« Une clameur géante sortait des choses comme un prélude d’apocalypse
jetant l’effroi des fins du monde. »
P. Loti, Pêcheur d’Islande
« Wie Todesahnung, Dämmrung deckt die Lande… »
(« Comme un pressentiment de mort, le crépuscule recouvre les pays… »)
R. Wagner, Tannhaüser (Wolfram)
1 Nous savions que les civilisations sont mortelles, nous apprenons aujourd’hui que la culture en tant que telle peut être menacée par de complémentaires barbaries, qu’où étaient le Je et le Nous, le On et le Cà peuvent advenir, que Thanatos peut s’emparer du Logos, et la Kulturarbeit être radicalement menacée par des ethnocides et des génocides programmés, et même l’humanité détruite au nom de Dieu ou du Progrès. Les menaces de mort de la culture et les attaques contre la civilisation révèlent le travail de la mort dans la culture et les tentations de l’anthropolyse, terme que je propose pour désigner l’autodestruction et le suicide de l’humanité.
2 À défaut d’une incertaine mais non absolument impossible Fin du Monde que millénaristes et complotistes se complaisent à fantasmer et annoncer de manière répétitive, nous vivons indubitablement la fin d’un monde, dont les modalités présentes et les conséquences probables nous demeurent aussi terrifiantes qu’indéterminées, même si, dans la partie critique de son œuvre, K. Marx en avait annoncé l’arrivée. Le vécu apocalyptique qui soutient la mélancolisation du lien social (O. Douville) dans un deuil impossible est aussi pourtant, en toute ambiguïté, dévoilement des conflictualités impensées, vacillement des certitudes, retour des passés sous silence, interrogation des discours et représentations obligés. De discours lénifiants en dénis prétendument salvateurs, les petites bondieuseries de l’idéologie dominante, telles que la majorité des médias les diffusent et les sacralisent, doivent donc travailler au jour le jour à empêcher de penser la réalité des barbaries quotidiennes agies par les nations soi-disant démocratiques et porteuses du Progrès, les massacres, la torture, la domination des femmes et l’exploitation des peuples étant systématiquement dénoncés comme les crimes spécifiques et singuliers des sauvages fanatiques qui prétendent résister à la mondialisation libérale et aux séductions du capitalisme financier. Entre euphémismes, doubles discours et formulations oxymoriques, les énoncés légitiment les fallaces des pactes de déni nécessaires à la survie d’un système d’autant plus implacable et destructeur qu’il est désormais au bord de l’implosion et menacé par un fanatisme terroriste qu’il a contribué à faire surgir comme réaction à son emprise… Et qu’il magnifie pour éviter de se trouver mis en question. Il conviendrait donc plutôt de s’interroger sur le délire occidental (D.-R. Dufour) et ses avatars mondialisés et notre imaginaire social-historique (C. Castoriadis) sans pour autant dénier la violence meurtrière qui attaque, au nom d’un djihad perverti, toute culture de la liberté et l’exigence d’universalité, telles que, malgré tout, l’Occident a su les créer et les maintenir.
3 Dans l’anomie géopolitique gérée par le capitalisme financier et les grandes transnationales, l’élimination concertée de l’humain par la technique et la gestion est à l’origine de la diffusion d’un Malêtre (R. Kaës) généralisé ; comme symptôme civilisationnel, ce dernier révèle et dévoile ce qui, dans ce vécu de fin de l’histoire et d’annonce de la fin des temps (la fin de l’histoire) se révèle et se dévoile dans et par les stratégies d’occultation et de masquage visant à le dénier. Comme le dit A. Badiou, « Notre mal vient de plus loin », et « La violence n’est pas un accident de nos systèmes, elle en est la fondation », comme le constate S. Zizek, nous rappelant, preuves à l’appui, la nécessité de réinvestir et transformer le paradigme marxiste pour penser et analyser les malheurs de notre temps et la violence de la mondialisation.
