Couverture de CIVIT_045

Article de revue

Consécration du jus cogens : un dialogue à raviver entre cours internationale et régionales dans l’œuvre de reconnaissance de droits humains impératifs

Pages 297 à 315

Notes

  • [1]
    V. CDI, Premier rapport sur le jus cogens présenté par Dire Tladi, Rapporteur spécial, Doc. A/CN.4/693, 8 mars 2016, §§ 18-41.
  • [2]
    Sur 85 articles, la CVDT consacre les articles 53 et 64 à la définition générale du jus cogens et les articles 44 § 5, 65, 66 et 71 au régime applicable en cas de violation.
  • [3]
    V. sur ce point C. MIK, “Jus cogens in contemporary international law”, Polish yearbook of international law, vol. 33, 2013, pp. 37-55.
  • [4]
    V.Ann. CDI, 1963, vol. I, p. 68.
  • [5]
    V. A/CONF.39/11, p. 280.
  • [6]
    V. sur ce point C. MAIA, « De l’exclusion des normes protégeant des intérêts purement étatiques du concept de jus cogens », in Mélanges offerts en l’honneur du professeur Rafâa Ben Achour, Konrad-Adenauer-Stiftung, Tunis, 2015, pp. 499-523.
  • [7]
    D’un point de vue méthodologique, l’analyse empirique présentée a porté sur les décisions utilisant l’expression « jus cogens » adoptées par la CIJ et les cours régionales (européenne, africaine et interaméricaine) dans l’exercice de leurs fonctions contentieuse et consultative. Ces décisions ont été identifiées grâce à une recherche par mots-clés sur les sites internet des tribunaux respectifs et ont ensuite été sélectionnées en fonction de leur pertinence, avec une irréductible part d’arbitraire exigée par le souci de concision d’un travail limité.
  • [8]
    CVDT, article 66-a.
  • [9]
    V. A. KACZOROWSKA-IRELAND, « The International Court of Justice’s vision of jus cogens », L’Observateur des Nations Unies, vol. 40, 2016, p. 86 ; C. MAIA, « Le juge international au cœur du dévoilement du droit impératif : entre nécessité et prudence », Revue de droit international de sciences diplomatiques et politiques, vol. 83, 2005, p. 2.
  • [10]
    Charte des Nations Unies, article 92.
  • [11]
    Statut de la CIJ, article 36-2-b.
  • [12]
    CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), arrêt du 27 juin 1986, CIJ Rec., 1986, § 190.
  • [13]
    CIJ, Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie c. Slovaquie), arrêt du 25 septembre 1997, CIJ Rec., 1997, § 112.
  • [14]
    CIJ, Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif du 22 juillet 2010, CIJ Rec., 2010, § 81.
  • [15]
    CIJ, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, § 83.
  • [16]
    CIJ, Détroit de Corfou (Royaume-Uni c. Albanie), arrêt du 9 avril 1949, CIJ Rec., 1949, p. 22.
  • [17]
    CIJ, Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif du 28 mai 1951, CIJ Rec., 1951, p. 23.
  • [18]
    CIJ, Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgique c. Espagne), arrêt du 5 février 1970, CIJ Rec., 1970, § 33.
  • [19]
    Ibid., § 34.
  • [20]
    CIJ, Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, CIJ Rec., 1995, § 29.
  • [21]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt du 11 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, § 31.
  • [22]
    CIJ, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004, CIJ Rec., 2004, § 155.
  • [23]
    V. sur cet aspect C. MAIA, « Jus cogens et (in)application de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 », in T. GARCIA et L. CHAN-TUNG (dir.), La Convention de Vienne sur le droit des traités : bilan et perspectives 50 ans après son adoption, Pedone, Paris, 2019, pp. 57-76.
  • [24]
    CIJ, Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Rwanda), arrêt du 3 février 2006, CIJ Rec., 2006, respectivement §§ 58 et 60.
  • [25]
    Ibid., § 64. Précisons que cette reconnaissance explicite a été facilitée par le départ du juge français Gilbert Guillaume, qui a siégé à la CIJ de 1987 à 2005. On retrouve néanmoins cette position hostile au jus cogens chez d’autres juges français à la CIJ. V. notamment, dans l’arrêt de 2012 sur les Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader, l’opinion individuelle du juge Abraham (§ 27) et l’opinion dissidente du juge ad hoc Sur (§ 4).
  • [26]
    La nature impérative de la prohibition du génocide avait déjà été reconnue par le TPIR. V. Le Procureur c. Clément Kayishema et Obed Ruzindana, affaire n°ICTR-95-1-T, jugement du 21 mai 1999, § 88.
  • [27]
    Dans son opinion individuelle jointe à l’arrêt de 2006, le juge ad hoc Dugard s’étonne que ce premier soutien explicite au jus cogens soit si tardif et estime que le silence prolongé de la CIJ est aggravé par le fait que d’autres juridictions avaient déjà pris l’initiative de reconnaître des normes impératives (§ 5).
  • [28]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt 26 février 2007, CIJ Rec., 2007, § 161.
  • [29]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt 3 février 2015, CIJ Rec., 2015, § 87.
  • [30]
    CIJ, Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c. Sénégal), arrêt du 20 juillet 2012, CIJ Rec., 2012, § 99.
  • [31]
    La nature impérative de la prohibition de la torture avait déjà été reconnue par le TPIY. V. TPIY, Le Procureur c. Anto Furundžija, affaire n° IT-95-17/1-T, jugement du 10 décembre 1998, §§ 153-157.
  • [32]
    CIJ, Droit de passage sur territoire indien (Portugal c. Inde), arrêt du 12 avril 1960, CIJ Rec., 1960, opinion dissidente du juge Fernandes, § 29.
  • [33]
    CIJ, Sud-Ouest africain (Éthiopie c. Afrique du Sud ; Libéria c. Afrique du Sud), arrêt du 18 juillet 1966, CIJ Rec., 1966, opinion dissidente du juge Tanaka, p. 298.
  • [34]
    CIJ, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, déclaration du juge Bedjaoui, § 13.
  • [35]
    CIJ, Plates-formes pétrolières (Iran c. États-Unis d’Amérique), arrêt du 6 novembre 2003, CIJ Rec., 2003, opinion individuelle du juge Simma, § 6.
  • [36]
    CIJ, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis du 9 juillet 2004, CIJ Rec., 2004, opinion individuelle du juge Elaraby, § 3.1.
  • [37]
    CIJ, Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965, avis consultatif du 25 février 2019, CIJ Rec., 2019, déclaration commune des juges Cançado Trindade et Robinson, § 8.
  • [38]
    V. notamment : l’opinion dissidente jointe à l’arrêt du 5 octobre 2016 sur les Obligations relatives à des négociations concernant la cessation de la course aux armes nucléaires et le désarmement nucléaire (Îles Marshall c. Royaume-Uni), §§ 186-187 ; ainsi que l’opinion dissidente jointe à l’arrêt du 3 février 2015 sur l’Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), § 83.
  • [39]
    Une importante dissemblance tient, en particulier, au droit de recours individuel, qui est automatique pour la Cour EDH, facultatif pour la Cour ADHP et exclu pour la Cour IDH.
  • [40]
    Des restrictions aux droits garantis peuvent être introduites par la loi en vue de protéger la sécurité nationale, l’intégrité territoriale ou la sûreté publique. En cas de danger public menaçant la vie de la nation, la suspension de certains droits est également possible dans les systèmes européen et interaméricain. Sur la signification de ces clauses de suspension pour la détermination des normes impératives, v. C. MAIA, « De la signification des clauses de non-dérogation en matière d’identification des droits de l’homme impératifs », in R. BEN ACHOUR et S. LAGHMANI (dir.), Les droits de l’homme : une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Pedone, Paris, 2008, pp. 39-62.
  • [41]
    Le 18 juillet 2018, les présidents respectifs des Cours interaméricaine, européenne et africaine ont signé à San José (Costa Rica), une Déclaration conjointe par laquelle il a été décidé la création d’un Forum permanent du dialogue institutionnel. Le premier forum, qui s’est tenu en 2019 à Kampala (Ouganda), a souhaité consolider le dialogue triangulaire, institutionnellement et jurisprudentiellement, par un partage d’informations et des meilleures pratiques.
  • [42]
    La Cour ADHP a rendu sa première décision en 2009. En date du 31 mars 2020, elle a rendu 90 arrêts et 12 avis, (source : fr.african-court.org).
  • [43]
    Au 30 avril 2020, 30 États seulement ont ratifié le Protocole.
  • [44]
    Sur les 55 États membres de l’Union africaine, 9 ont émis une telle déclaration, parmi lesquels le Bénin et la Côte d’Ivoire qui ont annoncé, respectivement les 24 mars et 28 avril 2020, le retrait de leur déclaration, qui sera effectif dans les 12 mois.
  • [45]
    Commission ADHP, Amnesty International et autres c. Soudan, com. 48/90, 50/91, 52/91, 89/93, 15 novembre 1999, § 42.
  • [46]
    Commission ADHP, Civil Liberties Organisation, Legal Defence Centre, Legal Defence and Assistance Project c. Nigeria, com. 218/98, 7 mai 2001, §§ 26-27.
  • [47]
    Commission ADHP, Open Society Justice Initiative c. Côte d’Ivoire, com. 318/06, 27 mai 2016, § 154. Elle dit clairement adhérer à cette position dans le paragraphe suivant.
