Notes
-
[1]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », Revue internationale du Travail, vol. 66, n° 1, 1952, p. 1-32 et n° 2, 1952, p. 127-159.
-
[2]
Doublet Jacques, « La Sécurité sociale et les frontières : Formation d’un droit international », Population, vol. 10, n° 2, avril 1955, p. 263-276.
-
[3]
Ferrera Maurizio, Les nouvelles frontières du social : l’intégration européenne et les transformations de l’espace politique de la protection sociale, Paris, Presses de Sciences Po, 2009.
-
[4]
Fertikh Karim, “From Territorialized Rights to Personalized International Social Rights? The Making of the European Convention on the Social Security of Migrant Workers (1957)”, in Baár Monika, van Trigt Paul (eds), Marginalized Groups, Inequalities and the Post-War Welfare. State Whose Welfare?, New York - London, Routledge, 2019, p. 29-48.
-
[5]
Rosental Paul-André, « Migrations, souveraineté, droits sociaux. Protéger et expulser les étrangers en Europe du XIXe siècle à nos jours », Annales. Histoire, Sciences Sociales, vol. 66, n° 2, 2011, p. 335-373.
-
[6]
Althammer Beate, “Welfare Does Not Know Any Borders’: Negotiations on the Transnational Assistance of Migrants before the World Wars”, Journal of Migration History, vol. 6, n° 3, 2020, p. 352-378.
-
[7]
Kott Sandrine, « Un modèle international de protection sociale est-il possible ? L’OIT entre assurance et Sécurité sociale (1919-1952) », Revue d’histoire de la protection sociale, vol. 10, n° 1, 2017, p. 62-83.
-
[8]
Lengwiler Martin, “Cultural Meanings of Social Security in Postwar Europe”, Social Science History, vol. 39, n° 1, 2015, p. 88-89.
-
[9]
Laroque Pierre, « De l’assurance sociale à la Sécurité sociale. L’expérience française », Revue internationale du Travail, LVII, fasc. 6, 1948, p. 645.
-
[10]
Lefevbre F., « Les pensions et allocations de vieillesse des divers régimes de Sécurité sociale », Informations sociales, vol. 7, n° 6, 1953, p. 296-307.
-
[11]
Kang Jin-Hee, « L’accès au marché du travail des réfugiés (1945-54) », in Angoustures Aline, Kevonian Dzovinar, Mouradian Claire (dir.), Réfugiés et apatrides : administrer l’asile en France, 1920-1960, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2017, p. 153-164.
-
[12]
Rosental Paul-André, Destins de l’eugénisme, Paris, Éditions du Seuil, 2016, p. 433-443.
-
[13]
Canepa Giacomo, “Catholic Civil Servants and Social Services: State and Subsidiarity in Italy and France (1945-58)”, European Journal for the History of Medicine and Health, vol. 79, 2022, p. 330-361.
-
[14]
Béthouart Bruno, Le ministère du Travail et de la Sécurité sociale : de la Libération au début de la Ve République, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006, p. 256.
-
[15]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’entraide sociale, 9 février 1952, p. B52, AN 19760180/6.
-
[16]
Conrad Christoph, « Pour une histoire des politiques sociales après le tournant transnational », in Brodiez-Dolino Axelle, Dumons Bruno (dir.), La protection sociale en Europe au XXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2014, p. 75-98.
-
[17]
Pour la liste des traités, voir Doublet Jacques, « Problèmes de Sécurité sociale et Communauté européenne du charbon et de l’acier », Annuaire français de droit international, vol. 3, n° 1, 1957, p. 570.
-
[18]
Mechi Lorenzo, « Du BIT à la politique sociale européenne : les origines d’un modèle », Le Mouvement social, vol. 244, n° 3, 2013, p. 17-30.
-
[19]
Arrangement relatif aux transferts financiers des travailleurs italiens, 21 mars 1947, AN 19790259/1.
-
[20]
Doublet Jacques, « La Sécurité sociale et les frontières », art. cit.
-
[21]
Picquenard Suzanne, « L’organisation de l’assistance en France et son application aux étrangers », Informations sociales, vol. 5, n° 14, 1951, p. 920.
-
[22]
Les travailleurs étrangers sont admis au bénéfice des allocations de chômage dans les mêmes conditions que les travailleurs français par le décret n° 51-319 du 12 mars 1951 (Journal officiel, 13 mars 1951, p. 2671).
-
[23]
« Projets de convention et de recommandation concernant les travailleurs migrants », 12 septembre 1949, AN 19770623/69.
-
[24]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 32.
-
[25]
Note sur les droits des réfugiés et apatrides en matière d’aide sociale et prestations non contributives de vieillesse, 10 mars 1964, AN 19760183/68.
-
[26]
Procès-verbal de la séance 199/AS/32, 10 février 1955, AN CE/514.
-
[27]
Circulaires n° 35 SS et n° 60 SS du 21 mars et du 5 août 1957, AN 19760183/68.
-
[28]
L’exclusion du FNS des étrangers non bénéficiaires d’une convention internationale a motivé la décision du 22 janvier 1990 du Conseil constitutionnel, affirmant l’illégalité de la subordination de l’accès aux prestations sociales à une condition de nationalité: cf. Michelet Karine, « Le droit des étrangers à la protection sociale. De l’affirmation du droit à sa mise en œuvre », Informations sociales, vol. 142, n° 6, 2007, p. 82.
-
[29]
Bonnechère Michèle, « Réflexions sur la Sécurité sociale des travailleurs migrants », Revue trimestrielle de droit sanitaire et social, vol. 12, n° 2, 1972, p. 133.
-
[30]
MTSS, Circulaire n° 103 relative à la situation des réfugiés au regard de l’allocation supplémentaire, 4 novembre 1959, AN 19760183/68.
-
[31]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 14.
-
[32]
Rosental Paul-André, L’intelligence démo-graphique : sciences et politiques des populations en France, 1930-1960, Paris, Odile Jacob, 2003, p. 110-113.
-
[33]
Accord du 17 avril 1950, Journal officiel, 13 mai 1951, p. 4995-96.
-
[34]
En 1948, l’Italie n’avait remboursé que 4,5 % des frais d’assistance des Italiens résidents en France et celle-ci souhaitait s’orienter vers une solution financière garantissant une diminution des contentieux de remboursement (« Attributions du 8e bureau de la sous-direction de l’entraide », s.d., AN 19760180/5).
-
[35]
Ambassade des Pays-Bas, « Insuffisance des allocations vieillards dont bénéficient aussi les étrangers », 18 juillet 1951, AN 19760180/7.
-
[36]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entr’aide sociale, 6 février 1952, p. A33, AN 19760180/6.
-
[37]
Ibid., p. A33-A34.
-
[38]
Compte rendu de la réunion de la Commission interministérielle pour la protection juridique des réfugiés, 6 octobre 1952, AN 20050590/107.
-
[39]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 6 février 1952, p. A48, AN 19760180/6.
-
[40]
Laporte André, « La réforme de la législation sur l’aide sociale », Droit social, 1954, p. 103.
-
[41]
Assistance à la famille, s.d. mais janvier 1952, AN 19760180/7.
-
[42]
Emmanuel Rain, « La réforme des lois d’assistance », La Revue administrative, vol. 6, n° 34, 1953, p. 350.
-
[43]
Décret n° 53-1186 du 29 novembre 1953, Journal officiel, 3 décembre 1953.
-
[44]
Circulaire n° 1590 relative à la Convention européenne d’assistance sociale et médicale, 20 mars 1958, AN 19760180/6.
-
[45]
Rauzy Albert, Jouany Denis, « Rapport concernant la réforme et la codification des lois d’assistance », 4 janvier 1952, AN 19760180/6.
-
[46]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 9 février 1952, p. B18, AN 19760180/6.
-
[47]
Aide sociale aux personnes âgées et aide sociale aux infirmes. Commission centrale, 18 juin 1959 », Revue de l’Aide sociale, vol. 3, n° 1, 1960, p. 38-42.
-
[48]
Question écrite n° 16800 posée après M. Henri Lacaze, 10 mai 1955, AN 19760183/54.
-
[49]
Sur le SSAE, crée en 1921, voir Chibrac Lucienne, Les pionnières du travail social auprès des étrangers : le Service social d’aide aux émigrants, des origines à la Libération, Éditions de l’École nationale de la santé publique, Paris, 2005.
-
[50]
Procès-verbal, Emmanuel Rain, 4 octobre 1952, AN 20050590/107.
-
[51]
Budget d’assistance aux réfugiés, 26 novembre 1952, AN 20050590/103.
-
[52]
Assistance aux réfugiés, 19 août 1952, AN 20050590/103.
-
[53]
Situation en France des étrangers bénéficiaires de conventions d’assistance, 27 juillet 1955, AN 19760183/68.
-
[54]
Ambassade Pays-Bas, 19 juillet 1955, AN 19760183/68 ; Note pour le chef du 4e bureau, 1er décembre 1960, ibid.
-
[55]
Situation en France des étrangers bénéficiaires de conventions d’assistance, 27 juillet 1955, AN 19760183/68.
-
[56]
Décrets n° 62-440 et 62-444 du 14 avril 1962, Journal officiel, 15 avril 1962.
