Couverture de CIVIT_035

Article de revue

La pensée juridique de Charles Chaumont

Pages 197 à 223

Notes

  • [1]
    Que ce soit à la Faculté de Droit de Nancy de 1943 à 1984, à l’IEP de Paris ou à l’Université Libre de Bruxelles. Pour une amorce de présentation de sa biographie, v. le discours fait à l’occasion de son départ de l’Université libre de Bruxelles en mai 1971, (http://cdi.ulb.ac.be/a-propos-du-centre/historique/historique-de-lenseignement-du-droit-international-public-a-lulb/charles-chaumont-1913-2001/) ; v. également la présentation de C. CHAUMONT dans « Galerie des Internationalistes », site de la SFDI par C. APOSTOLIDIS : (http://www.sfdi.org/internationalistes/chaumont-charles/).
  • [2]
    V. sa bibliographie, cité par C. APOSTOLIDIS, note 1 ; à titre d’analyse de sa pensée, E. JOUANNET, « La pensée juridique de Charles Chaumont », RBDI, 2004/1, pp. 259-289 ou en ligne dans (https://www.univ-paris1.fr/fileadmin/IREDIES/Contributions_en_ligne/E._JOUANNET/La_pensee_juridique_de_C.Chaumont.pdf).
  • [3]
    V., C. CHAUMONT, Hommage. Jules Basdevant, AFDI, 1967, pp. 1-3
  • [4]
    Entre crochets, remplacement du nom de Jules BASDEVANT par celui de C. CHAUMONT.
  • [5]
    Les auteurs se réfèrent à des enseignements suivis dans les années 70 qui peuvent être considérés comme caractéristiques d’une certaine approche du droit international, notamment telle que celle utilisée par C. CHAUMONT.
  • [6]
    C. CHAUMONT, La conception américaine de la neutralité - Essai sur le droit international de la neutralité aux États-Unis, thèse, Paris, Rousseau, 1936.
  • [7]
    Ibid. pp. 66-82 et pp. 103-130. V. notamment p. 103, le titre IV.
  • [8]
    V. le discours fait à l’occasion de son départ de l’Université libre de Bruxelles en mai 1971 (note 1).
  • [9]
    Le texte entre guillemets, légèrement modifié, est extrait de ce discours à l’Université libre de Bruxelles.
  • [10]
    Pendant cette période, comme de nombreux français, il a été mobilisé et démobilisé. Il choisit ensuite la résistance comme le montre sa biographie (note 1, le même discours de 1971).
  • [11]
    Une bibliographie des ouvrages et écrits de C. CHAUMONT est consultable dans les Mélanges qui lui ont été offerts ainsi que (v. note 1) sur le site de la SFDI.
  • [12]
    Outre ses fonctions de professeur, C. CHAUMONT a exercé des fonctions de type diplomatique ; d’une part, il a été membre de la délégation française (Comité des juristes) à Washington en 1945, pour la préparation du statut de la Cour Internationale de Justice, et d’autre part, il a aussi été membre de la délégation française à la Conférence de San Francisco (d’avril à juin 1945), préalable à l’adoption de la Charte des Nations Unies. V. en ce sens, la préface de l’ambassadeur J. FOUQUES-DUPARC dans C. CHAUMONT, La sécurité des États et la sécurité du monde, LGDJ, 1948, pp. 3 et s.
  • [13]
    C. CHAUMONT, La neutralité de l’Autriche et les Nations Unies, AFDI, 1955, pp. 151-157 ; Nations Unies et neutralité, RCADI, 1956, t. 89, pp. 1-59.
  • [14]
    Comme précisé par C. CHAUMONT dans son article de 1955, pp. 152 et s, cet État a voulu adhérer à l’ONU très rapidement mais sans y parvenir avant 1955.
  • [15]
    C. CHAUMONT, La neutralité de l’Autriche et les Nations Unies, op. cit., pp. 152 et s.
  • [16]
    Ibid.
  • [17]
    Ibid., p. 153.
  • [18]
    Ibid.
  • [19]
    Ibid., p. 154.
  • [20]
    Ibid.
  • [21]
    Ibid., p. 157
  • [22]
    Nations Unies et neutralité, RCADI, 1956, op. cit., note 13.
  • [23]
    Ibid., p. 45.
  • [24]
    Ibid., p. 53.
  • [25]
    Ibid., p. 57.
  • [26]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, RCADI, 1970, t. 129, pp. 333-528.
  • [27]
    C. CHAUMONT est à l’origine des Rencontres de Reims, comme le rappelle le site de l’Université de Reims sur lequel on peut trouver la reproduction de ces Rencontres qui se sont étalées, plus ou moins régulièrement entre 1973 et 1989, (http://www.univ-reims.fr/site/editions-et-presses-universitaires-de-reims/catalogue/themes/rencontres-de-reims-en-droit-international,15443,26638.html?), entrée « actes des rencontres ». Ces rencontres entre chercheurs — très majoritairement universitaires, issus de différents continents — ont été à l’origine de nombreuses discussions sur de nombreux concepts juridiques et sur les méthodes d’analyse du droit international.
  • [28]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., pp. 343 et s.
  • [29]
    Ibid. V. également E. DECAUX et O. de FROUVILLE, Droit international public, Dalloz, 9e éd., pp. 7 et s.
  • [30]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., p. 343.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Ibid.
  • [33]
    V., R. KOLB, « Mondialisation et droit international », in Relations internationales, vol. 3, n° 123, 2005, pp. 69-86.
  • [34]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., p. 344.
  • [35]
    V., E. JOUANNET, Qu’est-ce qu’une société internationale juste ? Le Droit international entre développement et reconnaissance, éd. Pedone, 2011.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    Ibid., p. 343.
  • [38]
    Ibid., pp. 434-445.
  • [39]
    V., J.-P. COLIN, « Discussion », in 1e Rencontre de Reims, Méthode d’analyse du Droit international, 1973, p. 295.
  • [40]
    C. CHAUMONT, Cours général de Droit international public, op. cit., p. 343.
  • [41]
    Ibid.
  • [42]
    Ibid.
  • [43]
    Ibid., p. 344.
  • [44]
    Ibid., p. 345.
  • [45]
    V., E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., p. 259.
  • [46]
    V., P. DAILLIER, M. FORTEAU, A. PELLET, Droit International Public, LGDJ, 8e ed, 2009, pp. 93-94.
  • [47]
    V., E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., pp. 278-279.
  • [48]
    Ibid., pp. 277-278.
  • [49]
    Ibid., p. 283.
  • [50]
    V., M. TROPER : « On n’est véritablement juriste que si on s’occupe du problème spécifique du droit international. Sinon on fait quelque chose qui est très intéressant […] mais qui relève d’une sociologie du droit […] mais ce dont nous avons besoin, c’est de ce que les Allemands appellent une « Rechts-Dogmatik », une théorie du droit proprement dite », dans 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 277.
  • [51]
    V., C. CHAUMONT, Rapport « À la recherche du fondement du caractère obligatoire du droit international », dans Réalités du droit international contemporain, Actes de la 2e Rencontre de Reims, 1974, pp. 1-40 (à consulter pour les citations suivantes de ce développement entre les pp. 6-11).
  • [52]
    C. CHAUMONT, Réalités du Droit international Contemporain. Le discours juridique sur la non intervention et la pratique internationale, Actes de la 7e Rencontre de Reims, 1986, p. 1.
  • [53]
    Ibid., pp. 5-6.
  • [54]
    V., C. CHAUMONT, 2e Rencontre de Reims, op. cit., p. 38.
  • [55]
    C. CHAUMONT, Ouverture de la 8e Rencontre de Reims, 27-28 mai 1989, Réalités du Droit international Contemporain. Les rapports entre l’objet et la méthode en droit international, p. 1.
  • [56]
    Ibid., pp. 2-3.
  • [57]
    Hommage d’une génération de juriste au Président Basdevant, éd. Pedone, 1960. Notamment son article « Recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l’État », pp. 114-151.
  • [58]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, RCADI, 1970, t. 129, pp. 333-528, spéc. pp. 384-397.
  • [59]
    J. BASDEVANT, Règles générales du droit de la paix, RCADI, 1936, t. 58, p. 578.
  • [60]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 386.
  • [61]
    Ibid., pour toutes ces citations.
  • [62]
    C. CHAUMONT, Recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l’État, déjà cité, p. 132, (italique ajouté au texte initial).
  • [63]
    Ibid., pp. 131 et s.
  • [64]
    Ibid., p. 133.
  • [65]
    Ibid.
  • [66]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 385.
  • [67]
    Ibid.
  • [68]
    Le droit des peuples sera envisagé dans le développement « C. La défense du droit des peuples », par C. CHAUMONT.
  • [69]
    C. CHAUMONT, RCADI 1970, op. cit., p. 390.
  • [70]
    V. notamment La sécurité des Etats et la sécurité du monde, LGDJ, 1948, 158 p ; La situation juridique des Etats à l’égard de la Force d’urgence des Nations Unies, AFDI, 1958, pp. 399-440 ; « Analyse critique de l’intervention américaine au Vietnam », RBDI, 1968, pp. 61-93.
  • [71]
    C. CHAUMONT, La sécurité des Etats et la sécurité du monde, LGDJ, op. cit.
  • [72]
    Ibid., pp. 56-79.
  • [73]
    Ibid., pp. 80-97, spéc. p. 81.
  • [74]
    V., le titre du Chapitre VII de la Charte et l’article 39 qui utilise l’expression « acte d’agression ».
  • [75]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, AFDI, 1956, pp. 521-529.
  • [76]
    C. CHAUMONT, « La définition de l’agression en 1970-1971 », in Miscellanea W.-J. Ganshof van der Meersch, Bruxelles, Bruylant, 1972, pp. 115-129.
  • [77]
    V. A/RES/377 du 3 novembre 1950 ou résolution L’union pour le maintien de la paix par laquelle l’Assemblée générale a réagi à une situation de blocage du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix.
  • [78]
    V., C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit. pp. 521-522.
  • [79]
    Ibid., pp. 525-526. En 1971, dans La définition de l’agression en 1970-1971, op. cit., p. 117, il complète cet extrait en précisant que « Le Comité [3 de la 3e Commission de la Conférence] a donc décidé […] de laisser au Conseil de Sécurité l’entière appréciation de ce qui constitue […] un acte d’agression ».
  • [80]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit. pp. 521-522 ; les guillemets à l’intérieur de la citation sont de C. CHAUMONT.
  • [81]
    Ibid., p. 527.
  • [82]
    Ibid., p. 528 : « L’agression armée entre Etats au sens de la Charte des Nations Unies est une rupture de la paix internationale, dirigée notamment contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un Etat, lorsque la force armée est utilisée dans un intérêt et dans des conditions non autorisés par la Charte ».
  • [83]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit., spéc. pp. 118-119 ; pourtant l’AG a adopté le 14 décembre 1974, une « définition de l’agression » dans la résolution 3314, avec toutes les limites d’une telle résolution.
  • [84]
  • [85]
    C. CHAUMONT, note 28, 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 263.
  • [86]
    C. CHAUMONT, note 28, 4e Rencontre de Reims, La relation du droit international avec la structure économique et social, p. 41.
  • [87]
    V., C. CHAUMONT, Le droit des peuples à témoigner d’eux-mêmes, Annuaire du Tiers-Monde, 1976, pp. 15-31.
  • [88]
    Ibid., p. 15, les guillemets dans la citation sont de C. CHAUMONT.
  • [89]
    Ibid.
  • [90]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 3e rencontre de Reims, La notion de peuple en droit international, p. 142.
  • [91]
    E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., p. 265.
  • [92]
    V. par ex., M. VIRALLY, Droit international et décolonisation, AFDI, vol. 9, 1963, pp. 508-541. A. CASSESE et E. JOUVE, Pour un droit des peuples, Berger-Levrault, 1977, 410 p.
  • [93]
    Les résolutions les plus connues à ce sujet sont : la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 et la résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970.
  • [94]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., pp. 396 et s. Il envisage la décolonisation mais en tenant compte de la réalité politique dans laquelle elle s’est réalisée.
  • [95]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 264. Notons que les Rencontres de Reims ont été publiés sous forme de transcription exacte des présentations orales de chaque intervenant, d’où la formulation à la première personne dans cet extrait et dans d’autres.
  • [96]
    Ibid.
  • [97]
    V. en ce sens A. PELLET, « Le “bon droit” et l’ivraie - Plaidoyer pour l’ivraie », in Mélanges offerts à Charles Chaumont, op. cit., pp. 465 et s.
  • [98]
    J. SALMON, 3e Rencontre de Reims, op. cit., pp. 221-223.
  • [99]
    Ibid., pp. 221-222
  • [100]
    Ibid., p. 222.
  • [101]
    Ibid.
  • [102]
    Ibid.
  • [103]
    A. PELLET, in Mélanges offerts à Charles Chaumont, op. cit., pp. 465-466.
  • [104]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 4e Rencontre de Reims, op. cit, « Rapport introductif », pp. 1-8.
  • [105]
    M. CHEMILLIER-GENDREAU, De la guerre à la communauté universelle, entre droit et politique, Fayard, 2013, p. 369.
  • [106]
    Ibid.
  • [107]
    Ibid.
  • [108]
    V. ci-dessus, note 3.
  • [109]
    J.-D. MOUTON, « Qu’on me permette d’évoquer un souvenir personnel : Charles CHAUMONT me montra la lettre de rupture qu’il envoya à Charles ROUSSEAU, après le compte-rendu critique que celui-ci fit de son Cours général à la RGDIP ».
  • [110]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 346 en référence à l’Encyclopédie des sciences philosophiques (1817).
  • [111]
    Il faut aussi signaler l’influence des marxistes contemporains de Charles CHAUMONT, le philosophe L. ALTHUSSER ou encore les juristes G.-I. TUNKIN et E.-B. PASHUKANIS.
  • [112]
    Bien entendu, l’article très pertinent d’E. JOUANNET, sur la base d’un rapport présenté lors de l’hommage rendu à Charles CHAUMONT à La Faculté de Droit de Nancy, le 11 mars 2003, nous a aidé à dégager ces idées, op. cit., note 2.
  • [113]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 368.
  • [114]
    Ibid., p. 363.
  • [115]
    C. CHAUMONT, Les méthodes d’analyse en droit international, 1ère Rencontre de Reims, 1973, p. 264.
  • [116]
    Ibid., p. 243.
  • [117]
    Ibid., p. 252.
  • [118]
    Ibid., p. 261.
  • [119]
    Ibid., p. 345.
  • [120]
    V., C. CHAUMONT, 1ère Rencontre de Reims, op. cit., p. 261.
  • [121]
    Ibid., p. 260.
  • [122]
    Ibid., p. 261.
  • [123]
    Ibid., p. 262.
  • [124]
    C. CHAUMONT, 2e Rencontre de Reims, 1974, op. cit., p. 4.
  • [125]
    V., article 53 de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités qui a pour titre : Traités en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens).
  • [126]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 371.
  • [127]
    Ibid, pp. 376-377.
  • [128]
    Ibid. p. 376.
  • [129]
    Ibid., p. 377.
  • [130]
    Ibid., p. 367.
  • [131]
    1ère Rencontre de Reims, op. cit., p. 264.
  • [132]
    Ibid, p. 264.
  • [133]
    C. CHAUMONT, « Mort et transfiguration du jus cogens », in Mélanges offerts à P.-F. GONIDEC, Paris, LGDJ, 1985, pp. 469-479.
  • [134]
    Ibid., p. 470.
  • [135]
    Ibid.
  • [136]
    Ibid., p. 477.
  • [137]
    Ibid., p. 478.
  • [138]
    V. note 88.
  • [139]
    B. BADIE, cité par J.-D. MOUTON, L’Etat dans la mondialisation, Colloque de Nancy, SFDI, éd. Pedone, 2012, p. 12.

