Notes
-
[1]
V. par exemple, CE, 15 décembre 1824, Arneva, Rec., p. 687 et CE, 2 mai 1861, Dato, Rec., p. 318. CE, 15 juin 1825, Recur, Rec., p. 297, CE, 22 février 1826, Thuret et compagnie, Rec., p. 108 et CE, 25 mai 1870, Souberbielle, Rec., p. 651.
-
[2]
CE, 5 juillet 2013, n° 348050, mentionné T.
-
[3]
CE, 7 octobre 2009, Société internationale du bâtiment et de génie civil (SIBAGEC), mentionné T. AJDA, 2009, p. 1866. DA, 2009, p. 16, chron. M. AUDIT.
-
[4]
TC, 17 mai 2010, INSERM c/ Fondation Saugstad, Rec., p. 580. RFDA, 2010, concl. GUYOMAR, p. 959 et note P. DELVOLVE, p. 971. note LAAZOUZI, RCDIP, 2011, p. 653. AJDA, 2010, p. 1047 et p. 1564, étude P. CASSIA et p. 2337, tribune P. CASSIA. D. 2010, p. 2633, obs. X. DELPECH, note S. LEMAIRE, p. 2323, obs. L. D’AVOUT et S. BOLLEE, p. 2933, obs. Th. CLAY. RDI, 2010, p. 551, obs. S. BRACONNIER. RTD com., 2010, p. 525, obs. E. LOQUIN. Gaz. Pal., 27 mai 2010, n° 147, p. 27, note M. GUYOMAR. JCPG, 2010, n° 552, p. 1045, note Th. CLAY, p. 1096, obs. E. GAILLARD, chron., 644, comm., 12, J. ORTSCHEIDT. Rev. arb., 2010, p. 275, concl. M. GUYOMAR. M. AUDIT, « Le nouveau régime de l’arbitrage des contrats administratif internationaux », Rev. arb., 2010, p. 253. D.A., 2010, comm., 122, F. BRENET et F. MELLERAY. Les cahiers de l’arbitrage, Gaz. Pal., 2010, p. 717, étude D. FOUSSARD.
-
[5]
CE Section, 19 novembre 1999, Tegos, Rec., p. 356. RFDA, 2000, p. 833, concl. J. ARRIGHI DE CASANOVA. J.D.I., 2000, p. 742, note J.-F. FLAUSS. RCDIP, 2000, p. 409, concl. J. ARRIGHI DE CASANOVA et note S. LEMAIRE. JCP, 2000, IV, 1439, obs. M.-C. ROUAULT. RDP, 2000, p. 378, obs. Ch. GUETTIER.
-
[6]
Il s’agissait précisément de l’association pour la relance agronomique en Alsace, de l’institut pour une agriculture respectueuse de l’environnement de Müllheim et du centre agricole d’Ebenrain.
-
[7]
V. sur ce point, Y. GAUDEMET, « propos introductifs », in F. MELLERAY (dir.), L’exorbitance du droit administratif en question(s), LGDJ, 2004.
-
[8]
Le premier mode de résolution, d’inspiration publiciste, consistait pour le juge administratif à commencer par qualifier matériellement le litige. Il déduisait sa compétence ainsi que l’applicabilité exclusive du droit administratif français du caractère administratif du litige au sens des critères traditionnels. CE Sect., 11 janvier 1952, Habib Bechara, Rec., p. 30. Rev. jur. pol. Union fr., 1952, p. 292, concl. BARBET. Le second mode de résolution expérimenté par le juge administratif, d’inspiration privatiste, consistait à l’inverse à déduire la seule compétence juridictionnelle de la qualification matérielle du litige tout en la considérant comme impuissante à l’égard de la question du droit applicable. Malgré la reconnaissance du caractère administratif du litige, le juge administratif devra néanmoins mettre en œuvre une règle de conflit afin de « découvrir » la loi applicable au fond. CE, 7 janvier 1987, Dame Félicien, Rec., p. 805. D., 1987, somm., p. 350, obs. B. AUDIT. RCDIP, 1988, p. 687, note P. RODIERE. CE, 10 mars 1997, Madame de Waele, Rec., 741. RCDIP, 1997, p. 695, note Ph. COURSIER.
-
[9]
CE Section, 19 novembre 1999, Tegos, préc.
-
[10]
La Convention 80/934/CEE sur la loi applicable aux obligations contractuelles du 19 juin 1980 a été remplacée par le Règlement (CE) n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. Ces deux textes généralisant l’emploi de la méthode bilatérale afin de déterminer la loi applicable aux obligations contractuelles.
-
[11]
V. notamment CE, 10 mars 1997, Madame de Waele, précité. L’un des commentateurs de cette décision s’interrogeait ainsi : « Dans la mesure où le contrat de travail est soumis à la loi mexicaine, par quel moyen le Conseil d’État qualifie-t-il le salarié “d’agent public” au sens du droit français ? » et, serait-on tenté d’ajouter, fonde-t-il alors sa propre compétence ? Ph. COURSIER, note préc.
-
[12]
H. GAUDEMET-TALLON, « Le nouveau droit international privé européen des contrats », RTDE, 1981, p. 241. V. également J. FOYER, « Entrée en vigueur de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles », JDI, 1991, p. 605.
-
[13]
La Cour de Justice n’a en effet jamais eu, à ce jour, l’opportunité de se prononcer précisément sur l’applicabilité de ces normes européennes aux contrats conclus par l’administration.
-
[14]
Si la jurisprudence de la Cour peut faire l’objet d’interprétations divergentes, certains auteurs remarquent que la Cour, lorsqu’elle se prononce sur un élément de puissance publique fait en outre toujours référence à la notion d’ « autorité publique ». Or une telle précaution peut être conçue comme révélant la conception strictement unilatéraliste de la Cour de Justice concernant la puissance publique, voire une réserve à l’encontre de l’idée de relations contractuelles de droit public. V. sur ce point, J.-P. et M.-J. BERAUDO, « Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, Convention de Lugano du 16 septembre 1988, Règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 - Généralités et champs d’application », J. Cl., Europe, fasc. 3000, n° 27.
-
[15]
Ce qui semble être le cas du juge administratif lui-même lequel, tout en conservant la méthode bilatérale inspirée par le droit de l’Union, a, après l’arrêt Tegos, persisté dans l’application de cette méthode sans jamais visé aucun texte européen. V. par exemple, CE, 30 mars 2005, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, Rec., p. 129 ; AJDA, 2005, p. 1844, note M. AUDIT ; JCP, 2005, I, p. 145, chr., C. BOITEAU.
-
[16]
Le deuxième alinéa de l’article premier du Règlement Rome I précité affirme ainsi que son champ d’application ne s’étend pas « aux matières fiscales, douanières et administratives ».
-
[17]
Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale. Le second alinéa de l’article premier énonce les mêmes exclusions.
-
[18]
CAA Douai, 29 mai 2012, SA King Consult, n° 10DA01035, AJDA, 2012, p. 2223, concl. V. MARJANOVIC. RFDA, 2013, p. 46, note M. LAAZOUZI.
-
[19]
V. MARJANOVIC, conclusions préc.
-
[20]
Article 2 Règlement préc.
-
[21]
Article 5-1 Règlement préc.
-
[22]
Le rapporteur public l’affirme lui-même. V. conclusions préc.
-
[23]
V. notamment CE Section, 19 novembre 1999, Tegos et CE, 30 mars 2005, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, préc.
-
[24]
V. à titre d’illustration, CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, Rec. 2013, p. 258. AJDA, 2012, p. 1314 et p. 2420, note M. LAAZOUZI. RDI, 2012, p. 560, note S. BRACONNIER.
-
[25]
CE, 4 octobre 1967, Trani, Rec., p. 352 et v. sur ce point R. CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 13e éd., 2008, pp. 264 et s.
-
[26]
C’est nous qui soulignons.
-
[27]
J.-M. JACQUET, Principe d’autonomie et droit applicable aux contrats internationaux, Thèse, Strasbourg, 1981, p. 450.
-
[28]
V. notamment sur cette thématique, P. MAYER, « Les lois de police étrangères », JDI, 1981, p. 277 et D. SINDRES, La distinction des ordres et des systèmes juridiques dans les conflits de lois, Bibliothèque de droit privé, t. 503, LGDJ, 2008, pp. 205 et s.
-
[29]
Pour un exemple de loi de police en droit du travail, CE, 29 juin 1973, Syndicat général du personnel Cie internationale des Wagons-lits, RCDIP, 1974, p. 344. JDI, 1975, p. 538, note SIMON-DEPITRE, RCDIP, 1974, p. 273, chron. Ph. FRANCESCAKIS.
-
[30]
CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc.
-
[31]
M. LAAZOUZI, Les contrats administratifs à caractère international, Economica, 2008, p. 168.
-
[32]
TC, 24 avril 2006, SCP de médecins Reichheld et Stürtzer, Rec., p. 629. RFDA, 2006, p. 1077. AJDA, 2006, p. 2456, concl. D. CHAUVAUX.
-
[33]
CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc.
-
[34]
Sur ce point, M. LAAZOUZI, note sous TC, 17 mai 2010, INSERM c/ Fondation Saugstad, op. cit., pp. 674 et s.
-
[35]
Tel est le cas par exemple du décret du 18 juin 1969, portant fixation du statut des agents contractuels de l’État et des établissements publics de l’État à caractère administratif de nationalité française en service à l’étranger. Il permit à deux reprises de désigner la loi française sans avoir à mettre en œuvre la méthode bilatérale, CE Sect., 7 juin 1991, Troquet, Rec., p. 222. D., 1992, somm., p. 148, obs. P. BON et Ph. TERNEYRE. Quot. Jur., 28 septembre 1991, p. 11, note M. DEGUERGUE et CE, 21 juin 2002, Laurent Delabouglise, AJDA, 2002, p. 877, note M. DEGUERGUE.