-
[57]
« Modification envisagée pour permettre aux personnes âgées étrangères qui ne bénéficient pas de l’allocation supplémentaire du FNS de percevoir l’allocation simple d’aide sociale », Alain Barjot à Emmanuel Rain, 17 juillet 1964, AN 19760183/68.
-
[58]
Capuano Christophe, Que faire de nos vieux ? Une histoire de la protection sociale de 1880 à nos jours, Paris, Presses de Sciences Po, 2018.
-
[59]
Application des décrets du 14 avril 1962, 19 janvier 1963, AN 19760183/68.
-
[60]
La loi du 12 juin 1956 (Journal officiel, 13 juin 1956) autorise la ratification de la convention, signée en 1958 : décret n° 58-194, Journal officiel, 26 février 1958.
-
[61]
Alfandari Elie, « Décret du 18 février 1958 portant publication de la convention européenne d’assistance sociale et médicale », Revue de l’Aide sociale, vol. 1, n° 2, 1958, p. 72.
-
[62]
Décret n° 60-1066 du 4 octobre 1960, Journal officiel, 5 octobre 1960. Seuls les réfugiés sous mandat du Haut-Commissariat des Nations Unies (Égyptiens, Libanais, Tunisiens) demeuraient exclus.
-
[63]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 32.
-
[64]
Ibid.
-
[65]
Perrin Guy, « Les prestations non contributives et la Sécurité sociale », Droit social, n° 3, 1961, p. 181.
-
[66]
Bec Colette, L’assistance en démocratie : les politiques assistantielles dans la France des XIXe et XXe siècles, Paris, Belin, 1998, p. 80.
-
[67]
Rauzy Albert, Picquenard Suzanne, La législation de l’aide sociale : textes et commentaires à jour au 1er juin 1955, Paris, Berger-Levrault, 1955, p. 143.
-
[68]
Fertikh Karim, “From Territorialized Rights to Personalized International Social Rights?”, op. cit., p. 38.
-
[69]
« Allocation vieillesse supplémentaire FNS. Réfugié apatride », Revue trimestrielle de droit sanitaire et social, vol. 10, n° 4, 1967, p. 318-319.
-
[70]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 9 février 1952, p. B6, AN 19760180/6.
1 En 1952, l’architecte du système de Sécurité sociale français Pierre Laroque publie dans la Revue internationale du Travail deux articles qui analysent les conceptions du fondement des législations nationales européennes, les divergences des lois et les discriminations entre étrangers et nationaux [1]. Pierre Laroque et son successeur à la direction générale de la Sécurité sociale du ministère du Travail (MTSS), Jacques Doublet, se veulent optimistes, en saluant la définition, désormais avalisée, d’une doctrine des relations internationales en matière de Sécurité sociale qui doit garantir aux migrants leurs droits à prestations, acquis ou en cours d’acquisition [2]. Après la Seconde Guerre mondiale en effet, l’Europe de l’Ouest est devenue un important laboratoire de la coordination des politiques sociales, avec la progressive mise au point de droits individualisés à la Sécurité sociale, c’est-à-dire indépendants du territoire où les travailleurs les ont acquis. Alors même que la mise en place de l’État-providence renforce la « clôture des appartenances » [3], la période comprise entre 1946 et 1953 voit la signature de 135 accords internationaux de Sécurité sociale, la plupart signés entre des pays européens. L’historiographie a montré les liens existant entre l’individualisation du droit à la Sécurité sociale et la libéralisation des mouvements de main-d’œuvre nécessaires au bon fonctionnement du Marché commun [4], sans oublier d’inscrire ces développements dans une histoire plus longue, désormais largement défrichée. La Convention européenne de Sécurité sociale de 1957 est ainsi considérée comme l’achèvement des efforts accomplis par les pays européens à partir du début du XXe siècle, à travers les traités de travail bilatéraux régulant et différenciant les droits sociaux des travailleurs migrants [5].
2 Le déplacement progressif de l’attention des acteurs vers l’assurance et le rôle joué par le Bureau international du Travail (BIT) ont conduit, pour la période post-1945, à oublier l’importance des prestations assistancielles, premier secteur concerné par l’internationalisation du droit social au début du siècle [6]. Cependant, une reconstruction de la situation des étrangers au regard de la législation sociale ne prenant en compte que les prestations contributives conduit à faire l’impasse sur le facteur « nationalité » et à raisonner comme si les différentes lois, qu’elles aient une base personnelle ou territoriale, s’appliquaient indistinctement à tous. En établissant des règles de réciprocité, les conventions internationales du travail avaient éliminé toute condition de nationalité au regard de l’accès des travailleurs étrangers aux systèmes de réparation des accidents du travail (1925) et d’assurance-vieillesse (1933) ; cependant, même dans les pays ayant ratifié ces conventions, plusieurs considérations d’ordre juridique, économique et politique continuaient de justifier dans les années 1940 et 1950 des discriminations entre étrangers et nationaux, notamment concernant les prestations non contributives, financées en tout ou en partie sur les budgets publics.
3 La notion de Sécurité sociale qui s’est imposée dans le débat international pendant la Seconde Guerre mondiale [7] comprend en effet également des prestations couvertes par l’impôt (l’assistance) ou ne correspondant pas à des cotisations versées précédemment (les prestations non contributives) [8]. Toutes sont considérées comme partie intégrante de la structure du système : Pierre Laroque ne réduit pas la Sécurité sociale à l’assurance, tandis que son successeur Jacques Doublet décrit l’avènement de la Sécurité sociale comme le passage d’un système d’indemnisation à une véritable répartition des risques par la redistribution des revenus. Ainsi, après les ordonnances de 1945, dans l’attente de la constitution de droits à pension suffisants, l’allocation aux vieux travailleurs salariés – créée par Vichy en 1941, versée sous condition de ressources et financée par les caisses – est maintenue et trois autres prestations non contributives voient le jour : en 1946, l’allocation temporaire aux vieux, à la charge du Trésor, versée aux personnes âgées qui ne réunissent pas les conditions exigées pour prétendre à une pension contributive de la Sécurité sociale ; en 1948, l’allocation aux vieux travailleurs non salariés (AVTNS) ; en 1952, l’allocation spéciale, qui remplace la première en instaurant un complément aux avantages vieillesse. Les prestations non contributives concrétisent un double mouvement de séparation de l’assurance sociale et de l’assurance privée et, bien que non soumises au principe de l’obligation alimentaire, de rapprochement avec l’assistance publique. D’ailleurs, Pierre Laroque estime que l’assistance, dûment modernisée, transformée en un droit subjectif et reliée à la Sécurité sociale [9], est nécessaire à la réalisation de son objectif, la garantie donnée aux ménages d’un horizon prévisible pour bâtir leur existence.
Les prestations contributives, non contributives et d’aide sociale en vigueur entre 1945 et 1954
Les prestations contributives, non contributives et d’aide sociale en vigueur entre 1945 et 1954
4 L’objectif de cette contribution est d’analyser dans quelle mesure l’accès des migrants aux prestations non contributives et d’aide sociale restait différencié de celui aux prestations contributives. Cette distinction n’était pas anodine : les statistiques concernant le régime général d’assurance-vieillesse des travailleurs salariés des départements du Nord et du Pas-de-Calais au début des années 1950 montrent que les bénéficiaires d’une pension non contributive représentaient 45 % des plus de 65 ans, pesant lourdement sur le financement du système. Dans les deux départements, en 1951, 75 000 personnes âgées bénéficiaient de l’assistance à domicile, en hospice ou sanitaire, un chiffre plus élevé que celui des retraités bénéficiaires d’une pension contributive âgés de 65 ans ou plus [10]. Ces données invitent à questionner les travaux sur l’accès des étrangers aux droits sociaux qui ont souvent repris le récit des acteurs, lequel présente le processus d’européanisation des politiques sociales et d’individualisation des prestations, en opposition à leur territorialisation, comme un mouvement linéaire vers un objectif prédéterminé, sans considérer les difficultés dans l’accès aux formes non contributives et assistancielles de la protection sociale.
5 En tant que pays d’immigration, porteur de politiques encourageant l’entrée des travailleurs migrants pour des raisons à la fois de besoin de main-d’œuvre pour la reconstruction et de peuplement, le cas français présente plusieurs avantages. La création de l’Office national d’immigration et du statut de résident privilégié, en novembre 1945, confère aux étrangers les mêmes droits au travail qu’aux nationaux, du moins en principe. Les accords de main-d’œuvre signés en 1947 et 1948 avec l’Italie ouvrent la voie à une augmentation importante de la migration italienne, graduellement remplacée à partir de 1955 par les Espagnols. Tout au long de la période, la France se confronte aussi au problème des personnes déplacées, d’abord en signant des accords avec l’Organisation internationale des réfugiés (OIR) permettant l’installation et l’intégration dans le marché du travail des réfugiés, puis en créant en 1952 l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (OPFRA). Pour examiner les droits à prestations des étrangers et leurs fondements, il est donc nécessaire de prendre en considération à la fois les travailleurs migrants et les réfugiés, souvent analysés séparément par deux historiographies différentes malgré la grande porosité entre les deux catégories pendant les Trente Glorieuses [11].
