Notes
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Université de Leyde.
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[1]
Notre édition de référence? : Rabelais, Œuvres complètes, éd. Mireille Huchon avec la collaboration de François Moreau, Paris, Gallimard, « ?Bibliothèque de La Pléiade? », 1994. Nous tenons à remercier Aurore Evain pour sa lecture critique d’une première version du présent article.
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[2]
Voir aussi Luc XIII 24? : « ?Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite? ».
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[3]
La Sainte Bible, trad. sous la dir. de l’École biblique de Jérusalem, Paris, Desclée De Brouwer, 1974.
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[4]
Voir Erwin Panofsky, Hercules am Scheidewege, Leipzig, BG Teubner, 1930, p. 64.
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[5]
Voir Stéphan Geonget, « ?Le “Y gregoys” de Rabelais? », dans Jean Céard et Marie-Luce Demonet (éds.), Rabelais et la question du sens, Genève, Droz, 2011 (= Études Rabelaisiennes?49), pp.?127-144.
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[6]
Voir la reproduction de cette page de titre dans Het zal koud zijn in’t water als’t vriest. Zestiende-eeuwse parodieën op gedrukte jaarvoorspellingen, éd. Hinke van Kampen, Herman Pleij e.a., La Haye, Martinus Nijhoff, 1980, p. 106.
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[7]
Voir la notice de Mireille Huchon dans son édition de Rabelais, p. 1070. Sur la polyvalence de l’Hercule Gaulois, voir Francis Goyet, « ?D’Hercule à Pantagruel? : l’ambivalence des géants? », dans Michel Simonin (éd.), Rabelais pour le xxie?siècle […], Genève, Droz, 1998 (= Études Rabelaisiennes?33), pp. 177-190.
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[8]
Voir, pour les topoi obligatoires de la rhétorique épidictique, Paul J.?Smith, Dispositio. Problematic Ordering in French Renaissance Literature, Leyde-Boston, Brill, 2007, pp. 25-42. Pour la bonne compréhension de notre argumentation, rappelons la place quelque peu anachronique du Gargantua dans l’œuvre de Rabelais? : ce livre portant sur le père Gargantua arrive en deuxième (1535), et suit donc le premier livre, consacré au fils Pantagruel (1532).
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[9]
Claude Gaignebet, À plus haut sens. L’ésotérisme spirituel et charnel de Rabelais, Paris, Maisonneuve et Larose, 2 tomes, 1986 (t. 1, p. 448?; c’est Gaignebet qui souligne).
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[10]
Gaignebet (o.c.) a été le premier à souligner l’importance de la Saint-Blasius dans le Gargantua.
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[11]
Strabon cité et traduit par Jean Plattard dans Rabelais, Œuvres, éd. Abel Lefranc e.a., Paris, Champion, t. II, 1913, p. 368, n. 40.
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[12]
Voir Lazare Sainéan, « ?Jean Thénaud et Rabelais? », Revue des Études Rabelaisiennes 8 (1910), pp. 350-360.
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[13]
Thenaud cité par Jean Plattard dans Rabelais, Œuvres, éd. Lefranc, o.c., t. II, p. 368, n. 41.
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[14]
André Thevet, Cosmographie de Levant, éd. Frank Lestringant, Genève, Droz, 1985, p. 115. Sur les sources de Thevet, voir la note de Lestringant (p. 290).
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[15]
Strabon, Géographie, chapitre XVII, cité par http://www.mediterranees.net/geographie/strabon/XVII-1.html (date de consultation? : 6 avril 2011).
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[16]
Pour d’autres exemples de l’anthropomorphisme géographique de Rabelais et de ses contemporains, voir Frank Lestringant, « ?Paysages anthropomorphes à la Renaissance? », dans Dominique de Courcelles (éd.), Nature et paysages. L’émergence d’une nouvelle subjectivité à la Renaissance, Paris, École des chartes, 2006, pp. 261-279.
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[17]
Rabelais se réfère au même passage chez Platon dans le Prologue du Gargantua? : « ?Mais veistes vous onques chien rencontrant quelque os medulare? ? C’est comme dict Platon. Lib. II. De rep. la beste du monde plus philosophe? » (p. 6).
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[18]
Plutarque, Isis et Osiris [= Œuvres morales, t. V, 2e partie], éd. et trad. Christian Froidefond, Paris, Les Belles Lettres, 1988, p. 186.
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[19]
Gaignebet (o.c., p. 176) a raison de renvoyer à l’interprétation de M. A. Screech, qui voit dans le chien de Tobie, l’emblème de la thématique du mariage sous-tendant le Tiers Livre. Voir M. A. Screech, The Rabelaisian Marriage. Aspects of Rabelais’s Religion, Ethics and Comic Philosophy, Londres, Edward Arnold, 1958, pp. 46-47.
