Notes
-
[1]
Andrée CORVOL (éd.), Duhamel du Monceau, un philosophe du siècle des Lumières, Actes du colloque du 12 mai 2000, académie d’Orléans, 2001 ; Bruno DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau, un savant exemplaire au siècle des Lumières, Luxembourg, Connaissance et mémoires européennes, 1999 ; Guy PUEYO, « Un initiateur de la météorologie agricole au XVIIIe siècle, Henri-Louis Duhamel du Monceau », Comptes rendus des séances de l’Académie d’agriculture de France, 1980-6, p. 944-952.
-
[2]
Jean BOISSIÈRE, « Duhamel du Monceau en son siècle », in A. CORVOL (éd.), Duhamel du Monceau, op. cit., p. 215-238.
-
[3]
Nicolas DE CONDORCET, « Éloge de M. Duhamel », Histoire de l’Académie des sciences (désormais HAS), année 1782, Paris, Imprimerie royale, 1785, p. 131.
-
[4]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit. p. 29-32.
-
[5]
Archives nationales (désormais AN), C793, États de services de Duhamel du Monceau dans la Marine, pièce n° 8, folio n° 3.
-
[6]
Henri NADAULT DE BUFFON, Correspondance inédite de Buffon, t. 1, Paris, Hachette, 1860, p. 32.
-
[7]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit. p. 71-72.
-
[8]
Henri-Louis DUHAMEL DU MONCEAU, Traité de la culture des terres, Paris, Guérin-Delatour, 1761, p. 176. Henry PATTULLO, Essai sur l’amélioration des terres, Paris, Durand, 1758.
-
[9]
Roland LAMONTAGNE, « L’influence de Maurepas sur les sciences : le botaniste Jean Prat à la Nouvelle-Orléans 1735-1746 », Revue d’histoire des sciences, 1996, vol. 49, numéro 1, p. 113-124.
-
[10]
En 1735, il écrit une Histoire des insectes qui en fait l’un des pionniers de l’entomologie, et la météorologie lui est redevable d’avoir inventé un thermomètre plus précis que les précédents ; Jean TORLAIS, Réaumur : un esprit encyclopédique en dehors de « L’Encyclopédie » : le biologiste, l’entomologiste, l’inventeur, le métallurgiste, le naturaliste, le physicien, Paris, Libraire scientifique et technique Albert Blanchard , 1961.
-
[11]
AN, MC ET/XII/706 (IAD dressé par maître Liénard).
-
[12]
Les Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences sont accessibles en ligne sur le site Gallica de la BnF.
-
[13]
Louis COTTE, Traité de météorologie, Paris, Imprimerie Royale, 1774.
-
[14]
Michel VERGE-FRANCESCHI, La marine française au XVIIIe siècle, Paris, SEDES, 1996, p. 276.
-
[15]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Moyens de conserver la santé aux équipages des vaisseaux, Paris, Guérin et Delatour, 1759.
-
[16]
Félix VICQ-D’AZYR, « Éloge de monsieur Duhamel », Histoire de la Société royale de médecine, année 1780 et 1781, Paris, Barrois, 1785, p. 131-155.
-
[17]
« Règlement ordonnée par le roi pour l’Académie royale des sciences », Histoire et mémoires de l’Académie royale des sciences, année 1699, Paris, Gabriel Martin, Jean-Baptiste Coignard, Louis Guerin, 1732 (1700), p. 6. Article XXII : « Quoique chaque académicien soit obligé de s’appliquer principalement à ce qui concerne la science particulière à laquelle il s’est adonné, tous néanmoins seront exhortés à étendre leurs recherches sur tout ce qui peut être d’utile ou de curieux dans les diverses parties des mathématiques, dans la différente conduite des arts et dans tout ce qui peut regarder quelque point de l’histoire naturelle, ou appartenir en quelque manière à la physique ».
-
[18]
Charles-Pierre COLLARDEAU, Épitre à monsieur Duhamel de Denainvilliers, Paris, Le Jay, 1774.
-
[19]
Ernest MAINDRON, L’Académie des sciences, Paris, Félix Alcan, 1888, p. 18 ; Éric BRIAN (éd.), Histoire et mémoires de l’Académie des sciences : guide de recherche, Paris, Tec-Doc, 1996 ; Christiane DEMEULENAERE-DOUYÈRE, Éric BRIAN (éd.), Règlement, usages et science dans la France de l’Absolutisme, Paris, Tec-Doc, 2002. Cf. également Roger HAHN, L’anatomie d’une institution scientifique. L’Académie des sciences de Paris, 1666-1803 (1971), Paris, éditions des archives contemporaines, 1993 ; É. BRIAN, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au XVIIIe siècle, Paris, Albin Michel, 1994.
-
[20]
Georges-Louis LECLERC DE BUFFON, « Moyen facile d’augmenter la solidité, la force et la durée du bois », Mémoires de l’Académie royale des sciences année 1738, Paris, Imprimerie royale, 1740.
-
[21]
H. NADAULT DE BUFFON, Correspondance…, op. cit., p. 498-499. ; Jacques ROGER, Buffon, Paris, Fayard, 1989, p. 66-67.
-
[22]
Claude MICHAUD, « Duhamel du Monceau et l’Europe », in A. CORVOL (éd), Duhamel du Monceau, un européen…, op. cit., p. 85-104. La liste des membres depuis la fondation est disponible sur le site internet de l’Académie des sciences.
-
[23]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit., p. 317-318.
-
[24]
Chrétien-Guillaume DE LAMOIGNON DE MALESHERBES, Observations de Lamoigon-Malesherbes sur l’histoire naturelle générale et particulière de Buffon et Daubenton, deux tomes, Paris, Charles Pougens, 1798.
-
[25]
Carl VON LINNÉ, Philosophie botanique, Paris, Cailleau, 1788.
-
[26]
Lettre de Duhamel du Monceau à Carl von Linné, 29 novembre 1760, The Linnaean correspondence, lettre L2811 (linnaeus. c18.net).
-
[27]
Lettre de Duhamel du Monceau à Carl von Linné, 12 mars 1768, The Linnaean correspondence, lettre L4053 (linnaeus. c18.net).
-
[28]
Antoine FURETIÈRE, Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots François, tome 2, La Haye, A. et R. Leers, 1690, p. 402.
-
[29]
« Observations sur les singularités de l’Histoire naturelle de la France », in Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences, année 1699…, op. cit., p. 23-24 ; Jean EHRARD, L’idée de nature dans la première moitié du XVIIIe siècle, Chambéry, Imprimeries réunies, 1963.
-
[30]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Traité des arbres fruitiers, tome 1, Paris, Saillant-Dessaint, 1768, p. i.
-
[31]
Andreas GIPPER, « La nature entre l’utilitarisme et esthétisation », in Françoise GEVREY (éd.), Écrire la nature au XVIIIe siècle, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2006, p. 38.
-
[32]
Daniel ROCHE, « Académies et académisme : le modèle français au XVIIIe siècle », Mélanges de l’école française de Rome, Italie et Méditerranée, 108-2, 1996, p. 643-658.
-
[33]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Éléments d’agriculture, tome 1, Paris, Guérin-Delatour, 1762.
-
[34]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Traité de la conservation des grains et en particulier du froment, Paris, Delatour, 1768 (1753), p. XXIX ; Éléments d’agriculture, op. cit., tome 2, p. 396 : « La marche naturelle de la police pour bien régler l’administration des grains serait de permettre un commerce des grains très libre ».
-
[35]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, G.-L. LECLERC DE BUFFON, « De la cause de l’excentricité des couches ligneuses qu’on apperçoit quand on coupe horizontalement le Tronc d’un Arbre ; de l’inégalité d’épaisseur, & du différent nombre de ces couches, tant dans le bois formé que dans l’aubier », Histoire et mémoires de l’Académie royale des sciences année 1737, Paris, Imprimerie royale, 1740.
-
[36]
Alfred FIERRO, Histoire de la météorologie, Paris, Denoël, 1991, p. 63-75.
-
[37]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques pour l’année 1740 », Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences 1741, Paris, Imprimerie royale, 1744, p. 149.
-
[38]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Recherches physiques de la cause du prompt accroissement des Plantes dans les temps de pluyes et plusieurs observations sur le sujet », Histoire de l’Académie royale des sciences avec les mémoires de mathématique et de physique pour la même année 1729, Paris, Imprimerie royale, 1731, p. 349-360.
-
[39]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, G.-L. LECLERC de BUFFON, « Observations des différents effets que produisent sur les végétaux, les grandes gelées d’hiver et les petites gelées du printemps », HAS (partie mémoires) pour l’année 1737, Paris, Imprimerie royale, 1740, p. 273-298.
-
[40]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques faites au château de Denainvilliers proche Pluviers en Gâtinois », HAS, années 1741 à 1780.