6 Nous nous proposons ici de reconstruire les débats portant sur les statuts juridiques des étrangers dans les réformes de la protection sociale à partir des positions des acteurs qui les ont élaborées : pour les prestations non contributives, la direction générale de la Sécurité sociale du MTSS, dirigée entre 1951 et 1960 par Jacques Doublet [12] ; pour l’assistance, la direction générale de la population et de l’entraide du ministère de la Santé et de la Population (MSP), dirigée de 1947 à 1959 par Emmanuel Rain [13]. Les deux hauts fonctionnaires, proches du Mouvement républicain populaire (Emmanuel Rain en était même membre fondateur), partagent la même conception de la protection sociale, entre objectifs sociaux, économiques et familialistes : la proportionnalité des prestations aux revenus, la centralité de l’action sociale, la démocratie sociale. Les divergences entre ces hauts fonctionnaires, qui font partie d’une galaxie d’experts, juristes et syndicalistes promotrice de la construction d’un droit social européen, concernent des aspects considérés comme marginaux, tels que le rôle de l’assistance dans le système à bâtir : alors que le MTSS, et notamment l’adjoint de Jacques Doublet, le socialiste Marcel Legras [14], juge que l’assistance doit cesser d’être séparée de la Sécurité sociale et former un tout avec elle, Emmanuel Rain ne considère pas ce système « durable, valable et satisfaisant » en voyant à terme la disparition de toute forme d’assistance économique et le développement de l’action sociale et des services sociaux [15]. Face aux enjeux migratoires, en l’absence d’un véritable débat parlementaire, le MTSS et le MSP sont porteurs de deux positions différentes : le premier entend développer les flux migratoires dont la France a besoin avec le souci de préserver les intérêts de la main-d’œuvre nationale, alors que la stratégie de la direction d’Emmanuel Rain vise le rééquilibrage des composantes de la population française par une politique de peuplement qui sélectionne des familles pour ses facultés d’assimilation. Ces deux logiques – dont la première s’impose dans les faits – convergent dans la promotion des droits sociaux et des prestations sociales pour les étrangers, qui permettent à la fois d’éviter que l’accueil des travailleurs migrants se pose en concurrence de la main-d’œuvre nationale, d’attirer des populations d’origine européenne (que le MSP considère préférables aux Algériens) et de les assimiler dans la société française.
7 Cet article, fondé sur le dépouillement de la littérature grise de l’époque et des fonds du MTSS et du MSP aux Archives nationales, notamment la documentation portant sur la signature par la France des accords internationaux, analyse deux lignes de fracture qui posaient à ces acteurs deux ordres de problèmes différents : d’abord, celle entre prestations contributives et non contributives de la Sécurité sociale ; puis dans un deuxième temps, celle entre l’ensemble de la Sécurité sociale et la législation d’assistance, dont la réforme de 1953-1954 change le nom en « aide sociale » tout en modifiant les conditions d’accès aux prestations pour les étrangers. Alors que les prestations non contributives et l’aide sociale s’assimilent à l’assistance, l’extension aux étrangers des droits sociaux repose sur des logiques en partie différentes, révélant les caractéristiques des prestations non contributives et d’aide sociale en interrogeant les différences de légitimation avec les prestations de type assurantiel. Finalement, l’analyse des débats et logiques qui ont déterminé l’élargissement respectif des droits des travailleurs migrants et des réfugiés permet, en creux, de cerner le rôle joué par les étrangers dans les réformes de la protection sociale française, en suivant les pistes ouvertes par Christoph Conrad sur l’importance des « acteurs mobiles » parmi les « vecteurs de la transnationalité » ayant contribué au développement des politiques sociales [16].
Les prestations non contributives au miroir de l’assurance
8 Le développement de la Sécurité sociale française rend nécessaire la mise à jour des traités de travail conclus avant 1939 visant à assurer, en matière de droit aux assurances sociales, une égalité de traitement pour les nationaux des parties contractantes [17]. À la signature de telles conventions bilatérales s’ajoutent des conventions multilatérales, couvrant les déplacements entre plusieurs pays, dans le cadre du processus d’intégration européenne. En signant le traité de Bruxelles, précurseur de l’OTAN, le 17 mars 1948, le Royaume-Uni, la France, le Luxembourg, les Pays-Bas et la Belgique s’engagent à fédérer leurs efforts pour « élever le niveau de vie de leurs peuples et faire progresser harmonieusement les activités nationales dans le domaine social ». Le 7 novembre 1949, les cinq pays approuvent deux conventions multilatérales, dont la première étend la validité des conventions bilatérales concernant l’assurance sociale aux autres pays signataires. Ensuite, le processus d’ouverture des marchés européens encourage la négociation de conventions bilatérales et l’élaboration de nouvelles conventions multilatérales. En décembre 1953, le Comité des ministres du Conseil de l’Europe adopte des Accords intérimaires de Sécurité sociale visant à assurer l’égalité de traitement entre les ressortissants des pays membres et permettant de bénéficier des conventions entre les pays tiers. Parallèlement, un comité d’experts de la Communauté européenne du charbon et de l’acier met au point, avec le concours du BIT, les fondations de la Convention européenne de Sécurité sociale, signée en 1957 et devenue l’année suivante le règlement n° 3 de la Communauté économique européenne. Pour garantir la mobilité de la main-d’œuvre, dont l’expansion économique demande sans cesse l’adaptation aux besoins, il faut éliminer les conditions d’octroi des prestations d’assurance susceptibles de nuire aux déplacements, ainsi que les discriminations dont les travailleurs migrants sont victimes, telles que les législations subordonnant l’octroi de prestations à une durée minimale d’assurance ou de résidence [18].
9 Les conventions se heurtent à la nécessité de trouver un compromis entre le principe de la territorialité des prestations, porté par les pays d’immigration comme la France, et celui de la personnalité, porté au contraire par les pays d’émigration. Le problème se pose surtout pour les allocations familiales, qui ont désormais perdu leur lien originel avec l’activité salariale : utilisées à des fins démographiques, elles sont attribuées sous condition de résidence sur le territoire national, ce qui exclut les travailleurs dont les familles sont restées dans le pays d’origine. De plus, les fonctionnaires français considèrent que les allocations doivent être dépensées sur le territoire national, pour ne pas soustraire une partie du revenu national. Ces préoccupations ont conduit à restreindre le champ d’application de la législation sur les prestations familiales (1932 et 1946) et sur l’allocation de logement (1948) en fonction de la nationalité des enfants des travailleurs bénéficiaires. Cependant, le montant élevé des allocations familiales en fait un élément important des revenus et du bien-être. En raison de la crise du logement, les accords d’immigration apportent ainsi une dérogation temporaire (dans le cas de l’Italie) ou totale (dans le cas de la Belgique) au principe de la territorialité, permettant le transfert de 100 % des allocations familiales [19]. En 1957, lors de la préparation de la Convention européenne de Sécurité sociale, le rejet de la proposition française – l’institution d’un fonds de compensation européen – impose une restriction au droit aux prestations familiales : le travailleur a désormais trois ans pour trouver un logement décent lui permettant d’installer sa famille et continuer à percevoir les allocations.
10 Au milieu des années cinquante, les acteurs et les observateurs peuvent ainsi dresser un bilan largement positif des efforts européens visant à assurer l’accès des étrangers résidant en France aux prestations financées par les cotisations. Les conventions bilatérales et multilatérales ont désormais déterminé la législation applicable – celle du lieu de travail dans la plupart des cas –, affirmé l’absence de discrimination entre ressortissants des parties contractantes et assuré la conservation des droits acquis ou en cours d’acquisition. Le problème concerne moins l’accès des étrangers aux droits sociaux dans les pays d’immigration que la valeur des prestations qu’ils reçoivent, notamment dans les cas particuliers d’un droit résultant de la totalisation des périodes de contribution. L’absence de définition d’une norme minimale de Sécurité sociale est considérée comme le seul échec d’un long chemin parcouru depuis 1945 dans la voie de la solidarité européenne et de la création d’un droit international [20].
11 Cependant, le tableau reste-t-il positif si l’on considère l’accès aux prestations non contributives de la Sécurité sociale ? Nous allons montrer que des discriminations persistent en effet à l’égard des étrangers résidents en France, qu’ils soient ou non travailleurs ; puis analyser les efforts réalisés par le MTSS pour rendre moins compliquée l’immigration des travailleurs européens, dont on souhaite la venue en France, et par le MSP soucieux de réduire les dépenses d’aide sociale.
Les prestations non contributives dans les négociations européennes
12 La signature des conventions en matière de Sécurité sociale ne met pas totalement fin aux discriminations. L’allocation temporaire aux vieux créée en 1946 ou l’allocation aux vieux travailleurs salariés (AVTS) restent ainsi réservées aux nationaux, de manière similaire à la situation des pays scandinaves pour les pensions de vieillesse, financées par des fonds publics et liées à la résidence dans le pays. Une exception est faite en faveur des femmes étrangères résidant en France depuis au moins vingt-cinq ans et ayant au moins deux enfants français, ainsi que pour les Belges et les Suisses à résidant en France depuis au moins quinze ans [21].