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[20]
Nous nous référons à Jan Buisman, Duizend jaar weer, wind en water in de Lage Landen, t. III (1450-1575), Franeker, Van Wijnen, 1998. Pour les mois de juillet et août 1531, voir Buisman, p. 416?; pour l’automne 1531, voir ibid., p. 419?; pour l’été 1532, voir ibid., p. 422. Pour l’année?1532, Buisman cite le journal parisien de Pierre Driart, qui s’étonne de la longue période de chaleur (de mai à novembre), et des meilleures vendanges depuis trente ans qui en ont résulté.
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[21]
Jean Plattard, L’Œuvre de Rabelais (sources, invention et composition), Paris, Champion, 1910, pp. 243-245.
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[22]
Plutarque, ouvrage cité, p. 181.
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[23]
Plutarque, ouvrage cité, p. 182.
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[24]
Nous suivons ici les références à la Bible données par Mireille Huchon dans son édition.
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[25]
Cette réflexion sur le signe se situe dans une réflexion plus large sur le symbolisme du blanc et du bleu. Précisons qu’au xvie?siècle, ces deux couleurs ne sont pas encore liées aux Nils Blanc et Bleu.
1Dans sa description de la naissance de Gargantua, Rabelais, adoptant les principes rhétoriques de l’evidentia, invite le lecteur à visualiser la scène décrite. Comme dans d’autres passages comiques du Gargantua (nous pensons ici aux scènes de bataille où est impliqué frère Jean), il en accentue le caractère absurde par la précision du vocabulaire médical :
Mais une analyse plus attentive de cette description nous amène à dépasser le simple cadre médical et à l’interpréter selon plusieurs autres cadres référentiels, conformément à la polyvalence textuelle propre à l’écriture rabelaisienne. C’est l’étude de cette polyvalence qui sera le sujet du présent article.Par cest inconvenient feurent au dessus relaschez les cotyledons de la matrice, par lesquelz sursaulta l’enfant, et entra en la vene creuse, et gravant par le diaphragme jusques au dessus des espaules (où ladicte vene se part en deux) print son chemin à gauche, et sortit par l’aureille senestre [1].
Gargantua à la croisée des chemins
2Dans un premier temps, si nous observons de plus près les verbes employés, une première remarque s’impose : les formes verbales utilisées – entra, gravant, print son chemin, sortit – sont intentionnelles. L’enfant, arrivé à la bifurcation de la veine « creuse » de sa mère, peut choisir entre la voie de droite et celle de gauche. L’expression print son chemin implique qu’il s’agit d’un choix délibéré : l’enfant opte intentionnellement pour le chemin qui mène à la vie, c’est-à-dire à sa propre naissance.
3La mise en scène du choix entre deux voies, l’une menant à la vie, l’autre à la mort, s’insère dans une double tradition biblique et mythologique. Le thème biblique des deux chemins – via vitae et via mortis – se rencontre, entre autres, dans Matthieu VII 13, où il côtoie celui de la porte étroite [2] :
Entrez par la porte étroite. Large, en effet, et spacieux est le chemin qui mène à la perdition, et il en est beaucoup qui s’y engagent ; mais étroite est la porte et resserré le chemin qui mène à la Vie, et il en est peu qui le trouvent [3].
5Cette thématique est en rapport avec le symbolisme antique du « verlandschaftlichte Y [4] ». Le tronc commun de cette lettre pythagorique symbolise la jeunesse : sa bifurcation évoque le choix que l’homme doit faire entre la voie de gauche, menant à Voluptas (la typographie de la lettre indique que c’est la voie large), et celle de droite, qui conduit à Virtus : c’est la voie étroite. Cette allégorie est intimement liée au thème du choix d’Hercule : Hercule, au seuil de l’âge adulte, doit faire le choix entre le Bien et le Mal – décision qui sera déterminante pour le reste de sa vie. Erwin Panofsky a montré que ces deux thèmes, à l’époque de la Renaissance, se fondent en un seul, qui jouit d’une grande popularité tant littéraire que picturale – et qui a fourni le titre à sa célèbre étude : Hercules am Scheidewege?–, à savoir Hercule in bivio, autrement dit à la croisée des chemins.