  • [48]
    Commission ADHP, Egyptian Initiative for Personal Rights and Interights c. Égypte, com. 334/06, 1er mars 2011, § 110. En note de bas de page 24 sont cités une observation générale du Comité contre la torture et un jugement du TPIY.
  • [49]
    Observation générale n°3 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : le droit à la vie (article 4), 18 novembre 2015, § 5.
  • [50]
    Cette jurisprudence abondante est le reflet d’une charge de travail qui s’est accrue depuis le Protocole n°11 ayant imposé aux États membres la compétence de la Cour, tout en introduisant la possibilité d’un recours individuel direct sans le filtrage de la Commission, réforme qui a été suivie par un élargissement géographique du Conseil de l’Europe.
  • [51]
    Résultat issu d’une recherche de l’expression « jus cogens » dans la base de données de la jurisprudence de la Cour EDH concernant les arrêts et avis en anglais, (echr.coe.int, consulté le 30 avril 2020).
  • [52]
    Cour EDH, Ringeisen c. Autriche, req. n°2614/65, arrêt du 16 juillet 1971, opinion séparée du juge Verdross (« les règles du droit international général concernant l’épuisement des voies de recours internes ne font pas partie du jus cogens »).
  • [53]
    V. notamment : McElhinney c. Irlande, req. n° 31253/96, arrêt du 21 novembre 2001, opinion dissidente du juge Loucaides ; Fogarty c. Royaume-Uni, req. n°37112/97, arrêt du 21 novembre 2001, opinion concordante des juges Caflisch, Costa et Vajić.
  • [54]
    Cour EDH, Al-Adsani c. Royaume-Uni, req. n° 35763/97, arrêt du 21 novembre 2001, § 60.
  • [55]
    La Cour EDH fait toutefois remarquer que, contrairement aux affaires Furundžija et Pinochet, n’est pas ici en cause la responsabilité pénale d’un individu, mais l’immunité dont un État continue à jouir face aux juridictions d’un autre État où des actions civiles seraient engagées sur le fondement d’actes de torture allégués (ibid., § 61).
  • [56]
    V. Cour EDH, Naït-Liman c. Suisse, req. n°51357/07, arrêt du 15 mars 2018, § 129 ; Othman (Abu Qatada) c.Royaume-Uni, req. n° 8139/09, arrêt du 17 janvier 2012, § 266 ; Volodina c. Russie, req. n° 41261/17, arrêt du 9 juillet 2019, § 8.
  • [57]
    V. Cour EDH, Jorgic c. Allemagne, req. n° 74613/01, arrêt du 12 juillet 2007, § 68 (la prohibition du génocide « relève du jus cogens », sans référence à d’autres décisions) ; Vasiliauskas c. Lituanie, req. n°35343/05, arrêt du 20 octobre 2015, § 113 (avec des références à la CIJ et au TPIR).
  • [58]
    Cour EDH, Ilnseher c. Allemagne, req. n° 10211/12 et 27505/14, arrêt du 4 décembre 2018, § 75.
  • [59]
    Cour EDH, Naït-Liman c. Suisse, req. n° 51357/07, arrêt du 21 juin 2016, §§ 45 et 50.
  • [60]
    V. notamment Cour EDH, Sargsyan c. Azerbaijan, req. n° 40167/06, arrêt du 16 juin 2015, opinion dissidente du juge Pinto de Albuquerque, § 21. V. également : Al-Dulimi et Montana Management Inc. c. Suisse, req. n° 5809/08, arrêt du 21 juin 2016, opinion concordante du juge Pinto de Albuquerque, à laquelle se rallient les juges Hajiyev, Pejchal et Dedov, §§ 34-35 ; Naït-Liman c. Suisse, req. n° 51357/07, arrêt du 21 juin 2016, opinion dissidente commune des juges Karakaş, Vučinić et Kūris, § 2.
  • [61]
    V. notamment Cour EDH, Jones et autres c. Royaume-Uni, req. n° 34356/06 et 40528/06, 14 janvier 2014, §§ 166 et 172 (notion utilisée par les requérants) ; Al-Dulimi et Montana Management Inc. c. Suisse, req. n° 5809/08, arrêt du 21 juin 2016 (notion utilisée par les gouvernements français et britannique autorisés à intervenir dans la procédure).
  • [62]
    V. notamment Cour EDH, Marguš c. Croatie, req. n° 4455/10, arrêt du 27 mai 2014 (§§ 57 ss) et Marguš c. Croatie, req. n° 4455/10, arrêt du 13 novembre 2012 (§§ 34 ss), où la Cour EDH cite des extraits de plusieurs décisions de la Commission et de la Cour IDH.
  • [63]
    T. GROPPI et A.M. LECIS COCCO-ORTU, « Les références mutuelles entre la Cour européenne et la Cour interaméricaine des droits de l’homme : de l’influence au dialogue ? », in L.-R. BASTA FLEINER et T. MARINKOVIC (dir.), Key developments in constitutionalism and constitutional law, Eleven International Publishing, La Haye, 2014, p. 187, note 48.
  • [64]
    L. HENNEBEL, « La Cour interaméricaine des droits de l’homme : entre particularisme et universalisme », in L. HENNEBEL et H. TIGROUDJA (dir.), Le particularisme interaméricain des droits de l’homme, Pedone, Paris, 2009, p. 620.
  • [65]
    Au 31 mai 2020, la Cour IDH a rendu 402 arrêts et 26 avis (source : www.corteidh.or.cr). Pour une analyse de cette jurisprudence, v. E. SALMÓN, Jurisprudencia de la Corte Interamericana de Derechos Humanos, Editorial Universidad del Rosario, Bogota, 2011. Sur certaines de ses spécificités, v. C. MAIA, « Le jus cogens dans la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme », in L. HENNEBEL et H. TIGROUDJA (dir.), Le particularisme interaméricain (…), op. cit., pp. 271-311.
  • [66]
    Cour IDH, Informes de la Comisión Interamericana de Derechos Humanos (Art. 51 Convención Americana sobre Derechos Humanos), avis consultatif OC-15/97 du 14 novembre 1997, Série A n° 15, § 16.
  • [67]
    Cour IDH, “Niños de la calle” (Villagrán Morales y otros) c. Guatemala, arrêt du 19 novembre 1999, Série C n° 63, §§ 139 et 144.
  • [68]
    Cour IDH, Hermanas Serrano Cruz c. El Salvador, arrêt du 23 novembre 2004, Série C n° 118, § 56.
  • [69]
    Cour IDH, Aloeboetoe y otros c. Suriname, arrêt du 10 septembre 1993, Série C n° 15, § 57.
  • [70]
    Cour IDH, Maritza Urrutia c. Guatemala, arrêt du 27 novembre 2003, Série C n° 103, § 92.
  • [71]
    Cour IDH, Hermanos Gómez Paquiyauri c. Pérou, arrêt du 8 juillet 2004, Série C n° 110, § 76.
  • [72]
    Cour IDH, Caesar c. Trinité-et-Tobago, arrêt du 11 mars 2005, Série C n° 123, § 100.
  • [73]
    Cour IDH, Goiburú y otros c. Paraguay, arrêt du 22 septembre 2006, Série C n° 153, §§ 84 et 131 ; Zambrano Vélez y otros c. Équateur, arrêt du 4 juillet 2007, Série C n° 166, § 96 ; La Cantuta c. Pérou, arrêt du 29 novembre 2006, Série C n° 162, §§ 157 et 160.
  • [74]
    Cour IDH, Condición jurídica y derechos de los migrantes indocumentados, avis consultatif OC-18/03 du 17 septembre 2003, Série A n°18, §§ 100-101 ; Masacre de Mapiripán c. Colombie, arrêt du 15 septembre 2005, Série C n° 134, § 178 ; Servellón García y otros c. Honduras, arrêt du 21 septembre 2006, Série C n° 152, § 94 ; Yatama c. Nicaragua, arrêt du 23 juin 2005, Série C n° 127, § 184.
  • [75]
    Cour IDH, Almonacid Arellano y otros c. Chili, arrêt du 26 septembre 2006, Série C n° 154, § 99 ; La Cantuta c. Pérou, arrêt du 29 novembre 2006, Série C n° 162, § 157.
  • [76]
    Cour IDH, Azul Rojas Marín y otra c. Pérou, arrêt du 12 mars 2020, Série C n° 402, § 140 ; Valenzuela Ávila c. Guatemala, arrêt du 11 octobre 2019, Série C n° 386, § 180.
  • [77]
    Cour IDH, García y familiares c. Guatemala, arrêt du 29 novembre 2012, Série C n° 258, § 96 ; Osorio Rivera y familiares c. Pérou, arrêt du 26 novembre 2013, Série C n°274, § 112 ; Rochac Hernández y otros c. El Salvador, arrêt du 14 octobre 2014, Série C n° 285, § 92.
  • [78]
    Cour IDH, Miembros de la aldea Chichupac y comunidades vecinas del municipio de Rabinal c. Guatemala, arrêt du 30 novembre 2016, Série C n° 328, § 216 ; Trabajadores de la Hacienda Brasil Verde c. Brésil, arrêt du 20 octobre 2016, Série C n° 318, §§ 412-413.
  • [79]
    Cour IDH, López Soto y otros c. Venezuela, arrêt du 26 septembre 2018, Série C n° 362, § 176.
  • [80]
    Cour IDH, Gutiérrez Hernández y otros c. Guatemala, arrêt du 24 août 2017, Série C n° 339, § 150 ; Identidad de género, e igualdad y no discriminación a parejas del mismo sexo, avis consultatif OC-24/17 du 24 novembre 2017, Série A n° 24, § 61.
  • [81]
    Cour IDH, Derechos y garantías de niñas y niños en el contexto de la migración y/o en necesidad de protección internacional, avis consultatif OC-21/14 du 19 août 2014, Série A n° 21, § 225.
  • [82]
    Cour IDH, La institución del asilo y su reconocimiento como derecho humano en el sistema interamericano de protección, avis consultatif OC-25/18 du 30 mai 2018, Série A n°25, § 98.
  • [83]
    Cour IDH, Mujeres víctimas de tortura sexual en Atenco c. Mexique, arrêt du 28 novembre 2018, Série C n° 371, § 178 ; Herzog y otros c. Brésil, arrêt du 15 mars 2018, Série C n° 353, § 220.
  • [84]
    Cour IDH, Omeara Carrascal y otros c. Colombie, arrêt du 21 novembre 2018, Série C n° 368, § 192.
  • [85]
    On peut également observer que si les TPI se réfèrent fréquemment à la jurisprudence de la Cour EDH et de la Cour IDH, la réciproque ne se vérifie pas.
  • [86]
    CIJ, Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, CIJ Rec., 1995, opinion dissidente du juge Skubiszewski, § 46.