4 Le rêve américain est devenu le cauchemar des peuples et le Divin Marché (D.-R. Dufour) impose au monde la destruction de l’œcoumène (géants de l’agroalimentaire et de l’industrie en général), l’effacement des cultures (colonisation numérique et médiatique) et la disqualification des traditions (pléonexie et urgence), le meurtre maniaque de l’humanité (le transhumanisme, la biopolitique et le transgenre) et le règne de la bêtise et de l’ignorance (réseaux « sociaux »). Sous les fallacieuses apparences du progrès technique et l’emprise désormais dominante des transnationales imposant leur loi aux États, le capitalisme paradoxant (F. Hanique, V. de Gaulejac) diffuse comme organisateur de la vie de chacun et de tous l’american way of kill and dead. Après les temps modernes, les totalitarismes noir et rouge, le totalitarisme vert de l’islam fanatique revendique par la terreur son idéal de pureté dans le gel de ses certitudes, tandis que, conçu et expérimenté dans les nouvelles sectes (E. Diet), le totalitarisme transparent (J.-P. Pinel) du néolibéralisme étayé sur l’informatique sape, dissout et disqualifie l’ensemble des cadres et repères symboliques nécessaires à l’humanisation et à la subjectivation et généralise l’ère du soupçon, de la surveillance et de la délation. Sans filtre ni médiation, la relation persécutive (P. Aulagnier) s’installe en doublet de la terreur comme l’organisateur de l’hypermodernité. Dans le même temps, la déliaison et la désintrication pulsionnelles, effets du capitalisme paradoxant, permettent le développement sans limites de l’imposture, des clivages, des alliances psychopathiques (J.‑P. Pinel), des régressions opératoires et des prédations cyniques dans un monde désormais sans interdit ni tabou.
5 Aussi bien convient-il, au-delà des représentations et jugements obligés, de penser ensemble ces deux avatars de la pulsion de mort (S. Resnik) comme les symptômes complémentaires d’une même destructivité et d’une même violence (A. Badiou, S. Zizek), de les rapporter à la violence originaire du capitalisme et d’y reconnaître l’expression contemporaine de la lutte des classes aujourd’hui directement inscrite dans la géopolitique, qu’elle se décline en prétendues guerres ethniques, lorsqu’il s’agit de s’approprier les ressources naturelles du tiers-monde, ou en lutte des places dans les pays développés plus directement soumis au délire de l’imaginaire social-historique occidental (C. Castoriadis ; D.‑R. Dufour). Dans un cas comme dans l’autre, la rage et le désespoir des humiliés se trouvent instrumentalisés par de très régressives séductions, qu’elles prennent la forme de très réactionnaires et paranoïaques revendications identitaires (retour et montée de l’extrême droite et de la droite extrême, racismes et intégrismes de toutes origines) ou celle de très indigestes et simplistes guimauves « spirituelles » d’un œcuménisme de bazar (nouvelles formes de l’opium du peuple : « philosophes » du bonheur, bouddhistes de pacotille, adeptes du lâcher prise et idéologues du New Age). Symptômes contradictoires d’une même violence originaire (J. Bergeret) qui menace et malmène les narcissismes, d’une haine de l’autre, de l’art et de la pensée, elles sollicitent les mêmes désintrications pulsionnelles, les mêmes clivages, les mêmes dénis et les mêmes projections. L’abandon de la violence symbolique primaire livre les sujets à la violence sans frein de la violence symbolique secondaire (P. Aulagnier) et à l’affrontement létal des nouveaux Assassins et des Pervers-Puritains (D.-R. Dufour).
6 Dans les deux perspectives idéologiques comme dans leur affrontement, la haine de la culture et de la pensée, le refus de la condition humaine, la peur de la sexualité et du désir, la haine et la peur du féminin (J. Cournut, G. Gaillard), la disqualification de la parole, de la raison et de la subjectivité, la destruction des codes et de la langue, le refus de l’instituant et de l’institué, ainsi que la normativité quantophrénique attaquent les conditions mêmes de l’humanisation et de la civilisation. En quoi elles rejoignent paradoxalement la nullité destructrice de la bêtise opératoire des procédures (A.‑L. Diet) et les logiques mortifères des processus sans sujet (R. Kaës). C’est qu’aussi nous pouvions nous sentir « à l‘aise dans la barbarie » (M. Nacht) et nous accommoder de la « barbarie douce » (J.‑P. Le Goff), tant du moins que n’en étant pas les victimes directes, il était encore possible aux cadres, aux intellectuels et aux classes moyennes de banaliser la « souffrance en France » (C. Dejours) et la « Misère du monde » (P. Bourdieu). Mais avec la folie ultralibérale et la terreur intégriste, ces temps sont révolus et nous devons faire face à la violence qui, au-delà des drames et des souffrances individuels, menace radicalement la Kulturarbeit (travail de civilisation) et l’avenir de notre humanité. Car dans l’arrogance de notre présent, c’est le Nihilisme prophétisé et identifié par F. Nietzsche qui déploie ses logiques de mort.