13 Ces discriminations ne sont pas en contradiction avec le droit international : pour les « subsides, majorations ou fractions de pensions payables sur les fonds publics », les conventions n° 35 à 40 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) prévoyaient l’assimilation aux nationaux des seuls ressortissants des pays ayant ratifié la convention ; par ailleurs, elles autorisaient les législations nationales à réserver aux nationaux les éléments de pension payables sur les fonds publics et attribuables exclusivement aux assurés ou ayants droit qui avaient dépassé un certain âge au moment de la mise en vigueur de la législation d’assurance obligatoire, à l’instar, selon le MTSS, de l’allocation temporaire créée en 1946. Lors des débats préparatoires de la convention n° 97 de l’OIT sur la Sécurité sociale des travailleurs migrants et des réfugiés, les délégués français cherchent à ne pas modifier les dispositions prévoyant la possibilité de refuser aux étrangers un droit aux prestations non contributives payables sur fonds publics. Cette discrimination s’enracine dans le fait que les prestations non contributives étaient conçues comme la contrepartie du bénéficiaire à la vie économique du pays d’immigration. Les pressions du MTSS, qui craint la mise en concurrence des travailleurs étrangers avec la main-d’œuvre nationale, concernent surtout l’accès aux prestations de chômage (qui ont relevé, jusqu’au 31 décembre 1958, de l’assistance) [22] et au logement. Grâce au soutien des autres pays d’immigration, le texte final de la convention reprend les propositions françaises, en correspondant « exactement à la législation française en matière de Sécurité sociale et assistance qui réserve certains avantages particuliers aux ressortissants français » [23]. En plus, comme les délégués français l’ont demandé, notamment en raison de l’existence d’une clause de non-refoulement des migrants inaptes au travail, la convention exclut les migrants non travailleurs.
14 La situation ne change pas avec la convention multilatérale du traité de Bruxelles de novembre 1949, qui ne comprend aucun passage sur les allocations non contributives de vieillesse. Pourtant, dans les années suivantes, la France signe de nouveaux accords et protocoles avec plusieurs pays européens donnant accès aux prestations non contributives, dans la plupart des cas après quinze ans de résidence, dont un nombre d’années ininterrompues (différent selon les pays), et précédant immédiatement la date de la demande. Les accords ne requièrent pas une réciprocité de fait, c’est-à-dire l’existence dans le pays d’origine des étrangers d’une législation comportant des prestations comparables, mais uniquement une réciprocité de droit, à savoir la garantie que les ressortissants français ne soient frappés d’aucune discrimination dans le pays signataire. Ainsi, la convention conclue le 30 juin 1951 entre le Danemark et la France ouvre pour les ressortissants danois le droit aux allocations aux vieux travailleurs salariés et non salariés sur un pied d’égalité, et pour les ressortissants français l’accès aux pensions non contributives que la législation danoise garantit à ses citoyens [24].
15 Les conventions multilatérales signées en marge du traité de Bruxelles suscitent immédiatement l’intérêt et l’approbation du Conseil de l’Europe, qui amorce alors ses premiers pas. Le Comité des experts en matière sociale, jugeant l’extension aux autres pays adhérents difficile en raison du faible nombre d’accords bilatéraux existants, propose la signature d’accords garantissant l’égalité entre nationaux et étrangers. Les Accords intérimaires signés en 1953 posent le principe de l’assimilation de l’étranger au national sous réserve d’une résidence normale dans le pays, établie antérieurement à la survenance du risque. Cependant, on différencie, d’une part, les législations sur la maladie, la maternité, le décès, les accidents du travail et les maladies professionnelles, le chômage et les prestations familiales, et de l’autre, les prestations de vieillesse, d’invalidité et de survivants. Dans le premier cas, le droit des étrangers aux prestations non contributives peut être subordonné à l’exigence d’une résidence de six mois et les prestations mixtes, comportant une part à la charge des fonds publics, sont considérées comme contributives pour la totalité. En ce qui concerne les prestations de vieillesse, au contraire, le droit du travailleur étranger aux prestations non contributives, telles que l’AVTS, n’est ouvert qu’après quinze ans de résidence postérieurement au vingtième anniversaire, dont cinq ans de résidence permanente immédiatement avant la demande de pension.
16 Un protocole additionnel étend également les droits aux prestations contributives et non contributives aux réfugiés bénéficiaires de la Convention de Genève signée en 1951. Il s’agit d’une extension importante pour les réfugiés ayant réussi à s’insérer sur le marché du travail et pour tous les réfugiés arrivés après 1945, résidant sur le territoire français depuis au moins quinze ans et n’ayant pas acquis de droit à une prestation de Sécurité sociale. En matière de vieillesse, en effet, la convention de 1951 consolide l’inégalité des droits sociaux des étrangers selon qu’il faut leur accorder des prestations contributives ou non contributives. Elle n’ouvre des droits qu’aux prestations contributives, en statuant qu’après un délai de résidence de trois ans tous les réfugiés bénéficient de la dispense de réciprocité législative mais en précisant (article 24) que ce traitement identique aux nationaux ne s’applique pas aux prestations payables sur les fonds publics et aux pensions non contributives. Malgré la ratification des Accords intérimaires, les réfugiés statutaires rentrant dans la convention de 1933, attestés par un certificat ou par le passeport Nansen (à savoir les Russes, les Arméniens, les Assyriens, les Sarrois, et après la Libération les Espagnols et les réfugiés d’Allemagne et d’Autriche), demeurent privilégiés : grâce à la clause de la nation la plus favorisée, ils peuvent par exemple jouir de l’AVTS en application de la convention franco-britannique, ou bien de l’allocation spéciale à condition de justifier de cinq ans de séjour ininterrompu en application de la convention franco-danoise [25].
L’extension aux allocations financées par la fiscalité
17 L’adhésion française aux Accords intérimaires est motivée par les soucis de rationalisation et par les impératifs politiques de l’intégration européenne, sans pourtant entraîner une appropriation administrative des principes d’extension des prestations non contributives aux non nationaux. Les décisions prises par le gouvernement de Guy Mollet en 1956, lors de la création de l’allocation supplémentaire du Fonds national de solidarité (FNS) – délivrée sous conditions de ressources pour que les personnes âgées de plus de 65 ans, ou de 60 ans si inaptes, puissent disposer d’une prestation minimale –, le prouvent. Comme la pauvreté des personnes âgées était un produit de la faiblesse des prestations de vieillesse, de la rareté des retraites à taux plein et des dévaluations monétaires successives, la nouvelle mesure, bien que gérée par le MTSS, doit peser sur l’ensemble de la collectivité nationale. Les modalités de financement – l’institution d’une vignette automobile, d’un nouvel impôt sur les successions et de plusieurs surtaxes sur l’alcool, les produits de luxe et les timbres – en font une mesure d’assistance, mais le dispositif rhétorique construit autour d’elle évite toute allusion à l’aide sociale au profit de la référence à la solidarité nationale. L’allocation supplémentaire incarne, en effet, un droit social fondé sur la citoyenneté : il s’agit d’une « compensation de la dette de la nation envers ceux qui ont contribué à la vie économique » [26] et d’un complément aux autres prestations qui permet à chaque citoyen français de disposer d’un minimum de ressources. Ces principes, et surtout le coût élevé de la mesure, entraînent l’exclusion des étrangers, y compris des travailleurs migrants. Le lancement de la mesure est donc immédiatement suivi d’une réserve du Gouvernement précisant que la nouvelle prestation n’est pas accordée aux étrangers dans le cadre des Accords intérimaires [27]: l’allocation n’est due que sous réserve de la signature d’accords internationaux de réciprocité [28], intervenus, pour les pays d’Europe occidentale, entre 1957 et 1959.
18 La distinction entre les droits aux prestations contributives et non contributives disparaît finalement dans la convention européenne de 1957. La France formule cependant une réserve et continue à ne verser l’allocation supplémentaire du FNS qu’aux ressortissants des pays ayant conclu une convention et résidant sur le territoire français [29]. Seule la mobilisation internationale autour de l’année mondiale du réfugié (1959-1960) permet d’ouvrir le bénéfice de l’allocation supplémentaire aux réfugiés visés par la Convention de Genève de 1951 [30]. Entre-temps, le financement de l’allocation change : les deux impôts initialement prévus laissent place à la contribution des caisses de Sécurité sociale. Les prestations ne sont plus payées sur fonds publics et ne rentrent désormais plus dans le domaine concerné par l’article 24 de la Convention de Genève de 1951. Néanmoins, cette extension ne couvre pas tous les réfugiés, écartant ceux qui ne rentraient pas dans les limites temporelles et géographiques de la convention, ainsi que les apatrides.
19 Tout au long des années 1950, l’extension aux étrangers des prestations non contributives relève ainsi de logiques politiques principalement liées à la négociation de l’intégration économique européenne : malgré le décalage temporel, elles sont examinées dans le cadre de la Sécurité sociale, dont il faut élargir le nombre des bénéficiaires pour promouvoir les migrations de travail. Le contexte marqué par l’effort de définition d’une norme minimale de Sécurité sociale met en lumière que celle-ci ne se réduit pas à un simple mécanisme d’assurance distribuant des prestations en contrepartie de cotisations préalables. La temporalité et les limites de l’extension des prestations non contributives – concernant essentiellement le risque vieillesse et fournissant des allocations au montant très faible – conduisent toutefois des populations très larges à avoir recours aux politiques d’assistance proprement dites.
