Notes
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[1]
Je tiens à remercier François Bourguignon, Stefan Dercon, James Foster, Jeni Klugman, Maria Emma Santos et Gaston Yalonetzky ainsi que les organisateurs et participants de la conférence EUDN 2010 pour leurs commentaires et suggestions. Je reste responsable de toutes les erreurs.
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[2]
Voir Grusky et Kanbur (2006) ; Jenkins et Micklewright (2007) ; Ravallion (1996) ; Ravallion (2010) ; Sen (1992) ; Sen (1993) ; Thorbecke (2008). Ainsi, Cappellari et Jenkins (in Jenkins et Micklewright [2007]) indiquent : « De nos jours, tout le monde admet que la pauvreté n’est pas uniquement liée au fait de ne pas avoir suffisamment d’argent » (phrase d’ouverture, p. 166).
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[3]
Dans Alkire et Foster (2011b), nous clarifions notre méthodologie de mesure ainsi que sa base dans les méthodes de pauvreté unidimensionnelle ; cet article s’appuie sur ce dernier et met en lumière des questions supplémentaires concernant l’implémentation empirique.
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[4]
Après le lancement de l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) en Juillet 2010, le blog d’Oxfam, le blog de la Banque mondiale, VOXEU, et d’autres forums sur internet ont effectué des échanges de fond sur l’IPM.
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[5]
Bien sûr, on observe aussi en parallèle une multiplication des évaluations multidimensionnelles du bien-être. Voir, par exemple, notamment Becker, Philipson et Soares (2005) ; Brighouse et Robeyns (2010), Fleurbaey (2009) ; Fleurbaey et Gaulier (2009) ; John et Klenow (2010) ; Kreitler et Kreitler (2006) ; McGillivray (2007) ; Robeyns et Van der Veen (2007) ; Stiglitz, Sen et Fitoussi (2009) entre autres.
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[6]
Sen (1987b), page 33.
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[7]
Deutsch et Silber (2005) ; Maasoumi et Lugo (2008).
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[8]
Balestrino (1998); Cerioli et Zani (1990); Cheli et Lemmi (1995); Chiappero-Martinetti (1994); Chiappero (2006); Deutsch et Silber (2005); Lelli (2001); Lemmi et Betti (2006); Qizilbash (2002).
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[9]
Kakwani et Silber (2008b) ; Krishnakumar (2004); Krishnakumar et Ballon (2008); Schokkaert et Van Ootegem (1990).
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[10]
Asselin (2009).
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[11]
Atkinson (2003); Erikson (1993); Gordon, Nandy, Pantazis, Pemberton et Townsend (2003); Nolan et Whelan (1996); Subramanian (2007).
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[12]
Bossert, D’Ambrosio et Peragine (2007); Bourguignon and Chakravarty (2002); Chakravarty (1998); Chakravarty et D’Ambrosio (2006); Chakravarty et Silber (2008); Deutsch et Silber (2005); Tsui (2002).
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[13]
Duclos, Sahn et Younger (2006).
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[14]
Ce point est discuté dans l’annexe 7 de Foster et Sen (Sen 1997), qui évoque différentes formes de mesures de la pauvreté et d’indicateurs d’autres fonctionnements.
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[15]
La nécessité de regarder au-delà des corrélations est bien connue et empiriquement importante. Pour ne donner qu’un parmi des nombreux exemples, Jones et Klenow (2010) concluent à une corrélation de 0,95 entre le PIB et leur indice de bien-être, mais ils trouvent aussi que « entre 134 pays, l’écart typique [entre les deux indices] est d’environ 46 %. »
-
[16]
Franco in Stewart et al (2004). Voir aussi Klasen (2000); Qizilbash (2002); Ruggeri-Laderchi, Saith et Stewart (2003); Ruggeri-Laderchi (1997); Ruggeri-Laderchi (2008).
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[17]
Nolan et Marx (2009). Voir aussi Balestrino (1996); Balestrino et Sciclone (2001); Brandolini et D’Alessio (1998); Chiappero-Martinetti (2000).
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[18]
S’appuyant sur cela, un indice multidimensionnel a été adopté récemment au niveau européen, qui combine le revenu avec des données de privation matérielle et de chômage pour fournir une évaluation plus précise des privations économiques. Voir par exemple http://ec.europa.eu/eu2020/pdf/115346.pdf à la page 12.
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[19]
Sen (1976). Dans ce texte, Sen centre son analyse sur l’agrégation dans la mesure où la littérature à cette époque se focalisait sur l’identification.
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[20]
Ces questions sont examinées en détail dans Alkire et Foster (2011b), cet article s’appuie sur ce dernier.
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[21]
Cette discussion fait référence à la « personne » comme unité d’analyse pour faciliter la présentation. Des mesures similaires pourraient être construites pour différentes unités d’analyse telles que les ménages ou des sous-groupes de population comme les jeunes ou les femmes, ou une institution comme l’école ou une clinique de santé.
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[22]
2003:25 ; souligné dans l’original. D’autres approches telles que les approches de « comptage » largement mises en œuvre en Europe et les approches des besoins fondamentaux non satisfaits en Amérique latine utilisent aussi cette approche (Atkinson 2003 ; Feres et Mancero 2001).
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[23]
James Foster et moi-même avons adopté une approche intermédiaire, dans laquelle une personne peut être identifiée comme pauvre au plan multidimensionnel si elle est pauvre dans une somme (pondérée) quelconque ou un « comptage » de dimensions qui peut inclure l’union, l’intersection ou des seuils intermédiaires (Alkire et Foster 2007).
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[24]
Atkinson et Bourguignon (1982) avaient déjà plaidé pour la prise en compte de ces questions.
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[25]
M0 satisfait également d’autres propriétés : principe de population (replication invariance), symétrie, orientation pauvreté, orientation privations, monotonicité faible, non-trivialité, normalisation et réarrangement faible. Ces axiomes sont des restrictions communes sur les méthodologies d’identification et d’agrégation.
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[26]
Il est important à ce niveau de faire attention à un important changement dans les termes : dans la discussion méthodologique chaque entrée dans la matrice constitue une « dimension ». Dans la description de l’IPM, la terminologie change, et chaque entrée dans la matrice est appelée « indicateur » ; le terme dimension est utilisé dans l’IPM pour refléter les catégories conceptuelles (santé) qui n’apparaissent pas dans la matrice g0 directement.
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[27]
Lorsque nous sommes en présence des dix indicateurs, les personnes identifiées comme pauvres avec k=3 sont également les mêmes qui seront désignées comme pauvres avec k=3,33.
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[28]
Cette section mentionne très brièvement certains résultats de Alkire et Santos (2010) ; pour une discussion complète le lecteur pourra se référer à cet article.
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[29]
Pour tous ces chiffres, il s’agit des données de population de 2007. Il serait aussi possible d’appliquer les données de population pour l’année au cours de laquelle l’enquête a été réalisée dans chaque pays.
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[30]
Les résultats dans ce paragraphe proviennent de Alkire, Santos, Seth et Yalonetzky (2010).
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[31]
Sur les 44 pays ayant un score IPM de 0 à 0,05, 14 changent d’au moins 10 places, ce qui implique que l’IPM n’est pas encore parfaitement adapté à des comparaisons très fines.
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[32]
Apablaza, Ocampo et Yalonetzky (2010).
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[33]
Il sera intéressant et fructueux de rattacher ce débat à la discussion, distincte mais connexe, sur le « problème de l’indexation ». voir Arneson (1990); Arrow (1973); Fleurbaey (2007); Rawls (1971); Sen (1991a) et les références citées dans ces ouvrages.
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[34]
L’incidence moyenne de la pauvreté multidimensionnelle (population-pondérée) à l’aide des données sur la population de 2007, l’approche de l’union pour l’identification et les indicateurs/ seuils/ pondérations de l’IPM à travers les 104 pays. L’incidence moyenne simple, avec tous les pays ayant les mêmes pondérations, est aussi de 58 %.
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[35]
Dans le cas du Mexique, le cadre juridique qui régit l’élaboration de la mesure nationale de la pauvreté multidimensionnelle repose sur certains principes. Par exemple, le progrès économique et le progrès social doivent s’équilibrer mutuellement, et le fait de parvenir à un certain niveau dans chaque dimension sociale doit être considéré comme un droit de la personne humaine. James Foster et moi-même avons alors développé une approche axiomatique montrant que ces principes, ainsi que les hypothèses relatives à l’exactitude des données, suffisaient à définir les pondérations pour les différentes dimensions et à identifier les individus pauvres au plan multidimensionnel. Alkire, S et Foster, JE. 2009. “Memo to Coneval.”
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[36]
Voir par exemple Dibben et al (2007), et Decanq et Lugo (à paraître).
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[37]
Bien sûr, dans d’autres applications possibles de la méthode AF, l’unité d’analyse peut être un établissement (école, établissement de santé communautaire), un quartier (zone de relevé des données), une entreprise ou une coopérative, voire un État ou un pays (pour les indicateurs de gouvernance). Cependant, dans le cadre de la pauvreté multidimensionnelle, l’unité est le plus souvent l’individu ou le ménage.
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[38]
Par exemple, lorsqu’on identifie un ménage comme ne souffrant pas de privations dès lors que l’un de ses membres compte au moins 5 années de scolarité, comme le fait l’IPM, on part du principe que l’éducation est partagée entre les membres du ménage. Or, dans certains contextes culturels ou dans certains types de ménages, cette hypothèse peut ne pas être juste.
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[39]
Lorsque tous les indicateurs pertinents ne sont pas présents dans une même étude, si c’est possible, on peut rapprocher plusieurs études afin d’obtenir des données pour le même individu ou le même ménage à partir de plusieurs enquêtes. Il est aussi envisageable de recourir à des techniques de cartographie de la pauvreté lorsque ces dernières présentent une exactitude suffisante au niveau des individus/ ménages et se prêtent à la formulation des politiques économiques.
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[40]
Par exemple, Browning (2003).
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[41]
Voir aussi Alkire et Foster (2011b).
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[42]
Comme les pondérations de l’IPM sont de 0,167 et 0,055 pour différentes dimensions, il existe des valeurs additionnelles de k auxquelles l’intensité change. Nous présentons les tranches de déciles à des fins de clarté uniquement.
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[43]
Alkire et Foster (2009a). Le dégré de précision pour ajuster le décompte en augmentant k dépend de la structure de pondération et du nombre de variables mais aussi de la distribution des privations. Il faut noter que le seuil de pauvreté k est, dans l’exemple donné, lui-même un instrument de politique économique (voir Alkire et Foster 2009a, section 8).
-
[44]
En identifiant par exemple exactement la/les privation/s dont souffrent ceux qui se trouvent dans la tranche des 30-40 % en Inde et au Kenya.
Introduction
1Nul ne conteste la multidimensionnalité de la pauvreté [2]. Pauvreté peut rimer avec mauvaise santé, éducation insuffisante, faible revenu, logement précaire, travail difficile ou non protégé, déresponsabilisation politique, insécurité alimentaire ou encore rejet des riches. Les composantes de la pauvreté évoluent en fonction des individus, des périodes et du contexte mais la pauvreté recouvre de multiples dimensions.