1D’origine lointaine [1], la notion de jus cogens ou de norme impérative a été consacrée en droit positif en 1969, au terme des travaux de la Commission du droit international (CDI), avec l’adoption de la Convention de Vienne sur le droit des traités (CVDT). Instrument de codification en matière de traités entre États, la CVDT dédie plusieurs dispositions au jus cogens, dont les deux dispositions centrales, les articles 53 et 64, donnent une définition générale centrée sur sa fonction d’indérogeabilité et son effet de nullité [2].

2Il ressort de ces dispositions qu’une norme impérative se distingue d’une norme ordinaire ou dispositive par certaines caractéristiques : il s’agit d’abord d’une norme qui n’admet aucune dérogation sous peine de nullité absolue ; il s’agit ensuite d’une norme de droit positif, acceptée et reconnue par la communauté internationale des États dans son ensemble, pouvant être altérée par une nouvelle norme de droit international général de même nature.

3En revanche, il ne ressort pas de ces dispositions un critère d’identification permettant de matérialiser avec un degré suffisant de précision de telles normes [3]. Si tel n’était pas le mandat de la CDI, une définition aussi générale revenait à prévoir une sanction pour une infraction imprécisément déterminée et engendrait un sentiment d’insécurité juridique auprès des destinataires de telles normes que sont les États.

4À défaut d’une définition plus précise, plusieurs exemples ont été avancés tant au sein de la CDI [4] que lors de la Conférence de Vienne (1968-1969) [5]. S’agissant de normes s’apparentant à des normes constitutionnelles au sens matériel, fondées sur l’exigence de prévalence des intérêts collectifs de la communauté internationale sur les intérêts individuels des États [6], il est rapidement apparu que cette notion recouvrait divers droits humains en raison de leur importance essentielle. Toutefois, les rédacteurs de la CVDT ont estimé préférable d’écarter l’élaboration d’une liste d’exemples, pour éviter de figer une notion par essence évolutive, et d’attendre que le contenu de ces normes soit dévoilé par la pratique des États et des tribunaux internationaux.

5Sur le plan de la pratique étatique, les États n’ont guère participé au dévoilement du jus cogens. Avant comme après 1969, c’est avec parcimonie qu’ils qualifient d’impératives les normes qu’ils appliquent. Sur le plan de la pratique jurisprudentielle, sans prétendre à l’exhaustivité, les résultats d’une recherche empirique [7] démontrent que certains droits humains ont été reconnus comme impératifs par les juridictions, aussi bien internationale que régionales. Ces juridictions, formellement indépendantes les unes des autres n’ont, en la matière, pas engagé de réelle dynamique de dialogue par des références croisées à leurs décisions qui auraient pu venir affermir la consécration du jus cogens ou apporter des précisions quant à sa substance, sa portée ou ses effets.

6Alors que la CVDT désignait la Cour internationale de Justice (CIJ) comme la juridiction compétente pour tout litige portant sur l’application ou l’interprétation du jus cogens[8], en raison de l’autorité de sa jurisprudence sur le développement du droit international, il n’y a pas eu de centralisation de l’identification des normes impératives par le juge international, celui-ci demeurant prudent et totalement autocentré (I). Il y a eu plutôt un mouvement de décentralisation dans lequel se sont inscrits les juges régionaux, qui ont oeuvré de manière contrastée et amplement autocentrée à la matérialisation des normes impératives (II).

I – Une consécration du jus cogens prudente et totalement autocentrée par la Cour internationale de justice

7Lors de la Conférence de Vienne, les débats ayant entouré la reconnaissance du jus cogens ont rapidement révélé la nécessité d’une détermination objective de son contenu par le juge international, conduisant même plusieurs États à conditionner leur acceptation de la CVDT à l’établissement d’un lien entre cette notion et la CIJ.

8Mettre la CIJ au cœur du mécanisme de garantie des normes impératives présente plusieurs avantages [9]. Établie par la Charte des Nations Unies, c’est « l’organe judiciaire principal » de l’ONU [10]. Contrairement aux juridictions spécialisées d’autres organisations internationales dont le champ opératoire est borné par leur acte constitutif, la CIJ est la seule qui cumule une compétence universelle, puisque tous les membres de l’ONU sont parties à son Statut annexé à la Charte, et une compétence générale, puisqu’elle est amenée à rendre des décisions obligatoires et définitives pour les parties pouvant concerner « tout point de droit international » [11]. Malgré cette position privilégiée dans l’ordonnancement international, la CIJ a été lente à consacrer le jus cogens. Suivant une stratégie générale de contournement (A), ses prises de position en la matière, tardives et restreintes, ont été réalisées au terme d’un monologue (B).

A – Une stratégie générale de contournement

9En raison d’un système de juridiction facultative fondé sur le consensualisme, qui commande de ne pas déplaire ou effrayer les États avec une notion pouvant apparaître trop révolutionnaire, la CIJ a mis en place une stratégie générale de contournement. Une telle stratégie conservatrice, qui ressort clairement de sa jurisprudence, vise à éviter toute prise de position explicite sur la nature des normes appliquées, ce qui se manifeste de diverses façons.

10Tout d’abord, la CIJ relaye la voix d’autres acteurs sans trancher elle-même la question du jus cogens. Ainsi, lors de sa première évocation directe du droit impératif dans l’arrêt de 1986 relatif aux Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua, la CIJ relève que les États désignent souvent la prohibition de l’emploi de la force comme un « principe fondamental ou essentiel », elle cite un passage des travaux de la CDI qualifiant cette prohibition comme un « exemple frappant » de norme impérative, et constate que les parties au différend admettent cette nature impérative, sans pour autant reprendre ce qualificatif à son compte [12].

11Ensuite, la CIJ ne se réfère au jus cogens que là où cette question n’a pas d’incidence dans l’affaire jugée. En ce sens, dans l’arrêt Projet Gabčíkovo-Nagymaros de 1997, la CIJ déclare :

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« Aucune des Parties n’a prétendu que des normes impératives du droit de l’environnement soient nées depuis la conclusion du traité [litigieux] et la Cour n’aura par suite pas à s’interroger sur la portée de l’article 64 de la Convention de Vienne sur le droit des traités » [13].

13C’est ici en toute quiétude que la CIJ fait cette mention, la validité du traité en cause à l’aune du jus cogens étant écartée, car sans objet dans le cas d’espèce. De même, dans son avis de 2010 sur la Déclaration d’indépendance du Kosovo, la CIJ rappelle la condamnation par le Conseil de sécurité de certaines déclarations d’indépendance, tout en précisant que leur illicéité découlait du fait qu’elles « allaient ou seraient allées de pair avec un recours illicite à la force ou avec d’autres violations graves de normes de droit international général, en particulier de nature impérative (jus cogens) » [14]. Toutefois, cette reconnaissance de l’existence du jus cogens est d’autant plus inoffensive qu’elle ne s’accompagne pas de l’identification d’une norme spécifique.

14La CIJ esquive encore la difficulté de la matérialisation des normes impératives en faisant une interprétation restrictive des problèmes soulevés dans les affaires qui lui sont soumises. Son avis de 1996 sur la Licéité des armes nucléaires est symptomatique de cette autolimitation. Dans cette espèce, la CIJ reconnaît comme « cardinaux » et « intransgressibles » certains principes du droit international humanitaire – à savoir la protection de la population et des biens civils et la prohibition de l’usage d’armes causant des maux superflus. Elle consacre toutefois un paragraphe entier à justifier son refus de se prononcer sur la nature impérative des règles de droit humanitaire, cette question allant au-delà de la demande d’avis formulée [15].

15Enfin, la CIJ évite de prononcer l’expression taboue « jus cogens », préférant des notions édulcorées à la notion originale. En ce sens, il est fréquent qu’elle reste à la lisière de l’impérativité en soulignant la nature fondamentale, cardinale, intransgressible ou erga omnes de certaines normes ou obligations. Cette pratique est ancienne et date de bien avant la consécration du jus cogens en droit positif. Ainsi, dès son premier arrêt de 1949, Détroit de Corfou, la CIJ affirme l’existence de « considérations élémentaires d’humanité, plus absolues encore en temps de paix qu’en temps de guerre », admettant par là même le caractère absolu de certains principes généraux du droit humanitaire [16]. Cette valorisation normative se retrouve dans l’avis de 1951 sur les Réserves à la Convention sur le génocide, où la CIJ insiste sur le « but purement humain et civilisateur » de la convention en cause, proclamant qu’

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« [o]n ne peut même pas concevoir une convention qui offrirait à un plus haut degré ce double caractère, puisqu’elle vise d’une part à sauvegarder l’existence même de certains groupes humains, d’autre part à confirmer et à sanctionner les principes de morale les plus élémentaires » [17].

17Par ailleurs, l’année suivant l’adoption de la CVDT a été marquée par la reconnaissance du concept d’obligations erga omnes, lequel entretient une connexité étroite avec le jus cogens. Dans son arrêt Barcelona Traction, la CIJ affirme que doivent être distinguées les obligations bilatérales et les obligations des États envers la communauté internationale. C’est en raison de « l’importance des droits en cause » que les obligations générées sont erga omnes, autrement dit « tous les États peuvent être considérés comme ayant un intérêt juridique à ce que ces droits soient protégés » [18], illustrant son propos par des exemples de normes généralement tenues pour impératives, à savoir :

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« la mise hors la loi des actes d’agression et du génocide mais aussi des principes et des règles concernant les droits fondamentaux de la personne humaine, y compris la protection contre la pratique de l’esclavage et la discrimination raciale » [19].

