Couverture de CISL_1801

Article de revue

Une enquête sociolinguistique à finalité institutionnelle sur les pratiques, les représentations et la demande sociale à propos de la langue régionale en Bretagne Gallo

Pages 113 à 136

Notes

  • [1]
    Dans l’Ouest de la France, on désigne traditionnellement l’ouest par la notion de haut et l’est par la notion de bas, en se fondant sur le mouvement apparent du soleil, au point qu’en Bretagne, autrefois, les cartes étaient positionnées avec l’est en haut et l’ouest en bas. Le sud et la droite d’une part, le nord et la gauche d’autre part, étant associés dans diverses dénominations et croyances (Diaz, 2018).
  • [2]
  • [3]
    Enquête 2013 de l’Observatoire sur les stratégies d’information des jeunes Bretons du CRIJ Bretagne (en ligne sur http://www.ij-bretagne.com/img_bzh/enquete2013.pdf) et enquête TMO-Ouest pour Bretagne Culture Diversité de 2014 en ligne sur http://www.bcd.bzh/fr/les-resultats-du-sondage-bcd-en-ligne/.
  • [4]
    Blanchet, Ph. et Le Coq, A., 2008 « Où en est le gallo ? Résultats d’enquêtes réalisées à l’université de Haute Bretagne », dans Autour du gallo : état des lieux, analyses et perspectives, Cahiers de Sociolinguistique n° 12, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, p. 11-29 ; Blanchet Ph. et Le Coq, A., 2008, « Où en est aujourd’hui la pratique du gallo ? », revue Bretagnes n° 11, p. 72-75.
  • [5]
  • [6]
    La Région Bretagne a commandé en 2018 une enquête quantitative sur les pratiques du breton et, pour la première fois, du gallo, à un institut de sondage (TMO Ouest). Le PREFICS participe aux comités technique et de pilotage de cette enquête avec le CRBC (Centre de Recherche Bretonne et Celtique des universités Rennes 2 et de Brest).
  • [7]
    Le protocole d’enquête est donné en annexe.
  • [8]
    Dans ce texte, nous avons choisi d’utiliser gallo plutôt que gallo / patois, sauf bien sûr dans les citations des témoins.
  • [9]
  • [10]
    Notre enquête de 2006, confirmée par des enquêtes quantitatives (cf. supra), donnait environ 5 % de locuteurs et locutrices dans la population bretonne, soit 200.000 personnes et 10 fois moins que dans la population ciblée ici.
  • [11]
    Les formulations employées révèlent souvent une comparaison implicite avec le français posé comme référence (ainsi tourjou présenté comme « une inversion » par rapport au français toujour(s), alors que bien sûr on pourrait tout à fait dire les choses en sens inverse ou ne pas comparer)
  • [12]
    Dans les représentations circulantes, fréquemment entendues dans l’ensemble de la Bretagne, les Breton•ne•s de la zone bretonnante sont perçu•e•s comme « les vrai•e•s Breton•ne•s », ceux de la zone gallo comme des « faux/fausses Breton•ne•s » voire, expression plus rare, comme des « sots Bretons » (la forme féminine n’est pas attestée à notre connaissance). On rencontre toutefois des affirmations identitaires fortes en Haute Bretagne, dont la formulation la plus célèbre est celles relative à St. Malo « Malouin, d’abord, Breton ensuite, Français s’il en reste ».

1. De quoi parle-t-on ?

1On entend par Bretagne gallo ou Haute Bretagne [1] l’ensemble de la zone linguistique romane et non celtique de la Bretagne historique qui comprend, à l’est de la Bretagne historique, les départements actuels que sont l’Ille-et-Vilaine, la Loire-Atlantique, les moitiés est des Côtes-d’Armor et du Morbihan. Le gallo est une langue romane issue du latin populaire en contact avec le gaulois (langue celtique) puis le breton (autre langue celtique), relevant de l’ensemble gallo-roman septentrional aussi appelé « d’oïl ». Dans cet ensemble, si l’on veut se représenter la « physionomie » du gallo, on trouve d’autres langues, comme le picard, le chtimi, le poitevin, ou le français, qui ressemblent plus ou moins au gallo  [2]. La plupart des gens, y compris des locuteurs et locutrices, comme le gallo par le terme patois, comme dans de nombreuses situations françaises. Le terme gallo, emprunté au breton où il sert à désigner ce qui relève de la Bretagne non bretonnante, est connu dans la zone de contact avec le breton, utilisé par les institutions et les promoteurs de cette langue pour éviter les connotations potentiellement très péjoratives du terme patois, et, on le verra, progressivement plus répandu et compris.

Carte 1 : aires géolinguistiques de Bretagne (Walter, 1994, 95).

tableau im1

Carte 1 : aires géolinguistiques de Bretagne (Walter, 1994, 95).

2 Dans la carte ci-dessus, les diverses lignes indiquent les limites orientales d’extension d’usages collectifs de la langue bretonne (dont la toponymie porte une trace forte). La zone hachurée représente une zone où ces usages du breton ont été finalement presqu’entièrement remplacés par des usages du gallo. La zone comprise entre la ligne en pointillés la plus à l’ouest et la frontière politique historique de la Bretagne à l’est, est celle où le gallo est principalement en usage. La zone de transition bordée par les lignes établies en 1886 par Sébillot à l’est et en 1941 par Panier à l’ouest, reste caractérisée jusqu’à aujourd’hui par des usages bilingues breton-gallo. Il y a d’ailleurs toujours eu des usages ponctuels de chacune des langues de Bretagne dans la zone d’usage principal de l’autre langue (d’où des emprunts au gallo en breton et en français de Basse Bretagne et des emprunts au breton en gallo et en français de Haute Bretagne). La diffusion du français comme langue dominante entre le XVIe et le XXe siècle, d’abord à l’écrit puis à l’oral, d’abord dans les villes et les classes dominantes puis beaucoup plus tard dans le monde rural et les classes populaires, a transformé l’organisation sociolinguistique de la Bretagne et ceci de façon radicale au cours du XXe siècle.

