Couverture de REDP_322

Article de revue

Mobilité des chercheurs, collaborations et circulation des connaissances

Pages 217 à 244

Notes

  • [1]
    RURALITES, Université de Poitiers, marie.ferru@univ-poitiers.fr
  • [2]
    CREG, Université Grenoble Alpes, virginie.jacquier-roux@univ-grenoble-alpes.fr
  • [3]
    CRIEF, Université de Poitiers, bastien.bernela@univ-poitiers.fr
  • [4]
  • [5]
    Dans la suite, nous utiliserons le terme plus générique de « chercheurs » afin de ne pas alourdir le texte, même si l’acception du terme n’est pas exactement la même et pourrait paraître plus restrictive. Nous nous intéressons à l’ensemble des individus dont l’activité professionnelle consiste en partie à produire de nouvelles connaissances.
  • [6]
    « Aux phases 1 et 3 du processus de collaboration correspondent des mobilités de personnes (qui concernent soit l’une soit les deux parties, selon le lieu de la réunion), alors que les phases 2 se caractérisent par l’utilisation des Tic dans un but de communication à distance qui établit une relation d’ubiquité » (Torre [2010]).
  • [7]
    Harrison [2010] résume explicitement ce à quoi renvoie le concept de connectivité actuellement : « joining up », « business hubs », « proximity, expanding existing markets ».
  • [8]
    On peut nuancer toutefois cette coïncidence en évoquant le cas où les chercheurs se déplacent pour effectuer leur travail de terrain, dans des lieux situés hors du cadre spatial des partenaires impliqués dans le projet collaboratif.

1. Introduction

1 La mobilité des chercheurs est devenue un instrument central des politiques publiques récentes de soutien à la compétitivité menées en Europe. Le lancement en 2000 de l’Espace Européen de la Recherche témoigne de la volonté du vieux continent de construire un marché intégré de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche, en soutenant la circulation des chercheurs, en s’équipant d’infrastructures d’envergure mondiale et en incitant à la mise en place de réseaux d’institutions de recherche. « Confrontée à l’intensification de la concurrence internationale pour les meilleurs talents et au défi démographique, l’UE propose un partenariat européen pour les chercheurs destiné à favoriser les carrières et la mobilité » [4]. (Ackers [2008], p. 413) souligne l’association, dans les discours politiques, du concept de mobilité avec ceux d’excellence, de compétitivité et d’attractivité : « European policy at the present time tends to conflate different forms of mobility and promotes the use of the concept as a proxy for internationalisation, excellence and competitiveness ». La circulation des hommes est considérée comme le principal levier de circulation des idées et la mobilité est ainsi fortement encouragée : elle se matérialise par une mobilité sortante de chercheurs pour certains territoires ou organisations et par une mobilité entrante pour d’autres.

2 Ces politiques publiques reposent sur des développements académiques allant de l’économie de la connaissance à la géographie de l’innovation. L’économie de la connaissance, fondée en partie sur des approches microéconomiques, considère la connaissance comme un bien public au cœur du processus d’innovation (Arrow [1962] ; Crampes et Encaoua [2005]). Les approches évolutionnistes dépassent cette analyse pour souligner la dépendance forte de l’innovation 1) au temps, étant donné le caractère cumulatif des connaissances, et 2) à l’espace, étant donné le caractère tacite des connaissances, dont la diffusion supporterait mal la distance physique. On observe alors un glissement de cette littérature vers des approches plus spatialisées, avec la mise en évidence à la fin des années 1990 de la forte polarisation des activités d’innovation (Fagerberg et al. [1997] ; Puga [1999] ; Lung [2003]). Le territoire devient un élément important et donne lieu à une recherche empirique abondante – que l’on regroupe sous le vocable de géographie de l’innovation (Feldman [1994]) – cherchant à comprendre la dynamique spatiale des processus d’innovation. Les modèles économétriques testés par les auteurs de ce courant rendent compte de la concentration spatiale de l’innovation ; ils concluent alors au caractère local des externalités de connaissances et considèrent que « le savoir traverse les corridors et les rues plus facilement que les continents et les océans » (Feldman [1994], p. 2).

3 Plus précisément, en raison de leur caractère essentiellement tacite, les connaissances sont attachées aux personnes (Von Hippel [1994]) et difficilement transmissibles à distance. Elles peuvent néanmoins se diffuser à travers trois grands mécanismes : 1) la colocalisation des acteurs de l’innovation, puisque « les secrets de l’industrie sont dans l’air » que respirent les personnes qui se côtoient (Marshall [1890]) ; 2) les partenariats d’innovation, afin de bénéficier des connaissances détenues par d’autres via l’établissement de collaborations ; et 3) la mobilité, les connaissances circulant avec les personnes qui les maîtrisent. Le premier mécanisme, largement étudié, est aujourd’hui mis en doute : « against this widely accepted tradition, some studies consistently argue that colocation is not a sufficient condition for accessing private pools of local knowledge » (Miguélez et Moreno [2013], p. 123). Les collaborations et la mobilité apparaissent alors comme les deux principaux vecteurs, souvent imbriqués, de la circulation des connaissances : « diffusion of knowledge occurs in part because movers bring knowledge to the destination and in part because mobile scientists establish collaborations with and across the local communities they bridge » (Gibson et McKenzie [2012]).

4 Des travaux récents révèlent néanmoins, à partir de l’étude conjointe de données sur les collaborations et la mobilité (Chinchilla-Rodríguez et al. [2018a,b]), qu’il existe « a moderate relationship between the percentage of publications in international collaboration and the share of mobile researchers overall ». Ces résultats rendent compte de la complexité du processus de circulation des connaissances.

5 A partir de là, il nous semble important de réinterroger les effets attribués à la mobilité des chercheurs en lien avec les processus de collaborations scientifiques, de relier la mobilité aux réseaux de recherche. Comment mobilité et collaborations, dans leurs différentes formes, s’articulent-elles ? Par ailleurs, si la mobilité est d’abord un support parmi d’autres pour faire circuler la connaissance, questionner son articulation aux collaborations revient également à interroger les modes de production des connaissances. Nous affirmons à cet égard la nécessité de distinguer d’un point de vue conceptuel circulation et production de connaissances. Faire circuler les connaissances recouvre à la fois les flux de diffusion et d’accès à ces connaissances, sans préjuger d’une production de nouvelles connaissances à la suite. Produire des connaissances repose sur des processus collectifs que la mobilité est censée favoriser dans certains cas : nous parlons alors de co-production de connaissances, objectif pour lequel l’articulation entre mobilité et collaborations prend une importance particulière. Nous pensons ainsi qu’il existe diverses modalités d’articulation entre mobilité et collaborations, qu’il convient de repérer et d’examiner en fonction de ce qu’elles produisent en matière de circulation et de production des connaissances, afin de dépasser le principe de valorisation de la mobilité en tant que telle.

6 Dans cette perspective, nous proposons un cadre d’analyse incluant les collaborations comme tiers terme entre la mobilité et l’objectif poursuivi en matière de connaissance. Cet exercice, rarement mené jusqu’alors (Scellato et al. [2015]), conduit à mieux documenter les mécanismes à travers lesquels la mobilité produit les effets qu’on peut attendre d’elle. En permettant de repenser l’enchainement « mobilité – circulation des connaissances » et d’éviter d’assimiler de manière abusive les deux phénomènes, comme cela avait été le cas pour l’assimilation entre colocalisation et diffusion des connaissances (Rallet et Torre [2005]), notre proposition contribue à la réflexion en économie de la connaissance et en géographie de l’innovation, mais également à la définition des politiques publiques.

