Notes
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[1]
Professeur d’histoire contemporaine à l’université de Toulouse II-Le Mirail, il dirige la revue Diasporas. Histoire et sociétés. Il a co-dirigé Cévennes, terre de refuge 1940-1944 (4e éd., 2006) et La Deuxième Guerre mondiale, des terres de refuge aux musées (2003), et publié Juifs et protestants en France, les affinités électives xvie-xxie siècle (2004).
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[2]
Au moins une autre collectivité, elle aussi fortement marquée par le protestantisme, serait candidate à une telle reconnaissance, le pays de Dieulefit, dans la Drôme. Le projet est porté par l’association Patrimoine, mémoire et histoire du pays de Dieulefit. Sur l’accueil des Juifs (entre autres) dans les années 1940 à Dieulefit et dans sa région, lire Sandrine Suchon, Résistance et Liberté. Dieulefit 1940-44, préface de Pierre Bolle, Die, Éditions À Die, 1994, et Anne Vallaeys, Dieulefit ou le miracle du silence, Paris, Fayard, 2008.
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[3]
Je renvoie à la bibliographie insérée en fin d’article (pp. 76-77).
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[4]
Le 18 octobre 1945, le Conseil des Églises évangéliques d’Allemagne, réuni à Stuttgart, évoque « la solidarité d’une faute commune » et affirme avec douleur : « C’est à cause de nous que des souffrances extrêmes se sont abattues sur de nombreux peuples et de nombreux pays. » Le 27 avril 1950, les synodes de l’Église évangélique d’Allemagne, réunis à Weissensee, se déclarent « solidairement coupables par nos omissions et par nos silences, devant le Dieu de miséricorde, des crimes qui ont été commis contre les Juifs par des membres de notre peuple. […] Nous prions tous les chrétiens de désavouer l’antisémitisme et de lui résister énergiquement où qu’il se manifeste ». Textes édités dans Sens, 2000, n° 9-10, Le Dialogue judéo-chrétien. Textes fondamentaux 2. Réflexions protestantes, pp. 423-424.
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[5]
On trouvera la traduction synthétisée et commentée de cette brochure de 44 pages, publiée en 1945 à Budapest, rééditée en fac-similé en 1984, par les soins d’Henri de Montety, « L’Église réformée de Hongrie et la persécution des Juifs », Diasporas. Histoire et sociétés, 8, 2006, pp. 208-222.
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[6]
On entend par là la minorité de l’Église luthérienne allemande qui a refusé la soumission au nazisme, et dont le maître à penser était le théologien calviniste suisse de langue allemande, Karl Barth.
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[7]
Imprimé à Valence début décembre 1939, avec une préface datée du mois d’octobre. Édition originale, en langue allemande, à Zurich ; cet ouvrage a été traduit dans les principales langues « protestantes » d’Europe : l’anglais, le danois, le hollandais, le norvégien et le suédois.
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[8]
On peut lire la biographie de ce dernier : Tela Zasloff, A Rescuer’s Story. Pastor Pierre-Charles Toureille in Vichy France, Madison, The University of Wiconsin Press, 2003.
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[9]
Plus exactement, le texte cite la Lozère, la Haute-Loire, l’Ardèche et le Dauphiné, toutes régions d’implantation du protestantisme rural.
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[10]
Elle n’est pas nommée, apparaissant seulement comme Mme B., à l’évidence pour des raisons de protection (elle est alors réfugiée en Suisse) ; elle apparaît sous son nom complet dans Les Clandestins de Dieu. CIMADE 1939-1945, textes rassemblés par Jeanne Merle d’Aubigné et Violette Mouchon, Paris, Fayard, 1968, pp. 182-184.
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[11]
Le pasteur Élie Gounelle lui fait écho dans les colonnes de la Revue du christianisme social, en janvier-mars 1946, p. 11 : « Si collectivement nous n’avons pu agir, individuellement chacun de nous a fait ce qu’il a pu, et c’était beaucoup. C’était beaucoup de lutter contre l’ignoble antisémitisme, d’aider nos frères juifs traqués, de ravitailler le maquis. »
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[12]
Les Églises protestantes pendant la guerre et l’Occupation. Actes de l’Assemblée générale du protestantisme français, Fédération protestante de France, 1946, p. 10. Plus loin, Boegner signale que les Églises (protestantes) de l’étranger saluaient avec émotion, dans la Cimade, « un signe manifeste de la résistance et de la vitalité du protestantisme français », p. 40.
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[13]
Ibid., p. 29.
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[14]
Droit et Liberté, 28 janvier-2 février et 3 février-8 février 1951, pp. 3 et 5 (article d’Oscar Rosowski). Peace news, 29 mai 1953, pp. 4 et 5. On trouvera une analyse dans Patrick Cabanel, Juifs et protestants en France, les affinités électives, xvie-xxie siècles, Paris, Fayard, 2004, pp. 306-307.
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[15]
Donald A. Lowrie, The Hunted Children, New York, Norton et Company, 1963, pp. 194-202.
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[16]
Madeleine Barot et les pasteurs Marc Boegner, Marc Donadille, André Dumas, Henri Manen et André Morel.
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[17]
Les Clandestins de Dieu, op. cit.
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[18]
Les Églises protestantes pendant la guerre, op. cit., p. 42.
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[19]
Allocution reproduite dans : Deuxième Centenaire de la Libération des dernières prisonnières huguenotes de la Tour de Constance 1768-1968, Paris, Société de l’histoire du protestantisme français, 1969, p. 80.
-
[20]
Anny Latour, La Résistance juive en France, 1940-1944, Paris, Stock, 1970, pp. 133-140.
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[21]
Droit et Liberté, art. cit.
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[22]
Le Point, n° 312, juin 1979 ; Le Monde, 24 juin 1979.
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[23]
Philippe Joutard, Jacques Poujol et Patrick Cabanel (dir.), Cévennes, terre de refuge 1940-1944, Montpellier, Presses du Languedoc, 1987 (4e éd., 2006).
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[24]
N. Vesper, « Deuxième lettre aux Juifs », Sully, décembre 1942, p. 4.
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[25]
« Une loi qui, frappant exclusivement les Israélites, frappe indistinctement les Israélites français depuis de longues générations et souvent depuis des siècles, et les naturalisés d’hier », alors qu’il fallait lire : « une loi frappant indistinctement les Israélites, français depuis de longues générations, et souvent depuis des siècles, et les naturalisés d’hier ». Coquille (et coupure) reprises par Philippe Boegner dans l’édition des Carnets du pasteur Boegner, 1940-1945, Paris, Fayard, 1992, qui ne comprenait pas la copie de ces lettres (pp. 92-93).
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[26]
Il y a là des relents de xénophobie à peine masqués…
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[27]
« Antijudaïsme protestant » et « Lettre du pasteur Boegner au grand rabbin », Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, 1939-1945, Paris, Les Éditions de Paris, 2000, pp. 21-22 et 100-102. On notera qu’Henri Cadier cite intégralement la lettre au grand rabbin, Le Calvaire d’Israël…, op. cit., pp. 46-47.
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[28]
Ainsi que le pasteur Franck Berton, frère du pasteur Jean Berton, président de la région « Paris » de l’Église réformée, qui s’était lui aussi refusé à lire le message.
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[29]
Cité par Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, op. cit., p. 22.
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[30]
J’ai tenté de développer ce point dans « Protestantismes minoritaires, affinités judéo-protestantes et sauvetage des Juifs dans les années 1940 », article à paraître.
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[31]
Plus paresseux encore, mais sans doute plus prudent, j’aurais pu citer l’étude très éclairante de Denis Müller dans l’article « Judaïsme » de l’Encyclopédie du protestantisme, Pierre Gisel (dir.), 2e éd., Paris, PUF, 2006, pp. 700-701.
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[32]
P.-F. Moreau, « Calvin, le peuple hébreu et la continuité des deux Testaments », dans Daniel Tollet, Les Textes judéophobes et judéophiles dans l’Europe chrétienne à l’époque moderne, Paris, PUF, 2000, pp. 85-96 [p. 86]. Rosemary Radford Ruether parle pareillement de « fatalité dualiste » ayant contraint le christianisme, nouvel Israël, à la négation de l’« ancien ». R. R. Ruether, Faith and Fratricide. The Christian Theological Roots of Anti-Semitism, New York, Seabury Press, 1974, cité par David Banon dans l’article « Judaïsme » de l’Encyclopédie du protestantisme, op. cit., p. 692.
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[33]
« De la similitude et différence… », dans les éditions de 1541-1557.
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[34]
Jean Calvin, Institution de la Religion chrestienne, livre second, édition de Jean-Daniel Benoit, Paris, Vrin, 1957, livre II, chap. X, paragraphe 13, p. 207 (graphie modernisée par mes soins). Un peu plus loin, Calvin ajoute : « Nous conclurons donc que le vieil Testament, ou l’alliance que Dieu a faite au peuple d’Israël, n’a pas été seulement contenue en choses terriennes, mais aussi a compris certaines promesses de la vie spirituelle et éternelle, de laquelle l’espérance devait être imprimée au cœur de tous ceux qui s’alliaient vraiment à ce Testament », ibid., parag. 23, p. 214.
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[35]
Commentaires de Jean Calvin sur le Nouveau Testament, 1852, t. I, p. 23, cité par Myriam Yardeni, « Juifs et judaïsme dans la théologie calviniste française du xviie siècle », Foi et Vie, juillet 2003, p. 5.
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[36]
D. Muller, « Judaïsme », art. cit., p. 701.
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[37]
Aux éditions Labor, Genève, et « Je sers », Paris. Analyse et extraits dans Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, op. cit., pp. 19-20.
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[38]
Objecteur de conscience à plusieurs reprises condamné par les tribunaux militaires, il a vu l’Église réformée refuser de le consacrer aux fonctions pastorales et ne deviendra pasteur que longtemps après la guerre. Juste des nations. Les analyses qui suivent sont reprises de mon article, « Le Pasteur Jacques Martin, de l’objection de conscience à la résistance spirituelle à l’antisémitisme », Archives juives, n° 40/1, 1er semestre 2007, pp. 78-99.
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[39]
Jacques Martin, « L’Antisémitisme païen… et chrétien », RCS, août 1939, pp. 120-129.
-
[40]
Cité par M. Yardeni, « Juifs et judaïsme… », art. cit.
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[41]
RCS, août 1939, art. cit., p. 128.
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[42]
« Nous avions réuni tous les pasteurs de cette région des Cévennes sur ce problème. Ces préliminaires étaient nécessaires. L’intérêt pour les Juifs n’est pas né spontanément, ni dans le souvenir des camisards ! Une longue préparation, une réflexion ont précédé, en opposition souvent avec telle ou telle théologie, protestante, qui considérait les Juifs et le judaïsme comme un simple préambule au christianisme, sans plus, alors qu’il s’agissait de tout un problème d’ordre spirituel, sur lequel s’est greffé le problème humain des sauvetages à partir de 1942 », témoignage publié dans Joutard, Poujol et Cabanel (dir.), Cévennes, terre de refuge, op. cit., pp. 239-240.
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[43]
Jacques Martin, Élie Gounelle. Apôtre et inspirateur du christianisme social, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 195 ; la citation de Gounelle est tirée de RCS, 1914, pp. 414-431.