-
[41]
La phénologie étudie les effets des variations saisonnières sur la végétation. Elle est aujourd’hui considérée comme une discipline reine dans la reconstruction climatique.
-
[42]
Paul-Jacques MALOUIN, « Histoire des maladies épidémiques observées à Paris en même temps que les différentes températures de l’air », Mémoires de l’Académie royale des sciences, années 1746 à 1754.
-
[43]
Sabine BARLES, La ville délétère. Médecins et ingénieurs dans l’espace urbain XVIIIe-XIXe siècle, Seyssel, Champ Vallon, 1999, p. 23-26.
-
[44]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques faites au château de Denainvilliers, proche Pluviers en Gâtinois, pendant l’année 1748 », Histoires de l’Académie royale des sciences avec les mémoires de mathématique et de physique pour la même année 1749, Paris, Imprimerie royale, 1753, p. 244.
-
[45]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Extrait des observations botanico-météorologiques faites à Québec par M. Gautier, médecin du roi au Canada », Mémoires de l’Académie des sciences, pour les années 1744 à 1750.
-
[46]
« Extrait d’une lettre de M. Joyeuse l’Ainé commissaire de la Marine à M. Duhamel du Monceau », Antoine LAVOISIER, Œuvres de Lavoisier, tome 3 : Mémoires et rapports sur divers sujets de chimie et de physique pures ou appliquées à l’histoire naturelle générale et à l’hygiène publique, Paris, Imprimerie impériale, 1865, p. 420.
-
[47]
N. DE CONDORCET, « Éloge de M. Duhamel », art. cit., p. 141.
-
[48]
L. COTTE, Traité de météorologie, op. cit., p. xxii.
-
[49]
Alfred ANGOT, « Étude sur les vendanges en France », Annales du bureau central météorologique de France, année 1883, tome 1, Paris, Gauthier-Villars, 1885, p. B. 37.
-
[50]
Christian PFISTER, Wetternachhersage, 500 jahre klimavariationen und naturkatastrophen 1496- 1995, Berne, Haupt, 1999.
-
[51]
Emmanuel LE ROY LADURIE, Valérie DAUX, Juerg LUTERBACHER, « Le climat de Bourgogne et d’ailleurs, XIVe-XXe siècle », Histoire, économie et société, 2006-3, p. 423.
-
[52]
Emmanuel GARNIER et alii. « Grapevine harvest dates in Besançon between 1525 and 1847 : Social outcomes or climatic evidence ? », Climatic Change (à paraître). E. GARNIER, Le renversement des saisons. Climats et sociétés en France (vers 1500-vers 1850), mémoire d’habilitation à diriger des recherches, université de Franche-Comté, 2009, p. 141-163.
-
[53]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques de l’année 1745 », HAS, année 1746, 1751, p. 72.
-
[54]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1741 », HAS, année 1742, 1745, p. 275-289.
-
[55]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1742 », HAS, année 1743, 1746, p. 267 « [en juin] Le vent et le froid n’avoient point empêché les hannetons de dévorer la verdure, les sycomores et les marronniers d’inde étoient comme en hiver, et les érables, les charmes et les pruniers avoient perdu une partie de leur feuilles ».
-
[56]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1744 », HAS, année 1745, 1749, p. 169 : « Cette façon de faire périr les chenilles est très expéditive, et nous auroit été très utile s’il n’y avoit pas eu une source inépuisable de ces insectes dans les bois du voisinage ».
-
[57]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1751 », HAS, année 1752, 1756, p. 373.
-
[58]
« Journal de Pierre Bordier (1748-1768) », Bulletin de la société archéologique du Vendômois, XL, 1901, p. 22-64 ; Jean VASSORT, Les papiers d’un laboureur au siècle des Lumières : Pierre Bordier une culture paysanne, Seyssel, Champ Vallon, 1999.
-
[59]
La date moyenne est le 5 octobre pour la période 1766-1774.
-
[60]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1763 », HAS, année 1764, 1767, p. 528 : « On a mesuré sur la rivière Essonne, auprès de Pithiviers, des glaçons de 22 pouces d’épaisseur, la gelée à pénétré en terre de 16 pouces et quoique les blés n’aient point été couverts de neige, il n’ont point souffert, parce que la gelée ayant été longue et sans pluie, le vent et le soleil ont tellement desséché le dessus de la terre que la poussière volait ; le dessous s’est aussi desséché au point que la terre étoit gercée comme dans les plus grandes sécheresses d’été ; la crête de quelques coqs et les pattes de plusieurs poules ont gelé ».
-
[61]
« Journal de Pierre Bordier… », op. cit., p. 127-128.
-
[62]
Archives municipales d’Angers (désormais AM Angers), BB 181.
-
[63]
A M Angers, série GG 464, « Le 14 janvier 1768, les glaces, au dégel emportèrent les ponts de Saumur, qui estoient en bois, à Nantes, à Ancenis, aux Ponts-de-Cé ; et comme il y eut alors une grande crue il en remonta des morceaux par la Maine, jusqu’à Bouchemaine ».
-
[64]
Jean NICOLAS, La rébellion française. Mouvements populaires et conscience sociale 1661-1789, Paris, Seuil, 2002, p. 252-253. ; H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1768 », HAS année 1769, Paris, Imprimerie Royale, 1772, p. 571.
-
[65]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1770 », HAS, année 1771, 1774, p. 815.
-
[66]
Denis LOTTIN, Recherches historiques sur la ville d’Orléans, tome 2, Orléans, Imprimerie Jacob, 1837, p. 323.
-
[67]
D. ROCHE, « Le temps de l’eau rare du Moyen Âge à l’époque moderne », Annales ESC, 39-2, 1984, p. 383-399.
-
[68]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1776 », HAS, année 1777, 1780, p. 616 : « La gelée a été considérable pendant ce mois (janvier), elle a pénétré en terre jusqu’à 22 pouces (59,6 cm) […] quelques personnes, entr’autres les mendians qui couchent dans les granges ont eu les pieds gelés ; d’autres sont morts le long des chemins, on en a même trouvé des morts dans les maisons ; on a entendu des chênes se fendre avec bruit ».
-
[69]
Histoire de la société royale de médecine, année 1779, Paris, Didot, 1782, p. 32.
-
[70]
La reconstruction du climat du centre de la France se poursuit avec le journal météorologique de Charles Pierre, riche paysan de Boësse : « Observations météorologiques et économiques faites à Boësses (Loiret) de 1764 à 1854, (d’après le journal de Charles Pierre) », La météorologie, XXVIII, 1873, p. 84-233.
1 La figure d’Henri-Louis Duhamel du Monceau est généralement associée à l’agronomie, bien plus qu’à la météorologie [1]. Sa contribution en ce domaine est pourtant rien moins que négligeable, à considérer ses observations botanico-météorologiques, relevées entre 1740 et 1780, que cet article se propose d’exploiter : celles-ci constituent une source de premier ordre dans l’étude du climat du centre de la France. Ce faisant, nous sommes conduits à suivre un savant au travail, en analysant comment l’observation climatique est intégrée à une démarche scientifique d’ensemble, dans le contexte des cercles académiques des Lumières.
DUHAMEL DU MONCEAU, UN « PHILOSOPHE CITOYEN »
2 À l’époque de ses premières observations botanico-météorologiques, Duhamel n’est pas encore le savant reconnu qu’il devint par la suite. Grâce à l’appui de Maurepas, il vient d’être nommé inspecteur général de la Marine et fait partie de l’Académie des sciences comme pensionnaire de la classe de botanique. Toutefois, il mène déjà de front des études sur des thèmes aussi divers que l’agronomie, la botanique et la marine.
3 Né en 1700, Duhamel est issu du milieu parlementaire parisien [2]. De son passage au collège d’Harcourt, il ne semble retenir qu’une seule chose : « c’est que les hommes en observant la Nature, avaient créé une science qu’on appelle la physique » [3]. Dès lors, il se destine à l’étude de cette science. Cependant, il répond à la volonté familiale et termine son droit à Orléans. De retour à Paris, il s’installe à proximité du Jardin du roi, seul endroit qui dispense un enseignement sur les sciences du végétal. Ces années de formation au contact des frères Jussieu, de Du Fay et d’autres botanistes sont déterminantes. Il approfondit ses connaissances en physique, s’intéresse à la physiologie végétale puis à la botanique et s’insère dans la sphère scientifique parisienne.