19La consécration de l’existence d’obligations erga omnes ne restera pas isolée. Par la suite, elle sera notamment réitérée : dans l’arrêt de 1995 sur le Timor oriental concernant le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes [20] ; dans l’arrêt de 1996 relatif à l’Application de la Convention sur le génocide concernant l’interdiction du génocide [21] ; ou encore dans l’avis de 2004 sur le Mur dans le territoire palestinien occupé concernant l’autodétermination des peuples et les obligations découlant du droit international humanitaire [22].

B – Des prises de position tardives et restreintes

20Non seulement la CIJ évite de se prononcer sur la question du jus cogens, mais ses prises de position ont été tardives.

21Outre la réticence tenace de la CIJ, cette tardivité se doit aussi sans doute au fait que les États, en raison des incertitudes sur la substance du jus cogens, se sont abstenus de la saisir concernant l’application et l’interprétation des articles 53 ou 64 de la CVDT. À notre connaissance, avant ou après 1969, aucun traité n’a jamais été annulé sur la base de sa violation d’une norme impérative [23].

22Si la CIJ n’est pas restée silencieuse sur le sujet, c’est essentiellement en dehors de la sphère conventionnelle qu’elle a consacré la notion. Toutefois, ses prises de position demeurent restreintes puisque, à ce jour, seules deux normes ont été admises comme impératives.

23Ce n’est qu’en 2006 que la CIJ reconnaît pour la première fois une norme impérative dans son arrêt relatif aux Activités armées sur le territoire du Congo. Dans cette affaire, la République démocratique du Congo (RDC) avait déposé une requête contre le Rwanda en raison de violations massives et graves des droits de l’homme et du droit international humanitaire découlant des actes d’agression armée qui auraient été perpétrés par le Rwanda sur le territoire congolais. En l’espèce, le consensus des États quant à la qualification impérative de la prohibition du génocide a certainement facilité sa consécration par le juge international. D’un côté, la RDC soulignait « la reconnaissance du caractère de jus cogens à l’interdiction du génocide par la doctrine et par la jurisprudence récentes », de l’autre, le Rwanda admettait que « les normes codifiées par les dispositions de fond de la Convention sur le génocide [o]nt le statut de jus cogens et créent des droits et obligations erga omnes » [24]. C’est donc sans risque de contestation que la CIJ fait sienne cette qualification.

24Alors qu’on aurait pu s’attendre à ce que cette première consécration s’accompagne de certains développements, la CIJ procède par pure affirmation. La nature impérative semble s’imposer d’elle-même comme une évidence, puisque tel est « assurément le cas de l’interdiction du génocide », ce qui dispense de toute démonstration [25]. De même, alors que, pour conforter sa prise de position, on aurait pu s’attendre à des références à d’autres organes juridictionnels ou quasi-juridictionnels, notamment au Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) [26], la CIJ procède dans un total isolationnisme [27].

25Si on considère que la motivation des décisions judiciaires a comme objectif principal de persuader leurs destinataires, à savoir les États, on ne peut guère dire qu’elle soit ici convaincante. C’est pourtant de la même manière que la CIJ réaffirme l’impérativité de la prohibition du génocide en 2007, lorsqu’elle réitère que « la norme interdisant le génocide constitu[e] assurément une norme impérative du droit international (jus cogens) » [28], puis en 2015, lorsqu’elle rappelle que « l’interdiction du génocide revê[t] le caractère d’une norme impérative (jus cogens) » [29].

26Outre l’interdiction du génocide, la prohibition de la torture est une deuxième norme qualifiée d’impérative par la CIJ dans son arrêt de 2012 sur les Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader. Cette fois, si la consécration du jus cogens s’accompagne de développements visant à démontrer la pratique générale et la conviction des États au sujet du caractère fondamental d’une telle norme [30], à nouveau, nulle référence n’est faite à d’autres décisions juridictionnelles ou quasi-juridictionnelles, notamment au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) [31].

27Il est intéressant de relever que cette modération de la CIJ contraste fortement avec la hardiesse des juges. Ceux-ci, tant dans leurs déclarations que dans leurs opinions individuelles et surtout dissidentes, n’hésitent pas à prendre position sur la nature impérative des règles pertinentes pour les affaires jugées. Qu’il s’agisse, entre autres, du juge Fernandes dans l’arrêt du Droit de passage sur territoire indien de 1960 affirmant l’existence de « règles du ius cogens auxquelles il ne saurait être dérogé par une pratique particulière » [32], du juge Tanaka dans l’arrêt du Sud-Ouest africain de 1966 défendant qu’« il n’y a pas de doute que l’on peut considérer le droit relatif à la protection des droits de l’homme comme relevant du jus cogens » [33], du juge Bedjaoui dans l’avis sur la Licéité de l’emploi d’armes nucléaires de 1996 soulignant la transformation de la physionomie de la société internationale contemporaine où les règles de jus cogens participent à une conception plus objectiviste du droit international [34], des juges Simma [35] et Elaraby [36] respectivement dans l’arrêt des Plates-formes pétrolières de 2003 et l’avis sur le Mur dans le territoire palestinien occupé de 2004 regrettant que la CIJ n’ait pas qualifié d’impérative la prohibition de l’usage de la force armée, ou des juges Robinson et Cançado Trindade dans l’avis sur l’Archipel des Chagos de 2019 déplorant que la CIJ n’ait pas reconnu l’impérativité du droit des peuples à l’autodétermination [37], la notion de jus cogens a toujours été présente dans l’esprit des juges.

28Le juge Cançado Trindade, en particulier, après avoir impulsé une dynamique au jus cogens comme juge et président à la Cour interaméricaine, poursuit cette dynamique depuis 2009 à la CIJ, où il continue à développer et à défendre la notion dans ses opinions, dans lesquelles il cite les décisions d’autres organes, qu’il s’agisse de la Cour interaméricaine des droits de l’homme (Cour IDH), la Cour européenne des droits de l’homme (Cour EDH), la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples (Commission ADHP), ou encore le Comité des droits de l’homme [38].

29Certes, les positions des juges n’ont pas vocation à refléter la position officielle de la CIJ, dont la jurisprudence présente un bilan extrêmement modeste en matière de consécration du jus cogens, puisqu’elle n’a ni contribué à en déterminer plus précisément la substance ou les effets, ni été l’occasion de renvois à d’autres organes. Néanmoins, la fréquence des références parmi les juges laisse augurer la possibilité, dans l’avenir, de développements plus audacieux qui la sortiraient de son isolement.

II – Une consécration du jus cogens contrastée et amplement autocentrée par les cours régionales

30Les cours européenne, interaméricaine et africaine sont des juridictions autonomes créées au sein d’une organisation régionale, dont l’objectif est d’assurer le respect des conventions des droits humains respectives et de déterminer, dans les affaires qui leur sont soumises, d’une façon subsidiaire par rapport aux tribunaux nationaux, si un État est responsable de violations des droits consacrés régionalement et, dans l’affirmative, d’ordonner une réparation.

31En dépit de dissemblances liées à leur origine et évolution historique [39], les systèmes de protection des droits humains européen, interaméricain et africain sont relativement proches par les textes que les cours régionales sont appelées à protéger et par les garanties prévues [40].

32Des échanges informels, tels que rencontres ou visites, ont donné lieu à ce qu’on a appelé un processus de fertilisation croisée ou réciproque, particulièrement entre les Cours européenne et interaméricaine, en raison de leur plus grande ancienneté et de l’inspiration que la juridiction interaméricaine a traditionnellement trouvée chez sa consœur européenne [41].

33En matière de jus cogens, cependant, les cours régionales se distinguent par des jurisprudences contrastées, qui vont de la frilosité pour les juges africain et européen (A) au dynamisme pour le juge interaméricain (B). Si ce contraste doit en partie sa raison d’être aux affaires qui leur parviennent, il est indéniable également que ces cours régionales ont développé, au gré d’un dialogue largement moribond, une politique judiciaire plus ou moins active.

A – La frilosité des juges africain et européen

34Des trois systèmes régionaux de protection des droits humains, le système africain est celui dont la jurisprudence est la plus récente et la moins étoffée [42].

35La Cour africaine des droits de l’homme et des peuples (Cour ADHP) a été créée par le Protocole relatif à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (Charte ADHP) portant création d’une Cour africaine, adopté en 1998 par la Conférence des chefs d’État et de gouvernement de l’Organisation de l’unité africaine et entré en vigueur en 2004 [43]. En vertu du Protocole, la Cour ADHP peut statuer sur les requêtes qui lui sont soumises soit par la Commission ADHP ou par les États parties au Protocole, soit par des organisations intergouvernementales africaines, soit encore par les organisations non gouvernementales jouissant du statut d’observateur auprès de la Commission ADHP et les individus ressortissants des États ayant émis une déclaration spéciale d’acceptation de la compétence de la Cour ADHP à cet effet [44].

36Pour l’heure, aucune affaire n’a donné lieu à une consécration explicite de normes impératives par la Cour ADHP. Et il est à craindre que le retrait, en 2020, de la déclaration d’accès direct au prétoire aux organisations non gouvernementales et aux individus par le Bénin et la Côte d’Ivoire n’encourage guère la Cour ADHP à avoir des positions audacieuses en la matière, le jus cogens pouvant être perçu comme attentatoire aux souverainetés étatiques.

37On trouve, toutefois, quelques éléments du côté de la Commission ADHP, qui attestent que la notion n’est pas inconnue du système africain.