-
[36]
S. LEMAIRE, note sous CE Section, 19 novembre 1999, Tegos préc.
-
[37]
V. sur la distinction entre la notion de prix et celle de subvention, CE, 26 mars 2008, Région de la Réunion. Rec. p. 114. BJCP, 2008, p. 245, concl. SENERS. JCPA, 2008, act. 304. JCP G., 2008, act. 249. JCP G., 2008, IV, 1821. R. Contrats et Marchés publics, 2008, comm. 90, G. ECKERT.
-
[38]
Les marchés publics ne sont pas un terreau favorable aux lois de police puisque le juge estime qu’en principe et sauf volonté contraire des parties, les règles ressortissant au code des marchés publics ont un champ d’application strictement territorial, CE, 4 juillet 2008, Société Colas Djibouti, AJDA, 2008, p. 1359, obs, S. BRONDEL, RFDA, 2008, p. 1123, note F. MELLERAY. Si le juge administratif a par la suite assoupli sa jurisprudence en indiquant que les principes généraux de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats, ainsi que la règle de transparence des procédures qui en découlent, bénéficient d’une portée extraterritoriale qui s’impose à l’administration, ces règles ne sont pas conçues en elles-mêmes comme impératives, CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc. Il est révélateur à ce propos de constater que dans l’arrêt même où le Conseil d’État développa cette solution, il rattacha le litige à l’ordre juridique français, non pas sur le fondement de ces règles, mais sur celui des règles relatives à la tarification des visas pourtant plus anecdotiques.
-
[39]
Cet article prévoit que toute association, œuvre ou entreprise ayant reçu une subvention peut
être soumise au contrôle des délégués de la collectivité qui l’a accordée. Tous groupements, associations, œuvres ou entreprises privées qui ont reçu dans l’année en cours une ou plusieurs subventions sont tenus de fournir à l’autorité qui a mandaté la subvention une copie certifiée de leurs budgets et de leurs comptes de l’exercice écoulé, ainsi que tous documents faisant connaître les résultats de leur activité. -
[40]
J. VERHOEVEN, « Non-intervention : “affaires intérieures” ou “vie privée” ? », Mélanges M. VIRALLY, Paris, éd. Pedone, 1991, pp. 493-500.
-
[41]
P. BOUREL, « Conflits de juridictions – immunités de juridiction et d’exécution » Jurisclasseur Droit international, fasc. 581-50, n° 3.
-
[42]
V. notamment P. MAYER et V. HEUZE, Droit international privé, Domat – Droit privé, Montchrestien, 10e éd., 2010, pp. 236 et s., et Ph. THERY, Pouvoir juridictionnel et compétence, étude de droit international privé, Thèse, Paris II, 1981, p. 197.
-
[43]
Ch. mixte, 20 juin 2003, Dame Soliman, RCDIP, 2003, p. 647, note H. MUIR WATT. JCP, 2004, II, 10010, note J.-G. MAHINGA. D., 2005, p. 1197, obs., H. CHANTELOUP.
-
[44]
Il s’agit d’ailleurs d’un « principe coutumier du droit international », I. PINGEL-LENUZZA, Les immunités des Etats en droit international, Bruylant, 1998, p. 11.
-
[45]
Ph. THERY, ibid.
-
[46]
Comme l’affirme le Professeur COSNARD, « la notion de bénéficiaire […] est fondamentale en matière d’immunité puisqu’elle désigne les personnes physiques ou morales possédant la capacité d’invoquer le privilège dévolu à l’État », La soumission des États aux tribunaux internes, Paris, éd. Pedone, 1996, p. 93.
-
[47]
C’est ainsi que la Cour de cassation a refusé, dès 1929, d’octroyer l’immunité de juridiction à la Représentation commerciale des soviets, Req., 19 février 1929, D.P., 1929. 1. 73, note SAVATIER. S., 1930. 1. 49, note NIBOYET.
-
[48]
P. BOUREL, « Conflits de juridictions – immunités de juridiction et d’exécution », op. cit., n° 71.
-
[49]
Cass. civ. 1ère, 25 février 1969, Soc. Levant Express Transport, G.A., n° 47. RCDIP, 1970, p. 102, note P. BOUREL.
-
[50]
Cass. civ. 1ère, 2 mai 1990, Société nationale iranienne de gaz, RCDIP, 1991, p. 140, note P. BOUREL. Cass. civ. 1ère, 27 avril 2004, Cotigny, RCDIP, 2005, p. 75, (1ère esp.), note MUIR WATT.
-
[51]
P. MAYER et XV. HEUZE, Droit international privé, op. cit., p. 236 et v. notamment Cass. civ. 1ère, 2 mars 1966, État du Pakistan, JCP, 1966, II. 14831, note M. ANCEL.
-
[52]
L’article 2. 2 de la Convention précise qu’« il faudrait prendre en considération son but si les parties au contrat ou à la transaction en sont ainsi convenues ». C’est nous qui soulignons.
-
[53]
Pour entrer en vigueur, cette Convention doit être ratifiée par trente États. Dix-huit États l’ont actuellement ratifiée. La France l’a signée le 17 janvier 2007 et la loi autorisant la ratification est intervenue le 28 juin 2011.
-
[54]
La convention des Nations Unies porte principalement sur des contrats en principe soumis à un régime de droit privé, comme les contrats de travail ou les contrats relatifs à des transactions commerciales, et énonce un certain nombre de dérogations au principe de l’absence d’immunité de juridiction en ces domaines.
-
[55]
V. notamment, CEDH, 23 mars 2010 (Grande Chambre), Cudak c/ Lituanie, n° 15869/02.
-
[56]
I. PINGEL-LENUZZA, op. cit., p. 3.
-
[57]
Au moins en vertu de l’article 14 du code civil qui permet à tout demandeur de nationalité française de saisir le juge français d’un différend.
-
[58]
V. notamment, P. MAYER et V. HEUZE, Droit international privé, op. cit., p. 238 et J. VERHOEVEN, O. BEAUD, Le droit international des immunités : contestation ou consolidation ?, Bruxelles, Larcier, 2004, p. 37.
-
[59]
V. notamment, J. VERHOEVEN, O. BEAUD, op. cit., pp. 38 et s.
-
[60]
Civ. 1ère, 9 mars 2011, GIE La Réunion aérienne c/ Jamahiriya Arabe Libyenne. Bull. civ., 2011, I, n° 49. RCDIP, 2011, p. 385, avis P. CHEVALLIER, p. 401, rapp. A.-F. PASCAL. RGDIP, 2012, p. 738, note A. DE NANTEUIL. JDI, 2011, comm. 19, p. 953, Ph. DELEBECQUE et S. ADELINE. AFDI, 2012, p. 858. CA Paris, 16 janv. 2009. JDI, 2009, comm. 14, p. 863, C. BRIERE.
-
[61]
Les jurisprudences suédoises et canadiennes confirment cette solution. Voir respectivement, HD, 30 décembre 1999, Local Authority of Västeräs v. Republic of Iceland, AJIL, 2001, p. 192 et SC, 12 septembre 2002, Schreiber c. Canada. De même la loi australienne promeut la même solution dans son article 10.2. Enfin l’article 7.2 de la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens affirme que « L’accord donné par un État pour l’application de la loi d’un autre État n’est pas réputé valoir consentement à l’exercice de la juridiction des tribunaux de cet autre État ».
-
[62]
En revanche, la même convention précise qu’ « Un État ne peut invoquer l’immunité de juridiction dans une procédure devant un tribunal d’un autre État à l’égard d’une matière ou d’une affaire s’il a consenti expressément à l’exercice de la juridiction de ce tribunal à l’égard de cette matière ou de cette affaire », notamment dans un contrat écrit (article 7.1.b).
-
[63]
Il est à noter que le juge administratif n’a jamais opposé la théorie des actes de gouvernements à l’activité extraterritoriale de l’administration française, et ce, depuis l’origine.
-
[64]
Comme le note judicieusement le Professeur Mayer, tandis que le droit privé régit indistinctement « l’institution du mariage », « l’objet des règles contenues dans le Code français de la nationalité est l’attribution, l’acquisition et la perte de la seule nationalité française…]. De même, l’objet du droit constitutionnel français est : la Constitution de la France, tandis que l’objet du droit constitutionnel italien est : la Constitution de l’Italie, etc… ». P. MAYER, « Droit international privé et droit international public sous l’angle de la notion de compétence », RCDIP, 1979, pp. 2 et s. (I), pp. 349 et s. (II) et pp. 537 et s. (III), sp. 350.
-
[65]
Il est traditionnellement affirmé que, tandis que les compétences normatives étatiques sont concurrentes en droit privé, elles sont exclusives en droit public. V. notamment P. MAYER, op. cit.
-
[66]
P. MAYER et V. HEUZE, op. cit., p. 230.
-
[67]
CIJ, 3 févr. 2012, Immunités juridictionnelles de l’État (Allemagne c/ Italie).
-
[68]
CA Paris, 26 juin 1981, Benvenutti et Bonfant SARL c/ République populaire du Congo. JDI, 1981, p. 843, note B. OPPETIT. RCDIP, 1982, p. 379.
Introduction
1Bien que n’ayant pas vocation à devenir un contentieux de masse, les litiges relatifs à l’activité administrative extraterritoriale, dont on trouve la trace dès avant l’avènement de la justice déléguée [1], continuent d’émerger avec une régularité remarquable. Outre les délicates questions qu’ils suscitent et le fréquent embarras du juge administratif lorsqu’il s’agit pour lui d’y répondre, l’incursion de la problématique de l’extranéité dans la matière administrative permet de s’interroger sur les confins tant géographiques que juridiques de cette discipline. Le présent arrêt en offre une opportunité supplémentaire.
