant que les marchés développés sont fortement intégrés. Par exemple, Bekaert et Harvey (1995) trouvent que le degré d’intégration du marché i vis-à-vis du marché international est une relation linéaire de la covariance conditionnelle entre ces derniers [3].
Représentation de l’évolution des rendements boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)
Représentation de l’évolution des rendements boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)
Représentation de l’évolution des rendements boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)
Représentation de l’évolution des rendements boursiers (janvier 2002 – janvier 2014)
63Par ailleurs, les autocorrélations simples des séries de rentabilité des différents marchés (présentées dans le tableau 3) montrent une absence d’autocorrélation sérielle. En effet, les probabilités du test de Ljung-Box d’ordre 30 sont toutes inférieures au seuil de significativité de 1 %. Il apparaît donc inutile d’introduire une correction AR dans l’équation de la moyenne pour les modélisations GARCH.
64Sur un autre plan, les carrés des séries de rentabilité boursière présentées dans le tableau 4 montrent que pour la plupart des séries étudiées, seules les autocorrélations d’ordre 1 sont significatives, ce qui pourrait aller en faveur d’une modélisation ARCH d’ordre 1.
65Concernant le choix des variables d’information nécessaires pour modéliser la variation conditionnelle du prix du risque mondial, nous nous basons sur les travaux de Harvey (1991), Ferson et Harvey (1993), De Santis et Gérard (1997), Bekaert et Harvey (1995), De Santis et al. (2003) et Gérard et al. (2003). Les variables retenues sont censées refléter les informations sur le cycle financier et économique international dont disposent les investisseurs à la date (t – 1). Le vecteur informationnel utilisé est noté Z ; il est inclus dans le vrai vecteur informationnel non observable Ω, .
66En outre, le vecteur Zt-1des variables d’information internationales contient un terme constant, le rendement en dividende (dividend price ratio) du portefeuille du marché mondial en excès du taux des eurodollars (RDM), la variation mensuelle d’une prime à terme américaine (DPTEU), une prime de défaut américaine (PDEU) et la variation mensuelle du rendement d’un certificat américain de trésorerie à 30 jours (DTIM). La prime de terme est mesurée par la différence entre un taux d’intérêt court (un certificat de trésorerie américain à 3 mois) et un taux long (un bon du Trésor américain à 10 ans). La prime de défaut est mesurée par l’écart de rendements entre une obligation notée Baa par l’agence Moody’s et une obligation notée Aaa. Toutes ces variables d’information sont obtenues de MSCI et de « International Financial Statistics » (IFS) ; elles sont utilisées avec un retard par rapport aux excès de rentabilité.
67Les statistiques descriptives de ces variables et les autocorrélations sont résumées dans le tableau 5.
Les statistiques descriptives des variables d’information et les tests d’autocorrélations (janvier 2002 – janvier 2014)
Les statistiques descriptives des variables d’information et les tests d’autocorrélations (janvier 2002 – janvier 2014)
*significatif au seuil de 1 % ; ** significatif au seuil de 5 % ; Q(30) : test de Ljung-Box d’ordre 30 ; J.B. test de normalité de Jarque-Bera.68Les corrélations (tableau 6) entre les variables globales d’information sont relativement faibles, ce qui suggère que le vecteur d’information Z ne contient pas d’informations redondantes.
Matrice de corrélation entre les variables informationnelles (janvier 2002 – janvier 2014)
Matrice de corrélation entre les variables informationnelles (janvier 2002 – janvier 2014)
4 – Estimation du modèle et mesure du gain de diversification
4.1 – Résultats et tests de robustesse
69Dans cette section, nous présentons d’abord les résultats de l’estimation du modèle décrit par les relations (4), (6) et (7) ainsi que quelques tests de spécification. Ensuite, nous testerons l’hypothèse d’intégration financière. Le tableau 7 présente les résultats de l’estimation des paramètres relatifs à la dynamique du prix du risque du marché mondial par la méthode « espace-état » (Space-State) et le filtre de Kalman pour les variables inobservables. Nous constatons que le prix moyen du risque s’élève à 2,35 dollars américains. Ce dernier est déterminé par le terme constant, le rendement en dividende du portefeuille du marché international, la variation mensuelle de la prime à terme, la prime de défaut et la variation mensuelle du rendement du certificat de dépôt américain.