7 Après avoir précisé les concepts de mobilité et de collaborations des high-skilled workers[5] (Section 2), une analyse des articulations entre les pratiques de mobilité géographique des chercheurs et de collaborations scientifiques nous amènera à proposer une grille de lecture sous forme de typologie reprenant les différentes configurations possibles (Section 3). La grille proposée nous permettra de mettre en évidence les verrous et les enjeux empiriques pour une analyse conjointe de ces deux phénomènes (Section 4), avant de conclure sur une mise en perspective critique de la mobilité dans le contexte de crise sanitaire actuel (Section 5).

2. Retour sur la mobilité des chercheurs et les collaborations scientifiques

2.1. Mobilité, circulation et co-production de connaissances

8 La mobilité géographique, définie comme un déplacement de portée variable dans l’espace géographique et dans le temps, permet aux individus d’agir dans des espaces différents, à des moments différents. Elle a connu une croissance importante avec le développement des infrastructures et technologies de transport et de communication. Les chercheurs ne sont pas exempts de cette tendance et sont de plus en plus mobiles, à la fois au fil de leur carrière et dans la pratique courante de leur activité (Harfi [2005] ; Avenyo et al. [2016]). La problématique de la mobilité des chercheurs renvoie classiquement à deux champs de la littérature : 1) celui du marché du travail et de la gestion des carrières, et 2) celui de la circulation des connaissances. Dans le premier champ, il s’agit essentiellement de comprendre le rôle de la mobilité dans l’avancement des carrières et son impact sur la productivité, avec la comparaison traditionnelle des modèles américains et européens. Les études empiriques (Long et al. [1993] ; Landry et al. [1996] ; Lee et Bozeman [2005] ; Mairesse et Turner [2005] ; Crespi et al. [2007] ; Hoisl [2007] ; Abramo et al. [2009] ; Lawson et Shibayama [2015]) tendent plutôt à montrer l’effet positif de la mobilité géographique sur la productivité scientifique. Dans le second champ, la mobilité est considérée comme un des mécanismes prioritaires de la diffusion et de la co-production des connaissances (Autant-Bernard et Massard [2009]), considération au cœur de notre propos et qui fera donc l’objet de la suite de cette section.

9 La littérature traitant de la relation entre mobilité de la main-d’œuvre qualifiée et diffusion des connaissances est vaste, et relativement ancienne si l’on considère les études pionnières d’Arrow [1962], Rosen [1972] ou Stephan [1996]. Chez les évolutionnistes, la mobilité est rapidement considérée comme un mécanisme privilégié d’accès aux connaissances dès les travaux de Teece [1982], Winter [1987] ou Dosi [1988]. « Étant donné que la connaissance, à la différence de l’information, est étroitement liée aux personnes, de façon individuelle ou collective et que, par conséquent, elle ne peut pas être transmise facilement, la mobilité des ressources humaines, en particulier de celles qui sont hautement qualifiées, est perçue comme un véhicule fondamental de transmission » (Cañibano [2006]). Des intuitions empiriques apparaissent avec les travaux de Saxenian [1994] sur la Silicon Valley, montrant l’importance de la mobilité des ingénieurs et son incidence sur la circulation des connaissances entre les entreprises du territoire. Plus précisément, Almeida et Kogut [1999] montrent que la mobilité interentreprises des inventeurs (i.e. déposants de brevets) dans l’industrie des semiconducteurs aux États-Unis influence la circulation des connaissances entre entreprises locales. Plus précisément, si les « spillovers » sont localisés, cela tient selon eux à l’existence de relations sociales au sein d’un marché local du travail qui circonscrivent géographiquement les mobilités. Ils révèlent que plus la mobilité professionnelle est forte, plus les connaissances se transmettent d’une firme à l’autre. Breschi et Lissoni [2009] ont fait état de résultats similaires dans une étude menée pour le compte d’inventeurs américains dans d’autres domaines technologiques. Plus récemment, Breschi et al. [2017] mettent en exergue les effets de diaspora pour les inventeurs expatriés et le rôle des liens avec le pays d’origine dans les citations de brevets. Agrawal et al. [2006] précisent les mécanismes de diffusion en indiquant que lorsque les inventeurs quittent leur lieu de travail, ils entretiennent des liens interpersonnels avec leurs anciens collègues, qui ont une probabilité plus forte de citer leurs travaux plus tard. Des auteurs intègrent enfin la dimension temporelle à l’analyse : Breschi et al. [2010] ou Fontes et al. [2013] soulignent l’impact sur le long terme de la mobilité scientifique sur l’échange de connaissances et la formation des réseaux. Cañibano et al. [2011] et Bernela [2015] précisent que la mobilité doit être distinguée selon qu’elle est permanente ou temporaire. Alors que la première, caractérisée par un changement d’emploi (Cañibano [2006]), retient quasi exclusivement l’attention de la littérature, les auteurs révèlent l’importance de la seconde pour la conduite des activités scientifiques et son rôle déterminant dans la diffusion des connaissances. Au final, les différents travaux cités précédemment montrent que la circulation des connaissances (accès et diffusion) s’appuie sur la mobilité, mais aussi sur la mise en place de réseaux de collaborations.

10 En nous appuyant sur ces derniers travaux et en intégrant la dimension temporelle de la mobilité, nous proposons d’enrichir la notion. Avec l’amélioration des technologies de l’information et de la communication (TIC) et des transports, une proximité temporaire entre partenaires est aujourd’hui possible et suffisante pour gérer les besoins d’interactions (Rallet et Torre [2005]). Cette substituabilité entre proximité permanente et proximité temporaire – via des mobilités et/ou la mobilisation de TIC – est envisageable a minima lors de certaines étapes d’un projet collaboratif d’innovation [6]. Les études de Gallaud et Torre [2004] montrent à cet égard que « participants in a project of innovation tend to meet only once a term (et que) the division of labor enables innovators to individually carry out the stage of production for which they possess the most competences and to limit interactions with other parties to the stage of assembling of the innovation ». Ainsi, pour la plupart des collaborations, les interactions physiques sont fréquentes durant les premières étapes de construction du partenariat notamment lorsque les acteurs ont des bases de connaissances très différentes et que le projet est peu structuré –, mais elles sont par la suite moins indispensables (Grossetti et Bès [2001]). De manière générale, « à chacune des séquences correspondent des mécanismes de mobilité ou d’ubiquité des acteurs, ainsi que l’utilisation de technologies particulières » (Torre [2010]). On parle volontiers à ce sujet de clusters temporaires (Maskell et al. [2006]), un terme qui souligne la parenté avec la forme permanente des systèmes localisés de production ; il s’agit essentiellement d’un besoin ponctuel de relations de face-à-face, motivées par la volonté de réduction des coûts de transaction et au service d’une meilleure coordination entre partenaires impliqués dans un même projet innovant.

11 Au final, nous considérons que les chercheurs vont réaliser lors de leur carrière scientifique des mobilités plus ou moins longues, plus ou moins réversibles, qui ont toutes le pouvoir de marquer leur réseau scientifique. Nous distinguons plus précisément trois formes de mobilité :

  1. Les chercheurs peuvent être amenés à avoir une mobilité permanente liée à un changement d’affiliation ou au recrutement des chercheurs. Elle peut être qualifiée d’irréversible dans la mesure où le déplacement dans l’espace est concomitant au fait de quitter son poste.