Tout va très bien, Madame la marquise…
7 Très longtemps, trop longtemps, les cliniciens, dans la méconnaissance appliquée de la réalité sociale-historique et leur soumission à une doxa très simplificatrice de la complexité de la pensée freudienne (A.‑L. Diet, E. Diet), ont pensé et mis en œuvre la discipline psychanalytique comme si le sujet de l’inconscient se constituait hors histoire, hors lien, hors contexte culturel, comme si sa parole ne dépendait en aucune manière des discours et représentations dominants et des événements du monde Nous avons pourtant appris, de l’expérience (Erlebnis), non sans réticences, ni résistances, que notre vie psychique dépendait d’abord d’un autre, des autres et de l’ensemble. Les situations extrêmes (B. Bettelheim) et leur effet d’inéluctable réalité ont notamment obligé à repenser les conditions de la subjectivation que la clinique de la psychose et l’expérience du travail psychanalytique en et de groupe ne permettent plus de réduire à une vulgate œdipienne sourde et aveugle à la prégnance de l’archaïque comme aux dimensions intersubjectives et transsubjectives instituantes de la vie psychique.
8 À la classique opposition entre l’hystérie et la névrose obsessionnelle (Zwangsneurose) et leur complément psychotique, la paranoïa, a succédé l’antagonisme systémique entre perversion et paranoïa et ses compléments : l’effondrement dépressif et mélancolique ou la régression opératoire. Homologue aux conflictualités géopolitiques de la guerre froide opposant la perversité libérale et le délire totalitaire, dans la poursuite impensable et impensée des pratiques génocidaires et des violences coloniales, la complexe mutation anthropologique en cours transforme les jeux et les enjeux de la subjectivation et de la socialisation, jusqu’à, sans état d’âme, prédire et préconiser la mort de « l’Homme ».
9 En chacun comme en tous et dans les liens, entre clivages, déchirures et confusions, un im-monde innommable formaté par l’économie libérale et les seules logiques du profit, promu par la quantophrénie informatique, et banalisé par les médias, s’impose comme la norme et l’indépassable réalité d’un univers sans passé ni avenir (tina). Avec lui se déploie la bêtise de l’insignifiance (C. Castoriadis) et se révèle la terrifique emprise d’un plein de vide (G. Pirlot) attaquant les liens et les subjectivités. Douloureusement, mais obscurément ressentie, la violence des déliaisons à l’origine du Malêtre est soigneusement dissimulée par de subtiles – et aussi bien grossières – manœuvres apotropaïques désignant, le plus souvent « mine de rien », les boucs émissaires nécessaires à la survie du système de domination symbolique et économique (juifs, arabes, musulmans, migrants, pauvres, chômeurs, syndicalistes, « communistes », femmes…). Et l’on sait bien que la chemise d’un drh a plus de prix que le licenciement de milliers de travailleurs, qu’une victime parisienne de la terreur fanatique a plus de poids médiatique que les centaines – voire milliers – d’Arabes et de musulmans tués pour être devenus dans le même temps la cible des attentats djihadistes et des bombardements censés les délivrer. Ces manœuvres idéologiques ne sont pas sans activer les dégagements pervers et la jouissance sadique (Schadenfreude) dont chacun d’entre nous est capable…
10 Au-delà des manipulations visant directement la fabrication de l’opinion et la théodicée de l’ordre libéral (N. Chomski, E. Herman), par un effet paradoxal, le bombardement des images-choc et des discours compassionnels, une fois le premier moment de sidération passé, produit la banalisation de l’horreur et l’accoutumance à l’inacceptable, quitte à mettre en scène quelque émouvant scénario compassionnel : parce que loin de nous, les meurtres et les exactions, les viols et les famines complaisamment présentés par les médias nous permettent de ne pas penser qu’une femme meurt en France tous les trois jours de maltraitance conjugale, que des travailleurs meurent de maladies professionnelles ou se suicident pour cause de souffrance au travail, que jeunes ou vieux, licenciés, chômeurs, mésinscrits (A.-N. Henri), migrants, exclus du système scolaire… sont dans la détresse et que la pauvreté et la misère progressent au même rythme que les scandaleux profits des plus riches… Par défense et lassitude, nous devenons indifférents à la morne répétition des horreurs et des terreurs, épuisés d’impuissance, résignés à supporter ce qui de toute manière nous échappe, non point véritablement cyniques mais spectateurs sans regard de ce qui s’expose à notre vue. Parfois, il est vrai, le courage, l’investissement et le talent d’un(e) journaliste ou d’un photographe, quelque action héroïque ou quelque drame parviendront à susciter une émotion authentique et ouvriront l’espace d’une réflexion possible, d’une légitime indignation (S. Hessel), d’un raisonnable engagement.