Estimation du prix du risque par la méthode Space-State (SS)
Estimation du prix du risque par la méthode Space-State (SS)
* significatif au seuil de 1 %, ** significatif au seuil de 5 %.(.) L’écart type est reporté entre parenthèses.
70Dans la mesure où le vecteur des variables d’information Zt-1 contient un terme constant, l’hypothèse de constance du prix du risque peut être testée directement en vérifiant la nullité conjointe des coefficients des autres variables d’information. Le test de Wald, reporté dans la deuxième partie du tableau 7, rejette clairement cette hypothèse et montre que le prix du risque varie au cours du temps. La robustesse de ce test est vérifiée par une probabilité (p-value) inférieure à 5 %.
71Le panel A du tableau A1 en annexe présente la structure des seconds moments conditionnels du MEDAFI asymétrique par la méthode de maximum de vraisemblance. Les coefficients des vecteurs (A) et (B) sont significatifs pour tous les marchés. Les valeurs estimées des paramètres du vecteur (B) sont largement supérieures à celles des paramètres du vecteur (A), ce qui témoigne de changements graduels dans la dynamique de la volatilité conditionnelle. En outre, certains marchés manifestent une forte persistance. Ces résultats sont en accord avec les études antérieures utilisant des spécifications GARCH.
72Un des avantages de notre approche est de permettre aux seconds moments conditionnels de réagir différemment aux chocs selon leurs signes et leurs amplitudes. Ce phénomène a été largement étudié dans le cas univarié. Par exemple, Engle et NG (1993) et Glosten et al. (1993) ont mis en évidence qu’un choc négatif a plus d’impact sur la volatilité qu’un choc positif. Kroner et N Ng (1998) ont obtenu des résultats similaires dans le cas bivarié. Dans notre cas, les paramètres significatifs du vecteur (S) impliquent que la réaction de la variance conditionnelle est plus importante après un choc négatif qu’après un choc positif. C’est le cas pour l’Argentine, l’Amérique, l’Allemagne, la France et le Mexique. De plus, les paramètres significatifs du vecteur (S) sont tous positifs, ce qui implique que les covariances conditionnelles entre ces pays augmentent à la suite d’un choc commun négatif.
73De même, les paramètres significatifs du vecteur (Z) impliquent que la réaction de la variance conditionnelle est plus importante à la suite d’un choc de forte amplitude. C’est le cas pour le Singapour, la Mexique, le Japon, Hong Kong et les États-Unis. De plus, les paramètres significatifs du vecteur (Z) sont presque tous négatifs, ce qui montre que les covariances conditionnelles entre ces pays augmentent après un choc commun négatif ou positif de forte amplitude.
74Enfin, le Panel B présente quelques tests sur les résidus estimés du modèle. L’hypothèse de normalité est rejetée pour tous les marchés étudiés. Il y a cependant lieu de signaler que les coefficients d’asymétrie (Skewness) et d’aplatissement centré (Kurtosis) sont plus faibles que ceux des séries de rentabilité présentés dans le tableau 1.
4.2 – Évolution des bénéfices de la diversification internationale
75Cette section se propose d’étudier, dans le cadre moyenne-variance de Markowitz, l’évolution des bénéfices que les investisseurs des pays développés et émergents attendent de la diversification internationale des portefeuilles. Pour atteindre cet objectif, nous considérons deux portefeuilles, présentant instantanément le même risque. Le premier est diversifié internationalement et on le désigne par (I) tandis que le second, purement domestique, est désigné par (i). La version conditionnelle du MEDAFI (équation (3)) permet de calculer la rentabilité anticipée sur chacun de ces deux portefeuilles. La différence entre les deux rentabilités peut être interprétée comme le gain ex ante de la diversification internationale des portefeuilles. Mathématiquement, ce gain s’écrit comme suit : .