13 Outre cette mobilité permanente, les chercheurs peuvent réaliser des mobilités non permanentes dans le cadre de leur activité scientifique, parmi lesquelles nous distinguons :

  1. la mobilité temporaire qui renvoie aux déplacements de durées intermédiaires, notamment aux séjours de recherche (ils durent traditionnellement de 1 mois à 2 ans), et qui implique la plupart du temps un retour dans la localisation d’origine ;
  2. la mobilité ponctuelle qui correspond aux déplacements courts des chercheurs, liés à la conduite de l’activité scientifique : la participation à des salons, à des colloques, à des jurys de thèse et d’HDR (Habilitation à Diriger des Recherches), la coordination de projets de recherche, etc.

15 Ces différentes formes de mobilités (permanente, temporaire ou ponctuelle) n’agissent pas nécessairement en substituabilité mais peuvent au contraire se compléter voire même se renforcer les unes les autres : une mobilité permanente peut conduire à des mobilités plus ponctuelles entre chercheurs pour le développement de projets de recherche, etc. La répétition de mobilités ponctuelles et temporaires peut permettre à un chercheur d’accéder à un ensemble de connaissances et construire des collaborations ici et là, sans changer durablement de localisation ou d’affiliation principale.

16 Par ailleurs, les mobilités peuvent être locales (d’un laboratoire à l’autre sur le même campus, ou encore d’un laboratoire académique vers une entreprise privée sur le même territoire), nationales ou internationales. La question des échelles géographiques n’est pas anodine puisque les incitations ou représentations tendent à donner une importance symbolique au franchissement de la distance : dans un CV de chercheur, les mobilités internationales tendent ainsi à être davantage valorisées que les mobilités nationales.

17 Notons enfin que si, au niveau individuel, la mobilité du chercheur se manifeste à l’échelle de sa propre trajectoire, nous pouvons considérer la mobilité au niveau d’une organisation (i.e. mobilité de l’ensemble des chercheurs). Alors que la mobilité, pensée au niveau individuel, est uniquement une mobilité « sortante », dirigée vers l’ailleurs, pour l’organisation (entreprise ou territoire) elle peut être entrante (recrutement, arrivée) et sortante (fin d’emploi, sortie). La mobilité entrante peut bénéficier à ceux qui sont déjà dans l’organisation qui accueille, et peut ainsi jouer un rôle important dans la connexion des chercheurs à d’autres réseaux. Elle permet des circulations dans l’environnement local d’un individu sans que ce dernier soit mobile (recrutement de post-doctorants, stagiaires, accueil de chercheurs invités, etc.).

18 La Figure 1 propose une synthèse des différentes caractéristiques des mobilités présentées précédemment. Nous inscrivant dans une approche spatio-temporelle de la mobilité, ce sont les dimensions « géographique » et « temporelle » (notées en gras dans la figure 1) qui retiendront notre attention dans la suite, compte tenu de leur incidence certaine pour l’analyse de la géographie de l’innovation.

Figure 1. Caractéristiques des mobilités

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Figure 1. Caractéristiques des mobilités

2.2. Collaborations scientifiques, circulation et co-production de connaissances

19 Les collaborations entre chercheurs sont souvent considérées comme des sources majeures d’innovation (Mansfield [1991] ; Salter et al. [2000] ; Cohen et al. [2002]). L’innovation est de moins en moins le fruit d’un individu isolé, l’innovation ouverte devenant la norme (Chesbrough [2003]). A partir de données bibliométriques, de nombreuses études ont montré la densification et l’internationalisation des cosignatures dans les articles scientifiques (Luukonen et al. [1992] ; Wagner et Leydesdorff [2005] ; Grossetti et al. [2014]) : le nombre d’auteurs par article ne cesse d’augmenter, toutes disciplines confondues (Wuchty et Jones [2007] ; Gazni et al. [2012]), et la part d’articles en collaboration avec des auteurs internationaux est passée de 10 % en 1990 à 25 % en 2011 (Wagner et al. [2015a,b]).

20 Ce renforcement des collaborations peut s’expliquer par plusieurs déterminants. D’abord, la tendance à la spécialisation, notamment des techniques, et le coût de certains équipements dans les sciences expérimentales, nécessitent la participation de plusieurs équipes pour un même programme de recherche, chaque partenaire ne disposant pas individuellement des ressources cognitives et/ou matérielles nécessaires. L’incitation à s’engager dans des projets collaboratifs, parfois avec des partenaires internationaux, pour être éligible à certains financements, ou encore la recherche de collaborations avec des partenaires prestigieux pour gagner en visibilité, participent également à la dynamique collaborative de l’activité scientifique. Katz et Martin [1997] insistent sur le développement des TIC et la diminution des coûts de transport comme facteurs ayant participé au renforcement des collaborations scientifiques.

21 Les collaborations pour l’innovation ont fait l’objet de nombreux travaux de recherche au cours des dix dernières années (Hussler [2004] ; Levy [2005] ; Gallié [2005] ; Gallaud [2005], etc.). Des revues systématiques de cette littérature ont été réalisées (voir notamment Katz et Martin [1997] ou Filippetti et Savona [2017]). Par ailleurs, Skute et al. [2019], sur la base d’une analyse bibliométrique de cette littérature, soulignent l’intérêt donné à « the interaction process and knowledge transfer » parmi les thèmes récurrents dans l’analyse des collaborations pour l’innovation. Plus récemment, Ferru et al. [2019] ont mesuré l’importance des liens interpersonnels dans la genèse des partenariats ; les modalités de mise en relation, et plus particulièrement les relations sociales du chercheur, déterminent alors fortement le choix du partenaire et la dimension spatiale de la collaboration. Grossetti et Bès [2001] confirment le lien entre relations interpersonnelles et partenariats locaux, suggérant que l’agglomération spatiale des activités d’innovation s’explique au moins en partie par l’existence de relations interpersonnelles entre chercheurs. Les relations se nouent en effet plus aisément avec des personnes situées à proximité, la probabilité de les rencontrer étant plus grande (voir par exemple Sorenson [2018]).

22 Des avancées ont ainsi été réalisées ces dernières années permettant de mieux comprendre les contraintes sous-jacentes aux collaborations. La nature même des collaborations a toutefois été peu appréhendée alors qu’il semble important de tenir compte de ses différentes caractéristiques pour mieux comprendre les contraintes d’interactions entre partenaires associés et d’éventuels besoins de mobilité.

23 Si l’on revient sur la notion de collaboration tout d’abord, des termes proches existent, tels que coopération ou partenariat. Le terme le plus approprié cependant nous semble être celui de collaboration en ce qu’il insiste sur l’existence d’un travail réalisé en commun. En effet, le partenariat constitue, selon Lauras et al. [2003], une association en vue d’un positionnement commun alors que la collaboration renvoie au fait de travailler ensemble, à une association dictée par l’utilité qui vise l’efficacité et renvoie plutôt à un processus de division du travail (Laurent [2018]). Certains partenariats existent au contraire sans qu’il y n’y ait de réelle collaboration, à l’instar des accords de licence. La coopération correspond quant à elle à un processus de partage et d’élaboration des connaissances communes (Laurent [2018]).