2. Une commande institutionnelle

3En 2006, le laboratoire PREFICS de l’université Rennes 2 a réalisé, à son initiative et avec le soutien de la région Bretagne ainsi que de l’Observatoire des Pratiques Linguistiques de la Délégation Générale à la Langue Française et aux Langues de France (ministère de la Culture), une première enquête sur les pratiques et les représentations de la langue régionale en Haute Bretagne. Cette enquête pionnière faisait, pour la première fois, et selon une méthode à dominante qualitative adaptée à son sujet, un point sur la situation du gallo. Ses résultats, qui montraient une situation du gallo beaucoup plus complexe et beaucoup moins déliquescente que présupposé par les discours circulants, ont été, depuis, confirmés sur plusieurs points par d’autres enquêtes réalisées selon une méthode différente, quantitative et beaucoup moins détaillée  [3]. Les résultats de cette enquête ont fait l’objet de publications diverses à destination de divers publics  [4], en plus du rapport de recherche remis à la Région. Ils ont ainsi constitué l’un des diagnostics sur lesquels ont été construites des actions de politique linguistique, éducative et culturelle, associative ou institutionnelle, en relation avec le gallo. Cette enquête a également posé des principes méthodologiques spécifiques pour l’évaluation par enquête de la situation d’une variété linguistique en situation de forte minoration, qui, depuis, ont été plusieurs fois repris. On retrouve des choix similaires par exemple dans l’étude FORA (« Francoprovençal et Occitan en Rhône-Alpes »), réalisée en 2009 pour la Région en question par un groupement de laboratoires universitaires de Lyon (Bert et Costa, 2009).

4A partir de 2013, la Région Bretagne a plusieurs fois émis le souhait de commander une nouvelle enquête sur la situation du gallo pour éclairer ses projets de politique linguistique incluant de plus en plus le gallo (jusque là globalement délaissé) aux côtés du breton, langue fortement soutenue pour son caractère emblématique par la Région et de nombreuses autres collectivités territoriales de Bretagne. À partir de 2014, la Région a développé une inclusion explicite et accrue du gallo dans sa politique linguistique désormais trilingue (breton-gallo-français), notamment par un projet d’affichage trilingue dans ses locaux et documents. Une commission terminologique y a travaillé, et le PREFICS y a été associé, notamment pour la réalisation en 2015 d’une enquête de réception de la terminologie élaborée (Marchadour et Blanchet, 2015). Le Conseil Culturel de Bretagne (2015) s’est saisi de l’ensemble de ces informations pour élaborer des préconisations de politique linguistique, dans la cadre de la politique linguistique de la Région  [5].

5Suite à cette enquête, la Région a décidé fin 2015 de confier au PREFICS et de financer la réalisation en 2016 d’une grande enquête sur le modèle de celle de 2006, afin de comparer la situation du gallo dix ans plus tard et d’évaluer ses évolutions, en y ajoutant un volet sur la demande sociale afin d’éclairer la Région sur sa politique linguistique en faveur du gallo. L’enquête a été élaborée et réalisée au cours du printemps 2016, sous la direction de Philippe Blanchet. L’équipe d’enquêteurs et enquêtrices a été pilotée par Clément Ferré, diplômé en sociolinguistique et doctorant au PREFICS. Le dépouillement des enquêtes a été effectué par Alexandrine Mignerot, titulaire d’un master de sociolinguistique, recrutée comme ingénieure d’études pour ce projet par le PREFICS. Les analyses ont été réalisées par A. Mignerot et Ph. Blanchet  [6] .

3. Méthode d’enquête et de restitution

6Les principes méthodologiques, posés dès la première enquête réalisée en 2006 (Blanchet Ph. et Le Coq A., 2006), permettent d’articuler l’analyse des attitudes et des représentations au regard de la demande sociale (nouvel aspect de cette enquête). En effet, l’étude de l’aire gallésante s’envisage à l’aune des processus de minoration (qualitatifs) et de minorisation (quantitatifs) qui la caractérisent (Blanchet Ph., 2005 et 2012). Les différentes pratiques langagières de la Haute Bretagne sont inégalement considérées (Manzano F., 1996 ; Angoujard et Manzano, 2008), c’est pourquoi leur examen implique de prendre en compte la potentielle stigmatisation perçue par les locuteurs les conduisant à sous déclarer, voire taire leurs pratiques. Par conséquent, la trame d’entretien interroge très progressivement les pratiques locales perçues, les discours métalinguistiques et pour finir explore, de façon méthodique, une demande sociale elle-même travaillée par la triglossie bretonne dans laquelle le gallo est doublement minoré par le français et par le breton.

7Un questionnaire semi-directif a été proposé aux participant•e•s sous forme d’entretiens individuels, ou en petits groupes et/ou par écrit, à la préférence des témoins [7]. Des tranches d’âges ont été constituées en fonction de grandes périodes du contexte sociolinguistique : né•e•s avant 1960 (pratiques linguistiques régionales attestées et prédominance du monde rural), né•e•s entre 1960 et 1980 (transition vers davantage d’urbanisation, forte chute de la transmission des parlers locaux et forte réduction de la pratique des langues régionales en Bretagne), né•e•s de 1980 à 2002, (réduction accrue de la pratique des langues régionales, forte prédominance du monde urbain et début de reconnaissance relative de ces langues), et né•e•s après 2002 (témoins mineurs, développement de la politique linguistique régionale en Bretagne, relégitimation du breton, progression vers une meilleure reconnaissance des langues régionales et minoritaires en Bretagne et en Europe, légitimation du « patrimoine immatériel », brouillage des clivages rural / urbain).

8Les questionnaires ont été diffusés de façon aléatoire par l’équipe de recherche, par les principales associations qui travaillent à la promotion sociale et culturelle du gallo, ainsi qu’en en ciblant particulièrement un public venu assister à la « Fête de la Gallésie » en juin 2016 à Monterfil (public ayant un intérêt potentiel pour le gallo) et un lycée agricole du nord de Loire-Atlantique (public de jeunes ruraux). Au final, 149 questionnaires ont été retenus selon le principe de saturation de l’information, soit sensiblement le même nombre qu’en 2006 (138 témoins). L’ensemble des classes d’âges et des milieux sociaux y est représenté.