1Si l’on cherche à mettre en avant des grands maîtres de droit public ayant enseigné à la Faculté de Droit de Nancy, le nom de Charles Chaumont vient naturellement à l’esprit de tout juriste internationaliste passé par son enseignement. Aurait-il vraiment apprécié d’être ainsi rangé dans une telle approche ? On peut en douter car, comme il le disait lui-même, il est impossible de « faire parler les morts » ! Il ne saurait évidemment être question de cela dans cette présentation mais il est important de présenter sa pensée juridique dans la mesure où ce professeur a marqué de nombreuses personnes, que ce soit directement par ses enseignements [1] ou plus indirectement à la lecture de ses écrits [2].

2Il est donc normal de lui reconnaitre une pensée juridique, aussi particulière soit-elle, et de rappeler que cette pensée relève d’une méthode d’analyse elle aussi assez originale. En tant qu’anciens étudiant(e)s du professeur Chaumont, devenu(e)s enseignants à la Faculté de Droit, Sciences économique et Gestion de Nancy, nous avons choisi de présenter certains aspects de sa pensée.

3En voulant présenter la pensée juridique de Charles Chaumont, son enseignement particulier revient naturellement à la mémoire d’anciens étudiant(e)s, tout comme ses écrits lus et relus pour tenter d’appréhender plus précisément sa vision du droit international.

4Pour en montrer la portée, reprenons la formule qu’il a lui-même utilisé en hommage à son directeur de thèse, Jules Basdevant [3], « vouloir évoquer le cheminement intellectuel de la pensée juridique de [Charles Chaumont] [4] est une tâche impossible en peu de lignes ». C’est donc avec modestie et avec un regard quelque peu subjectif et certainement incomplet que seront abordés différents aspects marquants de la personnalité et de la pensée de ce grand professeur (expression préférée à celle de grand maître qu’il n’aimait pas). La période dans laquelle cet enseignement a été suivi [5] peut expliquer que certaines notions et normes de droit international sont apparues comme étant particulièrement importantes dans la pensée juridique de cet auteur (II). Outre son apport dans la réflexion normative, il est important de noter que Charles Chaumont s’est initialement intéressé à un sujet particulier du droit international, la neutralité, et que par ailleurs, il a marqué le droit international en rejetant l’approche classique d’analyse de ce droit (I). Ce rejet l’amènera à préférer une méthode d’analyse juridique, différente et originale, car fondatrice d’une école critique du droit international (III).

I – À l’origine de la pensée juridique de Charles Chaumont

5Pour commencer la présentation de la pensée de cet auteur, il est intéressant de rappeler le début de ses réflexions en droit international, notamment la première analyse qu’il a faite de ce droit et qui est la question de la neutralité (A). En outre, il est tout aussi intéressant de connaitre le positionnement qu’il va rapidement adopter par rapport à l’analyse du droit international, tel qu’il lui a été enseigné et que, manifestement il rejette (B).

A – La neutralité, première recherche de Charles Chaumont en droit international

6La neutralité est son premier travail marquant en droit international. Cette question correspond au domaine essentiel de son sujet de thèse ; thèse faite sous la direction de Jules Basdevant et publiée en 1936 [6] ; La conception américaine de la neutralité. Essai sur le droit international de la neutralité aux Etats-Unis.

7Cette thèse développe très précisément l’analyse historique de l’évolution du droit de la neutralité, depuis la création des Etats-Unis jusqu’à la guerre de 1914-1918. Charles Chaumont présente ce pays comme étant un Etat qui, voulant préserver à la fois sa liberté, d’Etat neutre et le commerce maritime, a tenté de le faire en adoptant ou en adhérant à différents traités portant sur ces deux aspects. Mais comme ces traités ont posé des problèmes au cours de la Première Guerre mondiale, plutôt que de les mettre en œuvre, les Etats-Unis – en principe neutres – ont choisi de se mettre aux côtés des alliés [7].

8Au sujet de cette recherche, bien après sa publication, un collègue belge lui a fait remarquer [8] qu’il est possible de faire un lien entre la question de la neutralité et un épisode particulièrement marquant de son histoire familiale. En effet, Charles Chaumont est né à Lille, pendant la 1e Guerre mondiale, le 18 décembre 1913 et « [q]uelques mois plus tard, la guerre éclate et [son] père, officier dans les chasseurs, est tué en novembre 1914, à Dixmude en défendant le sol belge dont la neutralité avait été si brutalement violée » [9].

9Après cette étude, liée au fort impact de la Première Guerre mondiale sur son enfance, la 2e Guerre mondiale va également le toucher directement [10]. Ce qui ne l’empêche pas de continuer ses recherches universitaires qu’il orientera, un temps donné, plutôt vers des analyses de droit interne [11]. Ce n’est que peu de temps après la fin de cette guerre, dans les années 50, qu’il revient non seulement à l’analyse du droit international mais aussi à l’étude de son premier thème de recherche ; la neutralité. Il aborde cette question dans un contexte assez particulier. En effet, à cette époque, le monde connait à la fois la présence d’une nouvelle organisation internationale, l’Organisation des Nations Unies – à la création de laquelle il a participé [12] – et le développement d’une nouvelle forme de guerre, la guerre froide.

10Ainsi, en 1955, Charles Chaumont rédige un article sur la neutralité, qui sera suivi de la publication d’un cours à l’Académie de La Haye [13]. Dans son article de 1955, il s’interroge sur la possibilité pour un Etat neutre, en l’occurrence l’Autriche [14], d’adhérer à l’ONU. Il remarque que « poursuivant à la fois une politique de neutralité et une politique d’admission aux Nations Unies » [15], il faudra trouver « comment concilier ces deux politiques qui, à première vue, paraissent contradictoires ? » [16]. Chaumont considère que l’Autriche est confrontée à une double contradiction. La première contradiction relève de l’ONU, elle-même, à propos de laquelle il se demande « dans quelle mesure le système des Nations Unies laisse-t-il une place à des positions de neutralité ? » [17]. La deuxième contradiction relève encore de cette même organisation mais uniquement lorsque l’ONU est confrontée à une demande d’adhésion d’un Etat ayant adopté un régime de neutralité. En ce sens, cet auteur se demande « dans quelle mesure une situation de neutralité laisse-t-elle une place à certains engagements tels que ceux résultant de la participation aux Nations Unies ? » [18]. Toutefois, cette double contradiction ne lui parait pas insurmontable. En effet, au moment où Chaumont rédige son article sur la neutralité de l’Autriche, l’ONU n’en est encore qu’à ses débuts et l’échec d’une armée internationale, dû à la non réalisation des accords militaires spéciaux de l’article 43 de la Charte des Nations Unies, n’a pas empêché une intervention militaire, en Corée. Intervention faite, non sur le fondement de la Charte, mais par une « entreprise volontaire » de coercition internationale. Il en déduit alors que :

11

« [p]our l’avenir, la sécurité collective dans le cadre des Nations Unies s’oriente vers un système fondé sur le désarmement et le contrôle des armements, beaucoup plus que vers la formation d’une armée internationale au sens de l’article 43 de la Charte » [19].