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[44]
« Et, bien qu’il me déplaise de parler de nous-mêmes dans Réforme, je rappelle que durant toute l’Occupation, les protestants, par la voix de leurs autorités ecclésiastiques et par leurs actes privés, ont montré qu’ils en avaient nettement conscience », Albert Finet, « Jésus et notre temps. Juifs et chrétiens », Réforme, 7 décembre 1946.
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[45]
RCS, octobre-novembre 1946, pp. 699-714.
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[46]
Jean-Jacques Bovet, « L’Étoile », RCS, novembre-décembre 1946, pp. 408-422 (pp. 416 et 420).
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[47]
Foi et Vie, 1er Cahier d’études juives, avril 1947, pp. 209-211.
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[48]
RCS, mars-avril 1948, pp. 120-141.
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[49]
Isaac et Martin se sont rencontrés pendant la guerre à Saint-Agrève (Ardèche), où les Isaac se sont cachés quelque temps.
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[50]
Voir mon article « Protestantismes minoritaires, affinités judéo-protestantes et sauvetage des Juifs dans les années 1940 », à paraître.
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[51]
Aujourd’hui « Juste parmi les nations », comme Jacques Martin et Charles Westphal.
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[52]
Isaac allait participer également au 3e congrès international de l’ICCJ, à l’université de Fribourg, en juillet 1948.
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[53]
Cité par Michel Leplay, Les Églises protestantes et les Juifs face à l’antisémitisme au xxe siècle, Lyon, Éditions Olivétan, 2006, pp. 50-51. Texte complet dans le numéro spécial de la revue Sens, n° 9-10, 2000, op. cit.
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[54]
Cité par Marie-Thérèse Hoch et Bernard Dupuy, Les Églises devant le christianisme. Documents officiels 1948-1978, Paris, Cerf, 1980, pp. 170-171. Voir aussi Sens, 2000, n° 9-10, op. cit., p. 426.
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[55]
Texte dans Sens, op. cit., pp. 432-447.
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[56]
Cité par M. Leplay, op. cit., p. 58. Texte complet dans Sens, op. cit., p. 453-459.
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[57]
Église et Israël, III, 1.1.3, texte intégral dans le numéro spécial de Foi et Vie, février 2002, n° 1, ou encore dans la revue catholique Istina, avril-juin 2002, pp. 134-195.
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[58]
Outre les publications signalées à la note précédente, Colette Kessler lui a consacré un important article dans Sens, n° 11, 2002, pp. 565-573, et le pasteur Jaques Gruber, un résumé dans Yerushalaïm, n° 32, mai 2003, pp. 11-16.
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[59]
Communication au colloque de Paris du 2 mai 2004, « Juifs et protestants en France aujourd’hui ». Les actes sont disponibles en ligne, à l’adresse http://www.protestants.org/textes/colloque_juifs-protestants/massini.htm.
1Les Églises protestantes, même avec les luthériens d’Alsace, ne pèsent pratiquement rien dans la population française : moins de 2 % en 1940 comme aujourd’hui. Mais on sait qu’elles pèsent beaucoup plus lourd si l’on prend en compte l’influence économique, politique et culturelle des protestants, et si, pour ce qui nous intéresse ici, on s’avise que 10 % environ des Justes français proviennent de leurs rangs. Encore ce chiffre est-il nécessairement faussé par le fait que, dès 1988, une petite région a reçu collectivement le titre de « Juste » : il s’agit des hautes terres situées aux confins de l’Ardèche et de la Haute-Loire, autour du Chambon-sur-Lignon, mondialement célèbre dans le monde juif. Une seule autre collectivité, la commune hollandaise de Nieuwlande – également protestante du reste –, jouit d’un tel privilège [2]. C’est laisser entendre qu’il y a eu une évidente spécificité des protestants, au sein de la population française, face à l’antisémitisme du régime de Vichy et des Allemands et face aux persécutions et à la déportation. Cette spécificité est maintenant bien connue, et il suffira de rappeler en quelques lignes, pour aller à l’essentiel de cet article, la manière dont les Églises réformées ont fait mémoire de leur action au cours des années 1940 et considéré, d’un point de vue théologique, la relation du christianisme au judaïsme, dans le passé comme pour l’avenir.
1945 : témoigner dans l’urgence et pour mémoire
2Faut-il rappeler ici ce que les protestants français, leurs pasteurs, leurs institutions ecclésiastiques (Conseil national de l’Église réformée de France, Conseil national de la Fédération protestante de France), leur « président » (élu), le pasteur Marc Boegner, ont fait contre l’antisémitisme, dès les années 1930 et au long des années 1940 ? Ce chapitre de leur histoire est suffisamment connu pour que je m’en tienne à renvoyer à quelques titres, au sein desquels on voudra bien me pardonner de citer certains des miens [3]. On sait beaucoup moins, en revanche, que les protestants ont tenté de faire le bilan de leur action, notamment dans sa dimension d’aide aux Juifs, de manière extrêmement précoce, avant même la fin de la Seconde Guerre mondiale. Ce trait mérite attention, surtout si l’on s’avise que l’époque n’était ni aux déclarations de repentance, ni à la prise en compte de la spécificité de la déportation des Juifs. La France s’apprêtait, en dépit d’une première vague de témoignages juifs édités (comme l’a remarqué Annette Wieviorka, il n’y eut pas de l’indicible, mais de l’inaudible, ce qui est tout autre chose), à oublier cette spécificité et à bâtir la commode mémoire d’une nation toute résistante. Les protestants apparaissent donc quelque peu décalés.
3S’ils entament ce travail de bilan, c’est, me semble-t-il, pour deux raisons bien différentes. On peut mettre en avant un goût de l’introspection, personnelle et collective, propre à la tradition protestante, cette capacité à reconnaître publiquement ses fautes devant la communauté rassemblée – éventuellement aussi à rendre grâce à Dieu d’avoir su ne pas errer et d’être resté fidèle. Pécheurs et pharisiens, bonnes et mauvaises consciences se pressent devant le même Dieu. Plusieurs protestantismes d’Europe se sont livrés à ce premier travail de mémoire et de repentance dès 1945 : l’Église luthérienne allemande, avec le sentiment d’urgence et de faute que l’on imagine, l’a fait à deux reprises en nommant en 1950 les Juifs qu’elle ne distinguait pas encore en 1945, dans l’ensemble des peuples et pays martyrisés par le nazisme [4] ; mais aussi l’Église réformée de Hongrie, dans un opuscule intitulé Le Protestantisme hongrois contre la persécution des Juifs (A magyar protestantizmus a zsidoüldözés ellen) [5]. C’est ici que repose une deuxième explication de l’attitude des Églises protestantes françaises : trop minuscules et isolées dans leur pays, elles entretiennent des liens permanents, surtout depuis l’essor du mouvement œcuménique (alors principalement intraprotestant) tout au long de l’entre-deux-guerres, avec l’ensemble de l’Europe protestante, qu’elle soit réformée, luthérienne, anglicane, vaudoise ou dissidente (les Réveils). C’est une façon, trop peu prise en compte par les historiens français, de sortir du costume étriqué de minorité et de s’insérer dans une « catholicité » qui n’a rien à envier à celle de l’Église de Rome, si ce n’est une gestion non pas monarchique mais collégiale et élective, et donc moins aisée. Les responsables du protestantisme savaient, dès le début de la guerre, que le regard d’Églises sœurs (suisses, scandinaves, américaines, canadiennes, etc.) les suivait, que des comptes leur seraient demandés, et qu’entretemps, des informations, des textes, de l’argent, des hommes et des femmes pouvaient circuler de part et d’autre des frontières, surtout lorsqu’il s’agissait de pays neutres, comme la Suisse ou la Suède. Le pasteur Boegner a fait allusion à plusieurs reprises, dans ses lettres aux dirigeants de Vichy, à l’opinion protestante internationale et à la condamnation qu’elle risquait de faire peser sur la France antisémite. Écrire quasiment à chaud la page des années 1940 dans l’histoire séculaire du protestantisme français prenait donc tout son sens.
4Surtout – et nous restons au cœur de la dimension internationale des protestantismes européens – lorsque la principale maison d’édition protestante francophone de Genève, Labor et Fides, relayée en France par une autre maison, conçue comme un service d’Église, « Je sers », entreprend de publier, au cœur même de la Seconde Guerre mondiale (c’est le privilège de la neutralité, quelque imparfaite et ambiguë qu’elle puisse nous apparaître), une série de brefs volumes sur la résistance de diverses Églises nationales au nazisme ou à l’occupation. La collection, forte de onze titres, reçoit un titre significatif : « La Chrétienté au creuset de l’épreuve ». Elle intègre en fait des ouvrages parus dès avant la guerre, dans une première collection intitulée « Opuscules » : il s’agit, en version française, de la biographie et du théologien allemand Martin Niemöller, le principal animateur de l’Église confessante [6], d’extraits de ses prédications, ainsi que d’un roman qui met en scène un pasteur de cette même Église, le célèbre Village sur la montagne, tableau de l’Église fidèle sous le régime nazi, de Johan Maarten (1939 [7]), dont plusieurs témoignages de pasteurs ont montré qu’ils l’avaient immédiatement lu et fait lire dans leurs paroisses. L’agression soviétique de la Finlande puis l’occupation allemande d’une vaste partie de l’Europe voient la collection multiplier les titres, volontiers virils – ainsi le voulaient l’époque et des chrétiens conscients de se battre pour l’essentiel : Le Glaive et la Croix, de Hans Akerhielm (1942), sur les volontaires suédois qui se battaient en Finlande au cours de l’hiver 1939-1940 ; L’Église vit et ne se rend pas, de J.-G.-H. Hoffmann, sur la Finlande et la Norvège ; L’Église sentinelle, de Willelm Adolf Visser’t Hooft, sur les Pays-Bas ; L’Église, âme de la résistance, de Paul Borschenius, sur le Danemark ; L’Église sous le joug fasciste, du Vaudois Giovanni Miegge (1946), etc. C’est donc à chaud, on le voit, qu’une série de pasteurs, qui étaient ou avaient été eux-mêmes engagés dans le combat de leur Église, rendent un premier témoignage devant l’histoire, en proposant moins des plaidoyers pro domo que des recueils de documents, aujourd’hui précieux entre tous pour l’historien francophone, qui trouve dans les volumes consacrés à la Hollande et au Danemark, par exemple, le texte intégral des principales déclarations et circulaires rédigées et publiées (ou non) par les Églises. Le volume VIII, Une voix suisse. 1939-1944, rassemble des textes du grand théologien Karl Barth, dont l’influence allait achever de s’étendre sur le protestantisme réformé européen, et au-delà. Même si ces brefs volumes accordent l’essentiel de leur intérêt aux relations tourmentées entre les Églises et l’État allemand ou les autorités d’occupation, dans la lignée de la curiosité passionnée avec laquelle les protestants français ou italiens, pour ne citer qu’eux, avaient suivi dans les années 1930 la lutte trop inégale de l’Église confessante allemande contre le nazisme, ils accordent d’autant plus de place au destin des Juifs que ces mêmes Églises avaient eu du mal à se prononcer, chacune à sa manière, ou à œuvrer dans un silence protecteur face à la persécution qui les frappait.