2Ce qui fait débat – et de plus en plus – c’est la manière de refléter cette multidimensionnalité dans les mesures de la pauvreté. [3] Le lancement d’un nouvel indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) pour 104 pays en 2010 a attiré l’attention et l’intérêt dans de nombreux pays, et provoqué de vives discussions. [4] Cet article examine comment une mesure agrégée de la pauvreté multidimensionnelle apporte un plus par rapport à un assemblage d’indicateurs de privation et de pauvreté monétaire. Ces questions prennent plus d’acuité à la fois parce que l’on dispose d’un corpus grandissant d’études sur les interrelations entre les indicateurs de désavantages, et parce que l’on a plus de possibilités de créer des mesures de la pauvreté multidimensionnelle. [5] Jamais auparavant nous n’avons disposé d’autant de données sur les aspects non monétaires de la pauvreté. Parallèlement, les méthodes de la mesure multidimensionnelle ont fait d’immense progrès au cours des quinze dernières années, ouvrant de nouvelles perspectives pour mesurer la pauvreté multidimensionnelle à l’échelle locale, nationale et internationale. Pourtant, le fait que l’on puisse construire une mesure de la pauvreté multidimensionnelle ne signifie pas que cette mesure apportera nécessairement de la valeur ajoutée. Comme le rappelle Sen : « La passion de l’agrégation est tout à fait justifiée dans de nombreux contextes, mais elle peut devenir futile ou inutile dans d’autres… Le point de vue [global] a son utilité, mais il n’en détient pas le monopole. Variété ne doit pas impérativement rimer avec agrégation des données [6] ». Nous nous proposons de voir quand, comment et pourquoi des mesures de la pauvreté multidimensionnelle peuvent présenter un intérêt supplémentaire, en posant les limites de leur contribution et en introduisant une série de problématiques en suspens.
3Pour explorer ces questions, nous présentons une approche générale de la mesure de la pauvreté multidimensionnelle – celle qui reflète une distribution commune. Nous présentons ensuite une classe de mesures de la pauvreté au sein de cette approche, à savoir une extension de la classe des mesures FGT (Foster, Greer et Thorbecke, 1984) proposée par Alkire et Foster (2007 ; 2009a). Nous présentons également une application récente de l’une des mesures au sein de cette famille : l’indice de pauvreté multidimensionnelle. Bien que nous nous focalisions sur une approche globale de la mesure de la pauvreté, il est important de reconnaître que cette classe de mesure met en œuvre un sous-ensemble d’un éventail plus large de techniques conçues pour évaluer la pauvreté multidimensionnelle ; d’autres méthodes comprennent des techniques qualitatives et participatives, tableaux de bord, profils de la pauvreté, techniques de dominance, techniques multicritères ou encore indices d’inégalité multidimensionnelle. Parmi les mesures de la pauvreté multidimensionnelle, cette analyse se cantonne donc à un champ étroit des mesures de la pauvreté multidimensionnelle et n’aborde pas d’autres mesures pertinentes et intéressantes, qui font appel à la théorie de l’information [7], à la théorie des ensembles flous [8], aux techniques des variables latentes [9], à l’analyse des correspondances multiples [10], aux approches alternatives de comptage [11], aux approches axiomatiques alternatives [12] ou à la dominance [13]. Bien que certaines approches se partagent les mêmes problématiques, le cadre imparti ici oblige à se concentrer sur une seule approche et ses implications pour la recherche. Cependant, il paraît utile de détailler cette approche particulière pour en saisir les forces et faiblesses, et mettre en avant efficacement les domaines pour de nouvelles recherches.
4Faute de quoi, les mesures multidimensionnelles de la pauvreté peuvent s’apparenter à une aimable distraction. Dans un vibrant réquisitoire contre la parcimonie qui caractérise l’économie, A.O. Hirschman (1984) a proposé de rendre le discours économique plus complexe en introduisant notamment un traitement plus adapté de l’amour. Pour lui, l’amour est mal pris en compte dans l’économie parce que ce n’est ni une ressource rare ni une compétence augmentable. Cette suggestion de Hirschman, aussi noble soit-elle, n’a pas eu de suite dans la pratique. Cette persistance de la parcimonie a sans doute de nombreuses explications, dont probablement le fait que l’on n’ait pas bien compris quand et comment une telle complexité pourrait ajouter de la valeur, ou peut-être parce que le moment n’était pas encore venu. Si la mesure de la pauvreté multidimensionnelle peut paraître plus familière aux économistes que la marotte de Hirschman, elle risque néanmoins de menacer la parcimonie légitime dès lors que sa contribution potentielle – et ses limites – ne sont pas clairement établies.
1 – La pauvreté multidimensionnelle
5Une motivation normative bien connue pour mesurer la pauvreté multidimensionnelle provient du fait que les pauvres peuvent être confrontés à de multiples privations qui ont chacune leur propre importance (Sen, 1992). L’autre motivation essentielle provient du décalage empirique entre la pauvreté mesurée dans un espace unique donné – comme le revenu – et d’autres mesures importantes uniques et multidimensionnelles, du désavantage. Si le revenu (ou toute autre mesure unidimensionnelle) était une variable indicatrice d’autres désavantages suffisant à certaines fins pratiques (cibler les populations, suivre l’évolution dans le temps ou orienter la politique) alors, la parcimonie nous inciterait à nous en contenter [14].
6Mais au plan empirique, de nombreuses études soulignent que le degré de discordance entre les principaux indicateurs sociaux et de revenu, et même entre le revenu et les principales privations matérielles, peut être considérable entre pays et entre groupes. Par exemple, Brandolini et D’Alessio (2009) utilisent les données italiennes SHIW 1995 pour six dimensions, et constatent que les coefficients de corrélation « indiquent de faibles degrés de relations », et que les classifications croisées montrent « une faible redondance [15] ». Ils soutiennent que « le passage vers la multidimensionnalité implicite provient certainement des motivations purement empirique régies par la nécessité d’enrichir l’information disponible et pallier les insuffisances des indicateurs monétaires ». De même Franco et Ruggeri-Laderchi croisent les privations en santé et en éducation à la pauvreté monétaire à l’aide des données portant sur des enfants et des adultes en Inde et au Pérou. Ils trouvent que le pourcentage de personnes qui ont une faible capacité, mais ne sont pas pauvres en termes de revenu, ou vice versa, varie de 21 % à 93 % [16].
7Mais même s’il y a des écarts entre les indicateurs individuels, il se pourrait que le revenu, étant un moyen à objectif général, soit un représentant adéquat des multiples privations. En outre, les études empiriques n’ont pas nécessairement justifié cela. Klasen (2000) montre qu’alors que les corrélations entre les dépenses et les niveaux de privation en Afrique du Sud étaient fortes de façon générale, elles étaient plus faibles pour les plus démunis et pour certains groupes de population (Africains, ruraux, familles dirigées par des femmes, etc.). Dans cette étude, 17 % des personnes identifiées comme ayant des fonctionnements démunis n’ont pas des niveaux de dépenses de pauvres. D’autres études portant sur certains groupes de population tels que les handicapés soutiennent que les mesures de la pauvreté de revenu doivent être complétées par des informations supplémentaires sur les désavantages. Dans une étude portant sur 16 pays, Mitra et al. (2010) montrent que le handicap n’est pas significativement lié à la pauvreté de la consommation dans la plupart des pays, mais est significativement lié à la pauvreté multidimensionnelle (en utilisant différentes formes fonctionnelles et des seuils pour les mesures de la pauvreté multidimensionnelle) (voir aussi Kuklys 2005, Zaidi et Burchardt 2005). Et dans le contexte européen, Nolan et Marx concluent que le caractère multidimensionnel de la pauvreté nécessite généralement plusieurs variables :
Les études nationales et internationales suggèrent toutes que le nombre d’individus qui sont dans des niveaux de privation élevés à travers un certain nombre de dimensions sont souvent dans des conditions plutôt modestes et que le faible niveau de revenu ne suffit pas à lui seul pour prédire qui vit différents types de privation : mauvaises conditions de logement, pauvreté de voisinage, mauvais état de santé et faible accès aux services de santé, faibles niveaux d’éducation sont clairement liés à de faibles niveaux de revenu, mais sont des aspects distincts de l’exclusion sociale [17].
La distribution de la pauvreté monétaire combinée et de la privation persistante variable par pays
La distribution de la pauvreté monétaire combinée et de la privation persistante variable par pays
9D’autres analyses s’intéressent aux relations entre la pauvreté monétaire et d’autres types de privation dans le temps. Par exemple, Whelan, Layte et Maître (2004) étudient la privation en actif matériel et la pauvreté monétaire à travers les cinq vagues de données de l’ECHP dans neuf pays européens, et ne trouvent aucune forte relation directe ou retardée entre eux. Le tableau 1 ci-dessus extrait de leur article montre qu’en moyenne, 70,7 % des personnes ne vivent ni dans une situation de pauvreté monétaire persistante, ni dans une situation de privation persistante, et 9,7 % des personnes sont constamment à la fois pauvres en termes monétaires et souffrent de privation. Il faut toutefois noter que les mesures ne conviennent pas pour 19,6 % de la population. Ces personnes sont soient de façon persistante monétairement pauvres, mais pas démunies matériellement (10,4 %) ou démunies matériellement de façon persistante mais pas monétairement pauvres (9,2 %). L’utilisation de l’une ou l’autre mesure toute seule reviendrait à ignorer la moitié des personnes qui souffrent de privations dans l’autre. Pour comparer les mesures de la privation persistante (18,9 %) et la pauvreté monétaire persistante (19,6 %) prises individuellement, l’on négligerait cette divergence et pourrait même supposer que les populations de référence coïncident. En outre, si chaque mesure était utilisée toute seule, l’on perdrait des informations sur quels ménages souffrent à la fois de privations pour les deux mesures et lesquels sont ainsi pour une toute seule. Ce genre d’études sur les discordances empiriques de la question des disparités entre la pauvreté monétaire et les autres formes de privations motivent la pratique maintenant bien établie de la considération des multiples dimensions de la pauvreté [18].
10Toutefois, le recours à de multiples dimensions ne nécessite pas un indice de pauvreté multidimensionnelle. La section suivante souligne les raisons pour lesquelles un indice peut apporter une valeur ajoutée. En bref, la valeur ajoutée essentielle que peut rigoureusement apporter un indice de pauvreté multidimensionnelle est qu’il véhicule de nouvelles informations non captées par une quelconque mesure unidimensionnelle sur la distribution commune des désavantages et la composition de la pauvreté chez les populations « poly-désavantagées » (multiply deprived). Il fournit également une description cohérente de l’évolution globale de la pauvreté multidimensionnelle dans le temps et dans l’espace. Affirmer cela ne revient pas à dire qu’il faut abandonner les mesures unidimensionnelles ; mais qu’il faut les compléter.
1.1 – Les approches de mesure de la pauvreté multidimensionnelle
11Comme souvent cité, Sen, dans son article de 1976 « Poverty: An Ordinal Approach to Measurement », commence par affirmer la remarque suivante :
Dans la mesure de la pauvreté deux problèmes distincts doivent être résolus : (i) comment identifier les pauvres dans la population totale ; et (ii) comment construire un indice de la pauvreté en utilisant les informations disponibles sur les pauvres [19].
13Dans la foulée de cet article, la plupart des méthodes de mesure de la pauvreté se sont largement appuyées sur deux composantes : une approche d’identification et un mécanisme d’agrégation. Dans la mesure de la pauvreté monétaire, une personne sera considérée comme pauvre si son niveau de revenu est en deçà d’un seuil de pauvreté. Tandis que l’identification d’une personne pauvre dans un espace multidimensionnel est une opération plus complexe, car elle peut impliquer l’identification des privations pour chaque dimension ainsi qu’entre les différentes dimensions [20].
14Les mesures de pauvreté, qui utilisent des données sur de multiples dimensions, peuvent être globalement distinguées selon les opérations suivantes qu’elles comprennent, et l’ordre dans lequel elles sont menées. Bien que les détails varient, grosso modo, quatre étapes peuvent être identifiées (tableau 2) :
- appliquer le (s) seuil (s) dimensionnel (s) pour déterminer si une personne souffre de privation dans une dimension [21]
- agréger à travers les dimensions
- identifier si chaque personne est pauvre sur le plan multidimensionnel
- agréger à travers les individus.
L’ordre des opérations
L’ordre des opérations
15Bourguignon et Chakravarty limitent l’expression « pauvreté multidimensionnelle » à des mesures qui utilisent des seuils pour chaque dimension ou attribut : « la question de la multidimensionnalité de la pauvreté se pose parce que les individus, les observateurs sociaux ou les décideurs veulent définir une limite de la pauvreté sur chaque attribut individuel : le revenu, la santé, l’éducation, etc. » [22]. Ainsi, les deux autres méthodes du tableau 2 peuvent être classées dans la catégorie multidimensionnelle, car elles appliquent des seuils de privation à de multiples dimensions, par contre, seule la dernière approche identifie forcément si chaque personne est pauvre au plan multidimensionnel.