38Tout d’abord, il faut noter qu’à la différence des principaux traités de protection des droits humains (aux niveaux européen, américain et international avec le Pacte international sur les droits civils et politiques), la Convention ADHP ne contient pas de « clause de dérogation » permettant la suspension de certains droits pour faire face à une situation d’urgence nationale ou de circonstances exceptionnelles. Loin d’être un oubli, l’objectif est d’affirmer le respect des droits humains non seulement en temps de paix mais aussi en temps de crise, fréquent sur le continent africain. Cette singularité fait l’objet d’une application stricte de la part de la Commission ADHP, dont la jurisprudence rappelle régulièrement que la Charte ADHP, dans son ensemble, reste en vigueur quelles que soient les circonstances.

39Pour autant, les droits de la Charte ADHP ne sont pas tous absolus, puisque certains contiennent des clauses limitatives permettant des restrictions justifiées par des considérations d’ordre public. En ce sens, en 1999, la Commission ADHP a affirmé dans l’affaire Amnesty International et autres c. Soudan l’existence de « droits dits intangibles ou auxquels l’on ne peut pas déroger » [45]. Si la Commission ADHP ne précise pas de quels droits il s’agit, l’intangibilité et l’indérogeabilité nous rapprochent de l’impérativité.

40En 2001, la Commission ADHP a également considéré que certaines des garanties concernant le droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue revêtent un caractère indérogeable, en tant que protection minimale des citoyens soumis à des régimes militaires anti-démocratiques [46]. Là encore, la terminologie est proche de la notion de jus cogens.

41Dans d’autres affaires, la Commission ADHP fait une consécration plus explicite. Ainsi, en 2006, dans l’affaire Open Society Justice Initiative c. Côte d’Ivoire, où le plaignant alléguait une violation de l’égalité devant la loi et de l’égale protection de la loi, la Commission ADHP se réfère à la jurisprudence de la Cour IDH pour admettre, avec elle, la nature impérative des droits en cause :

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« la Commission relève une interconnexion intrinsèque entre l’égalité devant la loi et l’égale protection de la loi, d’une part, et le droit à la jouissance sans discrimination des droits garantis par la Charte, d’autre part. Il ne s’agit pas d’une interdépendance spécifique à la Charte africaine. De manière notable, la Cour interaméricaine des droits de l’homme fusionne ces trois prérogatives juridiques et les traite comme un principe unique. Dans son avis juridique OC-18 du 17 septembre 2003, la Cour conclut que ‘le principe d’égalité devant la loi, de l’égale protection de la loi et de la non-discrimination est une norme de jus cogens parce que l’ensemble de la structure juridique de l’ordre public national et international repose sur ce principe qui transcende toute norme’ » [47].

43La consécration du jus cogens demeure néanmoins laborieuse. En 2011, dans l’affaire Egyptian Initiative for Personal Rights and Interights c. Égypte, la Commission ADHP se contente d’énoncer que les plaignants soutiennent que l’interdiction de la torture est une norme impérative [48]. Alors que la Commission ADHP dispose de plusieurs précédents qu’elle connaît, puisque cités en note de bas de page, elle ne reprend pourtant pas à son compte le qualificatif.

44En 2015, ce n’est pas par la voie jurisprudentielle, mais par la voie de son observation générale n° 3, que la Commission ADHP reconnaît comme norme impérative « universellement contraignante en tout temps » le droit de ne pas être arbitrairement privé de sa vie [49], selon une vision large et similaire à celle de la Cour IDH, sans toutefois que celle-ci soit citée.

45Le bilan du système africain en matière de consécration du jus cogens est donc plutôt mince. On pourrait y voir la conséquence d’institutions encore jeunes. Or, on parvient au même constat pour le système européen plus ancien.

46Instituée en 1959, la Cour EDH est une juridiction régionale compétente pour statuer sur des requêtes individuelles ou étatiques alléguant des violations des droits énoncés par la Convention EDH de 1950 et ses Protocoles adoptés sous l’égide du Conseil de l’Europe regroupant 47 États membres. En plus de 60 ans d’existence, la Cour EDH a rendu plusieurs milliers arrêts [50]. Or, l’expression « jus cogens » n’apparaît dans aucun avis consultatif et seulement dans 36 arrêts [51], la plupart du temps dans les opinions des juges, par le biais de la citation des arguments des parties ou d’arrêts antérieurs, ce qui rend la consécration de la notion dans la jurisprudence européenne très ténue, au surplus d’être tardive.

47La première référence au jus cogens y apparaît en 1971, soit deux ans après sa consécration par la CVDT, mais uniquement sous la plume d’un juge dans son opinion séparée et de manière anodine [52]. À partir de 2001, on retrouvera l’expression sous la plume d’autres juges, sans toutefois l’identification d’une norme spécifique [53].

48Ces prises de position ont certainement favorisé la reconnaissance du jus cogens par la Cour EDH elle-même en 2001. C’est effectivement cette année-là qu’elle admet, dans l’arrêt Al-Adsani c. Royaume-Uni, que la prohibition de la torture est une norme impérative. Précédemment, une telle qualification avait déjà été opérée dans deux affaires auxquelles elle se réfère : en 1998, dans l’arrêt Furundžija rendu par le TPIY, première juridiction à s’être emparée du pouvoir d’identifier des normes de jus cogens, mais aussi en 1999, dans l’arrêt Pinochet rendu par la Chambre des Lords britannique [54]. C’est « sur la foi de ces précédents jurisprudentiels » que la Cour EDH reconnaît que « l’interdiction de la torture est devenue une règle impérative » [55].

49L’impérativité de la prohibition de la torture sera confirmée par la suite [56]. Cependant, l’œuvre de matérialisation du jus cogens demeure modeste. En effet, si la reconnaissance de la notion ne fait plus de doute dans la jurisprudence européenne, les normes qualifiées d’impératives sont peu nombreuses, avec la reconnaissance postérieure de la prohibition du génocide en 2007 [57] et du principe de légalité en droit pénal en 2012 [58].

50Par ailleurs, sans doute en raison de son ancienneté, qui lui a permis de se doter d’un patrimoine de précédents propres, les références extra-systémiques demeurent occasionnelles et, lorsqu’elles existent, visent à entériner une vision restrictive de la notion. Par exemple, dans l’arrêt de 2016 Naït-Liman c. Suisse, la Cour EDH cite les arrêts de la CIJ de 2006 et 2012, reconnaissant l’impérativité respectivement de la prohibition du génocide et de la torture, pour suivre un raisonnement selon lequel les normes substantielles et les normes procédurales ne se situent pas sur le même plan, si bien que les premières (même impératives) n’entrent pas en conflit avec les secondes (dont l’immunité étatique) [59].

51La timidité de la Cour EDH contraste avec l’audace manifestée dans la jurisprudence récente non seulement par certains juges dans leurs opinions, spécialement le juge portugais Pinto de Albuquerque [60], mais également par des parties ou des intervenants tiers, qui utilisent plus volontiers le jus cogens afin d’accepter ou rejeter cette qualification pour certaines normes [61].

52En réalité, le contingent très étroit d’arrêts de la Cour EDH citant les références d’autres organes juridictionnels ou quasi-juridictionnels, et tout particulièrement de sa consœur interaméricaine, suit, en matière de jus cogens, la tendance générale. Longtemps, la relation entre ces deux cours a été à sens unique, seule la Cour IDH citant copieusement la Cour EDH. À partir des années 2000, les citations sont devenues réciproques : d’un côté, sous l’effet de l’élargissement du Conseil de l’Europe à de nouvelles démocraties connaissant d’importants manquements et conduisant à une augmentation des requêtes, la Cour EDH a commencé à se référer à la Cour IDH [62] qui dispose d’une jurisprudence avancée en matière de violations massives ; d’un autre côté, la Cour IDH, confrontée au fil du temps à des démocraties mieux établies où sont commises des violations plus ponctuelles, continue de se référer à la Cour EDH dont la jurisprudence est plus ancienne. Toutefois, la Cour EDH demeure fondamentalement « [u]ne Cour chez laquelle le ‘looking down’ – aux solutions et pratiques des États membres – l’emporte sur le ‘looking up’ – à la dimension internationale de la protection des droits » [63]. Contrairement à ses homologues régionales, qui peuvent interpréter tout instrument de droits humains s’appliquant dans la région, la Cour EDH tend à élaborer un ordre jurisprudentiel autonome, cultivant une perspective essentiellement régionaliste fondée sur les textes européens et privilégiant des conceptions juridiques développées par les tribunaux des États membres.

B – Le dynamisme du juge interaméricain

53La Cour IDH, quant à elle, se démarque nettement, tant de la CIJ que de ses consœurs régionales, par une jurisprudence résolument hardie.

54Se considérant comme le « relais régional de l’universel » [64], elle a, dès le départ, et aujourd’hui encore, fait régulièrement des renvois à des sources extra-systémiques, citant amplement la Cour EDH, mais aussi d’autres organes juridictionnels ou quasi-juridictionnels, comme la CIJ ou le Comité des droits de l’homme, voire la jurisprudence de cours constitutionnelles ou suprêmes des États membres et même d’États tiers. Il s’agit, pour la Cour IDH, non seulement d’opter pour l’interprétation la plus favorable aux individus, mais également de convaincre les États et de renforcer son autorité dans le continent.

55Le système interaméricain de protection des droits humains dans le cadre de l’Organisation des États américains (OEA) a, en effet, été lent à se mettre en place. Une garantie judiciaire a été prévue dans la Convention américaine des droits de l’homme (Convention ADH) en 1969. Toutefois, la Cour IDH n’a été créée qu’en 1978, sans permettre un accès direct aux individus, lesquels doivent envoyer leurs plaintes à la Commission. Seuls 24 des 35 États de l’OEA ont ratifié la Convention ADH et seuls 21 ont accepté la compétence de la Cour IDH, englobant – à l’exception notable du nord du continent (États-Unis et Canada) – des pays d’Amérique latine présentant une homogénéité culturelle et une analogie dans leur développement démocratique ponctué par des processus de transition dans les années 1990.