5Le volume le plus significatif, à cet égard, est le neuvième de la collection : il est consacré à la France occupée et a été achevé de rédiger en mars 1945. Le Calvaire d’Israël et la solidarité chrétienne constitue sans doute l’un des tout premiers livres sur l’histoire du sauvetage des Juifs et sur ceux que l’on appellera beaucoup plus tard les Justes. Du reste, deux au moins de ceux qui ont concouru à sa rédaction, les pasteurs Henri Manen et Pierre Toureille [8], devaient être proclamés Justes. L’auteur, Henri Cadier, est un avocat protestant de Pau, né en 1877, membre d’une grande dynastie pastorale et missionnaire ; après avoir contribué à secourir les Juifs internés au camp de Gurs, il a dû fuir la France où la Gestapo le recherchait et se réfugier à Genève, « redevenue la cité du Refuge pour tant de fugitifs », ainsi que le relève l’avant-propos, qui ajoute que de nombreux drames ont dû se dérouler dans la France du Midi [9] et qu’une édition future, plus complète, pourrait « enfin contenir le martyrologe de tant d’infortunées victimes et le livre d’or de nombreux actes rédempteurs ». L’ouvrage de 152 pages, assez composite, comprend pour l’essentiel des témoignages, y compris celui d’une Juive allemande, Marthe Besag [10]. Les lettres déjà célèbres du cardinal Saliège et de Mgr Théas sont citées, de même que celle du pasteur Boegner au grand rabbin Schwartz, mais aussi la Cimade, l’Aumônerie des étrangers du pasteur Toureille, la maison d’enfants « Le Coteau fleuri » au Chambon-sur-Lignon.
6Le volume s’ouvre sur un texte de réflexion de Cadier qui attire aujourd’hui l’attention : « Les origines et le développement de l’antisémitisme ». C’est une première quête des responsabilités chrétiennes, même passives, dans ce processus. L’antisémitisme y est défini comme antidémocratique et antichrétien et le manque de vigilance des démocraties est mis en cause, alors que « combattre l’antisémitisme équivaut à se défendre soi-même. C’est accomplir un acte de prophylaxie sociale ; car le fléau de la haine menace, en se propageant, de détruire la société humaine ». L’auteur achève en dénonçant deux scandales : le racisme et, surtout, « le fait que la chrétienté n’ait su ni voulu intervenir en temps opportun pour empêcher cette abomination », car on n’a observé aucun élan mondial de réprobation massive. Ce silence des chrétiens a heureusement été rompu – c’est tout l’objet du livre –, par de « nobles et courageuses voix », des « dévouements admirables […] sur le plan individuel », des efforts consentis sans compter et sans aucun esprit de prosélytisme par des « organisations confessionnelles ». Mais combien minimes ont été ces efforts, conclut néanmoins Cadier [11]. Ainsi autoaccusation et autosatisfaction se mêlent-elles dans ce petit livre pionnier à tous égards, mais dont nous ignorons l’écho réel qu’il a pu rencontrer.
7Quelques mois plus tard, une nouvelle et désormais très officielle occasion de bilan et de témoignage s’offre aux protestants. Du 23 au 26 octobre 1945, Nîmes accueille l’assemblée générale du protestantisme français, dont la déclaration de guerre, cinq ans auparavant, avait empêché la tenue. Les Églises protestantes pendant la guerre et l’Occupation, tel est le titre des actes de l’assemblée, publiés au printemps 1946. Deux rapports historiques remarquables y sont lus. Le premier, très circonstancié et très long, est celui du pasteur Boegner : le président y résume l’activité du Conseil de la Fédération protestante de France depuis la déclaration de guerre jusqu’au procès du maréchal Pétain, en s’excusant à plusieurs reprises de parler à la première personne, d’autant plus qu’il résidait seul en zone sud, à Nîmes même, jusqu’en mars 1943, alors que les autres membres du Conseil étaient restés à Paris. Le second rapport, très bref, est celui du vice-président du Conseil, André-Numa Bertrand, d’origine nîmoise mais pasteur à l’Oratoire du Louvre et resté durant toute la guerre à Paris où il fit office, nolens volens, de chef du protestantisme réformé pour la zone occupée. Les deux textes accordent l’un et l’autre une réelle importance au destin des Juifs : près de 14 pages sur 44 chez Boegner, 1 sur 6 chez Bertrand. Boegner passe en revue neuf thèmes : la période de la « Drôle de Guerre » ; la « politique de présence », c’est-à-dire le résumé de son action, au cours des premiers mois, auprès du maréchal Pétain et de son gouvernement, avec une forte attention prêtée au cléricalisme et à un certain anti-protestantisme de ce denier, mais aussi à « l’antisémitisme passionnel » de plusieurs ministres, qui « se donnait libre cours en dehors de toute pression allemande » ; la question du serment au maréchal ; celle de la jeunesse unie, ou jeunesse unique ; les « lois raciales » (pp. 22-35) ; la relève ; l’Aumônerie des étrangers et la Cimade ; la censure à la Radiodiffusion nationale ; les relations avec les autorités allemandes ; enfin, les suites de la Libération.
8Juifs et judaïsme sont évoqués à plusieurs reprises, puisque au chapitre de la censure sur les ondes, on apprend que des pressions orales avaient été exercées pour que les pasteurs cessent de citer l’Ancien Testament, Psaumes compris. Pierre Laval a dénoncé auprès de Boegner la « rare hypocrisie » de ces pasteurs, qui « parlent sans cesse du peuple d’Israël sans en avoir l’air ». L’action de la Cimade, notamment au camp de Gurs, est citée plusieurs fois et fortement saluée à deux reprises, y compris d’une manière qui considérer qu’elle est déjà entrée dans la légende, alors que les événements sont encore tout récents : « Une œuvre nouvelle dont le nom, connu par ses initiales : Cimade (Comité intermouvements auprès des évacués), ne devait pas tarder à faire le tour du monde et à y porter un témoignage magnifique en faveur du protestantisme français [12]. » Si le Chambon-sur-Lignon, lui, ne jouit encore d’aucun renom légendaire, il est déjà cité, comme dans Le Calvaire d’Israël. Du rapport dans le rapport, sous le titre « Les lois raciales », on ne dira rien ici, car autant vaudrait résumer toute l’action des dirigeants protestants et notamment la série de lettres, publiées parce qu’elles étaient destinées à l’être ou parfois, officiellement du moins, contre le gré de leurs auteurs, dans lesquelles ils ont dénoncé les statuts des Juifs, le port de l’étoile jaune en zone occupée, puis les rafles et les déportations et, pour reprendre deux formules du pasteur Bertrand en juin 1942, « l’extermination d’une race, le martyre immérité de ses femmes et de ses enfants [13] ». Je soulignerai plus bas l’anomalie, peut-être significative, qu’a commise Marc Boegner en citant l’un de ces textes.
Des années 1960 aux années 1980, construction d’un légendaire
9Il convient maintenant de reconstituer au moins brièvement la manière dont les protestants français et leurs Églises ont construit la mémoire de la Shoah et de l’aide apportée aux Juifs depuis leurs rangs. À vrai dire, une fois refermé l’immédiat après-guerre, une assez longue période de silence est observée, qui correspond à celui que les historiens du génocide ou du « syndrome de Vichy » ont décrit de longue date. Silence incomplet, toutefois, puisqu’en 1951 et 1953, dans deux périodiques, l’un juif français, l’autre pacifiste américain, deux articles importants, au ton vibrant, sont consacrés au refuge juif au Chambon-sur-Lignon, tenu d’ores et déjà pour exceptionnel. Mais ces articles n’ont pas été portés à la connaissance du monde protestant [14]. Il en va de même pour l’ouvrage que publie en 1963, à New York, l’Américain Donald Lowrie, ancien représentant des Young Men Christian Associations en France et président du Comité de Nîmes : The Hunted Children porte sur le destin des enfants juifs dans la France de Vichy et consacre un chapitre au Chambon-sur-Lignon, signalé sur la carte de France au même titre que Lyon ou Marseille [15]. Ce n’est qu’en 1968 que le public protestant est invité à revenir sur les relations judéo-protestantes au temps du génocide, pour une triple raison éditoriale et mémorielle : cette année-là, en effet, deux figures féminines de la Cimade des années 1940, Violette Mouchon (qui la présidait à Nîmes) et Jeanne Merle d’Aubigné (qui se dépensait au camp de Gurs), recueillent et publient un riche ensemble de témoignages, dont beaucoup sont signés de futurs Justes [16], sous le titre Les Clandestins de Dieu [17]. Gurs, Rivesaltes, Les Milles, Le Chambon, la frontière avec la Suisse, sont quelques-uns des hauts lieux du livre.
10La même année, deux ans avant sa disparition, Marc Boegner, devenu académicien, publie ses mémoires, L’Exigence œcuménique, qui comportent plusieurs pages sur les années 1940 ; il prononce également une allocution au musée du Désert, le 1er septembre, vingt-six ans, presque jour pour jour, après avoir présidé le culte du 6 septembre 1942, au terme des premières grandes rafles en zone occupée et alors qu’il parlait devant des Juifs échappés des nasses des grandes villes méridionales, dont certains allaient, le soir même, se cacher dans le « désert » protecteur des Cévennes, sur les pas des pasteurs et de leurs paroissiens. En cet été 1968, les protestants français célèbrent une grande date de leur propre histoire de persécution : le bicentenaire de la libération des dernières prisonnières pour la foi enfermées à la Tour de Constance, à Aigues-Mortes (Gard). Ils devraient être tout à leur joie. Mais Boegner, comme malgré, est lui ramené à 1942. Il ne se souvient pourtant pas – et les historiens l’ont négligé à leur tour, l’auteur de ces lignes tout le premier –, de l’épisode de censure dont pasteurs et prêtres animant des émissions religieuses sur les ondes nationales avaient été les victimes, dans l’été 1943. Le gouvernement venait d’interdire toute allocution. La faute en revenait… à Boegner et à Marie Durand :
Le P. Roguet m’avait affirmé qu’aux Cardinaux qui en avaient manifesté leur émotion, on avait dit que Pierre Laval avait ordonnée [la mesure] après avoir entendu raconter que, parlant moi-même à la Radio, j’avais donné comme mot d’ordre aux Français le mot de Marie Durand : “Résistez”. Les catholiques me considéraient donc comme responsable de la mesure qui les atteignait comme nous. C’est vrai : j’avais rappelé le mot de Marie Durand, mais sans mauvaise intention, si j’ose ainsi m’exprimer [18].
12En 1968, Boegner choisit de mêler à la joie des protestants le souvenir de la souffrance des Juifs ; il le fait avec une force particulière, au lendemain de l’allocution vibrante prononcée par son collègue de l’Académie française, le romancier André Chamson, le Malraux de l’éloquence sacrée huguenote :
Je me rappelle cette journée de septembre, magnifique comme celle d’aujourd’hui. J’avais devant moi une quantité d’Israélites qui avaient voulu venir participer à notre grande assemblée. D’abord pour témoigner leur reconnaissance à ces protestants des Cévennes qui les avaient accueillis à leurs foyers et tentaient de les soustraire à ceux qui les cherchaient, quelquefois avec des chiens policiers. Et puis ils voulaient venir ici ; car ils avaient besoin de se serrer contre nous ; ils avaient peur ; ils soupçonnaient que quelque chose se tramait, que la foudre pourrait bientôt éclater sur leurs têtes. Et ces hommes, ces femmes, ces jeunes gens que j’ai vus ainsi à l’Assemblée du Désert de 1942 sont partis : ils ont été enlevés quelques jours après à leurs refuges. Ils ont connu alors des journées affreuses. Lorsque je vous regarde, en ce jour où nous pensons à Marie Durand et à ses compagnes libérées en même temps qu’elle, comment ne me rappellerais-je pas ces visages d’hommes et de femmes qui étaient déjà marqués par le grand sacrifice […]. Comment serait-il possible à celui qui vous parle, évoquant les prisonnières libérées il y a deux cents ans de la Tour de Constance, de ne pas penser, et avec quelle émotion, à ces prisonniers entassés dans les wagons et emmenés dans la détresse vers la souffrance et la mort [19] ?