11 Mais le plus souvent, sujets de la banalité du sens commun, « nous nous faisons une raison », c’est-à-dire adhérons à l’aliénation partageable qui constitue le fondement du lien social avec sa constellation d’alliances inconscientes (R. Kaës), et singulièrement des pactes dénégatifs et de dénis nécessaires à l’établissement du contrat narcissique (P. Aulagnier). Avec la caution de l’idéologie dominante et des lieux communs, nous nous employons à banaliser, euphémiser ou dénier la violence présente en nous, dans le lien aux autres et dans l’ensemble, à nier la conflictualité pulsionnelle, à récuser la prégnance de la réalité psychique. Évidemment, les refoulements, clivages et dénis instaurés pour préserver la tranquillité narcissique sont en réalité psychiquement très coûteux ; mais surtout, la mise en place de ces défenses ne suffit jamais à éliminer ou même contenir suffisamment la violence manifeste ou silencieuse présente dans la réalité, ses présentations (Dastellungen) et représentations (Vorstellungen). Pourtant, même dans les situations les plus catastrophiques, même lorsque l’événement s’impose comme rupture économique du pare-excitation, la complexité du psychisme demeure, et le débordement du sujet ne peut se réduire aux platitudes comportementales ; et victime ou témoin de l’attentat, il demeure, jusqu’à et dans son éventuel effondrement, l’interprète en quête du sens de ce qu’il lui arrive.
12 Le travail psychique nécessaire à la constitution d’une position subjective suffisamment sereine pour faire face aux situations ou événements traumatisants nécessite à la fois l’existence d’une sécurité originaire (M. Balint) constituée et intériorisée dans l’enfance par et dans le lien au porte-parole au sein du groupe d’appartenance primaire, et, d’autre part, la présence effective dans la réalité de répondants, cadres et métacadres ayant valeur et fonction d’étayage pour le sujet en situation critique. La violence terroriste, comme exigence absolue de l’idéal, a effet de révélateur des insuffisances des systèmes de défense interne et de contenance ; d’ailleurs, sa finalité et son but sont justement de mettre en crise tous les recours et les secours et de désorganiser la réalité pour plonger le sujet dans la détresse originaire (Hilfosigkeit) de l’infans confronté à l’imprévu d’une violence sans nom, ni sens.
La menace et l’urgence
13 Constituée de signifiants, de discours et de représentations qui font lien préconscient dans la socialité, construite et diffusée par les médias et tous les vecteurs de la propagande glauque (J.‑L. Beauvois), l’opinion dite publique est à la fois l’effet, le moyen et la légitimation de la domination symbolique. Objet et instrument idéologique, elle est investie par les sujets et s’impose à eux comme le fondement d’un partage « naturel » de certitudes rassurantes et de légitimes dramatisations contenant les angoisses et préservant de l’imprévu et de ses potentialités traumatiques. Il s’agit donc d’un imaginaire imposé, mais également psychiquement fonctionnel et nécessaire. Il est essentiel de le rappeler ici. Dans cette perspective, l’opinion comme l’idéologie (R. Kaës) est à la fois fallace défensive et symptôme de processus et de mécanismes qu’elle révèle dans le mouvement même où elle s’attache à les masquer. Il s’agit là d’un fragile équilibre que précisément les attaques terroristes détruisent en fracassant, par l’irruption de la violence brute, les compromis, les médiations et les cadres de référence de la civilité et de la citoyenneté : l’attentat a toujours pour visée, dans sa jouissance de mort, la destruction des repères et des conteneurs symboliques nécessaires à la vie subjective et aux liens entre les humains. Fondamentalement, sous prétexte de dénoncer par la violence de son agir la destructivité des pactes de déni, l’attentat fanatique anéantit les pactes dénégatifs instituants et garants du lien social et de la subjectivation.