24 Le caractère formel ou non des collaborations nous semble important à intégrer, les collaborations basées sur un financement formant de véritables projets de recherche, organisés selon un calendrier et une division du travail précis (« kick-off », « work packages », livrables, etc.) se différencient à de nombreux égards de collaborations beaucoup plus informelles et spontanées à l’instar des communautés cognitives (Amin et Cohendet [2004]). D’autres caractéristiques des collaborations doivent être prises en compte pour mieux les qualifier (Figure 2). La taille des collaborations (i.e. le nombre de collaborateurs) apparait également déterminante si l’on souhaite intégrer la diversité que recouvre la notion : une collaboration dyadique diffère nécessairement des consortiums de recherche et suppose des contraintes différentes, aussi bien du point de vue de son organisation que des interactions entre les acteurs impliqués. Les projets européens qui comprennent généralement une dizaine d’organisations partenaires reposent sur une toute autre logique qu’une publication entre deux chercheurs, la division du travail y est plus large et une coordination plus élaborée apparait indispensable (Bernela et Levy [2017]). Les collaborations peuvent ensuite différer selon qu’elles rassemblent des acteurs d’institutions différentes (i.e. collaborations mixtes de type public-privé ou science-industrie) ou similaires. Là encore, les contraintes inhérentes aux collaborations ne sont pas les mêmes si l’on tient compte de cette caractéristique (Ponds et al. [2007]). Dans une perspective dynamique, il est également primordial de savoir si les collaborations sont nouvelles ou reconduites avec d’anciens partenaires (Ferru [2010]), ou encore si elles sont le fruit de relations inter-individuelles ou inter-organisationnelles (Ferru [2014]), afin de repérer des phénomènes d’encastrement et de découplage dans le temps (Grossetti [2018]). Dans une perspective géographique enfin, la dimension locale versus nationale ou internationale des collaborations est décisive pour décrire la géographie de l’innovation.

Figure 2. Caractéristiques des collaborations

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Figure 2. Caractéristiques des collaborations

3. Quelle articulation entre mobilité des chercheurs et collaborations pour la circulation et la co-production de connaissances ?

25 Nous pensons ici l’approche des collaborations et de la mobilité non plus séparément mais conjointement pour avancer dans l’analyse de la dynamique spatiale de l’innovation et de la circulation des connaissances. Si la mobilité est un support parmi d’autres pour faire circuler la connaissance, que pouvons-nous dire de son articulation avec les collaborations ? Quels objectifs cette articulation peut-elle servir ? Comment mobilité et collaborations, dans leurs différentes formes, s’articulent-elles concrètement, et que produisent-elles ? L’une des questions est également de savoir si, et par quels moyens, les collaborations peuvent se nouer et se dérouler sans l’intervention d’une forme de mobilité ?

3.1. De l’intérêt de distinguer circulation et co-production des connaissances

26 Nous considérons la mobilité géographique comme un déplacement dans un espace spatio-temporel. Cette dernière, en permettant le rapprochement avec d’autres acteurs (i.e. effet de proximité physique), serait pour de nombreux auteurs le moyen de saisir la complexité des connaissances, alors qu’une trop grande distance isole les connaissances contextuelles nécessaires pour démêler l’ambiguïté causale (Sorenson et al. [2006]). Cependant, avec d’autres auteurs (voir notamment Grossetti [2004]), nous souhaitons insister sur l’idée que cette colocalisation permise par la mobilité ne suffit pas toujours pour accéder à des connaissances situées : « le potentiel de proximité géographique peut rester inactivé, ou non mobilisé » (Torre [2010]).

27 Tout d’abord, suivant Grossetti [2004], nous considérons que la mobilité, pour produire quelque chose en termes de connaissances, nécessite une médiation. Pour bénéficier des effets de proximité spatiale induits par la mobilité « il faut rencontrer des gens, nouer des relations, construire des réseaux. Cela prend du temps et ne s’effectue pas par simple présence dans les lieux » (ibidem, p. 169). La médiation est source de « connectivité » entre émetteur et récepteur des connaissances. Sans cette dernière, la mobilité peut très bien ne rien permettre de faire circuler, et viser d’autres objectifs. Le terme « connectivité » nous semble traduire l’idée de circulation des connaissances conditionnée aux relations entre acteurs. De nombreux auteurs ont depuis quelques années souligné cet aspect à l’instar d’Autant-Bernard et al. [2010] qui indiquent qu’une meilleure compréhension des mécanismes de production et de diffusion des connaissances conduit à s’interroger sur l’importance d’une action individuelle délibérée pour connecter les personnes. Pourtant, la notion est souvent associée à l’existence de réseaux (Gluckler [2013] l’utilisant même comme synonyme) alors qu’elle va au-delà de la métaphore du « channel » (Owen-Smith et Powell [2004]) et de la relation. Elle est parfois considérée à un niveau spatial (connectivité entre régions (Benaim et al. [2012]) ou villes (Beaverstock et al. [2002])) et non au niveau des acteurs tels que le chercheur ou l’organisation [7]. Dans notre cas, le concept de connectivité est utile à la réflexion afin d’embrasser à la fois l’importance de la circulation mais également l’organisation du lien émetteur-récepteur de connaissances. C’est l’intensité de la médiation et de la connectivité établie entre acteurs qui va définir l’effet de la mobilité : de la simple interaction (de l’un vers l’autre) qui permet une circulation des connaissances (je reçois/je transmets), au réel partage de connaissances (entre l’un et l’autre, avec un objectif commun) qui permet une co-production des connaissances. Cela confirme la nécessité de distinguer ce qui relève de la circulation de ce qui relève de la production de connaissances.

28 Finalement, on observe des situations différentes selon les effets que la mobilité produit : la mobilité ne produit rien en termes de connaissances ; la mobilité permet la circulation des connaissances ; la mobilité permet la co-production des connaissances. Une quatrième situation serait la capacité de la non-mobilité à produire les mêmes effets « à distance » (circulation/coproduction). A partir de là, on comprend bien la nécessité d’entrer dans les mécanismes à l’œuvre derrière la mobilité, ce que nous nous proposons de faire dans le Tableau 1 croisant les dimensions spatio-temporelles des mobilités avec la nature de l’objectif visé par les différents acteurs en présence. Ce croisement met ainsi en évidence les différentes médiations pour que la mobilité engendre la circulation ou la co-production de connaissances.

Tableau 1. Quelles mobilités, pour quels objectifs ?

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Tableau 1. Quelles mobilités, pour quels objectifs ?

29 De manière transversale à ces situations, se pose donc la question de l’articulation entre mobilité et collaborations, et de la connectivité potentiellement établie. Nous pensons que la mobilité « gagne » à s’articuler aux collaborations, ce qui assure davantage de médiation entre acteurs. Plus précisément, il nous semble que l’enjeu central dans les processus d’innovation, de plus en plus collectifs et ouverts, est de réussir à co-produire ces connaissances en participant activement à des réseaux de connaissances (i.e. collaborations), en activant une proximité d’essence non spatiale (Jacquier-Roux [2018] ; Miguélez et Moreno [2013]). Si la mobilité des chercheurs fait le lien entre des acteurs qui co-produisent, elle peut ne pas suffire : certaines connaissances se co-produisent uniquement dans une simultanéité du travail collectif que la mobilité seule ne peut fonder. C’est pourquoi nous pensons que la co-production de connaissances exige de combiner à la mobilité des chercheurs des collaborations scientifiques entre acteurs. L’articulation entre mobilité et collaborations devient le moyen de garantir l’efficacité du travail scientifique collaboratif. Cela montre la nécessité d’étudier finement les différentes configurations d’articulation mobilité-collaborations pour envisager les possibles effets cognitifs qui en découlent.