4 C’est en 1722 que la carrière de Duhamel débute. À cette époque, la culture du safran est en proie à une maladie appelée « la mort ». Fraîchement nommé au poste de professeur de botanique au Jardin du roi, Bernard Jussieu propose de confier à Duhamel le soin de trouver l’origine de la maladie [4]. Ce dernier constate que le safran n’est pas seul touché, et découvre l’existence d’un parasite qui se greffe aux racines des plantes. Ces recherches lui ouvrent les portes de l’Académie des sciences comme assistant chimiste en 1728. Ses connaissances en physiologie végétale sont rapidement repérées par Jean-Frédéric Phélypeaux de Maurepas, en charge de l’Académie des sciences et du Jardin du roi. Également secrétaire d’État à la Marine, il sollicite l’Académie en 1731 au sujet de la courbure du bois des vaisseaux. Duhamel se propose de mener les recherches. L’année suivante, il obtient les fonds nécessaires à la réalisation des expériences. Dès lors, sans statut officiel, il consacre l’essentiel de son temps à la marine « sur les ordres particuliers » de Maurepas [5]. Ses qualités d’expertise le conduisent à inspecter les ports du royaume afin de signaler les moindres négligences. En 1737, il se rend en Angleterre pour étudier les étuves utilisées dans la courbure des bois et l’année suivante, il se trouve dans le sud du royaume pour une tournée d’inspection. En 1739, il paie le prix fort du patronage. Le surintendant du Jardin du roi, Charles François de Cisternay du Fay meurt subitement et Duhamel du Monceau fait figure de successeur potentiel. Buffon obtient finalement le poste après avoir fait jouer ses nombreuses relations [6]. Maurepas l’assure de son soutien et lui propose le poste d’inspecteur général de la Marine pour le Ponant et le Levant resté vacant depuis 1711 [7]. Il collabore alors pleinement à l’action réformatrice du secrétaire d’État.
5 En contact avec les autorités royales, il accepte, à la demande du chancelier d’Aguesseau, de vérifier la traduction de l’ouvrage de Jethro Tull, qui esquisse le système de la nouvelle culture qui fait la part belle au froment. Pour ce faire, il multiplie les expériences afin de vérifier le contenu de l’ouvrage et l’application possible en France. Par ailleurs, ce « philosophe citoyen », comme il se définit lui-même, cherche à diffuser ces nouvelles idées vers un public plus large. LeTraité de la culture des terres paraît en 1750 et rencontre un franc succès. Le premier volume est rapidement suivi par cinq autres tomes qui contiennent des expériences rapportées par des correspondants de Duhamel. Au fil des onze années qu’a duré la publication, la pensée de Duhamel s’est affinée. Ainsi dans le tome six, il fait amende honorable en reconnaissant les vertus des engrais rejoignant ainsi l’avis d’Henry Pattullo [8]. La parution en 1772 des éléments d’agriculture vient consolider son apport à la nouvelle agriculture et son influence sur les physiocrates.
6 Le parcours de Duhamel s’inscrit dans le contexte d’une époque où le pouvoir royal, animé par la volonté de moderniser le royaume, manifeste un intérêt croissant pour les sciences. Bénéficiant d’une double fonction, à la Maison du roi et au secrétariat d’État à la Marine, Maurepas joue ici un rôle déterminant [9]. Attaché à ses services, Duhamel participe pleinement à l’émergence du monde des techniciens et des ingénieurs.
LES OISIVETÉS DE MONSIEUR DUHAMEL
7 À partir des années 1750, l’agronomie révèle Duhamel. Mais son travail au sein de l’Académie royale des sciences, au sein de la classe de botanique, souligne son intérêt pour les sciences naturelles. Entre 1728 et 1782, il publie près de 98 mémoires (document 1). De manière surprenante, la majeure partie des publications de ce savant connu pour son appétence envers l’agronomie porte sur les observations botanico-météorologiques. Mais il est vrai que son illustre aîné Réaumur fait preuve d’un même éclectisme [10].
8 La composition de la bibliothèque de Duhamel est également révélatrice. L’inventaire après décès dressé à partir du 28 août 1782 concerne ses deux résidences parisienne et beauceronne [11]. À Paris, quai d’Anjou, on trouve essentiellement des ouvrages scientifiques. Dans le domaine familial de Denainvilliers, une part plus importante est prise par les ouvrages religieux et juridiques. La pesée globale de l’inventaire fait ressortir la forte proportion, près de 50%, des ouvrages scientifiques (document 2).
Botanique 22 % Dictionnaires 4 %
Divers 13 %
Chimie 9 %
Mathématiques 9 %
Sciences naturelles
4 %
Pharmacie 9 %
Médecine 9 % Travaux académiques 22 %
Répartition thématique des ouvrages scientifiques dans la bibliothèque de Duhamel du Monceau
13 % Économie rurale
13 %
Chimie
13 %
Observations
Divers botanico-
9 % météorologiques
52 %
Répartition thématique des ouvrages scientifiques dans la bibliothèque de Duhamel du Monceau
9 La grande partie des ouvrages porte sur la botanique et les travaux académiques. Entendons par là les mémoires des Académies des sciences de Paris et de Saint-Pétersbourg. Parmi les ouvrages de botanique, on trouve l’intégrale de l’Histoire naturelle de Buffon mais aussi la classification de Tournefort (utilisée par Duhamel dans son ouvrage sur la physique des arbres). L’absence d’ouvrages de météorologie peut surprendre mais il est vrai que l’essentiel des publications sur le sujet se fait à travers les mémoires de l’Académie. Cette dernière a publié cent trois articles sur ce thème entre 1703 et 1788, auxquels viennent s’ajouter ceux de Duhamel. La seule absence notable est celle du Traité de météorologie de Louis Cotte, dont la préface souligne pourtant le rôle de Duhamel dans l’origine et la rédaction de l’ouvrage [13]. De surcroît, l’Académie avait confié son examen à Duhamel.
10 Les différentes missions effectuées au sein de la Marine peuvent expliquer la présence des ouvrages de médecine et de pharmacie. On sait que la faiblesse des ressources en hommes nécessite de combattre les épidémies au sein des navires et de lutter contre l’insalubrité dans les ports. Maurepas charge Duhamel de réorganiser l’hôpital de Rochefort en 1741. Situés à proximité des marais, militaires et malades sont confinés dans les mêmes espaces. En 1757, en pleine guerre de Sept Ans, l’amiral Dubois de la Motte, parti défendre le Canada, accoste à Brest avec, à bord de son navire, cinq cents malades. L’épidémie de typhus ne tarde pas à se répandre dans une partie de la Bretagne et marque le début d’une prise de conscience hygiéniste au sein de la Marine [14]. En 1759, Duhamel rend compte des moyens de se prémunir contre ces aléas. Il met en cause le manque de salubrité à bord comme cause principale des épidémies : eaux stagnantes, absence d’aération, cohabitation avec les animaux dans un espace trop restreint, etc. D’où la proposition d’équiper les navires de ventilateurs sur le modèle de ceux de Haller, afin de permettre un renouvellement de l’air. Duhamel propose aussi l’installation de robinets pour nettoyer fréquemment les cales des navires [15]. Dans l’éloge que lui rend la Société royale de médecine, le secrétaire perpétuel, Vicq d’Azyr, rappelle la précocité d’une telle étude en France [16].
11 Duhamel s’est donc intéressé à de nombreux domaines, l’agriculture, bien sûr, mais aussi la botanique, la physiologie végétale, la chimie et la sylviculture à travers ses fonctions d’inspecteur de la Marine. Surtout, le parcours de Duhamel ne peut se comprendre sans les multiples échanges qui se développent dans la sphère scientifique en général, et au sein de l’Académie des sciences en particulier, qui stimule la collaboration entre les savants [17].
UN HOMME D’INFLUENCE
Une entreprise familiale
12 Jusqu’en 1775, Henri-Louis a pu compter sur l’appui de son frère Alexandre. De deux ans son aîné, celui-ci s’est rapidement retiré à Denainvilliers après des études de droit. Marié à Marie d’Arfeuil en 1731, il a reçu en dot le domaine de Vrigny. Devenu veuf en 1750 et sans enfant, il se consacre pleinement aux travaux de son frère dans le domaine familial. Comme le souligne Collardeau dans l’épître qu’il lui dédie, il s’y « occupe journellement des expériences nécessaires aux travaux de l’académicien » [18]. Partageant avec son frère un goût immodéré pour les sciences du végétal, il a constitué un véritable jardin botanique où sont cultivées différentes espèces d’arbres tel le marronnier d’Inde. De plus, il fait construire de nombreuses serres pour les expériences. Au fil des années et du parcours académique de Duhamel, Denainvilliers devient un véritable laboratoire.