56Ces prémisses difficiles expliquent en partie pourquoi la Cour IDH se montre audacieuse. Ayant à juger moins d’affaires que son homologue européenne mais portant sur des violations graves et systématiques [65], elle saisit chaque opportunité pour rappeler aux États leurs engagements en matière de protection des droits humains. Dans cette optique, le recours au jus cogens peut être vu comme la volonté du juge interaméricain de lutter contre l’impunité et d’enraciner dans le continent une culture démocratique respectueuse des droits humains.

57Aussi, depuis le début des années 2000, la Cour IDH, qui renvoie habituellement à la jurisprudence de la Cour EDH, pratique moins de renvois lorsque sont en cause des normes impératives. Et pour cause, à partir de cette époque, les reconnaissances de droits humains impératifs sont allées crescendo dans la jurisprudence de la Cour IDH, au point d’être reconnue comme la juridiction qui a consacré le plus de normes impératives et qui a oeuvré le plus pour consolider cette notion dans le droit international.

58De manière indirecte et directe, dans le cadre de ses fonctions contentieuse et consultative, la Cour IDH a consacré diverses normes impératives dans plusieurs affaires, dont on peut citer ici certaines parmi les plus marquantes de sa jurisprudence.

59Tout d’abord, les références indirectes sont fréquentes, la Cour IDH citant les arguments des requérants, témoins ou experts, sans prendre position, ou se contentant d’une allusion au jus cogens, lorsqu’elle souligne le caractère indérogeable ou fondamental de certains droits.

60Lors de son avis consultatif de 1997 Informes de la Comisión interamericana, la Cour IDH affirme que la CIJ a annoncé l’avènement du jus cogens en reconnaissant que des principes humanitaires s’imposent aux États indépendamment de leurs obligations conventionnelles dans son avis de 1951 sur les Réserves à la Convention sur le génocide[66].

61Dans son arrêt de 1999 “Niños de la calle” c. Guatemala, la Cour IDH cite amplement la Commission qui a qualifié le droit à la vie de norme impérative. Sans reprendre cette qualification, la Cour IDH insiste sur l’importance fondamentale de ce droit, sans lequel sont impossibles la jouissance et l’exercice des autres droits humains [67].

62Dans l’arrêt Hermanas Serrano Cruz c. El Salvador de 2004, la Cour IDH cite, parmi les arguments exposés par les représentants des victimes, le fait que les disparitions forcées violent des droits fondamentaux indérogeables, qu’elles constituent un affront pour l’humanité et sont contraires au jus cogens[68].

63Ensuite, les références directes sont tout aussi foisonnantes et sont fréquemment réitérées dans la lignée d’une jurisprudence constante.

64Ainsi, dans l’arrêt Aloeboetoe y otros c. Suriname de 1993, où était en cause un accord du XVIIIe siècle organisant des pratiques esclavagistes, la Cour IDH observe que quand bien même un tel accord, passé entre une tribu et un État, aurait pu être qualifié de traité international, il serait aujourd’hui frappé de nullité, car contraire au jus cogens superveniens, reconnaissant implicitement comme impérative la prohibition de l’esclavage [69].

65Dans l’arrêt Maritza Urrutia c. Guatemala de 2003, la Cour IDH indique que toutes les formes de torture, tant physiques que psychologiques, sont strictement interdites. Cette prohibition est absolue et indérogeable, autrement dit elle ne peut être suspendue même dans les circonstances les plus difficiles, telles que la guerre, la lutte contre le terrorisme, l’état de siège ou d’urgence ou d’autres calamités nationales. Plus encore, cette prohibition appartient aujourd’hui au domaine du jus cogens, une affirmation faite étonnamment sans référence à l’arrêt Al-Adsani de la Cour EDH rendu deux ans plus tôt [70].

66Dès lors, la liste des droits humains impératifs ne va cesser de s’enrichir, s’accompagnant de précisions quant à leurs effets, avec la reconnaissance de l’impérativité des normes suivantes : l’interdiction des exécutions extrajudiciaires [71] ; l’interdiction des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, de tels actes étant attentatoires à l’intégrité des personnes [72] ; la prohibition des disparitions forcées reliée à un devoir d’enquêter et de sanctionner les responsables et au droit d’accès à la justice pour les victimes et leur famille [73] afin d’empêcher qu’un système d’impunité ne perdure dans un contexte de violations massives ; les principes d’égalité devant la loi et de non-discrimination découlant directement de l’unité du genre humain et inséparables de la dignité de la personne humaine [74] ; l’interdiction de commettre des crimes contre l’humanité imposant les devoirs pour l’État de prévenir et sanctionner de telles violations [75].

67La Cour IDH a ainsi progressivement étendu le champ matériel du jus cogens, essentiellement sous l’impulsion du juge Cançado Trindade, dont les convictions jusnaturalistes ont fini par rallier la majorité des juges.

68Mais l’élan insufflé par le juge brésilien ne s’est pas éteint après son départ pour la CIJ en 2009. Bien au contraire, l’œuvre de consécration du jus cogens s’est poursuivie, moins avec la reconnaissance de droits nouveaux qu’avec la consolidation de l’éventail des droits déjà identifiés, en renvoyant moins à des références extra-systémiques qu’à des références principalement intrasystémiques.

69Ainsi, depuis cette date, c’est en se référant essentiellement à sa propre jurisprudence que la Cour IDH a réitéré sans relâche qu’ont atteint le seuil de l’impérativité les normes suivantes : la proscription de la torture qui est absolue [76] ; l’interdiction des disparitions forcées [77] ; la prohibition de l’esclavage comme crime imprescriptible impliquant pour l’État une obligation d’enquêter et d’établir les responsabilités individuelles [78], y compris l’esclavage sexuel [79] ; le principe d’égalité découlant de l’unité de la nature du genre humain et lié indissociablement à la dignité de la personne [80] ; le principe de non-refoulement [81] dont l’ancrage dans le jus cogens a été admis par les États du continent dans la Déclaration et le plan d’action du Brésil de 2014 [82] ; l’interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [83] ; ou encore le droit à l’intégrité personnelle [84].

70La Cour IDH affiche ainsi une jurisprudence luxuriante avec des références aux normes impératives aussi fréquentes que diversifiées. Au fil du temps, elle a consolidé la conscientisation de l’importance de la notion, tout en développant ses effets. Mais cette consolidation, en raison du dynamisme singulier du juge interaméricain dans le domaine du jus cogens, est marquée par un décrochage d’avec les autres juridictions qu’elle a tendance à moins citer, pratique qui lui est pourtant familière en d’autres domaines, pour se référer principalement à sa propre jurisprudence et cultiver cette spécificité régionale.

Conclusion

71L’analyse comparée de la jurisprudence des juridictions mondiale et régionales révèle une œuvre de dévoilement du jus cogens à la fois modeste et contrastée. Tandis que la Cour ADHP n’a pas encore connu d’affaires lui permettant de prendre position, la CIJ comme la Cour EDH affichent une modération qui contraste fortement avec l’avant-gardisme de la Cour IDH.

72Par ailleurs, la consécration jurisprudentielle du jus cogens se fait essentiellement sur une base isolationniste, les cours internationale et régionales se citant rarement mutuellement, cela, même dans les cas de convergence quant à la reconnaissance de certains droits impératifs [85].

73Or, plus encore que pour toute autre norme ou catégorie de normes aux contours bien définis, les incertitudes entourant le jus cogens rendent indéniablement nécessaire la réactivation d’un dialogue actuellement amplement moribond entre les juges pour éviter les jurisprudences discordantes ou contradictoires quant à l’identification de sa substance et de ses effets. Pour paraphraser le juge Skubiszewski, une juridiction est la

74

« plus fidèle à sa fonction lorsque, tout en restant sur le plan du droit positif, elle [tient] compte des grands courants de l’évolution contemporaine. Une juridiction n’a pas à – et même ne doit pas – reprendre une doctrine d’‘hier’, ou pis encore (…) d’‛avant-hier’ » [86] ;

75elle doit résolument se tourner vers l’avenir pour assurer le développement progressif du droit.

76Le jus cogens ayant vocation à protéger des valeurs essentielles pour la communauté internationale, au premier plan desquelles se trouvent les droits humains, il est certain qu’un tel dialogue ne serait que bénéfique pour assurer le meilleur degré de protection, aussi bien au niveau régional qu’au niveau international, plaçant le juge comme le gardien de cette communauté de valeurs.