3.2. Configurations possibles d’articulation mobilité-collaborations

3.2.1. Indépendance mobilité – collaborations

30 Avant d’aborder les configurations d’articulation entre mobilité et collaborations, on peut envisager la complète indépendance des deux phénomènes. Trois situations se présentent.

a) La mobilité sans objectif de circulation de connaissances

31 La stratégie de mobilité des scientifiques peut ne pas répondre à des objectifs de collaboration et être complètement indépendante des pratiques collaboratives. Elle peut de même ne pas viser la circulation de connaissances. Au niveau individuel en effet, un chercheur peut se déplacer pour des raisons personnelles ou de gestion de carrière et ne pas collaborer avec les acteurs localisés là où il se déplace (cases I, J, K). De même, un organisme de recherche peut recruter ou mettre fin à des contrats de travail, à seule fin d’évolution de ses effectifs, de renouvellement, sur des critères d’âge ou de réputation (case K). Encore une fois, il ne faut pas faire d’amalgame a priori entre mobilité et circulation de connaissances et/ou collaboration : la mobilité peut ne rien produire en matière d’innovation.

b) La mobilité pour assurer la circulation… et rien d’autre

32 La mobilité des chercheurs peut apparaître nécessaire quand les autres modalités ne permettent pas la circulation des connaissances : elles sont « cadenassées ». Des contraintes empêchent la circulation des connaissances par d’autres moyens (utilisation des TIC, veille scientifique numérique). Pour les chercheurs d’une part, l’activation de leur réseau social nécessite alors de bouger. La mobilité est donc ponctuelle, temporaire, ou permanente (cases A, B et C). Pour les organisations d’autre part, l’accès à des compétences, savoirs et réseaux de connaissances passe par le recrutement de chercheurs (case C). La problématique des collaborations est ici hors-champ.

c) La co-production se dispense de la mobilité

33 Dans ce cas, la co-production de connaissances se fonde exclusivement sur les collaborations. Barjak et Robinson [2008] montrent que, dans les sciences de la vie, les équipes académiques les plus performantes sont caractérisées par peu de diversité en termes de culture et de nationalité (et donc peu de mobilité internationale des chercheurs) mais par des collaborations internationales très fournies. Elles disposent d’atouts leur permettant une connectivité sans mobilité (case H). Par ailleurs les collaborations sont dans certains cas aujourd’hui facilitées par les TIC (qui permettent l’ubiquité – Torre [2010]). Elles s’avèrent moins coûteuses pour les chercheurs et les organisations que des décisions de mobilité à fort impact en termes de choix de vie et de GRH.

34 Ces trois configurations, peu documentées par la littérature et les travaux empiriques, restent en réalité assez rares. Les recherches ont montré de façon beaucoup plus fournie les situations de complémentarité entre mobilité des chercheurs et collaborations.

3.2.2. Complémentarité mobilité – collaborations

35 L’idée d’une complémentarité entre mobilité et collaborations suggère qu’elles se renforcent mutuellement. Certes les collaborations supposent a priori un « travailler ensemble » pour produire des connaissances, mais la prise de contact, la définition des projets et des tâches, les ajustements, les séances de debriefing, la mise en place de normes, etc., qui rendent ce « travailler ensemble » opérationnel, sont facilités par la mobilité des chercheurs (qu’elle soit permanente, temporaire ou ponctuelle).

36 a) L’idée que la mobilité des chercheurs précède et/ou permet l’établissement de collaborations grâce à sa puissance de mise en relation est la plus documentée dans la littérature : « diffusion of knowledge occurs in part because movers bring knowledge to the destination and in part because mobile scientists establish collaborations with and across the local communities they bridge » (Gibson et McKenzie [2012]).

37 C’est tout d’abord la mobilité permanente des chercheurs, passant par un changement de poste, de lieu d’affectation, d’organisation, voire de contrat de travail, qui peut être considérée comme un vecteur de collaborations grâce à l’établissement de nouveaux liens, qui interconnectent le réseau de connaissances du chercheur mobile et celui de son lieu d’arrivée (case G).

38 Plusieurs analyses vont en ce sens concernant la mobilité internationale des scientifiques, c’est-à-dire leur établissement durable à l’étranger (Jonkers et Tijssen [2008] ; Trippl [2013]) : les chercheurs, dans la foulée de leur mobilité, favorisent la mise en place de diverses collaborations, formelles ou non, entre leur pays d’origine et leur pays d’arrivée, entre leur organisation d’origine et leur organisation d’arrivée, et enfin avec les acteurs de leur région d’arrivée. Scellato et al. [2015] mettent en évidence quant à eux les conséquences positives, en termes de collaborations internationales, des migrations de chercheurs suivies d’un retour durable dans leur pays d’origine.

39 D’autres travaux analysent comment la mobilité durable d’un chercheur favorise le lancement de collaborations ultérieures entre son organisation d’origine et son organisation d’arrivée (Agrawal et al. [2006]), ou, plus précisément, entre son entreprise d’origine et son entreprise d’arrivée (Somaya et al. [2008]). Ainsi peut-on considérer que le départ d’un chercheur de son organisation ou de son entreprise n’est pas une perte pour cette dernière, mais le moyen de faire du réseau et d’établir des connexions avec des partenaires potentiels.

40 Le même type d’analyse peut être fait en ce qui concerne les mobilités ponctuelle et temporaire des chercheurs (cases E et F) : un déplacement de quelques mois d’un chercheur lui permet de tisser des liens favorisant, de manière plus ou moins délibérée, des collaborations ultérieures (Jöns [2007]). En effet, la mise en place d’un projet de collaboration précis peut constituer la mission même du chercheur mobile (la mobilité temporaire est alors conçue pour générer des collaborations le temps de la mobilité), mais il est possible d’envoyer un chercheur à l’étranger ou dans une autre organisation de manière temporaire pour échanger sur des savoirs, des pratiques, des cultures, en vue de futures collaborations. D’autre part, dans les organisations dispersées spatialement, comme les firmes multinationales, la mobilité interne ponctuelle ou temporaire des chercheurs permet aux diverses communautés de pratiques (formalisées ou non) de se coordonner pour générer et déployer de manière collaborative des innovations à l’échelle globale (Guérineau et al. [2017]) (cases E et F).

41 Notons toutefois pour finir que cette complémentarité entre mobilité et collaborations est à nuancer par l’influence d’autres variables favorisant les collaborations, et qu’il convient, d’un point de vue empirique, de mentionner la notoriété d’un chercheur et sa performance scientifique (Kato et Ando [2017]), et la matérialité des dispositifs de recherche (Jöns [2007]).

42 b) Dans le sens inverse, on peut imaginer que les collaborations entre acteurs dans le cadre d’un projet de recherche ou d’une co-publication ou co-brevet entrainent la mobilité (permanente, temporaire ou ponctuelle) d’au moins un des acteurs impliqués dans la collaboration.

43 Tout d’abord, la progression dans le projet en collaboration peut nécessiter des mobilités pour sa coordination (cases E et F). Les raisons peuvent aussi être matérielles, du fait de la nécessité d’usage ou de contrôle de ressources localisées chez l’un des partenaires : le cadre de la collaboration est préexistant à la mobilité et la justifie. Certains travaux ont relevé cette concomitance : ainsi Fellesson et Mählck [2017] constatent que la mobilité et les collaborations coexistent et se renforcent au début de la carrière des chercheurs académiques. Di Lorenzo et Almeida [2017] montrent quant à eux que, concernant les chercheurs les plus performants, lorsqu’ils sont davantage impliqués dans des collaborations, leur probabilité de mobilité augmente.

44 Par ailleurs, à l’issue d’une collaboration, des mobilités temporaires de chercheurs permettent de maintenir le lien établi, de faire vivre le réseau de connaissances construit (mobilités entre les lieux où sont situés les anciens partenaires), de valoriser la collaboration auprès du marché ou des sources de financement (mobilités vers de nouveaux sites et de nouveaux acteurs) (case F).

45 Mais des logiques de recrutement peuvent aussi intervenir : la rencontre d’un chercheur lors d’une collaboration le rend précieux pour une organisation, de même que pour un chercheur, la connaissance qu’il acquiert d’une autre organisation à l’occasion d’une collaboration lui donne envie d’y travailler (case G) : la mobilité est alors envisagée comme permanente. Jöns [2007] et Scellato et al. [2015] signalent ces possibilités.