76Le portefeuille (I) est supposé efficient au sens de Markowitz. D’après le théorème de séparation [4] de Black (1972), on peut écrire la rentabilité du portefeuille (I) sous la forme d’une combinaison de la rentabilité de l’actif sans risque et de celle du portefeuille de marché : .
77Où θt-1 est un coefficient dépendant de l’aversion au risque d’un investisseur représentatif.
78Ainsi, les excès de rentabilité des deux portefeuilles s’écrivent :
80Les deux portefeuilles ont à chaque instant le même risque et le coefficient positif peut être déduit du système suivant :
82D’après les équations (9) et (10), les gains de la diversification internationale espérés par l’investisseur domestique, conformément à la version conditionnelle du MEDAFI, sont donnés par la relation suivante :
84Une interprétation intuitive est tirée de l’équation (11) en prenant le cas particulier θt-1, et par suite, le portefeuille domestique aura le même risque que le portefeuille mondial. Dans ce cas, les gains de la diversification s’écrivent comme suit :
86La relation (12) montre que les gains escomptés des stratégies de diversification internationale sont une fonction croissante du risque spécifique au pays considéré :
88Selon le MEDAFI, seul le risque systématique est rémunéré. En revanche, le risque spécifique pourrait être diversifié en augmentant le nombre d’actifs. On peut alternativement utiliser la corrélation conditionnelle entre le portefeuille domestique et le portefeuille du marché mondial :
90Ainsi l’équation (12) peut être réécrite de la manière suivante :
92Selon cette relation, les gains de la diversification internationale sont une fonction décroissante du coefficient de corrélation conditionnelle entre le portefeuille domestique et le portefeuille du marché mondial. On note également que la stratégie de diversification internationale devient inefficace et les gains seront réduits à zéro dans le cas où le coefficient , i.e. le portefeuille domestique est parfaitement corrélé positivement avec le portefeuille international. Pour étudier les autres cas de ce coefficient de corrélation, nous estimons la matrice conditionnelle des corrélations, donnée par le tableau 8.
Matrice des corrélations conditionnelles entre les marchés*
Matrice des corrélations conditionnelles entre les marchés*
* DEU : Allemagne, GBR : Royaume-Uni, FRA : France, JPN : Japon, ARG : Argentine, HKG : Hong Kong, MEX : Mexique, SGP : Singapour, USA : États-Unis, MM : Marché mondial.93Cette matrice de corrélation conditionnelle entre les indices montre que les gains de diversification les plus importants sont enregistrés sur les pays émergents et plus particulièrement sur les marchés mexicain et hongkongais.
94Afin d’étudier l’évolution des gains attendus de la diversification internationale des portefeuilles, le modèle est ré-estimé en exprimant à chaque fois les rentabilités des marchés étudiés dans la monnaie du pays pour lequel on calcule ces gains.
95Les résultats de cet exercice sont reportés dans le tableau 9 ci-dessous. Les bénéfices de la diversification sont calculés sur la période entière 01:2002-01:2014, ainsi que sur les sous-périodes 01:2002-08:2007 et 09:2007-01:2014. Le choix des sous-périodes est justifié par la crise économique mondiale, à la suite des soubresauts des marchés monétaires américains en août 2007 qui préfigurent de la crise à venir et la faillite de Lehman Brothers en septembre 2008.
Gains anticipés de la diversification internationale des marchés du portefeuille
Gains anticipés de la diversification internationale des marchés du portefeuille
* significatif au seuil de 10 % ;** significatif au seuil de 5 % ;*** significatif au seuil de 1 %.(.) L’écart type est reporté entre parenthèses.