14Les choses s’accélèrent bientôt, autour de ce point d’ancrage que constitue Le Chambon-sur-Lignon, en voie de sanctuarisation chez les Juifs français et américains. En 1970, Anne Lévy publie sous son pseudonyme de résistante, Anny Latour, un ouvrage pionnier sur la Résistance juive en France. Plusieurs pages sont consacrées à « La forteresse huguenote » du Chambon [20]. L’auteur se dépense avec d’anciens réfugiés juifs pour que la médaille des Justes soit remise au couple pastoral des Trocmé. C’est chose faite en janvier 1971 – André Trocmé étant mort quelques mois plus tard, c’est sa veuve Magda qui reçoit la médaille dans le temple du Chambon. Le titre de « Juste » passe alors parfaitement inaperçu dans la société française, mais il n’est intéressant de noter que plusieurs protestants sont parmi les tout premiers récipiendaires français et même européens (le dossier d’Alice Ferrières porte le n° 83, en 1964 ; ceux d’Adélaïde Hautval et de Henri Morin, en 1965, les numéros 100 et 106 ; Mgr Saliège et Mgr Théas sont récompensés en 1969, n° 197 et 197a). En juin 1979, Oscar Rosowski, ancien résistant juif au Chambon, auteur du premier article publié dès 1951 [21], organise dans le village des retrouvailles d’anciens réfugiés juifs. Une plaque est apposée face au temple : « À la communauté protestante de cette terre cévenole […] Les Juifs réfugiés au Chambon-sur-Lignon et dans les communautés avoisinantes ». La presse nationale accorde pour la première fois son attention au phénomène : « Un village contre l’holocauste » (Le Point), « Les hommes de la Bible » (Le Monde) [22]. L’année suivante est traduit chez Stock Le Sang des innocents. Le Chambon-sur-Lignon village sauveur, l’ouvrage d’un Juif américain, Philip Hallie, fasciné par la leçon de non-violence que le village et le pasteur Trocmé ont alors donnée. En 1982, l’historien Philippe Joutard lance une vaste enquête sur l’accueil des Juifs dans les Cévennes camisardes (Gard et Lozère), qui révèle un effectif de plusieurs centaines de réfugiés [23]. En 1988, le Chambon et les autres villages du plateau reçoivent à titre collectif la médaille des Justes. Colloques, études, témoignages se multiplient ; un documentaire et un téléfilm sont produits, Les Armes de l’esprit, de Pierre Sauvage, cinéaste américain, juif, né au Chambon en 1944, et La Colline aux mille enfants, de Jean-Louis Lorenzi, cinéaste français protestant. Un haut lieu, celui de la « banalité du bien », s’est imposé à la conscience du monde. Et un nouveau cliché est venu s’ajouter au légendaire d’une histoire huguenote qui comptait déjà, pour le versant sombre (mais bordé de la lumière du martyre et de la fidélité), la Saint-Barthélemy, la Révocation, les Camisards, les galériens, Marie Durand, l’affaire Calas, mais aussi, du côté lumineux des fondations, la République laïque, l’affaire Dreyfus (les protestants ont été massivement dreyfusards) et, désormais, le sauvetage des Juifs et les Justes. tre protestant français, aujourd’hui, c’est pouvoir citer les Cévennes, pour la guerre des Camisards, et le Chambon-sur-Lignon, pour ce sauvetage. L’Église réformée de France a parfaitement intégré dans sa mémoire la figure et le rôle d’un Boegner et la capacité qu’eurent les principaux terroirs protestants à se muer en « terres de refuge » et « villages sauveurs », pour reprendre les titres de deux ouvrages qui ont compté dans cette intériorisation.
Le protestantisme, l’antijudaïsme et les Juifs au temps de la Shoah
15Le titre de ce paragraphe ne comporte pas le mot antisémitisme. Il y a eu pourtant, dans le protestantisme français, une minorité antidreyfusarde, maurrassienne (au sens strict d’un ralliement à l’Action française), antisémite, qu’incarnent très précisément dans les années 1930 et 1940 le groupe Sully, branche protestante du maurrassisme, et son principal dirigeant et penseur, le pasteur de Lourmarin Noël Nougat (qui signait ses textes Vesper), fusillé avec son épouse dans les premiers jours de la Libération. À partir de l’automne 1942, Vesper publie dans Sully, le bulletin du groupe, une série de « Lettres sur les Juifs » ; il y regrette que « l’esprit judaïque [ait] lentement, obstinément ressaisi l’Église, particulièrement la nôtre, l’Église protestante », et ne craint pas d’écrire qu’« un certain antisémitisme – puisque le mot est ainsi jeté à tort et à travers ! – serait le meilleur service qui ait jamais été rendu, non seulement au vrai Israël, mais encore à l’autre… qui n’est pas un vrai Israël, mais que l’Apocalypse par deux fois appelle “la synagogue de Satan” ». La suite pèse son vrai poids d’ignominie, quelques mois après les grandes rafles de l’été :
Car, ainsi dénoncé et démasqué, le faux Israël, l’Israël racial, celui de la chair et de la circoncision, comme le définit l’apôtre Paul, serait neutralisé, livré comme il convient aux rigueurs de l’histoire qui ne cessera pas de lui régler son compte, chaque fois qu’il conviendra, chaque fois que son hubris et sa turbulence, chaque fois que l’esprit judaïque l’y provoqueront [24].
17Le rôle même de ce pasteur attire l’attention, au-delà d’un groupuscule virulent mais microscopique, sur la contribution protestante à l’antijudaïsme chrétien et sa responsabilité même lointaine dans l’antisémitisme et la Shoah. C’est à l’effort des Églises protestantes pour se défaire de l’antijudaïsme, avant comme après 1945, qu’il convient de s’intéresser, y compris dans une perspective comparative avec les efforts parallèles menés à l’intérieur de l’Église catholique.
18J’ai évoqué plus haut une « anomalie » dans le rapport présenté par Boegner devant l’Assemblée générale du protestantisme français en octobre 1945. C’est l’historien Jacques Poujol qui l’a signalée : tout à son travail d’archiviste consciencieux des prises de parole protestantes face à la tragédie vécue par les Juifs, Boegner publie page après page pas moins de six documents majeurs mais, curieusement, ne cite qu’en note (sans doute n’en a-t-il pas donné publiquement lecture) sa lettre privée au grand rabbin, le 26 mars 1941, qui fut à la fois le texte le plus répandu (sa diffusion émut jusqu’au gouvernement) et reste un des plus forts dans l’expression d’une solidarité avec les Juifs. Et surtout, outre une regrettable coquille [25], il « oublie » tout un paragraphe, le dernier : après avoir exprimé sa douleur devant l’introduction d’une législation raciste (premier paragraphe) et estimé que le problème de l’immigration et d’une naturalisation également massives devait être résolu dans le respect de la personne humaine (deuxième paragraphe [26]), le Boegner de 1941 affirmait la solidarité des protestants français, forts de leur ancienne expérience de la persécution (troisième paragraphe), avec les Juifs et soulignait le lien biblique entre judaïsme et protestantisme. Ce quatrième et dernier paragraphe, non repris dans le rapport de 1945, était ainsi rédigé :
Entre vos communautés et les Églises de la Réforme existe un lien que les hommes ne peuvent briser : la Bible des patriarches, des prophètes et des psalmistes, l’Ancien Testament dont Jésus de Nazareth a nourri son âme et sa pensée et où ses disciples de tous les siècles entendent la parole de Dieu. Notre Église sait tout ce que Dieu lui donne dans une méditation des livres saints, et son intercession pour les Israélites français si durement traités n’en est que plus fervente.
20Il ne s’agit plus ici de solidarité d’ordre humaniste ou de minorité à minorité, mais de bien autre chose : un lien théologique entre l’Ancienne Alliance et la Nouvelle. Boegner parle d’abord des seules Églises de la Réforme, parce qu’elles seules ont avec l’Ancien Testament, la Torah des Juifs, une familiarité qui fait largement défaut à l’Église catholique, du moins à ses laïcs ; mais il élargit ensuite au christianisme tout entier. C’était retrouver des intuitions de saint Paul puis de Calvin lui-même, mais c’était peut-être aussi se situer légèrement en avance, voire en porte-à-faux, face à une partie au moins des protestants, alors même que le dialogue judéo-chrétien n’avait pas pris son envol. Jacques Poujol, sans pouvoir trancher, explique cette autocensure de Boegner, en 1945, par la subsistance chez certains de ses collègues de traces d’antijudaïsme ; ces pasteurs auraient peu apprécié la reconnaissance d’un tel type de lien entre Juifs et disciples du Christ.
21Et Jacques Poujol de proposer une entrée nourrie, « Antijudaïsme protestant », dans son exploration thématique de l’histoire des protestants dans la France des années noires [27]. On y trouve la lettre envoyée par un pasteur de Paris pour motiver son refus de lire en chaire, le dimanche 4 octobre 1942, un message rédigé le 22 septembre par le Conseil national de l’Église réformée de France à l’attention des fidèles – un autre des six pasteurs de la zone occupée qui ont refusé de lire ce message, Louis de Saint-André, président de la région « Centre » de l’Église réformée, était l’un des délégués présents à l’Assemblée générale de Nîmes [28]. Voici l’extrait :
Les Juifs se sont déclarés eux-mêmes les pires ennemis de Jésus ; ainsi s’accomplit la malédiction qu’ils ont eux-mêmes attirée sur eux et sur leur descendance ; en quoi l’Église chrétienne devrait-elle chercher à atténuer des souffrances sans doute voulues par Dieu pour briser l’incurable orgueil de ce peuple au col roide et pour l’amener à la repentance ? Comment considérer les Juifs en général comme les frères des Français [29] ?
23Les dirigeants de l’Église réformée de France n’ignoraient nullement la persistance de l’antijudaïsme dans leurs rangs. Rappelons, sans insister car ces aspects sont maintenant bien connus, que cet antijudaïsme était cependant bien moins généralisé que dans les Églises luthérienne et catholique. Deux raisons l’expliquent, l’une théologique, l’autre socio-historique. Cette dernière est facile à décrire : la minorité huguenote française, tragiquement bousculée par l’histoire, riche d’une expérience d’autant plus « judaïsante » qu’elle avait été lue à travers le prisme de l’Ancien Testament (Babylone, Égypte, Désert, Terre Promise…), avait contribué depuis la Révolution à bâtir un État et une société détachés de la mainmise catholique et rendant justice de même manière aux Juifs et aux protestants. Échos et affinités, pour ne rien dire d’un certain nombre d’alliances objectives (et même matrimoniales au sens strict), avaient rapproché les uns et les autres, ce que les différents protestantismes européens n’avaient nullement expérimenté, sauf sans doute (et ce n’est pas négligeable) les vaudois italiens, les calvinistes hongrois ou les héritiers du hussisme en Tchécoslovaquie [30].