9Les résultats de l’enquête ont été présentés oralement dans deux vastes réunions au Conseil régional de Bretagne réunissant des élu•e•s, des responsables administratifs et des représentant•e•s du monde associatif. Ils ont également été remis sous la forme d’un long rapport écrit. Dans les trois cas, nous avons utilisé de nombreux graphes quantitatifs commentés. Il y a en effet une attente forte d’informations sous une forme quantitative de la part de l’institution et du grand public. Il n’en demeure pas moins que, pour nous, l’essentiel de l’information est qualitative. C’est d’ailleurs le choix que nous avons fait ici, en réduisant le quantitatif, qui souvent peu significatif, et en développant le qualitatif qui l’est beaucoup plus.

4. Comment enquêter sur la « demande sociale » en contexte d’hégémonie sociolinguistique ?

10Un aspect spécifique de cette nouvelle enquête mérite d’être présenté de façon plus détaillée : la question de la demande sociale. Nous avons élaboré pour la traiter deux points de méthode adaptés au contexte sociolinguistique tel que nous le connaissons. L’un a consisté à viser, parmi l’ensemble des témoins, des témoins déjà sensibilisés à la question du gallo et des expressions culturelles gallésantes ou apparentées en Haute Bretagne, afin de prendre en compte une partie de la population qui a potentiellement des demandes spécifiques à propos du gallo. Il s’agit de mettre en relief les demandes légitimes d’une minorité à la fois minorée (qualitativement) et minorisée (quantitativement) que le jeu habituel d’une sorte de « démocratie » réduite, exclusivement quantitative, prive mécaniquement de l’expression de ses droits linguistiques et culturels.

11Pour cela nous avons diffusé le questionnaire au sein des principales associations qui travaillent à la promotion sociale et culturelle du gallo. Nous avons également distribué des questionnaires aux personnes, pour la plupart non militantes et souvent plus intéressées par la musique et la danse que par la langue, venues assister à la fête de la Gallésie en juin 2016 à Monterfil. L’autre élément de méthode a consisté à faire précéder les questions portant sur la demande sociale par un texte bref affirmant un point de vue original sur les droits linguistiques, afin de fissurer l’hégémonie de l’idéologie linguistique monolingue vouée à la survalorisation du français et de rendre possible l’expression de demandes alternatives. Il s’agissait effectivement que les témoins puissent éventuellement exprimer des avis divergents ou contraires par rapport au discours hégémonique qui, parce qu’il est hégémonique, exclut a priori toute alternative et se trouve massivement repris par les dominés eux-mêmes à qui les instances dominantes (l’école, les médias, les politiques, les détenteurs du pouvoir) ont inculqué l’acceptation de cette domination. Sous le schéma « il y a des gens qui disent que… » ont ainsi été présentées aux témoins deux déclarations, l’une de l’UNESCO (issue de la Déclaration universelle sur la diversité culturelle), l’autre de discours ordinaires ou militants affirmant un statut sociolinguistique valorisant du gallo (voir protocole d’enquête en annexe).

5. Nommer la langue : « Gallo » et « Patois »

12Afin d’éviter, tant que possible, les sous déclarations provenant des hésitations entre les termes gallo et patois dans les désignations du parler local par les témoins, les questions n’induisent pas une dénomination et sont volontairement ouvertes : on y recueille la dénomination utilisée par le témoin et on la reprend tout au long de l’enquête individuelle [8] . À l’instar de l’enquête de 2006, c’est le terme patois qui est le plus répandu avec 75 occurrences récoltées (soit 50 % des répondants) dont 4 seulement précisent les patois ou des patois (52,8 % en 2006). Ce sont les femmes citadines de + 56 ans qui utilisent le plus le terme patois, voire l’opposent au terme gallo (qui, pour elles, désignerait autre chose de façon floue) ou ne l’évoquent pas, tandis que dans ce groupe d’âge, les hommes citadins et ruraux utilisent sensiblement les deux termes dans les mêmes proportions et pour désigner la même chose. La dénomination gallo apparait davantage mobilisée que durant l’enquête de 2006 mais reste moins utilisée que le terme patois. Dans 60 % des réponses, les deux termes sont cités indépendamment et la moitié du temps ils sont distingués.

13 – « le patois et le gallo se sont deux choses tellement différentes » (témoin F, 62 ans),
– « le patois […] appelé aujourd’hui gallo » (témoin H, 56 ans).

14Le terme patois est davantage utilisé dans le Morbihan, la Loire-Atlantique et l’Ille-et-Vilaine où il est parfois explicitement valorisé, par exemple à Fougère (à l’est de la Haute Bretagne). Contrairement aux jeunes témoins de 2006, les enquêtés les plus jeunes ne vivent pas tous en Haute Bretagne et n’ont pas de cours de gallo sur leur lieu de formation en Loire-Atlantique. Ils déclarent être en contact avec une pratique qu’ils nomment patois dans le cadre de leur établissement de formation agricole (le terme gallo n’est pas ou que très rarement utilisé en Loire-Atlantique).

15Les témoins qui distinguent les termes gallo et patois opposent plusieurs caractéristiques qui seraient propres à chacun : le gallo serait une langue tandis que le patois serait un dialecte, le patois ne se lirait ni ne s’écrirait tandis que le gallo pourrait s’écrire et se lire, le gallo serait le patois des villes, le patois ne se parlerait que dans l’entre-soi, etc.

16Les deux dénominations ne sont pas investies de la même valeur affective ou linguistique. Le terme gallo est très peu souvent connoté affectivement, patois semble l’être davantage. En revanche, patois n’est jamais accompagné du terme « langue » tandis que les termes gallo, breton et français le sont. Et lorsqu’un statut linguistique est refusé au breton, il l’est aussi au gallo « non ils parlent bien français, non, pas de breton ici ni de gallo » (témoin H, 71 ans). Comme dans l’enquête de 2006, seuls les témoins qui déclarent des compétences actives ou passives en gallo attribuent à ce dernier le statut de langue. Par ailleurs, les témoins et les informatrices qui utilisent préférentiellement la dénomination gallo, citent le cadre associatif comme contexte d’acquisition de la langue de Haute-Bretagne, qui est un contexte de transformation méliorative des représentations.