Aux marges du marché du travail : l’intégration des étrangers par l’aide sociale
20 La création de la Sécurité sociale en 1945 et le développement de ses différents régimes n’ont pas supprimé la nécessité du recours à l’assistance pour une large partie de la population française, y compris les travailleurs. Ses différentes formes sont d’autant plus indispensables pour les travailleurs migrants, souvent tardivement insérés dans le marché du travail ou plus fréquemment victimes de fraudes aux cotisations, et pour les réfugiés, parfois inaptes au travail. L’exclusion des prestations non contributives analysée dans la partie précédente entraîne des besoins d’assistance plus importants que la moyenne de la population française. Dans cette deuxième partie, nous montrerons comment l’accès des étrangers à l’assistance continue de distinguer leur provenance, avant d’analyser les propositions que le MSP formule pour les non nationaux lors de la réforme des lois d’assistance en 1953-1954.
De la compensation des dépenses au principe de réciprocité
21 En 1947, les conventions en vigueur signées par la France ne sont plus que six (Italie, Pologne, Belgique, Luxembourg, Suisse et Espagne). La convention signée avec l’Autriche le 27 mai 1930 a vu ses effets suspendus par la guerre sans jamais être réinstaurés par la suite, tandis que les conventions conclues avec la Yougoslavie, le Portugal et la Roumanie n’ont jamais été ratifiées par les gouvernements intéressés. Les ressortissants conventionnés jouissent selon les cas d’un traitement comparable à celui des Français, à l’exception de certaines mesures comme l’allocation aux aveugles et grands infirmes créée en 1949 ou l’allocation compensatrice des augmentations des loyers créée en 1951. Néanmoins, certaines conventions signées dans les années 1920 et 1930 (notamment celles avec l’Italie, la Pologne et l’Espagne) comportent le remboursement des dépenses d’assistance aux ressortissants étrangers par compensation entre créances réciproques. La limitation de l’accès à l’assistance aux ressortissants des pays ayant signé une convention ne découle pas uniquement de la légitimité que ces prestations fondent dans le contrat républicain de solidarité : l’administration française estime en effet impossible d’effectuer un contrôle des ressources sur un territoire étranger, notamment à cause des variations du change, du niveau des prix et des pouvoirs d’achat [31].
22 Aux étrangers ressortissants de pays n’ayant signé aucune convention, la loi française ne reconnaît que le droit à l’assistance hospitalière en hôpitaux, hospices et asiles, ainsi que le droit à l’assistance à l’enfance, intégralement appliquée sans distinction de nationalité pour des raisons essentiellement démographiques (il s’agit de promouvoir l’assimilation des enfants nés en France de parents étrangers) [32]. L’admission à l’assistance est prononcée par le préfet et la répartition des dépenses entre l’État, le département et la commune de résidence entraîne un rôle plus important du premier.
23 Les réfugiés constituent un cas particulier, avec deux catégories. Les réfugiés statutaires (bénéficiaires des conventions d’avant-guerre) sont depuis avril 1945 assimilés aux nationaux, alors que les nombreux étrangers réfugiés parvenus après 1945 dans le contexte des migrations d’après-guerre, originaires essentiellement d’Europe centrale, sont assimilés aux étrangers non conventionnés.
24 La convention d’assistance sociale et médicale entre les pays du traité de Bruxelles, signée le 7 novembre 1949, marque deux changements importants : en passant d’une logique bilatérale à une logique multilatérale, elle donne accès aux ressortissants des autres pays signataires, y compris de leurs colonies, aux prestations garanties aux indigents et aux malades (1893), aux vieillards, infirmes et incurables (1905), aux aliénés (1838), aux tuberculeux (1945), à la famille (1939) et à l’enfance (1943) [33]. L’application de la convention, en effet, comprend toutes les formes d’assistance sociale et médicale à l’exception « des pensions non contributives et des paiements effectués en vertu d’une législation d’assistance spéciale en faveur des vieillards, des infirmes ou des chômeurs ». La formule évoque la toute nouvelle loi Cordonnier relative aux aveugles et grands infirmes, revendiquée comme une mesure d’avant-garde encourageant au travail et donc exclue de la convention qui aménageait la présence en France des travailleurs actifs. Deuxièmement, les ressortissants des pays signataires sont placés sous le même régime que les Français, la seule condition exigée étant la régularité du séjour sur le territoire. Le système fondé sur les remboursements, dont le fonctionnement était d’ailleurs sujet à caution [34], est remplacé par le principe de gratuité : les frais occasionnés par l’assistance demeurent à la charge du pays de résidence. Celui-ci a toutefois la possibilité de solliciter le rapatriement dans des cas déterminés et seulement si l’étranger est résident depuis moins de cinq ans, ou moins de dix ans s’il est entré après 55 ans.
Les étrangers dans la réforme de 1953
25 Le traité de Bruxelles intervient dans un contexte où le MSP – pressé par l’Assemblée nationale, l’Association des maires de France et les problèmes auxquels l’administration a dû se confronter après 1945 – travaille à une révision de la législation assistancielle. L’objectif principal des projets de réforme, qui se présentent comme une opération de rationalisation abrogeant et unifiant plus de 25 lois précédentes, est la réduction des dépenses : il s’agit de réduire le nombre des allocataires tout en améliorant les prestations. L’incitation à une réforme globale du système vient également de la présence croissante des étrangers et de l’insuffisance de l’assistance qu’ils reçoivent sur le sol français. Le gouvernement néerlandais signale par exemple que ses ressortissants en France qui ne bénéficient pas de la Sécurité sociale ont du mal à subvenir à leurs besoins à cause de la faiblesse de l’assistance, les forçant à demander l’aide des autorités consulaires. Cette assistance, reçue par des gouvernements des pays d’origine respectifs, entraîne toutefois la perte du traitement en France, à cause des plafonds de ressources très bas [35]. Ces protestations trouvent un écho dans les débats sur la réforme de l’aide sociale qui se déroulent à partir de janvier 1952 au sein du Conseil supérieur de l’entr’aide sociale, une assemblée consultative créée en 1946, chargée de l’étude des questions législatives et composée de membres des différentes branches de l’administration, des associations, des ordres professionnels et des établissements publics et privés. Lors des débats sur le projet de réforme des lois d’assistance, les membres de l’Assemblée nationale doivent notamment examiner l’aide à la vieillesse, dont les taux ne permettent que l’achat d’un morceau de pain, d’un kilogramme de pommes de terre et d’un demi-litre de lait par jour. Parmi les 300 000 personnes qui ne peuvent pas cumuler l’aide à la vieillesse avec l’allocation temporaire aux vieux, les étrangers constituent une part non négligeable. Leur situation est alors évoquée pour critiquer la continuité des positions du ministère du Budget, qui s’oppose à toute amélioration des prestations assistancielles. En rappelant les tensions autour du vote du budget de la Santé à l’automne 1951, Emmanuel Rain juge que cette continuité est la cause
des chutes successives des gouvernements, parce que l’on fait prendre des positions si rigides pour des questions visant un nombre de citoyens très restreints et des dépenses au total restreintes, que l’on aboutit à des dégâts sur le plan général. Aucun gouvernement ne tiendra sur ces positions-là, c’est-à-dire 700 frs par mois pour certaines gens qui habitent la France, réputée pays hospitalier. [36]
27 Selon Emmanuel Rain, les restrictions concernant les prestations non contributives imposent un relèvement des prestations d’aide sociale aux personnes âgées, qu’il juge préférable à l’extension des publics bénéficiaires de l’allocation temporaire, versée sans tenir compte des ressources et des obligations alimentaires :
D’après le système que Monsieur Laroque a fait prévaloir, on n’y a droit qu’à partir d’une certaine durée de résidence en France, 15 ans si je ne me trompe, pour les étrangers qui sont ressortissants de pays avec lesquels ont été conclues de telles conventions de Sécurité sociale et d’assistance. Quand ils n’habitent pas la France depuis 15 ans, c’est le régime de l’assistance qui s’applique. [37]
29 Si Emmanuel Rain refuse la proposition du Budget de verser directement l’allocation temporaire aux étrangers, la raison affichée ne réside pas dans le coût budgétaire de la mesure, dans l’absence de contrôles qui caractérise la législation de 1946, ou dans son objectif de relever les prestations d’aide sociale. Le directeur de la Population et de l’Entr’aide motive son opposition par la nécessité de conserver la logique de conventions qui avait présidé depuis le début du siècle à l’extension de la protection sociale :
Pour la protection de nos nationaux à l’étranger, il faut garder un instrument de négociation, afin que les États étrangers conservent un intérêt à négocier avec nous, afin de passer des conventions qui font bénéficier les étrangers en France de conditions plus favorables. [38]
31 Dans le même temps, Emmanuel Rain reconnaît la nécessité d’une augmentation des taux de l’aide sociale aux personnes âgées, à la fois pour ne pas « laisser mourir les gens de faim » et pour réduire les frais d’hospitalisation, qui coûtent beaucoup plus cher à la collectivité [39]. C’est en trouvant un soutien parmi les fonctionnaires du MTSS, qui partagent son attention aux logiques de réciprocité, qu’Emmanuel Rain arrive à obtenir une augmentation des taux de l’aide sociale pour l’ensemble des personnes âgées, nationaux et étrangers, rentrant dans un plafond de ressources, y compris les assurés cumulant l’assistance avec leur faible pension de retraite.