12A partir de ce constat et s’agissant de la confrontation entre un régime de neutralité et les obligations de la Charte de l’ONU, Chaumont note que ce régime ne pose réellement problème « qu’en ce qui concerne l’action militaire » [20]. Il rappelle l’exemple de la Suisse dans le cadre de la SDN. Cet Etat a pourtant participé à des sanctions économiques et financières sans porter atteinte, selon le Conseil de la SDN, à son statut d’Etat neutre. Quant à la future situation de l’Autriche, dans le cadre de l’ONU, il estime que « tous les engagements autres que militaires contenus dans la Charte des Nations Unies ne peuvent, et sans examen particulier dans chaque cas, être qualifiés d’incompatibles a priori avec le statut d’un Etat perpétuellement neutre ».

13Ce qui est marquant dans cet article de 1955, comme dans son cours de La Haye de l’année suivante, c’est la volonté – encore sous-jacente – de Charles Chaumont de tenter de dépasser la contradiction qui existe entre les fonctions d’une organisation internationale, dont celle de maintien de la paix et le statut particulier d’Etat neutre pour un potentiel Etat membre. Pour ce faire, cet auteur, tout en analysant les différentes évolutions de la neutralité par rapport à la nouvelle sécurité internationale, donne une place essentielle aux États membres de l’ONU ce qui permet de dépasser ce problème. En ce sens, il considère qu’«[i]l appartient aux Nations Unies elles-mêmes soit de s’opposer à pareille évolution si elle est jugée incompatible avec la lettre et l’esprit de la Charte, soit de compléter la Charte sur ce point, si c’est nécessaire, soit de fournir une interprétation juridique et de rechercher les modalités pratiques en lesquelles pourra s’exprimer l’existence d’un ou plusieurs régimes de neutralité dans le cadre de la Charte » [21].

14Cette analyse sera largement reprise dans le Cours publié en 1956 à l’Académie de La Haye qui porte sur un thème proche [22], qui développe largement le lien apparemment manifeste entre l’ONU et la neutralité, à savoir le maintien de la paix [23]. Dans cette deuxième analyse, il constate que si :

15

« la neutralité n’est pas explicitement prévue par la Charte, cette place est néanmoins rendue possible par la nature même des mécanismes de sécurité qui résultent de ses dispositions, dans la mesure où ces mécanismes sont à la fois volontaires et partiels » [24].

16En ce sens, pour Chaumont :

17

« [a]vec une organisation internationale telle que l’Organisation des Nations Unies, entre les deux limites de la bonne foi et du détournement de pouvoir, la neutralité peut apparaître sans de trop grandes ambitions, mais aussi sans trop de honte ni de crainte, comme un des moyens, et parfois des plus efficaces, de réaliser la sécurité internationale, dans certains cas et dans certaines régions » [25].

18Pour cet auteur, la possibilité de concilier deux aspects juridiques, a priori contradictoires, découle d’une considération devenue manifestement essentielle dans la Charte des Nations Unies, le maintien de la paix. Ainsi, dans cette optique, voulue et assurée par l’ONU, un État neutre peut adhérer à cette organisation sans mettre en cause ni son statut de neutralité, ni les obligations qui découlent de cette appartenance puisqu’ils ont en commun le maintien de la paix.

19Outre ce thème d’analyse, notons que Charles Chaumont s’est aussi intéressé aux mutations profondes de la société internationale, telles qu’elles sont advenues entre la publication de sa thèse et celle de son Cours général à l’Académie de la Haye [26]. Est-ce l’analyse de ces mutations qui l’a amené à faire une critique sévère du droit international classique ? Sans se permettre de répondre à sa place à cette interrogation, envisageons différents aspects de la ou des critiques du droit international classique telles qu’on les trouve dans son cours de 1970 et dans des discussions au sein de l’« Ecole de Reims » ou des « Rencontres de Reims » qu’il a lui-même impulsées [27].

B – Le rejet du droit international classique et nouvelle méthode d’analyse

20C’est au début de son cours de La Haye, de 1970, que l’on trouve, clairement annoncé, le rejet par Chaumont de l’approche classique du droit international public.

21Cet auteur donne un sens particulier à la notion de « droit international classique ». Selon lui, cette notion correspond à « l’ensemble des règles et concepts juridiques dans les relations internationales antérieures à la fin de la guerre de 1914 » [28]. Comme nous pouvons le constater, il englobe dans un ensemble large de nombreuses approches spécifiques du droit international public qui vont de l’émergence de ce droit, correspondant notamment à l’apparition des premiers Etats en Europe [29] (dès le Moyen-âge) jusqu’à une période relativement récente, (début de la Première Guerre mondiale).

22Pour cet auteur, ce large ensemble est caractérisé par deux traits fondamentaux mais qui lui posent problème. Ainsi, le premier trait marquant du droit international classique est, selon lui, « la limitation de la participation créatrice » [30]. En effet, Chaumont estime que ce droit a essentiellement pour origine des normes européennes [31]. Il s’agit donc d’un droit européen, adopté par quelques Etats, qui a ensuite été « étendu, d’une manière généralement passive, aux prolongements coloniaux ou ex-coloniaux de l’Europe, ce qui lui permet théoriquement de couvrir l’Amérique, l’Afrique, l’Asie et l’Océanie » [32].

23S’il est possible de partager cette analyse de l’origine du droit international – telle qu’il la présente dans son cours de 1970 – on peut s’interroger sur la pertinence de cette analyse concernant le développement du droit international. Peut-on encore affirmer actuellement que le droit international contemporain, même marqué par son origine européenne, reste soumis à cette unique influence, alors que l’on évoque un phénomène de mondialisation [33]. L’impact de ce que l’on appelle la mondialisation a vraisemblablement ouvert le droit international à d’autres influences. Mais, comme Charles Chaumont l’a lui-même noté dans son cours de La Haye [34], il reste à déterminer, s’agissant du droit international contemporain, les influences les plus marquantes, qui ont orienté la société internationale vers une société plus juste [35]. Dans ce cours, tel qu’analysé longuement par E. Jouannet, Chaumont affirme que :

24

« [q]uand sonne l’heure de la révolte, c’est-à-dire quand l’exigence de la justice parle plus haut que celle de l’ordre, la fiction tombe et les tristes réalités apparaissent. Le droit qui est alors exigé est un droit qui puisse figurer dans l’arsenal politique, sociologique et psychologique des faibles contre les forts. Cette rupture, ce retournement constituent une partie de ce que l’on peut appeler le passage du droit classique au droit contemporain, sans que ce passage coïncide avec une date ou un événement subit, et bien entendu sans qu’il aboutisse à autre chose qu’à une période de transition » [36].

25Est-ce à nouveau la situation à laquelle est confronté le droit international actuel ?

26Outre l’origine particulière du droit international classique, Charles Chaumont estime que ce droit possède un deuxième trait marquant qui est « le caractère formaliste de l’apparition et de l’application des règles du droit international » [37]. Il développe le constat de formalisme du droit international classique en examinant les principales sources de ce droit, à savoir, la coutume, les traités et les principes généraux. Selon lui, « la coutume, une fois acceptée anonymement s’applique à tous, même si elle est contraire aux intérêts fondamentaux de certains » [38]. S’agissant des traités, il note qu’« ils peuvent résulter de l’inégalité [39], de la pression, de la contrainte, ou de la violence, mais [que] leur valeur reste établie par les formalités qu’ils comportent » [40]. Quant aux principes généraux de droit, selon lui, ceux qui sont, en vigueur, « résultent du droit interne des Etats d’Occident » [41].

27Chaumont rejette le droit international classique car, non seulement, il « apparait comme un système abstrait, comme un ensemble de normes formelles détachées de leur contenu concret » [42], mais aussi, parce qu’il correspond « dans son ensemble, [à] la mise en forme des situations de prédominance des forts sur les faibles » [43]. S’il rejette particulièrement le formalisme juridique de ce droit, c’est que, selon lui, il « est injuste par ce qu’il recèle et justifie [et qu’il] est irréel par ce qu’il stabilise et par ce qu’il ignore » [44].

28Comme le note E. Jouannet :

29

« C. Chaumont peut donc livrer une critique radicale et systématique du droit international classique, qui se définit extérieurement comme le droit de la coopération internationale, alors qu’il ne fait que traduire les intérêts catégoriels des classes dominantes au sein de certains Etats » [45].

30Du fait de cette critique du droit international classique, cet auteur a préconisé d’adopter une nouvelle méthodologie d’analyse du droit international. Avant d’y arriver, envisageons la qualification même de la pensée juridique de Charles Chaumont et sa classification dans les grandes théories du droit international. La façon, dont, lors de la dernière Rencontre de Reims, il évalue les apports novateurs de sa pensée, « modifier la façon de voir des écoles de pensée qui étaient dominantes : l’école idéaliste […] et l’école positiviste » laisse entrevoir la difficulté de la réponse à cette question, sauf à considérer que l’on est face à une école de pensée simplement critique. Au-delà, on peut considérer que Charles Chaumont renouvelle l’approche réaliste du droit international en la combinant avec une « idéologie socialisante (qui) a séduit des cercles étendus chez les auteurs du Tiers Monde » [46] ; on peut voir aussi dans l’« Ecole de Reims » un renouvellement profond du volontarisme [47]. E. Jouannet insiste sur le fait (que nous avons pu nous-mêmes constater in concreto dans les cours de Charles Chaumont) que sa critique la plus rude était « sans aucun doute adressée à l’objectivisme sociologique de Georges Scelle », à savoir « le fait d’avoir développé une argumentation idéaliste sous couvert d’une prétendue démarche sociologique », résurgence d’un jusnaturalisme[48]. Pourtant, à travers ces « normes d’action » traduisant la volonté des peuples, qui vont éventuellement se transformer en « normes de langage », Charles Chaumont ne se rapproche-t-il pas, d’une certaine manière, de la théorie scellienne de l’objectivisme sociologique qui est caractérisée par la traduction en normes de droit positif de normes sociales ?

