Couverture de ENTRE1_192

Article de revue

Infléchir la trajectoire de défaillance de la PME : actions du dirigeant et de l’équipe dédiée au redressement

Pages 67 à 92

Notes

  • [1]
    Recensement effectué sur Google Scholar en février 2017 sur les mots clés « croissance – PME » ; « défaillance – PME » ; « redressement – PME ».
  • [2]
    Savoir par exemple que le ratio cash-flow / endettement total est un très bon indicateur d’un risque de défaillance frôle ainsi la tautologie pour l’entrepreneur ou tout au moins lui est peu utile puisqu’il comprend assez vite que si sa capacité à rembourser ses créanciers baisse, la défaillance est proche.
  • [3]
    Voir la proposition de directive de la Commission européenne en 2017 visant à encourager d’une part le développement d’outils d’alerte précoce détectant les difficultés des entreprises et d’autre part des procédures de prévention permettant la restructuration et évitant l’insolvabilité.
  • [4]
    La fonction score résume à l’aide de ratios comptables et financiers le risque de défaillance d’une entreprise. Elle est produite notamment par la Banque de France, les organismes bancaires et financiers.
  • [5]
    Les procédures collectives recouvrent les procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire.
  • [6]
    Pour près des deux tiers des entreprises, cette étape signifie la liquidation immédiate de l’entreprise, selon l’étude de France Stratégie (Avril 2018).
  • [7]
    Par exemple, l’apparition de dépenses de R&D en immobilisation peut amener à conclure que l’entreprise en défaillance a décidé de s’orienter vers des projets innovants alors qu’il ne s’agit que d’une modification de l’enregistrement comptable des opérations de R&D.

Introduction

1La dernière décennie a malheureusement constitué une fabuleuse opportunité de terrain d’investigation pour les recherches portant sur la défaillance. Cependant, elle aurait dû ouvrir également de nouvelles voies d’exploration pour étudier le redressement des PME. En effet, pourquoi dans un contexte difficile qui a amené nombre de PME dans une trajectoire de défaillance, certaines d’entre elles arrivent-elles à infléchir cette trajectoire et d’autres pas ? Malgré ce constat, la recherche académique continue à s’intéresser prioritairement au développement de la PME ou à la défaillance, et beaucoup moins à son redressement. Lorsqu’une recherche est consacrée à son redressement, deux recherches portent sur la défaillance de la PME et six s’intéressent à son développement [1].

2L’échec entrepreneurial est pourtant un phénomène commun et intrinsèquement relié au phénomène entrepreneurial lui-même (Jenkins et Mckelvie, 2016). Les chiffres de défaillance d’entreprises attestent de son étendue. Sur la période 1991-2017, on recense en moyenne 40 à 50 000 entreprises défaillantes annuellement selon la Banque de France (2018), chiffre accentué par la période de crise (plus de 60 000 défaillances).

3La littérature en entrepreneuriat a essentiellement étudié les causes du phénomène – qu’elles soient internes ou liées au contexte – et ses conséquences (Guilhot, 2000 ; Khelil, 2016). Les littératures en finance ou en économie s’intéressent essentiellement à la prédiction de défaillance ou aux situations d’entreprises sous-performantes (Robbins et Pierce, 1992 ; Pandit, 2000 ; Chowdhury 2002). Néanmoins, l’échec entrepreneurial peut être étudié dans une visée praxéologique qui cherche à comprendre comment les entrepreneurs agissent face à l’échec ou plus précisément, lorsque leur entreprise entre dans une trajectoire de défaillance. Dans ce cadre, il s’agit moins de rendre compte des causes ou des prédictions [2] du phénomène que d’étudier les actions des acteurs en situation de défaillance (Koenig, 1985). Ainsi, une approche curative ou préventive peut être complétée par une approche proposant une compréhension des actions permettant de sortir de situations qui sont le lot potentiel de toute organisation. Elle peut ainsi in fine viser le développement de mesures d’accompagnement du dirigeant dans ces situations.

4Dans cet article, nous focalisons notre étude sur le phénomène de redressement d’entreprise en abordant la question suivante : « quelles sont les actions entreprises par le dirigeant et son équipe lorsque la PME entre dans une trajectoire de défaillance ? ». Étant donné le peu de recherches sur le redressement (Collett, Pandit et Saarikkoc, 2013), ce travail est avant tout exploratoire. Notre revue de littérature analyse les différents domaines qui se sont penchés sur la défaillance en montrant le point de vue qu’ils adoptent mais aussi leur point aveugle. À la suite de cette revue de littérature, nous proposons d’étudier le redressement de façon longitudinale en développant le concept de trajectoire de défaillance et de bifurcations afin d’explorer empiriquement le comportement des dirigeants en situation. L’étude qualitative menée s’appuie sur une analyse comparée d’un échantillon de 13 PME, étudiées essentiellement in vivo. L’analyse comparative permet d’identifier les séquences d’actions apparaissant dans la trajectoire de défaillance, les bifurcations créées par les actions du dirigeant et de son équipe, et leurs effets.

5Notre analyse aboutit à plusieurs résultats. Nous proposons d’abord une typologie de quatre types d’actions entreprises par le dirigeant qui tente de redresser sa PME. Notre travail ne permet pas de relier un type d’action ou une combinaison d’actions avec un type d’effet (redressement ou non). Nous montrons également que ce dirigeant ne travaille pas seul. Il s’entoure d’une équipe dédiée composée de membres de l’entreprise et/ou de conseils extérieurs. Tout au long de la trajectoire de défaillance de l’entreprise, la composition de ce noyau stratégique évolue.

6Nous débutons notre article par une revue de littérature sur la défaillance, thème qui est beaucoup plus traité que la thématique du redressement. Nous développons ensuite les limites des designs de recherche traditionnels pour justifier notre approche de cas comparés. Celle-ci est développée dans une section dédiée à la méthodologie de la recherche. Nous présentons de façon la plus transparente possible dans l’espace d’un article l’analyse comparée qui a été menée. Nous concluons l’article en développant les apports de notre recherche.

1 – Revue de littérature

1.1 – Une lecture de la défaillance par champs disciplinaires

7La littérature académique spécifiquement dédiée au redressement de la PME reste pauvre (Robbins et Pearce, 1992 ; Chowdhury et Lang, 1996 ; Thrams, 2013 ; Schweizer et Nienhaus, 2017). De ce fait, le redressement est appréhendé d’abord et avant tout par son phénomène antagoniste : la défaillance. Les difficultés de la PME sont principalement étudiées à travers ce concept qui peut se définir – avec cependant le risque de confusion entre la notion de défaut et celle de défaillance – comme l’état où cette PME n’est plus en mesure de faire face à ses obligations vis-à-vis de ses débiteurs (e.g. Charreaux, 1997 ; Levratto, 2014).

8Les problèmes de défaillance d’entreprise constituent un champ d’investigation depuis la crise des années 1930 et ont suscité l’intérêt de nombreux champs disciplinaires avec des approches différentes (Guilhot, 2000 ; Levratto, 2014 ; Malécot, 1991 ; Walsh et Cunningham, 2016). Cette littérature est éclectique et poursuit des objectifs différents selon la discipline par laquelle la défaillance est abordée (Walsh et Cunningham, 2016). Alors que certains travaux poursuivent un objectif de prédiction de la défaillance, d’autres s’inscrivent dans une volonté de prévention (Crutzen et Van Caillie, 2008). L’aspect curatif de la défaillance reste de son côté principalement abordé par les études juridiques. Cependant, sous l’impulsion de la réglementation européenne qui cherche à développer un cadre législatif plus favorable à la prévention de la défaillance [3], les travaux académiques s’orientent de plus en plus vers la prévention.