17Le contexte le plus favorable à l’utilisation du terme patois est clairement situé en milieu rural. Néanmoins le terme gallo n’y est pas systématiquement absent ou rejeté. Les témoins qui vivent dans une zone rurale mais dont l’activité professionnelle se déroule dans une zone urbaine ou suburbaine utilisent presque autant le terme gallo que le terme patois. Le « parler local » reste en majorité associé au monde rural mais la distinction rural / urbain a beaucoup perdu de sa pertinence, puisque les liens quasi permanents avec les deux espaces sont très fréquents pour une grande majorité de nos témoins.

6. Langue de la convivialité, du monde rural et des « anciens »

18Le protocole d’enquête suit une progression qui n’interroge pas frontalement la personne sur ses propres pratiques linguistiques pour contourner les effets de la honte potentielle d’admettre utiliser une variété linguistique fortement péjorée et péjorante : on interroge ainsi d’abord sur l’environnement sociolinguistique du témoin.

1998 témoins répartis de façon égale dans l’ensemble des groupes d’âge, soit 65 %, déclarent entendre parler gallo près de chez eux, dans leur famille ou sur le lieu de travail/formation. Le gallo reste donc relativement bien présent dans l’environnement sociolinguistique de nos témoins. Il est lié au monde agricole pour 60 % d’entre eux. 15 % des témoins rencontrent aussi le gallo dans le monde associatif et éducatif. Les « conteurs » (cités par 25 % des témoins) sont mentionnés comme intermédiaires entre monde rural et monde associatif-éducatif. Ce sont toujours les « anciens » qui sont les plus cités comme locuteurs de gallo (75 %). Mais les jeunes sont également mentionnés, notamment par des témoins qui travaillent en zones rurales et qui sont probablement davantage en contact avec des pratiques langagières que d’autres ne soupçonnent pas. On note que l’appellation patois, refusée et très peu usitée par les militants, est majoritaire de loin dans les propos tenus sur cette question, ce qui tend à montrer que ce n’est pas un discours à dominante militante qui affirme que le gallo est parlé dans l’environnement des témoins.

20La majorité des personnes interrogées note que la pratique du gallo relève de connivences et de proximités dans les relations humaines (famille, amis, voisins). Chez les plus jeunes notamment, qui n’apprennent pas le gallo dans leur lycée de formation, le gallo ne se parle qu’entre camarades, essentiellement pour rire et plaisanter. Pour les témoins et informatrices du groupe des -34 ans, le gallo s’entend autour d’une histoire racontée par leurs grands-parents ou d’une chanson mais très peu avec leurs parents. La majorité des témoins ne déclarent pas de différences dans l’utilisation du gallo entre les hommes et les femmes. Ceux qui déclarent une différence disent que les hommes utilisent plus souvent le gallo que les femmes.

21Lorsque les témoins déclarent avoir des compétences de compréhension ou de production ainsi que pour leurs parents et leurs grands-parents, entendre l’idiome local est particulièrement un plaisir « on se sent mieux d’entendre parler sa langue pour moi toujours » (témoin, 78 ans, Acigné). Ils/elles expriment une appartenance familiale, culturelle et territoriale. En revanche c’est un sentiment de gêne, de frustration ou d’ostracisme qui est évoqué par les personnes qui ne déclarent aucune pratique active ou passive.

7. Affects et emblèmes

22Entendre parler gallo est particulièrement un plaisir pour les témoins qui déclarent leurs compétences passives et actives et celles de leurs parents et de leurs grands-parents :

23

« on se sent mieux d’entendre parler sa langue pour moi toujours » (témoin F, 78 ans, Acigné)

24Autant de témoins du groupe a (-18 ans) disent ressentir du plaisir que de la gêne. Moins de témoins qui se réfèrent au terme gallo disent ressentir de la gêne ou un sentiment d’exclusion lorsqu’ils entendent parler gallo que ceux qui se réfèrent à la dénomination patois. Presque deux fois plus d’hommes que de femmes disent ressentir du plaisir à l’écoute du gallo, l’une d’elles, qui vit en territoire rural, se dit « émue ». Le sentiment d’une appartenance culturelle ou territoriale est évoqué par la même proportion d’hommes et de femmes. Ce sont les témoins les plus âgés qui sont les plus nombreux à dire aimer entendre le gallo. Dans ce groupe, les témoins qui ne déclarent aucune pratique active ou passive ressentent tous une gêne ou un sentiment gênant d’incompréhension excepté une informatrice qui dit être « attentive » à l’écoute du parler. C’est dans le groupe b (19-36 ans) que les sentiments négatifs sont les plus explicités, uniquement par les témoins qui disent ne pas comprendre la langue, en évoquant le sentiment d’un manque culturel lié à leur méconnaissance de la langue, un sentiment d’exclusion, de frustration ou bien encore d’étrangeté.

8. Le GALLO à l’école ?

25La majorité des participant-e-s (71 %) déclare savoir que le gallo est étudié à l’école et 23 % pensent qu’il ne l’est pas assez. Les plus âgés l’ignorent le plus souvent. Ce sont les témoins du groupe b (19-36 ans) qui résident dans les zones urbaines qui disent le plus souvent que le gallo est parlé à l’école. Aucun des témoins qui ont transmis des compétences actives en parler local à au moins un de leurs enfants ne déclare que ses enfants ont étudié le gallo à l’école. Pour les témoins qui distinguent le gallo du patois, l’un serait étudié (le gallo) mais pas l’autre (le patois). Pour deux témoins, le gallo serait étudié dans des « écoles spécialisées » uniquement et l’un d’eux cite les « Écoles Diwan » (écoles associatives immersives en breton). Les occurrences « secondaire » ou « collège » sont accompagnées du terme « option » dans trois quarts des cas environ. La perception de la place du gallo dans l’éducation, très faible, reste floue.