31Si la pensée de Chaumont, en tout état de cause, concrétise une application originale de la méthode dialectique au droit international, n’est-elle par ailleurs qu’une sociologie marxiste du droit ? C’est la question que soulève E. Jouannet [49], sur la base de remarques de participants aux colloques de Reims, notamment lors de la dernière Rencontre qui avait pour thème d’analyser les rapports entre l’objet et la méthode en droit international [50]. Il est vrai que le rapport de Chaumont consacré à « [l]a recherche du fondement du caractère obligatoire du droit international » [51], question qui est, par définition, à la base des différentes théories du droit international pour découvrir le critère de la juridicité, révèle que, pour lui, la réponse reste extérieure au droit, comme il le précise :

32

« d’une manière générale, le sentiment d’obligation se présente donc, à mon point de vue, comme le reflet dans la conscience individuelle et collective du décalage entre deux contradictions, le décalage entre la contradiction primitive et la contradiction consécutive ».

33Ce qu’il complète en considérant que « [l]’obligation juridique en tant qu’élément objectif provient donc de l’existence de deux types de contradictions ». Rechercher le critère de la règle de droit est pour Charles Chaumont « le type de questions formalistes et abstraites ». Mais alors, en réduisant le juridique à sa nature de fait social, la question de savoir s’il y a lieu à distinguer une science de l’être d’une science du devoir-être, se pose, ce qui évidemment a des conséquences sur le rôle que le juriste se voit assigner.

34A l’évidence, une pensée comme celle de cet auteur interroge manifestement quant au rôle du juriste. Adaptant la théorie marxiste au droit international d’un côté, et voulant faire œuvre critique, notamment du positivisme, de l’autre, dont la soi-disant neutralité cache la fonction idéologique, Charles Chaumont se trouve devant un dilemme : comment s’engager sans remplir soi-même une fonction idéologique ? Du Cours général professé à La Haye jusqu’à la dernière Rencontre de Reims, Charles Chaumont va tenter de résoudre ce dilemme en rattachant son militantisme au travail scientifique de l’analyste. Son analyse, fondée sur la fonction de camouflage que remplit le plus souvent la norme internationale, assigne au juriste le rôle de rechercher « une meilleure compréhension de ce qui est derrière le droit international, de ce qui est en-dessous du droit international » [52]. En s’attachant à analyser le jeu des contradictions à l’œuvre dans le passage de l’être au devoir-être puis du devoir-être à l’être, le juriste fait œuvre scientifique puisqu’il participe à un processus de dévoilement. Cette réflexion est aussi un éclairage de ce qui peut expliquer qu’une norme est effective ou ne l’est pas, puisque « le devoir-être suppose une contradiction dépassée […] si la contradiction consécutive est plus forte que la contradiction primitive, le sentiment d’obligation disparaît » [53]. Mais le rôle du juriste ne s’arrête pas à cette fonction de démystification. Si, lors des premières Rencontres de Reims, Chaumont semblait réticent à aller plus loin que la simple identification des éléments des contradictions [54], il estimera plus tard que :

35

« la tâche du droit international n’est pas simplement bien entendu de faire de la science, de constater aussi exactement que possible, si on peut le faire, les réalités qui animent la “société internationale”, mais bien entendu l’objet du droit international, c’est d’être normatif, c’est d’avoir l’audace de poser des propositions, qui, on peut l’espérer, seront applicables en vue de résoudre les conflits […] c’est-à-dire de faire progresser les relations internationales, de dépasser les relations internationales antérieures » [55].

36Mais, ce faisant, il ne s’agit pas pour autant de faire véritablement œuvre de militantisme, critique qui est souvent portée à l’égard de l’Ecole de droit de Reims, et ceci pour deux raisons principales. D’abord, même si la préoccupation de défendre les causes qu’il estime justes, est constamment présente dans les écrits de Chaumont, il rattache cette défense à sa théorie explicative du droit international ; et notamment à cette invocation de l’action des peuples, qui, comme nous le verrons, sous-tend le mouvement dialectique à l’œuvre dans le jus cogens. L’action des peuples est défendue puisqu’elle est à l’origine des mutations faisant progresser le droit international. Ensuite, s’il s’agit de mener un combat, c’est au sein de la doctrine du droit international, et pas dans la pratique ou dans l’action politique. L’Ecole de Reims est d’abord une tentative de promouvoir une école critique. C’est ce que Chaumont rappelait fortement dans son ouverture à la dernière Rencontre :

37

« Je ne crois pas que j’ai besoin d’insister beaucoup sur les raisons, les motifs qui expliquent la création de ces Rencontres de Reims […]. Un certain nombre d’entre nous ont eu l’idée que, dans l’analyse du droit international, il convenait peut-être d’apporter quelques nouvelles perspectives et quelques nouvelles façons de réfléchir sur le droit international, en particulier afin de dépasser un petit peu, ou tout au moins de modifier, la façon de voir des écoles de pensée qui étaient dominantes : l’école idéaliste […] et l’école positiviste » [56].

38Les termes qu’il emploie dans ce qui peut apparaître comme un testament, laissent percevoir une modestie que les évènements de cette année 1989 peuvent contribuer à expliquer.

39En préconisant une nouvelle approche du droit international, abordons à cet égard des questions auxquelles Charles Chaumont s’est beaucoup intéressé dont notamment la place de l’Etat et celle des peuples en droit international (II).

II – Charles Chaumont et la place de l’Etat et des peuples en droit international

40Si cet auteur a abordé la place de l’Etat en droit international, c’est parce qu’après la 1e et la 2e Guerre mondiale, deux organisations internationales – tout juste créées – ont donné aux Etats un poids particulier dans la société internationale, en leur attribuant ou en leur reconnaissant une caractéristique et une protection nécessaires à leur situation d’Etat. Charles Chaumont s’est intéressé à certaines notions de droit international liées aux Etats, envisagées surtout dans la Charte de 1945. C’est le cas d’une notion classique comme la souveraineté ou de notions plus nouvelles comme la sécurité ou l’agression (A). Par ailleurs, cet auteur s’est également attaché à l’étude d’un nouveau sujet de droit international, mentionné lui aussi dans la Charte des Nations Unies mais qui a pris une place spécifique dans l’ordre juridique international, contemporain de ses analyses, à savoir les peuples (B).

A – Souveraineté de l’Etat, sécurité et agression

41L’Etat est le sujet premier et habituel du droit international depuis l’émergence de ce phénomène, mais la survenance de deux guerres mondiales, en l’espace de vingt ans - qui ont l’une et l’autre commencé en Europe - a entrainé l’apparition d’une nouvelle structuration de la société internationale sous forme d’une organisation internationale à caractère général. En effet, suite à la 1e Guerre mondiale, les Etats vainqueurs de cette guerre ont cherché à se réunir sous cette forme, pour éviter toute nouvelle guerre. Telle est d’ailleurs l’origine de la création de la Société des Nations. Mais, face à l’échec de cette dernière qui n’a pu empêcher une 2e Guerre mondiale, les Etats vainqueurs ont gardé l’idée d’une organisation internationale mais en ont imaginé une autre, dénommée l’Organisation des Nations Unies (ONU). Cette nouvelle organisation est destinée non seulement à assurer la paix mais aussi à structurer d’une manière plus efficace, la société internationale composée elle-même essentiellement d’Etats. Il n’est donc pas étonnant que les auteurs de droit international de cette l’époque, dont Charles Chaumont, aient ressenti le besoin, à la fois, de réaffirmer la souveraineté des Etats (1) et d’envisager leur sécurité de manière à lutter contre toute agression (2).

1 – La souveraineté de l’Etat

42L’analyse de la souveraineté de l’Etat étant un phénomène récurrent en droit international depuis l’époque classique de ce droit, Charles Chaumont a naturellement abordé ce sujet de recherche mais pour l’étudier dans un contexte nouveau. Il l’a notamment fait, en 1960, dans des mélanges en l’honneur de son directeur de thèse, Jules Basdevant [57] - qui s’était lui aussi intéressé à cette question – et dans son cours général à l’Académie de La Haye paru en 1970 [58]. A cet égard, rappelons l’analyse de Basdevant concernant l’Etat. Pour ce dernier, « [l’]Etat est l’autorité la plus haute dans l’ordre juridique actuel ; cette autorité est donc l’autorité suprême ; on est fondé à l’appeler l’autorité souveraine puisqu’il n’y a pas d’autorité établie qui lui soit supérieure » [59]. Notons que Charles Chaumont, tout en se référant à la notion de souveraineté a adopté une vision assez critique de la souveraineté, telle qu’envisagée par le droit international classique. Il estime que pour ce droit « la souveraineté a eu trop souvent pour ambition de fournir une façade à l’arbitraire des Etats qui avaient les moyens d’imposer leur volonté » [60]. Il donne comme exemple « l’illusion de l’égale souveraineté du vainqueur et du vaincu après une guerre » ainsi que « l’affirmation du domaine réservé de l’Etat sans qualification par le droit international » [61]. Cet auteur aborde donc différemment des auteurs classiques, la notion de souveraineté. Son analyse se fonde sur une double réflexion.

43Dans une première approche, il fait intervenir la notion de « nation ». Il estime que l’analyse de l’Etat doit se faire avec celle de nation. Il considère en effet que « [q]uelle que soit l’analyse (classique, démocratique, libérale, capitaliste, marxiste, etc.) que l’on fasse de l’Etat, son infrastructure nationale est toujours présente » [62]. De cette approche de l’Etat, la nation en devient un élément déterminant.

44Dans une seconde approche, Chaumont tient à lier ensemble trois concepts dont celui de la souveraineté pour analyser plus précisément cette notion. À la souveraineté, il relie l’État et la nation [63] par une sorte de loi. Il considère que :

45

« la loi qui régit la liaison réelle existant entre les trois notions d’État, de nation et de souveraineté [s’exprime] de la manière suivante : s’il peut y avoir nation sans État et État sans souveraineté, il ne peut pas y avoir État sans nation, ni souveraineté sans État » [64].

46Il en conclut qu’« ainsi conçue, la souveraineté apparait comme l’expression internationale de la nation, dont l’Etat est la superstructure interne » [65].

47Dans son cours de La Haye de 1970, Chaumont affine son approche de la souveraineté en faisant intervenir une nouvelle notion, celle de peuple. Son raisonnement part de l’interrogation suivante : « un peuple a-t-il le droit de ne pas dépendre, pour ce qui est des décisions essentielles, d’autres gouvernements que les siens ? » [66]. Question à laquelle il répond par un double constat. Selon lui, d’une part, « [t]ant que les peuples existent avec leurs singularités, la souveraineté a un sens qui n’est ni abstrait ni négatif : ce n’est pas un pouvoir illusoire de tout faire, ni un pouvoir irréel de tout refuser », et d’autre part, « la souveraineté est intimement liée de nos jours au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes » [67].

48En dépit ou grâce à ce lien particulier avec la notion de peuple [68] et en réaction aux positions de certains auteurs ou en phase avec d’autres, pour Chaumont, la souveraineté est « au cœur même des relations internationales contemporaines » [69].

49Si, selon cet auteur, la souveraineté reste un concept essentiel, bien qu’élargie, de la société internationale, qu’en est-il de son approche de la sécurité des Etats, voire de la notion d’agression ?