16L’approche marginale (colonne 2) utilise les seuils de privation pour déterminer qui souffre de privation pour une dimension particulière. Elle agrège ensuite les informations sur une population pour générer une mesure privative pour chaque dimension. Les vecteurs des mesures de privation marginale sont ensuite agrégés. Il est important de noter que les personnes sont identifiées comme souffrant d’une privation ou non pour chaque dimension individuelle. Par contre, la mesure n’identifie pas si les personnes sont pauvres ou non au plan « multidimensionnel ». Elle ne reflète pas non plus la distribution commune de privations. Nous considérons ces indices comme marginaux (Alkire et Foster 2011b ; voir aussi Anand et Sen 1997 ; Atkinson 2003 ; Jenkins et Micklewright 2007).
17Les indices marginaux étant insensibles à la privation commune, ils ne nécessitent pas que toutes les variables proviennent de la même enquête. En outre, ils peuvent directement agréger des privations qui se rapportent à des populations de référence différentes – comme les enfants et les adultes, ou des populations rurales et urbaines. Ils peuvent aussi rassembler des privations qui se produisent avec différentes fréquences ou différents ordres de grandeur dans la population. Par exemple, une mesure marginale pourrait combiner un indicateur sur le pourcentage de personnes vivant dans des ménages sans accès aux sanitaires (nous supposons que c’est un événement relativement fréquent avec les données disponibles pour tous les ménages), avec un indicateur sur la mortalité maternelle pour 100 000 femmes, et un indicateur sur la malnutrition des enfants de moins de trois ans. Considérons encore un homme dont la maison est munie de sanitaires, mais dont la femme a péri en cours d’accouchement et dont le jeune enfant est malnutri. Est-il pauvre ? Les mesures marginales n’identifient pas chaque personne dans la société comme étant pauvre ou non-pauvre au plan multidimensionnel. Elles ne peuvent donc pas répondre à cette question. Elles ne satisfont donc pas aux critères d’identification de Sen (1976), qui imposent que l’identification précise si chaque personne dans la population est pauvre ou non-pauvre.
18La troisième colonne ci-dessus donne l’ordre général d’agrégation des mesures de la pauvreté multidimensionnelle qui reflètent une distribution commune. Comme les exemples empiriques de la section précédente l’ont montré, dans de nombreuses situations, l’information concernant les privations simultanées peut apporter une valeur ajoutée indépendante à l’évaluation globale de la pauvreté. Les mesures reflétant la distribution commune appliquent d’abord un ensemble de seuils de privation afin d’identifier les dimensions pour lesquelles la personne souffre de privation. Ces mesures déterminent ensuite si chaque personne est pauvre au plan multidimensionnel.
19Par exemple, une personne sera considérée pauvre au plan multidimensionnel par l’approche unioniste dès lors qu’elle souffre de privation dans une quelconque dimension (Atkinson 2003 ; voir aussi Duclos, Sahn et Younger 2006). Une personne sera identifiée comme pauvre au plan multidimensionnel par l’approche d’intersection si et seulement si elle subit des privations dans toutes les dimensions. Dans ces deux cas, l’identification se fait en considérant le vecteur de privations, mais une agrégation entre les dimensions n’est pas exigée. Des méthodes d’identification alternatives - telles que notre approche de seuil double [23] - peuvent exiger une agrégation entre les dimensions. La mesure de la pauvreté multidimensionnelle agrège à travers les personnes pour construire une mesure globale de la pauvreté multidimensionnelle pour la société.
20Il est important de souligner que l’approche commune toute seule identifie les personnes comme étant pauvres au plan multidimensionnel sur la base de leurs privations communes ou simultanées. Cette méthode exige que toutes les données soient disponibles pour chaque personne, ce qui signifie généralement que les données doivent provenir de la même enquête de ménages. Cette méthode nécessite également une unité d’analyse commune. Si l’unité d’analyse est la personne, chaque personne sera identifiée comme pauvre en fonction de ses propres privations directes. Mais les privations au niveau des ménages, ou les privations qui affectent les autres membres de la famille ou d’autres populations de référence peuvent aussi (ou ne pas) leur être appliquées de sorte à affecter l’identification.
21Ces distinctions entre ces approches générales de la mesure de la pauvreté multidimensionnelle sont essentielles et sont souvent négligées, ce qui crée une confusion considérable. Le reste de cet article se concentre sur les mesures multidimensionnelles qui reflètent la distribution commune des désavantages, dans le but de mieux explorer leurs caractéristiques et valeurs ajoutées.
22Le rapport de la Commission sur la mesure des performances économiques et du progrès social (2009) a bien souligné la pertinence d’une approche permettant de comprendre les interrelations entre les privations multiples. Ce rapport note que « certaines des questions concrètes les plus importantes sont liées à la manière dont les évolutions dans un domaine (par exemple l’éducation) affectent les évolutions dans d’autres domaines (par exemple l’état de santé, la représentation politique et les liens sociaux) et la manière dont les évolutions dans tous les domaines sont liées à celle du revenu ». Le rapport souligne également l’intérêt spécifique de la distribution commune pour étudier les désavantages : « Ainsi la dégradation de la qualité de la vie due à la fois à la pauvreté et à la maladie dépasse largement la somme des deux effets séparés, avec pour conséquence que les pouvoirs publics doivent cibler leurs interventions plus spécifiquement sur les populations qui cumulent ces désavantages » (Stiglitz et al 2009: p. 55). La conclusion a des implications à la fois pour la conception des enquêtes et pour l’approche des mesures : « la mise en œuvre des mesures de ces effets cumulés impose de collecter des informations sur la « distribution commune » des aspects les plus remarquables de la qualité de la vie auprès de toute la population d’un pays au moyen d’enquêtes spécifiques [24] ».
23Les prochaines sections vont permettre d’illustrer les étapes d’identification et d’agrégation d’une mesure multidimensionnelle qui reflète la distribution commune, en commençant par l’indice le plus élémentaire et le plus facilement applicable, M0, tiré de la classe M? introduite dans Alkire et Foster (2007, 2011a).
1.2 – Une mesure de la pauvreté multidimensionnelle : l’indice M0
24Cette section présente de manière succincte la classe de mesure M? d’Alkire-Foster (AF) tirée de l’indice FGT. Nous décrivons notre approche générale de mesure comme suit :
25Une méthodologie M pour mesurer la pauvreté multidimensionnelle comporte une méthode d’identification et une mesure agrégée (Sen, 1976). En suivant Bourguignon et Chakravarty (2003) nous représentons la première en utilisant une fonction d’identification ?: , qui part du vecteur de réalisation d’une personne i et du vecteur de seuil z dans pour arriver à une variable indicateur de telle sorte que ?(yi; z)=1 si la personne i est pauvre et ?(yi; z)=0 si la personne i n’est pas pauvre. En appliquant ? à chaque vecteur de réalisation individuelle dans y, on obtient l’ensemble Z?{1,…,n} de personnes qui sont pauvres dans y, z étant donné. L’étape d’agrégation considère alors ? comme donné et associe à la matrice y et au vecteur de seuil z un niveau général M(y, z) de pauvreté multidimensionnelle. La relation fonctionnelle qui en résulte est qualifiée d’indice, ou de mesure, de la pauvreté multidimensionnelle. Une méthodologie est alors fournie par M = (?, M). (Alkire et Foster, 2011a: p. 477).
26Considérons la pauvreté en d dimensions sur une population de n individus. Soit y = [yij] la matrice des réalisations n × d pour des personnes i sur j dimensions, où yij ? 0 est la réalisation de l’individu i sur toutes les j dimensions. Chaque vecteur de ligne yi = (yi1, yi2, …, yid) donne les réalisations de l’individu i dans chaque dimension, alors que chaque vecteur de colonne yj = (y1j, y2j, …, ynj) donne la distribution des réalisations dans la dimension j entre les individus. Pour pondérer les dimensions, il faut définir un vecteur de pondération ? dont le jème élément ?j représente la pondération appliquée à la dimension j. Nous établissons , à savoir la somme des pondérations dimensionnelles par rapport au nombre total de dimensions.
27La méthode de mesure M0 peut être résumée en trois étapes. Soient zj > 0 le seuil de privations pour la dimension j et z le vecteur des seuils de privations. Définissons , une matrice des privations dont l’élément type est défini par quand yij < zj et quand yij ? zj. Nous construisons à partir de la matrice g0 un vecteur colonne c de l’intensité des privations, où la ième entrée représente la somme des entrées dans une ligne donnée et les privations pondérées subies par une personne i.
28L’étape suivante consiste à identifier les personnes qui sont pauvres au plan multidimensionnel. Prenons un seuil de pauvreté k tel que 0 < k ? d et appliquons-le à ce vecteur colonne c. Une personne est identifiée comme pauvre si ses privations pondérées valent c ? k. On peut qualifier cette méthode de « méthode d’identification de seuil double », parce qu’elle utilise des seuils de privations zj pour savoir si une personne subit ou non des privations dans chaque dimension, et le seuil de pauvreté k pour décider qui peut être considéré comme pauvre au plan multidimensionnel.
29Construisons une seconde matrice g0 (k), obtenue à partir de g0 en remplaçant toujours sa ième ligne par un vecteur de zéros lorsque c ? k. Cette matrice contient les privations pondérées des seules personnes qui ont été identifiées comme pauvres et exclut les privations des non-pauvres. M0 est la moyenne de la matrice g0 (k). Ainsi, , où ? représente l’opérateur de la moyenne arithmétique.
30M0 peut aussi être exprimé comme le produit du taux d’incidence de la pauvreté (multidimensionnelle) (H) par la quote-part moyenne de privations des pauvres (A). H correspond simplement à la proportion de personnes pauvres, ou bien q/n où q est le nombre de personnes pauvres. A est la moyenne de la fraction d’intensité de privations chez les pauvres - - et représente l’intensité de la pauvreté multidimensionnelle.
31M0 satisfait au critère de monotonicité dimensionnelle : si une personne pauvre subit une privation dans une dimension supplémentaire, alors M0 augmente. M0 peut aussi se décomposer en sous-groupes de la population. En outre, après l’étape d’identification, M0 peut être ventilé par dimension. L’intuition de M0 – à savoir le produit du taux d’incidence de la pauvreté (H) et de son intensité (A) – avec ces trois propriétés en particulier permet de décomposer M0 de différentes manières pour multiplier les approches en question, comme le montre en détail la section suivante [25].
32Lorsque les données sont sous forme cardinale, et satisfont à des hypothèses supplémentaires, nous identifions d’autres mesures au sein de la famille M? qui peuvent être calculées pour refléter la profondeur et la gravité de la pauvreté multidimensionnelle. Elles remplacent la matrice binaire g0 par une matrice des écarts normalisés élevés à un réel positif a. Il suffit alors d’appliquer la fonction d’identification, de censurer les privations des non-pauvres et de prendre la moyenne des matrices respectives pour produire d’autres mesures.
1.3 – La décomposition de M0
33Une caractéristique pertinente de la méthodologie AF est que M0 (et d’autres mesures de cette classe) peut être décomposé directement en plusieurs indices importants, ce qui précise l’étendue et la composition de la pauvreté d’une manière cohérente. Ce « tableau de bord » des mesures internes cohérentes fournit un compte rendu plus complet de l’information résumée dans la mesure de la pauvreté globale. Les principaux indices partiels et intuitifs de M0 sont l’incidence de la pauvreté multidimensionnelle (H) et la mesure de l’intensité (A). M0 peut aussi être décomposé à travers la dimension, pour générer des incidences de pauvreté censurées pour chaque dimension, et les contributions dimensionnelles de la pauvreté. M0, H et A peuvent être décomposés par sous-groupes de population tels que les régions ou groupes ethniques. L’intensité (A) peut être décomposée par niveaux de sorte à déterminer les plus pauvres et les moins pauvres. Ces indicateurs sont utilisés aux côtés de la mesure agrégée pour fournir une profondeur à la compréhension et un aperçu de politique économique qu’on ne peut pas cerner seulement à l’aide de la mesure globale. Tous ces nombres sont issus de la matrice censurée g0 (k), et sont brièvement présentés ci-dessous.