14 La brutalité d’un agir fanatique et barbare, telle que nous la ressentons, n’est pourtant pas simplement l’expression d’une haine sans limite ou d’un amour de la mort qui viendrait accomplir une immémoriale vengeance d’humiliations d’un autre âge (les croisades ou la colonisation) ; elle est aussi révélation sanglante des logiques meurtrières silencieusement présentes dans le quotidien de notre culture, de nos démocraties occidentales et notre système économique. Dans sa revendication idéale, ses proclamations et son agir mortifères, elle dévoile les failles, les incohérences, les mensonges, les impostures, les abus, les trahisons et les transgressions structurellement constitutifs du système. La paranoïa intégriste dévoile la perversion libérale. La question est donc de savoir si l’horreur et la terreur qui nous visent sont pour nous occasion de salutaires interrogations sur nos valeurs et nos pratiques ou si, en une très diabolique persévération, nous nous contentons, même si c’est à juste titre, de condamner chez les autres une violence qui, de fait, ne nous est pas étrangère (violences faites aux femmes, exploitation du travail, prédation économique, disqualification de la pensée, des interdits et organisateurs symboliques…), même si elle prend encore – mais pour combien de temps ? – dans nos sociétés libérales développées des formes moins manifestement sanglantes, plus subtiles et plus perfides…
15 Le terrorisme et le nihilisme, même s’ils ne peuvent être réduits à des conséquences ou à des réactions mécaniques à l’emprise ultralibérale, sont les monstrueux symptômes réactionnels aux déculturations pléonexistes et consuméristes programmées par le capitalisme financier, au désenchantement du monde (M. Gauchet) et au redoublement de toutes les prédations dont la société occidentale, asservie aux logiques du capital, demeure l’origine et l’agent. Dès le Plan Marshall, depuis lors relevé par le Traité de Maastricht et les nouveaux traités commerciaux en cours et en train de se mettre en place (tafta), la colonisation de l’Europe et de la France en particulier s’est développée par une déculturation sauvage attaquant directement les usages et les valeurs de la démocratie républicaine et de la culture humaniste – singulièrement le service public (éducation, justice, santé…) –, les usa imposant leurs produits commerciaux et « culturels » et leur langue comme la norme inquestionnable de l’humanité et du progrès et leurs multinationales comme les légitimes dirigeants du monde. Ils semblent néanmoins possiblement menacés d’être à leur tour des victimes de ce qu’ils ont imposé au monde…
16 Avec un cynisme sans précédent, les traders, les agences de notation, les patrons du caq 40 et autres mafieux de prestige décident du sort des peuples, saluent comme autant de victoires l’obscène engraissement des actionnaires et la dramatique paupérisation des travailleurs, la destruction de l’œcoumène et des cultures, la transformation des politiques en petits voyageurs de commerce et des citoyens en troupeau de consommateurs. Les merveilles de l’aliénation produisant, en toute méconnaissance, la réalisation d’une révolution conservatrice et l’élection à la présidence d’un capitaine d’industrie milliardaire décidé à gérer avec ses très réactionnaires affidés le plus puissant pays du monde comme une entreprise, font éclater au grand jour la vérité du capitalisme financier de manière si violente et caricaturale que le plus borné des staliniens n’aurait même pas pu, ni osé, l’imaginer. La haine et le mépris de l’humain se révèlent ici, quoique sous d’autres formes, aussi radicalement mortifères que les injonctions idéales des fondamentalismes fanatiques ; mais, du même coup, donnent prise aux discours messianiques prêchant la conversion et le djihad… contre un monde inique et injuste ignorant des véritables valeurs. Et, comme le scientologue américain, le prêcheur-recruteur, avec de très simplistes arguments mais une méthodologie éprouvée, jouant sur la séduction narcissique, l’indignation, la compassion, la recherche d’idéal obtiendra, souvent en toute méconnaissance ou absence de conviction religieuse, la conversion et l’engagement du « surmusulman » ainsi produit par la simple monstration de l’horreur quotidienne de la société du spectacle (G. Debord) et de la perversité intrinsèque du monde capitaliste.
17 La confrontation des deux visions du monde en complémentarité antagoniste suscite des deux côtés de l’opposition un sentiment de menace du fait de la radicale incompatibilité des valeurs proclamées et des modes de vie préconisés, alors que la réalité des comportements est souvent plus complexe, que les personnalités modales (G. Devereux) sont plus métissées, les modalités d’acculturation, les appartenances (J.C. Rouchy) et les conflictualités psychiques maintenues… Notamment, et ce n’est point hasard, pour ce qui concerne le rapport à la femme et au féminin (G. Gaillard) ou la valorisation de la position opératoire. Mais il s’agit là de dangereuses proximités qui ne doivent pas être pensées et ne peuvent être nommées. Pourtant le Cambodge et le Vietnam, Guantanamo, comme l’Indochine, l’Algérie ou la « Françafrique » et le Rwanda pour nous, ont été l’occasion de crimes tout à fait comparables à ceux de Daesh… Mais cela doit être passé sous silence comme les violences coloniales ou néocoloniales, ou les maltraitances et abus au sein des églises chrétiennes ou des institutions républicaines…
18 En dehors de toute considération de psychopathologie individuelle ou collective, l’urgence du passage à l’acte fanatique et son caractère irrémédiable pourraient sans doute se comprendre comme la nécessité pour le terroriste d’assurer une rupture dans la continuité historique et de s’inscrire ainsi dans le temps absolu et sacré du martyre échappant à la pensée et aux lois des hommes. En vis-à-vis, l’état d’urgence, dans sa définition oxymorique, vise à reconstruire et stabiliser par une réaction immédiate le lien social et la temporalité de la Cité, non simplement à se préparer à l’imprévisible et à protéger ou rassurer les citoyens, mais plus encore à retisser le politique que l’attentat avait détruit et à restaurer l’État de droit.