96Pour tous les marchés étudiés, les gains anticipés de la diversification sont statistiquement et économiquement significatifs. Cependant, ils varient considérablement dans le temps et d’un marché à un autre. Ils sont nettement plus importants pour les marchés émergents que pour les marchés développés. Sur la période entière, le marché du Royaume-Uni est le plus corrélé avec le marché mondial (corrélation moyenne de 61,84 % ; tableau 8) et présente les bénéfices moyens annuels les plus faibles (2,99 % ; tableau 9). Il est suivi par le marché des États-Unis, qui présente une corrélation conditionnelle moyenne avec le marché mondial de 48,5 % et des bénéfices moyens annuels de 1,11 %. En revanche, le Mexique est le marché le moins corrélé avec le marché mondial (valeur moyenne de 2,01 %) et présente les gains annuels les plus élevés (11,04 %). Le marché de Hong-Kong présente aussi des gains importants s’élevant à 10,02 %. Pour la France, l’Allemagne et le Japon, les gains annuels attendus de la diversification internationale des portefeuilles sont respectivement de 3,33 %, 4,02 % et 5,47 %.
97En comparant la sous-période 01:2002-08:2007 à la sous-période 09:2007-01:2014, nous constatons que les gains espérés de la diversification internationale se sont réduits significativement et ce, pour pratiquement tous les marchés. Cette baisse s’explique par l’augmentation de la corrélation conditionnelle des marchés avec le portefeuille du marché mondial à partir de la fin de l’année 2007 qui a débouché sur la crise des subprime (l’annexe présente les coefficients de corrélations pour les deux sous-périodes).
98Cet accroissement de la corrélation peut s’expliquer de plusieurs manières. La première explication est une réaction commune et simultanée des marchés boursiers à la crise de subprime, crise ayant envoyé un signal négatif à l’ensemble des marchés et se traduisant par une hausse de la corrélation entre indices et une évolution dans une tendance commune. La méfiance et l’aversion au risque des investisseurs internationaux face à l’incertitude, aggravée par l’asymétrie d’information sur la composition de certains produits financiers, ont contribué à augmenter la volatilité sur les marchés. Plus généralement, l’attitude à l’égard du risque s’est traduite par une forme de mimétisme dans le comportement des investisseurs en termes d’allocation de richesse et, par suite, a généré un accroissement de la corrélation et de la volatilité de certains indices. La deuxième explication trouve son origine dans la panique provoquée par la faillite de Lehman Brothers. Très rapidement, la faillite a entraîné une baisse du volume de transactions et, par suite, a occasionné un choc commun de liquidité entraînant la hausse de la corrélation entre les indices de marchés boursiers. Plus généralement, l’incertitude, l’asymétrie d’information et la baisse de performance de certains actifs sur les marchés ont provoqué un repli à l’égard de certains marchés et actifs et entraîné une baisse de la diversification internationale des portefeuilles. Dans un contexte d’aversion au risque accru, la réallocation des portefeuilles vers les placements à revenu fixe comme l’obligataire a pu également contribué, après 2008, à la baisse des gains issus de la diversification internationale des portefeuilles.
99Pour démontrer l’importance de l’impact asymétrique des chocs sur les gains anticipés de la diversification, nous présentons, dans le tableau 10, la valeur des gains pour les trois périodes considérées en l’absence d’asymétrie. Les coefficients présentent tous une bonne significativité statistique. Surtout ils sont nettement plus élevés que ceux présentés dans le tableau 9, corroborant ainsi l’hypothèse de base selon laquelle l’impact asymétrique des chocs est négatif en termes de gains liés à la diversification internationale des portefeuilles.