2Avant de s’intéresser à l’arrêt du Conseil d’État du 5 juillet 2013 [2], il convient de préciser ce que l’on entend par « activité administrative extraterritoriale » ou « extraterritorialité ». Il s’agit de l’activité de l’administration française se démarquant de son action habituelle en ce qu’elle comporte un élément d’extranéité. Cet élément étranger à l’ordre juridique français peut découler de la réalisation de l’activité administrative à l’extérieur des frontières nationales [3] ou encore de la nationalité étrangère du cocontractant de l’administration [4] et souvent de l’alliance de ces deux critères [5]. Si le terme d’« extraterritorialité » ne recouvre pas, au sens strict, toutes les situations caractérisées par un élément d’extranéité que peut rencontrer l’administration française, il sera néanmoins privilégié ici dans son acception la plus large en tant qu’il s’oppose et se distingue du qualificatif « international ». Il désigne en effet la faculté pour l’administration d’outrepasser les frontières nationales tout en conservant sa qualité de sujet de droit interne, de particulier, c’est-à-dire sans être mécaniquement assimilée à l’État et sans être réputée intervenir en son nom dans l’ordre juridique international. L’activité administrative extraterritoriale suscite donc des problématiques de droit international privé – désignation de la juridiction compétente, détermination du droit applicable – et non de droit international public. Le présent arrêt en est une nouvelle illustration.
3Le litige opposant la Région Alsace et l’État français trouve son origine dans l’inexécution par ce dernier d’une convention conclue le 25 juillet 1997 ayant pour objet le financement d’un projet de coopération transfrontalière. Ce projet est né sous l’impulsion du Land de Bade-Wurtemberg et de la Région Alsace lesquels ont décidé, en 1993, de développer en commun et de promouvoir une agriculture respectueuse de l’environnement notamment par la création d’une structure commune : l’Institut Transfrontalier d’Application et de Développement Agroalimentaire (ITADA). Ce projet s’est étendu à la Suisse rhénane en 1996.
4La convention litigieuse fixait les modalités de la participation financière de divers acteurs intéressés par ce projet. Cette convention répartissait ainsi l’effort financier entre des entités publiques et privées, étatiques et locales. Étaient en effet parties à cette convention, outre les trois collectivités membres du projet transfrontalier, l’État français, une banque allemande, ou encore la chambre régionale d’agriculture d’Alsace. La convention du 25 juillet 1997 désignait en outre la Région Alsace comme maître d’ouvrage du projet et précisait qu’elle confiait à trois entités [6] le soin de réaliser concrètement les actions du programme de l’ITADA ainsi financées.
5Malgré ce montage juridique très abouti, il semble que l’État français ne se soit jamais acquitté de ses obligations financières. C’est pourquoi, la Région Alsace a, en tant que maître d’ouvrage, attrait l’État français devant le Tribunal administratif de Strasbourg qui, par un jugement du 25 juin 2009, a rejeté sa demande tant sur le fondement de la responsabilité contractuelle que de la responsabilité extracontractuelle de l’État français pour enrichissement sans cause. Cette solution fut approuvée et prolongée par un arrêt de la Cour administrative d’appel de Nancy du 1er février 2011. Or si le Conseil d’État ne va pas davantage satisfaire à la demande de la collectivité française, il va néanmoins annuler le jugement du Tribunal et l’arrêt de la Cour en tant qu’ils se sont estimés compétents pour se prononcer sur ce litige.
6Affirmant que la convention litigieuse « est exclusivement régie par la loi allemande », le Conseil d’État se déclare incompétent pour en connaître. Il laisse ainsi la clause attributive de juridiction contenue dans la convention en cause produire ses effets, lesquels sont remarquables, puisque le présent litige, opposant deux collectivités publiques françaises, sera in fine tranché par le juge allemand. Cette solution surprenante s’explique alors tant par la dissipation du privilège de juridiction dont bénéficie l’administration française lorsqu’elle intervient dans la sphère extraterritoriale (I) ainsi que par la disposition, par l’administration, de l’immunité de juridiction dont elle peut bénéficier devant le juge étranger (II).
I – La dissipation du privilège de juridiction de l’administration dans la sphère extraterritoriale
7Alors qu’il est l’une des expressions de l’exorbitance du régime auquel est soumise l’activité administrative au sein de l’ordre juridique français [7], le privilège pour l’administration de bénéficier d’une juridiction spécifique pour trancher ses litiges est largement remis en cause dans la sphère extraterritoriale. Si ce constat peut, à première vue, paraître logique compte tenu de la diversité et de la concurrence des ordres juridiques susceptibles de régir les litiges de l’administration comportant un élément d’extranéité, il résulte principalement de choix discutables réalisés par le juge administratif lui-même sans qu’il n’y soit pourtant contraint. Le présent arrêt confirme ainsi le caractère contingent assigné, par le juge administratif, à la question de la compétence juridictionnelle en matière extraterritoriale (A) ainsi que l’efficacité relative du correctif appliqué par ce dernier afin de tempérer sa propre jurisprudence (B).
A – La contingence de la question de la compétence juridictionnelle
8Contrairement au juge judiciaire dont c’est l’une des spécialités et même s’il est confronté à la problématique extraterritoriale de longue date, le juge administratif est manifestement embarrassé lorsqu’il s’agit pour lui de trancher un litige comportant un élément d’extranéité. Sa jurisprudence en la matière, laquelle est changeante voire heurtée, traduit cet embarras.
9Après avoir expérimenté deux modes antagonistes de résolution des litiges extraterritoriaux de l’administration [8], le Conseil d’État semble s’être arrêté sur une solution de moyen terme qui, malgré les insuffisances dont elle est porteuse, semble être une fois de plus confirmée par le présent arrêt.
10Cette solution issue de l’arrêt Tegos [9], laquelle n’a pas été remise en cause depuis une quinzaine d’années consiste pour le juge administratif à inverser l’ordre traditionnel des questions auxquelles il doit répondre lorsqu’il est saisi d’un litige comportant un élément d’extranéité.
11Il commence ainsi par déterminer la loi nationale applicable au moyen de la méthode bilatérale. Il s’agit d’une règle de conflit traditionnellement employée par le juge judiciaire caractérisée par sa neutralité et désignant, parmi les lois susceptibles de régir un litige contractuel, celle qui est désignée par les parties dans le contrat lui-même ou, à défaut, la loi du lieu d’exécution dudit contrat. Le juge administratif qualifie alors matériellement le litige en fonction de la loi désignée et n’en déduit sa compétence que dans l’hypothèse où le litige peut être conçu comme administratif, ce qui est impossible si le droit étranger régit exclusivement le litige. Le Conseil d’État affirme en effet que « le juge administratif français n’est pas compétent pour connaître d’un litige né de l’exécution d’un contrat qui n’est en aucune façon régi par le droit français ».
12La jurisprudence « Tegos » est donc porteuse d’une solution équivoque qui repose sur la mise en œuvre initiale d’une méthode privatiste, mais à laquelle le juge administratif attache des conséquences publicistes. En effet, alors que le juge administratif détermine la loi applicable au moyen de critères indifférents à l’égard de la dimension potentiellement administrative de la matière litigieuse, il se refuse à rompre tout lien entre la loi française et la matière administrative, cette dernière ne pouvant prospérer qu’autant que la loi française est, même partiellement, applicable.
13Cette solution ambiguë révèle la gêne désormais ressentie par le juge administratif lorsqu’il emploie la méthode conflictuelle. Le droit de l’Union a, en effet, progressivement harmonisé et généralisé les règles de résolution des conflits de lois [10]. Le juge administratif s’estime désormais contraint d’appliquer la méthode conflictuelle alors qu’il avait fait spontanément l’expérience de son inadaptation au droit administratif [11].
14Cette contrainte supposée s’est notamment traduite par le fait que la Convention de Rome – harmonisant les règles de détermination de la loi applicable en matière contractuelle – était expressément visée par le Conseil d’État dans l’arrêt Tegos. Or cette convention, qui prévoyait un certain nombre de dérogations au profit de domaines singuliers comme le droit du travail, demeurait silencieuse à l’égard du droit administratif. Si cet oubli devait être interprété comme révélant l’évidence de l’exclusion de la matière administrative du champ de cette convention [12], la jurisprudence incomplète de la Cour de justice [13] et la conception européenne de la matière administrative [14] expliquent l’appropriation par le Conseil d’État de la méthode conflictuelle de désignation de la loi applicable.
15Malgré des fondations manifestement branlantes, ce raisonnement est susceptible, dès lors qu’il est mené à son terme, d’échapper au juge administratif et de posséder des conséquences imprévues.
16Si l’on estime que la matière administrative au sens européen ne recoupe pas son acception française [15], alors les précautions prises par le Règlement Rome I [16] et son équivalent en ce qui concerne les règles de compétence internationale des tribunaux [17], consistant à écarter de leur champ d’application la matière administrative, ne peuvent qu’être frappées d’inanité. C’est ainsi qu’en 2012, la Cour administrative d’appel de Douai saisie d’un contrat conclu par l’administration française avec une société belge a appliqué – trop – sérieusement le raisonnement du Conseil d’État [18]. Suivant son rapporteur public [19], la Cour a considéré que, les règles européennes relatives à la détermination de la loi applicable s’étendant à la matière administrative, il en va de même pour les règles relatives à la compétence internationale des tribunaux.
17Or, contrairement aux règles de conflit de lois, les règles de conflit de juridictions ont un effet bien plus radical, qui ne peut être tempéré. Règles issues de la jurisprudence judiciaire, elles sont fondées sur le postulat de l’équivalence des juges en compétition. C’est pourquoi elles déterminent la compétence internationale directe des tribunaux en fonction de critères spatiaux et matériellement neutres comme le domicile du défendeur [20] ou le lieu de l’exécution du contrat [21].