2 – Sécurité des Etats et la question de l’agression

50Les écrits de Charles Chaumont portant sur la sécurité des Etats sont en lien direct avec la notion de sécurité telle qu’établie par la Charte des Nations Unies. En effet, chaque écrit de cet auteur portant sur la sécurité internationale se réfère généralement aux obligations de la Charte, que ce soit l’interdiction de l’emploi de la force (art. 2 § 4) ou la sécurité collective (chap. VI, Règlement pacifique des différends et chapitre VII, Action en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d’acte d’agression) [70].

51Il est possible de considérer que c’est l’impact des deux guerres mondiales sur sa vie personnelle ainsi que sa participation aux négociations de création de l’ONU qui l’ont marqué au point d’être particulièrement sensible à la question de la sécurité internationale. Cette hypothèse est confirmée par son ouvrage intitulé « [l]a sécurité des États et la sécurité du monde » [71], publié en 1948. Dans cet ouvrage, il analyse une double possibilité, voire difficulté, en matière de sécurité internationale telle que voulue avec l’adoption de la Charte. Il constate qu’il y a une sécurité fondée soit sur « l’entente des Grandes puissances » [72] soit sur « [l]’exclusion des États […] qui ne se comprend que parce qu’apparait en même temps le rôle nécessaire d’une institution internationale […] [qui] peut remplir une fonction qui dépasse les facultés de l’État » [73]. Ce constat ne redevient-il pas d’actualité ?

52Par ailleurs, concernant la sécurité des États, Charles Chaumont s’est également intéressé à une notion nouvellement envisagée dans la Charte, celle de l’agression [74]. En ce sens, en 1956, il a publié une analyse relative à l’« explication juridique de la notion d’agression » [75] suivi, en 1971 de l’actualisation de la définition de cette notion [76]. Dans son approche de 1956, cet auteur développe les difficultés à définir l’agression dans le cadre de l’ONU, suite à l’adoption par l’Assemblée générale de la résolution 377 par laquelle, elle s’est estimée compétente pour « démasquer les agresseurs » [77] et aux désaccords entre Etats quant à l’utilité d’une telle définition. Selon lui, « on s’est posé, et on peut encore se poser la question de savoir si tout cela n’est pas “beaucoup de bruit pour rien” ». La Charte des Nations Unies ne contient apparemment aucune définition de l’agression et l’article 39 de cette Charte donne au Conseil de Sécurité le pouvoir de constater l’agression, pouvoir qui semble impliquer l’inutilité, voire même pour certains esprits l’illégalité d’une définition de l’agression (non prévue par la Charte) [78]. Il rappelle à ce sujet les débats inaboutis de la Conférence de San Francisco à propos du futur chapitre VII ; débats au cours desquels « il est apparu néanmoins à la majorité qu’une définition préalable de l’agression dépassait les possibilités de cette Conférence et le but de la Charte » [79]. Pour autant, dans la mesure où, comme le rappelle cet auteur ;

53

« [l]e Conseil de Sécurité “constate […] l’acte d’agression”, puis il recommande ou décide des mesures à prendre. Alors donc que ces mesures sont le fruit d’une démarche constructive du Conseil, l’acte d’agression se présente comme une réalité objective que le Conseil se borne à constater » [80].

54Cet auteur en fait l’analyse en énumérant neuf principes issus de la Charte des Nations Unies qui permettent de déterminer les éléments constitutifs de cette constatation [81] à partir desquels il propose une définition essentiellement fondée sur l’agression armée [82].

55Comme Chaumont l’avait pressenti la question de la définition de l’agression a perduré dans le temps [83], au-delà même de la création de la Cour pénale internationale en 1998. Ce n’est qu’en 2010 qu’a été modifié le Statut de Rome, en permettant par son nouvel article 8 bis, de définir ce crime [84]. Cette définition aura-t-elle une application effective ? Seul l’avenir du contexte conflictuel actuel permettra de le savoir.

56Si l’on garde à l’esprit l’enseignement de Charles Chaumont, nous pouvons constater que la situation internationale actuelle confirme la place essentielle de l’État dont il faut encore protéger la souveraineté et la sécurité. Mais, rappelons toutefois, que lui-même a établi une limite importante aux droits de ce sujet qui est de respecter le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes.

B – Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

1 – Notion de peuple

57L’intérêt que cet auteur a eu pour la question du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes se retrouve, entre autres, dans son cours de 1970 à La Haye, dans son article de 1976 ainsi que dans certaines des Rencontres de Reims qu’il a impulsé et qui se sont déroulées de 1973 à 1989. Comme nous l’avons remarqué précédemment, pour Chaumont, le peuple a une place manifeste en droit international. Selon lui, « [l]e Droit International contemporain est notamment caractérisé par une certaine apparition de la notion de peuple au milieu des notions classiques d’un Droit International fondé sur la seule volonté des gouvernements » [85]. C’est d’ailleurs ce qu’il affirme lors de la 4e Rencontre de Reims, en estimant qu’« il existe de nos jours une force qui a pris un rôle capital, moteur, créateur dans la dynamique du droit international : c’est le peuple » [86]. Encore faut-il déterminer la place du peuple dans ce droit. A cet égard, un de ses articles publié en 1976, intitulé « [l]e droit des peuples à témoigner d’eux-mêmes » [87], apporte une réponse à cette question. Il y remarque d’emblée que non seulement l’article 1 § 2 de la Charte des Nations Unies mais aussi de nombreuses résolutions de certains de ses organes « parlent du “droit des peuples à disposer d’eux-mêmes” » [88]. Tout en notant préalablement « l’extrême difficulté du problème de la preuve des peuples » en droit international contemporain, il estime qu’une voie pourrait être ouverte en ce sens dans la mesure où un peuple prouve son existence par l’action, en l’occurrence par le combat, qui est « le témoignage du peuple en marche » [89]. Il affirme ainsi que « c’est la lutte des peuples qui a fait apparaitre ce principe du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes ; ce sont les hommes, avec leur chair et leur sang, et ce n’est pas une question de rôle de juridictions et de rôle de juristes » [90]. Mais si lutte il y a, c’est uniquement dans un but précis qui est la libération du peuple. En effet, comme Charles Chaumont le précisait souvent, un peuple qui lutte cherche à se libérer d’une oppression et il cherche à réaliser son autodétermination.

58En commentant la pensée de cet auteur sur la notion de peuple et en la replaçant dans son opposition entre le droit international classique et le droit international contemporain, E. Jouannet affirme que :

59

« le droit international contemporain se caractérise, selon Chaumont, par l’apparition de cette notion de peuple, alors que le droit international classique était fondé sur la volonté des gouvernements. Il y a ainsi une inversion des jeux de puissances. Le plus fort n’est pas toujours celui qu’on croit et, à la faveur des évolutions en cours, on observe des retournements qui peuvent à terme changer l’état de la société internationale » [91].

60Il est un fait que l’analyse de Chaumont, comme celle d’autres auteurs contemporains, sur l’émergence de la notion de peuple [92] correspondent à un contexte particulier de l’après 2e Guerre mondiale qui a vu certaines colonies aider leurs métropoles à se libérérer. Après cette guerre, ces Etats et territoires ont alors envisagé la possibilité de devenir indépendants de leur métropole, idée qui a été en partie confortée par l’Assemblée générale de l’ONU en adoptant de nombreuses résolutions [93], soutenue d’ailleurs tant par l’URSS que par les EU. Ces résolutions ont permis la mise en œuvre de la décolonisation, mais, comme le précise Chaumont dans son cours de 1970 :

61

« la souveraineté et l’autodétermination n’ont pas le même contenu pour les situations coloniales, pour les situations néocoloniales, pour les relations entre pays développés de type capitaliste, pour les relations entre pays développés de type socialiste. Il est impossible de donner une formule unique du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes pour toutes ces situations, et par conséquent d’élaborer un corps unique de règles pour l’application de ce droit » [94].

62En d’autres termes, outre les cas d’autodétermination en période de décolonisation, faut-il donner un autre contenu au droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, lorsqu’il s’applique dans un autre contexte ?

2 – Le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes

63La notion de «droit» accordé à un sujet nouvellement apparu en droit international supposait une véritable réflexion que Charles Chaumont n’a pas hésité à faire en ayant à l’esprit les principes d’indépendance et de liberté auxquels il a souvent eu recours dans ses réflexions.

64Notons que dès la 1e Rencontre de Reims, cet auteur pose le problème de la place des peuples dans la société internationale. Pour ce faire, il utilise l’expression « volonté des peuples » et, selon lui :

65

« cette volonté existe, mais elle n’existe pas en langage verbal. Je veux dire qu’elle n’existe pas dans la technique ou selon le procédé de la formulation des normes juridiques : la volonté des peuples existe par à-coups, soit pour la solution des contradictions, lorsque, par exemple, il s’agit d’une lutte de libération nationale, soit pour la simple position des contradictions » [95].

66Il ajoute que :

67

« c’est dans l’action périodique des peuples que se forme le corps des normes nouvelles, du Droit International. De cette action périodique, certaines grandes circonstances en sont le témoignage, par exemple la Révolution russe d’Octobre, la Révolution chinoise, la décolonisation classique et la décolonisation plus contemporaine dirigée contre le néocolonialisme. Et c’est là que se trouve, en quelque sorte, le creuset des normes nouvelles […] » [96].

68A cet égard, notons que cet extrait qui présente le droit des peuples comme un droit de décolonisation envisage également une autre hypothèse, le néo-colonialisme, que l’on peut vraisemblablement analyser comme le poids économique des États développés par rapport aux États longtemps qualifiés de sous-développés. Bien que Charles Chaumont n’ait guère abordé cette question dans ces écrits [97], c’est dans le cadre de la 3e Rencontres de Reims que la question de l’économie et du droit des peuples a été abordé, en particulier par Jean Salmon. Pour ce dernier et sans opposition manifeste de Chaumont, il existe une « autodétermination économique » qui est fondée sur de très nombreuses résolutions de l’Assemblée générale [98]. Cette autodétermination correspondrait, entre autres :

69

« au droit pour chaque pays d’adopter le système économique et social qu’il juge être le mieux adapté à son propre développement, […] [au] droit inaliénable des peuples des territoires dépendants […] à l’indépendance et à la jouissance des ressources naturelles de leurs territoires, […] [à] la souveraineté permanente des États et des peuples dont les territoires sont occupés sur leurs ressources nationales, […] » [99].

70Qui plus est, « le droit à l’indemnisation et à la restitution des mêmes Etats et peuples est proclamé par la déclaration concernant l’instauration d’un nouvel ordre économique international » [100]. Analysant de nombreuses hypothèses du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes en matière économique, J. Salmon, s’interroge dans sa présentation, entre autres, sur le fait de savoir :

71

« si le peuple bénéficie de droits contre son propre État, si celui-ci dirigé par une bourgeoisie compradore vendue à l’étranger, qui laisse ce dernier continuer le pillage des ressources nationales, possède des droits contre cet appareil d’État ? » [101].

72Ce qui l’amène à estimer que « [d]ans ce cas, on se trouve devant une opposition entre peuple et État » [102]. Il semble alors que ce problème relève autant d’une analyse de droit interne que de droit international.