46 c) A la suite des réflexions ci-dessus sur les liens de complémentarité séquentielle entre mobilité des chercheurs et collaborations, on peut proposer une vision de moyen ou long terme qui devient une séquence continue enchainant mobilités et collaborations, dans un processus cyclique auto-entretenu. Ainsi une mobilité engendre une collaboration, qui elle-même engendre une nouvelle mobilité (ponctuelle, temporaire ou permanente – cases E, F et G), qui permet de nouvelles collaborations, etc. A chaque étape du processus, la connectivité des acteurs se renforce, le réseau de circulation de connaissances s’étoffe, se renouvelle, se restructure. Cette boucle serait alors un dispositif (à la fois RH et stratégie organisationnelle) de circulation des connaissances et d’innovation en réseau. Elle confirmerait l’intérêt d’appréhender la mobilité sous son angle temporaire.

47 L’enjeu stratégique pour ce réseau consisterait alors à éviter l’enfermement dans une redondance routinisée des acteurs parties prenantes (mobilité limitée à un cercle restreint, collaborations entre les mêmes partenaires). La mobilité doit ici être vue tout autant pour ouvrir un consortium existant que pour le renforcer. Les collaborations, de même, doivent sortir d’un certain formalisme, pour se renouveler. On retrouve alors l’utilité des approches en termes de caractéristiques des réseaux et des liens qui les constituent, et notamment l’importance d’un équilibre liens forts – liens faibles (Granovetter [1973], p. 1223). A cet égard, Jacquier-Roux [2018] insiste sur l’importance à accorder aux liens faibles dans les réseaux de connaissances. Ces liens faibles « sont alimentés par la mobilité des chercheurs car elle multiplie le nombre des expériences, contacts, lieux, limitant ainsi leur approfondissement. De même que les coopérations externes augmentent le nombre de collaborateurs et diversifient les horizons des contacts, au détriment de la constitution d’un cercle stable et restreint ».

3.2.3. Articulation mobilité-collaborations à différentes échelles

48 Pour avoir une vision plus complète de l’articulation mobilité-collaborations, il convient d’intégrer enfin une approche multi-échelles. Dans ce cadre, l’articulation revêt un caractère systémique, qui exige, pour l’appréhender de manière empirique, de distinguer trois types d’échelles : les échelles d’acteurs, les échelles temporelles et les échelles spatiales.

49 a) La mobilité des chercheurs et les collaborations s’articulent à différentes échelles d’acteurs. On peut étudier des systèmes d’interdépendance pour l’établissement de la connectivité distribuant des rôles aux acteurs de diverses échelles, en termes de mobilité et de collaborations. Plusieurs travaux décrivent en effet des situations dans lesquelles les chercheurs d’un réseau de connaissances ou d’une organisation sont peu mobiles, voire stables à long terme, tout en participant activement à des collaborations. Selon Chinchilla-Rodriguez et al. [2017], d’une manière générale, « researchers collaborate internationally to a much higher degree than they become internationally mobile ». De même, Zucker et al. [1998] et Murray [2002] insistent sur l’enracinement local et organisationnel des chercheurs « vedettes » qui constituent les pivots de nombreuses collaborations. A l’échelle de ces chercheurs-là, la mobilité n’est pas observée, seules les collaborations sont actives. Cependant, à l’échelle des organisations dans lesquelles ces chercheurs travaillent, on observe une mobilité entrante significative : ces organisations sont attractives pour des chercheurs débutants, des collègues, désireux d’approcher les chercheurs « vedettes ». La circulation des chercheurs au niveau de l’organisation est forte. Les collaborations qu’elles soutiennent le sont aussi. Dans un tel système, on peut aussi considérer les chercheurs qui gravitent autour des chercheurs « vedettes » comme étant quant à eux mobiles. Et parmi eux, certains n’ont pas d’objectif de collaboration (mais un objectif de cv amélioré par le passage dans l’organisation du chercheur « vedette »), et d’autres au contraire se déplacent pour établir des collaborations avec le chercheur « vedette ».

50 A ces deux échelles, l’une individuelle, l’autre organisationnelle, on peut ajouter une échelle plus institutionnelle, qui fait intervenir dans le système observé les politiques publiques, à différents niveaux territoriaux (régions, nations, échelon européen) concernant la mobilité des chercheurs (dispositifs, régimes migratoires, etc.) et les collaborations (législation sur les droits de propriété intellectuelle et les partenariats, appels à projets financés, etc.).

51 b) La mobilité des chercheurs et les collaborations s’articulent également à différentes échelles temporelles. On doit ainsi distinguer les liens de complémentarité ou de substituabilité qui peuvent exister entre mobilité des chercheurs et collaborations selon qu’on cible un projet précis de collaboration, qui concerne le moyen terme, ou qu’on cible une collaboration durable entre des organisations, des pays, des chercheurs. Dans ce dernier cas la mobilité peut être courte (temporaire ou ponctuelle), pour une collaboration maintenue et renouvelée. A l’inverse, une collaboration bornée dans le temps peut être l’occasion d’une mobilité permanente d’un chercheur (un tournant dans sa carrière). Les objectifs stratégiques des acteurs de diverses échelles doivent être pris en considération : le temps de la carrière du chercheur n’est pas celui du projet de collaboration. De la même façon, le temps de l’évolution des TIC et des possibilités d’ubiquité et celui du changement de la qualité de vie dans les régions et métropoles, qui impactent à long terme les pratiques de mobilité, ne sont pas ceux d’un projet : y a-t-il incompatibilité entre ces faits aux horizons temporels différents, ou bien est-ce qu’ils se renforcent mutuellement ? Ces diverses temporalités sont à articuler dans des analyses à mener à l’avenir pour en appréhender les conséquences sur la géographie de l’innovation. La littérature ne fournit pas de travaux s’inscrivant dans cette démarche, à notre connaissance.

52 c) La mobilité des chercheurs et les collaborations s’articulent enfin à différentes échelles spatiales. En effet, l’échelle spatiale des mobilités et celle des collaborations peuvent coïncider, tout comme elles peuvent se distinguer. Dans la coordination d’un projet en collaboration, la mobilité nécessaire épouse en général le cadre spatial de la collaboration : on circule d’un lieu à l’autre selon la localisation des divers partenaires du projet [8]. Ainsi, les projets définissent l’espace des mobilités des chercheurs y participant. Par contre, dans le cas d’une articulation séquentielle mobilité-collaboration, la coïncidence spatiale ne va pas toujours de soi. Certaines mobilités internationales de chercheurs, notamment lorsqu’elles sont temporaires, provoquent des collaborations locales, là où le chercheur séjournera quelque temps : on saisit l’occasion de ce séjour pour collaborer avec les collègues locaux autour de la présence du chercheur mobile. Cette collaboration peut survivre à distance suite au retour du chercheur dans son lieu d’origine. Dans la recherche publique, le dispositif des chercheurs invités encourage l’émergence de ce type de collaborations locales puis maintenues à distance. Dans les entreprises multinationales, la mobilité d’une filiale à une autre de cadres du département R & D est un outil de cohésion des dynamiques locales de collaborations. De manière symétrique à ces situations, la mobilité locale d’un chercheur doté d’un réseau de contacts et collaborations à l’échelle internationale favorise de nouvelles collaborations à toutes les échelles spatiales, suite à la combinaison des réseaux de ce chercheurs avec ceux de ses nouveaux collègues. Il ressort donc de ces articulations mobilité-collaborations à diverses échelles spatiales que la dynamique de circulation et de co-production de connaissances fonctionne potentiellement comme un phénomène de contraction vs démultiplication de l’espace.