18Pensant poursuivre et prolonger l’œuvre entreprise par le Conseil d’État, la Cour administrative d’appel de Douai en a démontré l’absurdité en en aggravant les conséquences. Alors qu’en principe, y compris dans le cadre de la jurisprudence Tegos, les compétences matérielle et internationale de la juridiction administrative sont confondues, l’extension des règles de droit privé relatives à la compétence internationale des tribunaux provoque leur séparation. Autrement dit, dans la solution Tegos, la compétence internationale du juge administratif découle, malgré l’emploi de la méthode bilatérale, de la qualification administrative du litige laquelle permet d’établir simultanément la compétence matérielle du juge administratif. En revanche, dans la solution King Consult, la qualification administrative du litige [22] n’a plus aucune influence sur la compétence internationale du juge administratif. C’est ainsi que dans cet arrêt de 2012, la qualification administrative du contrat en cause est restée impuissante face à la clause attributive de juridiction qu’il contenait et qui désignait les juridictions belges ; la Cour s’estimant incompétente sur ce fondement.
19Cette solution prônée par la Cour administrative d’appel de Douai entérinant l’absence de toute originalité de la matière administrative dans sa dimension extraterritoriale n’a, pour l’heure, pas été soumise à l’appréciation du Conseil d’État. Il était donc possible de s’interroger sur l’avenir de la jurisprudence Tegos et sur l’aggravation potentielle du raisonnement qu’elle avait initié. Le présent arrêt permet de soulever ces doutes.
20Sans qu’il soit nécessaire de qualifier immédiatement la convention litigieuse, celle-ci comportait à la fois une clause attributive de juridiction désignant les tribunaux allemands ainsi qu’une clause prévoyant l’applicabilité du droit allemand pour les litiges qu’elle pourrait susciter. La décision du Conseil d’État résonne alors comme un désaveu pour la Cour administrative d’appel de Douai. En effet, quel que soient les modalités de détermination de la loi applicable – clause expresse contenue dans le contrat litigieux [23] ou déduction à partir de la matière litigieuse [24] - la jurisprudence Tegos l’érige en critère conditionnant la compétence juridictionnelle. La question de la compétence est contingente car elle est placée dans la dépendance de la question relative à la loi applicable. À l’inverse, la solution King Consult prône l’autonomie et la priorité de la problématique de la compétence juridictionnelle.
21Déclinant in fine sa compétence, le Conseil d’État était libre quant au fondement à apporter à cette décision. S’il avait consacré la jurisprudence de la Cour administrative d’appel de Douai, il se serait désintéressé de la clause relative au droit applicable et aurait simplement affirmer son incompétence sur le fondement de la clause attributive de juridiction. Or le Conseil d’État réitéra de manière révélatrice la solution Tegos en en reproduisant le considérant de principe : « Considérant, en premier lieu, que le juge administratif français, juge d’attribution en matière de contrat international, n’est pas compétent pour connaître d’un litige né de l’exécution d’un contrat qui n’est en aucune façon régi par le droit français ». Ne relevant pas même l’existence de la clause attributive de juridiction et s’appuyant sur les seules stipulations relatives au droit applicable, le Conseil d’État conclut que la convention litigieuse « est exclusivement régie par la loi allemande ; qu’il s’ensuit, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires contraires, que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en s’estimant compétente ».
22Confirmant la jurisprudence Tegos, le présent arrêt en prolonge également les inconséquences. La dimension potentiellement administrative du litige et, in fine, la compétence du juge administratif conçue comme une compétence d’attribution en matière extraterritoriale sont placées dans la dépendance de la loi applicable. Mais la loi applicable est déterminée en fonction d’une méthodologie structurellement indifférente à l’égard de la question de la matière litigieuse au sens du droit administratif français. Au surplus, cette méthode privatiste repose sur le dogme du consensualisme et fait de la volonté des parties le critère principal de détermination de la loi applicable. Or, la loi applicable conditionnant la compétence du juge administratif, la solution Tegos revient à laisser à la discrétion de l’administration contractante le choix quant au juge susceptible de trancher les litiges auxquels elle est partie et comportant un élément d’extranéité ; contrevenant manifestement au caractère d’ordre public de la compétence de la juridiction administrative [25].
B – L’efficacité relative de la méthode corrective de désignation de la juridiction compétente
23Conscient dès l’origine des aberrations auxquelles pouvait mener ce raisonnement, le juge administratif a, dans la décision Tegos elle-même, consacré une méthode alternative de détermination de la loi applicable devant tempérer les conséquences de la mise en œuvre de la méthode bilatérale. Laissant à la discrétion de l’administration la faculté de déterminer le droit applicable à son activité contractuelle et, par extension, le juge compétent pour en connaître, la compétence du juge administratif risquait en effet d’être réduite à la portion congrue en matière extraterritoriale. Le correctif imaginé par le juge administratif consiste à compléter la mise en œuvre de la méthode bilatérale par une méthodologie d’inspiration unilatérale renforçant la probabilité qu’une règle de droit français soit applicable aux litiges dont il est saisi et accroissant par là même ses chances de pouvoir se déclarer compétent. Seulement, cette technique n’est pourvue que d’une efficacité relative ; le présent litige en est une nouvelle illustration.
24Cette précaution prise eu égard à la portée de la mise en œuvre de la méthode bilatérale en matière administrative s’évince de la rédaction de l’arrêt Tegos. En effet, après avoir affirmé que les parties s’étaient accordées pour que les litiges relatifs au contrat litigieux soient soumis au droit grec, le Conseil d’État ajoute « d’autre part, que la situation de M. X… en qualité de professeur suppléant de l’Institut français d’Athènes n’était régie par aucune règle de droit français ».
25Force est alors de constater que les mêmes précautions sont prises dans le présent arrêt. Le Conseil indique
« qu’il résulte ainsi clairement des stipulations de la convention du 25 juillet 1997 que celle-ci est exclusivement régie par la loi allemande ; qu’il s’ensuit, en l’absence de dispositions législatives ou réglementaires contraires, que la cour administrative d’appel a commis une erreur de droit en s’estimant compétente » [26].
27Cette vérification systématique et supplétive par rapport à la détermination de la loi applicable sur le fondement de la volonté des parties révèle, par sa rédaction, son caractère unilatéral. Contrairement à la méthode bilatérale qui, par une analyse du rapport de droit, cherche à désigner la loi avec laquelle il possède les liens les plus étroits, la méthode unilatérale ne s’intéresse qu’à une seule loi – généralement la loi du for – et cherche à déterminer si son champ d’application englobe le rapport de droit en cause. En d’autres termes, quelle que ce soit la loi désignée par les parties ou en fonction du lieu d’exécution du contrat, le juge administratif s’interroge en outre pour savoir si aucune norme de droit français n’aurait en tout état de cause prévu de s’appliquer au litige dont il est saisi.
28Cette méthodologie supplétive rappelle un correctif appliqué par le juge judiciaire lorsque l’application de la méthode bilatérale conduit, en raison de sa trop grande neutralité, à des solutions contestables. Il s’agit de la technique des lois de police. Elles peuvent être définies comme les lois « organisatrices de la société dont l’État a la charge » [27] dont la fonction est de faire échec à la mise en œuvre de la règle de conflit bilatérale de conflit afin de forcer la compétence de l’ordre juridique intéressé [28]. C’est ainsi que dans un litige de droit commun, le juge du for peut appliquer une autre loi que celle désignée par la règle de conflit bilatérale en raison de l’intérêt social dont elle est porteuse. C’est la raison pour laquelle les lois de police sont souvent relatives aux droits de la partie faible et sont présentes en droit du travail ou en droit de la consommation [29].
29Cependant, contrairement au juge judiciaire, la compétence du juge administratif dépend de l’applicabilité du droit français, expliquant l’instrumentalisation qu’il fait de cette technique.
30D’une part, l’étude de la jurisprudence administrative révèle le caractère indépendant de ces deux méthodes lorsqu’elles sont mises en œuvre par le juge administratif. En d’autres termes, recherchant exclusivement à établir l’applicabilité du droit français, le juge administratif ne met en œuvre une seconde méthode que si la première n’a pas conduit à ce résultat. C’est ainsi que dans le silence des parties, la seule applicabilité extraterritoriale de dispositions relatives à la tarification des visas permet au juge de rattacher l’ensemble du litige à l’ordre juridique français et d’asseoir sa compétence sans même qu’il ne s’interroge sur le critère du lieu d’exécution du contrat [30]. Comme l’affirme un auteur particulièrement autorisé sur le sujet,
« c’est seulement en l’absence de désignation du droit français par l’un des modes de raisonnement que le juge est contraint de conjuguer les méthodes afin de motiver l’incompétence de la juridiction administrative par l’inapplicabilité du droit public français » [31].
32La recherche compulsive de l’applicabilité d’une règle de droit français conduit, d’autre part, le juge administratif à estimer, de manière encore plus critiquable, que seule l’applicabilité même résiduelle du droit français suffit à fonder sa compétence. Ainsi, dans un litige relatif à un contrat conclu entre un hôpital public français, un hôpital public allemand et un cabinet privé de radiologie allemand et alors que les parties avaient convenu de l’applicabilité du droit allemand, le Tribunal des conflits a restauré la compétence du juge administratif en considérant que l’article R. 6134-1 du Code de la santé publique, prévoyant que de tels contrats devaient respecter le contrat d’objectifs et de moyens initialement établi par l’agence régionale de la santé, était une loi de police applicable en tout état de cause au litige [32]. De même, le Conseil d’État a récemment considéré que l’applicabilité nécessaire des seules règles relatives à la tarification des visas permettait, dans le silence des parties, de rattacher l’ensemble de la relation contractuelle établie entre le Consulat de France à Tunis et une entreprise privée tunisienne dans le but que cette dernière collecte des dossiers de demande de visas à l’ordre juridique français et de fonder, ce faisant, la compétence du juge administratif [33].