34Les indices partiels
351) L’incidence de la pauvreté (H) : Le pourcentage de personnes qui sont identifiées comme pauvres au plan multidimensionnel. Au plan multidimensionnel comme au plan unidimensionnel, l’incidence de la pauvreté est beaucoup utilisée, intuitive et facile à communiquer. Elle peut être directement comparée au taux de pauvreté monétaire ou à l’incidence des privations dans un autre indicateur. Son évolution peut aussi être comparée au cours du temps.
362) L’intensité (A) : Le pourcentage des dimensions pondérées dans lesquelles la personne pauvre moyenne subit des privations. L’intensité reflète l’étendue des privations simultanées que les pauvres subissent. Sa limite inférieure est le pourcentage k/d - le seuil de pauvreté exprimé en pourcentage du nombre total des dimensions juste en dessous du seuil de pauvreté - et sa limite supérieure est de 100 %.
37La décomposition par dimension (post-identification)
383) L’incidence dimensionnelle censurée de la pauvreté Hj. : la moyenne de chaque colonne de la matrice censurée fournit le pourcentage des personnes qui sont à la fois pauvres au plan multidimensionnel et souffrent de privations dans chaque dimension.
394) La contribution en pourcentage de chaque dimension de la pauvreté multidimensionnelle. L’intensité A peut être décomposée selon la dimension pour fournir le pourcentage que chaque dimension (pondérée) contribue à la pauvreté. Cela est similaire à la propriété de décomposabilité de facteur (Chakravarty et al. 1998), mais utilise la matrice censurée g0(k).
40La décomposition par sous-groupe :
415) On peut décomposer les indices M0, H, et A par sous-groupes de population, pour montrer comment chacun de ces indices varie selon la région, selon l’origine ethnique, les milieux ruraux et urbains, ou autres sous-groupes pour lesquels l’échantillon est représentatif. Ces indices pourraient être, par exemple, utilisés pour construire des cartes de pauvreté.
42Décomposition selon l’intensité
436) L’intensité (A) est construite comme la moyenne des décomptes ci des privations de chaque personne ou ménage (avec les pondérations d’échantillonnage appropriées appliquées). La moyenne cache l’inégalité dans les intensités entre les personnes. Ainsi, l’intensité peut être décomposée en différents groupes pour fournir le pourcentage des personnes pauvres qui vivent différents niveaux d’intensité ou pour distinguer les plus pauvres parmi les pauvres.
44Les indices liés (à partir de g0 plutôt qu’à partir de la matrice g0(k))
457) L’incidence dimensionnelle brute de la pauvreté censurée. De la matrice brute g0 la moyenne du vecteur colonne fournit les incidences « brutes » des personnes qui sont démunies - qu’elles soient pauvres au plan multidimensionnel ou non. Cela peut être comparé à l’incidence censurée de la pauvreté afin de déterminer, par exemple, quelles sont les privations les plus fréquentes chez les non-pauvres, ou le pourcentage de personnes démunies qui sont pauvres sur le plan multidimensionnel. Cela peut aussi être utile pour l’établissement des priorités en termes de prestation de services et pour trancher entre les mécanismes de prestation universelle de services et ceux ciblés.
2 – Une application particulière de la mesure M0 : l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM)
46En 2010, le bureau du rapport sur le développement humain du PNUD et l’Oxford Poverty and Human Development Initiative (OPHI) ont publié un indice de pauvreté multidimensionnelle très précis, couvrant 104 pays en développement (Alkire et Santos, 2010). Cette section décrit la structure de cet IPM et fournit certains de ses résultats clés.
2.1 – Paramètres
47L’IPM produit des mesures de la pauvreté multidimensionnelle en analysant des données largement accessibles. Il s’appuie notamment sur les enquêtes « Demographic and Health Surveys (DHS) » pour 48 pays, sur les « Multiple Indicator Cluster Surveys (MICS) » pour 35 pays, et sur les « World Health Survey (WHS) » pour 19 pays. Des enquêtes distinctes sont utilisées pour le Mexique et les zones urbaines d’Argentine. Toutes les enquêtes utilisées ont été effectuées entre 2000 et 2008. Les questions pour chaque pays ont été tirées de la même enquête auprès des ménages pour chaque pays considéré.
48L’IPM met en œuvre la première mesure de l’approche du seuil double de Alkire et Foster (2007) présentée ci-dessus : M0. Cette méthodologie a été retenue parce qu’elle peut servir pour des données ordinales voire catégorielles. Elle s’appuie sur les mesures FGT de la pauvreté monétaire, est facile à comprendre, est de construction intuitive et satisfait à un nombre intéressant d’axiomes. Ainsi, en termes de politique économique pertinente, la mesure qui en découle peut être décomposée en groupes de population et ventilée par facteurs afin de faire apparaître la composition de la pauvreté. Elle peut ce faisant décrire comment l’étendue et la composition de la pauvreté multidimensionnelle varient d’un État ou d’une communauté ethnique à l’autre et dans le temps.
49L’IPM est construit à l’aide de dix indicateurs couvrant trois dimensions. [26] Ces trois dimensions sont la santé, l’éducation et le niveau de vie. Les dix indicateurs sont : pour la santé : la nutrition (mesures anthropométriques) et la mortalité infantile ; pour l’éducation : le nombre d’années d’éducation et le taux de scolarisation ; pour le niveau de vie : l’électricité, l’eau, les sanitaires, les combustibles de cuisine, le revêtement du sol, et la détention d’actifs. Chaque dimension a une pondération d’un tiers. Chaque indicateur au sein d’une dimension a également une pondération égale aux autres. Les indicateurs pour la santé et l’éducation sont ainsi pondérés d’un sixième chacun, et ceux du niveau de vie d’un dix-huitième.
50Les seuils de privation : L’IPM identifie d’abord les personnes subissant des privations dans chacun des dix indicateurs. Les indicateurs, les seuils et les pondérations sont résumés dans le tableau ci-dessous. Il est important de noter à ce niveau que l’unité d’analyse est la personne. Pour les indicateurs de niveau de vie, une personne souffre de privation si le ménage auquel elle appartient souffre de privation pour ces indicateurs particuliers. Par contre, pour les indicateurs de santé et d’éducation, les privations d’une personne dépendent des privations des autres membres du ménage. Nous reviendrons sur cette question et lancerons un appel pour des recherches futures sur cette combinaison de données au niveau individuel et familial.
Dimensions, indicateurs, seuils et pondérations de l’IPM
Dimensions, indicateurs, seuils et pondérations de l’IPM
51Le seuil de pauvreté : Une fois les personnes souffrant de privations identifiées dans chacun des indicateurs, l’étape suivante consiste à déterminer qui est pauvre au plan multidimensionnel. Ce second seuil appelé « seuil de pauvreté » k, est calculé sur la somme pondérée des privations d’une personne. Dans le cas de l’IPM, les personnes sont identifiées comme pauvres au plan multidimensionnel si et seulement si elles souffrent de privations dans au moins un tiers des indicateurs pondérés. [27] Ainsi, une personne est pauvre si elle souffre de privations dans n’importe lequel des deux indicateurs de santé ou d’éducation, dans tous les six indicateurs pour le niveau de vie, ou dans trois indicateurs pour le niveau de vie et un indicateur pour la santé ou l’éducation.
52Dès que le seuil de pauvreté k exige une privation dans plus d’un seul indicateur, il y aura des personnes qui, malgré de réelles privations, ne seront pas considérées comme pauvres au plan multidimensionnel, tout simplement parce que le total des privations pondérées est inférieur au seuil de pauvreté k. Une personne peut cuisiner avec du bois, mais avoir une cuisine séparée et un système de ventilation, ce critère n’indiquera pas de pauvreté dans ce cas. Une personne non éduquée peut néanmoins devenir millionnaire à la force du poignet et jouir d’une excellente santé. Il ne faut pas non plus négliger l’imprécision des données ou l’inadéquation des indicateurs par rapport au contexte, qui peuvent créer des privations qui n’existent pas. Sous certains climats et cultures, un sol naturel ne sera pas le signe d’une privation, par exemple. Finalement, dans certains cas, des personnes peuvent volontairement s’abstenir de certaines dimensions : c’est le cas, par exemple, de ceux qui auront une masse corporelle faible à cause du jeûne.
53Dans la méthodologie AF, ces privations sont censurées puisqu’elles correspondent à des personnes qui ne sont pas pauvres au plan multidimensionnel. Leurs valeurs sont remplacées par des zéros dans la matrice g0(k) (qui diffère de la matrice g0 précisément parce qu’elle censure ces privations). Les analyses qui suivent ne sont pas toutes basées sur les données brutes originales (qui apparaîtraient dans un profil de pauvreté ou un tableau de bord par exemple et qui sont contenues dans la matrice g0) mais plutôt sur les seules privations des personnes pauvres au plan multidimensionnel. Cette censure des privations des personnes non pauvres est une étape nouvelle, donc facilement oubliée. Elle a pourtant une influence, parfois considérable, sur l’analyse qui suit.
54L’IPM – comme la mesure plus générale M0 – correspond à la moyenne de la matrice censurée des privations pondérées. Il peut être calculé de manière équivalente comme le produit du taux d’incidence de la pauvreté – le pourcentage de personnes pauvres au plan multidimensionnel – et de l’intensité ou de la proportion moyenne de privations pondérées qu’une personne pauvre subit. Ainsi, si une personne souffre de privations en termes de nutrition, d’années de scolarité et de trois indicateurs pour le niveau de vie, alors son indicateur est de 50 % (1/6 + 1/6 + 3/18). Si – en moyenne – chaque personne d’un pays souffre d’une privation dans 50 % des indicateurs pondérés et si 40 % de la population est pauvre dans ce pays, alors l’IPM pour ce pays est égal à 0,20.
Contraintes de données
55Les indicateurs, qui pourraient être comparés avec les séries de données DHS, MICS et WHS présentent des limites à plusieurs égards, qui sont une contrainte majeure pour l’IPM. Alkire et Santos (2010) fournissent une description détaillée de ces limites, qui comprennent l’utilisation des enquêtes ne couvrant pas les mêmes années, le fait que tous les indicateurs ne soient pas disponibles pour tous les pays, certains ménages ne disposant pas de populations éligibles et certains sous-groupes étant systématiquement exclus de l’enquête ménage. Ces limites de données affectent la précision nationale ainsi que la comparabilité entre pays. Les valeurs de l’IPM ne peuvent pas permettre de comparer de manière définitive l’extrême pauvreté dans les 104 pays, puisqu’elles concernent des années différentes, n’ont pas toutes les mêmes définitions pour certaines variables et que, dans certains pays, des indicateurs font défaut. L’étude parvient néanmoins à :
- offrir une base de référence plus complète et plus précise pour évaluer l’extrême pauvreté multidimensionnelle qui reflète les privations communes, ce qui ne serait pas possible avec une analyse théorique fondée sur les mêmes indicateurs ;
- fournir une estimation de l’extrême pauvreté multidimensionnelle dans chacun des 104 pays à partir des informations disponibles sur trois dimensions fondamentales du développement humain ;
- démontrer l’intérêt de la méthodologie AF pour mesurer la pauvreté multidimensionnelle, qui peut être adaptée à des cadres nationaux et régionaux aux objectifs différents ou disposant de données plus nombreuses et de meilleure qualité.