9La littérature peut s’analyser selon une grille de lecture à trois niveaux selon que l’on privilégie l’environnement, l’entreprise ou l’entrepreneur. Cette distinction nous amène à repérer deux blocs de disciplines académiques. Certaines d’entre elles comme le droit, l’économie ou la finance cherchent à défendre avant tout les intérêts des parties prenantes externes (institutions et organisations publiques, créanciers). En s’appuyant sur une lecture des lois et en réalisant le plus souvent une comparaison de la mise en œuvre du droit (Pochet, 2001 ; Vallens et Chaput, 2011), les travaux juridiques cherchent par exemple à préserver les intérêts des acteurs de l’environnement. Il s’agit notamment de limiter les coûts de la défaillance pour la collectivité. Les approches économiques de la défaillance l’analysent sous l’angle du marché (Kondratieff et Stolper, 1935 ; Marco, 1984) ou des forces concurrentielles (Blazy, 2000 ; Myers, 1977). Elles insistent sur des données de contexte et les cycles de l’activité économique. En souhaitant maintenir un environnement macroéconomique favorable via les interventions des acteurs institutionnels (État, Banque centrale), ces approches cherchent là encore à préserver les intérêts économiques de la société. Il s’agit d’éviter les phénomènes de contagion et les effets systémiques. Les recherches à dominante financière permettent de leur côté d’identifier le risque de défaut de l’entreprise sur un horizon court terme (Altman, 1968 ; Argenti, 1976 ; Beaver, 1966 ; Lukason et Laitinen, 2019). À l’origine de la fonction score [4], ces travaux à visée prédictive permettent de délivrer une information aux parties prenantes de l’entreprise en donnant aux créanciers de l’entreprise la possibilité d’identifier le niveau de risque auquel ils sont exposés.

10Le second bloc de travaux regroupe les approches stratégiques, entrepreneuriales et organisationnelles. Ces disciplines se focalisent sur l’entreprise et/ou l’entrepreneur. En mettant en évidence l’impact de la turbulence de l’environnement sur la défaillance de l’entreprise, les approches stratégiques accordent une place importante au contexte concurrentiel et plus spécifiquement à l’inadéquation des choix de l’entreprise avec son environnement (Marchesnay, 1985 ; Paturel, 1987). Ces approches privilégient la poursuite de l’activité de l’entreprise et sa pérennité. En s’intéressant à l’échec entrepreneurial (Shepherd, 2013 ; Dias et Teixeira, 2017), les études en entrepreneuriat privilégient l’entrepreneur en tant qu’individu (Michoud et Paturel, 1995) et adoptent des approches sociologiques, psychosociologiques (Lechat et Torrès, 2016) ou psychologiques. De leur côté, les approches organisationnelles et managériales s’attachent à analyser la situation de l’entreprise en déclin et accordent un rôle central à son dirigeant et à ses actions. Bien que cette littérature ait plutôt investi la notion de crise et de déclin et s’intéresse à la grande entreprise (Anderson, 1986 cité par Hernandez, 2010 ; D’Aveni, 1989 ; Miller et Friesen, 1980 ; Sheppard et Chowdhury, 2005), elle présente l’intérêt d’introduire le dirigeant et le rôle de l’équipe dirigeante comme niveau d’analyse pertinent qui oriente les choix stratégiques de l’organisation.

11Cependant, quelle que soit la discipline, l’une des principales limites méthodologiques évoquée concernant l’étude du phénomène de la défaillance porte sur le caractère rétrospectif des analyses menées et le peu d’études réalisées en temps réel, que ce soit par des études de cas, sur la base d’analyse de ratios ou de décisions de tribunaux. Par conséquent, comme le notent Walsh et Cunningham (2016, p. 247), « As the event is explored in retrospect it is more difficult to ensure that details of the failure are accurate and true ». En effet, les interprétations du dirigeant et le contexte de l’entreprise évoluent dans le temps. Les échecs ainsi que leurs causes s’interprètent de multiples façons (Ucbasaran, Shepherd, Lockett et Lyon, 2013 ; Walsh et Cunningham, 2016). L’étude d’un phénomène en temps réel permettrait de comprendre les dynamiques présentes à l’intérieur de contextes particuliers (Eisenhardt, 1989), en prenant en compte les acteurs et au premier chef, le dirigeant (Khelil, 2016).

12Par ailleurs, les travaux sur la défaillance mettent en évidence que certaines disciplines permettent d’envisager le redressement de l’entreprise dans une visée praxéologique. La discipline juridique est un cas à part puisqu’elle pose le cadre légal de la défaillance et comporte un pouvoir institutionnel que ne possèdent pas les autres disciplines (Burniaux, 1995). D’autres disciplines prennent davantage en compte les intérêts de l’entreprise et de son dirigeant, « agent décisif du changement » (Tichy et Ulrich, 1986), notamment dans la PME. Pour s’intéresser au redressement de la PME, il apparaît donc nécessaire de s’intéresser au comportement du dirigeant car « il est difficile voire impossible d’agir significativement sur l’environnement politique, social et économique de l’entreprise et que par définition, en PME, le chef d’entreprise est le principal ou le seul décideur » (Michoud et Paturel, 1995, p. 767). En définitive, si la défaillance de l’entreprise concerne de multiples disciplines et présente un caractère subi, le thème du redressement nécessite une intention délibérée et requiert de s’intéresser avant tout aux acteurs de l’entreprise et à leurs actions. Comme le notent Sheppard et Chowdhury (2005, p. 40), « because failure deals with strategy, we can make choices to accelerate it or avoid falling into its clutches ».

1.2 – Trajectoire de défaillance, redressement et actions de redressement

13Les travaux sur la défaillance ont progressé dans plusieurs directions ces dernières années. D’une part, l’amélioration des tailles d’échantillons, de la qualité des données et l’évolution vers des modèles utilisant l’intelligence artificielle (réseaux de neurones ou d’algorithmes génétiques) a permis de sophistiquer les analyses (Refait-Alexandre, 2004). D’autre part, les recherches ont progressé vers une lecture intégrative de la défaillance (Ferrier, 2002 ; Crutzen et Van Caillie, 2007, 2010) qui prend en compte d’autres intérêts que ceux des seuls acteurs de l’environnement et qui considère que la défaillance provient d’une conjonction de facteurs environnementaux et d’erreurs de management (Argenti, 1976 ; Khelil, 2016). Enfin, au-delà de ces améliorations théoriques et méthodologiques, les travaux sur la défaillance montrent un intérêt de plus en plus marqué pour la PME (Marco, 1989) et ont évolué pour analyser le phénomène de manière plus dynamique en mobilisant le concept de trajectoire (Lukason et Laitinen, 2019). En effet, la défaillance peut être considérée sous l’angle d’un processus et non comme le passage subit d’un état « sain » à un état défaillant, ce qui implique de saisir le phénomène « dynamically – in terms of movement, activity, events, change and temporal evolution » (Langley, 2007, p. 271).

14Sous cet angle, Crutzen et Van Caillie (2007) identifient quatre étapes communes dans le processus de défaillance de toute entreprise : l’origine de la défaillance, l’apparition et la détérioration des symptômes de défaillance, le passage au rouge des clignotants et la faillite potentielle de l’entreprise. Ils donnent ainsi une définition processuelle de la défaillance tenant compte de l’organisation et de son environnement (Crutzen et Van Caillie, 2010, p. 6) : « Une entreprise entre dans un processus de défaillance à partir du moment où, suite à un problème d’alignement à son environnement, elle ne parvient pas/plus à se créer ou à maintenir une position stratégique viable sur son marché pour différentes raisons (manque de compétences, bouleversements technologiques, etc.). Si aucune action n’est entreprise, l’entreprise s’enfonce alors dans le processus (spirale) de défaillance : sa structure et son organisation interne se détériorent de plus en plus. Cette détérioration croissante se traduit, après un laps de temps variable par la détérioration de ses indicateurs financiers et se termine, dans le pire des cas, par la faillite juridique de l’entreprise ». Levratto (2014, p. 135) fait récemment le même constat : « De cette présentation des travaux sur la nature de la défaillance et la manière de l’expliquer, ressort l’idée que la défaillance est un processus multiforme dont les déterminants, nombreux, sont à chercher au sein de l’entreprise même mais aussi dans ses interactions avec son environnement. »

15Théoriquement, une approche processuelle permet de considérer que le redressement est une question d’inflexions positives ou négatives, suite à des actions sur une trajectoire de dégradation progressive. Cette trajectoire s’assimile à une dépendance de sentier (e.g., Arthur, 1994 ; David, 1985 ; Sydow, Schreyögg et Koch, 2009) dans laquelle le poids du passé (choix des dirigeants et évolutions de l’environnement notamment) produit des phénomènes de verrouillage (« lock-in ») dans l’orientation future de la PME (inflexions négatives). D’où l’idée avancée par Van Caillie et Crutzen (2010) de « s’enfoncer dans une spirale de défaillance ». Néanmoins, les bifurcations dans une trajectoire sont toujours possibles (Garud et Karnoe, 2001) sauf à adopter une vision complètement déterministe de la défaillance. Ces bifurcations correspondent à des inflexions positives qui permettent à l’entreprise de sortir de la trajectoire de défaillance pour rejoindre la trajectoire de redressement. Elles sont le résultat d’actions ciblées dans cette trajectoire de défaillance. En définitive, nous pouvons définir le redressement comme le résultat positif des actions entreprises par une organisation prise dans une trajectoire de défaillance, cette dernière aboutissant potentiellement à une procédure collective [5]. Pour le dire autrement, nous considérons le redressement comme un état durable dans lequel la structure financière s’est rétablie après des difficultés ayant mis en péril l’entreprise.