32 La réforme voit finalement le jour en novembre 1953, marquant un important changement sémantique : le terme « assistance » laisse place à « aide sociale » pour utiliser un lexique « plus conforme à la dignité humaine » [40]. On reconnaît que l’insuffisance des ressources n’est pas « uniquement un problème de Sécurité sociale » et qu’il est « dans le rôle de l’assistance de compléter les prestations le cas échéant » [41]. La réforme se propose de réduire l’importance de l’assistance traditionnelle, en compensant par la diffusion des services sociaux visant à promouvoir la « réadaptation » des bénéficiaires, c’est-à-dire leur intégration dans la vie sociale, ainsi que la prévention des « inadaptations sociales » aux changements socio-économiques et culturels. La réforme reste toutefois au milieu du gué, dans la mesure où elle améliore et différencie les prestations, mais continue à ne pas reconnaître la seule pauvreté comme critère d’accès à l’aide sociale : pour en bénéficier, Français et étrangers doivent être également âgés, malades ou bien invalides [42].
33 Parmi les nouveautés, la réforme opère finalement un important élargissement des droits des étrangers. La formule très large qui ouvre le décret du 29 novembre 1953 constitue en elle-même une innovation : « toute personne résidant en France bénéficie, si elle remplit les conditions légales d’attribution, des formes de l’aide sociale telles qu’elles sont définies par le présent décret et la législation existante » [43], c’est-à-dire les aides sociales à la famille, aux personnes âgées, aux infirmes, les formes d’aide médicale dont celles aux tuberculeux et aux malades mentaux, les allocations de compensation des augmentations de loyer et celles aux familles dont les soutiens effectuent le service militaire. La plupart des ressortissants des pays ayant signé un traité d’assistance réciproque bénéficient désormais de l’ensemble de ces mesures, à l’exception de la carte sociale d’économiquement faible et de l’allocation de compensation aux aveugles et grands infirmes travailleurs. La carte sociale d’économiquement faible n’est en effet pas considérée comme une mesure d’aide sociale, mais comme « une simple facilité de procédure que le gouvernement français était libre de réserver à ses propres ressortissants ». L’allocation de compensation aux grands infirmes, destinée à compléter la rémunération que le grand infirme tire de son travail, est au contraire présentée comme un encouragement au travail « dont l’équivalent n’existe dans aucune législation d’assistance étrangère » [44].
34 L’élargissement des droits à l’aide sociale opéré par la réforme de 1953-1954 concerne surtout les étrangers dont les pays d’origine n’ont pas passé avec la France de traités d’assistance spécifique. La perspective du MSP est résolument populationniste : l’intérêt qu’il y a de « favoriser la venue, l’implantation et l’assimilation de nombreux étrangers nécessaires au développement de l’économie française » exige le changement du régime de l’aide sociale [45]. Les étrangers non conventionnés peuvent désormais prétendre à l’aide médicale à domicile, qui a remplacé l’assistance médicale gratuite créée en 1893 (sous réserve de justifier d’une résidence ininterrompue depuis au moins trois ans), et à l’allocation pour les personnes âgées et les infirmes, y compris la majoration pour tierce personne au taux fixé pour l’aide sociale aux personnes âgées (sous condition de quinze ans de résidence avant 70 ans). Le directeur de la Population Emmanuel Rain estime que ces conditions sont exagérées : s’il faut donner aux pays étrangers un intérêt à passer des conventions, « exiger une résidence ininterrompue de 15 ans pour venir en aide à une personne âgée ou infirme » est « aller un peu loin » par rapport au but recherché, c’est-à-dire la baisse du nombre des hospitalisations grâce à l’aide à domicile [46]. Selon lui, pour ce qui relève de l’assistance, la législation devrait se montrer plus large qu’en matière de prestations non contributives, en ramenant à dix ans la durée de résidence demandée. La jurisprudence souligne au contraire les aspects innovants de la réforme en remarquant qu’elle établit « une sorte de minimum vital à l’aide sociale, indépendamment de toute convention et de toute idée de réciprocité » [47].
35 Les seuls secours accessibles à toutes les catégories d’étrangers étaient ceux des bureaux d’aide sociale, comprenant des formes d’assistance sociale professionnalisée (consultations, crèches, permanences sociales, maisons de repos, services sociaux) ; « essentiellement facultatifs », ils ne constituent cependant pas un droit [48]. Le séjour dans les centres d’hébergement – la seule mesure qui élargisse l’aide sociale à des catégories de personnes potentiellement aptes au travail dans la perspective d’une réinsertion dans la vie économique, sociale et politique – n’est pas prévu pour les ressortissants étrangers.
36 Les réfugiés constituent un troisième cas, à l’heure où l’OIR est fermée au profit du bien plus modeste Haut-Commissariat pour les réfugiés et où la France se dote, par réaction, de l’OPFRA : les réfugiés d’avant-guerre peuvent bénéficier de la clause de la nation la plus favorisée, alors que les « néo-réfugiés » provenant d’Europe centrale suite à la guerre de 1939-1945 sont orientés vers le Service social d’aide aux émigrants (SSAE), branche française du Service social international [49]. L’organisme poursuit le travail d’aide, d’action sociale et de coordination des œuvres privées entamé pour le compte de l’OIR, grâce notamment aux financements du MSP et d’un reliquat de fonds du budget de l’OIR destiné à la réadaptation professionnelle et sociale des réfugiés issus de camps européens. Le financement étatique se justifie par la possibilité de réadaptation et donc de sortie du système d’assistance [50], mais correspond à 50 % de celui accordé par l’OIR. Le ministère des Finances explique la diminution du financement par les coupures budgétaires parallèlement opérées dans l’assistance aux nationaux. Les secours sont souvent en nature et les droits à l’assistance équivalant à ceux des nationaux ne sont garantis que sur le papier. En 1952, le SSAE lui-même déplore que seuls 35 000 des 400 000 réfugiés sont assistés, en essayant de faire valoir les promesses de Robert Schuman qui avait déclaré ne pas vouloir « financer la protection au détriment de l’assistance » [51] :
Les secours réguliers ne sont accordés qu’à ceux qui ne sont pas en mesure de subvenir à leur subsistance. Pour tous les autres, l’effort principal se porte sur la remise au travail et la récupération par le réfugié du point de vue physique et psychologique de la volonté et l’énergie nécessaire pour se suffire à soi-même. [52]
38 D’après les cadres du SSAE, les réfugiés nécessitent des prestations assistancielles supérieures à celles des nationaux pour se « réadapter », ayant des besoins spécifiques d’accompagnement ou bien ne pouvant travailler à cause des restrictions prévues par la loi, ou des prestations de vieillesse et d’invalidité, en l’absence d’accès aux prestations de la Sécurité sociale.
39 La ratification de la Convention de Genève en juin 1954 ouvre finalement la porte à une assimilation des réfugiés aux Français en ce qui concerne la législation de l’aide sociale. La reconnaissance du statut de réfugié par l’OPFRA (qui concernait à cette époque entre 80 et 90 % des demandeurs) peut désormais assurer des secours qu’il était difficile d’obtenir en tant que simple « migrant ». Cependant, la continuation des activités du SSAE, désormais déchargé de la plupart des préoccupations relatives à la subsistance des demandeurs, estompe l’écart entre les différents secours en nature, espèces et services dont jouissent les réfugiés ressortissants des démocraties populaires, et les migrants, essentiellement des Portugais ou des Yougoslaves souvent orientés vers les procédures d’immigration en amont du dépôt d’une demande d’asile.
Des prestations d’adaptation pour réduire les coûts
40 Une évaluation globale de la réforme des lois d’assistance de 1953-1954 doit en souligner les limites. Des pays comme la Suisse, les Pays-Bas et la Belgique ne manquent pas de pointer la situation lamentable de leurs ressortissants âgés résidant en France et demandent de pouvoir leur accorder des secours. La demande est jugée fondée par les fonctionnaires du MSP, qui reconnaissent que le taux de l’allocation est « tout à fait insuffisant pour permettre à une personne âgée d’assurer son entretien » [53]. Cela entraîne des hospitalisations qui coûtent beaucoup plus cher à la collectivité et suscitent les protestations des cantons suisses, dont les budgets sont déséquilibrés par les demandes élevées de remboursement des frais. Pour les fonctionnaires sous la direction d’Emmanuel Rain, si des secours occasionnels et ponctuels peuvent être admis sans les inclure dans les ressources des personnes âgées intéressées [54], il n’est pas question qu’un sort privilégié soit fait aux étrangers par rapport aux Français en autorisant l’octroi de secours réguliers. La présence des ressortissants étrangers est alors évoquée par les fonctionnaires du MSP pour demander une augmentation de l’allocation aux personnes âgées et du plafond des ressources autorisées :
Outre qu’il semble indigne d’un pays civilisé d’accorder une aide aussi faible à ses vieillards ou à ses infirmes […], les arguments mis en avant par les pays étrangers corroborent tout à fait l’expérience des services français. En effet, malgré l’extension de la Sécurité sociale, le nombre des vieillards bénéficiaires de l’aide sociale tend à augmenter, en fonction du nombre des hospitalisations. [55]
42 La réforme des lois d’assistance de 1953-1954 n’établit pas non plus un principe faisant référence pour l’ensemble des mesures d’aide sociale. Les réserves posées par la France lors de la création de l’allocation supplémentaire du FNS (1956), en excluant les étrangers de la prestation, ne tardent pas à reposer le problème de l’accès des étrangers à l’aide sociale. En effet, ne pouvant bénéficier ni de l’allocation spéciale aux vieux ni de l’allocation supplémentaire du FNS, les étrangers doivent avoir recours à l’aide sociale aux personnes âgées. Lorsqu’en 1962 le cumul de prestations non contributives de vieillesse et d’aide sociale est interdit, dans le but de simplifier un système demandant aux personnes âgées une multiplicité de procédures, de réduire les dépenses et de faire un pas vers la disparition de l’aide sociale au profit de la Sécurité sociale [56], les ressortissants étrangers âgés qui en bénéficiaient – un total de 5 287 personnes en 1961 – sombrent dans la misère [57]. Le ministère de l’Intérieur, estimant que les collectivités locales ne doivent pas soutenir des dépenses qui relèvent de la solidarité nationale, prône l’interdiction du cumul et propose d’inclure les allocations non contributives parmi les avantages de base susceptibles d’être assortis de l’allocation supplémentaire. Cependant, si les deux ministères sociaux partagent l’objectif d’éviter les placements en établissement uniquement déterminés par des raisons pécuniaires, beaucoup plus onéreux pour les finances publiques que l’octroi de l’aide à domicile [58], ils préfèrent exempter les étrangers de l’interdiction de cumul [59] : une fois de plus, la primauté des conventions ne peut être mise en cause, malgré le processus d’intégration européenne et la volonté d’établir de bonnes relations avec les pays nés de la dissolution de l’Union française.