2.2 – Quelques résultats de l’IPM en termes d’illustration [28]
56Conformément aux résultats de l’IPM, environ 1,7 milliard d’êtres humains dans les 104 pays couverts – soit 32 % de la population – sont pauvres. [29] L’objectif étant de compléter les mesures de la pauvreté monétaire avec une mesure directe des privations, Alkire et Santos (2010) comparent l’incidence calculée par l’IPM à l’incidence de la pauvreté monétaire dans les pays qui disposent de données pour les deux mesures (92 des 104 pays) et établissent que le seuil se situe entre 1,25 et 2 USD par jour. Dans tous les pays considérés, les estimations indiquent que 25 % de la population vivent avec 1,25 USD par jour ou moins et 48 % avec moins de 2 USD par jour. Si nous passons à l’échelle nationale, nous observons une relation générale claire entre le revenu et la pauvreté multidimensionnelle, mais des différences profondes pour certains pays. L’IPM capte directement les privations – en termes de santé et d’éducation ou de services essentiels comme l’eau, l’assainissement et l’électricité – de sorte que les décalages avec d’autres travaux ne soient pas vraiment surprenants. Dans une certaine mesure, les valeurs de l’IPM et du revenu différeront aussi en fonction des années d’enquête, sans oublier les erreurs de mesure et l’inexactitude des données. Une analyse plus approfondie s’impose pour mieux comprendre ces différences et les complémentarités potentielles.
57En termes de distribution régionale de l’extrême pauvreté multidimensionnelle, nous trouvons que 51 % des pauvres dans le monde tels que mesurés par l’IPM vivent en Asie du Sud (844 millions de personnes) et 28 % en Afrique (458 millions). En Afrique subsaharienne, 64,5 % des personnes sont pauvres selon les termes de l’IPM, contre 55 % en Asie du Sud. L’Afrique subsaharienne et l’Asie du Sud détiennent aussi le palmarès en termes d’intensité de la pauvreté – le nombre moyen de privations subies par chaque ménage. La pauvreté multidimensionnelle sur ces deux continents est inquiétante à la fois par rapport au nombre de personnes souffrant de multiples privations et par rapport à l’intensité de leur pauvreté.
58L’IPM est le produit de l’incidence de la pauvreté (H) et de l’intensité de la pauvreté (A). L’étude compare donc ces indices partiels dans les 104 pays concernés et observe une relation troublante : les pays ayant une plus forte incidence de la pauvreté multidimensionnelle tendent à avoir une intensité moyenne supérieure. Les décompositions font apparaître de profondes divergences dans l’IPM des sous-groupes de population – une conclusion qui a stimulé les décompositions des valeurs de l’IPM de 50 pays et les analyses des disparités spatiales qui émergent.
59L’étude ventile aussi l’IPM en fonction des indicateurs. Il s’agit d’une décomposition postérieure à l’identification, de sorte que les résultats excluent encore les privations subies par les personnes non identifiées comme pauvres. Cette décomposition révèle la structure de la pauvreté chez les populations pauvres. Ainsi dans l’ethnie Kikuyu du Kenya, les privations en termes de mortalité infantile et de malnutrition (les deux indicateurs pour la santé) contribuent le plus à la pauvreté. Pour le groupe ethnique des Embu, ce sont les privations en termes d’électricité, de toilettes et de combustibles de cuisine qui contribuent le plus à la pauvreté. La décomposition de la pauvreté en Inde et en Bolivie révèle également des différences intéressantes entre ethnies, castes et groupes religieux.
60L’IPM est-il robuste par rapport à un éventail de pondérations ? [30] En premier lieu, Alkire et Santos (2010) estiment l’IPM à l’aide de trois structures de pondération supplémentaires : (i) une pondération de 50 % pour la santé et une pondération de 25 % pour l’éducation et pour le niveau de vie ; (ii) une pondération de 50 % pour l’éducation et une pondération de 25 % pour la santé et pour le niveau de vie ; et (iii) une pondération de 50 % pour le niveau de vie et une pondération de 25 % pour la santé et pour l’éducation. Les comparaisons par paires de pays montrent que 88 % des classements sont robustes pour toutes les structures de pondération. Ils trouvent aussi que les coefficients de corrélation tau-b de Kendal entre les classements de l’IPM et chacune des trois nouvelles méthodes sont supérieurs à 0,90. Alkire, Santos, Seth et Yalonetzky estiment la concordance entre les quatre classements à l’aide de plusieurs méthodes. La concordance est forte (0,975 et plus) et l’hypothèse nulle d’indépendance des rangs dans les quatre classements est rejetée par le test de Friedman à un seuil de confiance de 99 %. Parmi les 60 pays dont les scores IPM vont de 0,05 à 0,64, seuls cinq affichent un changement de rangs supérieur ou égal à dix places. [31] Ce qui nous conduit à conclure que les classements de pays selon l’IPM sont raisonnablement robustes aux pondérations.
61Des analyses sont aussi en cours pour étudier l’évolution de l’IPM dans le temps pour un certain nombre de pays. Ainsi au Bangladesh, 68 % des personnes étaient considérées comme pauvres au plan multidimensionnel en 2004. En 2007, ce taux est retombé à 58 %. Si des progrès ont été faits pour certains indicateurs, c’est l’amélioration de la scolarisation des enfants qui est l’aspect le plus frappant de la réduction de la pauvreté dans ce pays. En Éthiopie, à l’inverse, la pauvreté a reculé grâce aux progrès accomplis en termes de nutrition et d’accès à l’eau. Quant au Ghana, il a amélioré plusieurs indicateurs en même temps. [32]
2.3 – Opérationnalité de l’IPM
62L’IPM est une mesure internationale de référence très simple de la pauvreté multidimensionnelle qui est parfaitement opérationnelle. Elle est fortement contrainte par les données, mais elle met en œuvre une méthodologie identifiable, effectue des tests de robustesse et appelle des améliorations.
63Dans Grusky et Kanbur (2006), Bourguignon avance que « la principale difficulté dans le domaine de l’analyse de la pauvreté ne fait aucun doute : il s’agit de construire un ensemble d’instruments, à commencer par une définition satisfaisante de la pauvreté, susceptible de répondre en partie ou à toutes les critiques du paradigme [de la pauvreté monétaire] décrit précédemment tout en conservant au moins en partie son ‘opérationnalité’. L’analyse économique actuelle de la pauvreté ne remplit visiblement pas cet objectif… Le paradigme de la pauvreté monétaire sert actuellement souvent dans des situations appelant des définitions alternatives de la pauvreté, en particulier parce que les instruments pour gérer ces définitions ne sont pas disponibles. Le défi consiste à créer ces instruments plutôt que d’essayer de rendre le paradigme initial artificiellement adapté à une base conceptuelle différente » (pp. 78-79). Par essence, la revendication la plus claire de l’IPM est qu’il s’agit d’un instrument opérationnel, dont les forces et les limites ont été clairement exposées et qui peut donc être développé plus avant et renforcé à terme. Dans la suite de cet article, nous allons nous efforcer d’identifier d’autres problématiques et de susciter ce faisant les recherches qui permettront d’avancer.
3 – Travaux a venir : thèmes de recherche et débats
64Ce qui précède résume l’IPM et la méthodologie qui le sous-tend. L’IPM est l’une des applications possibles de M0, qui est lui-même l’une des mesures de la famille M? de Alkire-Foster (AF). La classe M? constitue elle-même l’une des approches possibles de la mesure de la pauvreté multidimensionnelle telle que nous la définissons ici. L’IPM a été étudié et critiqué. Il pourrait donc être utile de regrouper les « critiques » en quelques grandes catégories. Nombre de problèmes évoqués à propos de l’IPM se retrouveraient avec n’importe quelle mesure de la pauvreté multidimensionnelle, qui commencerait par agréger les données par dimension et refléterait les privations communes que subissent les pauvres (par exemple, Bourguignon et Chakravarty, 2003, Bossert et al. 2007) ou un taux d’incidence. Ces problèmes portent sur des points méthodologiques (agrégation, pondérations et seuils), sur des difficultés relatives aux données (est-il possible d’obtenir des données suffisamment précises sur les dimensions observées à partir d’une seule enquête ?), sur des aspects politiques (actualisation et manipulation) et sur des points économiques (en particulier le lien entre les mesures de la pauvreté multidimensionnelle et l’économie du bien-être). Certains de ces problèmes sont directement liés à la méthodologie AF, comme sa neutralité vis-à-vis de la compensation entre dimensions ou l’axiome de ciblage. D’autres se rapportent à la mise en œuvre de la méthodologie AF dans l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM).
65Cette dernière section revient sur chacun de ces quatre types de problèmes (les pondérations, l’unité d’analyse, les données et l’agrégation en un indice unique). Ces problèmes sont de deux ordres : il peut s’agir, premièrement, de « critiques » qui ont été formulées et, deuxièmement, de thèmes de recherche à venir et d’innovation. J’aborde la plupart de ces problèmes sous l’angle de l’IPM et de la méthodologie M0 ; cependant, nombre de ces questions trouveraient des réponses différentes si l’on avait retenu une autre approche de la mesure. Jusqu’ici le débat a négligé certaines questions relevant de ces catégories, mais qui peuvent revêtir une importance égale, voire supérieure, à celles déjà exposées, c’est pourquoi je prends la liberté de les proposer également.
3.1 – Pauvreté multidimensionnelle et distribution commune : généralités
66Comme nous l’avons indiqué plus haut, les mesures de la pauvreté qui reflètent la distribution commune des privations pour une personne ou un ménage agrègent des informations [pondérées] relatives aux privations sur toutes les dimensions pour chaque individu. Elles identifient les personnes pauvres au plan multidimensionnel sur cette base et ensuite agrègent à travers les personnes pauvres afin d’établir une mesure de la pauvreté. Cette section repère les domaines sur lesquels il convient de poursuivre les travaux, aussi bien concernant les méthodologies généralistes que leur mise en œuvre pratique.
Les pondérations
67Peu après la publication de l’IPM, Martin Ravallion (2010) a mis en évidence, entre autres, la question de la robustesse de l’IPM à un éventail possible de pondérations, ainsi qu’à l’espace au sein duquel les pondérations ont été définies. [33] Rappelons que l’IPM pondère l’incidence des privations ; la santé, le niveau d’instruction et le niveau de vie reçoivent la même pondération, et les pondérations interviennent dans une forme linéaire.
68Amartya Sen – comme d’autres – constate qu’il faut fixer des pondérations dans les mesures multidimensionnelles et que celles-ci doivent être considérées comme un avantage et non comme un inconvénient : « Il est tout à fait utile… d’avoir des échanges ouverts sur le type de pondérations susceptibles d’être employées » (Sen, 1997). Après tout, tout budget national fixe implicitement des pondérations pour de multiples dimensions du bien-être, sans pour autant en discuter ouvertement. Les pondérations utilisées pour l’IPM sont explicites : les pondérations sont égales pour chaque dimension et pour chaque indicateur dans chaque dimension. Pourtant, étant donné la diversité normale des valeurs humaines, Sen affirme aussi qu’il n’est pas forcément impératif de se mettre d’accord sur un ensemble déterminé de pondérations : idéalement, les mesures devront être robustes par rapport à un éventail de pondérations. Toutefois, il est pertinent de se demander pourquoi les pondérations sont nécessaires, et en particulier de noter que, en l’absence de pondérations, dans de nombreuses situations, il ne sera pas possible d’identifier un groupe plausible de personnes qui sont pauvres au plan multidimensionnel. Dans cette section nous décrivons la raison pour laquelle les pondérations sont nécessaires - tant au plan méthodologique qu’empirique - et nous résumerons ensuite les résultats de la robustesse de l’IPM, puis nous identifierons les enjeux pour la recherche.
69Les pondérations peuvent être introduites à l’étape d’identification et/ou à celle d’agrégation ; dans leur méthodologie, Alkire et Foster les introduisent à chacune de ces deux étapes. Il faut toutefois noter que si les approches d’union ou d’intersection sont utilisées, aucune pondération particulière sur les dimensions n’est exigée pour identifier qui est pauvre. Pour rappel, l’approche d’union identifie une personne comme pauvre si cette dernière souffre de privations dans une quelconque dimension. Celle d’intersection exige qu’une personne souffre de privations dans toutes les dimensions pour qu’elle soit considérée comme pauvre au plan multidimensionnel. L’intérêt des approches d’union et d’intersection est la simplicité : aucune de ces approches n’exige la fixation des pondérations spécifiques entre les dimensions. Il faut toutefois noter que ces deux approches imposent une pondération non nulle sur chaque dimension. En effet, la sélection des dimensions et des seuils joue un rôle très important dans l’obtention des résultats, mais les pondérations ne sont pas exigées. Pourquoi la méthodologie AF introduit-elle alors une approche différente?
