Maririta Guerbo : Giordana Charuty, pourriez-vous revenir sur la traduction des
Benandanti [trad. fr. Les batailles nocturnes], la première œuvre de Carlo Ginzburg ?
Qui était à l’initiative de ce projet éditorial ? Qu’a-t-il signifié pour vous ?Giordana Charuty : La découverte du livre de Carlo Ginzburg, les Benandanti,
revient à Daniel Fabre qui, depuis plusieurs années, allait régulièrement en Italie et
se tenait informé de la production italienne en histoire et en anthropologie. Le projet
de traduction, c’est moi qui l’ai proposé en rejoignant l’équipe de recherche qui
allait devenir le Centre d’anthropologie des sociétés rurales. D’une certaine façon,
c’est Dina Dreyfus, la première épouse de Claude Lévi-Strauss, qui m’a orientée
vers l’ethnologie de l’Europe parce qu’elle avait introduit en 1969 un enseignement
d’anthropologie sociale de deux heures hebdomadaires dans les Écoles normales
où j’enseignais la philosophie. C’était soit un historien, soit un philosophe qui en
avait la charge, la formation universitaire en anthropologie n’existant pas alors.
En arrivant à Carcassonne, j’ai découvert que cela me revenait et c’est par le biais
de Bernard Traimond, membre de la section locale de l’« École émancipée » – un
courant syndical –, que je suis entrée en relation avec Daniel Fabre qui venait de
publier les deux volumes sur la tradition orale occitane. Je l’ai invité à l’École
normale, à mon arrivée en 1976.
Je m’intéressais aussi à l’antipsychiatrie, parce que l’enseignement de
psychopédagogie dont j’étais chargée me paraissait bien problématique…