16En nous inspirant des deux logiques dominantes identifiées par Dubouloy et Fabre (2002) dans le cadre des restructurations de grandes entreprises, les actions d’un dirigeant pour infléchir positivement la trajectoire de défaillance de sa PME peuvent relever de deux types d’actions. Elles peuvent s’assimiler à des actions de restructuration quand il s’agit d’éliminer des foyers de pertes ou restaurer la profitabilité. Elles peuvent concerner des actions similaires à la « rejuvenation » (Stopford et Baden-Fuller, 1990 ; Thiétart, 1986) lorsque l’organisation se transforme plus ou moins radicalement pour retrouver une croissance profitable. D’un côté, une logique plutôt financière met l’accent avant tout sur la baisse des coûts et charges, notamment de la masse salariale. De l’autre, une approche plutôt stratégique vise avant tout à reconfigurer les processus internes de l’organisation et la structure pour assurer une meilleure adaptation aux marchés. Les quelques recherches qui se sont intéressées au contenu des actions menées pour redresser la PME évoquent ces deux logiques (Robbins et Pearce, 1992). La première (dite de « retrenchment ») vise en effet un retour à la performance et à la rentabilité de l’entreprise autour d’actions permettant un abaissement du seuil de rentabilité ou une optimisation des processus internes de l’entreprise. Il s’agit d’actions rapides, à court terme, visant à sauver l’entreprise en abaissant ses coûts. La seconde logique (dite de « recovery ») vise une évolution du positionnement stratégique de l’entreprise. Il s’agit d’assurer un nouveau développement à une entreprise avec des actions ayant des effets à plus long terme comme le développement de nouveaux produits ou l’exploitation de nouveaux segments de clients. Ces deux types d’actions couvrent potentiellement un large spectre d’actions concrètes des PME pour se redresser et créer des bifurcations dans la trajectoire de défaillance.

17À l’issue de cette revue de littérature, les travaux de recherche sur le redressement ouvrent des pistes à explorer qui ont orienté notre recherche empirique. D’abord, les actions menées par le dirigeant sont peu étudiées alors qu’on peut penser qu’elles influencent fortement le redressement de la PME prise dans une trajectoire de défaillance. Ensuite, bien que le dirigeant de PME porte la stratégie de son entreprise dans une configuration entrepreneuriale (Mintzberg, 2004), il est peu vraisemblable qu’il agisse seul. Empiriquement, il est donc nécessaire de se pencher sur le « noyau stratégique », défini comme « le groupe (composé de 1 à n individus) qui a, de par la propriété et/ou le mandat, le pouvoir d’émettre des stratégies favorables aux buts de l’entreprise. Il peut s’enrichir en s’agrégeant des individus puisés dans l’organisation (cadres…) ou à l’extérieur (expert, conseils, alliés) » (Martinet, 1984, p. 40). Par ailleurs, à notre connaissance, aucune étude portant sur le redressement d’entreprise inscrite dans une trajectoire de défaillance n’est réalisée en temps réel. Le phénomène de la défaillance est reconstitué a posteriori dans les travaux de recherche ou analysé pour produire des prédictions, en utilisant les variables comptables ou financières ex post qui permettent de les associer aux entreprises défaillantes comparativement aux entreprises non défaillantes (Refait-Alexandre, 2004). Nous n’avons que peu de connaissances finalement de ce que font les dirigeants de PME lorsque leurs entreprises empruntent ces trajectoires. Observer un phénomène au moment où il se produit confère davantage de richesse et de finesse aux données collectées et permet de relier contexte et actions (Einsenhardt, 1989 ; Yin, 2014). Enfin, le concept de trajectoire de défaillance incite à penser le redressement en termes dynamiques. Les actions entreprises peuvent déboucher sur un redressement et une sortie de la trajectoire ou à l’inverse sur une disparition de l’entreprise, en fonction des effets de ces actions. L’étude des bifurcations (Crutzen et Van Caillie, 2007 ; Sheppard et Chowdhury, 2005) créées par les actions et leurs effets est importante. La prise en compte de la dimension temporelle dans les processus et les actions doit permettre de comprendre l’évolution et la transformation des variables étudiées, c’est-à-dire comment et pourquoi les choses changent au cours du temps (Van de Ven, 1992). Ces pistes de recherche nous ont amenés à adopter un design de recherche et une méthodologie que nous développons dans la section suivante.

2 – Méthodologie

18Notre étude qualitative et exploratoire s’inspire de la démarche de la Grounded Theory (Glaser et Strauss, 1967) en partant d’un questionnement initial large (« que font les dirigeants de PME pour redresser leur entreprise ? ») qui s’est focalisé progressivement sur les actions du dirigeant et de son équipe. Elle s’appuie sur l’étude comparée de cas multiples, réalisée sur un échantillon de 13 PME. La méthodologie de l’étude de cas permet notamment de comprendre les dynamiques organisationnelles sans les déconnecter de leur contexte particulier (Eisenhardt, 1989, p. 534). Cette approche méthodologique permet de rejeter le dualisme traditionnel dans les travaux sur la défaillance, entre approche déterministe et volontariste (Khelil, 2016). La première donne la prééminence à l’environnement quand la seconde voit dans la défaillance le résultat des mauvais choix des acteurs de l’entreprise.

19L’un des auteurs, de par son activité dans le domaine de l’ingénierie financière, a eu l’opportunité d’observer en temps réel les trajectoires de défaillance de plusieurs entreprises au côté de l’acteur susceptible de l’infléchir le plus : le dirigeant. La collecte des données a été réalisée sur une période de 3 ans. L’opérationnalisation de la trajectoire de défaillance en différentes séquences (cf. infra) est un point crucial du design de notre recherche. Ces séquences permettent d’étudier les similitudes et les différences à plusieurs niveaux : les actions mises en œuvre par le dirigeant pour tenter d’infléchir la trajectoire ; la façon dont le dirigeant travaille et l’équipe qui l’entoure ; l’influence de la séquence dans laquelle se trouve l’entreprise à la fois sur les actions entreprises et les résultats de ces actions.

2.1 – Collectes de données

20La collecte de nos données a débuté après 2008, lorsque plusieurs dirigeants de PME ont sollicité l’un des auteurs au lendemain de la crise économique et financière. Ils souhaitaient être accompagnés dans « la recherche de financement en lien avec le projet de développement de leur entreprise ». Or, après un examen approfondi de leur situation financière, le niveau de fragilité de leur entreprise apparaissait élevé. Si le contexte post-crise et la raréfaction des financements aux PME justifiaient les difficultés rencontrées par toutes les PME dans leur phase de développement, il mettait également en péril les entreprises fragilisées. Il fallait donc trouver des solutions de redressement qui passaient notamment par la recherche de financements complémentaires. Après avoir accompagné plusieurs dirigeants, nous nous sommes aperçus que leur mode de gestion de la trajectoire de défaillance variait et pouvait avoir une influence sur le redressement de leur entreprise. Ayant pris conscience de ce phénomène, nous avons alors cherché à l’approfondir dans une démarche de comparaison systématique.

21Afin de nous assurer de la fiabilité de nos données, nous les avons collectées selon deux positionnements du chercheur. Dans un premier temps, nous sommes intervenus en acteur du redressement d’entreprises inscrites dans une trajectoire de défaillance. Dans un second temps, nous avons modifié notre mode de collecte en privilégiant une posture d’observateur participant qui nous permettait de tester nos idées et d’observer les équipes dirigeantes en action. Nous avons donc alterné les cas pour lesquels nous étions « Acteur » (AC) (9 cas) et ceux pour lesquels nous étions « Observateur Participant » (OP) (3 cas) (tableau 1). Dans un cas, nous avons démarré notre collecte dans une position d’observation participante, puis nous sommes devenus acteur (cas #8).