73Le silence de Chaumont sur la notion de développement [103] ne signifie pas son désintérêt pour cette question comme le montre son approche particulière du droit international en général qu’il présente dans son analyse de la « relation du droit international avec la structure économique et sociale » [104].

74Que penser de l’actualité de la pensée de Chaumont quant au droit des peuples ? A cet égard, la tentative de Monique Chemillier-Gendreau, une des figures tutélaires de l’Ecole de Reims, de penser le droit international dans le contexte actuel est symptomatique des bouleversements induits par l’évolution du monde sur ce courant doctrinal. L’auteur appelle à un droit de résistance pour permettre aux peuples de « faire valoir leur existence comme association politique d’hommes libres » [105], mais en précisant que « dans le choix des moyens, il (ce Droit) rencontre les obligations découlant des droits de l’Homme. La nouvelle dialectique se joue entre ces deux pôles » [106]. L’appel à l’activation de ce droit de résistance, défini comme étant « celui d’entrer dans un agir ensemble qui dépasse le cadre de chaque Etat, car son fondement est le principe d’existence d’une communauté politique à l’échelle du monde » [107], peut être certes perçu comme une utopie que n’aurait pas nécessairement soutenue le fondateur de l’Ecole de Reims, mais elle atteste en tout cas du caractère toujours stimulant de ce courant doctrinal.

75Par ailleurs, ce courant doctrinal et critique, initié par Charles Chaumont, a apporté une nouvelle méthode d’analyse du droit international.

III – Une méthode d’analyse fondatrice d’une école critique du droit international

76Que Charles Chaumont ait développé une méthode d’analyse du droit international appliquant la philosophie dialectique n’est pas pour surprendre, compte-tenu de sa double formation, qu’il revendiquait : licence en philosophie (1932), avant la licence en droit (1933). Si ses premiers écrits, on l’a vu, restent dominés par la technique juridique, dès 1960, déjà le théoricien du droit, qui va développer une véritable école de pensée juridique, perce sous sa contribution à l’hommage rendu à son directeur de thèse, le Président Basdevant [108]. Mais ce sont le Cours général professé à l’Académie de droit international de La Haye puis les huit Rencontres de Reims, qui vont lui offrir l’occasion de développer sa pensée. Le recours au courant dialectique le faisait remonter à l’Antiquité, à travers Héraclite et Zénon d’Elée, qu’il citait volontiers, et allait jusqu’à Mao Tsetung, dont les nombreuses citations, dans le Cours général, alimentèrent les critiques ironiques de certains de ses prestigieux collègues [109], en passant bien entendu par Hegel et Marx. Reprenant de Hegel l’idée selon laquelle « il n’y a pas de progrès sans négation de ce qui existe, et cette négation fait naître la contradiction qui est surmontée dans une synthèse qui est à la fois conservation, suppression et élévation » [110], il se réfère à Marx et Engels pour adapter la méthode dialectique à l’histoire concrète, notamment en distinguant l’infrastructure de la superstructure. De Mao, il va surtout retenir l’approfondissement de la distinction entre contradiction primaire et contradiction secondaire [111].

77L’application de la méthode dialectique au Droit international, ainsi conçue par Charles Chaumont, peut être résumée dans quelques idées, qui sont évidemment loin de restituer la richesse de sa pensée, et qui fondent une école critique du droit international [112]. Cette pensée repose sur une méthode originale (A) et des notions que l’on peut qualifier de fondamentales (B).

A – Une application originale de la méthode dialectique au droit international

78Rappelons d’abord une approche particulière de la méthode d’analyse de Charles Chaumont. Il considère que le droit international est l’expression de contradictions sous-jacentes qui se trouvent dans les rapports économiques et sociaux mais pas seulement :

79

« ce serait méconnaitre l’infrastructure du droit international, que de sous-estimer ces facteurs que sont la nation, le niveau de développement, la classe dominante, les solidarités internationales concrètes (de langue, de race, d’intérêt ou d’idéologie), la volonté de puissance des gouvernants, les représentations psychiques des dirigeants et des masses. Ces facteurs sont à la fois sources de contradictions et sources de mutations » [113].

80Et si la pensée juridique de Charles Chaumont, à certains égards, peut être considérée comme un renouvellement du volontarisme, c’est à la condition d’admettre que :

81

« la notion de volonté n’a de valeur, comme concept, que si l’on tient compte des facteurs concrets qu’elle suppose et sur lesquels elle s’appuie. Tout le faisceau de forces qu’expriment les notions de nation, classe, développement, pouvoir économique, potentiel militaire, position géographique ou stratégique, régime politique, etc suscitent cette volonté et lui fournit son contenu et son dynamisme » [114].

82Ensuite, selon Chaumont, dans cette vision dialectique, la norme de droit international a pour fonction soit de camoufler ces contradictions, soit de les mettre entre parenthèses, soit de les surmonter. Charles Chaumont reprend la formule de Paul Valery « le Droit, c’est le langage » [115] pour développer l’idée que les normes de droit international sont des normes de langage dont la fonction est « l’expression momentanée de la solution de ces contradictions » [116], à travers l’accord qu’elles formalisent. « Mais les volontés dans l’accord sont hétérogènes bien que l’accord soit la conjonction de volontés » [117] ; si bien que la norme de droit international ne va surmonter qu’exceptionnellement les contradictions. La plupart du temps la norme ne fera que les mettre entre parenthèses [118]. Le droit peut aussi camoufler les contradictions. A cet égard, le droit international dit « classique » est caractéristique de cette situation. Comme nous l’avons vu,

83

« le droit classique, injuste par ce qu’il recèle et justifie, est irréel par ce qu’il stabilise et par ce qu’il ignore. Reposant sur la loi du plus fort, à un moment donné, en cristallisant cette loi, il s’éloigne des relations internationales réelles et s’expose constamment à rester lettre morte » [119].

84Mais la méthode dialectique repose aussi sur le mouvement : les contradictions évoluent. Si bien que la norme de droit international « n’a jamais un caractère définitif » [120] que « l’expression de la volonté est dans l’instant » [121] et qu’en conséquence « l’expression de la volonté est toujours sous réserve » [122]. Et, Charles Chaumont de se demander :

85

« si la plupart des solutions données par le droit international positif aux contradictions ne sont pas tout simplement des mises entre parenthèses de ces contradictions, comptant sur l’évolution historique pour les faire disparaître. Dans ces conditions, la norme serait plutôt le résultat d’un répit, d’une lassitude, d’une impuissance de la volonté […] dès que le répit est terminé, la contradiction ressurgit » [123].

86L’originalité de la pensée juridique de Chaumont s’est particulièrement déployée dans la théorisation qu’il va opérer à propos de ce mouvement dialectique. Il décompose ce mouvement en deux passages :

87

« il y a d’abord le passage de l’être au devoir-être et il y a ensuite le passage du devoir-être à l’être. Le passage de l’être au devoir-être, c’est le passage de la réalité internationale, de la réalité psycho-sociologique à la norme de droit. L’autre passage, c’est la situation spécifique qui fait que la norme juridique devient un fait. La norme juridique est un devoir-être, mais c’est un devoir-être qui entre dans le domaine des faits. Si elle n’entre pas dans le domaine des faits, il n’y a pas de norme juridique » [124].

88Pour Charles Chaumont, la norme juridique se situe donc à un certain moment d’évolution de la contradiction. Mais « la norme juridique, qui est aussi la transformation de la contradiction, recèle encore la contradiction ». Devenant lui-même de l’être, le sollen devient partie intégrante de la réalité et donc lui-même devient un élément de la contradiction ;

89

« nous appellerons la première contradiction “la contradiction primitive”, c’est-à-dire la contradiction qui est inhérente à la réalité sociale et qui oblige à aboutir à la norme juridique, qui conduit les Etats à la norme juridique. Et nous appellerons la deuxième contradiction, c’est-à-dire celle qui apparaît dès que la norme existe “la contradiction consécutive” ».

90Ainsi Charles Chaumont construit une école critique du droit international qui repose sur quelques notions fondamentales.

B – Les notions fondamentales ou le jus cogens

91L’originalité de la pensée juridique de Charles Chaumont, saisie dans son évolution, va surtout se déployer dans l’analyse qu’il fait de la notion de jus cogens. Il faut rappeler que le Cours général à l’Académie de droit international se tient peu après que le texte de la Convention de Vienne sur le droit des traités de 1969 ait consacré la notion [125]. Dans son cours, il va d’abord adopter une position que l’on peut qualifier de minimaliste. Il remarque déjà que, si l’on interprète la notion de jus cogens comme caractérisant des règles échappant à l’accord, elle ne peut être retenue :

92

« il y a une contradiction apparemment insoluble entre toute conception du droit international fondée sur la suprématie de l’accord et l’acceptation d’une notion telle que celle de jus cogens, que l’on définit comme caractérisant des règles échappant à l’accord. Car à partir du moment où l’on se soustrait à ce dernier, il faut rechercher d’où peuvent provenir ces règles et l’on réintroduit alors des explications que la conception de l’accord a pour caractéristique de récuser, du genre de celles du droit naturel ou de la volonté de la communauté internationale » [126].

93Bref, si l’on veut échapper, à travers la consécration du jus cogens, à ce qui serait un avatar du droit naturel ou de l’objectivisme, la notion de jus cogens ne peut alors renvoyer qu’à des principes suffisamment généraux pour faire l’objet d’un accord de la part de tous les Etats, et qui sont à ce titre au même niveau de l’ordre juridique international. Ainsi en est-il de la souveraineté, de l’égalité, du droit des peuples à disposer d’eux-mêmes, de l’interdiction de l’agression.

94

« L’inspiration commune à ces principes est la négation d’une autorité supérieure des uns sur les autres, donc la relativité ; et finalement ils sont eux-mêmes des manières d’exprimer, dans les domaines auxquels ils correspondent, le principe essentiel de l’accord » [127].

95Mais la conséquence de cette généralité, c’est que ce sont « des principes abstraits, détachés des conditions réelles, et planant dans une zone de suprématie conceptuelle » d’où ils « se heurtent, dès qu’ils sont appelés à servir concrètement, aux contradictions de la réalité » [128]. S’ils fournissent un cadre pour les Etats dans la solution des contradictions, ils vont donner lieu à des interprétations différentes :

96

« nous appellerons donc “droit impératif général” non pas un jus cogens imprécis émané d’une communauté internationale inexistante, mais un certain nombre de normes, qui, quoi que leurs interprétations soient contradictoires, font l’objet d’une reconnaissance généralisée, en ce sens que tous les Etats acceptent ces normes d’une manière expresse ou tacite, en tant qu’elles sont des expressions de la primauté de l’accord » [129].