70L’une des principales raisons pour développer une approche intermédiaire de l’identification est la pratique. Les approches d’union et d’intersection produisent souvent des valeurs plutôt extrêmes si les applications empiriques ont plus de deux dimensions. Cela dépend bien sûr des dimensions, des indicateurs et des seuils choisis dans chaque contexte. L’approche d’intersection peut être plutôt stricte. Par exemple, si on devait identifier qui est pauvre à l’aide de l’approche d’intersection à travers les seuils et les pondérations des indicateurs utilisés dans l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) lancé en 2010 (Alkire et Santos 2010), nous trouverions que le pourcentage moyen de personnes pauvres à travers 104 pays est 0 %, et plus de 2 % de la population seraient identifiés comme pauvres au plan multidimensionnel dans seulement deux pays : le Burundi (4,6 %) et le Niger (6,9 %).
Union et intersection, et identification de l’IPM à l’aide de la matrice des privations de l’IPM, 2010 [34]
Union et intersection, et identification de l’IPM à l’aide de la matrice des privations de l’IPM, 2010 [34]
71Si, pour identifier les pauvres au plan multidimensionnel, un seuil de pauvreté est fixé à un niveau intermédiaire quelconque entre l’union et l’intersection, alors les pondérations sont nécessaires. Dans la méthodologie AF, des pondérations générales sont appliquées aux vecteurs de privation 0-1, où la somme des pondérations est égale au nombre de dimensions d. Une personne est identifiée comme pauvre en fonction de la somme des pondérations dans les dimensions pour lesquelles elle souffre de privations. D’autres approches pourraient toutefois être mises en œuvre. Il est très important de noter que sans pondération il est impossible d’identifier qui est pauvre au plan multidimensionnel sauf en utilisant les méthodes d’union ou d’intersection. Les pondérations sont nécessaires uniquement pour identifier les personnes pauvres au plan multidimensionnel, même si aucune mesure résumée ou agrégée n’est construite. Comme il est largement admis, toutes les mesures agrégées qui reflètent la distribution commune imposeront aussi des pondérations à l’étape d’agrégation sur les mesures. Si les pondérations sont à définir avec trans-parence et sans confusion, de futures recherches sont nécessaires sur trois questions :
72Critères et types de robustesse aux pondérations : Premièrement, il est impératif de poursuivre les travaux sur la robustesse à un éventail de pondérations. Les valeurs de l’IPM 2010 doivent être considérées comme une référence. Elles ne sont pas directement comparables pour les raisons afférentes aux données que nous avons déjà évoquées, ce qui limite la puissance des études relatives à la robustesse des classements des pays selon l’IPM. De surcroît, même dans les tests déjà mis en œuvre, le niveau de robustesse qu’une mesure de la pauvreté multidimensionnelle doit satisfaire est souvent peu clair. Par ailleurs, les mesures AF sont conçues pour alimenter l’analyse de la pauvreté et non uniquement les classements par pays ou par sous-groupe, et le niveau de pauvreté multidimensionnelle, ainsi que sa ventilation par indicateur, sont affectés par la structure de pondération, de sorte qu’il faut déployer des approches supplémentaires de la robustesse qui explorent la robustesse de différentes analyses descriptives pertinentes ayant trait aux changements de pondérations.
73Source des pondérations : Deuxièmement, la définition des pondérations constitue elle aussi une question essentielle, de même que les éléments conceptuels et empiriques à prendre en compte dans le choix de la méthode. Pour déterminer les pondérations, diverses approches ont été mises en œuvre : des consultations participatives, des données d’enquête (questions sur les choix d’utilisation du temps, les façons de parier, les biens perçus par la société comme étant de première nécessité et le bien-être subjectif), des techniques statistiques, des opinions d’experts, des approches axiomatiques [35] et, plus couramment, des pondérations normatives appliquées par l’auteur [36]. Les études quantitatives ont utilisé, comparé et étudié de près diverses façons de définir des pondérations, par exemple dans l’économie de la santé et la politique sociale ; ces études sont également nécessaires pour les mesures de la pauvreté multidimensionnelle.
74Espace des pondérations : Troisièmement, même si les pondérations normatives des indicateurs sont absolument claires, des questions demeurent quant à l’espace auquel ces pondérations se rapportent. Dans l’IPM, le vecteur de pondération w s’applique à l’incidence de la privation. Cependant, on pourrait transformer le vecteur de manière à ce que les pondérations normatives s’appliquent dans un espace différent. Ainsi, si 10 % des individus n’ont pas accès à l’eau potable et 40 % à un système d’assainissement, alors on peut tout à fait proposer une structure de pondérations 80-20 ou 20-80. Autre possibilité : les pondérations pourraient être définies dans l’espace des dépenses sociales de manière à ce que les décideurs politiques ne soient pas incités à réaliser des investissements qui réduisent davantage une privation plutôt que l’autre. L’espace approprié dépendra de l’objectif de la mesure autant que de l’exactitude des transformations potentielles. Il faut exposer les différentes possibilités, leurs conséquences non seulement pour l’IPM global, mais aussi pour les décompositions et analyses ultérieures, ainsi que leurs utilisations et limites potentielles.
L’unité d’analyse
75L’une des caractéristiques des mesures de la pauvreté multidimensionnelle est qu’elles doivent construire une rangée de privations pour la même unité d’analyse. Pourtant, dans de nombreuses situations, les données d’enquête ménage contiennent des informations concernant aussi bien le ménage que les membres du ménage pris individuellement. Il ne serait donc pas inutile d’étudier plus avant comment combiner ces deux niveaux de données lorsque l’unité d’analyse est la personne et lorsque c’est le ménage. [37]
76Pour chaque cas, ces combinaisons soulèvent trois types d’interrogations : a) comment combiner les informations disponibles concernant chaque membre du ménage (comme les années de scolarité) et comment traiter les « valeurs manquantes » dans certaines réponses ou comment attribuer des scores aux répondants inéligibles ; b) comment attribuer à chaque individu les données recueillies au niveau des ménages (en tenant compte de la littérature et des études empiriques sur les échelles d’équivalence pour le revenu, ainsi que pour des inégalités de distribution au sein même des ménages), et c) quand et comment est-il justifié d’utiliser une variable correspondant à un répondant individuel ou à un sous-ensemble de membres de ménages pour représenter la totalité des membres des ménages ? Pour répondre à ces questions, peut-être faut-il disposer d’une connaissance approfondie de chaque domaine mesuré par chaque indicateur.
77Les méthodes de combinaison doivent également tenir compte des biais résultant des différences de taille entre les ménages. Dans l’IPM 2010, les ménages étendus affichent une plus grande probabilité de souffrir de privations exprimées par les indicateurs relatifs à la santé ou à la « scolarisation » et une probabilité moindre de souffrir de privations concernant les « années de scolarité » et au moins concernant la « détention de biens » parmi les indicateurs du niveau de vie. L’effet global n’est pas encore clair. La composition du ménage – l’âge et le genre des membres du ménage, aussi bien que les relations entre eux – varie également. Un ménage constitué de travailleurs migrants de genre masculin aura relativement peu de chance de souffrir de privations en termes de nutrition (plusieurs enquêtes manquent de données sur la malnutrition chez les hommes), de scolarisation et de mortalité infantile, tandis qu’un ménage avec beaucoup d’enfants aura relativement plus de chance.
78Il convient de mener des études afin de pouvoir énumérer les autres méthodes de combinaisons des données envisageables, d’indiquer quelles erreurs chacune de ces méthodes risque d’introduire et de préciser comment vérifier la robustesse des résultats découlant des choix opérés. Il est également nécessaire d’explorer de manière empirique l’ampleur des différences introduites par les différentes méthodologies, afin de produire des exemples de méthodes vérifiées avec soin et rigueur pour la combinaison des données au niveau individuel et au niveau des ménages. Parallèlement aux travaux quantitatifs, il est pertinent de recourir à des études qualitatives et ethnographiques afin d’examiner les hypothèses sur lesquelles reposent les différentes méthodes possibles et de déterminer quelles échelles d’équivalence et quelles méthodes d’agrégation au sein des ménages produisent les résultats les plus justes dans un contexte donné. [38]
Les données
79Dans le cas de l’IPM ou de tout autre mesure mondiale nécessitant des indicateurs internationalement comparables, les restrictions sur les données sont considérables, comme nous l’avons exposé en détail plus haut. Les limitations de données au niveau du pays sont moins contraignantes, mais il peut se révéler utile de ventiler les limitations communes. Beaucoup d’entre elles sont bien connues. Par exemple, un grand nombre d’enquêtes auprès des ménages omettent les populations vivant en établissement (telles que les prisonniers), les personnes sans domicile et les personnes hospitalisées. De plus, certaines enquêtes excluent des catégories essentielles, comme les personnes âgées ou l’un des deux sexes. Par ailleurs, le cadre d’échantillonnage, la périodicité et la qualité des enquêtes auprès des ménages sont également régulièrement critiqués. Les mesures multidimensionnelles soulèvent, en outre, des questions bien particulières, pour deux raisons.
80Pour une même personne, il faut disposer de données pour chaque variable. Si une mesure de la pauvreté multidimensionnelle suit la méthode préconisée par Sen, et commence par identifier qui est pauvre au plan multidimensionnel, il convient ensuite de disposer d’information sur les privations communes. C’est cette approche qui a été recommandée récemment par la commission Sarkozy. La nécessité de disposer de données sur différentes dimensions pour la même personne ou la même famille constitue un point fondamental que l’on ne peut pas ignorer.
81Dans les pays en développement, on est parfois contraint de tirer toutes les questions de la même enquête (ou de les générer pour le même ménage par appariement ou cartographie [39]). De plus en plus, les enquêtes multi-sujets auprès des ménages se spécialisent dans l’étude de la santé multidimensionnelle ou de la qualité de l’enseignement ou de l’émancipation ou de la gestion de l’eau, etc. Ces enquêtes traitent un ou plusieurs sujets de manière assez approfondie précisément parce qu’aucun indicateur ne peut servir à lui seul de mesure de substitution suffisante pour la dimension en question. On peut légitimement se demander s’il est possible de construire des modules succincts pour chaque dimension de manière à ce que les données générées soient suffisamment exactes. [40] Une telle démarche nécessite de faire appel à des spécialistes de différents domaines et disciplines. Elle requiert également un travail participatif et qualitatif afin d’explorer l’exactitude des indicateurs et des mesures après la mise en œuvre.
82Les données doivent être exactes au niveau individuel. Deuxièmement, puisque les données sont agrégées d’abord pour chaque individu ou ménage, chaque variable doit exprimer la privation au niveau de l’individu ou du ménage lui-même, et pas simplement en moyenne, ce qui influe sur la conception de l’enquête. Par exemple, une question sur « la mortalité au cours des deux dernières semaines » peut fournir des données utiles en moyenne, mais ne sera probablement pas un bon indicateur de l’état de santé général du répondant. Des problèmes similaires apparaissent aussi pour la mortalité maternelle où l’incidence est très rare. Les indicateurs qui constituent l’indice doivent aussi être conceptuellement scrutés pour identifier s’ils sont des variables de stock ou des variables de flux, s’ils sont subjectifs ou objectifs, et s’ils font référence à des ressources, des intrants, des productions ou des résultats. Ainsi, l’IPM inclut la mortalité infantile qui peut être une variable de stock – elle a été en partie incluse parce qu’il n’y avait pas d’autres variables de santé disponibles aussi bien, et en partie parce que les études empiriques ont montré qu’elle varie dans une période de temps pertinente. Il convient d’effectuer des recherches sur chaque dimension ou domaine afin de proposer des questions reflétant exactement les différentes dimensions de la pauvreté pour l’unité d’analyse pertinente, le type d’indicateur et la période concernés.