6Rabelais a sans aucun doute connu ce topos [5], notamment à travers les magnifiques illustrations de Champfleury (1529) de Geoffroy Tory, livre où il a puisé son inspiration pour d’autres épisodes, parmi lesquels celui de l’Écolier limousin. En outre, il se réfère au symbolisme de la lettre pythagorique dans son Quart Livre : sous l’attaque d’un terrible monstre marin, la flotte de Pantagruel se range en forme de Y, afin de faire face au danger imminent. Par cet alignement, Rabelais suggère que les Pantagruélistes doivent faire le choix crucial entre le combat et la fuite. Dans ce contexte, on notera également que la page de titre pour la traduction néerlandaise anonyme de la Pantagruéline Pronostication de 1561 représente un personnage endormi (peut-être Alcofrybas, ou bien Pantagruel, ou encore Hercule ? voire un lecteur virtuel ?) visualisant en songe ce même Y, symbole sans doute des choix à faire [6] – ce en quoi la lecture de cette pronostication « certaine, veritable, et infaillible » (p. 923) sera bien sûr de grande utilité…
7Pour en revenir au choix que fait Gargantua à la bifurcation de la veine creuse de sa mère, on observera que cette scène présente, au premier abord, une grande dissemblance avec l’image traditionnelle du Hercules in bivio. Car, contrairement à Hercule, l’enfant semble choisir le mauvais chemin, celui de gauche. Cependant, comme la mère, pendant l’accouchement, est couchée sur le dos, la réception de la scène fonctionne en miroir : son oreille gauche est en fait du côté droit, tant pour les sages-femmes présentes que pour le narrateur/focalisateur. Le bébé fait donc le même choix qu’Hercule, mais à une différence près, qui est de taille : ce choix intervient avant même la naissance, ce qui implique, dans une sorte de clin d’œil parodique, que Gargantua, à l’âge prénatal, est déjà supérieur au héros mythologique, qui ne prendra sa décision qu’au terme de son adolescence.
8Cette référence ludique à Hercule n’est pas un cas isolé dans le Gargantua. Dans ce même registre des récits de naissances extraordinaires, le narrateur évoque la conception miraculeuse d’Hercule : « À pareille raison Jupiter feist durer XLVIII. heures la nuyct qu’il coucha avecques Alcmene. Car en moins de temps n’eust il peu forger Hercules qui nettoia le monde de monstres et tyrans » (p. 15). Quelques pages plus tôt, ce sont les énigmatiques Fanfreluches antidotées, ouvrant le Gargantua, qui mentionnent un autre Hercule : « En cest arrest le courbeau fut pelé / Par Hercules : qui venoit de Libye » (p. 12). Quoique la signification précise de cette allusion à l’Hercule libyen reste obscure, tout comme d’ailleurs le reste du poème, elle n’aura pas échappé au lecteur contemporain, d’autant qu’au xvie siècle, cet Hercule a acquis un symbolisme politique : l’Hercule de Libye (ou d’Égypte), connu sous le nom d’Hercule Gaulois, est perçu comme l’ancêtre des Rois de France [7]. Rabelais, ayant peut-être à l’esprit les illustrations de ce thème par Tory, s’en souviendra dans sa Lettre à Odet de Chastillon (1552), où il qualifie son protecteur d’« un second Hercules Gaulloys » (p. 520).
9L’épisode de la naissance de Gargantua nous renvoie donc à la veine héroï-comique de Rabelais, qui consiste à souligner la supériorité de ses héros par rapport aux héros mythologiques, et à Hercule en particulier. En cela, Gargantua ressemble à Pantagruel bébé, qui lui aussi l’emportait sur Hercule :
Et n’estoit rien Hercules qui estant au berseau tua les deux serpens : car lesdictz serpens estoyent bien petitz et fragiles. Mais Pantagruel estant encores au berseau feist cas bien espouventables.
11Cet exemple montre que la figure de Gargantua est calquée sur celle de Pantagruel, tout comme le livre entier de Gargantua, dans sa structure biographique et épidictique, peut être considéré comme une réécriture du Pantagruel [8]. Cette réécriture est loin, cependant, d’être une pâle copie : si elle consiste à reprendre les principaux thèmes du premier livre, elle en modifie aussi en profondeur le contenu – le plus souvent au moyen d’amplifications et/ou de renversements thématiques. Citons comme exemple la longue généalogie de Pantagruel, qui ouvre le livre, selon la topique de la rhétorique épidictique. Si le Gargantua mentionne en effet le genus comme topos obligé, c’est pour mieux le rejeter aussitôt, dans un renvoi ironique :
Je vous remectz à la grande chronicque Pantagrueline recoignoiste la genealogie et antiquité dont nous est venu Gargantua […] et ne vous faschera, si pour le present je m’en deporte.
13Ce même procédé est utilisé pour le deuxième topos incontournable, celui de la genesis, à savoir la naissance du héros et les circonstances extraordinaires dans lesquelles elle se produit.
Les crues du Nil et la naissance du héros
14La genesis de Pantagruel se fait sous le signe du feu. Il est né dans une période de sécheresse extrême, causée par une anomalie climatique mondiale, dont l’origine se trouve en Afrique :
Vous noterez qu’en icelle année feut une seicheresse tant grande en tout le pays de Africque, que passerent.XXXVI. moys, troys sepmaines, quatre jours, treze heures, et quelque peu dadvantaige sans pluye, avec chaleur de soleil si vehemente que toute la terre en estoit aride.