24Sur le plan théologique comme sur d’autres, il est bien établi que Calvin se distingue nettement de Luther dans ce qu’il dit du rapport du christianisme au judaïsme, ainsi que de l’Ancienne et de la Nouvelle Alliance. On voudra bien me pardonner de reprendre ici quelques lignes d’un ouvrage publié il y a plusieurs années [31]. J’y citais Pierre-François Moreau, selon qui l’un des problèmes centraux du christianisme repose dans la définition de son rapport interne au judaïsme. Quoi qu’il en ait, c’est la religion dont il sort. Il doit à la fois la valoriser (il a été « préparé » par elle) et la dévaloriser (lui seul détient la vraie révélation). « On pourrait donc dire que toute théologie chrétienne doit constituer simultanément un philojudaïsme minimal et un antijudaïsme minimal ; l’originalité de chacune tenant aux variations qu’elle instituera entre ces deux pôles et à l’accent qu’elle mettra sur l’un ou l’autre [32]. » Sur cette échelle, le catholicisme et le luthéranisme occupent le pôle de l’antijudaïsme maximal, le calvinisme celui du philojudaïsme maximal. Le catholicisme recourt à la théorie classique de la figuration ou double destination : ce qui est dit dans l’Ancien Testament ne fait que préfigurer le Nouveau, le sens charnel du texte ou de l’événement, seul accessible aux Hébreux, contient un sens spirituel qui leur est resté invisible, mais que les chrétiens ont le privilège de déchiffrer immédiatement. La Nouvelle Alliance est accomplissement et développement. Les Juifs ne sont plus les élus d’une promesse qui, en vérité, était faite à d’autres qu’eux. Le luthéranisme s’inscrit dans cette approche et durcit même l’opposition entre Juifs et chrétiens, entre la Loi et l’Évangile. La justification du chrétien par la grâce seule est opposée à la justification du Juif par les œuvres de la Loi.
25Pour Calvin, en revanche, les distinctions entres les deux Testaments existent, mais il ne les accepte qu’en tant que l’Écriture les énonce elle-même et « à condition qu’elles ne dérogent rien à l’unité que nous avons déjà mise ». Méditant saint Paul, Calvin recourt aux paradigmes de la pédagogie et du degré. « Il y a eu une même Église entre eux que la nôtre ; mais elle était encore comme en âge puéril. » L’idée maîtresse du Réformateur repose sur la continuité des deux Alliances. Il l’exprime dans le chapitre X du livre second de l’Institution de la religion chrétienne, « De la similitude du vieil et nouveau testament [33] ». Il y a, à ses yeux, similitude et même identité ou unité entre les alliances : « C’est que l’Alliance faite avec les Pères anciens, en sa substance et vérité est si semblable à la nôtre qu’on la peut dire une même avec icelle. » Dieu a promis aux Juifs non seulement la félicité terrestre, mais aussi la béatitude éternelle. La preuve s’en trouve… dans les malheurs que les Hébreux n’ont cessé de connaître. Si Dieu ne leur avait promis le bonheur que sur Terre, il aurait manqué à sa parole. « Si tous ces saints Pères ont attendu de Dieu une vie bien heureuse (ce qui est indubitable), ils ont certes connu et attendu une autre béatitude que de la vie terrienne [34]. » Il n’y a de ce point de vue aucune supériorité des chrétiens. Il en va de même du baptême. Le passage de la mer Rouge a baptisé les Juifs. Saint Paul écrit certes dans l’Épître aux Corinthiens que la plupart des Juifs ne furent pas agréables à Dieu, puisqu’ils tombèrent morts dans le Désert. Mais ils ne sont pas tombés parce que juifs, mais parce que pécheurs, et les correspondants de Paul doivent méditer leur exemple afin de ne pas tomber dans les mêmes travers et de ne pas tenter le Seigneur. Si Dieu distingue, ce n’est pas entre Ancienne et Nouvelle Alliance, entre Juifs et chrétiens, mais entre élus et réprouvés. Il y a des réprouvés parmi les chrétiens et des élus parmi les Juifs, hier comme ici et maintenant. Quelque révoltés que soient les Juifs, « le Seigneur jusqu’à la fin en sauvera toujours quelque résidu, d’autant que sa vocation est sans repentance [35] ».
26Sociologie et mémoire minoritaires d’une part, théologie en bonne part philojudaïque de l’autre, n’ont pourtant pas suffi à éradiquer dans le protestantisme réformé français le traditionnel antijudaïsme chrétien. D’autant que, même pour un Calvin, le Juif demeurait « un faire-valoir respectable, mais au fond dépassé, de la vérité ultime » – chrétienne [36]. Ce nécessaire travail d’éradication, des pasteurs ont entrepris de le mener dès les années 1930, dans l’urgence de l’antisémitisme nazi auquel le christianisme devait, selon eux, se garder d’apporter sa caution théologique. Ils le font dans les colonnes de leurs revues, Foi et Vie, Le Semeur, la Revue du christianisme social (RCS, organe déjà ancien du mouvement du même nom), Hic et Nunc (jeune organe des disciples français de Karl Barth). Les condamnations visent d’abord le nazisme et sa persécution de l’Église confessante ; l’intérêt se déplace en 1938 du côté du christianisme et de sa responsabilité dans l’antisémitisme. Un théologien calviniste suisse, Franz J. Leenhardt, publie un long article, repris en brochure, L’Antisémitisme et le Mystère d’Israël [37], qui prétend fonder théologiquement l’antisémitisme chrétien. Le philosophe russe Nicolas Berdiaeff lui répond dans « Christianisme et antisémitisme », un article publié dans la RCS en avril 1939, puis Jacques Martin, un ancien étudiant en théologie [38], dans la même revue en août, dans « L’Antisémitisme païen… et chrétien ». Martin regrette qu’il soit malaisé de faire le partage entre les raisons héritées d’une longue tradition chrétienne d’antisémitisme et les explications proprement religieuses du mystère incontestable que présente la destinée de ce peuple. C’est de cette équivoque que profite l’antisémitisme. Avec la conséquence ô combien paradoxale que l’on voit coïncider une explication religieuse du « problème judaïque » et cette manifestation de l’absolutisme d’un État païen qu’est l’antisémitisme [39].
27Revenant à l’accusation chrétienne fondamentale à l’encontre des Juifs, peuple déicide qui a rejeté le Messie, Martin retrouve presque mot pour mot les termes d’un sermon de Théodore de Bèze, le successeur de Calvin à Genève, que l’historienne Myriam Yardeni tient pour le refus le plus puissant de l’antijudaïsme chrétien. Ce ne sont pas les Juifs qui ont crucifié le Sauveur, ni Satan, ni Caïphe, ni Pilate, mais l’humanité, écrivait Bèze en 1590 [40]. Martin renchérit :
Les responsables du rejet du Christ sont moins les Juifs charnels que le monde avec son orgueil ecclésiastique et son cléricalisme, et l’absolutisme de son pouvoir dominateur. […] Qui ne rejette pas le Christ ? La chrétienté elle-même ne porte-t-elle pas, au moins autant que les Juifs, la responsabilité de la « crucifixion » de son Maître ? Ce que l’on appelle la civilisation chrétienne n’est-elle pas plus le témoignage d’un rejet et d’un blasphème plus profond et plus grave que les cris d’une foule versatile ou les calculs d’un sanhédrin perdu dans son cléricalisme et son orgueil ? Le spectacle qu’elle donne est-il de nature à provoquer cette sainte émulation dont parle l’apôtre ? N’oublions pas ce que dit celui-ci en un autre endroit : « À cause de vous, le nom de Dieu est blasphémé » [41].
29Surviennent la défaite, la prise du pouvoir par le maréchal Pétain, le Statut des Juifs du 3 octobre 1940. Le vieux pasteur Élie Gounelle, directeur de la RCS, et Jacques Martin, tous deux installés dans la région cévenole de Ganges (Hérault), décident de réunir une pastorale – une rencontre locale de pasteurs. Nous n’avons d’autre document sur celle-ci que le témoignage de Martin dans un colloque organisé en 1984 – il parle d’une « journée consacrée au problème de l’antisémitisme, plutôt l’antisémitisme et la Bible [42] » –, et quelques lignes dans la biographie d’Élie Gounelle écrite par ses soins :
Un premier projet de pastorale s’esquisse et, lors d’une rencontre au Vigan, se décide pour octobre 1940. Elle sera d’abord d’études spirituelles et de ressourcement, mais abordera bientôt l’actualité. […] Mais toute action doit à ses yeux [Gounelle] s’accompagner d’une réflexion et mettre en cause les responsabilités chrétiennes dans l’interprétation théologique d’une tradition fortement ancrée dans l’imagination de l’Église. Il pensait que cette théologie confortait ce que Jules Isaac dans son livre célèbre Jésus et Israël dénonça plus tard comme l’antisémitisme chrétien. Ce sera l’objet d’une première pastorale réunie en octobre 1940 dans le désarroi immédiat de l’après-guerre et d’une deuxième en novembre 1942, « L’Antisémitisme et la responsabilité chrétienne » (rapport confié à Jacques Martin). Liant ainsi la pensée à l’action, il donne une assise de réflexion théologique à cette action clandestine de jeunes collègues des paroisses cévenoles. Ce sera sa manière de participer à leur geste. Depuis longtemps, déjà en 1914, en note à un article sur la situation faite aux Juifs, il écrivait : « Il n’existe pas de problème qui nous intéresse plus que celui de la révision contemporaine du séculaire procès de Jésus-Christ » [43].
Protestantisme et judaïsme depuis 1945
31Il appartenait aux Églises de tenter de mener à bien après la Shoah cette révision d’un procès séculaire, entamée dans l’urgence des années 1938-1942. Au début, l’antijudaïsme n’est pas même complètement éradiqué au sein du protestantisme, comme le montre un article du pasteur barthien Jean Bosc, « Le Mystère d’Israël », dans le nouvel hebdomadaire protestant, Réforme, le 23 novembre 1946. Bosc y déclare sans ambages que les Juifs sont des gens difficiles à défendre, « voulant être absolument chez eux partout, alors qu’ils ne réussissent, en général jamais, à s’assimiler complètement à nous ». Il trouve « irritante » leur surreprésentation dans les ministères, les administrations, l’Université. On reste confondu : Drumont ou Maurras, décidément, n’étaient pas tout à fait morts. Le chrétien n’en doit pas moins refuser l’antisémitisme, « contre ses mouvements instinctifs » (sic), croit corriger Bosc, parce que sa foi lui permet de percer le mystère juif. Ce peuple est utile à l’humanité en ce qu’il lui rappelle qu’on ne se moque pas impunément de Dieu. Sa seule présence est un avertissement et une prédication pour l’Église, qui a besoin de lui et ne peut accepter son élimination… Le texte a suscité de vives réactions, celles notamment du rabbin Kaplan et de Jules Isaac, ce qui a contraint le directeur de Réforme, un autre pasteur barthien, Albert Finet, à une mise au point d’autant plus large que les uns et les autres devaient en fait se positionner face à un livre remarqué et contesté de Daniel-Rops, Jésus en son temps. Que Finet en vienne à rappeler ce que les protestants ont fait en faveur des Juifs au cours des années noires [44] révèle assez le malaise au lendemain de l’article de Bosc. Piètre défense, quoi qu’il en soit, aux yeux d’un autre pasteur, Jean-Jacques Bovet, qui estime, lui, que ces initiatives de sauvetage, « nombreuses et souvent héroïques, n’abolissent pas la responsabilité plusieurs fois séculaire du peuple chrétien ». On est bien là au cœur du sujet.