19 À la menace répond l’état d’urgence, mais s’installant dans le temps, celui-ci ne perpétue-t-il pas la menace qu’il veut contrer et n’y a-t-il pas risque, sous couvert d’une très, trop compréhensible raison d’État, de mettre par des mesures d’exception en danger cette même démocratie qu’il s’agit de défendre, d’installer l’anxiété paranoïde et le soupçon d’intention chez les sujets que l’on prétend protéger ? N’y a-t-il pas là à identifier le piège que notamment l’ambiguïté de la médiatisation représente pour la lutte antiterroriste ? À interroger l’empressement intéressé des journalistes à confondre réaction et résistance (D.‑R. Dufour) ? Et voilà revenue l’infernale complémentarité entre paranoïa et perversion, dont on voit bien en l’occurrence qu’elle peut, à l’infini, se renforcer de terrifiants renversements… Et l’art du pervers est de pousser à la faute qui semblera le justifier par la disqualification de son ennemi, tandis que les soupçons et la violence du paranoïaque se trouveront légitimés par les transgressions perverses…
Catastrophes
« Die Wüste wächst ! »
(« Le désert s’accroit ! »)
F. Nietzsche, Also sprach Zarathustra
21 C’est du côté de l’effet qu’il cherche à produire et produit que doit se tourner l’analyse du terrorisme : le vécu contre-transférentiel étant ici comme toujours le moyen de comprendre le sens et les enjeux de ce qui s’impose à la psyché (G. Devereux). Et il faut ici oser dépasser la doxa (A.‑L. Diet) d’une trop simpliste œdipianisation pour affronter l’archaïque et le politique effectivement présents dans le devenir et la structure de l’Œdipe (E. Diet). L’attentat terroriste est un agir psychopathique dont le lien intrinsèque à la jouissance mortifère (suicide du ou des kamikazes directement connecté à l’accomplissement du meurtre sacrificiel et salvateur) nous choque et nous sidère, non simplement par sa violence, mais aussi et surtout par son impersonnalité : acteurs et victimes interchangeables, simplisme des motivations idéologiques, inaffectivité opératoire et auto-destructivité caractérisent ce nihilisme actif (F. Nietzsche) qui met en échec nos schèmes interprétatifs et nos capacités empathiques et d’identification projective. L’horreur qu’il inspire renvoie victimes, témoins et analystes à un sentiment d’impuissance, et plus encore de sidération face à ce qui s’impose comme destruction de l’ordre du monde, surgissement de l’impossible d’un réel inimaginable. « Hier ist kein Warum ! »
22 Le propre de l’attentat est en effet de transformer l’événement singulier destructeur en état de menace, de faire de l’indicible horreur d’un moment non point un simple traumatisme, aussi mortifère soit-il, mais une représentation envahissante et insensée productrice d’indéfinis et infinis fantasmes paranoïdes, suscitant méfiance et soupçons d’intention, peur et rejet de l’autre étranger, imaginaire et émotions archaïques présents chez chacun et chez tous, que les idéologies et les mouvements les plus réactionnaires se hâtent de nourrir et d’instrumentaliser, alimentant ainsi, notamment chez les mésinscrits (A.‑N. Henri) les vécus d’humiliation, de rage et d’abandon potentiellement gros de toutes les radicalisations. C’est l’« Umwertung aller Werte » qui est ici à l’œuvre…
23 L’état de menace produit par l’agir psychopathique signifie pour la psyché que tout peut arriver, n’importe où, n’importe quand, de n’importe quelle manière, de la part de n’importe qui, sans distinction d’appartenance ou d’origine, que la violence anonyme peut à tout moment frapper n’importe qui, sans motif ni raison apparente autre que la volonté de nuire et détruire la civilisation dominante, ses valeurs, ses pratiques et ses idéaux, et finalement d’éradiquer de la surface de la terre ce qui n’est pas conforme au délire de référence. Comme l’indiquent les cibles et le modus operandi, ce sont la vie quotidienne et le citoyen ordinaire qui sont visés, le plaisir de vivre et les liens, et non simplement les ennemis idéologiques. Mais le premier sentiment éprouvé est sans doute, avant toute réflexion, d’être confronté à « l’inhumain » et à une déshumanisation létale, à un effondrement de tous les cadres, conteneurs, étayages et répondants nécessaires à notre existence subjective, à la disparition de toutes les barrières protectrices et des repères de sens nous préservant de l’impossible du réel. Le langage, le droit, la raison se trouvent démunis face à l’horreur, et le psychiste lui-même se trouve interdit… L’effondrement interne surgit dans la dévastation du monde. Redoublée par l’obscure perception que la barbarie qui attaque notre civilisation ne lui est en réalité nullement étrangère, malgré les pactes de déni et les alliances de combat (R. Kaës), la terreur s’installe à l’horizon de nos pensées, infiltre l’ambiance intersubjective (C. Bittolo). Discrètement, mais de manière lancinante, le contexte social-historique fait ressurgir en chacun les désarrois de l’enfance et les accablements de la détresse infantile (Hilflosigkeit). Mais aussi, et cela est difficilement acceptable pour notre narcissisme de « civilisés », les passés sous silence, les erreurs, les crimes et les incohérences présents et passés de notre culture que le « barbare » pointe sauvagement et que l’attaque qu’elle subit nous oblige à reconsidérer… et à reconnaître en nous comme de toujours actives potentialités…