43 Une véritable amélioration du sort des ressortissants de plusieurs pays européens découle de la ratification en 1958 de la Convention européenne d’assistance sociale et médicale, signée en décembre 1953 parallèlement aux Accords intérimaires. La convention élargit le traité de Bruxelles en attribuant le bénéfice de la législation française, y compris les allocations de loyer, aux ressortissants allemands, danois, grecs, irlandais, norvégiens, suédois et turcs [60]. La définition du champ de l’assistance comprend « toute assistance prévue par les lois et les règlements en vigueur […] tendant à accorder aux personnes démunies de ressources suffisantes les moyens d’existence et les soins que nécessite leur état, à l’exception des pensions non contributives et des prestations aux victimes de guerre et de l’occupation ». La Convention européenne rend ainsi caduque les prescriptions de la réforme de 1953-1954, qui subordonnaient pour tout étranger non conventionné l’octroi des allocations d’aide sociale aux personnes âgées à la justification préalable d’une résidence ininterrompue en France métropolitaine depuis au moins quinze ans avant 70 ans. Le texte, sous la pression des délégués français et allemands, mentionne explicitement la nécessité d’un effort de la part des gouvernements signataires dans la récupération des obligations alimentaires prévue par la législation du pays de résidence [61]. La ratification de la Convention européenne bénéficie notamment aux ressortissants européens rentrant d’Afrique du Nord lors de la décolonisation et qui ne remplissent pas les conditions requises pour bénéficier des mesures pour les rapatriés.
44 Les dispositifs de la Convention européenne s’appliquent aussi aux réfugiés reconnus sur la base de la convention de 1951, issus pour la plupart des démocraties populaires et considérés, notamment après l’arrivée des Hongrois en 1956-1957, comme des hérauts de la liberté, normalement aptes au travail. Jusqu’à la fin des années 1950, la France s’oppose d’ailleurs à l’entrée sur le territoire des réfugiés malades ou incapables, sur le court ou sur le long terme, d’assurer de manière autonome leur survie. Le droit à l’aide sociale des réfugiés est donc plus large que le droit aux prestations non contributives, en raison des possibilités de réadaptation sociale ou inversement des coûts d’hospitalisation que la dégradation des conditions sanitaires de populations en proie à la pauvreté et à la marginalisation sociale aurait entraîné. Ce processus d’élargissement du droit à l’aide sociale, qui franchira une nouvelle étape en 1960, avec la ratification par la France de la convention de New-York de 1954 qui étend finalement aux apatrides l’accès à l’aide à domicile [62], découle de la nouvelle légitimation de l’assistance, fondée sur le principe de « réadaptation » et notamment sur l’idée que l’absence de prise en charge d’un minimum de besoins finit par entraîner des dépenses plus importantes à l’avenir.
Conclusion
45 Dans l’article publié dans la revue de l’OIT en 1952, Pierre Laroque a beau souligner « l’exclusion pratiquement complète de toute considération de réciprocité dans les relations internationales en matière de Sécurité sociale », sans se préoccuper du « niveau atteint par la législation de chacun des pays signataires » [63], l’idée qu’il faut considérer « l’homme, l’individu, la famille en eux-mêmes […] en faisant de plus en plus abstraction de leur pays d’origine, pour leur assurer le bénéfice de toutes les garanties sociales prévues par la législation du pays où ils travaillent ou vivent » [64], est moins une réalité qu’un horizon dont la réalisation est censée dépendre du développement du droit social international, notamment dans le cadre européen. Certes, les années d’après-guerre ont vu s’établir les éléments d’une organisation européenne des relations internationales en matière de Sécurité sociale, mais l’accès des étrangers aux droits concerne essentiellement les travailleurs migrants et les prestations contributives. Alors que tout au long des années 1950, les différences entre les assurances sociales et l’assistance tendent « à s’estomper, sinon à s’évanouir » au sein de la Sécurité sociale [65], le droit aux prestations non fondées sur des cotisations, notamment pour ceux qui ne travaillent pas (ou plus) à cause de l’invalidité, de la vieillesse ou du chômage, reste largement dépendant de la logique des conventions, qui à la fois protègent et hiérarchisent les ressortissants étrangers. Le tableau 2 décrit la situation en septembre 1958, au début de la Ve République :
Accès des étrangers résidents en France aux prestations non contributives et d’aide sociale en septembre 1958
Accès des étrangers résidents en France aux prestations non contributives et d’aide sociale en septembre 1958
46 Ce tableau montre que les prestations non contributives et d’aide sociale, indépendamment du conflit d’idées sur l’avenir de la Sécurité sociale, ne constituent « un élément régulateur du conflit entre droits de l’homme et droits du travailleur » [66] qu’en tant que droits de citoyenneté censés garantir l’intégration des citoyens dans la vie sociale et politique et, réciproquement, légitimer l’État [67]. L’érosion du lien entre État et droits sociaux ne constitue pas l’objectif des législateurs et des acteurs administratifs : les droits sociaux « n’étaient pas philosophiquement perçus comme étant au-dessus et au-delà des frontières » [68], et l’ensemble des débats sur les droits des individus et la coordination européenne a été motivé par la volonté de préserver les systèmes de Sécurité sociale nationaux. Ainsi, les tentatives pour constituer des fonds européens et les références à la nécessaire harmonisation des politiques sociales émanent de délégués français cherchant à protéger les acquis de la Sécurité sociale du pays contre le dumping social. Le coût des prestations contributives ayant un impact sur celui de la main-d’œuvre industrielle, donc sur les conditions de concurrence, l’intégration européenne explique la résolution relativement plus rapide des problèmes concernant les droits assurantiels attachés à un individu plutôt qu’à un territoire ou une nation. Au contraire, l’accès des étrangers à l’assistance, financée par la fiscalité générale, n’est pas directement lié à l’ouverture du Marché commun européen. Le MTSS, intéressé à la maîtrise de la main-d’œuvre, considère que le problème de l’accès des étrangers aux droits sociaux est destiné à se résorber au fil du temps grâce à la généralisation des pensions contributives – les prestations non contributives constituant dès lors des mesures temporaires. Le MSP au contraire, plus attentif aux problèmes de la famille, de peuplement et notamment des réfugiés, insiste sur l’importance de l’extension de l’aide sociale, sans pour autant proposer d’abandonner le recours aux conventions internationales.
47 Les aléas de l’accès des étrangers aux prestations mettent en lumière la fragmentation et la segmentation du système français de protection sociale entre assurance, prestations non contributives et aide sociale. Les prestations non contributives relèvent de la Sécurité sociale, tant au plan européen, lors de négociations aboutissant aux conventions, qu’au plan national (l’allocation supplémentaire du FNS elle-même, bien que financée par les impôts, est gérée par le MTSS). Cependant, les discriminations vis-à-vis des étrangers, les montants des allocations et les enjeux du financement contribuent à rapprocher les prestations non contributives de l’aide sociale. L’élargissement des droits aux prestations non contributives découle des accords signés avec les autres pays européens, l’administration française se montrant « peu favorable à l’assimilation des étrangers aux nationaux » [69], alors que pour l’aide sociale plusieurs facteurs expliquent les positions plus libérales du MSP – le processus d’élargissement des droits à l’aide sociale des étrangers pouvant notamment être considéré comme un produit de la légitimation de l’assistance en tant qu’élément d’un système de Sécurité sociale qui pondère l’objectif traditionnel de la garantie de revenu avec la garantie du minimum vital. Cependant, la nouvelle légitimation de l’assistance ne repose pas uniquement sur la diffusion des principes universalistes et sur les insuffisances du système assurantiel ; elle s’appuie également sur le nouveau référentiel de l’adaptation/réadaptation, qui marque le développement des politiques d’aide sociale et œuvre à l’élargissement des droits des étrangers. Il est par exemple envisageable de déroger à la logique des conventions lorsque le soutien économique de l’État, en gardant les assistés actifs à leur domicile, peut prévenir toute forme d’hospitalisation. Le principe de la réadaptation, par son objectif d’infléchir les attitudes des groupes sociaux pour garantir l’intégration sociale des bénéficiaires, s’articule bien avec la continuité des logiques d’assimilation, les besoins de main-d’œuvre de la France des années cinquante et les impératifs politiques liés à l’anticommunisme dans le cas des réfugiés. Certes, l’objectif de rendre stable la présence des travailleurs migrants sur le territoire français amène à éviter les mesures trop libérales dans la mesure où elles ne favorisent pas la naturalisation, et donc à lier l’octroi de certaines prestations à la citoyenneté. Néanmoins, les besoins de main-d’œuvre et l’objectif d’empêcher la constitution des étrangers en une population à part, difficilement intégrable dans le tissu social français, jouent un rôle considérable non seulement concernant les prestations contributives – notamment par la possibilité de totaliser les prestations des travailleurs ayant cotisé dans des pays différents – mais également dans l’octroi des prestations non contributives et d’aide sociale. L’accès à ces prestations reste toutefois limité en raison du non-recours : pour l’aide sociale par exemple, la demande doit être rédigée par l’intéressé et adressée à la mairie de résidence, se heurtant souvent à la mobilité des travailleurs migrants et des réfugiés. Lorsqu’il n’y a pas d’assistantes sociales ou d’organisation syndicale aidant les potentiels bénéficiaires, la plupart des mesures demeurent, notamment hors des grandes villes, « lettre-morte pour toutes les catégories d’étrangers » [70]. La convention la plus largement utilisée était celle avec la Suisse, mais elle bénéficiait surtout aux Français y résidant. Si les hauts fonctionnaires modernisateurs des années 1950 élargissent le cadre des droits sociaux aux travailleurs migrants et aux réfugiés, son application reste à étudier, et un décalage entre droit et pratiques ne peut pas être exclu.