16L’explication de ce phénomène donne lieu à une parodie de débat savant où le narrateur fait référence au Nil :
Les aultres gens sçavans disoyent que c’estoit pluye des Antipodes : comme Sénèque narre au quart livre questionum naturalium, parlant de l’origine et source du Nil.
18Ces allusions à l’Afrique et au Nil, dans la première édition de Pantagruel (1532), ne sont pas sans importance. Dans l’édition de 1542, Rabelais ajoute, dans le même contexte, une autre de ces références, qui combine la naissance du géant avec les thèmes de la soif et de la jeunesse d’Hercule : pour expliquer l’origine de la uia lactea, il renvoie aux « plus Huppez poetes [qui] disent estre la part où tomba le laict de Juno, lors qu’elle allaicta Hercules » (p. 223).
19Ces passages ont amené l’anthropologue Claude Gaignebet à voir un rapport non seulement entre Pantagruel et Hercule, mais aussi entre la naissance de Pantagruel (dont il a calculé la date précise : le 25 juillet) et la canicule, qui coïncide avec une période d’abondance en Égypte, marquée par la saison des inondations du Nil : « Au 25 juillet de la Grande Année, lors de la Canicule Annuelle, les eaux du Nil et le fleuve lacté qui lui est parallèle sauvent ou délient l’Univers que menace l’excès de chaleur [9]. » Or, cette association de sujets a été reprise et modifiée par Rabelais en 1535 pour décrire la naissance de Gargantua, en combinant le thème du choix d’Hercule avec celui de l’Égypte.
20Cependant, avant de continuer dans cette direction, constatons tout d’abord la grande dissemblance de thème entre les naissances des deux géants rabelaisiens. Si celle de Pantagruel se fait sous le signe du feu, de la détresse et de la soif, celle de Gargantua est marquée au contraire par une allégresse générale et des scènes de beuverie. Contrairement à Pantagruel, Gargantua, dont le narrateur souligne qu’il est de nature « merveilleusement phlegmaticque » (p. 23), est lié à l’élément aquatique. Une autre modification apportée à la genesis du Pantagruel tient au fait que, dans le Gargantua, ce topos de la naissance est placé dans le contexte du carnaval, que Rabelais fait coïncider avec la fête de saint Blasius, le 3 février [10]. Malgré ces dissemblances de taille entre les deux naissances, celles-ci se ressemblent par l’évocation de la thématique du Nil. En effet, Rabelais reprend la thématique du Nil pour la transposer de la genesis du premier livre à celle du livre suivant, en prenant soin de mettre explicitement la fécondité du Nil en rapport avec celle de la femme. Rabelais le fait par la bouche de Gargantua, qui, répondant à une remarque de frère Jean, selon qui l’ombre du clocher d’une abbaye est toujours féconde, observe :
C’est (dist Gargantua) comme l’eau du Nile en Egypte, si vous croyez Strabo, et Pline lib. VII. chap. III. advise que c’est de la miche, des habitz et des corps.
22Strabon nous apprend en effet que « Le Nil est plus fertile et ses productions sont plus grandes que celles des autres fleuves […] Quant aux femmes égyptiennes, il arrive qu’elles mettent au monde quatre enfants à la fois [11] » – information reprise par les cosmographes contemporains de Rabelais, parmi lesquels son ami Jean Thenaud. On sait d’ailleurs avec certitude que Rabelais a lu son Voyage d’oultre mer (1530) [12], où il est écrit : « L’eaue de cestuy fleuve féconde toutes choses […] et les femmes selon Bocace, elle prépare les stériles à fécondité [13]. » Même observation chez André Thevet, qui précise :
Les femmes y sont tant fecondes, qu’elles engendrent communement trois, & quatre, & bien souvent huit enfans : & encore qu’ils naissent au huitieme mois, ils vivent : ce qu’aucuns attribuent à la bonté du Nil [14].
24Notons que la référence de Gargantua à Pline coïncide avec celle alléguée par le narrateur pour argumenter, de manière comique, la plausibilité de la naissance miraculeuse de Gargantua :
Mais vous seriez bien dadvantaige esbahys et estonnez, si je vous expousoys presentement tout le chapitre de Pline, auquel parle des enfantemens estranges, et contre nature. Et toutesfoys je ne suis poinct menteur asseuré comme il a esté. Lisez le septieme de sa naturelle histoire, capi. III. et ne m’en tabustez plus l’entendement.
26On relèvera cependant les importantes modifications que Rabelais a apportées à cette cosmographie antique : Gargamelle accouche non pas d’une multitude d’enfants, mais d’un seul géant, et cela non pas au terme d’une grossesse prématurée de huit mois, mais suite à une gestation beaucoup moins naturelle de onze mois.