32Tout avait bien « commencé » avec Jésus en son temps. Scandalisé par la vision traditionnelle du châtiment d’Israël que le livre expose, Isaac a rédigé une lettre, refusée par Esprit mais publiée par Europe, le 1er juillet 1946, « Comment on écrit l’Histoire (sainte) ». Ce texte suscite des réactions dont Isaac fait état dans un premier article confié à la RCS, « À propos d’un débat sur la Passion [45] ». Jacques Martin, devenu le rédacteur en chef de la revue, présente ainsi les choses : « Il sait que ce combat est le nôtre. S’agissant des Juifs, il concerne la chrétienté entière. Les chrétiens surtout. Il faut que ceux-ci comprennent leur erreur et leur honte ». Jean-Jacques Bovet réagit à son tour à cet article d’Isaac dans la même RCS :
Qu’on vous relise […]. Tout l’essentiel s’y trouve, de ce qui doit être répondu aux innombrables Daniel-Rops qui sommeillent (ou qui veillent !), – avec souvent une merveilleuse bonne conscience – dans chacune de nos Églises […]. Ce n’est pas pour en dire plus que vous que j’écris cet article : c’est pour qu’une voix chrétienne vienne s’unir à la vôtre, dans le même cri d’indignation, de douleur et d’authentique piété.
[…] Dans une confession ou dans l’autre, nous appartenons, chrétiens, à une Église dont il est malheureusement légitime de dire qu’elle a fourni jadis à l’antisémitisme des excitants hideux et efficaces [46].
34Bovet n’hésite pas à écrire qu’un certain type d’attitude chrétienne revient à légitimer, à absoudre, à accepter religieusement le massacre des Juifs. Certaines plumes seraient « taillées dans le métal dont on construit les fours crématoires ». Le pasteur évoque longuement une scène de déportation à laquelle il semble se reprocher d’avoir assisté sans un regard pour les victimes. Qu’ont fait les chrétiens pour arracher de ce monde l’infamie de l’étoile jaune ? Certes, l’émotion ne sert à rien, elle ne peut résoudre ni une question d’exégèse, ni un problème politique ou social. Mais les chrétiens doivent se souvenir du remords brûlant qu’ils portent désormais en eux, les protestants sauront que les écrits de Luther contre les Juifs ont souillé sa figure plus qu’une lèpre. L’article de Bovet est repris en brochure et Isaac, qui l’apprécie particulièrement, en achète une vingtaine pour les diffuser ; il appuie le projet de Bovet de publier un recueil sous le titre Je m’accuse. Une nouvelle satisfaction lui vient d’une autre revue protestante de qualité, Foi et Vie, qui lance en avril 1947 un premier Cahier d’études juives, introduit par une longue prière du pasteur Charles Westphal, « Père, pardonne-nous » :
Nous ne devrions plus parler des Juifs, parler aux Juifs, que dans une grande angoisse d’humiliation et d’espérance […]. La question juive est la question des questions. À la manière dont ils parlent des Juifs, on peut juger sûrement de la valeur spirituelle d’un homme, d’une Église, d’un peuple, d’une civilisation. L’antisémitisme est, pour l’Église, la plus grave méconnaissance du Christ, le plus secret refus de la foi […]. Père, pardonne-nous [47].
36Westphal, ayant appris que Hachette refusait de publier Jésus et Israël, le grand travail d’Isaac, intervient auprès d’un ami protestant, Sabatier, fils et frère de pasteur et directeur littéraire chez Albin Michel, pour que ce dernier publie l’ouvrage. Sa sortie, au printemps 1948, est en quelque sorte orchestrée par les grandes revues protestantes. Le deuxième Cahier d’études juives de Foi et Vie reproduit les Propositions XI et XII du livre et la RCS publie un article d’Isaac, « Bases de l’antisémitisme chrétien [48] », qui est le résumé de Jésus et Israël. Alors que l’ouvrage suscite de vives critiques chez des catholiques comme Louis Massignon, le père Daniélou et surtout Henri-Irénée Marrou, les protestants se montrent plus favorables, tels Charles Westphal, dans Le Monde du 14 juillet 1948, Fadiey Lovsky dans Réforme et Foi et vie, et Pierre Ducros dans la RCS.
37Deux longues amitiés lient alors Isaac à des protestants très engagés dans le dialogue avec les Juifs, Jacques Martin [49] et Fadiey Lovsky. Le cadre en est d’abord la jeune Amitié judéo-chrétienne. Martin est vice-président du bureau et rédacteur en chef de la revue Amitié judéo-chrétienne ; Lovsky est secrétaire adjoint du bureau, auquel appartient également le pasteur Élie Lauriol de l’Oratoire du Louvre, un proche d’Élie Gounelle et de Martin. Je n’insisterai pas sur ce dernier, déjà longuement aperçu dans cet article [50], mais sur Fadiey Lovsky, qui a bâti une œuvre qu’on peut lire en parallèle avec celle d’Isaac, et dont le relatif manque d’écho me semble s’expliquer à la fois par la faible taille du protestantisme français et par l’éclat de travaux similaires menés par un Isaac et un Léon Poliakov. Né en 1914 à Paris dans une famille d’émigrés russes ayant rompu avec la foi orthodoxe, Lovsky s’est converti au protestantisme dans les années 1930. Il lit dans Esprit et Vie, un bulletin mensuel publié par le pasteur Louis Dallière [51], un commentaire de l’Épître aux Romains qui bouscule l’antijudaïsme chrétien. De 1947 à 1951, il assure la publication de quatre Cahiers d’études juives pour la revue Foi et Vie. De 1947 à 1968, il est secrétaire du Comité de la Fédération protestante de France pour le témoignage auprès d’Israël, devenu par la suite Comité Église et peuple d’Israël. En 1955, il publie chez Albin Michel, l’éditeur de Jésus et Israël, Antisémitisme et Mystère d’Israël, un gros ouvrage qui tente de faire, tout en s’en défendant, une histoire globale de l’antisémitisme. Si plusieurs chapitres sont consacrés aux antisémitismes païen, musulman, rationaliste, raciste, le cœur de l’étude s’intéresse à l’antisémitisme chrétien et aux diverses formes qu’il a revêtues dans l’histoire – la différenciation, l’installation, le ressentiment, pour reprendre les formules de l’auteur. En 1970, Lovsky publie au Cerf une anthologie raisonnée de L’Antisémitisme chrétien. Un troisième livre important, La Déchirure de l’absence. Essai sur les rapports de l’Église du Christ et du peuple d’Israël paraît chez Calmann-Lévy l’année suivante. L’auteur y mêle des considérations théologiques et politiques, s’intéressant aussi bien au sionisme et à l’État d’Israël qu’à la rencontre des Juifs et des chrétiens sous le regard de Dieu. L’attitude des seconds à l’égard des premiers est le pivot de la réconciliation durable de la chrétienté : l’unité de l’Église ne peut se concevoir sans le peuple d’Israël.
38Laissons maintenant les intellectuels et intéressons-nous aux Églises pour noter les initiatives prises en faveur de ce dialogue avec les Juifs. S’il n’y avait aucun protestant français à la conférence de Seelisberg en juillet-août 1947, leurs coreligionnaires suisses, britanniques, américains, y dominaient. C’est le Genevois Pierre Visseur, secrétaire de l’International Council of Christians and Jews (ICCJ), fondé à Oxford en 1946, qui est venu à Paris inviter Jules Isaac [52]. Foi et Vie publie le message du Synode de l’Église réformée des Pays-Bas instituant, à partir de 1949, une journée de prière pour Israël, le dimanche précédant le Grand Pardon. À son tour, en 1955, la liturgie de l’Église réformée de France se dote d’une Prière d’intercession pour Israël. Elle débute ainsi : « Protège le peuple d’Israël contre les violences de l’antisémitisme. Garde-nous, garde l’Église de toute tentation de haine ou de mépris, en présence des Juifs et de leur destin. » Les décisions les plus importantes, et pour cause, sont prises au niveau œcuménique global : en août-septembre 1948, Amsterdam accueille la première assemblée du Conseil œcuménique des Églises (COE), qui réunit 351 délégués de 147 Églises luthériennes, calvinistes, anglicanes et orthodoxes. Le COE était d’autant plus attentif à la question des relations entre chrétiens et Juifs qu’au cours des années 1940, deux de ses principaux dirigeants, le pasteur hollandais Willem Adolf Visser’t Hooft, son secrétaire général, et le pasteur allemand (d’origine juive) Adolf Freudenberg, secrétaire général du Comité œcuménique pour les réfugiés à Genève, avaient œuvré au premier plan pour le sauvetage des Juifs et l’éradication de l’antijudaïsme chrétien. L’assemblée d’Amsterdam rédige un long texte qui rappelle l’alliance de Dieu avec Israël, et la promesse qu’il lui a faite de la venue de son Messie. Les chrétiens savent que Jésus-Christ a accompli cette promesse et ils doivent, « humbles mais convaincus », annoncer aux Juifs que le messie qu’ils attendaient est venu. Les Juifs sont donc toujours un peuple à évangéliser. Encore faut-il – et le COE retrouve ici l’intuition du jeune Luther –, pour que la tâche puisse être accomplie, que « tombent certaines barrières » :
Nous pensons ici spécialement à celles que nous avons trop souvent contribué à élever nous-mêmes et que nous sommes seuls à pouvoir faire tomber.
Nous devons confesser en toute humilité que nous avons trop souvent négligé les devoirs de l’amour chrétien, et même ceux de la simple justice sociale à l’égard des Juifs. Nous avons négligé de combattre de toutes nos forces le désordre séculaire que constitue l’antisémitisme. Dans le passé, les Églises ont contribué à présenter les Juifs comme les seuls ennemis du Christ, ce qui a renforcé l’hostilité de la société séculière à leur égard. Dans bien des pays, l’antisémitisme reste une force virulente, tandis qu’ailleurs les Juifs sont l’objet de traitements indignes.
Nous demandons à toutes les Églises représentées ici de dénoncer l’antisémitisme, quelles que soient ses origines, comme une attitude absolument inconciliable avec la profession et la pratique de la foi chrétienne. L’antisémitisme est un péché à la fois contre Dieu et contre l’homme [53].