9. Le Gallo à la radio ?

26Ce sont les plus anciens et les adultes d’âge mûr qui écoutent le plus les programmes en gallo à la radio. Ce sont davantage les témoins qui vivent en zones urbaines et suburbaines qui évoquent les quelques radios ou programmes en gallo : ils citent le plus souvent « Plum’FM » et « Radio France Armorique », des « chaînes spécialisées », « Internet » et surtout les humoristes comme « Roger le Contou et Fred le Disou » qui ont tenu très longtemps une chronique en gallo sur France Bleu Armorique (aujourd’hui reprise par Thiophile et la Boudette [9]).

10. Les pratiques déclarées, variables et en diminution constante

27Les témoins qui déclarent des compétences déclarent davantage de compétences de compréhension (56 %) que de compétences d’expression (44 %), de même pour les compétences de leurs parents et de leurs grands-parents. 80 % des personnes qui déclarent une pratique du gallo citent le contexte familial comme contexte principal d’acquisition du parler local et 40 % citent la sociabilité proche (amis, voisins) comme contexte secondaire. En famille, la transmission se fait plus souvent avec les grands-parents qu’avec les parents pour l’ensemble des groupes d’âge enquêtés. Pour l’ensemble des catégories socio professionnelles, on observe une chute des pratiques déclarées des parents des témoins. Ce sont les étudiants et les lycéens qui évoquent le moins les pratiques de leurs parents par rapport à celles de leurs grands-parents (et les leurs !). Les 37-55 ans déclarent d’ailleurs avoir très peu transmis le parler local à leurs enfants même lorsqu’ils/elles déclarent des compétences actives en gallo. La moitié des témoins les plus âgés déclarent que les locuteurs les plus vieux ont appris la variété locale dans leur famille mais que les plus jeunes l’ont appris à l’école, cependant les plus jeunes ne citent que peu ou pas l’école comme contexte d’apprentissage du gallo.

28Les pratiques déclarées par les témoins et les informatrices sont très majoritairement orales. En ce qui concerne l’expression, le spectre se déploie de « jamais » à « tous les jours » et de « quelques mots » ou « quelques expressions » à « couramment ». L’ensemble des témoins dont au moins un des grands-parents et un des parents parle ou parlait gallo déclare des compétences d’expression et de compréhension en gallo, seulement deux informatrices dont les parents et grands-parents parlaient gallo disent connaitre et comprendre quelques mots sans jamais les utiliser (informatrice, 34 ans, Saint-Brieuc) ou « ne plus le parler » (informatrice, 50 ans, Bain-de-Bretagne). On constate une chute importante de la pratique « dans la vie de tous les jours », « ils parlaient plus gallo que français », « tout le temps » (2 témoins, 2 parents, 8 grands-parents) au profit de pratiques plus ponctuelles : « plaisanter », « expressions », « quelques mots », dont on trouve une majorité d’occurrences, 20 pour les témoins, 19 pour les parents, 13 pour les grands-parents.

29

« C’est leur langue maternelle » (témoin H, 67 ans, Rennes) ; « ma grand-mère paternelle, un peu mon père (quand il acceptait…) » (témoin H, 60 ans, Messac, 35) ; « Ils [parents] ne parlent pas, […] mal vu donc ils évitent » (témoin F, 48 ans, Rennes) ; « Ils [grands-parents] essayaient de pas le faire [parler gallo] » (témoin F, 30 ans, Gévezé, 35) ; « ils parlent entre eux […] c’était interdit » (témoin H, 56 ans, Lusanger, 44).

30 Il apparait ainsi que le discours largement dominant affirme une chute massive mais qu’il n’y a pas un arrêt total de la transmission de compétences en gallo aux jeunes, y compris en termes de compétences de réception. En effet, une forme ponctuelle et spontanée de maintien des pratiques est bien présente, et de façon inattendue chez les jeunes, sur leur lieu de formation en Loire-Atlantique, essentiellement « pour rire et plaisanter ».

31On met ainsi le doigt sur des contradictions intéressantes entre les déclarations des un•e•s et des autres :

  • – Alors que les témoins ont majoritairement déclaré constater une absence ou quasi absence des pratiques langagières de variétés locales chez les jeunes (aucun témoin du groupe des plus de 57 ans, par exemple, ne cite « jeunes » comme locuteurs possibles), les résultats montrent une forme de maintien des pratiques chez les jeunes.
  • – Alors que ce sont surtout les grands-parents des témoins qui sont déclarés utilisateurs de la langue locale, ce sont les 37-56 ans qui déclarent le plus eux-mêmes et elles-mêmes parler gallo quotidiennement même s’ils/elles déclarent des compétences actives peu variées.

32Le chant est l’occasion la plus souvent citée d’entendre le parler local juste avant les contes (pratiques perçues comme à la fois familiales et événementielles) et les anecdotes, spécifiquement attachées aux pratiques des parents ainsi que les « histoires du passé » quant à elles associées aux pratiques des grands-parents.

33Une minorité des témoins (30 % de ceux qui déclarent une compétence active en gallo, soit 20 % du total des témoins, beaucoup plus que dans la population en général [10]) déclarent lire et/ou écrire en gallo. L’écriture est essentiellement utilisée afin de rédiger des courriers électroniques (qui s’apparent à des formes d’oralité) ou afin d’élaborer des supports militants, associatifs ou culturels. Les ouvriers et les employés déclarent très peu écrire le gallo. Ce sont les professions intellectuelles où l’on trouve le plus de scripteurs (surtout des enseignant•e•s) et les professions intermédiaires parmi lesquelles on trouve le plus de lecteurs et de lectrices. Il s’agit bien sûr de tendances analogues à ce qu’on trouve à propos du français, renforcées ici par la rareté de l’écriture du gallo. C’est le groupe d (+ de 57 ans) qui comporte le plus grand nombre de lecteurs et de scripteurs. Ceci est à mettre en relation avec la part des militant-e-s de la vie associative (souvent des retraité•e•s) dans cette classe d’âge et donc parmi ceux et celles qui lisent et qui écrivent en gallo. Les habitudes de lecture du type de supports publics où l’on trouve du gallo écrit (presse locale, plutôt fréquentée par les classes d’âge adulte et vieillissantes) renforcent probablement cette tendance.