27Outre les références liées à cette naissance miraculeuse, intéressons-nous aux autres motifs égyptiens présents dans l’épisode de la naissance de Gargantua, et considérons à nouveau « le choix d’Hercule » auquel il est confronté avant sa naissance proprement dite. Une lecture attentive du texte nous fait aussitôt songer à la description du Nil, telle que Rabelais a pu la lire chez Strabon :
À partir des frontières de l’Éthiopie, le Nil coule droit au nord jusqu’au lieu appelé Delta. Au-dessous de ce point, comme un arbre dont le sommet se bifurque (pour nous servir d’une expression de Platon), il se divise en deux branches et se trouve faire du Delta en quelque sorte le sommet d’un triangle, les deux côtés du triangle étant figurés par ces deux branches qui aboutissent à la mer [15].
29Les cartes de l’Égypte contenues dans les cosmographies de l’époque sont une bonne retranscription de cette description de Strabon. Avec un peu d’imagination, nous pouvons, du reste, y retrouver certaines pages de l’atlas anatomique de Vésale (1543), et plus particulièrement son illustration du système artériel du corps humain.
30Une telle évocation géographique du corps humain est loin d’être unique dans l’œuvre de Rabelais. On se rappelle le passage où Panurge compare sa barbe à une mappemonde : « Voy là Afrique. Icy est la montaigne de la Lune. Voydz tu les paluz du Nil ? » (p. 238). Ces précisions, qui prouvent que Rabelais connaissait bien les mappemondes de l’époque, et surtout la carte de l’Égypte, témoignent de ce regard anthropomorphique que lui et ses contemporains portaient [16].
31Conséquence logique de ce télescopage thématique entre le choix d’Hercule et l’itinéraire du Nil : dans les deux cas, le côté droit, l’orient, renvoie à la vie, alors que le côté gauche, celui de l’ouest, se place sous le signe de la mort. Une vision qui s’accorde parfaitement aux croyances des anciens Égyptiens, mais nous ignorons si Rabelais en était informé, d’autant que le traité de Plutarque Isis et Osiris, l’un de ses textes de référence en matière égyptienne, n’en fait pas mention.
La matière d’Égypte : chiens et beuverie
32Ce traité, en revanche, nous permet de mieux comprendre l’arrière-plan égyptien de deux thèmes importants que Rabelais a repris du Pantagruel tout en les modifiant : ceux du chien et de l’excès de beuverie. Le chien, lié d’un point de vue cosmogonique, dans le premier livre, au personnage de Pantagruel, devient l’animal attribut de Gargantua. En effet, Rabelais semble vouloir insister, dès le début de son livre, sur la remarquable attirance mutuelle entre Gargantua et les chiens :
Les petitz chiens de son pere mangeoient en son escuelle. Luy de mesmes mangeoit avecques eux : il leurs mordoit les aureilles. Ilz luy graphinoient le nez. Il leurs souffloit au cul. Ilz luy leschoient les badigoinces.
34Dans un registre plus élevé, Plutarque nous renseigne sur le statut du chien en Égypte, lié au dieu Hermès :
Si les Égyptiens appellent Hermès « le chien », ce n’est pas au sens propre du mot, mais parce que les qualités de cet animal, bon gardien, vigilant, philosophe, selon le mot de Platon [17], en ce qu’il distingue l’ami de l’ennemi en connaissant l’un et en traitant l’autre comme un inconnu, leur inspire un rapprochement avec le plus intelligent des dieux [18].
36Ce passage permet de replacer dans son contexte la réapparition inattendue de Gargantua au Tiers Livre – en fait, il s’agit d’une sorte de renaissance du géant, qui, dans le Pantagruel, avait quitté le monde pour être « translaté au pays des Phées » (p. 298). Au Tiers Livre, son retour dans le roman est annoncé par son petit chien, qui figure ainsi une sorte de Hermès messager :
En cestuy instant Pantagruel aperceut vers la porte de la salle le petit chien de Gargantua, lequel il nommoit Kyne, pource que tel fut le nom du chien de Thobie. Adoncques dist à toute la compagnie. « Nostre Roy n’est pas loing d’icy : levons nous ».
38Pour Claude Gaignebet, cette réapparition de Gargantua en compagnie d’un chien n’a rien de surprenant : « Si c’est certainement à Tobie qu’il faut penser d’abord nous pouvons pourtant, interprétant à plus haut sens, voir dans cet animal au nom grec la Canicule dont le lever précède celui de Sirius, l’étoile de Pantagruel [19]. » Père et fils s’unifient dans le grand cycle de la vie et de la mort.