97Charles Chaumont ajoute, dans son Cours général, que le droit impératif général correspond à « un droit de transition », exprimant « des mutations en cours » [130]. Et c’est sur cet aspect qu’il va plus tard rebondir pour préciser sa pensée. Pour comprendre cette évolution, il faut évoquer la distinction qu’il fait apparaître entre la volonté formelle des gouvernants et la volonté des peuples. La volonté des peuples « n’existe pas en langage verbal […] la volonté des peuples existe par à-coups […] en d’autres termes, à côté des normes juridiques de langage […] [i]l y a ce qu’on pourrait appeler “des normes d’action” » [131]. Cette action périodique des peuples forme le « corps de normes nouvelles de droit international […] une autre manière de voir le corps de normes et de voir l’ensemble du droit international et qui, elle, peut donner une signification très particulière à cette notion très controversée du jus cogens » [132]. C’est cette signification qu’il va préciser dans son article « Mort et transfiguration du jus cogens » [133]. Après avoir noté qu’ :

98

« [i]l y a pourtant un fait indéniable, qui suffirait à faire prendre au sérieux la notion de jus cogens : la majorité des Etats dits du Tiers Monde est favorable à cette notion qui, à certains égards, a pris l’allure d’un mythe juridico-politique [134]. Mais ce mythe n’est pas abstrait […] : il symbolise l’avènement continu d’un Droit international nouveau au détriment de divers principes du Droit international traditionnel » [135].

99Charles Chaumont reprend alors la distinction entre normes de langage et normes d’action pour distinguer le jus cogens des appareils d’Etat du jus cogens des peuples. Le premier, qui passe par le langage, se concrétise donc dans ces grands principes énoncés par les articles liminaires de la Charte des Nations-Unies (principe de l’égalité des droits des peuples et de leur droit à disposer d’eux-mêmes, principe de l’égalité souveraine des Etats, principe de bonne foi, principe du règlement pacifique, principe d’interdiction de la force, principe de non-intervention, respect des droits de l’Homme). A ces principes abstraits s’appliquent donc des interprétations contradictoires. Mais l’action des peuples, qui s’exprime par des révoltes, des luttes, traduit une force qui :

100

« peut avoir une valeur normative dans la mesure où elle est une activité volontaire et efficace qui tantôt sous-tend la volonté des appareils, tantôt la conteste ou même la renverse. Un tel genre d’activités comporte ce que l’on peut appeler des “normes d’action” par différenciation d’avec les “normes de langage”, qui forment le pain quotidien du droit international » [136].

101Charles Chaumont qualifie ce jus cogens des peuples de « jus cogens primitif » ; lorsque ce jus cogens, repris par les appareils gouvernementaux, va devenir des normes de langage, il est alors qualifié de « jus cogens dérivé ». Devenant du jus cogens dérivé, il court évidemment le risque de se concrétiser dans des principes abstraits, faisant l’objet d’interprétations contradictoires.

102

« En posant le jus cogens comme un impératif supérieur à leur volonté, les Etats impliquent une référence qui ne peut pas être uniquement cette volonté. Mais en même temps cette référence est exprimée par leur volonté et comporte les dangers d’ambiguïté, d’infléchissement ou de déviation » [137].

103La pensée juridique de Charles Chaumont dévoile certainement son originalité la plus profonde dans cette référence à l’action des peuples. L’auteur du célèbre article « Le droit des peuples à témoigner d’eux-mêmes » [138], qui assène que peuple, nation et Etat sont des notions distinctes, fait donc – comme nous l’avons déjà remarqué - du peuple le ressort fondamental du droit international contemporain.

104Pour terminer avec la pensée de cet auteur qui a marqué et qui marque encore de nombreux juristes internationalistes, tentons d’évaluer l’actualité de la pensée de Charles Chaumont. Ceci oblige à évoquer l’évolution du contexte des relations internationales, dans la mesure où les grandes contradictions à l’œuvre résultent de celui-ci. L’époque durant laquelle Chaumont écrit est marquée par une bipolarisation contestée et par la fin du mouvement de décolonisation. S’agissant de la bipolarisation, qui se traduit d’abord par une opposition bloc capitaliste/bloc communiste, un aspect important − dans la mesure où il influence directement la pensée de Charles Chaumont − tient aux contradictions ouvertes à l’intérieur du camp communiste, la Chine de Mao apparaissant comme le facteur progressiste favorisant les mutations du droit international. S’agissant de la décolonisation, elle se traduit par l’émergence de nombreux nouveaux Etats qui, ayant parfois des intérêts convergents, forment un ensemble, le Tiers Monde, qui était susceptible de défendre, dans les enceintes internationales, ses intérêts.

105A l’évidence, le monde a connu, par rapport à ces grandes contradictions, un véritable bouleversement. La mondialisation triomphante, notamment grâce à la fin de la bipolarisation, se traduit par deux mouvements qui peuvent apparaître comme contradictoires mais qui sont liés : une interdépendance accrue et un phénomène de fragmentation. En effet, la mondialisation est couramment définie comme un phénomène d’abord économique « qui se traduit par l’intensification des interdépendances planétaires dans un nombre croissant de domaines de la vie sociale, culturelle, politique ». Mais en même temps :

106

« le nouveau système international est fragmenté, non seulement en un nombre d’Etats qui n’ont jamais été aussi proliférant, mais aussi en un nombre incroyable d’acteurs qui n’obéissent pas aux mêmes règles, qui n’ont pas les mêmes obligations, la même identité, et dont certains sont plus puissants que la moyenne des Etats-membres des Nations-Unies » [139].

107Autrement dit, si la pensée de Charles Chaumont peut encore être mobilisée pour comprendre le processus de formation d’une norme et ses perspectives d’application, elle est moins utile pour appréhender ces grandes transformations du système intrenational et leurs conséquences sur le droit international actuel.

108Notons à titre de remarque finale que les écrits de Charles Chaumont offrent, à la relecture, toujours ce plaisir d’une pensée profonde et singulière, à l’image de l’homme lui-même.


Date de mise en ligne : 07/08/2016.