33Enfin, les lois de police sont considérées par la doctrine privatiste comme d’application nécessaire et, ce faisant, comme d’application immédiate. L’objectif social qu’elles poursuivent explique leur impérativité ainsi que la dérogation qu’elles constituent à la mise en œuvre de la règle de conflit bilatérale. Ainsi tandis qu’il revient au juge judiciaire de déceler le caractère impératif de chaque norme potentiellement applicable au litige dont il est saisi, la tâche du juge administratif est plus aisée. Il estime en effet – et non sans raison – que toute règle composant le droit administratif est revêtue d’une telle impérativité [34]. Il ne saurait pour autant considérer l’intégralité du droit administratif comme une loi de police. C’est pourquoi, il se borne à vérifier si l’auteur d’une règle administrative a entendu octroyer à celle-ci un champ d’application extraterritorial. Si tel est le cas, cette règle sera considérée comme une loi de police sans même que son caractère impératif ait été interrogé [35].
34Ces libertés prises par le juge administratif à l’égard de la technique des lois de police afin de préserver sa compétence dans un contexte conflictuel défavorable qu’il a pourtant lui-même développé permettaient à une partie de la doctrine de conclure à l’applicabilité systématique d’une bribe de droit français et à la compétence constante du juge administratif en matière extraterritoriale. En effet, si l’on pense aux dispositions de la loi du 4 août 1994 imposant la rédaction de tous les contrats des personnes publiques françaises en langue française, ou encore à la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription quadriennale, il semble possible d’affirmer qu’« aucun contrat passé par l’administration française n’est entièrement régi par un droit étranger » [36].
35Le présent arrêt dément pourtant cette interprétation mécaniste. Cet arrêt est d’autant plus intéressant que le juge administratif y emploie un vocabulaire assez flou. Il n’hésite pas à qualifier les financements prévus par la convention en cause de « subventions » tout en indiquant plus loin que le maître d’ouvrage s’est engagé à respecter les règles relatives aux procédures d’appel d’offre. Le Conseil d’État semble donc hésiter entre les notions de subvention et de prix pour qualifier les financements en cause dans la présente affaire. Mais que le contrat litigieux soit considéré comme un marché public ou comme un simple contrat relatif à l’octroi de subventions par plusieurs entités, il semble que le juge administratif n’a pu déceler l’applicabilité nécessaire d’aucune règle nationale.
36S’il semblait difficile de considérer que la convention litigieuse comme un marché public [37], force est de constater qu’une telle qualification n’aurait pas permis de déceler l’applicabilité nécessaire d’une quelconque règle de droit français [38].
37La qualification des financements en cause en termes de subventions n’était pas plus satisfaisante. À l’image de l’article 1611-4 du code général des collectivités territoriales [39], aucune disposition nationale n’a été expressément conçu en ce domaine comme devant disposer d’un champ d’application extraterritorial.
38Embarrassé par les problématiques posées par l’extranéité des litiges qui lui sont soumis, le juge administratif y apporte des solutions maladroites. La contrainte supposée selon laquelle le droit de l’Union lui imposerait la mise en œuvre d’une méthode conflictuelle privatiste sans égard pour la dimension administrative de la matière litigieuse conduit le juge administratif à abandonner sa compétence à la volonté de l’administration. Le correctif apporté à cette solution n’étant en outre que d’une efficacité relative, ceci explique que des litiges administratifs au sens du droit français soient in fine tranchés par le juge étranger et qu’un litige opposant l’État français à la Région Alsace ressortisse à la compétence du juge allemand.
II – La disposition par l’administration de l’immunité de juridiction devant la juridiction étrangère
39Bien qu’étant fondée sur un raisonnement critiquable, l’incompétence du juge administratif à l’égard du présent litige n’a rien de surprenant au regard de sa jurisprudence désormais bien établie. Si elle permet à l’administration de se délester du régime administratif et de son juge, celle-ci n’est peut-être pas pour autant prête à se soumettre à la juridiction d’un tribunal étranger. Dans une telle hypothèse, il reste à l’administration la possibilité de soulever devant la juridiction étrangère l’immunité de juridiction dont le champ d’application recoupe en partie celui du droit administratif (A). Seulement le bénéficiaire de l’immunité de juridiction est toujours susceptible d’y renoncer à la manière de l’État français dans le présent arrêt (B).
A – L’opportunité du mécanisme de l’immunité de juridiction pour l’administration
40Après avoir analysé le raisonnement qui sous-tend l’arrêt en cause et qui justifie l’incompétence du juge administratif français, il convient de s’interroger sur les suites potentielles de cette affaire. La juridiction administrative s’étant déclarée incompétente par la voix de sa juridiction suprême et les parties ayant désigné le juge allemand dans la convention litigieuse, alors la Région demanderesse devra saisir les juridictions allemandes si elle souhaite que l’État français soit condamné à respecter ses obligations contractuelles. Or la connaissance par le juge allemand d’un tel litige, dont la dimension formellement publique et même profondément intime [40] au regard de la souveraineté française est patente, peut déconcerter. Mais elle n’est pas une fatalité.
41Il convient alors de s’interroger sur la possibilité, pour l’administration, après avoir endigué la compétence du juge administratif français, de contester la compétence des tribunaux allemands. Il convient en d’autres termes de s’interroger sur la possibilité pour l’administration de bénéficier du mécanisme de l’immunité de juridiction et de circonscrire pour ce faire le champ matériel de ce mécanisme.
42L’immunité de juridiction est un mécanisme ancien de régulation des relations internationales [41]. Si son titulaire est et demeure le souverain, le nombre de ses bénéficiaires s’est constamment accru ; l’immunité s’étendant aux personnes agissant au nom du souverain et notamment aux agents diplomatiques. Quand bien même le fondement de ce mécanisme semble incertain, une grande partie de la doctrine [42] et des tribunaux [43] situent son origine en droit international public. L’immunité de juridiction, si elle n’est pas un principe autonome du droit international public, apparaît comme contenue en substance dans le principe structurel d’égalité souveraine des États, comme l’effet utile de ce principe [44].
43L’immunité de juridiction peut ainsi être considérée comme « “un point d’équilibre” entre deux manifestations de souveraineté, celle du for dans son expression juridictionnelle et celle de l’État étranger » [45] ; le principe d’égalité souveraine des États impliquant la renonciation de la souveraineté du for à s’ériger en juge de la souveraineté étrangère. Or si l’immunité de juridiction est conçue comme un principe régissant les relations internationales des États encore convient-il de démontrer que son champ d’application peut s’étendre aux relations extraterritoriales dans lesquelles l’administration est impliquée.
44Force est alors de constater que le mécanisme de l’immunité de juridiction s’étend à l’activité administrative extraterritoriale, et ce, au gré de deux translations successives.
45La première translation a été réalisée entre le souverain et l’État. Conçue dès l’origine comme attachée au souverain, l’immunité de juridiction était initialement personnelle tant que le souverain se confondait avec une personne physique. Ce mécanisme fut nécessairement bouleversé par le phénomène d’institutionnalisation de l’État. La souveraineté étant désormais attachée à une institution désincarnée, le champ de l’immunité n’était plus strictement personnel, mais s’étendait à toute entité agissant au nom de cette institution [46].
46La seconde translation a été réalisée entre la souveraineté et la puissance publique. Elle trouve son origine dans la multiplication des activités menées par l’État à partir du début du XXe siècle. Alors qu’auparavant les activités étatiques étaient nécessairement régaliennes et ainsi rattachables à la souveraineté, l’État a pu étendre son champ d’action à l’économie et, plus généralement, à des activités dans lesquelles il intervient comme un simple particulier. Or l’immunité trouvant sa raison d’être dans la protection de la souveraineté, il convenait de dégager des critères permettant distinguer parmi les activités étatiques, celles qui ressortissaient à sa qualité souveraine et les autres. L’immunité de juridiction qui bénéficiait jusqu’alors d’un caractère absolu, ne disposait plus que d’une applicabilité relative [47]. Or cette relativité de l’immunité de juridiction a justement permis d’en élargir le champ.
47Il convenait désormais pour le juge devant lequel le défendeur avait soulevé l’immunité de juridiction de s’assurer que l’activité litigieuse participait de la souveraineté étrangère, pouvait être rattachée à l’État étranger agissant en tant que tel. Après quelques errements, la jurisprudence française a opté pour des critères qui ne sont pas inconnus du droit administratif. Elle utilise désormais
« le critère objectif, qui prend en considération la forme dans laquelle l’acte a été passé, et le critère finaliste tiré du but poursuivi par l’auteur de l’acte. Le premier autorise l’État étranger à se prévaloir de l’immunité chaque fois que l’acte litigieux comporte des clauses exorbitantes du droit commun ; le second vise à cantonner le domaine du privilège aux actes poursuivant un but d’intérêt public, c’est-à-dire accomplis en vue d’un service public » [48].
49La Cour de cassation s’est, en d’autres termes, appropriée les critères de la puissance publique et du service public [49], qui forment encore aujourd’hui le socle de sa jurisprudence [50].
50Si ces critères démontrent incontestablement l’extension potentielle de l’immunité de juridiction à la matière administrative, ils doivent cependant être replacés dans leur contexte. Ils ne sont que les critères élaborés par les juridictions françaises. Or l’immunité étant un privilège octroyé par l’État du for, la qualification de l’activité s’effectue en tout état de cause lege fori, « la mesure de l’immunité devant dépendre de l’État qui l’accorde et non de celui qui en bénéficie » [51]. En d’autres termes, si les juridictions françaises sont assez sensibles à la problématique administrative en raison de la tradition juridique française, rien ne permet d’affirmer que les juridictions allemandes se montreront aussi compréhensives.