3.2 – La méthodologie AF
83La méthodologie AF possède certaines propriétés souhaitables comme esquissé ci-dessus, et M0 est certainement applicable à cause de sa capacité à utiliser des variables ordinales. Mais il y a aussi un certain nombre de problèmes ou questions qui apparaissent dans le cadre de cette méthodologie, dont l’un est discuté ci-dessous.
Indice agrégé
84La première question est claire : en fin de compte pourquoi choisir de mesurer la pauvreté multidimensionnelle (dans le sens de fournir une agrégation) ? En effet, il est déjà possible d’examiner un vecteur de privations. On peut construire un vecteur de privations avec des données provenant de sources différentes. Il n’est pas obligatoire que les données proviennent toutes de la même enquête. Par ailleurs, les pondérations ne sont pas indispensables, un tableau de bord semble donc moins sujet à caution.
85La première partie de cette question est pourquoi fournir une mesure agrégée globale ? [41] Une raison fondamentale est qu’une mesure agrégée définit chaque personne comme pauvre ou non au plan multidimensionnel, et est dans ce sens une mesure de la pauvreté au sens de Sen (1976). Même si un tableau de bord ou un vecteur de privations peuvent définir les privations une par une pour les différents groupes, ils n’examinent pas la pauvreté à travers les dimensions de leur distribution commune. En outre, une mesure globale - par exemple au niveau national - permet des comparaisons dans le temps (la pauvreté s’est-elle accrue ?), et aussi entre les régions (quelles sont les plus pauvres ?) à l’aide d’une métrique cohérente.
86Une autre question est pourquoi fournir une mesure agrégée et parallèlement un vecteur de privations (par exemple les incidences censurées) ? Les incidences censurées que nous fournissons reflètent la distribution commune et ne peuvent être produites sans l’imposition de pondérations à moins que les approches d’union ou d’intersection soient utilisées. Selon la valeur du seuil de pauvreté k et de la pente de la distribution, l’impact de la censure sur les incidences à dimension unique peut être plutôt important, et les divergences elles-mêmes peuvent être intéressantes.
87Pour prendre un premier exemple de l’IPM, le tableau 5 compare les incidences « brutes » - qui sont directement disponibles à partir des données - et les incidences censurées - qui reflètent notre démarche d’identification. Pour l’IPM international, les personnes qui souffraient de privation en termes de services d’assainissement adéquats au Ghana étaient de 88 % dans la matrice brute, mais seulement un tiers de ces ménages étaient pauvres selon l’IPM. Ainsi, dans la matrice censurée, le pourcentage de personnes pauvres selon l’IPM et qui vivent dans des ménages qui manquent d’assainissement tombe à 29 %. En Irak, 29 % des ménages avaient des enfants non scolarisés en âge d’aller à l’école, mais seulement 41 % de ces ménages étaient pauvres selon l’IPM. Par conséquent, l’incidence censurée des personnes vivant dans des ménages pauvres selon l’IPM, où un enfant ne fréquente pas l’école, est de 12 %. En Inde, 48 % des personnes vivaient dans des ménages avec au moins un membre souffrant de malnutrition, mais seulement 82 % de ces personnes étaient pauvres selon l’IPM, donc la matrice censurée identifie 39 % des personnes comme étant pauvres selon l’IPM et vivant dans des ménages avec un membre souffrant de malnutrition. En général, à travers les indicateurs de l’IPM, l’écart entre les matrices brutes et censurées était le plus élevé pour l’assainissement et le combustible pour la cuisine, et le plus bas pour les années de scolarisation.
Différences entre les taux d’incidence brute et censurée pour des pays choisis (pourcentage décroissant)
Différences entre les taux d’incidence brute et censurée pour des pays choisis (pourcentage décroissant)
88Comme le montre l’exemple ci-dessus, il est possible et intéressant de comparer les incidences brutes de chaque indicateur (qui comprend toutes les privations) et les incidences censurées (qui mettent l’accent sur les personnes qui souffrent de privations dans k ou plusieurs indicateurs pondérés).
89Pour un deuxième exemple, nous explorons d’autres aperçus concernant l’intensité. Une caractéristique distinctive des mesures M0 est liée à l’indice partiel que nous appelons « intensité ». Rappelons-le, cet indice est construit en prenant la proportion moyenne des dimensions dans lesquelles les personnes pauvres subissent des privations. Comme exemple, la figure ci-dessous, illustre six dimensions pour k = 2. Nous voyons que 5 % des personnes souffrent de privations dans 6/6 dimensions (100 %), 10 % dans 4/6 et 5/6 dimensions et 15 % dans 2/6 et 3/6 dimensions, de sorte que 55 % des personnes souffrent de privations dans 59 % des dimensions en moyenne, où 59 % est la somme pondérée des proportions indiquées ci-dessus. Les barres horizontales équivalent à M0 – comme le ferait un rectangle simple - 55 % x 59 %.
90Du fait de sa construction, les analyses de M0 pour toute valeur donnée de k permettent toujours de décrire la composition de l’intensité chez les pauvres – la proportion moyenne des dimensions dans lesquelles les personnes pauvres au plan multidimensionnel souffrent de privations dans une population. Dans l’IPM, une personne doit souffrir de privations dans 30 % des indicateurs pondérés pour être identifiée comme pauvre. Nous pouvons décomposer l’intensité de différentes manières. Dans chaque pays analysé pour l’IPM, nous présentons un diagramme à secteurs représentant le pourcentage de personnes pauvres au plan multidimensionnel souffrant de privations dans une catégorie d’intensité. Ainsi, les secteurs les plus foncés montrent le pourcentage de personnes pauvres au plan multidimensionnel souffrant de privations dans 90-100 % des dimensions (par exemple 90? ci/d ?100). Les tranches suivantes, un peu plus claires, représentent le nombre de personnes souffrant de privations dans 80-89 % des dimensions et ainsi de suite jusqu’à 30-39 %. [42] On le voit clairement, la configuration varie d’un pays à l’autre. Prenons le cas de l’Inde, du Cameroun et du Kenya, qui sont contigus dans le classement de l’IPM. L’intensité moyenne de la pauvreté multidimensionnelle s’échelonne de 50 à 54,7 %. Par contre, la composition de l’intensité moyenne varie : au Kenya – qui a l’IPM le plus élevé – le pourcentage de personnes souffrant de privations dans 30-50 % des dimensions, se situe juste sous les 70 %, alors qu’environ 25 % des personnes souffrent de privations dans 60 % ou plus des dimensions. Le Cameroun a globalement l’intensité la plus élevée et le pourcentage le plus fort de personnes souffrant de privations dans 60-90 % des dimensions – soit un tiers environ. Mais l’Inde, dont l’intensité est assez proche de celle du Cameroun, affiche un pourcentage moindre de personnes pauvres souffrant de privations dans 30-50 % des dimensions que ce pays, mais un pourcentage supérieur de personnes souffrant de privations dans 50-60 % et 80-90 % des dimensions.
Décomposition de l’intensité de l’IPM pour l’Inde, le Cameroun et le Kenya
Décomposition de l’intensité de l’IPM pour l’Inde, le Cameroun et le Kenya
L’intensité des privations parmi des pauvres selon l’IPM
L’intensité des privations parmi des pauvres selon l’IPM
91Cette aptitude à décomposer un indice de pauvreté multidimensionnelle par couche d’intensité peut se révéler utile, notamment pour le ciblage des populations. Ainsi, si un gouvernement peut assurer des services à 18 % de la population et si la mesure de la pauvreté multidimensionnelle est construite de manière appropriée pour ce pays, alors on pourrait simplement augmenter la valeur du seuil k jusqu’à ce qu’environ 18 % des personnes soient identifiées comme pauvres. [43] Il s’agit des 18 % de personnes ayant la plus forte intensité de pauvreté. Elle peut aussi être utile en termes de politiques économiques : au Cameroun, plus de personnes souffrent de privations dans 80 à 100 % des indicateurs – de sorte que le ciblage des plus pauvres des pauvres et la mise à disposition d’un éventail intégré de services pourraient permettre de faire reculer la pauvreté plus rapidement. N’oublions pas que si l’on sort une personne à forte intensité de pauvreté de la pauvreté, la réduction de la pauvreté sera plus importante que si l’on sort une personne simplement pauvre de la pauvreté, [44] car dans le premier cas, l’intensité moyenne et le taux d’incidence diminueront. On pourrait aussi combiner cette analyse avec une décomposition en sous-groupes afin de montrer les points communs dans les structures de privations : ainsi, si 80 % des personnes souffrant de privations dans 40-50 % des indicateurs souffrent de privations dans les deux mêmes indicateurs, cela implique d’adopter des politiques différentes que pour un scénario de forte dispersion des combinaisons de privations dans ce sous-groupe. Enfin, on peut (et on devrait) effectuer ces analyses non seulement pour une population tout entière mais aussi pour différents sous-groupes – États, groupes ethniques ou autres – pour lesquels des données représentatives sont disponibles et la mesure est valide.
92La mesure agrégée n’est donc pas un nombre autonome. Une fois que la matrice censurée g0(k) a été créée, dont la moyenne est l’IPM, on peut en déduire tout un ensemble de descriptions : comparaisons, décompositions en sous-groupe ou analyse par indicateur et par intensité. Les sources de données pour ces différents outils sont celles de la matrice censurée post-identification g0(k), créée à l’aide de la matrice de réalisation, du vecteur des seuils de privation, du vecteur de pondération et du seuil de pauvreté. Dans toute identification autre que l’approche unioniste (où k prend la valeur de l’indicateur à la pondération la plus faible), g0(k) sera différente de la matrice de privations. Les analyses basées sur cette matrice sont cohérentes avec la mesure agrégée, et servent à décomposer ses aperçus. Une telle analyse peut aussi être comparée aux données originales (brutes) et aux chiffres provenant d’autres sources de données.
4 – Remarques de conclusion
93Cet article a présenté une approche de la mesure de la pauvreté multidimensionnelle (AF), une de ses applications (IPM) et quatre sujets de recherches qui sont en cours d’investigation ou à approfondir par les recherches futures. Les principales forces de la méthodologie M0 proviennent du fait que c’est une mesure de la pauvreté qui incorpore les étapes d’identification et d’agrégation énoncées par Amartya Sen pour les mesures de la pauvreté ; elle est intuitive et facile à interpréter ; elle satisfait à un ensemble de caractéristiques souhaitables, telles que la cohérence du sous-groupe ; elle rend explicites les pondérations attribuées à chaque dimension ; elle identifie les privations communes et propose différentes manières de présenter ces dernières grâce à la mesure de l’intensité. Enfin, cette méthodologie est flexible : les dimensions, seuils et pondérations peuvent être choisis de manière à refléter l’objet de la mesure et son contexte. L’IPM n’est qu’un exemple parmi les nombreuses applications de cette méthodologie.
94Nous avons utilisé les résultats du récent Indice de Pauvreté Multidimensionnelle pour 104 pays, qui a appliqué la méthodologie M0 pour illustrer certaines analyses que la mesure peut produire. Nous avons constaté que les analyses de l’IPM diffèrent des analyses qui utilisent des données et des indicateurs originaux parce que la matrice de base utilisée dans tous les cas de figures liés à tous les IPM est « censurée » pour cibler seulement les désavantages des personnes qui souffrent de privations dans 30 % (dans ce cas) des dimensions.
95La dernière section présente brièvement un ensemble incomplet mais significatif de sujets de recherche dans lesquels un progrès pourrait propulser ce travail à une autre étape. Ces sujets comprennent un ensemble de questions liées à de nombreuses approches de la mesure multidimensionnelle – telles que les travaux sur les pondérations, les seuils, le revenu, la combinaison des données individuelles et des données niveau ménage, l’analyse de politique économique, les liens avec les préférences et l’économie du bien-être, le traitement des données ordinales et catégorielles, et ainsi de suite. Il y a aussi des problèmes spécifiques à la méthodologie AF – tels que l’incorporation de la complémentarité et de la substituabilité, et le relâchement de l’axiome d’attention pendant l’identification.