13 Resté célibataire, Duhamel prend soin de ses neveux qu’il considère comme ses héritiers. À partir des années 1750, deux d’entre eux prennent part aux travaux de leurs oncles, Auguste Denis Fougeroux de Bondaroy (1732-1789) et Armand Eustache François Fougeroux de Blaveau (1734-1788). Veuve en 1743, leur mère Angélique décide de s’installer à Denainvilliers. Les neveux s’intéressent rapidement à la botanique et à la physiologie végétale. En 1758, Fougeroux de Bondaroy est admis comme assistant botaniste à l’Académie des sciences. Il est associé aux recherches de son oncle qui lui confie plusieurs volumes de la Description des arts et métiers. Son parcours au sein de l’Académie est remarquable. Il devient pensionnaire de la classe de botanique en 1779 avant d’en prendre la direction en 1787. Condorcet suggère que Fougeroux de Bondary est resté sa vie durant dans l’ombre de son oncle et sous son joug scientifique. Privé de liberté dans l’exercice de la science, il aurait été condamné à suivre le chemin tracé par son oncle. Son frère Fougeroux de Blaveau fait carrière dans la Marine comme ingénieur. Pour autant, il reste dans la sphère de son oncle et devient l’un de ses correspondants à l’Académie en 1774.
de Denainvilliers
(1647-1714)
ép. Anne Trotier
(†1757)
Marie-Anne Alexandre Duhamel Henri-Louis Angélique
(1695-1709) de Denainvilliers Duhamel du (†1760)
(1697-1775) Monceau ép. Pierre Jacques
ép. Marie d’Arfeuil (1700-1782) Fogeroux
(†1750) de Blaveau (†1753)
Auguste-Pierre Alexandre-François Auguste-Denis Armand Eustache André Fougeroux
Fougeroux Fougeroux d’Angerville Fougeroux Fougeroux de Secval
de Grandlieu Auditeur de la chambre de Bondaroy de Blaveau (1739-1819) Capitaine
(†1764) des comptes, (1732-1889) (1734-1888) de vaisseaux, inspecteur
Officier Grand maître Membre Capitaine du des forges fonderies
de Marine des Eaux et Forêts de l’académie corps royal et manufactures
de Champagne des sciences du génie d’armes de la Marine
Le rôle de l’Académie dans les réseaux de Duhamel
14 L’Académie royale des sciences est bien sûr un lieu clé [19]. Pendant cinquante-quatre ans, Duhamel a participé à la vie de l’assemblée savante et a exercé à plusieurs reprises les fonctions de sous-directeur (1742, 1755 et 1767) et de directeur (1743, 1756 et 1768). Au moment où Duhamel y entre, le règlement de 1716 est venu corriger celui de 1699. Douze honoraires sont choisis par le pouvoir parmi les hauts fonctionnaires ou les grands courtisans. L’essentiel du corps scientifique se compose de vingt pensionnaires répartis entre les classes de géomètres, astronomes, mécaniciens, anatomistes, chimistes et botanistes. Ils ont l’obligation de résider à Paris et sont astreints à une présence régulière aux assemblées. Ils perçoivent chaque année une somme de 1500 livres, à laquelle peuvent s’ajouter des appointements pour la réalisation des expériences. Viennent compléter cette composition les vingt associés au statut intermédiaire avant l’accès à celui de pensionnaire et enfin douze adjoints qui sont attachés personnellement à un pensionnaire.
1 vice-président
20 pensionnaires
3parclasse
1 secrétaire
12 associés
2parclasse
1 trésorier
6 classes
12 associès non attachés Botanique
Géométrie 1 directeur
Astronomie
Mécanique
2 par classe Anatomie
12 adjoints Chimie 1 sous-directeur
15 Membre de la classe de chimie puis de botanique, Duhamel côtoie les mêmes personnes qu’au Jardin du roi. Parmi elles figurent les frères Jussieu et en particulier Bernard. Une réelle amitié lie les deux hommes et Bernard Jussieu se rend régulièrement à Denainvilliers pour participer aux expériences des frères Duhamel. Admis comme adjoint chimiste en 1728, Duhamel continue, après sa nomination dans la classe de botanique, de rédiger plusieurs mémoires avec Johann Gross. Son parcours académique a été jalonné par sa rivalité avec Buffon. Au début, les deux hommes sont associés par Maurepas pour mener une étude sur les bois de marine. La querelle entre les deux hommes éclate au moment où Buffon publie un mémoire sur le moyen d’accroître la solidité du bois [20]. Duhamel croit reconnaître ses propres conclusions et crie au plagiat. Dès lors, les relations entre les deux hommes sont définitivement rompues [21]. À l’inverse, il semble entretenir des liens privilégiés avec René Réaumur qui fait régulièrement appel à ses services. À la mort de celui-ci en 1757, l’Académie confie à Duhamel le soin de classer ses travaux et de reprendre la publication de la Description des arts et métiers.
16 L’institution a pour principale vocation la collecte et la diffusion des savoirs. Pour ce faire, elle dispose de correspondants dont le statut est officiellement fixé par le règlement de 1753, qui précise les modalités d’admission. L’obligation leur est faite de résider en dehors de Paris à une distance minimum de dix lieues (45,6 km). Le correspondant est rattaché à un pensionnaire avec lequel il doit correspondre régulièrement sous peine d’exclusion. Durant sa carrière, Duhamel a eu vingt-quatre correspondants. Parmi eux se trouvent majoritairement des botanistes, des naturalistes et des médecins à l’image de Gautier, médecin du roi à Québec. En 1757, il hérite à la mort de Réaumur de plusieurs correspondants dont le plus connu est le botaniste genevois Charles Bonnet avec lequel il entretient déjà une riche correspondance depuis plusieurs années [22]. Duhamel noue également des relations avec la nouvelle génération de scientifiques. Fils d’un de ses amis, Antoine-Laurent Lavoisier fait ses premiers pas à l’Académie sous sa protection [23]. Il en est de même pour Malesherbes, qui se lie avec Fougeroux de Bondaroy et se rend régulièrement au domaine de Denainvilliers pour consulter Duhamel. Gravitant ainsi dans la sphère des Jussieu et de Duhamel, Malesherbes se voit chargé de rédiger la riposte des botanistes de l’Académie en 1748. À cette date, Buffon publie son Histoire naturelle dans laquelle il ne mentionne pas l’apport de ses collègues académiciens. L’apologie des naturalistes ne sera finalement publiée qu’en 1798, après son décès [24].
17 Fort de son travail sur la nouvelle agriculture, Duhamel acquiert une solide réputation à l’échelle européenne. Parmi les savants avec lesquels il correspond se trouve Carl von Linné (document 5). Ce botaniste suédois reste célèbre pour sa classification des espèces parue en 1735. Elle s’attire rapidement les foudres des philosophes car elle est jugée fixiste. En 1751, il pose les fondements méthodologiques de la botanique [25]. Leur correspondance (une dizaine de lettres) s’étend entre 1757 et 1769. Au fil des années, la nature des échanges évolue. Au début, Duhamel lui fait part de l’envoi de ses différents ouvrages. Ainsi, Linné reçoit entre 1757 et 1761, La physique des arbres, le tome six de son Traité sur la culture des terres et le traité des semis et plantations. Pour faciliter ces envois, Duhamel a recours à Baër, aumônier de l’ambassadeur de Suède en France. Toutefois, la réception est souvent longue. Expédié en juin 1760, son Traité de la physique des arbres n’est reçu par Linné qu’au début de l’année suivante [26]. Cherchant à acclimater certaines espèces, Duhamel le remercie pour son envoi de graines d’Iris de Sibérie en 1768 [27]. Par la suite, l’échange épistolaire porte essentiellement sur l’évolution de la croissance des plantes.
Un réseau scientifique au siècle des Lumières : l’exemple de Duhamel du Monceau
Société royale des lettres
et des sciences de Norvège
Naturaliste 1773
Carl Von Linné
Royal Society
Naturaliste,
botaniste
John Mitchell
1757-1769
Royal Society
Roland Michel Barrin SRteopyahleSnoHciaelteys
OdfeficlaieGrdaleislsaoMnnaièrinree Chimiste, naturaliste
1739-1756
Jean-François Gaultier
Médecin à Québec Gerhard Friedrich Müller
1745-1756 Royal Society, Académie
des sciences
1761-1782
Duhamel
du Monceau
Charles Bonnet
Royal Society
1757-1782 Albrecht
Von Haller
Royal Society
Relation épistolaire connue
1757-1782 Période de correspondance
Un réseau scientifique au siècle des Lumières : l’exemple de Duhamel du Monceau
18 Les différents travaux entrepris dans son domaine de Denainvilliers et au sein de l’Académie royale des sciences ont donc permis à Duhamel de bénéficier très tôt d’un réseau scientifique d’envergure. En France, on l’a vu, la sphère duhamelienne comprend essentiellement sa famille et quelques grands noms comme les frères Jussieu ou encore René Réaumur. En Europe, c’est par la diffusion de son travail sur l’agriculture et la physiologie végétale qu’il se fait connaître de différents savants. Outre Linné, les plus illustres sont Albretch Von Haller, l’anatomiste suisse, et Stephan Hales, le physiologiste britannique.