39Les excès de festivité, caractérisés par des scènes de goinfrerie et de beuverie sans fin, se présentent comme le pendant des états de soif et de détresse tout aussi excessifs qui marquent la genesis du Pantagruel. En effet, tout se passe comme si Rabelais soulignait la démesure ouvrant chaque début de livre pour mieux les opposer. Il consacre tout le chapitre II du Pantagruel à décrire la sécheresse extrême et ses conséquences sur la nature et sur les hommes. Voici quelques citations, qui, par ailleurs, malgré leur exagération comique, n’en évoquent pas moins la réalité caniculaire vécue par les lecteurs contemporains en 1531 et 1532, lors de deux étés exceptionnellement secs [20] :
Car il n’estoit arbre sus terre qui eust ny fueille ny fleur, les herbes estoient sans verdure, les rivieres taries, les fontaines à sec, les pauvres poissons delaissez de leurs propres elemens, vagans et crians par la terre horriblement, les oyseaux tumbans de l’air par faulte de rosée, les loups, les regnars, cerfs, sangliers, dains, lievres, connilz, belettes, foynes, blereaux, et aultres bestes l’on trouvoit par les champs mortes la gueulle baye.
Au regard des hommes, c’estoit la grande pitié, vous les eussiez veuz tirans la langue comme levriers qui ont couru six heures. Plusieurs se gettoyent dedans les puys.
41Au comique de cette description hyperbolique, qui passe systématiquement en revue (selon l’échelle ascendante des créatures terrestres) les cinq grands règnes de la nature (plantes, poissons, oiseaux, animaux terrestres et l’homme) s’oppose celui, tout aussi démesuré, des scènes de goinfrerie et de beuverie effrénées qui ouvrent le Gargantua : on y abat 367 014 bœufs gras, dont « les tripes furent copieuses, comme entendez : et tant friandes estoient que chascun en leichoit ses doigtz » – et comme ces tripes ne se conservent pas (« Car elles feussent pourries »), il « fut conclud, qu’ilz les bauffreroient sans rien y perdre ». Le narrateur, qui qualifie les tripes de « belle matiere fecale », précise que Gargamelle, quoique enceinte, « en mangea seze muiz, deux bussars, et six turpins » (pp. 16-17). Suit le chapitre V, entièrement consacré à l’énumération chaotique des « propos des bienyvres », à propos desquels nous observerons, pour le besoin de notre argumentation, que la question du pouvoir altératif du sel et du jambon y est inlassablement répétée.
42Les chapitres IV et V du Gargantua ne se présentent pas seulement comme un renversement du chapitre II du Pantagruel : on assiste également au retournement burlesque des propos sur l’Égypte tels qu’on les trouve décrits dans le traité de Plutarque. En effet, même si Rabelais n’avait peut-être pas encore lu, au moment de la rédaction du Gargantua, le traité Isis et Osiris (selon Jean Plattard cette lecture serait plus tardive, et daterait des années 1540) [21], nous pouvons mieux apprécier le dénigrement grotesque qu’il fait subir à certains idéals ascétiques, si l’on garde à l’esprit le traité de Plutarque. Selon celui-ci, les prêtres égyptiens ont de la répugnance pour tout ce qui est excrément (on pense a contrario à la « mache-merde » que sont les tripes tant goûtées par les personnages rabelaisiens), ils ne mangent pas de porc, ils n’utilisent pas le sel (alors que chez Rabelais, le jambon et le sel sont les aiguillons du vin), et ils ne boivent le vin qu’en petites quantités, évitant toute forme d’ivresse (ce qui contraste totalement avec les chapitres de la genesis de Gargantua). Voici le passage de Plutarque dont il est question :
Les prêtres ont une telle répugnance à l’égard des excréments de toute nature que, non contents de s’abstenir de la plupart des légumineuses et de la viande de mouton et de porc, qui produisent beaucoup de résidus, ils s’interdisent aussi, durant tout le temps où ils doivent rester purs, le sel dans les aliments, et cela, entre toutes les raisons qu’ils donnent de cet usage, parce qu’il excite l’appétit et pousse aux excès de boissons et de table [22].
44Sur le vin, Plutarque nous précise que
Les […] prêtres en consomment, mais en quantité modérée, et ils s’en abstiennent pendant leurs nombreuses périodes de pureté, qu’ils consacrent à la philosophie, tantôt apprenant, tantôt enseignant les vérités divines [23].
46On mesure ainsi le travestissement burlesque que Rabelais fait subir à ce type de textes, lorsqu’il parsème les propos des « bienyvres » de remarques qui frôlent le blasphème. Ces propos concernent tantôt la vie monacale, tantôt la scolastique, ou encore telle maxime attribuée à saint Augustin (« En sec jamais l’ame ne habite »), mais le plus souvent ils visent directement la Bible [24] : « Je boy […] tamquam sponsus, et moy sicut terra sine aqua » (pp. 18-19 : calembours sur des mots des Psaumes XIX (XVIII) 6 et CXLIII (CXLII) 6), « Respice personam » (p. 19 : détournement de Matthieu XXII 16), « J’ay la parolle de dieu en bouche : Sitio » (p. 19 : reprise ironique des mots du Christ crucifié, Jean XIX 28), « Ex hoc in hoc » (p. 20 : citation tronquée des Psaumes LXXV (LXXIV) 9).