Date de mise en ligne : 04/01/2021

https://doi.org/10.3917/civit.045.0297

Notes

  • [1]
    V. CDI, Premier rapport sur le jus cogens présenté par Dire Tladi, Rapporteur spécial, Doc. A/CN.4/693, 8 mars 2016, §§ 18-41.
  • [2]
    Sur 85 articles, la CVDT consacre les articles 53 et 64 à la définition générale du jus cogens et les articles 44 § 5, 65, 66 et 71 au régime applicable en cas de violation.
  • [3]
    V. sur ce point C. MIK, “Jus cogens in contemporary international law”, Polish yearbook of international law, vol. 33, 2013, pp. 37-55.
  • [4]
    V.Ann. CDI, 1963, vol. I, p. 68.
  • [5]
    V. A/CONF.39/11, p. 280.
  • [6]
    V. sur ce point C. MAIA, « De l’exclusion des normes protégeant des intérêts purement étatiques du concept de jus cogens », in Mélanges offerts en l’honneur du professeur Rafâa Ben Achour, Konrad-Adenauer-Stiftung, Tunis, 2015, pp. 499-523.
  • [7]
    D’un point de vue méthodologique, l’analyse empirique présentée a porté sur les décisions utilisant l’expression « jus cogens » adoptées par la CIJ et les cours régionales (européenne, africaine et interaméricaine) dans l’exercice de leurs fonctions contentieuse et consultative. Ces décisions ont été identifiées grâce à une recherche par mots-clés sur les sites internet des tribunaux respectifs et ont ensuite été sélectionnées en fonction de leur pertinence, avec une irréductible part d’arbitraire exigée par le souci de concision d’un travail limité.
  • [8]
    CVDT, article 66-a.
  • [9]
    V. A. KACZOROWSKA-IRELAND, « The International Court of Justice’s vision of jus cogens », L’Observateur des Nations Unies, vol. 40, 2016, p. 86 ; C. MAIA, « Le juge international au cœur du dévoilement du droit impératif : entre nécessité et prudence », Revue de droit international de sciences diplomatiques et politiques, vol. 83, 2005, p. 2.
  • [10]
    Charte des Nations Unies, article 92.
  • [11]
    Statut de la CIJ, article 36-2-b.
  • [12]
    CIJ, Activités militaires et paramilitaires au Nicaragua et contre celui-ci (Nicaragua c. États-Unis d’Amérique), arrêt du 27 juin 1986, CIJ Rec., 1986, § 190.
  • [13]
    CIJ, Projet Gabčíkovo-Nagymaros (Hongrie c. Slovaquie), arrêt du 25 septembre 1997, CIJ Rec., 1997, § 112.
  • [14]
    CIJ, Conformité au droit international de la déclaration unilatérale d’indépendance relative au Kosovo, avis consultatif du 22 juillet 2010, CIJ Rec., 2010, § 81.
  • [15]
    CIJ, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, § 83.
  • [16]
    CIJ, Détroit de Corfou (Royaume-Uni c. Albanie), arrêt du 9 avril 1949, CIJ Rec., 1949, p. 22.
  • [17]
    CIJ, Réserves à la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide, avis consultatif du 28 mai 1951, CIJ Rec., 1951, p. 23.
  • [18]
    CIJ, Barcelona Traction, Light and Power Company, Limited (Belgique c. Espagne), arrêt du 5 février 1970, CIJ Rec., 1970, § 33.
  • [19]
    Ibid., § 34.
  • [20]
    CIJ, Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, CIJ Rec., 1995, § 29.
  • [21]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt du 11 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, § 31.
  • [22]
    CIJ, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis consultatif du 9 juillet 2004, CIJ Rec., 2004, § 155.
  • [23]
    V. sur cet aspect C. MAIA, « Jus cogens et (in)application de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 », in T. GARCIA et L. CHAN-TUNG (dir.), La Convention de Vienne sur le droit des traités : bilan et perspectives 50 ans après son adoption, Pedone, Paris, 2019, pp. 57-76.
  • [24]
    CIJ, Activités armées sur le territoire du Congo (République démocratique du Congo c. Rwanda), arrêt du 3 février 2006, CIJ Rec., 2006, respectivement §§ 58 et 60.
  • [25]
    Ibid., § 64. Précisons que cette reconnaissance explicite a été facilitée par le départ du juge français Gilbert Guillaume, qui a siégé à la CIJ de 1987 à 2005. On retrouve néanmoins cette position hostile au jus cogens chez d’autres juges français à la CIJ. V. notamment, dans l’arrêt de 2012 sur les Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader, l’opinion individuelle du juge Abraham (§ 27) et l’opinion dissidente du juge ad hoc Sur (§ 4).
  • [26]
    La nature impérative de la prohibition du génocide avait déjà été reconnue par le TPIR. V. Le Procureur c. Clément Kayishema et Obed Ruzindana, affaire n°ICTR-95-1-T, jugement du 21 mai 1999, § 88.
  • [27]
    Dans son opinion individuelle jointe à l’arrêt de 2006, le juge ad hoc Dugard s’étonne que ce premier soutien explicite au jus cogens soit si tardif et estime que le silence prolongé de la CIJ est aggravé par le fait que d’autres juridictions avaient déjà pris l’initiative de reconnaître des normes impératives (§ 5).
  • [28]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Bosnie-Herzégovine c. Serbie-et-Monténégro), arrêt 26 février 2007, CIJ Rec., 2007, § 161.
  • [29]
    CIJ, Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), arrêt 3 février 2015, CIJ Rec., 2015, § 87.
  • [30]
    CIJ, Questions concernant l’obligation de poursuivre ou d’extrader (Belgique c. Sénégal), arrêt du 20 juillet 2012, CIJ Rec., 2012, § 99.
  • [31]
    La nature impérative de la prohibition de la torture avait déjà été reconnue par le TPIY. V. TPIY, Le Procureur c. Anto Furundžija, affaire n° IT-95-17/1-T, jugement du 10 décembre 1998, §§ 153-157.
  • [32]
    CIJ, Droit de passage sur territoire indien (Portugal c. Inde), arrêt du 12 avril 1960, CIJ Rec., 1960, opinion dissidente du juge Fernandes, § 29.
  • [33]
    CIJ, Sud-Ouest africain (Éthiopie c. Afrique du Sud ; Libéria c. Afrique du Sud), arrêt du 18 juillet 1966, CIJ Rec., 1966, opinion dissidente du juge Tanaka, p. 298.
  • [34]
    CIJ, Licéité de la menace ou de l’emploi d’armes nucléaires, avis consultatif du 8 juillet 1996, CIJ Rec., 1996, déclaration du juge Bedjaoui, § 13.
  • [35]
    CIJ, Plates-formes pétrolières (Iran c. États-Unis d’Amérique), arrêt du 6 novembre 2003, CIJ Rec., 2003, opinion individuelle du juge Simma, § 6.
  • [36]
    CIJ, Conséquences juridiques de l’édification d’un mur dans le territoire palestinien occupé, avis du 9 juillet 2004, CIJ Rec., 2004, opinion individuelle du juge Elaraby, § 3.1.
  • [37]
    CIJ, Effets juridiques de la séparation de l’archipel des Chagos de Maurice en 1965, avis consultatif du 25 février 2019, CIJ Rec., 2019, déclaration commune des juges Cançado Trindade et Robinson, § 8.
  • [38]
    V. notamment : l’opinion dissidente jointe à l’arrêt du 5 octobre 2016 sur les Obligations relatives à des négociations concernant la cessation de la course aux armes nucléaires et le désarmement nucléaire (Îles Marshall c. Royaume-Uni), §§ 186-187 ; ainsi que l’opinion dissidente jointe à l’arrêt du 3 février 2015 sur l’Application de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide (Croatie c. Serbie), § 83.
  • [39]
    Une importante dissemblance tient, en particulier, au droit de recours individuel, qui est automatique pour la Cour EDH, facultatif pour la Cour ADHP et exclu pour la Cour IDH.
  • [40]
    Des restrictions aux droits garantis peuvent être introduites par la loi en vue de protéger la sécurité nationale, l’intégrité territoriale ou la sûreté publique. En cas de danger public menaçant la vie de la nation, la suspension de certains droits est également possible dans les systèmes européen et interaméricain. Sur la signification de ces clauses de suspension pour la détermination des normes impératives, v. C. MAIA, « De la signification des clauses de non-dérogation en matière d’identification des droits de l’homme impératifs », in R. BEN ACHOUR et S. LAGHMANI (dir.), Les droits de l’homme : une nouvelle cohérence pour le droit international ?, Pedone, Paris, 2008, pp. 39-62.
  • [41]
    Le 18 juillet 2018, les présidents respectifs des Cours interaméricaine, européenne et africaine ont signé à San José (Costa Rica), une Déclaration conjointe par laquelle il a été décidé la création d’un Forum permanent du dialogue institutionnel. Le premier forum, qui s’est tenu en 2019 à Kampala (Ouganda), a souhaité consolider le dialogue triangulaire, institutionnellement et jurisprudentiellement, par un partage d’informations et des meilleures pratiques.
  • [42]
    La Cour ADHP a rendu sa première décision en 2009. En date du 31 mars 2020, elle a rendu 90 arrêts et 12 avis, (source : fr.african-court.org).
  • [43]
    Au 30 avril 2020, 30 États seulement ont ratifié le Protocole.
  • [44]
    Sur les 55 États membres de l’Union africaine, 9 ont émis une telle déclaration, parmi lesquels le Bénin et la Côte d’Ivoire qui ont annoncé, respectivement les 24 mars et 28 avril 2020, le retrait de leur déclaration, qui sera effectif dans les 12 mois.
  • [45]
    Commission ADHP, Amnesty International et autres c. Soudan, com. 48/90, 50/91, 52/91, 89/93, 15 novembre 1999, § 42.
  • [46]
    Commission ADHP, Civil Liberties Organisation, Legal Defence Centre, Legal Defence and Assistance Project c. Nigeria, com. 218/98, 7 mai 2001, §§ 26-27.