DE LA PHYSIQUE À LA MÉTÉOROLOGIE
La nature chez Duhamel du Monceau
19 La nouvelle façon de voir et de se représenter la nature au XVIIIe siècle est perceptible à travers l’évolution de la définition du mot. À la fin du XVIIe siècle, elle est pour Furetière une merveille « où on ne reconnaisse le doigt de Dieu » [28]. Cette référence au paradigme physico-théologique demeure au siècle suivant, mais s’accompagne d’une volonté de recherche des faits [29]. Avec les encyclopédistes, la nature est désormais considérée comme un assemblage de toutes les choses créées, un système redevable d’explications. Mais il semble que Duhamel ne soit pas aussi sensible aux changements qui s’opèrent que son illustre cadet Buffon.
20 Dans la préface de son Traité sur les arbres fruitiers, il commence par ces mots : « Étudier les ouvrages du créateur, contempler l’admirable spectacle de la nature, est une occupation bien digne de l’homme qui pense » [30]. Ici s’exprime l’influence de l’abbé Pluche dont Le spectacle de la nature, paru en 1732, réaffirme le postulat de l’utilité de la nature où le principe physico-théologique s’inscrit dans une « positivation de la nature » [31]. Cette dernière est considérée pour ses richesses qu’il importe de connaître pour mieux les exploiter. Duhamel va au-delà de la conception traditionnelle de l’histoire naturelle fondée sur le simple inventaire des biens de la nature, en s’intéressant au fonctionnement des végétaux.
21 Par ailleurs, son académisme l’inscrit dans une tradition de « pédagogie de l’utilitarisme » [32]. Portée au rang de valeur morale dès la fin du XVIIe siècle, l’utilité publique ou l’utilité au public s’inscrit, chez Duhamel, dans la continuité de celle de la nature. Ainsi, il n’hésite pas à critiquer ouvertement les choix économiques effectués par les autorités royales et proclame, comme Quesnay, que l’agriculture est la seule vraie richesse du royaume [33]. Dans son ouvrage sur la conservation des grains, en 1753, puis dans le second tome des éléments d’agriculture, en 1762, il préconise l’établissement de magasins et la liberté du commerce pour remédier aux disettes et à l’appauvrissement du monde paysan [34].
22 Sa méthode repose sur l’accumulation des observations et des expérimentations. Pour ce faire, il dispose du domaine familial de Denainvilliers, exclusivement consacré à ses expériences. Dans un travail commun, Duhamel et Buffon ne font pas moins de dix expériences pour suggérer l’influence des racines dans la formation des cercles des aubiers et la croissance des arbres [35]. Au fil des années, l’étude des facteurs extérieurs prend une place importante et l’amène à prendre en considération l’importance des variations météorologiques.
L’œuvre météorologique de Duhamel
23 La météorologie ne devient une science à part entière qu’au XIXe siècle sous l’impulsion de Lamarck et de Le Verrier. Jusque-là considérée comme une branche de la physique, elle a bénéficié de la révolution scientifique du XVIIe siècle à travers la création des principaux instruments d’observations [36]. Au siècle suivant, le recours à la météorologie se limite essentiellement aux domaines de la physiologie végétale et de la médecine, comme l’illustre le travail de Duhamel.
24 Dans le premier résumé de ses observations faites en 1740, il annonce :
« Il est certain que les biens de la campagne, ces biens si nécessaires qu’on peut les regarder comme les seuls vrais biens, les bleds, les vins, les chanvres, les fruits, les bois, etc. ne viennent pas tous les ans aussi abondamment ni d’aussi bonne qualité, et l’on sait en général que ces variétés dépendent de la différente température des saisons […]. Or dans quantité de cas de cette espèce, il est souvent avantageux de prévoir » [37].
26 Tournées vers l’agriculture, les observations visent une meilleure connaissance de l’influence des variations atmosphériques saisonnières sur les végétaux. En accumulant les observations, Duhamel espère pouvoir prévoir le temps, afin de prendre des mesures préventives pour les récoltes.
27 Ses premiers contacts avec la météorologie se font dès 1729. Il s’intéresse aux effets de la pluie sur la croissance des végétaux et tente de développer une nouvelle façon de pratiquer l’arrosage [38]. En 1737, il rédige avec Buffon un mémoire sur les impacts du gel sur les végétaux [39]. Il tente d’analyser les effets des gelées hivernales et printanières sur la croissance des arbres qui, selon lui, sont plus pernicieuses que les hivers sibériens du type 1709 car plus fréquentes. Avec l’aide de son frère, il se lance ultérieurement dans des observations régulières en 1740 [40]. Reposant essentiellement sur la phénologie, la présentation s’enrichit en 1748 des données thermométriques et barométriques [41]. Ses relations avec René Réaumur lui ont permis de disposer d’outils fiables et étalonnés selon les normes de l’observatoire de Paris. Il relève chaque jour la température à huit heures du matin, midi et onze heures du soir. Tout au long des quarante années d’observation, les informations instrumentales ne cessent d’augmenter et prennent peu à peu le pas sur les données phénologiques. À partir de 1768, la pluviométrie vient s’ajouter au vaste corpus des données. Outre les données phénologiques et instrumentales, il dresse à chaque fin d’année la situation des cours d’eau et les différentes réserves en eau disponibles. Les données météorologiques collectées sont au nombre de douze mille (document 6).
Répartition thématique des données météorologiques de Duhamel du Monceau
Inondation Phénologie Moissons Vendanges Tempête Sécheresse Précipitations |
19
313
63
38
6 51 50 |
Gel Froid Températures Pluviométrie Orage Grêle Insectes Total |
14 24 11625 156 7 6 62 12434 |
Répartition thématique des données météorologiques de Duhamel du Monceau
28 Vient s’ajouter également un résumé des maladies et des épidémies. En 1745, 1746, 1747 et 1749, il rapporte les bilans d’Arnault de Nobleville, médecin du roi à Orléans et de Mulcaille, médecin à Pluviers. Cette méthode visant à comparer les observations médicales et météorologiques se développe dans ces mêmes années. Paul-Jacques Malouin établit des relations entre la météorologie et les maladies qui règnent à Paris dès 1746 [42]. La démarche empirique de ce Normand vise à accumuler les données nosologiques pour prévoir la diffusion des épidémies. Cette inclination pour les questions médicales est reprise à la fin du siècle par la Société royale de médecine : Vicq d’Azyr cherche à établir les relations entre climat et épidémies et diligente de nombreuses topographies médicales [43].
Présentation des observations botanico-météorologiques à partir de 1749 [44]
Présentation des observations botanico-météorologiques à partir de 1749 [44]
29 Duhamel a voulu créer un réseau en se servant de sa position au sein de l’Académie et de la Marine. En 1743, il demande à Gaultier, médecin du roi à Québec de collecter des données météorologiques. Les résultats furent publiés seulement pendant quatre années dans les mémoires de l’Académie des sciences [45]. En février 1776, il reçoit une lettre d’un nommé Joyeuse, commissaire de la Marine à Baudina. Relevés thermométriques à l’appui, il rapporte à Duhamel la rigueur de l’hiver [46].
30 S’il n’a pas réussi à pérenniser ce réseau d’observateurs, Duhamel voit néanmoins son travail unanimement reconnu. Dans son éloge de 1782, Condorcet écrit :
« Si la météorologie touche à une révolution, si elle devient ce qu’elle doit être, une des branches, à la fois les plus utiles et les plus curieuses des sciences physiques, on n’oubliera pas sans doute que M. du Hamel s’en occupa constamment » [47].
32 L’exercice auquel se soumet Condorcet tend bien sûr à présenter le défunt comme l’académicien idéal. Un des fondateurs de la météorologie moderne, Louis Cotte, rappelle que « cesavant a la gloire d’avoir défriché ce vaste champ » [48]. Autre écho concordant, l’abbé Rozier qui, en 1791, recommande dans son cours d’agriculture de faire des observations météorologiques en s’inspirant de celles de Duhamel pour adapter au mieux les cultures au milieu. Près d’un siècle plus tard, son œuvre météorologique est toujours reconnue, comme en témoigne le météorologue et père de la phénologie Alfred Angot, lorsqu’il recourt encore, en 1883, aux données de Duhamel dans son étude sur les vendanges en France [49].
LE CLIMAT BEAUCERON AU TEMPS DE DUHAMEL
33 Les premières observations de Duhamel du Monceau coïncident avec le terrible hiver 1740. Durant la période précédente 1720-1740, le climat du royaume connaît un optimum climatique, matrice d’étés chauds et d’hivers doux. À ce « beau XVIIIe siècle » succède une période de réchauffement entrecoupée de dégradations annuelles ou pluriannuelles [50]. Les observations faites par les frères Duhamel autorisent une approche quantitative et qualitative de l’ampleur des variations du climat à l’échelle de la Beauce.