40Le travail entamé entre 1946 et 1948 n’a plus cessé, aussi bien au niveau du protestantisme français qu’européen. Parmi les quelques textes qui ont marqué, on signalera spécialement le vœu adressé par le Conseil de la Fédération protestante de France au COE, le 14 mars 1961. Le Conseil, selon ses propres termes, n’entend se pencher ni sur les problèmes théologiques posés aux chrétiens par le peuple d’Israël, ni sur les incidences purement politiques provoquées par la création de l’État d’Israël, sans pour autant « oublier non plus les souffrances, anciennes et récentes, supportées par les Juifs » ; il demande au COE de prolonger et de préciser sa condamnation, en 1948, de l’antisémitisme comme « un péché contre Dieu et l’homme »,
en recommandant aux éducateurs chrétiens, aux catéchètes et aux prédicateurs de tenir compte des fâcheux précédents historiques et de multiplier les précautions afin que l’enseignement ne soit pas altéré par les ferments de la tentation antisémite, de sorte que l’enseignement chrétien sous toutes ses formes ne puisse jamais ni engendrer ni favoriser des sentiments de haine, de répulsion ou de mépris, sous quelque forme qu’ils se déguisent, à l’égard des Juifs et du peuple de Jésus-Christ, de ses premiers disciples et des apôtres [54].
42Le COE a d’autant plus poursuivi dans ce sens que l’Église catholique, au concile de Vatican II, a clairement redéfini ses liens avec le judaïsme dans la constitution Nostra aetate. L’ensemble du christianisme avançait désormais dans la même direction. Si la réunion de Bristol, en 1967, dite « Foi et Constitution », n’a pas remis en cause l’antique mission chrétienne envers les Juifs [55], les choses ont changé dans les années 1970 et 1980, avec les textes intitulés Directives pour le dialogue interreligieux (1979) et Considérations œcuméniques sur le dialogue judéo-chrétien (1982). Le tout est synthétisé dans la déclaration rédigée par le COE en 1988, Les Églises et le peuple juif, vers une entente nouvelle. On y lit que l’alliance de Dieu avec le peuple juif reste valable, que l’antisémitisme et toute forme d’« enseignement du mépris » pour le judaïsme sont à rejeter, que le prosélytisme en direction des Juifs est incompatible avec la foi chrétienne. Voici le texte même des deux derniers paragraphes :
Nous nous réjouissons de la perpétuation de l’existence et de la vocation du peuple juif, en dépit des tentatives faites pour le faire disparaître, et y voyons un signe de l’amour et de la fidélité de Dieu envers lui. Ce fait ne remet pas en cause le caractère unique du Christ et la vérité de la foi chrétienne. Ce que nous voyons, ce n’est pas une alliance en supplantant une autre, mais deux communautés de foi, appelées l’une et l’autre aux dons respectifs qu’elles ont reçus de Dieu, et l’une et l’autre responsables devant Dieu.
Nous affirmons que le peuple juif d’aujourd’hui est en continuité avec l’Israël biblique et sommes reconnaissants de la vitalité que possèdent la foi et la pensée juives. Nous considérons les Juifs et les chrétiens, en même temps que tous les adhérents des fois vivantes, comme des partenaires de Dieu, travaillant dans le respect et la coopération mutuels pour la justice, la paix et la réconciliation [56].
44En 2001, enfin, les Églises européennes issues de la Réforme, réunies dans la Communion ecclésiale de Leuenberg, ont publié un long document, Église et Israël, qui entend faire le point de manière doctrinalement argumentée sur les relations entre christianisme et judaïsme. Cette déclaration s’inscrit dans la continuité directe de celle du COE qui vient d’être citée. On peut considérer dès lors que l’essentiel du travail théologique a été fait : l’éradication de toute trace d’antijudaïsme, l’abandon de toute mission d’évangélisation destinée aux Juifs, la renonciation à toute théologie de la substitution des alliances, ce qui est peut-être le point majeur et le plus délicat, d’un point de vue chrétien, depuis les textes de saint Paul.
45Église et Israël intervient également sur la question, sensible entre toutes, de l’État d’Israël :
Pour des raisons historiques et théologiques, l’Église est liée par la solidarité avec Israël. Ceci demeure valable même si les Églises prennent position de façon critique sur le conflit israélo-arabe et sur des décisions politiques actuelles du gouvernement de l’État d’Israël. Elles s’opposent à toutes les tendances qui cherchent à diffamer le mouvement sioniste – qui a conduit à la fondation de l’État d’Israël – en le qualifiant de raciste. Les Églises soutiennent tous les efforts de l’État d’Israël et de ses voisins, en particulier du peuple palestinien, pour parvenir à une paix sûre, durable et juste dans le respect mutuel, et pour la sauvegarder.
La question du sens théologique de la fondation et de l’existence de l’État d’Israël pour les chrétiens obtient des réponses différentes selon les Églises et demeure un défi pour celles-ci. Dans ce contexte, toute application directe à la politique des promesses bibliques relatives à la terre doit être récusée. Il faut également rejeter toutes les interprétations tendant à considérer ces promesses comme dépassées à la lumière de la foi chrétienne. La prise en compte par les chrétiens de l’élection d’Israël en tant que peuple de Dieu ne peut en aucun cas conduire à légitimer l’oppression de minorités politiques, ethniques et religieuses au nom de considérations religieuses [57].
47Avec deux spécialistes, le pasteur Alain Massini, président de la commission « Chrétiens et Juifs » de la Fédération protestante de France, ou le pasteur Michel Leplay, membre de l’Amitié judéo-chrétienne, on doit remarquer qu’Église et Israël a reçu peu d’échos dans le monde protestant, sinon dans quelques revues de qualité mais très spécialisées et au lectorat confidentiel [58]. Massini souligne à juste titre que la Fédération protestante de France, très plurielle dans sa composition et ses sensibilités (qui vont du soutien militant à la cause palestinienne, notamment dans la CIMADE, à des formes de sionisme chrétien), ne peut la faire immédiatement sienne [59]. C’est peut-être que la chronologie (et l’anthologie) qui viennent d’être rappelées ont été en quelque sorte doublées, dès 1948 au plus tard, d’une autre chronologie, de plus en plus envahissante : celle de l’État d’Israël et des réactions face à sa création et à sa politique. Alors que les protestants français s’étaient révélés historiquement proche des Juifs, dans l’affaire Dreyfus comme dans les années 1940, et qu’ils ont d’abord soutenu le jeune État, ils semblent s’être laissés emporter au cours deux dernières décennies du xxe siècle, et comme l’immense majorité des Français, dans une dénonciation de plus en plus sévère de la politique d’Israël et dans une sympathie parfois agissante pour la cause des Palestiniens. J’y vois pour ma part la preuve d’une normalisation du statut des protestants dans la société française : de moins en moins différents, de plus en plus oublieux de leur spécificité de minorité anciennement persécutée, ils regardent l’État d’Israël avec les yeux de leurs compatriotes d’origine catholique ou athée, là où leurs pères regardaient Israël, le peuple dont parle leur Bible, comme celui de leur Dieu et comme une minorité sœur face à la longue hostilité que l’État catholique français a marquée aux uns comme aux autres.
48Ceci est une autre question, aussi familière que délicate, et qu’il ne m’appartient pas d’aborder ici : celle de la manière dont l’antisionisme peut en arriver, éventuellement, à retrouver une part au moins du legs antisémite ; il s’agissait, dans cet article, de rappeler l’effort, que l’on peut estimer couronné de succès, par lequel les Églises protestantes françaises (et européennes) et leurs théologiens ont éradiqué la partie proprement chrétienne –l’antijudaïsme –de ce même legs antisémite, d’abord dans l’urgence des temps de nazisme et de Shoah, puis dans la relative sérénité des temps de repentance, d’éclaircissement et de purification mémorielle et théologique.
Bibliographie
Bibliographie
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- Fadiev Lovsky, La déchirure de l’absence. Essai sur les rapports entre l’Église du Christ et le peuple d’Israël, Calmann-Lévy, 1971
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- Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre 1939-1945. Dictionnaire thématique et biographique, Paris, Les Éditions de Paris, 2000
- Rosemary Radford Ruether, Faith and Fratricide. The Christian Theological Roots of Anti-Semitism, New York, Seabury Press, 1974
- Sens, revue de l’amitié judéo-chrétienne de France, « Le dialogue judéo-chrétien. Textes fondamentaux. 2 Réflexions protestantes », 2000, n° 9-10
- K. Spicer (éd.), Antisemitism, Christian Ambivalence and the Holocaust, Bloomington and Indianapolis, Indiana University Press, 2007
- Daniel Tollet (éd.), Les textes judéophobes et judéophiles dans l’Europe chrétienne à l’époque moderne, Paris, PUF, 2000
Notes
-
[1]
Professeur d’histoire contemporaine à l’université de Toulouse II-Le Mirail, il dirige la revue Diasporas. Histoire et sociétés. Il a co-dirigé Cévennes, terre de refuge 1940-1944 (4e éd., 2006) et La Deuxième Guerre mondiale, des terres de refuge aux musées (2003), et publié Juifs et protestants en France, les affinités électives xvie-xxie siècle (2004).
-
[2]
Au moins une autre collectivité, elle aussi fortement marquée par le protestantisme, serait candidate à une telle reconnaissance, le pays de Dieulefit, dans la Drôme. Le projet est porté par l’association Patrimoine, mémoire et histoire du pays de Dieulefit. Sur l’accueil des Juifs (entre autres) dans les années 1940 à Dieulefit et dans sa région, lire Sandrine Suchon, Résistance et Liberté. Dieulefit 1940-44, préface de Pierre Bolle, Die, Éditions À Die, 1994, et Anne Vallaeys, Dieulefit ou le miracle du silence, Paris, Fayard, 2008.
-
[3]
Je renvoie à la bibliographie insérée en fin d’article (pp. 76-77).
-
[4]
Le 18 octobre 1945, le Conseil des Églises évangéliques d’Allemagne, réuni à Stuttgart, évoque « la solidarité d’une faute commune » et affirme avec douleur : « C’est à cause de nous que des souffrances extrêmes se sont abattues sur de nombreux peuples et de nombreux pays. » Le 27 avril 1950, les synodes de l’Église évangélique d’Allemagne, réunis à Weissensee, se déclarent « solidairement coupables par nos omissions et par nos silences, devant le Dieu de miséricorde, des crimes qui ont été commis contre les Juifs par des membres de notre peuple. […] Nous prions tous les chrétiens de désavouer l’antisémitisme et de lui résister énergiquement où qu’il se manifeste ». Textes édités dans Sens, 2000, n° 9-10, Le Dialogue judéo-chrétien. Textes fondamentaux 2. Réflexions protestantes, pp. 423-424.
-
[5]
On trouvera la traduction synthétisée et commentée de cette brochure de 44 pages, publiée en 1945 à Budapest, rééditée en fac-similé en 1984, par les soins d’Henri de Montety, « L’Église réformée de Hongrie et la persécution des Juifs », Diasporas. Histoire et sociétés, 8, 2006, pp. 208-222.
-
[6]
On entend par là la minorité de l’Église luthérienne allemande qui a refusé la soumission au nazisme, et dont le maître à penser était le théologien calviniste suisse de langue allemande, Karl Barth.
-
[7]
Imprimé à Valence début décembre 1939, avec une préface datée du mois d’octobre. Édition originale, en langue allemande, à Zurich ; cet ouvrage a été traduit dans les principales langues « protestantes » d’Europe : l’anglais, le danois, le hollandais, le norvégien et le suédois.
-
[8]
On peut lire la biographie de ce dernier : Tela Zasloff, A Rescuer’s Story. Pastor Pierre-Charles Toureille in Vichy France, Madison, The University of Wiconsin Press, 2003.