La matière d’Égypte : réflexions sémiotiques
47C’est à partir de la scène de la naissance de Gargantua que le thème de l’Égypte envahit l’œuvre de Rabelais, pour atteindre son point culminant dans les passages archéologiques et cosmographiques du Quart Livre, ainsi que dans les chapitres ésotériques du Cinquiesme Livre, inspirés du roman égyptisant de Francesco Colonna, Hypnerotomachia Poliphili (1499), remarquable pour ses superbes illustrations d’obélisques et de hiéroglyphes. Contentons-nous de passer en revue ici deux références liées au thème égyptien qui se présentent d’emblée au lecteur, et qui trouveront un écho dans le reste de l’œuvre. La première est évoquée dès les premiers cris de Gargantua à sa naissance :
Soubdain qu’il fut né, ne cria comme les autres enfans, « mies, mies ». Mais à haulte voix s’écrioit, « à boire, à boire », comme invitant tout le monde à boire.
49Selon Mireille Huchon, tout lecteur contemporain pensait aussitôt ici à la célèbre fable du roi égyptien Psammetic, racontée par Hérodote. Cette fable est alléguée par Panurge au Tiers Livre afin de combattre la thèse de la nature arbitraire et conventionnelle de la langue, soutenue par Pantagruel (« C’est abus dire que ayons languaige naturel. Les languaiges sont par institutions arbitraires et convenences des peuples » [p. 409]). Voici l’argument développé par Panurge :
Vous doncques ne croyez ce qu’escript Herodote des deux enfans guardez dedans une case par le vouloir de Psammetic roy des AEgyptiens, et nourriz en perpetuelle silence ? les quelz après certain temps prononcerenet ceste parolle Becus, laquelle en langue Phrygienne signifie pain ?
51Mireille Huchon montre que cette référence à la fable de Psammetic est d’autant plus plausible que Rabelais semble jouer ici sur la signification du lexème mie[s], qui peut signifier pain, tout comme le mot phrygien becus. Selon elle, « les premières paroles de Gargantua prennent de singulières allures de critique bouffonne contre les tenants d’un langage naturel » (p. 1081).
52L’autre référence, suggérée par l’interprétation « égyptienne » des premiers chapitres du Gargantua, concerne également une réflexion rabelaisienne sur le pouvoir des signes. Cette réflexion fait immédiatement suite à une discussion sur l’inefficacité sémiotique des rébus de l’époque, auxquels les sacrosaints hiéroglyphes égyptiens sont infiniment supérieurs :
Bien aultrement faisoient en temps jadis les saiges de Egypte, quand ilz escripvoient par lettres, qu’ilz appelloient hieroglyphiques. Lesquelles nul n’entedoit qui n’entendist : et un chascun endendoit qui entendist la vertu, proprieté, et nature des choses par icelles figurées [25].
54Et Rabelais de renvoyer ici à deux ouvrages qui ont largement contribué à la mode égyptisante de l’époque : « Desquelles Orus Apollon a en Grec composé deux livres, et Polyphile au songe d’amours en a davantaige exposé » (p. 29) – référence qu’il a répétée dans la Briefve Declaration accompagnant le Quart Livre (p. 708).
55Concluons notre brève analyse en observant que l’épisode de la naissance de Gargantua ne présente pas seulement un exemple convaincant de la polyvalence interprétative du texte rabelaisien. Mettant en œuvre des strates interprétatives d’origines diverses –?médicale, rhétorique, mythologique, géographique, cosmogonique, et ainsi de suite?–, il conduit aussi, par l’irruption de la thématique égyptienne, à une importante réflexion autoréférentielle sur le signe et sa signification.
Notes
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Université de Leyde.
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[1]
Notre édition de référence? : Rabelais, Œuvres complètes, éd. Mireille Huchon avec la collaboration de François Moreau, Paris, Gallimard, « ?Bibliothèque de La Pléiade? », 1994. Nous tenons à remercier Aurore Evain pour sa lecture critique d’une première version du présent article.
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[2]
Voir aussi Luc XIII 24? : « ?Efforcez-vous d’entrer par la porte étroite? ».
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[3]
La Sainte Bible, trad. sous la dir. de l’École biblique de Jérusalem, Paris, Desclée De Brouwer, 1974.
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[4]
Voir Erwin Panofsky, Hercules am Scheidewege, Leipzig, BG Teubner, 1930, p. 64.
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[5]
Voir Stéphan Geonget, « ?Le “Y gregoys” de Rabelais? », dans Jean Céard et Marie-Luce Demonet (éds.), Rabelais et la question du sens, Genève, Droz, 2011 (= Études Rabelaisiennes?49), pp.?127-144.