https://doi.org/10.3917/civit.035.0197

Notes

  • [1]
    Que ce soit à la Faculté de Droit de Nancy de 1943 à 1984, à l’IEP de Paris ou à l’Université Libre de Bruxelles. Pour une amorce de présentation de sa biographie, v. le discours fait à l’occasion de son départ de l’Université libre de Bruxelles en mai 1971, (http://cdi.ulb.ac.be/a-propos-du-centre/historique/historique-de-lenseignement-du-droit-international-public-a-lulb/charles-chaumont-1913-2001/) ; v. également la présentation de C. CHAUMONT dans « Galerie des Internationalistes », site de la SFDI par C. APOSTOLIDIS : (http://www.sfdi.org/internationalistes/chaumont-charles/).
  • [2]
    V. sa bibliographie, cité par C. APOSTOLIDIS, note 1 ; à titre d’analyse de sa pensée, E. JOUANNET, « La pensée juridique de Charles Chaumont », RBDI, 2004/1, pp. 259-289 ou en ligne dans (https://www.univ-paris1.fr/fileadmin/IREDIES/Contributions_en_ligne/E._JOUANNET/La_pensee_juridique_de_C.Chaumont.pdf).
  • [3]
    V., C. CHAUMONT, Hommage. Jules Basdevant, AFDI, 1967, pp. 1-3
  • [4]
    Entre crochets, remplacement du nom de Jules BASDEVANT par celui de C. CHAUMONT.
  • [5]
    Les auteurs se réfèrent à des enseignements suivis dans les années 70 qui peuvent être considérés comme caractéristiques d’une certaine approche du droit international, notamment telle que celle utilisée par C. CHAUMONT.
  • [6]
    C. CHAUMONT, La conception américaine de la neutralité - Essai sur le droit international de la neutralité aux États-Unis, thèse, Paris, Rousseau, 1936.
  • [7]
    Ibid. pp. 66-82 et pp. 103-130. V. notamment p. 103, le titre IV.
  • [8]
    V. le discours fait à l’occasion de son départ de l’Université libre de Bruxelles en mai 1971 (note 1).
  • [9]
    Le texte entre guillemets, légèrement modifié, est extrait de ce discours à l’Université libre de Bruxelles.
  • [10]
    Pendant cette période, comme de nombreux français, il a été mobilisé et démobilisé. Il choisit ensuite la résistance comme le montre sa biographie (note 1, le même discours de 1971).
  • [11]
    Une bibliographie des ouvrages et écrits de C. CHAUMONT est consultable dans les Mélanges qui lui ont été offerts ainsi que (v. note 1) sur le site de la SFDI.
  • [12]
    Outre ses fonctions de professeur, C. CHAUMONT a exercé des fonctions de type diplomatique ; d’une part, il a été membre de la délégation française (Comité des juristes) à Washington en 1945, pour la préparation du statut de la Cour Internationale de Justice, et d’autre part, il a aussi été membre de la délégation française à la Conférence de San Francisco (d’avril à juin 1945), préalable à l’adoption de la Charte des Nations Unies. V. en ce sens, la préface de l’ambassadeur J. FOUQUES-DUPARC dans C. CHAUMONT, La sécurité des États et la sécurité du monde, LGDJ, 1948, pp. 3 et s.
  • [13]
    C. CHAUMONT, La neutralité de l’Autriche et les Nations Unies, AFDI, 1955, pp. 151-157 ; Nations Unies et neutralité, RCADI, 1956, t. 89, pp. 1-59.
  • [14]
    Comme précisé par C. CHAUMONT dans son article de 1955, pp. 152 et s, cet État a voulu adhérer à l’ONU très rapidement mais sans y parvenir avant 1955.
  • [15]
    C. CHAUMONT, La neutralité de l’Autriche et les Nations Unies, op. cit., pp. 152 et s.
  • [16]
    Ibid.
  • [17]
    Ibid., p. 153.
  • [18]
    Ibid.
  • [19]
    Ibid., p. 154.
  • [20]
    Ibid.
  • [21]
    Ibid., p. 157
  • [22]
    Nations Unies et neutralité, RCADI, 1956, op. cit., note 13.
  • [23]
    Ibid., p. 45.
  • [24]
    Ibid., p. 53.
  • [25]
    Ibid., p. 57.
  • [26]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, RCADI, 1970, t. 129, pp. 333-528.
  • [27]
    C. CHAUMONT est à l’origine des Rencontres de Reims, comme le rappelle le site de l’Université de Reims sur lequel on peut trouver la reproduction de ces Rencontres qui se sont étalées, plus ou moins régulièrement entre 1973 et 1989, (http://www.univ-reims.fr/site/editions-et-presses-universitaires-de-reims/catalogue/themes/rencontres-de-reims-en-droit-international,15443,26638.html?), entrée « actes des rencontres ». Ces rencontres entre chercheurs — très majoritairement universitaires, issus de différents continents — ont été à l’origine de nombreuses discussions sur de nombreux concepts juridiques et sur les méthodes d’analyse du droit international.
  • [28]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., pp. 343 et s.
  • [29]
    Ibid. V. également E. DECAUX et O. de FROUVILLE, Droit international public, Dalloz, 9e éd., pp. 7 et s.
  • [30]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., p. 343.
  • [31]
    Ibid.
  • [32]
    Ibid.
  • [33]
    V., R. KOLB, « Mondialisation et droit international », in Relations internationales, vol. 3, n° 123, 2005, pp. 69-86.
  • [34]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, op. cit., p. 344.
  • [35]
    V., E. JOUANNET, Qu’est-ce qu’une société internationale juste ? Le Droit international entre développement et reconnaissance, éd. Pedone, 2011.
  • [36]
    Ibid.
  • [37]
    Ibid., p. 343.
  • [38]
    Ibid., pp. 434-445.
  • [39]
    V., J.-P. COLIN, « Discussion », in 1e Rencontre de Reims, Méthode d’analyse du Droit international, 1973, p. 295.
  • [40]
    C. CHAUMONT, Cours général de Droit international public, op. cit., p. 343.
  • [41]
    Ibid.
  • [42]
    Ibid.
  • [43]
    Ibid., p. 344.
  • [44]
    Ibid., p. 345.
  • [45]
    V., E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., p. 259.
  • [46]
    V., P. DAILLIER, M. FORTEAU, A. PELLET, Droit International Public, LGDJ, 8e ed, 2009, pp. 93-94.
  • [47]
    V., E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., pp. 278-279.
  • [48]
    Ibid., pp. 277-278.
  • [49]
    Ibid., p. 283.
  • [50]
    V., M. TROPER : « On n’est véritablement juriste que si on s’occupe du problème spécifique du droit international. Sinon on fait quelque chose qui est très intéressant […] mais qui relève d’une sociologie du droit […] mais ce dont nous avons besoin, c’est de ce que les Allemands appellent une « Rechts-Dogmatik », une théorie du droit proprement dite », dans 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 277.
  • [51]
    V., C. CHAUMONT, Rapport « À la recherche du fondement du caractère obligatoire du droit international », dans Réalités du droit international contemporain, Actes de la 2e Rencontre de Reims, 1974, pp. 1-40 (à consulter pour les citations suivantes de ce développement entre les pp. 6-11).
  • [52]
    C. CHAUMONT, Réalités du Droit international Contemporain. Le discours juridique sur la non intervention et la pratique internationale, Actes de la 7e Rencontre de Reims, 1986, p. 1.
  • [53]
    Ibid., pp. 5-6.
  • [54]
    V., C. CHAUMONT, 2e Rencontre de Reims, op. cit., p. 38.
  • [55]
    C. CHAUMONT, Ouverture de la 8e Rencontre de Reims, 27-28 mai 1989, Réalités du Droit international Contemporain. Les rapports entre l’objet et la méthode en droit international, p. 1.
  • [56]
    Ibid., pp. 2-3.
  • [57]
    Hommage d’une génération de juriste au Président Basdevant, éd. Pedone, 1960. Notamment son article « Recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l’État », pp. 114-151.
  • [58]
    C. CHAUMONT, Cours général de droit international public, RCADI, 1970, t. 129, pp. 333-528, spéc. pp. 384-397.
  • [59]
    J. BASDEVANT, Règles générales du droit de la paix, RCADI, 1936, t. 58, p. 578.
  • [60]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 386.
  • [61]
    Ibid., pour toutes ces citations.
  • [62]
    C. CHAUMONT, Recherche du contenu irréductible du concept de souveraineté internationale de l’État, déjà cité, p. 132, (italique ajouté au texte initial).
  • [63]
    Ibid., pp. 131 et s.
  • [64]
    Ibid., p. 133.
  • [65]
    Ibid.
  • [66]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 385.
  • [67]
    Ibid.
  • [68]
    Le droit des peuples sera envisagé dans le développement « C. La défense du droit des peuples », par C. CHAUMONT.
  • [69]
    C. CHAUMONT, RCADI 1970, op. cit., p. 390.
  • [70]
    V. notamment La sécurité des Etats et la sécurité du monde, LGDJ, 1948, 158 p ; La situation juridique des Etats à l’égard de la Force d’urgence des Nations Unies, AFDI, 1958, pp. 399-440 ; « Analyse critique de l’intervention américaine au Vietnam », RBDI, 1968, pp. 61-93.
  • [71]
    C. CHAUMONT, La sécurité des Etats et la sécurité du monde, LGDJ, op. cit.
  • [72]
    Ibid., pp. 56-79.
  • [73]
    Ibid., pp. 80-97, spéc. p. 81.
  • [74]
    V., le titre du Chapitre VII de la Charte et l’article 39 qui utilise l’expression « acte d’agression ».
  • [75]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, AFDI, 1956, pp. 521-529.
  • [76]
    C. CHAUMONT, « La définition de l’agression en 1970-1971 », in Miscellanea W.-J. Ganshof van der Meersch, Bruxelles, Bruylant, 1972, pp. 115-129.
  • [77]
    V. A/RES/377 du 3 novembre 1950 ou résolution L’union pour le maintien de la paix par laquelle l’Assemblée générale a réagi à une situation de blocage du Conseil de sécurité en matière de maintien de la paix.
  • [78]
    V., C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit. pp. 521-522.
  • [79]
    Ibid., pp. 525-526. En 1971, dans La définition de l’agression en 1970-1971, op. cit., p. 117, il complète cet extrait en précisant que « Le Comité [3 de la 3e Commission de la Conférence] a donc décidé […] de laisser au Conseil de Sécurité l’entière appréciation de ce qui constitue […] un acte d’agression ».
  • [80]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit. pp. 521-522 ; les guillemets à l’intérieur de la citation sont de C. CHAUMONT.
  • [81]
    Ibid., p. 527.
  • [82]
    Ibid., p. 528 : « L’agression armée entre Etats au sens de la Charte des Nations Unies est une rupture de la paix internationale, dirigée notamment contre l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un Etat, lorsque la force armée est utilisée dans un intérêt et dans des conditions non autorisés par la Charte ».
  • [83]
    C. CHAUMONT, Explication juridique d’une définition de l’agression, op. cit., spéc. pp. 118-119 ; pourtant l’AG a adopté le 14 décembre 1974, une « définition de l’agression » dans la résolution 3314, avec toutes les limites d’une telle résolution.
  • [84]
  • [85]
    C. CHAUMONT, note 28, 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 263.
  • [86]
    C. CHAUMONT, note 28, 4e Rencontre de Reims, La relation du droit international avec la structure économique et social, p. 41.
  • [87]
    V., C. CHAUMONT, Le droit des peuples à témoigner d’eux-mêmes, Annuaire du Tiers-Monde, 1976, pp. 15-31.
  • [88]
    Ibid., p. 15, les guillemets dans la citation sont de C. CHAUMONT.
  • [89]
    Ibid.
  • [90]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 3e rencontre de Reims, La notion de peuple en droit international, p. 142.
  • [91]
    E. JOUANNET, La pensée juridique de Charles Chaumont, op. cit., p. 265.
  • [92]
    V. par ex., M. VIRALLY, Droit international et décolonisation, AFDI, vol. 9, 1963, pp. 508-541. A. CASSESE et E. JOUVE, Pour un droit des peuples, Berger-Levrault, 1977, 410 p.
  • [93]
    Les résolutions les plus connues à ce sujet sont : la résolution 1514 (XV) du 14 décembre 1960 et la résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970.
  • [94]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., pp. 396 et s. Il envisage la décolonisation mais en tenant compte de la réalité politique dans laquelle elle s’est réalisée.
  • [95]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 1e Rencontre de Reims, op. cit., p. 264. Notons que les Rencontres de Reims ont été publiés sous forme de transcription exacte des présentations orales de chaque intervenant, d’où la formulation à la première personne dans cet extrait et dans d’autres.
  • [96]
    Ibid.
  • [97]
    V. en ce sens A. PELLET, « Le “bon droit” et l’ivraie - Plaidoyer pour l’ivraie », in Mélanges offerts à Charles Chaumont, op. cit., pp. 465 et s.
  • [98]
    J. SALMON, 3e Rencontre de Reims, op. cit., pp. 221-223.
  • [99]
    Ibid., pp. 221-222
  • [100]
    Ibid., p. 222.
  • [101]
    Ibid.
  • [102]
    Ibid.
  • [103]
    A. PELLET, in Mélanges offerts à Charles Chaumont, op. cit., pp. 465-466.
  • [104]
    C. CHAUMONT, note 28 ; 4e Rencontre de Reims, op. cit, « Rapport introductif », pp. 1-8.
  • [105]
    M. CHEMILLIER-GENDREAU, De la guerre à la communauté universelle, entre droit et politique, Fayard, 2013, p. 369.
  • [106]
    Ibid.
  • [107]
    Ibid.
  • [108]
    V. ci-dessus, note 3.
  • [109]
    J.-D. MOUTON, « Qu’on me permette d’évoquer un souvenir personnel : Charles CHAUMONT me montra la lettre de rupture qu’il envoya à Charles ROUSSEAU, après le compte-rendu critique que celui-ci fit de son Cours général à la RGDIP ».
  • [110]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 346 en référence à l’Encyclopédie des sciences philosophiques (1817).
  • [111]
    Il faut aussi signaler l’influence des marxistes contemporains de Charles CHAUMONT, le philosophe L. ALTHUSSER ou encore les juristes G.-I. TUNKIN et E.-B. PASHUKANIS.
  • [112]
    Bien entendu, l’article très pertinent d’E. JOUANNET, sur la base d’un rapport présenté lors de l’hommage rendu à Charles CHAUMONT à La Faculté de Droit de Nancy, le 11 mars 2003, nous a aidé à dégager ces idées, op. cit., note 2.
  • [113]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 368.
  • [114]
    Ibid., p. 363.
  • [115]
    C. CHAUMONT, Les méthodes d’analyse en droit international, 1ère Rencontre de Reims, 1973, p. 264.
  • [116]
    Ibid., p. 243.
  • [117]
    Ibid., p. 252.
  • [118]
    Ibid., p. 261.
  • [119]
    Ibid., p. 345.
  • [120]
    V., C. CHAUMONT, 1ère Rencontre de Reims, op. cit., p. 261.
  • [121]
    Ibid., p. 260.
  • [122]
    Ibid., p. 261.
  • [123]
    Ibid., p. 262.
  • [124]
    C. CHAUMONT, 2e Rencontre de Reims, 1974, op. cit., p. 4.
  • [125]
    V., article 53 de la Convention de Vienne sur le Droit des Traités qui a pour titre : Traités en conflit avec une norme impérative du droit international général (jus cogens).
  • [126]
    C. CHAUMONT, RCADI, 1970, op. cit., p. 371.
  • [127]
    Ibid, pp. 376-377.
  • [128]
    Ibid. p. 376.
  • [129]
    Ibid., p. 377.
  • [130]
    Ibid., p. 367.
  • [131]
    1ère Rencontre de Reims, op. cit., p. 264.
  • [132]
    Ibid, p. 264.
  • [133]
    C. CHAUMONT, « Mort et transfiguration du jus cogens », in Mélanges offerts à P.-F. GONIDEC, Paris, LGDJ, 1985, pp. 469-479.
  • [134]
    Ibid., p. 470.
  • [135]
    Ibid.
  • [136]
    Ibid., p. 477.
  • [137]
    Ibid., p. 478.
  • [138]
    V. note 88.
  • [139]
    B. BADIE, cité par J.-D. MOUTON, L’Etat dans la mondialisation, Colloque de Nancy, SFDI, éd. Pedone, 2012, p. 12.
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