4. Pour un renouvellement des protocoles d’analyse empirique de la mobilité et des collaborations

53 Si la question de la mesure et de l’indicateur est sous-jacente à l’étude d’un objet dès lors que le chercheur se lance dans l’analyse empirique de cet objet, celle de la disponibilité des données, et leur collecte le cas échéant, est centrale. Les différentes configurations mises en évidence dans la section précédente renvoient à un ensemble de données très diverses si l’on souhaite les mesurer, les évaluer : affiliations des chercheurs, projets (contrats et hors contrats), co-publications, co-brevets, colloques, déplacements scientifiques, etc. Certaines données existent et sont déjà mobilisées par les auteurs pour avancer dans l’analyse de la géographie de l’innovation ; d’autres au contraire doivent être développées. Une première catégorie de données, que l’on peut qualifier de données de réseaux et qui renvoient aux co-publications, co-brevets, ou co-participation à des projets, sont largement mobilisées ces dernières années à la fois pour l’analyse des collaborations mais également pour l’analyse des mobilités en permettant de « tracer » les déplacements des chercheurs au regard de leurs affiliations. Elles sont ainsi des données précieuses pour les chercheurs, d’autant qu’elles offrent d’importantes économies d’échelle : la diffusion rapide et la progression exponentielle au sein de la communauté scientifique de travaux mobilisant des données de réseaux (et notamment de publications) entretiennent un effet cumulatif de l’utilisation de ces sources et de l’affinement des méthodes. Mais il ne faut pas oublier le sens premier des données : que mesure-t-on et que traduisent réellement les données ? Ces données se fondent trop souvent sur l’hypothèse de collaborations entre chaque dyade d’acteurs impliqués dans un projet – en reconstituant des réseaux complets à partir de données de consortium – sans véritablement vérifier leur réalité (Bernela et Levy [2017]). En effet, la plupart des auteurs s’appuient sur des données agrégées et non sur des données relationnelles signifiant que les interactions entre acteurs, à la base des collaborations et des externalités, ne sont donc pas véritablement observées mais seulement supposées à travers leurs résultats (co-production de brevets et de publications) : « most of existing contribution on this matter lacks data at the individual level » (Giuri et al. [2007]) ; « a growing number of studies use patent information to apply social networks analysis (…) assuming relations between inventors who jointly worked on patents » (Cantner et Graf [2006]). Par ailleurs, les données de publications butent sur leur caractère très primaire (liste d’individus et d’adresses) : elles ne constituent qu’un indicateur quantitatif et ne disent rien sur la nature des relations entre les co-auteurs.

54 Une deuxième catégorie de travaux mobilise des sources directes d’informations sur 1) la mobilité des chercheurs (enquêtes DADS (Déclaration Annuelle des Données Sociales) individuelles qui permettent de repérer des trajectoires individuelles de chercheurs, enquête Génération pour les docteurs, enquêtes du SIES (Systèmes d’Information et d’Études Statistiques) du MESRI (Ministère de l’Enseignement, de la Recherche et de l’Innovation) sur les pratiques des entreprises concernant la mobilité de leurs chercheurs) ; 2) les collaborations (enquêtes auprès de chercheurs sur leurs réseaux ; enquêtes et données sur les collaborations des entreprises et des universités comme le Community Innovation Survey).

55 Les recherches ont eu pour objectif premier l’amélioration du traitement de ces données plutôt que l’amélioration des données elles-mêmes et leur diversification. Ainsi, en se développant essentiellement en fonction des données disponibles (data-driven) et des possibilités de raffinements techniques, elles laissent de nombreux « angles morts » dans l’analyse des mobilités et collaborations. Dit autrement, tout un pan de l’activité des chercheurs est non visible au travers des données disponibles. Plus encore, les micro-déterminants de leurs activités ne peuvent être étudiés. Pourquoi les collaborations ou mobilités ont lieu ? Quels objectifs ? Combien de mobilités temporaires ou ponctuelles les chercheurs ont-ils fait ? Ces mobilités ont-elles permis de construire des partenariats ? etc. L’enjeu est donc d’avancer sur la construction de telles données, de mieux caractériser les réseaux individuels et organisationnels tout en intégrant des récits sur les flux de mobilité et les collaborations menées.

56 Compte tenu des limites inhérentes aux données existantes, un enjeu important est de construire des bases de données relationnelles afin de saisir ce qui se cache réellement derrière l’activité de production scientifique. Pour comprendre l’articulation entre mobilité et collaborations (quel rôle joue la mobilité dans la construction des collaborations par exemple), il est nécessaire d’étudier les processus d’interaction entre les chercheurs : cela nécessite de collecter des données originales, auprès des protagonistes eux-mêmes, c’est-à-dire les chercheurs qui sont à l’origine des publications par exemple ou les entreprises qui font circuler leurs chercheurs.

57 Plus généralement, nous plaidons pour l’articulation des méthodologies pour saisir au mieux notre objet d’étude : les analyses quantitatives (études statistiques et économétrie appliquée) permettent de dégager des régularités, et le travail sur des populations importantes permet d’obtenir des résultats généralisables ; les analyses qualitatives permettent de comprendre finement les processus décisionnels des acteurs (choix de mobilité et de collaboration) et de mieux caractériser les relations de causalité qui peuvent être à l’œuvre entre mobilité et collaboration. Quelques travaux ont avancé dans ce sens. Conscients que « understanding the way mobility pathways unfold over time requires comprehensive longitudinal and sequential data » (Woolley et Turpin [2009], p. 144), Cañibano et Bozeman [2009], Lenzi [2007] ou encore Bernela [2015] ont par exemple étudié les mobilités de chercheurs grâce à la reconstruction de trajectoires individuelles ou organisationnelles basées sur la combinaison de données du Web of Science et de données de CV. Pour mieux comprendre les articulations entre mobilité et collaborations et vérifier les relations de cause à effet qui peuvent être « devinées » via du quantitatif, des entretiens semi-directifs s’avèrent toutefois indispensables.

58 Dans une perspective dynamique, il est également important de regarder comment l’avancement dans la carrière du chercheur par exemple peut venir modifier son rôle dans les collaborations et l’intensité de sa mobilité (Bernard et al. [2021]). En sciences expérimentales par exemple, les chercheurs vont de moins en moins être impliqués dans les manipulations et vont accorder davantage de temps aux tâches d’encadrement, de « chasse » au financement, de management des contrats de recherche, de mise en réseau avec d’autres laboratoires, et à la valorisation des résultats dans les réseaux internationaux, tels des ambassadeurs. Au contraire, quand une co-localisation temporaire est nécessaire à l’utilisation d’un équipement, il semblerait que la mobilité temporaire soit très souvent faite par les chercheurs juniors. En devenant senior, le chercheur organise la mobilité des autres pour les tâches techniques et sa propre mobilité sert davantage à la diffusion des travaux de l’équipe et à la construction de nouveaux partenariats.

59 Pour saisir les tenants et les aboutissants de notre sujet, il est important de coupler les échelles d’analyse : spatiale, temporelle mais aussi d’action. En référence à l’organisation en réseau du monde de la recherche, il semble alors que les collaborations d’un chercheur puissent être autant impactées par la mobilité des autres que par sa propre mobilité.