Tableau 1

Synthèse des données collectées

Tableau 1
# Cas Position du chercheur Durée de collecte (en mois) Données primaires Données secondaires financières Données secondaires non financières 1 AC 4 Réunions de travail dirigeant et conseils, Réunions actionnaires, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Prévisionnel financier Articles de presse, Site internet, Études de marché, Projet stratégique, PV CA et AG 2 AC 24 Réunions de travail dirigeant et comité de direction, Réunions actionnaires, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnel financier Articles de presse, Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique 3 AC 8 Réunions de travail dirigeant et conseils, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnel financier Articles de presse, Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique 4 AC 8 Réunions de travail dirigeant et conseils, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Prévisionnel financier Articles de presse, Projet stratégique 5 AC 17 Réunions de travail dirigeant, conseils Échanges conseils Bilan 1 exercice, Prévisionnel financier Articles de presse, Projet stratégique 6 AC 17 Réunions de travail dirigeant, Échanges conseils Bilans 2 exercices, Prévisionnel trésorerie, Comptes rendus Tribunal de commerce Plaquette présentation, Études de marché 7 AC 9 Réunions de travail dirigeant, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Plan de continuation, Prévisionnel financier Articles de presse Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique 8 OP/AC 12 / 36 Réunions de travail dirigeant, comité de direction, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnels financiers, Comptes rendus Tribunal de commerce, Plan de continuation Articles de presse, Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique 9 AC 12 Réunions de travail dirigeant et collaborateurs Bilans 3 exercices, Plan de continuation, Prévisionnel financier Articles de presse, Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique

Synthèse des données collectées

Tableau 1
# Cas Position du chercheur Durée de collecte (en mois) Données primaires Données secondaires financières Données secondaires non financières 10 OP 3 Réunions dirigeant et collaborateurs Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnel financier Articles de presse Site internet, Plaquettes Projet stratégique 11 OP 6 Réunions dirigeant et conseils Bilans 2 exercices, Plan de reprise, Prévisionnel financier Articles de presse, Plaquettes, Projet stratégique 12 OP 6 Réunions dirigeant et conseils Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnel financier Articles de presse Site internet, Plaquettes Projet stratégique 13 AC 36 Réunions de travail dirigeant et conseils, Échanges conseils Bilans 3 exercices, Situations intermédiaires, Prévisionnel financier Articles de presse Site internet, Plaquettes, Études de marché, Projet stratégique

22La période de collecte moyenne des données a été de 8 mois pour la catégorie « OP » et de 18 mois pour la catégorie « AC ». Deux cas ont fait l’objet d’une durée plus longue d’observation (24 mois et 36 mois). Notre approche méthodologique nous a permis de collecter en temps réel des données relatives aux actions menées par le dirigeant et par l’équipe dédiée au redressement. Dans tous les cas, nous avons collecté des données primaires (entretiens et réunions de travail avec les dirigeants, participations aux réunions et échanges avec les différents intervenants de l’équipe dédiée au redressement) et secondaires (bilans et comptes de résultat, articles de presse, sites Internet, études de marché, projet stratégique…).

23Nous avons prédéfini un protocole de collecte des cas visant à assurer la reproductibilité et permettre une analyse comparative. Nous avons ainsi utilisé des formats identiques de prises de notes afin de disposer du même matériau empirique de cas en cas (Miles et Huberman, 1994). Pour chaque cas en tant qu’AC, nous avons passé entre 20 et 25 heures en entretien avec chaque dirigeant. Pour les cas en tant qu’OP, la durée totale des entretiens avec le dirigeant est comprise entre 3 et 10 heures pour chaque entreprise. Enfin, nous avons procédé à une triangulation des sources de données afin d’accroître la qualité du recueil et des inférences effectuées : entretiens avec les dirigeants et les autres membres de leur équipe ; analyse de données primaires et secondaires. Une validation du diagnostic de l’entreprise ainsi que de nos analyses a été systématiquement faite auprès du dirigeant.

2.2 – Caractéristiques de l’échantillon

24Notre échantillon a été construit théoriquement (Glaser et Strauss, 1967) et non, aléatoirement. Nous avons progressivement sélectionné des cas pour observer et analyser des situations de PME prises à différents niveaux de leur trajectoire de défaillance, ainsi que des cas de succès (sortie de la trajectoire) et des cas d’échecs. À court terme, 9 cas peuvent être décrits comme des succès, et donc 4 cas comme des échecs (tableau 4). La sélection théorique des cas visait également à créer de l’hétérogénéité en termes de secteurs, de taille, d’âge, de profil des dirigeants, de chiffre d’affaires, d’appartenance à un groupe et d’effectif (Yin, 2014 ; Eisenhardt, 1989) (tableau 2). Concernant le profil du ou des dirigeants, notre échantillon a été constitué pour inclure des dirigeants aux profils et à l’ancienneté variés, et pour observer des dirigeants repreneur ou fondateur de leur entreprise. Notre échantillon final retient cependant des entreprises en défaillance dont les dirigeants ont traditionnellement recours à des conseils ou des expertises externes (d’où la présence d’un des chercheurs en intervention), ce qui peut potentiellement introduire un biais de sélection.

Tableau 2

Présentation synoptique des cas

Tableau 2
Identité de l’entreprise Identité du dirigeant # Cas Groupe de sociétés Nombre société d’exploitation Activité Âge site d’exploitation Chiffre d’Affaires en M€ Effectif Nombre dirigeants opérationnels Dirigeant Ancienneté dans la société 1 oui 4 Négoce 5 4 17 2 Fondateur 5 2 oui 5 Services 20 10 130 1 Fondateur 20 3 oui 2 Services 25 12 16 1 Repreneur 5 4 non 1 Services 6 0,6 6 2 Fondateur 6 5 non 1 Services 15 0,6 7 2 Repreneur 1 6 non 1 Production 26 1 9 1 Repreneur 3 7 oui 1 Services 15 1 14 2 Repreneur 5 8 oui 1 Production 100 12 95 1 Repreneur 25 9 oui 1 Production 5 1,5 12 1 Repreneur 3 10 non 1 Production 55 20 80 1 Repreneur 4 11 oui 1 Production 60 25 136 1 Repreneur 1 12 oui 2 Négoce 70 14 34 1 Repreneur 2 13 oui 4 Négoce 100 6 31 2 Repreneur 30

Présentation synoptique des cas

2.3 – Opérationnalisation de la trajectoire de défaillance

25Le concept central de cet article est celui de trajectoire de défaillance. Il permet : de situer le niveau de défaillance de nos cas dans une visée comparative ; d’avoir une vision longitudinale et processuelle de la défaillance (évolutions dans le temps vers une sortie ou non) ; de relier actions des dirigeants et niveau de défaillance ; de relier actions et résultats (sortie ou non de la trajectoire). Avant de démarrer l’analyse des cas, il était donc nécessaire de définir l’étape de défaillance dans laquelle se situait l’entreprise au moment du démarrage de la collecte des données en temps réel. Un premier choix pour identifier le niveau de défaillance aurait été d’utiliser les traditionnels indicateurs financiers de la défaillance en termes de rentabilité, liquidité, solvabilité et levier d’endettement (D’Aveni, 1989 ; Laitinen et Lukason, 2019). Mais disposant d’un échantillon composé en partie de groupes d’entreprises dont les données comptables ne sont pas consolidées, cette option n’a pas été retenue. Une autre possibilité aurait été de retenir les cotations externes de la Banque de France mais dans la mesure où les entreprises de notre échantillon ne sont pas systématiquement cotées, nous ne disposons pas de l’exhaustivité des cotations. Au final, nous avons retenu le cadre proposé par Crutzen et Van Caillie (2008) pour opérationnaliser la trajectoire de défaillance sous la forme de différentes étapes qui se succèdent potentiellement dans le temps (tableau 3). Chaque étape se caractérise par des difficultés croissantes pour l’entreprise. Toutefois, nous avons légèrement amendé ce cadre en ajoutant une cinquième étape dite de « redémarrage ». En effet, en regroupant nos cas par étape de défaillance, nous avons constaté que la phase 4 dite « légale » n’était pas forcément la phase ultime d’une trajectoire lorsque l’on s’intéresse au redressement. En effet, si cette phase légale constitue l’étape ultime de la défaillance pour la majeure partie des entreprises arrivées à ce stade [6], pour certaines entreprises une continuité d’activité est possible après cette étape.