  • [47]
    Commission ADHP, Open Society Justice Initiative c. Côte d’Ivoire, com. 318/06, 27 mai 2016, § 154. Elle dit clairement adhérer à cette position dans le paragraphe suivant.
  • [48]
    Commission ADHP, Egyptian Initiative for Personal Rights and Interights c. Égypte, com. 334/06, 1er mars 2011, § 110. En note de bas de page 24 sont cités une observation générale du Comité contre la torture et un jugement du TPIY.
  • [49]
    Observation générale n°3 sur la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples : le droit à la vie (article 4), 18 novembre 2015, § 5.
  • [50]
    Cette jurisprudence abondante est le reflet d’une charge de travail qui s’est accrue depuis le Protocole n°11 ayant imposé aux États membres la compétence de la Cour, tout en introduisant la possibilité d’un recours individuel direct sans le filtrage de la Commission, réforme qui a été suivie par un élargissement géographique du Conseil de l’Europe.
  • [51]
    Résultat issu d’une recherche de l’expression « jus cogens » dans la base de données de la jurisprudence de la Cour EDH concernant les arrêts et avis en anglais, (echr.coe.int, consulté le 30 avril 2020).
  • [52]
    Cour EDH, Ringeisen c. Autriche, req. n°2614/65, arrêt du 16 juillet 1971, opinion séparée du juge Verdross (« les règles du droit international général concernant l’épuisement des voies de recours internes ne font pas partie du jus cogens »).
  • [53]
    V. notamment : McElhinney c. Irlande, req. n° 31253/96, arrêt du 21 novembre 2001, opinion dissidente du juge Loucaides ; Fogarty c. Royaume-Uni, req. n°37112/97, arrêt du 21 novembre 2001, opinion concordante des juges Caflisch, Costa et Vajić.
  • [54]
    Cour EDH, Al-Adsani c. Royaume-Uni, req. n° 35763/97, arrêt du 21 novembre 2001, § 60.
  • [55]
    La Cour EDH fait toutefois remarquer que, contrairement aux affaires Furundžija et Pinochet, n’est pas ici en cause la responsabilité pénale d’un individu, mais l’immunité dont un État continue à jouir face aux juridictions d’un autre État où des actions civiles seraient engagées sur le fondement d’actes de torture allégués (ibid., § 61).
  • [56]
    V. Cour EDH, Naït-Liman c. Suisse, req. n°51357/07, arrêt du 15 mars 2018, § 129 ; Othman (Abu Qatada) c.Royaume-Uni, req. n° 8139/09, arrêt du 17 janvier 2012, § 266 ; Volodina c. Russie, req. n° 41261/17, arrêt du 9 juillet 2019, § 8.
  • [57]
    V. Cour EDH, Jorgic c. Allemagne, req. n° 74613/01, arrêt du 12 juillet 2007, § 68 (la prohibition du génocide « relève du jus cogens », sans référence à d’autres décisions) ; Vasiliauskas c. Lituanie, req. n°35343/05, arrêt du 20 octobre 2015, § 113 (avec des références à la CIJ et au TPIR).
  • [58]
    Cour EDH, Ilnseher c. Allemagne, req. n° 10211/12 et 27505/14, arrêt du 4 décembre 2018, § 75.
  • [59]
    Cour EDH, Naït-Liman c. Suisse, req. n° 51357/07, arrêt du 21 juin 2016, §§ 45 et 50.
  • [60]
    V. notamment Cour EDH, Sargsyan c. Azerbaijan, req. n° 40167/06, arrêt du 16 juin 2015, opinion dissidente du juge Pinto de Albuquerque, § 21. V. également : Al-Dulimi et Montana Management Inc. c. Suisse, req. n° 5809/08, arrêt du 21 juin 2016, opinion concordante du juge Pinto de Albuquerque, à laquelle se rallient les juges Hajiyev, Pejchal et Dedov, §§ 34-35 ; Naït-Liman c. Suisse, req. n° 51357/07, arrêt du 21 juin 2016, opinion dissidente commune des juges Karakaş, Vučinić et Kūris, § 2.
  • [61]
    V. notamment Cour EDH, Jones et autres c. Royaume-Uni, req. n° 34356/06 et 40528/06, 14 janvier 2014, §§ 166 et 172 (notion utilisée par les requérants) ; Al-Dulimi et Montana Management Inc. c. Suisse, req. n° 5809/08, arrêt du 21 juin 2016 (notion utilisée par les gouvernements français et britannique autorisés à intervenir dans la procédure).
  • [62]
    V. notamment Cour EDH, Marguš c. Croatie, req. n° 4455/10, arrêt du 27 mai 2014 (§§ 57 ss) et Marguš c. Croatie, req. n° 4455/10, arrêt du 13 novembre 2012 (§§ 34 ss), où la Cour EDH cite des extraits de plusieurs décisions de la Commission et de la Cour IDH.
  • [63]
    T. GROPPI et A.M. LECIS COCCO-ORTU, « Les références mutuelles entre la Cour européenne et la Cour interaméricaine des droits de l’homme : de l’influence au dialogue ? », in L.-R. BASTA FLEINER et T. MARINKOVIC (dir.), Key developments in constitutionalism and constitutional law, Eleven International Publishing, La Haye, 2014, p. 187, note 48.
  • [64]
    L. HENNEBEL, « La Cour interaméricaine des droits de l’homme : entre particularisme et universalisme », in L. HENNEBEL et H. TIGROUDJA (dir.), Le particularisme interaméricain des droits de l’homme, Pedone, Paris, 2009, p. 620.
  • [65]
    Au 31 mai 2020, la Cour IDH a rendu 402 arrêts et 26 avis (source : www.corteidh.or.cr). Pour une analyse de cette jurisprudence, v. E. SALMÓN, Jurisprudencia de la Corte Interamericana de Derechos Humanos, Editorial Universidad del Rosario, Bogota, 2011. Sur certaines de ses spécificités, v. C. MAIA, « Le jus cogens dans la jurisprudence de la Cour interaméricaine des droits de l’homme », in L. HENNEBEL et H. TIGROUDJA (dir.), Le particularisme interaméricain (…), op. cit., pp. 271-311.
  • [66]
    Cour IDH, Informes de la Comisión Interamericana de Derechos Humanos (Art. 51 Convención Americana sobre Derechos Humanos), avis consultatif OC-15/97 du 14 novembre 1997, Série A n° 15, § 16.
  • [67]
    Cour IDH, “Niños de la calle” (Villagrán Morales y otros) c. Guatemala, arrêt du 19 novembre 1999, Série C n° 63, §§ 139 et 144.
  • [68]
    Cour IDH, Hermanas Serrano Cruz c. El Salvador, arrêt du 23 novembre 2004, Série C n° 118, § 56.
  • [69]
    Cour IDH, Aloeboetoe y otros c. Suriname, arrêt du 10 septembre 1993, Série C n° 15, § 57.
  • [70]
    Cour IDH, Maritza Urrutia c. Guatemala, arrêt du 27 novembre 2003, Série C n° 103, § 92.
  • [71]
    Cour IDH, Hermanos Gómez Paquiyauri c. Pérou, arrêt du 8 juillet 2004, Série C n° 110, § 76.
  • [72]
    Cour IDH, Caesar c. Trinité-et-Tobago, arrêt du 11 mars 2005, Série C n° 123, § 100.
  • [73]
    Cour IDH, Goiburú y otros c. Paraguay, arrêt du 22 septembre 2006, Série C n° 153, §§ 84 et 131 ; Zambrano Vélez y otros c. Équateur, arrêt du 4 juillet 2007, Série C n° 166, § 96 ; La Cantuta c. Pérou, arrêt du 29 novembre 2006, Série C n° 162, §§ 157 et 160.
  • [74]
    Cour IDH, Condición jurídica y derechos de los migrantes indocumentados, avis consultatif OC-18/03 du 17 septembre 2003, Série A n°18, §§ 100-101 ; Masacre de Mapiripán c. Colombie, arrêt du 15 septembre 2005, Série C n° 134, § 178 ; Servellón García y otros c. Honduras, arrêt du 21 septembre 2006, Série C n° 152, § 94 ; Yatama c. Nicaragua, arrêt du 23 juin 2005, Série C n° 127, § 184.
  • [75]
    Cour IDH, Almonacid Arellano y otros c. Chili, arrêt du 26 septembre 2006, Série C n° 154, § 99 ; La Cantuta c. Pérou, arrêt du 29 novembre 2006, Série C n° 162, § 157.
  • [76]
    Cour IDH, Azul Rojas Marín y otra c. Pérou, arrêt du 12 mars 2020, Série C n° 402, § 140 ; Valenzuela Ávila c. Guatemala, arrêt du 11 octobre 2019, Série C n° 386, § 180.
  • [77]
    Cour IDH, García y familiares c. Guatemala, arrêt du 29 novembre 2012, Série C n° 258, § 96 ; Osorio Rivera y familiares c. Pérou, arrêt du 26 novembre 2013, Série C n°274, § 112 ; Rochac Hernández y otros c. El Salvador, arrêt du 14 octobre 2014, Série C n° 285, § 92.
  • [78]
    Cour IDH, Miembros de la aldea Chichupac y comunidades vecinas del municipio de Rabinal c. Guatemala, arrêt du 30 novembre 2016, Série C n° 328, § 216 ; Trabajadores de la Hacienda Brasil Verde c. Brésil, arrêt du 20 octobre 2016, Série C n° 318, §§ 412-413.
  • [79]
    Cour IDH, López Soto y otros c. Venezuela, arrêt du 26 septembre 2018, Série C n° 362, § 176.
  • [80]
    Cour IDH, Gutiérrez Hernández y otros c. Guatemala, arrêt du 24 août 2017, Série C n° 339, § 150 ; Identidad de género, e igualdad y no discriminación a parejas del mismo sexo, avis consultatif OC-24/17 du 24 novembre 2017, Série A n° 24, § 61.
  • [81]
    Cour IDH, Derechos y garantías de niñas y niños en el contexto de la migración y/o en necesidad de protección internacional, avis consultatif OC-21/14 du 19 août 2014, Série A n° 21, § 225.
  • [82]
    Cour IDH, La institución del asilo y su reconocimiento como derecho humano en el sistema interamericano de protección, avis consultatif OC-25/18 du 30 mai 2018, Série A n°25, § 98.
  • [83]
    Cour IDH, Mujeres víctimas de tortura sexual en Atenco c. Mexique, arrêt du 28 novembre 2018, Série C n° 371, § 178 ; Herzog y otros c. Brésil, arrêt du 15 mars 2018, Série C n° 353, § 220.
  • [84]
    Cour IDH, Omeara Carrascal y otros c. Colombie, arrêt du 21 novembre 2018, Série C n° 368, § 192.
  • [85]
    On peut également observer que si les TPI se réfèrent fréquemment à la jurisprudence de la Cour EDH et de la Cour IDH, la réciproque ne se vérifie pas.
  • [86]
    CIJ, Timor oriental (Portugal c. Australie), arrêt du 30 juin 1995, CIJ Rec., 1995, opinion dissidente du juge Skubiszewski, § 46.

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