Climat, récoltes et insectes
34 Les dates de récoltes sont depuis longtemps utilisées pour les reconstructions climatiques. Les bans de vendanges sont considérés par les agronomes et les climatologues actuels comme de bons indicateurs des conditions météorologiques des mois printaniers et estivaux [51]. Néanmoins, le début des récoltes ne s’explique pas toujours par le facteur météorologique [52]. En 1745, l’aspect peu engageant des vignes oblige les vignerons à envisager une vendange prématurée « craignant qu’il ne survint des gelées » à même d’hypothéquer définitivement toute production de vin [53]. Aux bans de vendanges peuvent s’ajouter, dans le cas de Denainvilliers, les données thermométriques et les dates de moissons (document 8).
Climat et récoltes à Denainvilliers entre 1741 et 1780
- 30,00 2,0
Date de récoltes (anomalie en jours)
1,5
- 20,00
1,0
- 10,00
0,5
0
0,0
10,00
- 0,5
20,00 -1,0
30,00 -1,5
- 2,0
40,00
1740
1742
1744
1746
1748
1750
1752
1754
1756
1758
1760
1762
1764
1766
1768
1770
1772
1774
1776
1778
1780
Températures (anomalie de degrés Celsius)
Froments Vendanges Températures (Avril-Août)
Climat et récoltes à Denainvilliers entre 1741 et 1780
35 Couramment, les données sont exprimées en anomalies. Cette méthode moyenne les séries (thermométrique, vendémiologique) afin d’éviter une surinterprétation des années remarquables. D’emblée, une forte corrélation entre les différents indicateurs se dégage. Des températures plus élevées se traduisent par une date de récolte plus précoce. Une lecture plus précise du graphique autorise la restitution de la variabilité du climat beauceron. Passé l’hiver rigoureux de 1740, les années suivantes s’inscrivent dans une phase d’optimum climatique. En 1741, la sécheresse s’installe dès janvier pour une durée de neuf mois [54]. À la fin de l’année, tout espoir de bonne récolte pour les blés, le fourrage et la vigne paraît compromis, tandis que les ovins sont victimes d’une épizootie. Cette absence d’humidité profite aux insectes qui prolifèrent. Dès 1742, Duhamel signale les ravages des hannetons sur les arbres qui « étaient comme en hiver » comprenons entièrement défeuillés [55]. L’année suivante, les chenilles prêtent main forte aux hannetons pour piller les arbres et les récoltes et en 1744, la situation s’aggrave. Les ravages débutent le 12 mai. Le 15, à l’aube, Duhamel et ses paysans brûlent les nids de chenilles, mais l’opération se révèle peu utile devant l’ampleur de l’invasion [56]. De fait, en septembre, nouvelle offensive sur les choux-fleurs. La baisse des températures des années 1750 interrompt, pour un temps, la présence des chenilles.
36 À la froidure de cette décennie s’ajoutent de fortes précipitations neigeuses et pluviales, causes de fréquentes inondations. En 1751, après un hiver blanc, Duhamel écrit : « Le débordement de la rivière est devenu considérable et il y avait 8,5 pieds d’eau (2,7 m) dans un puits où il n’y en voit que 3 pieds en 1734 (97,5 cm) » [57]. Au cours de cette année froide et humide, les récoltes sont tardives dans une bonne partie de l’Europe. Deux ans plus tard, après un hiver abondant en neige, la pluie se manifeste au début du printemps. À Denainvilliers, la récolte des seigles prend du retard et l’accalmie de septembre sauve les vendanges. Un peu plus au nord, à Lancé, les rivières débordent et les prés sont envahis, ce qui compromet la récolte de fourrages [58]. Au long de ces années, aucune grande épidémie ne touche la région de Denainvilliers, excepté entre 1752 et 1754 où plusieurs fièvres et gales se manifestent sans entraîner une mortalité accrue.
Les offensives hivernales
37 La période 1763-1772 est considérée comme une phase de péjoration des conditions météorologiques caractérisée par une chute des températures (document 9). De fait, les moyennes annuelles sont inférieures à celle de la période et les dates de vendanges sont en net recul [59].
Températures et précipitations à Denainvilliers
1,5 150
Anomalie de températures (en degrés Celsius)
1,0 100
0,5 50
0,0 0
- 0,5 -50
- 1,0 -100
1748
1750
1752
1754
1756
1758
1760
1762
1764
1766
1768
1770
1772
1774
1776
1778
1780
Anomalie de températures en millimètres)
- 1,5 -150
- 2,0 -200
Anomalie de précipitations Anomalie de températures
Températures et précipitations à Denainvilliers
38 Essentiellement liée aux conditions hivernales, cette baisse est illustrée par les frimas de 1763 et 1766. En 1763, pendant deux mois, le gel paralyse tout. À Denainvilliers, la terre est prise sur plus de 40 cm et l’Essonne sur 60 cm d’épaisseur [60]. Dans son journal, Pierre Bordier décrit les ravages du froid pour le vendômois :
« La gelée continue depuis la Notre-Dame-des-Avents, le 8 décembre, sans aucun dégel du tout ; la neige n’est pas encore toute fondue […] Depuis Noël jusqu’icy (22/01) il est mort sept personnes […] Les fortes gelées continuent toujours ; on compte que la terre est gelée de 13 à 14 pouces d’épaisseur » [61].
40 Le reste de l’année n’encourage pas plus les cultures. Le froid et la pluie se poursuivent tout au long de l’année gâtant définitivement les récoltes.
41 Trois ans plus tard, à Angers, le gel de la Maine immobilise les moulins et met en péril l’approvisionnement des habitants. Les pêcheurs s’inquiètent de ne pouvoir faire des réserves suffisantes à l’approche du carême. La situation est telle qu’à la fin du mois, à la requête du conseil de ville, l’évêque d’Angers autorise la consommation de viande jusqu’au jeudi de la Passion (27 mars) [62]. À Denainvilliers, la moyenne hivernale est la plus basse de la série avec -0,8 °C. La glace emprisonne l’Essonne sur 40 cm. L’année suivante les vendanges ont lieu le 12 octobre soit la date la plus tardive de la série. Sont en cause le froid et l’absence de précipitations, qui sont signalés par Duhamel dès le mois de mai. Cette situation dure jusqu’à l’hiver suivant où les cours d’eau affaiblis sont de nouveau prisonniers des glaces.
42 L’année suivante est contraire aux biens de la terre, les vendanges se font à la date la plus tardive du trend, le 12 octobre. Le froid du printemps et de l’été stoppe la croissance des végétaux. La sécheresse qui s’installe en août exaspère les paysans incapables d’abreuver leur bétail. À l’arrivée de l’hiver, le froid intense et le faible niveau des eaux concourent à l’embâcle des rivières. En janvier, une hausse des températures précipite la fonte des glaces et occasionne de nombreux dommages [63]. Au printemps, la menace de nouveaux désastres agricoles entraîne une inflation des prix du blé et des émeutes de subsistance éclatent [64]. Le paroxysme de cette période se situe en 1770. Le froid tout d’abord, avec des moyennes thermométriques saisonnières qui plongent d’environ deux degrés. Ensuite, les précipitations hivernales font déborder l’Essonne à deux reprises en février. La pluie persistante condamne les récoltes dès le début de l’été. En juillet, « la terre était imbibée d’eau et les chemins étaient aussi mauvais qu’en hiver » [65]. Ce contexte climatique général à l’ensemble du royaume provoque une nouvelle période de cherté. Localement, le tonneau de vin se vend soixante-dix livres de plus que l’année précédente. Pour conjurer la situation, les autorités municipales d’Orléans organisent une série de processions, en vain [66]. En novembre, les principaux cours d’eau de l’ouest de la France sortent de leur lit. La dernière offensive hivernale se manifeste en 1772 avec, à la clé, une nouvelle débâcle.
« Le temps de l’eau rare » [67]
43 La série pluviométrique de Denainvilliers, même restreinte à quelques années, met en évidence le déficit hydrique des premières années du règne de Louis XVI (document 10). À cette tendance vient s’ajouter une hausse notable des températures, exception faite de l’hiver 1776 qui tire à la baisse la moyenne annuelle. Il est souvent considéré par les témoins comme un rappel de celui de 1709. De fait, il obtient le triste record de longévité avec vingt-trois jours de gel continu [68]. Si cette intensité frappe les esprits, Duhamel retient cette année comme celle de la « grande sécheresse ». Dès avril, il signale que les sainfoins ne progressent pas. En août, les vignerons demandent de l’eau pour les raisins.