Tableau 3

Opérationnalisation des différentes étapes de la trajectoire de défaillance (Adapté de Crutzen et Van Caillie, 2008)

Tableau 3
Étapes Étape 1 Premières difficultés Étape 2 Premiers symptômes Étape 3 Clignotants au rouge Étape 4 Défaillance juridique Étape 5 Redémarrage Évolution chronologique Origine de la défaillance Conséquences de la défaillance Étape ultime de la défaillance Étape légale Étape post-légale Description du phénomène Difficultés non observables par l’extérieur Conséquences visibles par l’extérieur Passage au rouge des indicateurs de gestion Procédure judiciaire Sortie de la procédure collective Qualification de l’entreprise Entreprise défaillante Entreprise en difficulté Entreprise en état de faillite Entreprise en faillite Entreprise sous plan Opérationnalisation du phénomène Dysfonctionnements internes de la société pouvant peser à moyen et long terme sur la rentabilité de la société Évolution défavorable des ratios financiers, amenant une dégradation éventuelle de la cotation mais n’amenant aucune décision contraignante des financeurs Évolution défavorable des ratios financiers, amenant une dégradation de la cotation ainsi qu’une décision contraignante des financeurs Ouverture d’une procédure amiable (mandat ad hoc, conciliation) ou collective (sauvegarde, redressement judiciaire, liquidation judiciaire) Entreprise en plan de continuation ou plan de cession Nombre de cas de l’échantillon 2 1 4 2 4

Opérationnalisation des différentes étapes de la trajectoire de défaillance (Adapté de Crutzen et Van Caillie, 2008)

26Nous avons identifié trois formes de poursuite d’activité à la suite d’un redressement judiciaire. Tout d’abord, la mise sous plan de continuation de l’entreprise, pour laquelle un étalement des dettes (associé ou pas à un abandon d’une partie de la dette par les créanciers) est validé par le tribunal de commerce. Dans ce cas, le propriétaire – dirigeant actuel a en charge le redressement de l’entreprise. Le deuxième cas renvoie à une situation où l’entreprise poursuit son existence avec un nouveau propriétaire. Dans ce cas, l’entreprise bénéficie d’un plan de cession global où la majeure partie des actifs est cédée à une nouvelle entité juridique qui continue de développer l’entreprise avec une partie des collaborateurs, la marque, les clients… Enfin, une troisième voie consiste en une vente partielle d’actifs de la société (la marque et/ou le savoir-faire au travers d’une partie des équipes, et/ou les immobilisations corporelles, et/ou le portefeuille de clients, les stocks…) qui sont ensuite réintégrés dans d’autres sociétés. Dans ce cas, la continuité débouche sur une entreprise de type « Frankenstein », totalement éclatée et reconstituée.

27La collecte des données sur les 13 cas analysés a démarré sur les 5 étapes identifiées. Certains cas ont cependant été analysés sur plusieurs étapes. Un cas dont la collecte commence par exemple en étape 1 peut donner lieu à une analyse en étape 1 et 2, voire 3.

28L’analyse des cas nous a rapidement montré qu’au sein d’une même étape, plusieurs séquences – considérées comme une action entreprise par le dirigeant et son équipe et ses résultats (bifurcation, verrouillage ou disparition) – pouvaient être repérées. Ce sont ces séquences que nous analysons au sein d’une trajectoire de défaillance (tableau 4). Afin d’enrichir notre base de séquences à analyser, il a été possible de reconstituer une partie de la trajectoire de manière rétrospective dans certains cas. Pour chacun de nos 13 cas, nous avons ainsi été en mesure de collecter en temps réel des données sur une à trois séquences de la trajectoire de défaillance (26 séquences). Dans 8 cas, il nous a été possible de collecter rétrospectivement le même type d’information qu’en temps réel pour une ou deux séquences. Au total, nous disposons de 35 séquences observées ou reconstruites pour lesquelles nous sommes en mesure d’observer les actions du dirigeant et le fonctionnement de l’équipe dédiée au redressement (Annexe 2).

Tableau 4

Séquences analysées et variable dépendante par cas

# CasNiveau de défaillanceNb séquences observées en temps réelNb séquences rétrospectivesSortie de la trajectoire sur la dernière séquence observée en temps réel
1320Oui
2321Non
3321Non
4310Oui
5521Oui
6422Oui
7511Oui
8431Oui
9221Oui
10522Non
11520Non
12110Oui
13121Oui

Séquences analysées et variable dépendante par cas

2.4 – Analyse des données

29Notre terrain de recherche nous permet de disposer d’un matériau riche qu’il a fallu condenser à des fins de théorisation à l’aide de tableaux et de matrices (Miles et Huberman, 1994). Compte tenu de la masse des données collectées pour chacun de nos 13 cas, le respect « à la lettre » de la démarche proposée par la théorisation ancrée de Glaser et Strauss, nous est apparu difficilement réalisable. Nous avons donc adapté la méthode en simplifiant les cas. Après avoir analysé chaque cas en profondeur, nous avons rédigé un document de présentation de la société qui a fait l’objet d’une validation par le dirigeant. Cette étape essentielle à notre analyse nous a permis d’éviter les biais d’interprétation liés à l’étude des seules données financières [7]. Après cette étape, nous disposions de données répondant à un double objectif de compréhension de l’environnement et de la stratégie de l’entreprise ainsi que de l’identification des risques de défaillance (historique, organisation juridique et performances financières, positionnement de l’activité au sein de son secteur, identification de la concurrence, perspectives stratégiques). Le diagnostic financier et stratégique mené pour chaque cas nous a fourni une connaissance approfondie des situations étudiées. Nous avons ensuite réalisé une fiche d’identité du cas autour des caractéristiques de l’entreprise et de son dirigeant.

30Dans un second temps, nous avons procédé à une analyse des unités de sens autour des thèmes présentés dans la figure 1. Chaque thème a fait l’objet d’un descriptif détaillé (annexe 1) qui nous a permis de faire apparaître les concepts centraux (étape de défaillance, actions entreprises, résultats, rôle du dirigeant, composition de l’équipe dédiée) et une grille d’analyse. Nous avons ensuite comparé nos différents cas et mis en relation les différents concepts dans l’analyse inter-cas. Les actions de redressement mises en œuvre par les dirigeants ont émergé du terrain et ont été codées de façon inductive (Glaser et Strauss, 1967). Elles ont permis d’affiner l’opposition entre actions de « rejuvenation » et de « retrenchment » (voir 2.1.). Ces actions et leurs résultats ont permis de mettre en lumière 35 séquences que nous avons analysées après avoir condensé les données (annexe 2).

Figure 1

Design de la recherche

Figure 1

Design de la recherche

31En ce qui concerne la variable dépendante de notre recherche (le redressement), nous avons considéré que lorsque le dirigeant mettait en œuvre une action avec succès et qu’elle produisait les effets attendus à court terme, la séquence s’achevait par une bifurcation, c’est-à-dire, une sortie provisoire de la trajectoire de défaillance. Dans le cas contraire, nous avons considéré qu’apparaissait un phénomène de verrouillage amenant l’entreprise dans la séquence ou l’étape suivante de la trajectoire de défaillance, et dans certains cas l’entreprise était amenée à disparaître. Notre analyse ne permet donc pas de s’assurer d’un redressement à long terme des PME mais seulement de la sortie de la trajectoire de défaillance. Le redressement à long terme pouvant être décrit comme une combinaison d’inflexions positives qui s’enchaînent après la bifurcation à l’origine de la sortie de la trajectoire de défaillance et jusqu’au redressement des ratios financiers. En effet, les approches financières laissent augurer une sortie définitive de la trajectoire de défaillance lorsque les ratios financiers sont rétablis.

3 – Présentation des résultats

32Nos études de cas mettent en évidence deux catégories de résultats. La première catégorie a trait aux actions menées par le dirigeant. La seconde, au dirigeant et à son équipe.