24 Ce que le fanatique (B. Chouvier) produit par son agir désubjectivé comme figure extrême de l’aliénation idéologique est la récusation définitive du travail de la culture, le refus agi de toute altérité, de tout manque et de toute limite, l’érection de la haine comme idéal et la disqualification de toute position subjective non conforme au discours prescrit. Ce qui, bien entendu, n’est pas sans évoquer les logiques totalitaires des injonctions managériales (E. Diet) et du techno-fascisme (R. Gori) dans la paradoxale affinité qui lie les logiques sectaires les intégrismes meurtriers et le totalitarisme libéral. Et l’état de menace justifie un état d’urgence qui menace l’État de droit qu’il est censé défendre, tandis que la surveillance de précaution crée de fait une très problématique relation persécutive (P. Aulagnier) entre les citoyens et le pouvoir d’État, et entre les citoyens eux-mêmes. Dans ce contexte, l’autre devient un potentiel ennemi, une menace pour ma vie, mes valeurs et mes liens.
25 La volonté de déculturation qui attaque les mœurs, les œuvres et les liens vise la destruction des conditions de possibilité d’advenue du Je (P. Aulagnier) et remet en cause la possibilité, le sens et le résultat de l’acculturation subjectivante en détruisant la différenciation des enveloppes et des registres psychiques, la violence agie désorganisant les articulations, volatilisant les intermédiaires et les médiations symboliques contenant la pulsionnalité, produisant de l’impensable et de l’indicible. La culture de la haine se réalise en haine de la culture, le discours opératoire tue la parole, la brutalité meurtrière sidère la pensée. On est ici très au-delà de conflits interculturels, même si, bien entendu, au niveau manifeste, on repère l’opposition entre des civilisations différentes et en rivalité. L’attaque des repères et cadres symboliques par l’obscénité de la violence nue prive les sujets économiquement débordés du recours à leur étayage habituel sur les incorporats culturels qui les identifient et soutiennent et structurent leur pensée. Le choc de l’attentat fracture des liens internes et externes, et produit isolation et isolement des sujets avant qu’un éventuel mouvement de panique ne les amasse en foule ou qu’ils ne puissent se regrouper en une alliance défensive pour faire face.
26 Dans ces situations extrêmes, la violence subie, qui prend toujours pour chacun et pour chaque groupe sa valeur singulière d’après-coup, est à l’origine de désorganisations topiques, de confusion des instances (B. Duez). Le propre de l’état de menace consiste précisément dans l’impossibilité de pouvoir distinguer l’angoisse interne (Angst), la peur devant un danger « réel » (Furcht) et l’effroi de terreur (Schreck) qui menace l’existence du sujet, et le collapsus entre ces trois modalités de menaces est une expérience traumatique pour le psychisme, pour chacun et pour tous. De même, l’indifférence opératoire du terroriste, dans son agir psychopathique, assigne aux victimes tentant de rendre un sens humain au surgissement de la barbarie, la charge de gérer les vécus de honte, de culpabilité et d’effroi dans une obscénalité (B. Duez) aussi destructrice que méconnue.
Memento mori…
« Gott ist tot, Gott bleibt tot, und wir haben Ihn getötet »
(« Dieu est mort, Dieu reste mort, et c’est nous qui L’avons tué ! »)
F. Nietzsche, Also sprach Zarathustra.
« Vanitas vanitatum… »
28 Nous savons désormais que le ciel est vide, que tous les lendemains déchantent, que dans le sauveur se cache le tyran, que les Lumières ont leur part d’ombre, que la raison a sa propre folie, que la démocratie est grosse de potentielles tyrannies, et la science de futures destructions, et que ce n’est pas le bon sens, mais le délire et la perversion qui sont les choses au monde les mieux partagées. Mais que le pire soit toujours le plus sûr ne nous dispense pas d’assumer ce qui dépend de nous, ni de résister aux tentations et aux séductions des régressions meurtrières. Encore convient-il de récupérer la possibilité et le droit de penser dans un contexte dramatique et dramatisé où tous les simplismes incitent à la résignation et à la soumission.