11. Transformation perçue des pratiques

34L’exode rural, l’urbanisation, les carences de la transmission familiale, le vieillissement de la population (donc du vivier principal des locuteurs et locutrices), l’école par sa politique glottophobe et la concurrence d’autres langues économiquement ou culturellement plus valorisées (français, anglais, breton) sont les raisons pour lesquelles plus de la moitié des témoins et des informatrices pensent que le gallo est parlé « moins qu’avant ». Cette diminution perçue des pratiques est accompagnée d’un sentiment de perte culturelle et patrimoniale dommageable dont la préservation est nécessaire voire urgente. Un très petit nombre seulement pense que la disparition du gallo est « utile » ou « une bonne chose ».

35Les témoins qui distinguent les termes patois et gallo déclarent que le patois (qu’ils/elles perçoivent comme rural et/ou populaire) est moins parlé qu’avant tandis que le gallo (qui serait parlé et enseigné en ville) l’est davantage qu’avant.

36Pour 77 % des participants à l’enquête qui ont déclaré des compétences actives en gallo, connaître l’idiome régional aide à apprendre d’autres langues. Le gallo est ici perçu comme permettant des enrichissements plurilingues.

12. Contacts de langues et français local

37Un des éléments importants de la problématique d’identification et d’individuation du gallo est, depuis la francisation de la Bretagne, la présence d’un continuum allant, pour reprendre la terminologie créoliste tout à fait adaptée ici, d’un gallo basilectal à un français acrolectal à peine marqué régionalement (chez les jeunes urbains surtout), en passant des formes mixtes (mésolectales) sur tous les plans (phonétique, lexical, morphologique, syntaxique…). Certaines de ces formes sont suffisamment stables et répandues chez les non gallésant•e•s pour être envisagées comme constituant un français régional (Blanchet et Walter, 1999). C’est un phénomène bien attesté et qui a déjà été étudié en domaine d’oïl (une référence est le travail de M. Auzanneau (1995) sur le poitevin).

3877 % des témoins déclarent la présence de la variété locale dans le français usuel dans l’ensemble des catégories sociolinguistiques. Un seul témoin (groupe d, 44) relève la présence du gallo dans les conjugaisons en français (qui est pourtant un trait stéréotypique, notamment les passés simples usuels en -i comme i couri, a coupi « il couru, elle coupa). La majorité de ces témoins parle d’un « mélange ». Ils sont autant de témoins à évoquer des pratiques quotidiennes que ponctuelles. Tous les témoins qui priorisent la dénomination gallo à celle de patois déclarent la présence et l’utilisation de mots de gallo dans le français usuel à l’exception d’un. Ce sont tendanciellement les témoins qui priorisent la dénomination patois qui répondent davantage par la négative à la question 2.8. portant sur les contacts de langues.

39Les exemples de ces mélanges, hors contextes, sont difficiles à faire émerger. Ils sont de toute façon peu identifiés par les locuteurs et les locutrices, par exemple :

40

« Je sais pas si c’est du patois / quand je rencontre des gens d’autres régions je me rends compte qu’eux ne l’utilisent pas donc je me demande si c’est du patois / du français régional ou autre dans le sens où c’est toujours en rencontrant des gens d’ailleurs qu’on se rend compte des différences / déjà te donner une définition précise de la langue que je parle… » (informatrice, 23 ans, Saint-Herblain, 44).

41Une autre locutrice n’en donne pas, au motif de « ne pas savoir les orthographier » (témoin F, 30 ans, Rennes).

42Les témoins sont peu nombreux à donner des exemples de prononciations venues du gallo/patois. Quand ils et elles en proposent, c’est presque toujours le son [œ] (voir ci-dessous), des diphtongues (coutiao [kutiaw]

43« couteau »), le r présenté comme « inversé » [11] (Bërtègne = « Bretagne »). Ce Ce sont surtout des exemples lexicaux qui sont donnés. Dans les tableaux suivants nous avons rassemblé les exemples lexicaux cités plus de 3 fois par les témoins (mais on observe que ces exemples comportent également des particularités phonétiques emblématiques). Nous avons conservé les graphies proposées ou utilisées par les témoins.

tableau im2

13. Pratiques linguistiques et identités locales ou régionales

44La langue bretonne reste l’emblème linguistique majeur de la Bretagne. Pour un tiers des témoins, la référence principale de l’identité de la Bretagne est la langue bretonne et la zone déclarée la plus emblématique de la Bretagne est le département du Finistère (le seul entièrement bretonnant). 10 % des témoins pourtant tous et toutes ancré•e•s en Bretagne gallo accorde au seul breton la qualité de marqueur linguistique principal voire unique de la Bretagne  [12] . Le prestige du breton comme « langue », opposé à la dévalorisation du gallo comme « patois », contribue à cette identification. On nous dit par exemple :

45

« la langue bretonne d’une part et les différents patois d’autre part » (témoin F, 37 ans, Loire-Atlantique)

46En revanche, le gallo a désormais une fonction d’identification régionale et plus seulement locale (comme c’était encore le cas dans notre enquête 2006) car il apparait majoritairement attaché à la région par l’ensemble des témoins (mais un peu moins par les plus jeunes). Il n’y est pas rattaché seul : lorsque les témoins citent le gallo comme marqueur linguistique de la Bretagne, ils et elles y ajoutent toujours « et le breton » (une seule exception dans notre corpus).

47Les témoins incluent la situation sociolinguistique de la Haute-Bretagne dans celle de la Bretagne en général et la rapprochent souvent d’ensembles linguistiques perçus comme similaires en France ou dans un autre pays celtique (Pays Basque, Corse, Normandie, Provence, Alsace, Nord-Pas de Calais, occitan, langues d’oc, écossais, gaëlique sont cités). Ces rapprochements témoignent d’une perception de la diglossie et de l’inclusion du gallo, non pas du côté du français (dans l’orbite duquel il a été fortement satellisé, présenté comme « du français déformé, du vieux français, du mauvais français » à l’instar de l’ensemble des langues dites d’oïl), mais de langues dites « régionales ou minoritaires » distinctes du français.