3.1 – Perceptions, séquences et actions du dirigeant

33Notre premier résultat est que les dirigeants mènent un certain nombre d’actions pour infléchir la trajectoire de défaillance de leur entreprise. Ils ne restent pas inactifs dans ces trajectoires. Notre analyse permet d’identifier quatre grandes catégories d’actions qui renvoient à des objectifs distincts (tableau 5). La première catégorie d’actions se rattache au « recovery » de Robbins et Pearce (1992) et vise à développer et diversifier le chiffre d’affaires. Une seconde catégorie d’actions vise à diminuer les charges et à atteindre le seuil de rentabilité (actions de « retrenchement » chez Robbins et Pearce (1992)).

Tableau 5

Actions mises en œuvre par le dirigeant visant à une inflexion de la trajectoire de défaillance de l’entreprise

Actions mises en œuvre par le dirigeant visant à une inflexion de la trajectoire de défaillance de l’entreprise

Tableau 5
Catégorie d’action Objectif de l’action Descriptif Objectif recherché sur les indicateurs financiers de la défaillance Activité Développer et diversifier le Chiffre d’Affaires • Augmentation ou diminution du prix de vente • Développement de nouveaux produits • Conquête de nouveaux marchés • Nouveaux segments de clientèle • Innovation RENTABILITE Seuil de rentabilité Diminuer les charges • Réduction des charges fixes, • Renégociation des contrats • Diminution de l’effectif • Travail sur les process internes • Cession d’actifs insuffisamment rentables RENTABILITE Communication Améliorer l’image de la société • Modifications comptables (provisions, production) • Articles dans la presse • Mandats auprès d’institutions, fédérations patronales RENTABILITE Financier Reconstituer la trésorerie • Nouveaux financements bancaires • Négociation des délais • Recapitalisation • Cessions d’actifs LIQUIDITE

34Une troisième catégorie concerne les actions de communication au sens large. Nous y incluons la communication financière et les habillages de bilan au côté d’actions de communication dites « corporate » à destination de la presse spécialisée ou généraliste. Cette catégorie intègre également les actions visant à siéger au sein d’instances institutionnelles telles que les fédérations patronales. Ces actions élargissent le réseau du dirigeant et contribuent à une meilleure insertion de ce dernier dans son écosystème, en lui permettant d’occuper une position d’influence. Au travers des actions de communication, le dirigeant vise à améliorer l’image de l’entreprise auprès de ses parties prenantes et de son environnement. Cette catégorie constitue une activité peu développée dans la littérature mais qui apparaît néanmoins importante pour la réussite du redressement.

35La quatrième catégorie d’actions regroupe toutes les mesures ayant pour objectif d’améliorer la trésorerie de l’entreprise. Ces actions couvrent des solutions classiques comme le recours aux crédits bancaires à court ou moyen terme, ou la négociation des délais de paiement mais aussi les opérations plus sophistiquées de « lease-back » ou de recapitalisation.

36Puisque chaque action menée par le dirigeant se traduit financièrement, nous avons mis en perspective les catégories d’actions mises en œuvre avec l’objectif recherché par le dirigeant. Cette opération est rendue possible grâce à notre positionnement privilégié au côté du dirigeant.

37En termes d’impact sur les indicateurs financiers de la défaillance (tableau 5), il ressort de notre analyse que les actions menées par le dirigeant n’obéissent qu’à une double volonté d’amélioration de rentabilité de son entreprise et de recherche de liquidité. Cette observation nous semble essentielle dans un contexte de redressement durable de l’entreprise car si l’amélioration de la rentabilité et de la liquidité se conçoivent dans une logique de court terme, l’amélioration de la solvabilité et de levier d’endettement – utilisés également comme indicateurs de défaillance potentielle –, s’inscrit dans une logique de pérennité à long terme de l’entreprise, souhaitée principalement par les financeurs. Ces critères n’apparaissent pas comme une priorité du dirigeant dans une trajectoire de défaillance. Ainsi, après avoir vécu une séquence de retour à la rentabilité, le dirigeant de notre cas 2 a eu cette réaction, lorsque nous avons évoqué la nécessité d’un renforcement de la structure financière par apport extérieur (le ratio Fonds Propres/Total Bilan de son groupe s’élevant alors à 10 %) : « Ça se fera tout doucement, le plus important c’est que l’activité a redémarré et qu’on ne perde plus d’argent. » Cette réaction trouve bien évidemment son explication dans le risque de se voir légèrement dilué en cas d’entrée d’un nouvel actionnaire.

38Une autre analyse met en perspective les actions menées par le dirigeant avec l’étape de défaillance de l’entreprise pour les données exclusivement collectées en temps réel (annexe 2). Agit-il de la même façon quelle que soit l’étape de défaillance ? Nous avons tout d’abord rapproché la perception du dirigeant avec le type d’action menée. Nous constatons que la perception du dirigeant concernant l’horizon temporel dont il dispose joue un rôle déterminant dans le choix des actions qu’il entreprend. Les choix du dirigeant sont ainsi guidés par l’éventualité d’un risque de défaut de son entreprise plus ou moins imminent. Ainsi, dans le cas 13 (étape 1 du niveau de défaillance), lorsque l’entreprise vit la première séquence de sa trajectoire de défaillance (qui fait suite à un différend avec un de ses fournisseurs), les dirigeants estiment que le risque financier qui pèse sur l’entreprise se situe à long terme. Dans ces conditions, les dirigeants décident de mener des actions de redressement de type « recovery » et définissent un projet stratégique d’envergure visant à l’implantation d’autres sites d’exploitation, nécessitant des investissements conséquents. Bien entendu, les effets de ces actions auront un impact à plus long terme.

39En revanche, dans le cas 12, l’entreprise se situe également à l’étape 1 du niveau de défaillance (également suite à un différend avec un de ses fournisseurs), mais l’horizon de l’impact financier perçu par le dirigeant se situe à très court terme. Bien que le dirigeant mène des actions à plus long terme pour désensibiliser le risque de son entreprise (développement de nouvelles références), il privilégie des actions ayant un effet à court terme (recherche de financements court terme, recherche d’un factor). Ainsi, en mettant en perspective les actions menées par le dirigeant et sa perception du risque financier, il apparaît que lorsque le dirigeant perçoit un horizon de risque financier (voire de défaillance financière) qui se situe à court terme, il privilégie les actions comportant des effets visibles à court terme. En revanche, lorsque l’horizon du risque financier est à plus long terme, le dirigeant dispose d’une plus grande latitude et procède à une combinaison d’actions ayant des effets à court terme et/ou long terme.

40Nous avons ensuite procédé à une analyse par séquence. Pour mener ces analyses, nous associons à chaque séquence de la trajectoire de défaillance, les catégories d’actions menées mises en évidence précédemment : « Activité » (A), « Seuil de rentabilité » (S), « Communication » (C), « Financier » (F), aucune action menée (0) (voir annexe 2). L’objectif d’une analyse par séquence vise à déterminer si certaines combinaisons d’actions peuvent avoir un effet positif sur l’inflexion de la trajectoire de défaillance. Nous indiquons ensuite les résultats obtenus dans chaque séquence : « bifurcation » (B) (inflexion positive), « verrouillage » (V) (continuation de la trajectoire), « disparition » (D). Enfin, nous condensons par étape de défaillance nos résultats en faisant apparaître l’issue finale de la dernière séquence de chaque étape (annexe 2). Notre objectif est d’identifier si des catégories d’actions spécifiques sont particulièrement associées à des étapes de la trajectoire.

41Premier constat, pour la quasi-totalité des séquences analysées, le dirigeant privilégie des actions en lien avec l’activité (A), quelle que soit l’étape de défaillance. Il s’agit pour lui de sortir de sa trajectoire en lançant des actions qui permettent d’accroître le chiffre d’affaires ou d’en diversifier les sources en développant de nouvelles activités, en innovant ou en cherchant de nouveaux clients. De façon étonnante, c’est avant tout sur ce levier de l’activité que portent les actions, beaucoup plus que sur la baisse des charges (S). Dans près de la moitié des séquences, le dirigeant et son équipe cherchent également à restaurer la trésorerie de l’entreprise, ces actions devenant de plus en plus fréquentes alors que l’entreprise avance dans la trajectoire de défaillance. Enfin, les actions de communication (C) n’interviennent qu’à partir de l’étape 2.