-
[9]
Plus exactement, le texte cite la Lozère, la Haute-Loire, l’Ardèche et le Dauphiné, toutes régions d’implantation du protestantisme rural.
-
[10]
Elle n’est pas nommée, apparaissant seulement comme Mme B., à l’évidence pour des raisons de protection (elle est alors réfugiée en Suisse) ; elle apparaît sous son nom complet dans Les Clandestins de Dieu. CIMADE 1939-1945, textes rassemblés par Jeanne Merle d’Aubigné et Violette Mouchon, Paris, Fayard, 1968, pp. 182-184.
-
[11]
Le pasteur Élie Gounelle lui fait écho dans les colonnes de la Revue du christianisme social, en janvier-mars 1946, p. 11 : « Si collectivement nous n’avons pu agir, individuellement chacun de nous a fait ce qu’il a pu, et c’était beaucoup. C’était beaucoup de lutter contre l’ignoble antisémitisme, d’aider nos frères juifs traqués, de ravitailler le maquis. »
-
[12]
Les Églises protestantes pendant la guerre et l’Occupation. Actes de l’Assemblée générale du protestantisme français, Fédération protestante de France, 1946, p. 10. Plus loin, Boegner signale que les Églises (protestantes) de l’étranger saluaient avec émotion, dans la Cimade, « un signe manifeste de la résistance et de la vitalité du protestantisme français », p. 40.
-
[13]
Ibid., p. 29.
-
[14]
Droit et Liberté, 28 janvier-2 février et 3 février-8 février 1951, pp. 3 et 5 (article d’Oscar Rosowski). Peace news, 29 mai 1953, pp. 4 et 5. On trouvera une analyse dans Patrick Cabanel, Juifs et protestants en France, les affinités électives, xvie-xxie siècles, Paris, Fayard, 2004, pp. 306-307.
-
[15]
Donald A. Lowrie, The Hunted Children, New York, Norton et Company, 1963, pp. 194-202.
-
[16]
Madeleine Barot et les pasteurs Marc Boegner, Marc Donadille, André Dumas, Henri Manen et André Morel.
-
[17]
Les Clandestins de Dieu, op. cit.
-
[18]
Les Églises protestantes pendant la guerre, op. cit., p. 42.
-
[19]
Allocution reproduite dans : Deuxième Centenaire de la Libération des dernières prisonnières huguenotes de la Tour de Constance 1768-1968, Paris, Société de l’histoire du protestantisme français, 1969, p. 80.
-
[20]
Anny Latour, La Résistance juive en France, 1940-1944, Paris, Stock, 1970, pp. 133-140.
-
[21]
Droit et Liberté, art. cit.
-
[22]
Le Point, n° 312, juin 1979 ; Le Monde, 24 juin 1979.
-
[23]
Philippe Joutard, Jacques Poujol et Patrick Cabanel (dir.), Cévennes, terre de refuge 1940-1944, Montpellier, Presses du Languedoc, 1987 (4e éd., 2006).
-
[24]
N. Vesper, « Deuxième lettre aux Juifs », Sully, décembre 1942, p. 4.
-
[25]
« Une loi qui, frappant exclusivement les Israélites, frappe indistinctement les Israélites français depuis de longues générations et souvent depuis des siècles, et les naturalisés d’hier », alors qu’il fallait lire : « une loi frappant indistinctement les Israélites, français depuis de longues générations, et souvent depuis des siècles, et les naturalisés d’hier ». Coquille (et coupure) reprises par Philippe Boegner dans l’édition des Carnets du pasteur Boegner, 1940-1945, Paris, Fayard, 1992, qui ne comprenait pas la copie de ces lettres (pp. 92-93).
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[26]
Il y a là des relents de xénophobie à peine masqués…
-
[27]
« Antijudaïsme protestant » et « Lettre du pasteur Boegner au grand rabbin », Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, 1939-1945, Paris, Les Éditions de Paris, 2000, pp. 21-22 et 100-102. On notera qu’Henri Cadier cite intégralement la lettre au grand rabbin, Le Calvaire d’Israël…, op. cit., pp. 46-47.
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[28]
Ainsi que le pasteur Franck Berton, frère du pasteur Jean Berton, président de la région « Paris » de l’Église réformée, qui s’était lui aussi refusé à lire le message.
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[29]
Cité par Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, op. cit., p. 22.
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[30]
J’ai tenté de développer ce point dans « Protestantismes minoritaires, affinités judéo-protestantes et sauvetage des Juifs dans les années 1940 », article à paraître.
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[31]
Plus paresseux encore, mais sans doute plus prudent, j’aurais pu citer l’étude très éclairante de Denis Müller dans l’article « Judaïsme » de l’Encyclopédie du protestantisme, Pierre Gisel (dir.), 2e éd., Paris, PUF, 2006, pp. 700-701.
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[32]
P.-F. Moreau, « Calvin, le peuple hébreu et la continuité des deux Testaments », dans Daniel Tollet, Les Textes judéophobes et judéophiles dans l’Europe chrétienne à l’époque moderne, Paris, PUF, 2000, pp. 85-96 [p. 86]. Rosemary Radford Ruether parle pareillement de « fatalité dualiste » ayant contraint le christianisme, nouvel Israël, à la négation de l’« ancien ». R. R. Ruether, Faith and Fratricide. The Christian Theological Roots of Anti-Semitism, New York, Seabury Press, 1974, cité par David Banon dans l’article « Judaïsme » de l’Encyclopédie du protestantisme, op. cit., p. 692.
-
[33]
« De la similitude et différence… », dans les éditions de 1541-1557.
-
[34]
Jean Calvin, Institution de la Religion chrestienne, livre second, édition de Jean-Daniel Benoit, Paris, Vrin, 1957, livre II, chap. X, paragraphe 13, p. 207 (graphie modernisée par mes soins). Un peu plus loin, Calvin ajoute : « Nous conclurons donc que le vieil Testament, ou l’alliance que Dieu a faite au peuple d’Israël, n’a pas été seulement contenue en choses terriennes, mais aussi a compris certaines promesses de la vie spirituelle et éternelle, de laquelle l’espérance devait être imprimée au cœur de tous ceux qui s’alliaient vraiment à ce Testament », ibid., parag. 23, p. 214.
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[35]
Commentaires de Jean Calvin sur le Nouveau Testament, 1852, t. I, p. 23, cité par Myriam Yardeni, « Juifs et judaïsme dans la théologie calviniste française du xviie siècle », Foi et Vie, juillet 2003, p. 5.
-
[36]
D. Muller, « Judaïsme », art. cit., p. 701.
-
[37]
Aux éditions Labor, Genève, et « Je sers », Paris. Analyse et extraits dans Jacques Poujol, Protestants dans la France en guerre, op. cit., pp. 19-20.
-
[38]
Objecteur de conscience à plusieurs reprises condamné par les tribunaux militaires, il a vu l’Église réformée refuser de le consacrer aux fonctions pastorales et ne deviendra pasteur que longtemps après la guerre. Juste des nations. Les analyses qui suivent sont reprises de mon article, « Le Pasteur Jacques Martin, de l’objection de conscience à la résistance spirituelle à l’antisémitisme », Archives juives, n° 40/1, 1er semestre 2007, pp. 78-99.
-
[39]
Jacques Martin, « L’Antisémitisme païen… et chrétien », RCS, août 1939, pp. 120-129.
-
[40]
Cité par M. Yardeni, « Juifs et judaïsme… », art. cit.
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[41]
RCS, août 1939, art. cit., p. 128.
-
[42]
« Nous avions réuni tous les pasteurs de cette région des Cévennes sur ce problème. Ces préliminaires étaient nécessaires. L’intérêt pour les Juifs n’est pas né spontanément, ni dans le souvenir des camisards ! Une longue préparation, une réflexion ont précédé, en opposition souvent avec telle ou telle théologie, protestante, qui considérait les Juifs et le judaïsme comme un simple préambule au christianisme, sans plus, alors qu’il s’agissait de tout un problème d’ordre spirituel, sur lequel s’est greffé le problème humain des sauvetages à partir de 1942 », témoignage publié dans Joutard, Poujol et Cabanel (dir.), Cévennes, terre de refuge, op. cit., pp. 239-240.
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[43]
Jacques Martin, Élie Gounelle. Apôtre et inspirateur du christianisme social, Paris, L’Harmattan, 1999, p. 195 ; la citation de Gounelle est tirée de RCS, 1914, pp. 414-431.
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[44]
« Et, bien qu’il me déplaise de parler de nous-mêmes dans Réforme, je rappelle que durant toute l’Occupation, les protestants, par la voix de leurs autorités ecclésiastiques et par leurs actes privés, ont montré qu’ils en avaient nettement conscience », Albert Finet, « Jésus et notre temps. Juifs et chrétiens », Réforme, 7 décembre 1946.
-
[45]
RCS, octobre-novembre 1946, pp. 699-714.
-
[46]
Jean-Jacques Bovet, « L’Étoile », RCS, novembre-décembre 1946, pp. 408-422 (pp. 416 et 420).
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[47]
Foi et Vie, 1er Cahier d’études juives, avril 1947, pp. 209-211.
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[48]
RCS, mars-avril 1948, pp. 120-141.
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[49]
Isaac et Martin se sont rencontrés pendant la guerre à Saint-Agrève (Ardèche), où les Isaac se sont cachés quelque temps.
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[50]
Voir mon article « Protestantismes minoritaires, affinités judéo-protestantes et sauvetage des Juifs dans les années 1940 », à paraître.
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[51]
Aujourd’hui « Juste parmi les nations », comme Jacques Martin et Charles Westphal.
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[52]
Isaac allait participer également au 3e congrès international de l’ICCJ, à l’université de Fribourg, en juillet 1948.
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[53]
Cité par Michel Leplay, Les Églises protestantes et les Juifs face à l’antisémitisme au xxe siècle, Lyon, Éditions Olivétan, 2006, pp. 50-51. Texte complet dans le numéro spécial de la revue Sens, n° 9-10, 2000, op. cit.
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[54]
Cité par Marie-Thérèse Hoch et Bernard Dupuy, Les Églises devant le christianisme. Documents officiels 1948-1978, Paris, Cerf, 1980, pp. 170-171. Voir aussi Sens, 2000, n° 9-10, op. cit., p. 426.
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[55]
Texte dans Sens, op. cit., pp. 432-447.
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[56]
Cité par M. Leplay, op. cit., p. 58. Texte complet dans Sens, op. cit., p. 453-459.
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[57]
Église et Israël, III, 1.1.3, texte intégral dans le numéro spécial de Foi et Vie, février 2002, n° 1, ou encore dans la revue catholique Istina, avril-juin 2002, pp. 134-195.
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[58]
Outre les publications signalées à la note précédente, Colette Kessler lui a consacré un important article dans Sens, n° 11, 2002, pp. 565-573, et le pasteur Jaques Gruber, un résumé dans Yerushalaïm, n° 32, mai 2003, pp. 11-16.
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[59]
Communication au colloque de Paris du 2 mai 2004, « Juifs et protestants en France aujourd’hui ». Les actes sont disponibles en ligne, à l’adresse http://www.protestants.org/textes/colloque_juifs-protestants/massini.htm.