5. Conclusion et implications

60 Les discours de politiques publiques sont aujourd’hui très normatifs en matière de mobilité des chercheurs. Ils promeuvent cette mobilité en l’attachant aux notions d’excellence, d’attractivité ou de compétitivité, de sorte qu’elle apparait valorisée en tant que telle. Or, pour atteindre de tels objectifs, la mobilité doit permettre la circulation et la production des connaissances. Il est donc important de questionner la nature même des conséquences de la mobilité des chercheurs pour identifier si et dans quelles conditions elle peut satisfaire les attentes fortes qu’on lui associe. Pour analyser le lien entre mobilité et connaissances, nous avons proposé d’introduire un terme supplémentaire, les collaborations, lesquelles permettent que les connaissances échangées grâce à la mobilité deviennent productives. La mobilité et les collaborations s’articulent selon des configurations variées, que nous avons identifiées et décrites au prisme de ce qu’elles produisent en termes de circulation et de production de connaissances. Ce que nous proposons finalement peut se résumer ainsi : on relève que dans certains cas la mobilité peut ne rien produire en termes de circulation et de production de connaissances. On relève aussi que quelquefois (certains travaux l’illustrent) mobilité et collaborations restent indépendantes, sans préjuger de leurs effets en termes d’innovation. On avance l’idée que, pour que la mobilité débouche sur la production et la circulation de connaissances, il est utile de l’articuler aux collaborations. En conséquence, des politiques publiques centrées uniquement sur la mobilité (sans prise en considération de la nécessaire articulation aux collaborations) risquent de rater leur cible. Car s’il est vrai que dans de nombreux cas, les dispositifs encourageant la mobilité conduisent de facto à des situations facilitant les collaborations (conférences nourrissant des communautés scientifiques, mobilité temporaire pour amorcer des projets, etc), cette dimension reste souvent du domaine de l’implicite et gagnerait à être explicitée comme objectif premier. Notre proposition ouvre donc des perspectives tant pour la réflexion en économie de la connaissance et en géographie de l’innovation, que pour la définition des politiques publiques.

61 Les travaux empiriques existants qui se sont penchés sur les conséquences concrètes de la mobilité des chercheurs se concentrent généralement sur une des modalités temporelles de la mobilité (permanente, temporaire, etc.) et/ou un des objectifs visés (circulation des connaissances, co-production de connaissances, autres), d’où notre proposition de fournir un travail systémique distinguant et classant les croisements possibles de ces deux entrées analytiques. Notre approche fournit en conséquence une typologie des configurations d’articulation entre mobilité des chercheurs et collaborations, à l’usage des décideurs, qu’ils soient publics ou privés, afin qu’ils puissent mesurer les impacts des différentes modalités de mobilité des chercheurs en termes d’innovation : encourager, par des dispositifs, la mobilité des chercheurs peut, selon les cas, favoriser la circulation des connaissances, la co-production de connaissances via les collaborations, ou encore d’autres objectifs non liés à l’innovation (progression de carrière des chercheurs, gestion des effectifs). Il est donc important d’y voir clair pour ne pas manquer sa cible.

62 La crise sanitaire déclenchée par l’épidémie de Covid-19 vient par ailleurs confirmer la pertinence du questionnement sur le rôle de la mobilité des chercheurs dans la production et la circulation des connaissances, à l’heure où les technologies numériques permettent en partie une continuité de l’activité scientifique. Le confinement de la plupart des chercheurs au printemps 2020, et les deuxième et troisième confinements pour les universitaires, ont de facto limité au strict minimum les pratiques de mobilité. Cela a permis par conséquent d’expérimenter à grande échelle, par le télétravail et les techniques de visio-conférences, l’ubiquité déjà analysée par Torre [2008], ainsi que de nouvelles modalités de coordination et de collaborations, dont certaines sont déjà entrées dans les usages et pourraient s’avérer irréversibles. La participation aux conférences virtuelles a considérablement augmenté dès 2020 – le nombre de participants à certaines réunions ayant doublé par rapport aux événements en personne organisés l’année précédente (Glausiusz [2021]). DeFilippis et al. [2020] ont étudié l’impact de la COVID-19 sur les habitudes de communication numérique des employés localisés dans différentes zones métropolitaines en Amérique du Nord, en Europe et au Moyen-Orient. Ils notent, par rapport aux niveaux pré-pandémiques, une augmentation du nombre de réunions par personne et du nombre de participants par réunion, mais une diminution de la durée moyenne des réunions. Collectivement, l’effet net est que les chercheurs ont passé moins de temps en réunion par jour pour une durée moyenne de la journée de travail plus longue de près d’une heure. Ces résultats marquent un changement de la nature du travail, dont on ne sait pas s’il résistera à la sortie de la pandémie mondiale.

63 Quel bilan pourra-t-on en tirer quant à la co-production et la circulation des connaissances ? Selon l’OCDE [2021], la mobilisation considérable des chercheurs dans le monde entier pour trouver des vaccins, déclenchée par l’épidémie, a été alimentée par le partage de données ouvertes récemment institutionnalisé et par des plateformes technologiques agiles donnant accès aux données épidémiologiques, cliniques et génomiques, ainsi qu’aux études connexes et publications scientifiques qui en sont issues. A défaut de mobilité des chercheurs, la communauté scientifique a donc organisé des pratiques pour bénéficier d’une circulation des connaissances. Sans nul doute, ces premiers éléments demandent à être confirmés. Mais en tout état de cause, si le bilan de ces adaptations s’avérait mauvais, il pourrait réhabiliter la mobilité des chercheurs comme pivot central de la circulation et de la co-production des connaissances ; s’il s’avérait au contraire bon, cela justifierait bien, au fond, de questionner sa nécessité impérative et le rôle affirmé que les politiques publiques tendent à lui faire jouer : a-t-on pu et pourrait-on durablement co-produire et faire circuler la connaissance avec des chercheurs moins mobiles ? Les « trouvailles » avancées provisoirement ou durablement pour faire face à l’entrave à la mobilité pourraient-elles tenir lieu de nouveau paradigme ? Cette situation inédite dans les pratiques scientifiques viendrait rappeler que l’innovation s’appuie sur l’articulation de pratiques de mobilité et de collaboration. Elle inviterait aussi à porter une attention aux nouveaux schémas de cette articulation.

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Mots-clés éditeurs : économie de la connaissance, mobilité, géographie de l’innovation, politiques publiques, collaborations

Date de mise en ligne : 16/05/2022

https://doi.org/10.3917/redp.322.0217

Notes

  • [1]
    RURALITES, Université de Poitiers, marie.ferru@univ-poitiers.fr
  • [2]
    CREG, Université Grenoble Alpes, virginie.jacquier-roux@univ-grenoble-alpes.fr
  • [3]
    CRIEF, Université de Poitiers, bastien.bernela@univ-poitiers.fr
  • [4]
  • [5]
    Dans la suite, nous utiliserons le terme plus générique de « chercheurs » afin de ne pas alourdir le texte, même si l’acception du terme n’est pas exactement la même et pourrait paraître plus restrictive. Nous nous intéressons à l’ensemble des individus dont l’activité professionnelle consiste en partie à produire de nouvelles connaissances.
  • [6]
    « Aux phases 1 et 3 du processus de collaboration correspondent des mobilités de personnes (qui concernent soit l’une soit les deux parties, selon le lieu de la réunion), alors que les phases 2 se caractérisent par l’utilisation des Tic dans un but de communication à distance qui établit une relation d’ubiquité » (Torre [2010]).
  • [7]
    Harrison [2010] résume explicitement ce à quoi renvoie le concept de connectivité actuellement : « joining up », « business hubs », « proximity, expanding existing markets ».
  • [8]
    On peut nuancer toutefois cette coïncidence en évoquant le cas où les chercheurs se déplacent pour effectuer leur travail de terrain, dans des lieux situés hors du cadre spatial des partenaires impliqués dans le projet collaboratif.

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