Mots-clés éditeurs : réfugiés, minimum vieillesse, OIT, assistance, prestations non contributives, Aide sociale, Sécurité sociale, travailleurs migrants
Date de mise en ligne : 28/02/2024
https://doi.org/10.3917/rhps.016.0050Notes
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[22]
Les travailleurs étrangers sont admis au bénéfice des allocations de chômage dans les mêmes conditions que les travailleurs français par le décret n° 51-319 du 12 mars 1951 (Journal officiel, 13 mars 1951, p. 2671).
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[23]
« Projets de convention et de recommandation concernant les travailleurs migrants », 12 septembre 1949, AN 19770623/69.
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[24]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 32.
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[25]
Note sur les droits des réfugiés et apatrides en matière d’aide sociale et prestations non contributives de vieillesse, 10 mars 1964, AN 19760183/68.
-
[26]
Procès-verbal de la séance 199/AS/32, 10 février 1955, AN CE/514.
-
[27]
Circulaires n° 35 SS et n° 60 SS du 21 mars et du 5 août 1957, AN 19760183/68.
-
[28]
L’exclusion du FNS des étrangers non bénéficiaires d’une convention internationale a motivé la décision du 22 janvier 1990 du Conseil constitutionnel, affirmant l’illégalité de la subordination de l’accès aux prestations sociales à une condition de nationalité: cf. Michelet Karine, « Le droit des étrangers à la protection sociale. De l’affirmation du droit à sa mise en œuvre », Informations sociales, vol. 142, n° 6, 2007, p. 82.
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[29]
Bonnechère Michèle, « Réflexions sur la Sécurité sociale des travailleurs migrants », Revue trimestrielle de droit sanitaire et social, vol. 12, n° 2, 1972, p. 133.
-
[30]
MTSS, Circulaire n° 103 relative à la situation des réfugiés au regard de l’allocation supplémentaire, 4 novembre 1959, AN 19760183/68.
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[31]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 14.
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[32]
Rosental Paul-André, L’intelligence démo-graphique : sciences et politiques des populations en France, 1930-1960, Paris, Odile Jacob, 2003, p. 110-113.
-
[33]
Accord du 17 avril 1950, Journal officiel, 13 mai 1951, p. 4995-96.
-
[34]
En 1948, l’Italie n’avait remboursé que 4,5 % des frais d’assistance des Italiens résidents en France et celle-ci souhaitait s’orienter vers une solution financière garantissant une diminution des contentieux de remboursement (« Attributions du 8e bureau de la sous-direction de l’entraide », s.d., AN 19760180/5).
-
[35]
Ambassade des Pays-Bas, « Insuffisance des allocations vieillards dont bénéficient aussi les étrangers », 18 juillet 1951, AN 19760180/7.
-
[36]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entr’aide sociale, 6 février 1952, p. A33, AN 19760180/6.
-
[37]
Ibid., p. A33-A34.
-
[38]
Compte rendu de la réunion de la Commission interministérielle pour la protection juridique des réfugiés, 6 octobre 1952, AN 20050590/107.
-
[39]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 6 février 1952, p. A48, AN 19760180/6.
-
[40]
Laporte André, « La réforme de la législation sur l’aide sociale », Droit social, 1954, p. 103.
-
[41]
Assistance à la famille, s.d. mais janvier 1952, AN 19760180/7.
-
[42]
Emmanuel Rain, « La réforme des lois d’assistance », La Revue administrative, vol. 6, n° 34, 1953, p. 350.
-
[43]
Décret n° 53-1186 du 29 novembre 1953, Journal officiel, 3 décembre 1953.
-
[44]
Circulaire n° 1590 relative à la Convention européenne d’assistance sociale et médicale, 20 mars 1958, AN 19760180/6.
-
[45]
Rauzy Albert, Jouany Denis, « Rapport concernant la réforme et la codification des lois d’assistance », 4 janvier 1952, AN 19760180/6.
-
[46]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 9 février 1952, p. B18, AN 19760180/6.
-
[47]
Aide sociale aux personnes âgées et aide sociale aux infirmes. Commission centrale, 18 juin 1959 », Revue de l’Aide sociale, vol. 3, n° 1, 1960, p. 38-42.
-
[48]
Question écrite n° 16800 posée après M. Henri Lacaze, 10 mai 1955, AN 19760183/54.
-
[49]
Sur le SSAE, crée en 1921, voir Chibrac Lucienne, Les pionnières du travail social auprès des étrangers : le Service social d’aide aux émigrants, des origines à la Libération, Éditions de l’École nationale de la santé publique, Paris, 2005.
-
[50]
Procès-verbal, Emmanuel Rain, 4 octobre 1952, AN 20050590/107.
-
[51]
Budget d’assistance aux réfugiés, 26 novembre 1952, AN 20050590/103.
-
[52]
Assistance aux réfugiés, 19 août 1952, AN 20050590/103.
-
[53]
Situation en France des étrangers bénéficiaires de conventions d’assistance, 27 juillet 1955, AN 19760183/68.
-
[54]
Ambassade Pays-Bas, 19 juillet 1955, AN 19760183/68 ; Note pour le chef du 4e bureau, 1er décembre 1960, ibid.
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[55]
Situation en France des étrangers bénéficiaires de conventions d’assistance, 27 juillet 1955, AN 19760183/68.
-
[56]
Décrets n° 62-440 et 62-444 du 14 avril 1962, Journal officiel, 15 avril 1962.
-
[57]
« Modification envisagée pour permettre aux personnes âgées étrangères qui ne bénéficient pas de l’allocation supplémentaire du FNS de percevoir l’allocation simple d’aide sociale », Alain Barjot à Emmanuel Rain, 17 juillet 1964, AN 19760183/68.
-
[58]
Capuano Christophe, Que faire de nos vieux ? Une histoire de la protection sociale de 1880 à nos jours, Paris, Presses de Sciences Po, 2018.
-
[59]
Application des décrets du 14 avril 1962, 19 janvier 1963, AN 19760183/68.
-
[60]
La loi du 12 juin 1956 (Journal officiel, 13 juin 1956) autorise la ratification de la convention, signée en 1958 : décret n° 58-194, Journal officiel, 26 février 1958.
-
[61]
Alfandari Elie, « Décret du 18 février 1958 portant publication de la convention européenne d’assistance sociale et médicale », Revue de l’Aide sociale, vol. 1, n° 2, 1958, p. 72.
-
[62]
Décret n° 60-1066 du 4 octobre 1960, Journal officiel, 5 octobre 1960. Seuls les réfugiés sous mandat du Haut-Commissariat des Nations Unies (Égyptiens, Libanais, Tunisiens) demeuraient exclus.
-
[63]
Laroque Pierre, « Problèmes internationaux de Sécurité sociale », art. cit., p. 32.
-
[64]
Ibid.
-
[65]
Perrin Guy, « Les prestations non contributives et la Sécurité sociale », Droit social, n° 3, 1961, p. 181.
-
[66]
Bec Colette, L’assistance en démocratie : les politiques assistantielles dans la France des XIXe et XXe siècles, Paris, Belin, 1998, p. 80.
-
[67]
Rauzy Albert, Picquenard Suzanne, La législation de l’aide sociale : textes et commentaires à jour au 1er juin 1955, Paris, Berger-Levrault, 1955, p. 143.
-
[68]
Fertikh Karim, “From Territorialized Rights to Personalized International Social Rights?”, op. cit., p. 38.
-
[69]
« Allocation vieillesse supplémentaire FNS. Réfugié apatride », Revue trimestrielle de droit sanitaire et social, vol. 10, n° 4, 1967, p. 318-319.
-
[70]
Compte rendu de la section permanente du Conseil supérieur de l’Entraide sociale, 9 février 1952, p. B6, AN 19760180/6.