51Cette nécessaire précaution peut néanmoins être nuancée pour deux raisons.
52D’une part, les critères de la puissance publique et du service public sont consacrés, bien que de manière subsidiaire pour le second [52], par la Convention des Nations Unies sur l’immunité juridictionnelle des États et de leurs biens du 2 décembre 2004. Cette convention n’est pas encore entrée en vigueur [53], mais elle représente le compromis le plus récent et le plus abouti auquel sont parvenus les États sur ce sujet à ce jour. Ainsi, quand bien même cette convention demeure silencieuse quant aux contrats de financement tels que la convention litigieuse [54], elle révèle néanmoins le consensus dont font l’objet ces critères familiers. En outre, si l’Allemagne n’a pas signé cette convention, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme utilise également le critère de la puissance publique afin de déterminer si une immunité octroyée ne l’a pas été au détriment du droit à un procès équitable [55].
53D’autre part et surtout, quels que soient les critères effectivement employés par le juge allemand, le litige en cause n’est pas ordinaire. Tandis qu’en principe « tout différend soulevant une question d’immunité suppose en amont un conflit, et donc une relation, née ou non d’un contrat, entre un État et une personne privée » [56], le présent litige se singularise par le fait qu’il oppose deux collectivités publiques françaises et même deux personnes publiques primaires issues d’une souveraineté étrangère à celle du for. De plus, la personne publique défenderesse n’est pas un mandataire de l’État mais bien l’État français lui-même. Quand bien même une telle relation peut être régie par le droit privé, de tels éléments ne peuvent laisser indifférents le juge allemand dans l’hypothèse où le défendeur soulèverait l’immunité de juridiction. Si, dans de telles circonstances, le juge allemand estimait plus sage de renoncer à l’exercice de son pouvoir juridictionnel, le présent litige ne serait pas pour autant abandonné au néant juridique. Le juge judiciaire français pourra alors être valablement saisi par la Région requérante [57].
54Toutefois, ces éléments de réflexion ne pourront en toute hypothèse posséder qu’un simple intérêt théorique. L’État français ne saurait soulever l’immunité de juridiction si la Région Alsace le poursuivait devant les tribunaux allemands car, en désignant ces derniers pour se prononcer sur les litiges que pourrait engendrer la convention en cause, l’État français est réputé avoir renoncé au bénéfice de ce mécanisme.
B – La renonciation par l’administration à l’immunité de juridiction
55L’immunité de juridiction est un privilège accordé, par la souveraineté du for, au souverain étranger ou à l’une de ses émanations afin de préserver sa qualité. Or si l’étendue de ce privilège dépend naturellement de celui qui l’accorde, son exercice est abandonné à son bénéficiaire, à la volonté de celui qu’elle est censée protéger [58]. Il est donc toujours possible de renoncer au bénéfice de ce privilège, même si une telle renonciation doit, pour être valable, remplir certaines conditions ; ce qui semble être le cas pour l’État français dans la présente affaire.
56La renonciation à l’immunité de juridiction, qu’elle soit implicite [59] ou explicite, doit, selon le dernier état de la jurisprudence, être « certaine, expresse et non équivoque » [60]. Plusieurs jurisprudences nationales, confirmées par la Convention des Nationaux Unies sur les immunités précitée, apportent des précisions quant aux modalités concrètes de renonciation à ce privilège.
57L’existence dans un contrat d’une clause déterminant l’application d’une loi étrangère et plus précisément prévoyant l’application de la loi du for, comme c’est le cas en l’espèce, n’est pas interprétée comme équivalent à une renonciation à l’immunité de juridiction [61]. En revanche, tel n’est pas le cas pour les clauses attributives de juridiction qui sont logiquement considérées comme révélant l’acceptation de la juridiction étrangère, comme une renonciation par anticipation [62]. Ainsi en désignant la compétence des tribunaux allemands dès l’article premier de la convention litigieuse, l’État français est fatalement réputé avoir renoncé à l’immunité de juridiction dont il aurait pu bénéficier.
58S’il semble ainsi inconcevable que l’État français échappe dans la présente affaire à la compétence des tribunaux allemands, reste alors a déterminé les modalités selon lesquelles le litige sera tranché, si la Région Alsace entend effectivement saisir le juge allemand.
59Quand bien même il est question ici de relations extraterritoriales et non pas de relations internationales, celles-ci posent tout de même la question des rapports horizontaux entre divers ordres juridiques étatiques. En effet, si l’activité extraterritoriale de l’administration ne se confond pas avec les relations diplomatiques de la France [63], celle-ci ne saurait être considérée comme aussi ordinaire que les agissements des simples particuliers comportant un élément d’extranéité. Tandis que les personnes privées sont détachables de toute souveraineté impliquant que leurs litiges peuvent être tranchés sur le fondement de n’importe quelle norme, l’administration est rattachée à une souveraineté donnée [64] – celle qui l’a instituée – et ne peut être régie en tant que telle par les normes du seul ordre juridique dont elle découle.
60C’est ainsi qu’en raison de leur dimension potentiellement publique, les relations extraterritoriales de l’administration renvoient au principe d’égalité souveraine des États, lequel les influence en retour. La souveraineté des ordres juridiques étatiques implique leur étanchéité. Souverains, ces ordres juridiques sont institutionnellement clos et cette clôture s’étend aux normes qu’ils édictent afin de régir l’organisation et le fonctionnement de l’entité étatique et de celles qui s’y rattachent. En d’autres termes, l’ordre juridique français n’a pas vocation à viser par l’une de ses normes une activité publique étrangère. Mais étant donné que ce constat peut être étendu à l’ensemble des ordres juridiques étatiques en raison de leur nature même, il est possible d’affirmer que seul l’ordre juridique français régit par ses normes l’activité administrative française.
61Rapportés à la présente affaire, ces éléments permettent de conclure en l’inapplicabilité du droit administratif allemand, lequel possède par hypothèse un objet différent de celui qui nous préoccupe : l’activité administrative allemande [65]. Saisi de la présente affaire, le juge allemand serait placé devant l’alternative suivante : trancher le litige au moyen de n’importe quel droit privé, y compris allemand, avec lequel il possède un rattachement suffisant, ou trancher le litige sur le fondement du droit administratif français.
62Mais cette dernière hypothèse doit également être rejetée. Le juge allemand est, à la manière de l’administration, une entité dotée de compétences et instituée par la souveraineté allemande afin de trancher en son nom les litiges qui lui sont soumis. Or ce rattachement nécessaire du juge à la souveraineté dont il émane limite sa marge d’appréciation. S’il est susceptible de trancher les litiges qui lui sont soumis sur le fondement de n’importe quel droit privé, tel n’est pas le cas en matière de droit public. Si le juge allemand tranchait le présent litige en fonction du droit administratif français, il serait réputé servir une souveraineté étrangère et, compte tenu de l’exclusivité inhérente à la notion de souveraineté, romprait ainsi le lien existentiel qui l’unit à la souveraineté dont il est la création.
63Finalement, si l’étanchéité des ordres juridiques étatiques et des normes y afférant permet d’écarter le droit administratif allemand de la résolution par le juge allemand de la présente affaire, l’ « égoïsme » [66] consubstantiel de ces ordres juridiques qui en découle permet en outre de conclure à l’inapplicabilité du droit administratif français. Le présent litige, s’il devait être soumis au juge allemand, serait donc nécessairement tranché sur le fondement du droit privé.
64Il resterait alors à l’État français une possibilité fragile de faire obstacle à l’exécution d’un tel jugement. En effet, la renonciation à l’immunité de juridiction est traditionnellement distinguée de la renonciation à l’immunité d’exécution. Supposant la mise en œuvre d’actes de contrainte à l’encontre d’une entité rattachable à une souveraineté étrangère, l’exécution des jugements est la phase la plus attentatoire à cette souveraineté, expliquant son traitement différencié [67]. Cette possibilité pour l’État français de ne pas se conformer à la décision que pourrait rendre le juge allemand est néanmoins fragile car il ne pourrait cependant faire obstacle à un jugement en exequatur. Rien n’empêcherait en effet la Région Alsace de demander a posteriori aux tribunaux français de donner force exécutoire au jugement allemand, car la jurisprudence française estime que seule l’immunité de juridiction peut s’opposer à une demande d’exequatur [68].
65En désignant les tribunaux allemands pour trancher les litiges relatifs à la convention en cause, l’administration française renonce au privilège de l’immunité de juridiction et, par une réaction en chaîne, à toute exorbitance du régime juridique applicable à son action extraterritoriale.
Conclusion
66Bien qu’étant incontestablement un arrêt d’espèce, le présent arrêt est toutefois éminemment représentatif du traitement dont font l’objet les litiges de l’administration comportant un élément d’extranéité et de ses conséquences sur le fond du droit.
67Alliant la méthode bilatérale, laquelle est structurellement inadaptée à la matière administrative, avec les exigences inhérentes à cette discipline, le juge administratif tente de tracer une voie médiane qui ne semble guère satisfaisante. Il parvient à restaurer une certaine cohérence entre la compétence juridictionnelle et la matière litigieuse, mais en abandonnant à l’administration le soin de déterminer le droit applicable ainsi que le juge compétent pour régir son activité extraterritoriale. Une telle solution provoque une nécessaire dissipation du privilège de juridiction de l’administration en ce domaine, laquelle ne peut être systématiquement combattue par le juge administratif.
68Le juge administratif semble ainsi être à l’origine de ses propres turpitudes et de celles que connaît le droit administratif dans la sphère extraterritoriale. Sa jurisprudence timorée et trop inspirée de la méthodologie privatiste est interprétée par l’administration comme lui octroyant la faculté de disposer du choix du juge destiné à trancher les litiges que son activité extraterritoriale suscite ainsi que de s’exonérer de l’application du droit administratif. Cette position est susceptible d’engendrer des surprises, sinon des aberrations, comme celle de permettre au juge allemand de trancher un litige opposant deux collectivités publiques françaises. Mais elle n’est en rien une fatalité ; de telles situations amèneront, il faut l’espérer, le juge administratif à faire évoluer sa jurisprudence.