42En deuxième lieu, nous cherchons à identifier si des actions ou des configurations d’actions sont spécifiquement associées aux entreprises qui rebondissent. À l’issue de la collecte des données en temps réel, sur nos 13 cas, 10 entreprises ont bénéficié d’une bifurcation, c’est-à-dire que des solutions ont pu être trouvées à court terme. Cette bifurcation de la trajectoire permet à l’entreprise un infléchissement temporaire de sa trajectoire mais pas forcément un redressement durable de la situation. Il apparaît ainsi raisonnable de considérer qu’un redressement durable peut être constaté lorsque l’entreprise sort de la zone de défaillance pour retrouver des fondamentaux financiers acceptables en termes de rentabilité, solvabilité, levier d’endettement et liquidité, lui permettant de poursuivre son existence. L’analyse à plus long terme fait apparaître un redressement pour seulement 7 entreprises de notre échantillon. Cela signifie que pour 3 entreprises, le rebond n’a été que temporaire. Des inflexions positives de la trajectoire ne garantissent donc pas une sortie définitive de la trajectoire de défaillance. Enfin, en reliant les actions ou des configurations d’actions au redressement de l’entreprise, aucune association n’émerge clairement tant pour l’inflexion de la trajectoire que pour le redressement plus durable.

43Nous avons également procédé à l’analyse des alternatives possibles en termes d’actions menées et de décisions potentielles qui s’offraient au dirigeant, en fonction du degré de défaillance de l’entreprise. Nous faisons le constat qu’en fonction de la position de l’entreprise dans la trajectoire de défaillance, le dirigeant dispose d’une latitude différente en termes d’actions et de décisions potentielles, justifiant théoriquement l’application du concept de trajectoire. Cette latitude est plus élevée lorsque l’entreprise se situe dans les premières étapes de la trajectoire de défaillance (1, 2 et 3) et se traduit dans les faits par un choix d’alternatives plus important. En effet, l’entreprise 13 (située dans l’étape 1 de la trajectoire de défaillance), a pu mener sans difficulté un projet d’envergure afin de redresser sa situation, alors que cette même alternative qui était envisagée par l’entreprise 4, située en étape 3 a été plus difficile à mettre en œuvre et impossible à réaliser pour l’entreprise 6 située en étape 4. Des marges de liberté sont néanmoins retrouvées, une fois l’étape 4 de procédure collective passée.

44À cette étape 5, l’entreprise – si elle n’a pas disparu – a retrouvé des marges de manœuvre (refinancement notamment) et engage de nombreuses actions. Il faut préciser que lorsque l’étape 4 (procédure collective) de la trajectoire de défaillance est atteinte, le dirigeant peut être privé de tout pouvoir à l’égard de son entreprise et des tiers. À l’appui de nos observations menées sur des durées plus longues, nous constatons également que pour les entreprises très avancées dans la trajectoire de défaillance, le dirigeant dispose de deux voies d’actions : trouver des financements ou gagner du temps pour trouver des financements. Dans certains cas, le dirigeant est prêt à retenir et mettre en œuvre une solution bien plus radicale qui consiste en la cession totale de son entreprise (cas 2, 3 ou 8). Bien évidemment, cette option est retenue uniquement après que le dirigeant constate l’échec des actions qu’il a menées précédemment.

45En définitive, il apparaît qu’aucune configuration d’actions ne semble favoriser systématiquement une bifurcation permettant de sortir de la trajectoire de défaillance. La sortie de la trajectoire de défaillance ne dépend donc pas uniquement du type d’actions menées ni de leur nombre. Cependant, une détection rapide des problèmes dans la trajectoire permet d’envisager un spectre d’actions plus large. Nous pouvons aussi faire l’hypothèse qu’une autre variable explicative concerne le processus décisionnel en situation d’échec.

3.2 – Équipe dédiée au redressement

46Notre seconde catégorie de résultats concerne le processus décisionnel adopté par le dirigeant. Ce résultat a émergé lorsque nous avons reconstitué pour chacun de nos cas, les différentes trajectoires de défaillance en retenant cette fois, les données collectées en temps réel et celles de manière rétrospective. Nous avons alors constaté que tout au long de la trajectoire de défaillance, les dirigeants de notre échantillon ne sont pas seuls. Ils sont entourés de conseils internes (conseil d’administration, comité de direction) et externes (avocats, consultants, experts-comptables). Ainsi, le dirigeant met rapidement en place un mode de gestion collective de la défaillance et constitue une équipe dédiée composée de certains collaborateurs, de ses conseils habituels ou de nouveaux conseils.

47L’analyse par séquence sur les données exclusivement collectées en temps réel permet d’identifier la configuration de l’équipe dédiée au redressement. Nous identifions pour chaque séquence deux types de noyau stratégique (annexe 2) : le premier est composé des collaborateurs et conseils habituels (CH) ; le second, de collaborateurs et nouveaux conseils (NC).

48L’analyse de notre matériau empirique montre qu’en ce qui concerne le recours aux conseils, l’attitude du dirigeant diffère en fonction du niveau de défaillance de l’entreprise. Ainsi, au début de la trajectoire de défaillance (Étape 1), lorsque son environnement est encore peu contraignant, le dirigeant cherche à trouver des solutions et les fait appliquer avec ses conseils existants. Toutefois, lorsque la situation devient plus critique, il tend soit à se séparer de ses conseils habituels, soit à en intégrer de nouveaux pour enrichir sa réflexion. Ce dernier résultat ouvre une hypothèse de recherche intéressante sur la capacité du dirigeant à gérer un réseau d’acteurs qui apparaît comme un facteur de succès de la sortie d’une trajectoire de défaillance.

4 – Conclusion

49Alors que les deux concepts de redressement et de défaillance sont étroitement liés dans la vie des PME, les deux champs de la littérature qui les étudient semblent s’ignorer. Peu de recherches traitent spécifiquement du redressement de l’entreprise inscrite dans une trajectoire de défaillance. Pourtant, la défaillance peut être définie comme l’échec d’un redressement (Sheppard et Chowdhury, 2005). En analysant la défaillance de l’entreprise au prisme du concept de trajectoire, il devient possible de modéliser plus facilement le phénomène pour étudier le redressement de l’entreprise comme un enchaînement de séquences d’actions donnant lieu ou non à des bifurcations. Cette approche intégrative traduit davantage la réalité (Mellahi et Wilkinson, 2004) en mêlant déterminisme et volontarisme. En effet, le concept de trajectoire confère en partie un caractère inéluctable à la défaillance. Les séquences et les étapes s’enchaînent et créent des effets de verrouillage. Le spectre des actions envisageables se réduit progressivement. Dans ce cadre, les dirigeants sont progressivement contraints dans les différentes options stratégiques qui peuvent être mises en œuvre.

50Cependant, comme nous l’avons vu, dans une perspective plus volontariste qui s’intéresse au redressement de l’entreprise et aux actions du noyau stratégique, une bifurcation reste toujours possible. Il s’agit alors de s’intéresser davantage aux actions réalisées par les dirigeants qui sont les principaux décideurs. Ces actions ne peuvent être décrites avec précision à la lecture des seuls documents financiers (Blazy et Combier, 1997) et nécessitent une approche au plus près du terrain, alors que l’entreprise se trouve dans une trajectoire de défaillance.

51Notre recherche, menée in vivo, permet d’enrichir les travaux menés précédemment sur le redressement des PME (Robbins et Pearce, 1992) en prenant en compte les objectifs recherchés par les dirigeants. On constate ainsi, qu’à côté des actions de « recovery » et de « retrenchment », le dirigeant de PME mène deux types d’actions supplémentaires en lien avec la communication et le financier et que l’horizon de la défaillance perçue par le dirigeant (court terme ou long terme) constitue un élément important dans les choix de ses actions.

52Cependant, à l’instar de Barker et Mone (1994), nous ne sommes pas en mesure d’associer certaines actions ou configurations d’actions avec des inflexions positives. Nous constatons simplement que le type d’action privilégiée porte avant tout sur l’activité et que la diversité des actions décroît jusqu’à l’étape de procédure collective. Il apparaît cependant important de détecter au plus vite – et pour le dirigeant de prendre conscience – des difficultés de son entreprise. Cette posture lui donne plus de marge de manœuvre pour sortir de la trajectoire.