Répartition saisonnière des précipitations
Précipitations déficitaires Précipitations excédentaires
(anomalie en mm) (anomalie en mm)
40
20
0
- 20
40
- 60
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
DEF
MAM
JJA
SON
Répartition saisonnière des précipitations
44 Représentée sous forme d’anomalies, la répartition saisonnière des précipitations souligne la sévérité du phénomène qui porte essentiellement sur la saison estivale. Les conséquences sanitaires ne tardent pas à se manifester. En effet, les cours d’eau sont ralentis dans leur marche. La stagnation des eaux devient alors propice au développement de bactéries vectrices de maladies comme la dysenterie. L’année 1779 apparaît comme le paroxysme de ce désastre sanitaire. L’épidémie se répand dans tout le royaume et la société royale de médecine s’en fait l’écho : « L’épidémie dysentérique qui a régné durant l’automne de l’année 1779 dans la plupart des provinces du royaume […] a dévasté des cantons entiers dans la Bretagne, le Poitou, l’Anjou, le Maine, la Normandie, la Picardie, la Flandre » [69]. Dans la campagne beauceronne, elle fait son apparition au début du mois de septembre. Touchant aussi bien les villes que les campagnes, elle dépeuple plusieurs paroisses à raison de dix personnes par jour. La dernière année des observations de Duhamel s’achève sur les épidémies de fièvre qui touchent la région en juillet 1780. Leur propagation rapide prive les campagnes de bras et ralentit considérablement les travaux agricoles.
45 Dès ses débuts au Jardin du roi, Duhamel du Monceau a bénéficié de l’appui des frères Jussieu et s’est rapidement imposé auprès de Maurepas. Son admission à l’Académie a permis de souligner le rôle de cette institution dans la création de réseaux de sociabilité scientifique. De plus, sa relation avec Buffon autorise l’esquisse des dissensions au sein de l’institution face au mouvement philosophique. Ses fonctions dans la Marine l’ont conduit à s’intéresser à la salubrité et à l’hygiène à bord des vaisseaux. Savant complet, son concours à la naissance de la météorologie et à la connaissance du climat est indéniable. La singularité des données de Duhamel repose sur un registre d’informations variées et continues pour un même site et pendant quarante ans. Les relevés instrumentaux effectués dans son domaine de Denainvilliers constituent une exception française. Paris excepté, aucune série de ce type n’a encore été recueillie pour cette même période. Elle offre une reconstitution climatique fine qui met en évidence la nécessaire prise en compte d’une variabilité locale du climat, et appelle de nouveaux approfondissements [70].
Mots-clés éditeurs : Lumières, Beauce, climat, Académie royale des sciences, France, XVIII
Date de mise en ligne : 24/09/2010
https://doi.org/10.3917/rhmc.573.0070Notes
-
[1]
Andrée CORVOL (éd.), Duhamel du Monceau, un philosophe du siècle des Lumières, Actes du colloque du 12 mai 2000, académie d’Orléans, 2001 ; Bruno DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau, un savant exemplaire au siècle des Lumières, Luxembourg, Connaissance et mémoires européennes, 1999 ; Guy PUEYO, « Un initiateur de la météorologie agricole au XVIIIe siècle, Henri-Louis Duhamel du Monceau », Comptes rendus des séances de l’Académie d’agriculture de France, 1980-6, p. 944-952.
-
[2]
Jean BOISSIÈRE, « Duhamel du Monceau en son siècle », in A. CORVOL (éd.), Duhamel du Monceau, op. cit., p. 215-238.
-
[3]
Nicolas DE CONDORCET, « Éloge de M. Duhamel », Histoire de l’Académie des sciences (désormais HAS), année 1782, Paris, Imprimerie royale, 1785, p. 131.
-
[4]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit. p. 29-32.
-
[5]
Archives nationales (désormais AN), C793, États de services de Duhamel du Monceau dans la Marine, pièce n° 8, folio n° 3.
-
[6]
Henri NADAULT DE BUFFON, Correspondance inédite de Buffon, t. 1, Paris, Hachette, 1860, p. 32.
-
[7]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit. p. 71-72.
-
[8]
Henri-Louis DUHAMEL DU MONCEAU, Traité de la culture des terres, Paris, Guérin-Delatour, 1761, p. 176. Henry PATTULLO, Essai sur l’amélioration des terres, Paris, Durand, 1758.
-
[9]
Roland LAMONTAGNE, « L’influence de Maurepas sur les sciences : le botaniste Jean Prat à la Nouvelle-Orléans 1735-1746 », Revue d’histoire des sciences, 1996, vol. 49, numéro 1, p. 113-124.
-
[10]
En 1735, il écrit une Histoire des insectes qui en fait l’un des pionniers de l’entomologie, et la météorologie lui est redevable d’avoir inventé un thermomètre plus précis que les précédents ; Jean TORLAIS, Réaumur : un esprit encyclopédique en dehors de « L’Encyclopédie » : le biologiste, l’entomologiste, l’inventeur, le métallurgiste, le naturaliste, le physicien, Paris, Libraire scientifique et technique Albert Blanchard , 1961.
-
[11]
AN, MC ET/XII/706 (IAD dressé par maître Liénard).
-
[12]
Les Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences sont accessibles en ligne sur le site Gallica de la BnF.
-
[13]
Louis COTTE, Traité de météorologie, Paris, Imprimerie Royale, 1774.
-
[14]
Michel VERGE-FRANCESCHI, La marine française au XVIIIe siècle, Paris, SEDES, 1996, p. 276.
-
[15]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Moyens de conserver la santé aux équipages des vaisseaux, Paris, Guérin et Delatour, 1759.
-
[16]
Félix VICQ-D’AZYR, « Éloge de monsieur Duhamel », Histoire de la Société royale de médecine, année 1780 et 1781, Paris, Barrois, 1785, p. 131-155.
-
[17]
« Règlement ordonnée par le roi pour l’Académie royale des sciences », Histoire et mémoires de l’Académie royale des sciences, année 1699, Paris, Gabriel Martin, Jean-Baptiste Coignard, Louis Guerin, 1732 (1700), p. 6. Article XXII : « Quoique chaque académicien soit obligé de s’appliquer principalement à ce qui concerne la science particulière à laquelle il s’est adonné, tous néanmoins seront exhortés à étendre leurs recherches sur tout ce qui peut être d’utile ou de curieux dans les diverses parties des mathématiques, dans la différente conduite des arts et dans tout ce qui peut regarder quelque point de l’histoire naturelle, ou appartenir en quelque manière à la physique ».
-
[18]
Charles-Pierre COLLARDEAU, Épitre à monsieur Duhamel de Denainvilliers, Paris, Le Jay, 1774.
-
[19]
Ernest MAINDRON, L’Académie des sciences, Paris, Félix Alcan, 1888, p. 18 ; Éric BRIAN (éd.), Histoire et mémoires de l’Académie des sciences : guide de recherche, Paris, Tec-Doc, 1996 ; Christiane DEMEULENAERE-DOUYÈRE, Éric BRIAN (éd.), Règlement, usages et science dans la France de l’Absolutisme, Paris, Tec-Doc, 2002. Cf. également Roger HAHN, L’anatomie d’une institution scientifique. L’Académie des sciences de Paris, 1666-1803 (1971), Paris, éditions des archives contemporaines, 1993 ; É. BRIAN, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au XVIIIe siècle, Paris, Albin Michel, 1994.
-
[20]
Georges-Louis LECLERC DE BUFFON, « Moyen facile d’augmenter la solidité, la force et la durée du bois », Mémoires de l’Académie royale des sciences année 1738, Paris, Imprimerie royale, 1740.
-
[21]
H. NADAULT DE BUFFON, Correspondance…, op. cit., p. 498-499. ; Jacques ROGER, Buffon, Paris, Fayard, 1989, p. 66-67.
-
[22]
Claude MICHAUD, « Duhamel du Monceau et l’Europe », in A. CORVOL (éd), Duhamel du Monceau, un européen…, op. cit., p. 85-104. La liste des membres depuis la fondation est disponible sur le site internet de l’Académie des sciences.
-
[23]
B. DUPONT DE DINECHIN, Duhamel du Monceau…, op. cit., p. 317-318.
-
[24]
Chrétien-Guillaume DE LAMOIGNON DE MALESHERBES, Observations de Lamoigon-Malesherbes sur l’histoire naturelle générale et particulière de Buffon et Daubenton, deux tomes, Paris, Charles Pougens, 1798.
-
[25]
Carl VON LINNÉ, Philosophie botanique, Paris, Cailleau, 1788.
-
[26]
Lettre de Duhamel du Monceau à Carl von Linné, 29 novembre 1760, The Linnaean correspondence, lettre L2811 (linnaeus. c18.net).
-
[27]
Lettre de Duhamel du Monceau à Carl von Linné, 12 mars 1768, The Linnaean correspondence, lettre L4053 (linnaeus. c18.net).
-
[28]
Antoine FURETIÈRE, Dictionnaire universel contenant généralement tous les mots François, tome 2, La Haye, A. et R. Leers, 1690, p. 402.
-
[29]
« Observations sur les singularités de l’Histoire naturelle de la France », in Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences, année 1699…, op. cit., p. 23-24 ; Jean EHRARD, L’idée de nature dans la première moitié du XVIIIe siècle, Chambéry, Imprimeries réunies, 1963.
-
[30]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Traité des arbres fruitiers, tome 1, Paris, Saillant-Dessaint, 1768, p. i.