Notes
-
[1]
V. par exemple, CE, 15 décembre 1824, Arneva, Rec., p. 687 et CE, 2 mai 1861, Dato, Rec., p. 318. CE, 15 juin 1825, Recur, Rec., p. 297, CE, 22 février 1826, Thuret et compagnie, Rec., p. 108 et CE, 25 mai 1870, Souberbielle, Rec., p. 651.
-
[2]
CE, 5 juillet 2013, n° 348050, mentionné T.
-
[3]
CE, 7 octobre 2009, Société internationale du bâtiment et de génie civil (SIBAGEC), mentionné T. AJDA, 2009, p. 1866. DA, 2009, p. 16, chron. M. AUDIT.
-
[4]
TC, 17 mai 2010, INSERM c/ Fondation Saugstad, Rec., p. 580. RFDA, 2010, concl. GUYOMAR, p. 959 et note P. DELVOLVE, p. 971. note LAAZOUZI, RCDIP, 2011, p. 653. AJDA, 2010, p. 1047 et p. 1564, étude P. CASSIA et p. 2337, tribune P. CASSIA. D. 2010, p. 2633, obs. X. DELPECH, note S. LEMAIRE, p. 2323, obs. L. D’AVOUT et S. BOLLEE, p. 2933, obs. Th. CLAY. RDI, 2010, p. 551, obs. S. BRACONNIER. RTD com., 2010, p. 525, obs. E. LOQUIN. Gaz. Pal., 27 mai 2010, n° 147, p. 27, note M. GUYOMAR. JCPG, 2010, n° 552, p. 1045, note Th. CLAY, p. 1096, obs. E. GAILLARD, chron., 644, comm., 12, J. ORTSCHEIDT. Rev. arb., 2010, p. 275, concl. M. GUYOMAR. M. AUDIT, « Le nouveau régime de l’arbitrage des contrats administratif internationaux », Rev. arb., 2010, p. 253. D.A., 2010, comm., 122, F. BRENET et F. MELLERAY. Les cahiers de l’arbitrage, Gaz. Pal., 2010, p. 717, étude D. FOUSSARD.
-
[5]
CE Section, 19 novembre 1999, Tegos, Rec., p. 356. RFDA, 2000, p. 833, concl. J. ARRIGHI DE CASANOVA. J.D.I., 2000, p. 742, note J.-F. FLAUSS. RCDIP, 2000, p. 409, concl. J. ARRIGHI DE CASANOVA et note S. LEMAIRE. JCP, 2000, IV, 1439, obs. M.-C. ROUAULT. RDP, 2000, p. 378, obs. Ch. GUETTIER.
-
[6]
Il s’agissait précisément de l’association pour la relance agronomique en Alsace, de l’institut pour une agriculture respectueuse de l’environnement de Müllheim et du centre agricole d’Ebenrain.
-
[7]
V. sur ce point, Y. GAUDEMET, « propos introductifs », in F. MELLERAY (dir.), L’exorbitance du droit administratif en question(s), LGDJ, 2004.
-
[8]
Le premier mode de résolution, d’inspiration publiciste, consistait pour le juge administratif à commencer par qualifier matériellement le litige. Il déduisait sa compétence ainsi que l’applicabilité exclusive du droit administratif français du caractère administratif du litige au sens des critères traditionnels. CE Sect., 11 janvier 1952, Habib Bechara, Rec., p. 30. Rev. jur. pol. Union fr., 1952, p. 292, concl. BARBET. Le second mode de résolution expérimenté par le juge administratif, d’inspiration privatiste, consistait à l’inverse à déduire la seule compétence juridictionnelle de la qualification matérielle du litige tout en la considérant comme impuissante à l’égard de la question du droit applicable. Malgré la reconnaissance du caractère administratif du litige, le juge administratif devra néanmoins mettre en œuvre une règle de conflit afin de « découvrir » la loi applicable au fond. CE, 7 janvier 1987, Dame Félicien, Rec., p. 805. D., 1987, somm., p. 350, obs. B. AUDIT. RCDIP, 1988, p. 687, note P. RODIERE. CE, 10 mars 1997, Madame de Waele, Rec., 741. RCDIP, 1997, p. 695, note Ph. COURSIER.
-
[9]
CE Section, 19 novembre 1999, Tegos, préc.
-
[10]
La Convention 80/934/CEE sur la loi applicable aux obligations contractuelles du 19 juin 1980 a été remplacée par le Règlement (CE) n° 593/2008 du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles. Ces deux textes généralisant l’emploi de la méthode bilatérale afin de déterminer la loi applicable aux obligations contractuelles.
-
[11]
V. notamment CE, 10 mars 1997, Madame de Waele, précité. L’un des commentateurs de cette décision s’interrogeait ainsi : « Dans la mesure où le contrat de travail est soumis à la loi mexicaine, par quel moyen le Conseil d’État qualifie-t-il le salarié “d’agent public” au sens du droit français ? » et, serait-on tenté d’ajouter, fonde-t-il alors sa propre compétence ? Ph. COURSIER, note préc.
-
[12]
H. GAUDEMET-TALLON, « Le nouveau droit international privé européen des contrats », RTDE, 1981, p. 241. V. également J. FOYER, « Entrée en vigueur de la Convention de Rome du 19 juin 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles », JDI, 1991, p. 605.
-
[13]
La Cour de Justice n’a en effet jamais eu, à ce jour, l’opportunité de se prononcer précisément sur l’applicabilité de ces normes européennes aux contrats conclus par l’administration.
-
[14]
Si la jurisprudence de la Cour peut faire l’objet d’interprétations divergentes, certains auteurs remarquent que la Cour, lorsqu’elle se prononce sur un élément de puissance publique fait en outre toujours référence à la notion d’ « autorité publique ». Or une telle précaution peut être conçue comme révélant la conception strictement unilatéraliste de la Cour de Justice concernant la puissance publique, voire une réserve à l’encontre de l’idée de relations contractuelles de droit public. V. sur ce point, J.-P. et M.-J. BERAUDO, « Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, Convention de Lugano du 16 septembre 1988, Règlement n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 - Généralités et champs d’application », J. Cl., Europe, fasc. 3000, n° 27.
-
[15]
Ce qui semble être le cas du juge administratif lui-même lequel, tout en conservant la méthode bilatérale inspirée par le droit de l’Union, a, après l’arrêt Tegos, persisté dans l’application de cette méthode sans jamais visé aucun texte européen. V. par exemple, CE, 30 mars 2005, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, Rec., p. 129 ; AJDA, 2005, p. 1844, note M. AUDIT ; JCP, 2005, I, p. 145, chr., C. BOITEAU.
-
[16]
Le deuxième alinéa de l’article premier du Règlement Rome I précité affirme ainsi que son champ d’application ne s’étend pas « aux matières fiscales, douanières et administratives ».
-
[17]
Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière civile et commerciale. Le second alinéa de l’article premier énonce les mêmes exclusions.
-
[18]
CAA Douai, 29 mai 2012, SA King Consult, n° 10DA01035, AJDA, 2012, p. 2223, concl. V. MARJANOVIC. RFDA, 2013, p. 46, note M. LAAZOUZI.
-
[19]
V. MARJANOVIC, conclusions préc.
-
[20]
Article 2 Règlement préc.
-
[21]
Article 5-1 Règlement préc.
-
[22]
Le rapporteur public l’affirme lui-même. V. conclusions préc.
-
[23]
V. notamment CE Section, 19 novembre 1999, Tegos et CE, 30 mars 2005, SCP de médecins Reichheld et Sturtzer, préc.
-
[24]
V. à titre d’illustration, CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, Rec. 2013, p. 258. AJDA, 2012, p. 1314 et p. 2420, note M. LAAZOUZI. RDI, 2012, p. 560, note S. BRACONNIER.
-
[25]
CE, 4 octobre 1967, Trani, Rec., p. 352 et v. sur ce point R. CHAPUS, Droit du contentieux administratif, Montchrestien, 13e éd., 2008, pp. 264 et s.
-
[26]
C’est nous qui soulignons.
-
[27]
J.-M. JACQUET, Principe d’autonomie et droit applicable aux contrats internationaux, Thèse, Strasbourg, 1981, p. 450.
-
[28]
V. notamment sur cette thématique, P. MAYER, « Les lois de police étrangères », JDI, 1981, p. 277 et D. SINDRES, La distinction des ordres et des systèmes juridiques dans les conflits de lois, Bibliothèque de droit privé, t. 503, LGDJ, 2008, pp. 205 et s.
-
[29]
Pour un exemple de loi de police en droit du travail, CE, 29 juin 1973, Syndicat général du personnel Cie internationale des Wagons-lits, RCDIP, 1974, p. 344. JDI, 1975, p. 538, note SIMON-DEPITRE, RCDIP, 1974, p. 273, chron. Ph. FRANCESCAKIS.
-
[30]
CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc.
-
[31]
M. LAAZOUZI, Les contrats administratifs à caractère international, Economica, 2008, p. 168.
-
[32]
TC, 24 avril 2006, SCP de médecins Reichheld et Stürtzer, Rec., p. 629. RFDA, 2006, p. 1077. AJDA, 2006, p. 2456, concl. D. CHAUVAUX.
-
[33]
CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc.
-
[34]
Sur ce point, M. LAAZOUZI, note sous TC, 17 mai 2010, INSERM c/ Fondation Saugstad, op. cit., pp. 674 et s.