53Notre recherche suggère enfin que le processus de redressement ne doit pas s’analyser uniquement sous l’angle des actions menées par le dirigeant de PME, mais également sous l’aspect du processus décisionnel qu’il engage au cours de la défaillance. En mettant en évidence la constitution d’une équipe dédiée et son évolution au cours de la trajectoire, notre travail ouvre de nouvelles voies de recherche qui nécessitent de s’intéresser aux interactions du dirigeant avec son équipe dédiée. De la même façon qu’Argenti (1976) soulignait qu’un dirigeant trop autocratique était un facteur de défaillance, il est possible qu’un mode de gestion collectif et collégial soit l’une des clés du redressement. La façon dont le dirigeant s’entoure dans ces situations et avec laquelle il travaille avec des experts semble être une piste prometteuse.

54Sur ce point, l’une des limites à la validité externe de notre recherche concerne justement le recours aux experts. La position privilégiée d’un des auteurs en tant qu’observateur et participant auprès des dirigeants peut être le signe d’un biais dans la sélection de l’échantillon. Ce biais se situe moins à notre avis dans les interprétations effectuées dans cette recherche que dans le profil de dirigeants qui n’hésitent pas à faire appel à des conseils extérieurs. Cette caractéristique peut renvoyer à un profil de dirigeant spécifique attendant des conseils extérieurs une rupture dans ses façons de faire et suffisamment ouvert pour se remettre en cause (Plane et Torrés, 1998).


Annexe 1

Exemple de présentation détaillée d’un cas

Présentation de l’entreprise
Créée il y a quatre ans, l’entreprise 1 évolue dans le domaine de la conception et la diffusion de petits accessoires ménagers. Diffusés dans un premier temps de manière confidentielle, via des ventes privées, les produits de l’entreprise rencontrent très rapidement un vif succès qui amène l’entreprise à mettre en place un véritable réseau de distribution (grandes enseignes, boutiques multimarques, boutiques en propres, franchises, e-commerce). Parallèlement, une société est constituée afin d’assurer le rôle de centrale d’achat et plusieurs sociétés sont créées pour assurer la distribution au niveau international. Quatre ans après sa création, le groupe comprend 4 sociétés d’exploitation créées ex nihilo et génère un Chiffre d’Affaires de plus de 4 M€ avec un effectif de 17 personnes.
Origine des difficultés
Disposant de fonds conséquents et d’un réseau financier permettant une forte capitalisation de l’entreprise qui reste cependant déficitaire, les dirigeants financent leur développement à grand renfort d’augmentation de capital familial, associé à des valorisations successives. Le développement rapide du groupe, réalisé en fonction des opportunités commerciales et financières (ouverture d’un compte auprès d’une banque différente pour chaque société du groupe, autofinancement des investissements long terme…), amène des incohérences financières et organisationnelles ne permettant pas d’avoir une lecture claire et lisible de la situation réelle. Par exemple, puisque seule la centrale d’achat dispose d’une ligne de crédit court terme, tout le chiffre d’affaires pouvant faire l’objet d’un financement court terme est transféré de la principale société d’exploitation à la centrale d’achat ; les charges correspondantes, étant maintenues sur la société principale et faisant l’objet d’une refacturation à la centrale d’achat en fin d’année. Si cette solution permet de résoudre temporairement le financement de la croissance du groupe, elle amène plusieurs difficultés dont notamment des difficultés dans la gestion de trésorerie de la société principale et la dégradation de ses soldes intermédiaires de gestion. Autre exemple, l’absence d’alignement des arrêtés comptables ne permet pas de porter un jugement financier pertinent sur l’ensemble du groupe en l’absence de consolidation même officieuse. Dans ces conditions, la banque de la société principale décide de refuser les dépassements, ce qui amène une dégradation de la cote de crédit Banque de France au niveau 8. Cette cotation signifie que « la capacité de l’entreprise à honorer ses engagements financiers à un horizon de trois ans est menacée ». La société se retrouve donc au stade 3 de la trajectoire de défaillance (apparition des clignotants et méfiance extrême des prêteurs).
Gestion de la trajectoire et actions mises en œuvre par les dirigeants
Face à cette situation, les dirigeants qui souhaitent poursuivre leur développement cherchent en premier lieu à trouver de nouveaux financements et à rassurer l’actionnariat. Si les premières difficultés peuvent se résoudre en mobilisant leur réseau, le degré des difficultés rencontrées nécessite une autre approche. Bien qu’ils aient recruté un directeur financier 6 mois auparavant et disposent de nombreux conseils pour la gestion quotidienne de la société (experts comptables, avocats, investisseurs en capital), ils sollicitent de nouveaux conseils externes, afin de les accompagner dans le redressement de la situation et mettre fin à cette situation de blocage bancaire. Ils souhaitent également disposer d’un état des lieux organisationnel et financier complété de préconisations d’actions à mettre en œuvre pour redresser durablement le groupe. Parallèlement, ils poursuivent leurs actions de développement et de communication auprès de la presse et préparent une nouvelle levée de fonds avec de nouveaux actionnaires.
Annexe 2

Codage et analyse des séquences

tableau im7
Etape de la trajectoire 1 2 3 4 5 CAS Actions Nb Séquences Actions Nb Séquences Actions Nb Séquences Actions Nb Séquences Actions Nb Séquences Total Séquences Noyau stratégique Résultat Noyau stratégique Résultat Noyau stratégique Résultat Noyau stratégique Résultat Noyau stratégique Résultat 12 A/F 1 1 CH B 13 A/S 3 3 CH B 9 F 1 S 1 A/C/F 1 3 CH V NC V NC B 1 0 0 A/C/F 2 2 V V NC B 2 A 1 C/S/F 2 3 NC V NC D 3 A/S/F/C 1 A/S 2 3 CH V NC D 4 A/F 1 1 NC B 6 0 0 S/F 2 A/S/F 2 4 V V CH V NC B 7 F/S 1 A/F 1 2 CH B NC B 5 A/C/F/S 3 3 NC B 8 F 1 S/F 1 A/C/F 2 4 CH V NC B NC B 10 A/C/F/S 4 4 NC D 11 A/C/F/S 2 2 NC D Total séquences 5 3 11 4 12 35 LEGENDE Evolution de la trajectoire Verrouillage V Bifurcation B Disparition D Type d’action menée Activité A Seuil de rentabilité S Communication C Financier F Composition du noyau stratégique Conseils habituels CH Nouveaux conseils NC

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Mots-clés éditeurs : accompagnement de la PME, trajectoire de défaillance, redressement des PME, noyau stratégique, dirigeant

Date de mise en ligne : 11/01/2021

https://doi.org/10.3917/entre1.192.0067

Notes

  • [1]
    Recensement effectué sur Google Scholar en février 2017 sur les mots clés « croissance – PME » ; « défaillance – PME » ; « redressement – PME ».
  • [2]
    Savoir par exemple que le ratio cash-flow / endettement total est un très bon indicateur d’un risque de défaillance frôle ainsi la tautologie pour l’entrepreneur ou tout au moins lui est peu utile puisqu’il comprend assez vite que si sa capacité à rembourser ses créanciers baisse, la défaillance est proche.
  • [3]
    Voir la proposition de directive de la Commission européenne en 2017 visant à encourager d’une part le développement d’outils d’alerte précoce détectant les difficultés des entreprises et d’autre part des procédures de prévention permettant la restructuration et évitant l’insolvabilité.
  • [4]
    La fonction score résume à l’aide de ratios comptables et financiers le risque de défaillance d’une entreprise. Elle est produite notamment par la Banque de France, les organismes bancaires et financiers.
  • [5]
    Les procédures collectives recouvrent les procédures de sauvegarde, de redressement judiciaire et de liquidation judiciaire.
  • [6]
    Pour près des deux tiers des entreprises, cette étape signifie la liquidation immédiate de l’entreprise, selon l’étude de France Stratégie (Avril 2018).
  • [7]
    Par exemple, l’apparition de dépenses de R&D en immobilisation peut amener à conclure que l’entreprise en défaillance a décidé de s’orienter vers des projets innovants alors qu’il ne s’agit que d’une modification de l’enregistrement comptable des opérations de R&D.

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