29 La violence meurtrière de l’attentat fanatique vient ébranler les tranquilles certitudes de notre quotidienneté et disqualifie les pactes de déni que la pléonexie consumériste et les idéologies religieuses ou politiques soutiennent pour nous protéger, au-delà de toute castration symbolique, du réel de la mort que le nazi Heidegger, reprenant la tradition métaphysique, avait osé penser comme constitutif de l’humain en tant que « Sein zum Tode ». Ce retour du dénié dans le réel fait à la fois traumatisme et dévoilement. Il offre du même coup, dans la terreur et la douleur, l’occasion de dirimantes prises de conscience, de salutaires réflexions, de nouvelles interprétations. Il oblige à prendre en considération la complexité sans banaliser la barbarie à l’œuvre dans la réalité contemporaine et à restituer à la pensée politique et anthropologique sa nécessaire dynamique dialectique.
30 La violence et la terreur font ressurgir l’inéluctable mortalité du sujet (I. Yalom) comme une menace actuelle que le fantasme de castration, bien entendu toujours actif, ne suffit plus à symboliser, contenir ni éviter. La terreur de l’anéantissement surgissant dans la brutalité du réel de l’inouï et de l’impensable ramène les sujets à l’inéluctable de la condition humaine et d’une finitude qu’aucun déni ne peut plus contenir. L’horreur et la terreur font revenir ce que les idéologies antagonistes s’entendaient, dans leur complicité secrète, à masquer sous leurs promesses paradisiaques, mais, au-delà de la peur et de la sidération, la rencontre de la mort dans la réalité de sa présence dévoile quelque chose de la vérité de la contingence, de la fragilité et du dérisoire de l’existence humaine, mais aussi de la possible résistance du sujet lorsqu’il accepte sa finitude. Confrontés dans l’après-coup aux terreurs de l’infans sans secours ni recours, les sujets dans leurs différences d’histoires et de fantasmatisation, dans la redécouverte de leur commune mortalité, malgré la singularité de leurs réactions, se retrouvent partager la solidarité de l’humaine condition…
31 Ainsi, paradoxalement, l’attentat fait rappel à l’ordre dans le moment même où il crée le chaos et détruit le symbolique. Il engendre la résurrection de ce qu’il veut anéantir, et notamment les résistances et manifestations de solidarité symboliques, d’identifications et d’empathies qu’il voulait effacer de la face du monde. Aussi surdéterminées et ambiguës, éphémères et instrumentalisées soient-elles (« Je suis Charlie ! »), les réactions à la violence fanatique signifient le refus de se soumettre aux logiques de mort dans l’après-coup du drame surgi de nulle part. Malgré tout, il faut reconquérir la part du rêve et reconstruire la pensée d’un avenir possible.
Malgré tout…
32 Le triste constat de la réalité contemporaine est donc à la fois prise de conscience des impasses et du désastre dont le terrorisme intégriste est la conséquence et le révélateur, mais aussi des paradoxes et des contradictions qui détruisent de l’intérieur le travail de la culture avec sa volonté de démocratie, de subjectivation et d’universalité, tel qu’il a pu se développer au cours de l’histoire, à travers et malgré les conflits et les guerres, les luttes idéologiques et politiques, et les antagonismes sociaux et sociétaux. Débordant les schèmes habituels de l’interprétation, parce que symptôme, cause et effet de la civilisation qu’il attaque dans la haine de soi, de l’autre et de toute différence, l’agir terroriste qui fait date pour arrêter l’histoire est dans le même temps, au-delà et grâce à l’effroi qu’il provoque, convocation de la pensée réflexive et prescription de nécessaires transformations. Il oblige à se confronter à la haine de l’autre, mais aussi de soi et en soi, parce qu’il révèle par l’événement qu’il met en scène l’avènement impensé de l’anthropolyse, non point simplement volonté barbare de l’autre, non point simplement mort de l’homme, mais suicide programmé de l’humanité, renonçant à la pensée et au désir par soumission aux mortelles prescriptions de la religion ou du profit. Face à la violence, la terreur et la destructivité, contre les hallucinés des arrière-mondes et les zélateurs du Divin Marché, il appartient à chacun, et à tous, de resituer l’humain à sa juste place et de travailler, dans une résistance critique, à construire et retisser dans l’histoire les liens d’une possible universalité dans le respect des « belles différences » chères à S. Freud.
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Mots-clés éditeurs : Anthropolyse, terreur, état de menace, apocalypse, paranoïa et perversion, retour du dénié, pulsion de mort
Date de mise en ligne : 08/06/2017.
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