-
[35]
Tel est le cas par exemple du décret du 18 juin 1969, portant fixation du statut des agents contractuels de l’État et des établissements publics de l’État à caractère administratif de nationalité française en service à l’étranger. Il permit à deux reprises de désigner la loi française sans avoir à mettre en œuvre la méthode bilatérale, CE Sect., 7 juin 1991, Troquet, Rec., p. 222. D., 1992, somm., p. 148, obs. P. BON et Ph. TERNEYRE. Quot. Jur., 28 septembre 1991, p. 11, note M. DEGUERGUE et CE, 21 juin 2002, Laurent Delabouglise, AJDA, 2002, p. 877, note M. DEGUERGUE.
-
[36]
S. LEMAIRE, note sous CE Section, 19 novembre 1999, Tegos préc.
-
[37]
V. sur la distinction entre la notion de prix et celle de subvention, CE, 26 mars 2008, Région de la Réunion. Rec. p. 114. BJCP, 2008, p. 245, concl. SENERS. JCPA, 2008, act. 304. JCP G., 2008, act. 249. JCP G., 2008, IV, 1821. R. Contrats et Marchés publics, 2008, comm. 90, G. ECKERT.
-
[38]
Les marchés publics ne sont pas un terreau favorable aux lois de police puisque le juge estime qu’en principe et sauf volonté contraire des parties, les règles ressortissant au code des marchés publics ont un champ d’application strictement territorial, CE, 4 juillet 2008, Société Colas Djibouti, AJDA, 2008, p. 1359, obs, S. BRONDEL, RFDA, 2008, p. 1123, note F. MELLERAY. Si le juge administratif a par la suite assoupli sa jurisprudence en indiquant que les principes généraux de liberté d’accès à la commande publique et d’égalité de traitement des candidats, ainsi que la règle de transparence des procédures qui en découlent, bénéficient d’une portée extraterritoriale qui s’impose à l’administration, ces règles ne sont pas conçues en elles-mêmes comme impératives, CE, 29 juin 2012, Société Pro 2C, préc. Il est révélateur à ce propos de constater que dans l’arrêt même où le Conseil d’État développa cette solution, il rattacha le litige à l’ordre juridique français, non pas sur le fondement de ces règles, mais sur celui des règles relatives à la tarification des visas pourtant plus anecdotiques.
-
[39]
Cet article prévoit que toute association, œuvre ou entreprise ayant reçu une subvention peut
être soumise au contrôle des délégués de la collectivité qui l’a accordée. Tous groupements, associations, œuvres ou entreprises privées qui ont reçu dans l’année en cours une ou plusieurs subventions sont tenus de fournir à l’autorité qui a mandaté la subvention une copie certifiée de leurs budgets et de leurs comptes de l’exercice écoulé, ainsi que tous documents faisant connaître les résultats de leur activité. -
[40]
J. VERHOEVEN, « Non-intervention : “affaires intérieures” ou “vie privée” ? », Mélanges M. VIRALLY, Paris, éd. Pedone, 1991, pp. 493-500.
-
[41]
P. BOUREL, « Conflits de juridictions – immunités de juridiction et d’exécution » Jurisclasseur Droit international, fasc. 581-50, n° 3.
-
[42]
V. notamment P. MAYER et V. HEUZE, Droit international privé, Domat – Droit privé, Montchrestien, 10e éd., 2010, pp. 236 et s., et Ph. THERY, Pouvoir juridictionnel et compétence, étude de droit international privé, Thèse, Paris II, 1981, p. 197.
-
[43]
Ch. mixte, 20 juin 2003, Dame Soliman, RCDIP, 2003, p. 647, note H. MUIR WATT. JCP, 2004, II, 10010, note J.-G. MAHINGA. D., 2005, p. 1197, obs., H. CHANTELOUP.
-
[44]
Il s’agit d’ailleurs d’un « principe coutumier du droit international », I. PINGEL-LENUZZA, Les immunités des Etats en droit international, Bruylant, 1998, p. 11.
-
[45]
Ph. THERY, ibid.
-
[46]
Comme l’affirme le Professeur COSNARD, « la notion de bénéficiaire […] est fondamentale en matière d’immunité puisqu’elle désigne les personnes physiques ou morales possédant la capacité d’invoquer le privilège dévolu à l’État », La soumission des États aux tribunaux internes, Paris, éd. Pedone, 1996, p. 93.
-
[47]
C’est ainsi que la Cour de cassation a refusé, dès 1929, d’octroyer l’immunité de juridiction à la Représentation commerciale des soviets, Req., 19 février 1929, D.P., 1929. 1. 73, note SAVATIER. S., 1930. 1. 49, note NIBOYET.
-
[48]
P. BOUREL, « Conflits de juridictions – immunités de juridiction et d’exécution », op. cit., n° 71.
-
[49]
Cass. civ. 1ère, 25 février 1969, Soc. Levant Express Transport, G.A., n° 47. RCDIP, 1970, p. 102, note P. BOUREL.
-
[50]
Cass. civ. 1ère, 2 mai 1990, Société nationale iranienne de gaz, RCDIP, 1991, p. 140, note P. BOUREL. Cass. civ. 1ère, 27 avril 2004, Cotigny, RCDIP, 2005, p. 75, (1ère esp.), note MUIR WATT.
-
[51]
P. MAYER et XV. HEUZE, Droit international privé, op. cit., p. 236 et v. notamment Cass. civ. 1ère, 2 mars 1966, État du Pakistan, JCP, 1966, II. 14831, note M. ANCEL.
-
[52]
L’article 2. 2 de la Convention précise qu’« il faudrait prendre en considération son but si les parties au contrat ou à la transaction en sont ainsi convenues ». C’est nous qui soulignons.
-
[53]
Pour entrer en vigueur, cette Convention doit être ratifiée par trente États. Dix-huit États l’ont actuellement ratifiée. La France l’a signée le 17 janvier 2007 et la loi autorisant la ratification est intervenue le 28 juin 2011.
-
[54]
La convention des Nations Unies porte principalement sur des contrats en principe soumis à un régime de droit privé, comme les contrats de travail ou les contrats relatifs à des transactions commerciales, et énonce un certain nombre de dérogations au principe de l’absence d’immunité de juridiction en ces domaines.
-
[55]
V. notamment, CEDH, 23 mars 2010 (Grande Chambre), Cudak c/ Lituanie, n° 15869/02.
-
[56]
I. PINGEL-LENUZZA, op. cit., p. 3.
-
[57]
Au moins en vertu de l’article 14 du code civil qui permet à tout demandeur de nationalité française de saisir le juge français d’un différend.
-
[58]
V. notamment, P. MAYER et V. HEUZE, Droit international privé, op. cit., p. 238 et J. VERHOEVEN, O. BEAUD, Le droit international des immunités : contestation ou consolidation ?, Bruxelles, Larcier, 2004, p. 37.
-
[59]
V. notamment, J. VERHOEVEN, O. BEAUD, op. cit., pp. 38 et s.
-
[60]
Civ. 1ère, 9 mars 2011, GIE La Réunion aérienne c/ Jamahiriya Arabe Libyenne. Bull. civ., 2011, I, n° 49. RCDIP, 2011, p. 385, avis P. CHEVALLIER, p. 401, rapp. A.-F. PASCAL. RGDIP, 2012, p. 738, note A. DE NANTEUIL. JDI, 2011, comm. 19, p. 953, Ph. DELEBECQUE et S. ADELINE. AFDI, 2012, p. 858. CA Paris, 16 janv. 2009. JDI, 2009, comm. 14, p. 863, C. BRIERE.
-
[61]
Les jurisprudences suédoises et canadiennes confirment cette solution. Voir respectivement, HD, 30 décembre 1999, Local Authority of Västeräs v. Republic of Iceland, AJIL, 2001, p. 192 et SC, 12 septembre 2002, Schreiber c. Canada. De même la loi australienne promeut la même solution dans son article 10.2. Enfin l’article 7.2 de la Convention des Nations Unies sur les immunités juridictionnelles des États et de leurs biens affirme que « L’accord donné par un État pour l’application de la loi d’un autre État n’est pas réputé valoir consentement à l’exercice de la juridiction des tribunaux de cet autre État ».
-
[62]
En revanche, la même convention précise qu’ « Un État ne peut invoquer l’immunité de juridiction dans une procédure devant un tribunal d’un autre État à l’égard d’une matière ou d’une affaire s’il a consenti expressément à l’exercice de la juridiction de ce tribunal à l’égard de cette matière ou de cette affaire », notamment dans un contrat écrit (article 7.1.b).
-
[63]
Il est à noter que le juge administratif n’a jamais opposé la théorie des actes de gouvernements à l’activité extraterritoriale de l’administration française, et ce, depuis l’origine.
-
[64]
Comme le note judicieusement le Professeur Mayer, tandis que le droit privé régit indistinctement « l’institution du mariage », « l’objet des règles contenues dans le Code français de la nationalité est l’attribution, l’acquisition et la perte de la seule nationalité française…]. De même, l’objet du droit constitutionnel français est : la Constitution de la France, tandis que l’objet du droit constitutionnel italien est : la Constitution de l’Italie, etc… ». P. MAYER, « Droit international privé et droit international public sous l’angle de la notion de compétence », RCDIP, 1979, pp. 2 et s. (I), pp. 349 et s. (II) et pp. 537 et s. (III), sp. 350.
-
[65]
Il est traditionnellement affirmé que, tandis que les compétences normatives étatiques sont concurrentes en droit privé, elles sont exclusives en droit public. V. notamment P. MAYER, op. cit.
-
[66]
P. MAYER et V. HEUZE, op. cit., p. 230.
-
[67]
CIJ, 3 févr. 2012, Immunités juridictionnelles de l’État (Allemagne c/ Italie).
-
[68]
CA Paris, 26 juin 1981, Benvenutti et Bonfant SARL c/ République populaire du Congo. JDI, 1981, p. 843, note B. OPPETIT. RCDIP, 1982, p. 379.