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[6]
Voir la reproduction de cette page de titre dans Het zal koud zijn in’t water als’t vriest. Zestiende-eeuwse parodieën op gedrukte jaarvoorspellingen, éd. Hinke van Kampen, Herman Pleij e.a., La Haye, Martinus Nijhoff, 1980, p. 106.
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[7]
Voir la notice de Mireille Huchon dans son édition de Rabelais, p. 1070. Sur la polyvalence de l’Hercule Gaulois, voir Francis Goyet, « ?D’Hercule à Pantagruel? : l’ambivalence des géants? », dans Michel Simonin (éd.), Rabelais pour le xxie?siècle […], Genève, Droz, 1998 (= Études Rabelaisiennes?33), pp. 177-190.
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[8]
Voir, pour les topoi obligatoires de la rhétorique épidictique, Paul J.?Smith, Dispositio. Problematic Ordering in French Renaissance Literature, Leyde-Boston, Brill, 2007, pp. 25-42. Pour la bonne compréhension de notre argumentation, rappelons la place quelque peu anachronique du Gargantua dans l’œuvre de Rabelais? : ce livre portant sur le père Gargantua arrive en deuxième (1535), et suit donc le premier livre, consacré au fils Pantagruel (1532).
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[9]
Claude Gaignebet, À plus haut sens. L’ésotérisme spirituel et charnel de Rabelais, Paris, Maisonneuve et Larose, 2 tomes, 1986 (t. 1, p. 448?; c’est Gaignebet qui souligne).
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[10]
Gaignebet (o.c.) a été le premier à souligner l’importance de la Saint-Blasius dans le Gargantua.
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[11]
Strabon cité et traduit par Jean Plattard dans Rabelais, Œuvres, éd. Abel Lefranc e.a., Paris, Champion, t. II, 1913, p. 368, n. 40.
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[12]
Voir Lazare Sainéan, « ?Jean Thénaud et Rabelais? », Revue des Études Rabelaisiennes 8 (1910), pp. 350-360.
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[13]
Thenaud cité par Jean Plattard dans Rabelais, Œuvres, éd. Lefranc, o.c., t. II, p. 368, n. 41.
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[14]
André Thevet, Cosmographie de Levant, éd. Frank Lestringant, Genève, Droz, 1985, p. 115. Sur les sources de Thevet, voir la note de Lestringant (p. 290).
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[15]
Strabon, Géographie, chapitre XVII, cité par http://www.mediterranees.net/geographie/strabon/XVII-1.html (date de consultation? : 6 avril 2011).
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[16]
Pour d’autres exemples de l’anthropomorphisme géographique de Rabelais et de ses contemporains, voir Frank Lestringant, « ?Paysages anthropomorphes à la Renaissance? », dans Dominique de Courcelles (éd.), Nature et paysages. L’émergence d’une nouvelle subjectivité à la Renaissance, Paris, École des chartes, 2006, pp. 261-279.
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[17]
Rabelais se réfère au même passage chez Platon dans le Prologue du Gargantua? : « ?Mais veistes vous onques chien rencontrant quelque os medulare? ? C’est comme dict Platon. Lib. II. De rep. la beste du monde plus philosophe? » (p. 6).
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[18]
Plutarque, Isis et Osiris [= Œuvres morales, t. V, 2e partie], éd. et trad. Christian Froidefond, Paris, Les Belles Lettres, 1988, p. 186.
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[19]
Gaignebet (o.c., p. 176) a raison de renvoyer à l’interprétation de M. A. Screech, qui voit dans le chien de Tobie, l’emblème de la thématique du mariage sous-tendant le Tiers Livre. Voir M. A. Screech, The Rabelaisian Marriage. Aspects of Rabelais’s Religion, Ethics and Comic Philosophy, Londres, Edward Arnold, 1958, pp. 46-47.
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[20]
Nous nous référons à Jan Buisman, Duizend jaar weer, wind en water in de Lage Landen, t. III (1450-1575), Franeker, Van Wijnen, 1998. Pour les mois de juillet et août 1531, voir Buisman, p. 416?; pour l’automne 1531, voir ibid., p. 419?; pour l’été 1532, voir ibid., p. 422. Pour l’année?1532, Buisman cite le journal parisien de Pierre Driart, qui s’étonne de la longue période de chaleur (de mai à novembre), et des meilleures vendanges depuis trente ans qui en ont résulté.
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[21]
Jean Plattard, L’Œuvre de Rabelais (sources, invention et composition), Paris, Champion, 1910, pp. 243-245.
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[22]
Plutarque, ouvrage cité, p. 181.
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[23]
Plutarque, ouvrage cité, p. 182.
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[24]
Nous suivons ici les références à la Bible données par Mireille Huchon dans son édition.
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[25]
Cette réflexion sur le signe se situe dans une réflexion plus large sur le symbolisme du blanc et du bleu. Précisons qu’au xvie?siècle, ces deux couleurs ne sont pas encore liées aux Nils Blanc et Bleu.