14. Quelle demande sociale ?

48L’ajout de cette question par rapport à notre enquête de 2006 répond à une demande explicite et pressante de la Région d’évaluation d’une éventuelle demande sociale provenant d’acteurs familiers du gallo voire engagés dans la promotion du gallo en Haute-Bretagne (environ 50 % des personnes interrogées). Comme nous l’avons dit plus haut, cette question a fait l’objet d’une réflexion et d’une phase exploratoire particulière pour déjouer les effets de l’idéologie linguistique hégémonique.

49 Les personnes enquêtées ont été d’abord invitées à commenter un extrait relatif à la Déclaration universelle de l’Unesco sur la diversité culturelle du 2 novembre 2001 (voir annexe questions 8.0 et suivantes). La grande majorité des personnes donne des réponses favorables au contenu du texte, en termes de principes. En l’occurrence, il s’agit surtout d’un principe de sauvegarde du gallo et d’un encouragement à la diversité linguistique incluant le gallo. Néanmoins, le texte est également critiqué par certains témoins pour son absence d’opérabilité et sa nature non contraignante. Ces témoins sont deux fois plus nombreux à désigner le parler local par le terme gallo que par le terme patois. Ce document de l’UNESCO suscite ainsi autant de réactions soulignant son importance de principe que sa non-application effective.

50Seulement cinq témoins (sur 149) se positionnent négativement ou partiellement défavorablement face aux principes évoqués dans la déclaration de l’UNESCO. Il est intéressant de voir quels sont leurs arguments, rares ici mais finalement très répandus en France. Il y en a 3 du groupe d (+ 56 ans), un du groupe c (37-55 ans) et une informatrice du groupe b (19-36 ans). Les deux premiers témoins et la plus jeune vivent dans le département d’Ille-et-Vilaine, les deux suivants dans la Loire-Atlantique. Concernant le groupe d, le témoin le plus opposé, originaire du Finistère, déclare ne pas entendre d’autres variétés que le français qui est « la langue maternelle en France ». Les deux autres témoins de ce groupe sont enseignant•e•s, l’une est opposée au texte et l’autre partiellement. Pour la première, c’est l’apprentissage du plurilinguisme qui est perçu comme un problème et pas la défense de la langue locale. Elle explique que la « langue de la maison » n’a pas velléité à être enseignée car elle s’oppose à la langue « de l’extérieur, publique ». Pour le dernier témoin de ce groupe, toutes les variétés ne peuvent bénéficier de la même protection. Pour lui, qui témoignait auparavant d’interdictions pluri générationnelles de parler une autre langue que le français, le gallo a disparu (même s’il déclare l’entendre à la radio), par conséquent les efforts doivent être investis au profit du breton uniquement. Le témoin du groupe c (37-55 ans) déclare être favorable à la diversité des langues mais s’inquiète d’un déficit : « il faut déjà maitriser la nôtre » (il veut dire « le français »), vision monolingue en accord avec ses réponses précédentes (il déclare en effet que le gallo ne serait « pas du tout utilisé en Bretagne »). La plus jeune informatrice n’avait apparemment pas connaissance du gallo avant l’enquête. Elle est originaire du Gard comme un de ses parents et y a vécu au moins durant son enfance, elle témoigne de cours d’occitan à l’école primaire. Son discours suggère qu’elle considère la variété locale comme une langue morte, elle déclare être favorable au contenu du texte s’il concerne l’apprentissage des « langues vivantes comme l’anglais, l’espagnol ». Par ailleurs, pour elle c’est le breton qui est la langue de la Bretagne.

51On a ensuite soumis aux témoins une autre question, précédée par cet énoncé d’une position alternative aux représentations les plus courantes : « il y a des gens qui disent que le patois (qu’on appelle aussi gallo) est une langue comme les autres. Si on admet que c’est une vraie langue, par exemple comme le breton, qu’est-ce que vous identifieriez comme action allant dans le sens de la Déclaration de l’Unesco vis-à-vis du breton et du gallo (8.1) ?

52 D’après les réponses à cette question, une demande sociale de soutien au gallo en complémentarité adaptée avec le breton apparait clairement et s’articule autour de trois points clés :

  • – Une reconnaissance d’un statut de langue pour affirmer la dignité linguistique,
  • – Un accroissement de la visibilité dans l’espace public par l’affichage, les médias et le soutien éditorial,
  • – Une relance de la transmission par l’école et hors de l’école.

53La transmission occupe à elle seule la moitié des réponses des témoins. C’est le seul principe d’action déclaré par le groupe a (-18 ans). Les témoins proposent d’intégrer le gallo à l’école sous forme d’initiations grâce aux chansons, aux textes et aux histoires aussi bien sur le gallo qu’en gallo. Ce principe d’action regroupe également la formation des enseignants, la mise en place d’options au collège et au lycée, notamment au baccalauréat, voire pour certains témoins une formation pour tous les niveaux à la faculté et même la création d’écoles bilingues gallo-français sur le modèle des écoles bilingues de langue bretonne.

54Quant à la diffusion publique du gallo, les témoins signalent un manque de visibilité dans l’espace public et dans les médias. Ils suggèrent de promouvoir la diversité linguistique bretonne par l’investissement dans l’affichage public, la communication publique et la signalétique, par exemple en nommant des lieux en gallo en Haute-Bretagne (nouveaux ou existants), à l’instar de ce qui est fait en breton (surtout mais pas uniquement en Basse Bretagne). Ils et elles suggèrent aussi la création d’un média public en gallo et le soutien de programmes audiovisuels et d’édition de supports pédagogiques et informatifs en breton pour la Basse-Bretagne et en gallo pour la Haute-Bretagne. Enfin, les témoins évoquent une meilleure promotion d’évènements culturels notamment en gallo et davantage de soutiens financiers aux associations.