-
[31]
Andreas GIPPER, « La nature entre l’utilitarisme et esthétisation », in Françoise GEVREY (éd.), Écrire la nature au XVIIIe siècle, Paris, Presses de l’université Paris-Sorbonne, 2006, p. 38.
-
[32]
Daniel ROCHE, « Académies et académisme : le modèle français au XVIIIe siècle », Mélanges de l’école française de Rome, Italie et Méditerranée, 108-2, 1996, p. 643-658.
-
[33]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Éléments d’agriculture, tome 1, Paris, Guérin-Delatour, 1762.
-
[34]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, Traité de la conservation des grains et en particulier du froment, Paris, Delatour, 1768 (1753), p. XXIX ; Éléments d’agriculture, op. cit., tome 2, p. 396 : « La marche naturelle de la police pour bien régler l’administration des grains serait de permettre un commerce des grains très libre ».
-
[35]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, G.-L. LECLERC DE BUFFON, « De la cause de l’excentricité des couches ligneuses qu’on apperçoit quand on coupe horizontalement le Tronc d’un Arbre ; de l’inégalité d’épaisseur, & du différent nombre de ces couches, tant dans le bois formé que dans l’aubier », Histoire et mémoires de l’Académie royale des sciences année 1737, Paris, Imprimerie royale, 1740.
-
[36]
Alfred FIERRO, Histoire de la météorologie, Paris, Denoël, 1991, p. 63-75.
-
[37]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques pour l’année 1740 », Histoire et Mémoires de l’Académie royale des sciences 1741, Paris, Imprimerie royale, 1744, p. 149.
-
[38]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Recherches physiques de la cause du prompt accroissement des Plantes dans les temps de pluyes et plusieurs observations sur le sujet », Histoire de l’Académie royale des sciences avec les mémoires de mathématique et de physique pour la même année 1729, Paris, Imprimerie royale, 1731, p. 349-360.
-
[39]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, G.-L. LECLERC de BUFFON, « Observations des différents effets que produisent sur les végétaux, les grandes gelées d’hiver et les petites gelées du printemps », HAS (partie mémoires) pour l’année 1737, Paris, Imprimerie royale, 1740, p. 273-298.
-
[40]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques faites au château de Denainvilliers proche Pluviers en Gâtinois », HAS, années 1741 à 1780.
-
[41]
La phénologie étudie les effets des variations saisonnières sur la végétation. Elle est aujourd’hui considérée comme une discipline reine dans la reconstruction climatique.
-
[42]
Paul-Jacques MALOUIN, « Histoire des maladies épidémiques observées à Paris en même temps que les différentes températures de l’air », Mémoires de l’Académie royale des sciences, années 1746 à 1754.
-
[43]
Sabine BARLES, La ville délétère. Médecins et ingénieurs dans l’espace urbain XVIIIe-XIXe siècle, Seyssel, Champ Vallon, 1999, p. 23-26.
-
[44]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques faites au château de Denainvilliers, proche Pluviers en Gâtinois, pendant l’année 1748 », Histoires de l’Académie royale des sciences avec les mémoires de mathématique et de physique pour la même année 1749, Paris, Imprimerie royale, 1753, p. 244.
-
[45]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Extrait des observations botanico-météorologiques faites à Québec par M. Gautier, médecin du roi au Canada », Mémoires de l’Académie des sciences, pour les années 1744 à 1750.
-
[46]
« Extrait d’une lettre de M. Joyeuse l’Ainé commissaire de la Marine à M. Duhamel du Monceau », Antoine LAVOISIER, Œuvres de Lavoisier, tome 3 : Mémoires et rapports sur divers sujets de chimie et de physique pures ou appliquées à l’histoire naturelle générale et à l’hygiène publique, Paris, Imprimerie impériale, 1865, p. 420.
-
[47]
N. DE CONDORCET, « Éloge de M. Duhamel », art. cit., p. 141.
-
[48]
L. COTTE, Traité de météorologie, op. cit., p. xxii.
-
[49]
Alfred ANGOT, « Étude sur les vendanges en France », Annales du bureau central météorologique de France, année 1883, tome 1, Paris, Gauthier-Villars, 1885, p. B. 37.
-
[50]
Christian PFISTER, Wetternachhersage, 500 jahre klimavariationen und naturkatastrophen 1496- 1995, Berne, Haupt, 1999.
-
[51]
Emmanuel LE ROY LADURIE, Valérie DAUX, Juerg LUTERBACHER, « Le climat de Bourgogne et d’ailleurs, XIVe-XXe siècle », Histoire, économie et société, 2006-3, p. 423.
-
[52]
Emmanuel GARNIER et alii. « Grapevine harvest dates in Besançon between 1525 and 1847 : Social outcomes or climatic evidence ? », Climatic Change (à paraître). E. GARNIER, Le renversement des saisons. Climats et sociétés en France (vers 1500-vers 1850), mémoire d’habilitation à diriger des recherches, université de Franche-Comté, 2009, p. 141-163.
-
[53]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations botanico-météorologiques de l’année 1745 », HAS, année 1746, 1751, p. 72.
-
[54]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1741 », HAS, année 1742, 1745, p. 275-289.
-
[55]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1742 », HAS, année 1743, 1746, p. 267 « [en juin] Le vent et le froid n’avoient point empêché les hannetons de dévorer la verdure, les sycomores et les marronniers d’inde étoient comme en hiver, et les érables, les charmes et les pruniers avoient perdu une partie de leur feuilles ».
-
[56]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1744 », HAS, année 1745, 1749, p. 169 : « Cette façon de faire périr les chenilles est très expéditive, et nous auroit été très utile s’il n’y avoit pas eu une source inépuisable de ces insectes dans les bois du voisinage ».
-
[57]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1751 », HAS, année 1752, 1756, p. 373.
-
[58]
« Journal de Pierre Bordier (1748-1768) », Bulletin de la société archéologique du Vendômois, XL, 1901, p. 22-64 ; Jean VASSORT, Les papiers d’un laboureur au siècle des Lumières : Pierre Bordier une culture paysanne, Seyssel, Champ Vallon, 1999.
-
[59]
La date moyenne est le 5 octobre pour la période 1766-1774.
-
[60]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1763 », HAS, année 1764, 1767, p. 528 : « On a mesuré sur la rivière Essonne, auprès de Pithiviers, des glaçons de 22 pouces d’épaisseur, la gelée à pénétré en terre de 16 pouces et quoique les blés n’aient point été couverts de neige, il n’ont point souffert, parce que la gelée ayant été longue et sans pluie, le vent et le soleil ont tellement desséché le dessus de la terre que la poussière volait ; le dessous s’est aussi desséché au point que la terre étoit gercée comme dans les plus grandes sécheresses d’été ; la crête de quelques coqs et les pattes de plusieurs poules ont gelé ».
-
[61]
« Journal de Pierre Bordier… », op. cit., p. 127-128.
-
[62]
Archives municipales d’Angers (désormais AM Angers), BB 181.
-
[63]
A M Angers, série GG 464, « Le 14 janvier 1768, les glaces, au dégel emportèrent les ponts de Saumur, qui estoient en bois, à Nantes, à Ancenis, aux Ponts-de-Cé ; et comme il y eut alors une grande crue il en remonta des morceaux par la Maine, jusqu’à Bouchemaine ».
-
[64]
Jean NICOLAS, La rébellion française. Mouvements populaires et conscience sociale 1661-1789, Paris, Seuil, 2002, p. 252-253. ; H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1768 », HAS année 1769, Paris, Imprimerie Royale, 1772, p. 571.
-
[65]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1770 », HAS, année 1771, 1774, p. 815.
-
[66]
Denis LOTTIN, Recherches historiques sur la ville d’Orléans, tome 2, Orléans, Imprimerie Jacob, 1837, p. 323.
-
[67]
D. ROCHE, « Le temps de l’eau rare du Moyen Âge à l’époque moderne », Annales ESC, 39-2, 1984, p. 383-399.
-
[68]
H.-L. DUHAMEL DU MONCEAU, « Observations… année 1776 », HAS, année 1777, 1780, p. 616 : « La gelée a été considérable pendant ce mois (janvier), elle a pénétré en terre jusqu’à 22 pouces (59,6 cm) […] quelques personnes, entr’autres les mendians qui couchent dans les granges ont eu les pieds gelés ; d’autres sont morts le long des chemins, on en a même trouvé des morts dans les maisons ; on a entendu des chênes se fendre avec bruit ».
-
[69]
Histoire de la société royale de médecine, année 1779, Paris, Didot, 1782, p. 32.
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[70]
La reconstruction du climat du centre de la France se poursuit avec le journal météorologique de Charles Pierre, riche paysan de Boësse : « Observations météorologiques et économiques faites à Boësses (Loiret) de 1764 à 1854, (d’après le journal de Charles Pierre) », La météorologie, XXVIII, 1873, p. 84-233.