96Une question cruciale se pose alors : poursuivre de nouvelles recherches pionnières et collecter les données manquantes permettrait-il de faire nettement progresser la capacité des divers agents à réduire l’incidence, l’intensité, la profondeur et la durée de la pauvreté humaine ? Selon moi, investir davantage dans les mesures de la pauvreté multidimensionnelle peut contribuer à faire mieux comprendre ce phénomène et permettre de créer des instruments de politique économique utiles. Si l’on veut développer ce potentiel, il est essentiel de définir et de diffuser de bonnes pratiques pour la mise en œuvre des mesures de la pauvreté multidimensionnelle, de sorte que les mesures soient appliquées avec rigueur et transparence dans les phases ultérieures. Cet article identifie également les méthodologies statistiques et analytiques supplémentaires qui sont nécessaires. Si les méthodologies de la mesure de la pauvreté multidimensionnelle surmontent de manière satisfaisante ces difficultés, elles peuvent être perçues non comme une menace à la parcimonie légitime de l’économie, mais comme une extension de ses forces intrinsèques.
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- YALONETZKY, G. (2010c). Stochastic dominance conditions and test for ordered, discrete variables. OPHI Research in Progress.
Notes
-
[1]
Je tiens à remercier François Bourguignon, Stefan Dercon, James Foster, Jeni Klugman, Maria Emma Santos et Gaston Yalonetzky ainsi que les organisateurs et participants de la conférence EUDN 2010 pour leurs commentaires et suggestions. Je reste responsable de toutes les erreurs.
-
[2]
Voir Grusky et Kanbur (2006) ; Jenkins et Micklewright (2007) ; Ravallion (1996) ; Ravallion (2010) ; Sen (1992) ; Sen (1993) ; Thorbecke (2008). Ainsi, Cappellari et Jenkins (in Jenkins et Micklewright [2007]) indiquent : « De nos jours, tout le monde admet que la pauvreté n’est pas uniquement liée au fait de ne pas avoir suffisamment d’argent » (phrase d’ouverture, p. 166).
-
[3]
Dans Alkire et Foster (2011b), nous clarifions notre méthodologie de mesure ainsi que sa base dans les méthodes de pauvreté unidimensionnelle ; cet article s’appuie sur ce dernier et met en lumière des questions supplémentaires concernant l’implémentation empirique.
-
[4]
Après le lancement de l’indice de pauvreté multidimensionnelle (IPM) en Juillet 2010, le blog d’Oxfam, le blog de la Banque mondiale, VOXEU, et d’autres forums sur internet ont effectué des échanges de fond sur l’IPM.
-
[5]
Bien sûr, on observe aussi en parallèle une multiplication des évaluations multidimensionnelles du bien-être. Voir, par exemple, notamment Becker, Philipson et Soares (2005) ; Brighouse et Robeyns (2010), Fleurbaey (2009) ; Fleurbaey et Gaulier (2009) ; John et Klenow (2010) ; Kreitler et Kreitler (2006) ; McGillivray (2007) ; Robeyns et Van der Veen (2007) ; Stiglitz, Sen et Fitoussi (2009) entre autres.
-
[6]
Sen (1987b), page 33.
-
[7]
Deutsch et Silber (2005) ; Maasoumi et Lugo (2008).
-
[8]
Balestrino (1998); Cerioli et Zani (1990); Cheli et Lemmi (1995); Chiappero-Martinetti (1994); Chiappero (2006); Deutsch et Silber (2005); Lelli (2001); Lemmi et Betti (2006); Qizilbash (2002).
-
[9]
Kakwani et Silber (2008b) ; Krishnakumar (2004); Krishnakumar et Ballon (2008); Schokkaert et Van Ootegem (1990).
-
[10]
Asselin (2009).
-
[11]
Atkinson (2003); Erikson (1993); Gordon, Nandy, Pantazis, Pemberton et Townsend (2003); Nolan et Whelan (1996); Subramanian (2007).
-
[12]
Bossert, D’Ambrosio et Peragine (2007); Bourguignon and Chakravarty (2002); Chakravarty (1998); Chakravarty et D’Ambrosio (2006); Chakravarty et Silber (2008); Deutsch et Silber (2005); Tsui (2002).
-
[13]
Duclos, Sahn et Younger (2006).
-
[14]
Ce point est discuté dans l’annexe 7 de Foster et Sen (Sen 1997), qui évoque différentes formes de mesures de la pauvreté et d’indicateurs d’autres fonctionnements.
-
[15]
La nécessité de regarder au-delà des corrélations est bien connue et empiriquement importante. Pour ne donner qu’un parmi des nombreux exemples, Jones et Klenow (2010) concluent à une corrélation de 0,95 entre le PIB et leur indice de bien-être, mais ils trouvent aussi que « entre 134 pays, l’écart typique [entre les deux indices] est d’environ 46 %. »
-
[16]
Franco in Stewart et al (2004). Voir aussi Klasen (2000); Qizilbash (2002); Ruggeri-Laderchi, Saith et Stewart (2003); Ruggeri-Laderchi (1997); Ruggeri-Laderchi (2008).
-
[17]
Nolan et Marx (2009). Voir aussi Balestrino (1996); Balestrino et Sciclone (2001); Brandolini et D’Alessio (1998); Chiappero-Martinetti (2000).
-
[18]
S’appuyant sur cela, un indice multidimensionnel a été adopté récemment au niveau européen, qui combine le revenu avec des données de privation matérielle et de chômage pour fournir une évaluation plus précise des privations économiques. Voir par exemple http://ec.europa.eu/eu2020/pdf/115346.pdf à la page 12.
-
[19]
Sen (1976). Dans ce texte, Sen centre son analyse sur l’agrégation dans la mesure où la littérature à cette époque se focalisait sur l’identification.
-
[20]
Ces questions sont examinées en détail dans Alkire et Foster (2011b), cet article s’appuie sur ce dernier.
-
[21]
Cette discussion fait référence à la « personne » comme unité d’analyse pour faciliter la présentation. Des mesures similaires pourraient être construites pour différentes unités d’analyse telles que les ménages ou des sous-groupes de population comme les jeunes ou les femmes, ou une institution comme l’école ou une clinique de santé.
-
[22]
2003:25 ; souligné dans l’original. D’autres approches telles que les approches de « comptage » largement mises en œuvre en Europe et les approches des besoins fondamentaux non satisfaits en Amérique latine utilisent aussi cette approche (Atkinson 2003 ; Feres et Mancero 2001).
-
[23]
James Foster et moi-même avons adopté une approche intermédiaire, dans laquelle une personne peut être identifiée comme pauvre au plan multidimensionnel si elle est pauvre dans une somme (pondérée) quelconque ou un « comptage » de dimensions qui peut inclure l’union, l’intersection ou des seuils intermédiaires (Alkire et Foster 2007).
-
[24]
Atkinson et Bourguignon (1982) avaient déjà plaidé pour la prise en compte de ces questions.
-
[25]
M0 satisfait également d’autres propriétés : principe de population (replication invariance), symétrie, orientation pauvreté, orientation privations, monotonicité faible, non-trivialité, normalisation et réarrangement faible. Ces axiomes sont des restrictions communes sur les méthodologies d’identification et d’agrégation.
-
[26]
Il est important à ce niveau de faire attention à un important changement dans les termes : dans la discussion méthodologique chaque entrée dans la matrice constitue une « dimension ». Dans la description de l’IPM, la terminologie change, et chaque entrée dans la matrice est appelée « indicateur » ; le terme dimension est utilisé dans l’IPM pour refléter les catégories conceptuelles (santé) qui n’apparaissent pas dans la matrice g0 directement.
-
[27]
Lorsque nous sommes en présence des dix indicateurs, les personnes identifiées comme pauvres avec k=3 sont également les mêmes qui seront désignées comme pauvres avec k=3,33.
-
[28]
Cette section mentionne très brièvement certains résultats de Alkire et Santos (2010) ; pour une discussion complète le lecteur pourra se référer à cet article.
-
[29]
Pour tous ces chiffres, il s’agit des données de population de 2007. Il serait aussi possible d’appliquer les données de population pour l’année au cours de laquelle l’enquête a été réalisée dans chaque pays.
-
[30]
Les résultats dans ce paragraphe proviennent de Alkire, Santos, Seth et Yalonetzky (2010).
-
[31]
Sur les 44 pays ayant un score IPM de 0 à 0,05, 14 changent d’au moins 10 places, ce qui implique que l’IPM n’est pas encore parfaitement adapté à des comparaisons très fines.
-
[32]
Apablaza, Ocampo et Yalonetzky (2010).
-
[33]
Il sera intéressant et fructueux de rattacher ce débat à la discussion, distincte mais connexe, sur le « problème de l’indexation ». voir Arneson (1990); Arrow (1973); Fleurbaey (2007); Rawls (1971); Sen (1991a) et les références citées dans ces ouvrages.
-
[34]
L’incidence moyenne de la pauvreté multidimensionnelle (population-pondérée) à l’aide des données sur la population de 2007, l’approche de l’union pour l’identification et les indicateurs/ seuils/ pondérations de l’IPM à travers les 104 pays. L’incidence moyenne simple, avec tous les pays ayant les mêmes pondérations, est aussi de 58 %.
-
[35]
Dans le cas du Mexique, le cadre juridique qui régit l’élaboration de la mesure nationale de la pauvreté multidimensionnelle repose sur certains principes. Par exemple, le progrès économique et le progrès social doivent s’équilibrer mutuellement, et le fait de parvenir à un certain niveau dans chaque dimension sociale doit être considéré comme un droit de la personne humaine. James Foster et moi-même avons alors développé une approche axiomatique montrant que ces principes, ainsi que les hypothèses relatives à l’exactitude des données, suffisaient à définir les pondérations pour les différentes dimensions et à identifier les individus pauvres au plan multidimensionnel. Alkire, S et Foster, JE. 2009. “Memo to Coneval.”
-
[36]
Voir par exemple Dibben et al (2007), et Decanq et Lugo (à paraître).
-
[37]
Bien sûr, dans d’autres applications possibles de la méthode AF, l’unité d’analyse peut être un établissement (école, établissement de santé communautaire), un quartier (zone de relevé des données), une entreprise ou une coopérative, voire un État ou un pays (pour les indicateurs de gouvernance). Cependant, dans le cadre de la pauvreté multidimensionnelle, l’unité est le plus souvent l’individu ou le ménage.
-
[38]
Par exemple, lorsqu’on identifie un ménage comme ne souffrant pas de privations dès lors que l’un de ses membres compte au moins 5 années de scolarité, comme le fait l’IPM, on part du principe que l’éducation est partagée entre les membres du ménage. Or, dans certains contextes culturels ou dans certains types de ménages, cette hypothèse peut ne pas être juste.
-
[39]
Lorsque tous les indicateurs pertinents ne sont pas présents dans une même étude, si c’est possible, on peut rapprocher plusieurs études afin d’obtenir des données pour le même individu ou le même ménage à partir de plusieurs enquêtes. Il est aussi envisageable de recourir à des techniques de cartographie de la pauvreté lorsque ces dernières présentent une exactitude suffisante au niveau des individus/ ménages et se prêtent à la formulation des politiques économiques.
-
[40]
Par exemple, Browning (2003).
-
[41]
Voir aussi Alkire et Foster (2011b).
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[42]
Comme les pondérations de l’IPM sont de 0,167 et 0,055 pour différentes dimensions, il existe des valeurs additionnelles de k auxquelles l’intensité change. Nous présentons les tranches de déciles à des fins de clarté uniquement.
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[43]
Alkire et Foster (2009a). Le dégré de précision pour ajuster le décompte en augmentant k dépend de la structure de pondération et du nombre de variables mais aussi de la distribution des privations. Il faut noter que le seuil de pauvreté k est, dans l’exemple donné, lui-même un instrument de politique économique (voir Alkire et Foster 2009a, section 8).
-
[44]
En identifiant par exemple exactement la/les privation/s dont souffrent ceux qui se trouvent dans la tranche des 30-40 % en Inde et au Kenya.