Gains anticipés de la diversification internationale des marchés du portefeuille en absence d’asymétrie informationnelle
Gains anticipés de la diversification internationale des marchés du portefeuille en absence d’asymétrie informationnelle
* significatif au seuil de 10 %, ** significatif au seuil de 5 %, *** significatif au seuil de 1 %.(.) L’écart type est reporté entre parenthèses.
5 – Conclusion
100Dans le cadre de cet article, nous avons essayé de tester l’effet de l’intégration des principaux marchés boursiers des pays développés et émergents sur les gains attendus de la diversification.
101Pour ce faire, nous avons estimé une version internationale du MEDAF conditionnel, en utilisant une extension asymétrique du modèle GARCH multivarié de De Santis et Gérard (1997, 1998). Cette approche permet, notamment, aux primes de risque, à la volatilité et aux corrélations de varier dans le temps et de réagir différemment aux chocs affectant les indices boursiers. En outre, nous avons dérivé une mesure conditionnelle des gains attendus de la diversification internationale et étudié l’impact de l’intégration financière sur ces gains. Nous montrons empiriquement que les gains sont une fonction croissante du prix du risque du marché mondial et de la quantité de risque spécifique au marché boursier du pays considéré. En revanche, ces gains sont une fonction décroissante des corrélations conditionnelles avec le portefeuille du marché mondial.
102En outre, nos résultats montrent que les gains de diversification étaient plus importants avant la crise des subprime. La baisse des gains observée pendant la deuxième sous-période d’analyse (09:2007-01:2014), marquée par le début de crise financière, reflète sans doute la méfiance des investisseurs à l’égard de la diversification internationale. L’accroissement des risques sur les marchés durant la crise justifie la préférence pour les actifs domestiques.
103Une extension intéressante de notre méthodologie consisterait à intégrer d’autres classes d’actifs (e.g. œuvres d’art, matières premières) de façon à mesurer la contribution de ces actifs à l’amélioration de la performance des portefeuilles internationaux.
Estimation par la méthode du quasi-maximum de vraisemblance du MEDAFI asymétrique
ProcessusGARCHmultivarié
ProcessusGARCHmultivarié
Diagnostic des résidus
Diagnostic des résidus
Estimation par la méthode du quasi-maximum de vraisemblance du MEDAFI asymétrique
* significatif au seuil de 10 % ; ** significatif au seuil de 5 % ; *** significatif au seuil de 1 % ; (,) L’écart type est reporté entre parenthèses.Corrélations conditionnelles avec le marché mondial pour la période entière et les deux sous-périodes
Corrélations conditionnelles avec le marché mondial pour la période entière et les deux sous-périodes
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
Corrélations conditionnelles dynamiques des différents marchés vis-à-vis du marché mondial
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Mots-clés éditeurs : intégration financière, marchés émergents, diversification des portefeuilles, GARCH multivarié asymétrique, MEDAFI
Mise en ligne 07/07/2016
https://doi.org/10.3917/reof.146.0089Notes
-
[1]
Les American Depositary Receipts (ADR) sont des certificats émis par des banques américaines en échange du dépôt d’actions d’entreprises étrangères. La banque gère les flux de dividendes et le registre des détenteurs de certificats.
-
[2]
L’indice boursier du marché mondial mesure la performance des marchés boursiers du monde entier, cet indice est calculé par MSCI (Morgan Stanley Capital International) d’où sa nomination (MSCI world index). Le MSCI mondial est composé par les titres de 23 pays les plus développés, ainsi que les valeurs cotées dans la zone d’Amérique latine, d’Europe de l’Est, d’Afrique (Afrique du Sud, Égypte, Maroc), du Moyen-Orient (la Turquie), et la région asiatique.
-
[3]
Marché i (pays développé) vis-à-vis du marché international (mondial)
-
[4]
Selon le théorème de séparation, tous les investisseurs, quelles que soient leurs richesses initiales et leurs préférences pour le risque, construisent leurs portefeuilles optimaux par combinaison entre le titre sans risque et le portefeuille de marché.