55On observe très peu de variations dans l’énonciation des trois critères d’action, ce qui indique qu’ils sont globalement partagés et répartis également suivant la génération sociolinguistique des témoins, excepté pour les plus jeunes (qui ciblent surtout la transmission), mais aussi selon l’habitat rural ou urbain et le département de résidence. Mais les témoins qui utilisent le terme patois afin de désigner le parler local convoquent deux fois plus souvent le critère de transmission que ceux qui utilise le terme gallo, ce qui confirme une différence partielle de positionnement sociolinguistique qu’on retrouve tout au long de l’enquête.

56Comme on le voit, nombre de témoins proposent une action commune au breton et au gallo. Près des trois quarts des témoins qui privilégient une action spécifique pour le gallo précisent malgré tout que les deux langues ne doivent pas être opposées, doivent être défendues ensemble et qu’il ne s’agit pas de reproduire les politiques linguistiques qui ont conduit à la minoration d’une ou plusieurs langues par le passé. Ils et elles déclarent que le gallo a tout intérêt à ce que le breton se maintienne en bonne situation de valorisation et que les politiques linguistiques doivent être inclusives. Pour une informatrice (29 ans), qui privilégie par ailleurs le vecteur culturel autour des loisirs (des chants et des danses), grâce aux différences notamment linguistiques, le gallo possède le même potentiel commercial que le breton sans être concurrent. Pour ces témoins qui associent le gallo et le breton dans une valorisation associée, le pôle principal d’investissement des efforts est l’enseignement, notamment via l’initiation à l’école, puis vient la création ou le développement d’activités culturelles ou d’évènements existants et enfin un affichage public trilingue français/gallo/breton dans toute la région Bretagne.

57Les témoins qui proposent une action spécifique pour le breton et une autre, spécifique, pour le gallo, donnent des informations plus hétérogènes mais insistent en majorité sur la nécessité de travailler l’image du gallo prioritairement et sur l’inégale répartition des financements alloués au gallo et au breton. Le décalage dans les représentations des deux langues est également perçu comme justifiant des axes d’actions spécifiques au gallo. Par exemple, selon ces témoins, le gallo est en général considéré de façon stigmatisante comme du « français déformé », alors que le breton ne l’est pas. Pour les 75 % de témoins ayant déclaré observer une différence significative de traitement entre le gallo et le breton par les institutions, le breton est davantage considéré, médiatisé, valorisé tandis que le gallo est stigmatisé, déconsidéré, pas reconnu et bénéficie de moins de moyens matériels et humains. Pour ces témoins, l’essor du breton, devenu emblématique de la région Bretagne, a certes contribué à encourager les Bretons et Bretonnes dont la langue régionale est le gallo à revaloriser leur langue, mais il a aussi produit des mécanismes de distinction parfois perçus comme menaçants ou exclusifs, renforçant la triglossie régionale bretonne.

58Ainsi, les témoins sont partagé•e•s entre des actions spécifiques en faveur du gallo avec pour objectif de combler les différences et de bénéficier de manière équitable de la revalorisation des deux langues régionales de Bretagne, et des actions communes aux deux langues qui partagent une même fragilité face au français.


ANNEXE : PROTOCOLE D’ENQUÊTE

59Enquête sur la langue régionale en Bretagne gallo, réalisée par le laboratoire PREFics de Rennes 2 pour le Conseil Régional de Bretagne

60 Sexe :
Age :
Lieu de naissance :
Commune où vous résidez :
Profession (Si retraité-e, précisez de quelle profession) :
A quel âge avez-vous commencé à travailler ? :
Lieu de naissance des parents ? :
Profession des parents ? :
Avez-vous vécu ou séjourné ailleurs ? :
Si oui, où ? :
Commune où vous travaillez :

61Profession :

62Enquête :
1.0. Qu’est-ce qu’on parle par ici ?
1.1. Est-ce qu’il y a différents parlers locaux ?
Comment les appelle-t-on ?
2.0. Dans quel(s) autre(s) secteur(s) / coin(s) est-ce qu’on l’ (les) utilise ?
3.0. Entendez-vous parler gallo/patois près de chez vous ?
3.1. Dans quelles circonstances l’emploie-t-on autour de vous ?
3.2. Qui le parle ?
3.3. Entendez-vous parler gallo/patois à la radio ?
3.4. Vos parents s’expriment-ils en gallo/patois ?
3.5. Le comprennent-ils ?
3.6. Dans quelles circonstances l’emploient-ils ou l’employaient-ils ?
3.7. Vos grands-parents s’expriment-ils ou s’exprimaient-ils en gallo/patois ?
3.8. Le comprennent-ils ?
3.10. Est-ce que vous-mêmes vous comprenez / parlez le gallo/patois ?
3. 12. Vos enfants le comprennent-ils ?

63Le parlent-ils ?
3.13. Est-ce qu’il vous arrive de lire des textes écrits en gallo/patois ?
3.14. Est-ce qu’il vous arrive d’écrire en gallo/patois ?

644.0. Autour de vous le gallo/patois est-il utilisé comme avant, plus ou moins ?
4.1. A votre avis pourquoi ?
4.2. Qu’en pensez-vous ?
4.3. Que pensez-vous de ce qui est fait pour défendre le gallo/patois ?
4.4. Observez-vous une différence dans son utilisation entre les hommes et les femmes ?
4.6. Vous-même, quand vous parlez gallo/patois, que ressentez-vous ?
4.7. Est-ce que les gens qui parlent gallo/patois connaissent souvent d’autres langues ?

65Lesquelles ?
4.8. Selon vous, est-ce que le fait de connaitre, comprendre ou parler le gallo/patois peut aider à apprendre d’autres langues ?
5.0 Selon vous, ceux qui parlent gallo/patois l’ont-ils appris avec leurs parents, leurs grands-parents, d’autres personnes ?
5.1. Et vous-même, l’avez-vous appris avec vos parents, vos grandsparents,
d’autres personnes ?
5.2. Savez-vous si le gallo/patois est étudié à l’école ?
6.0. Est-ce que les gens d’ici utilisent parfois des mots gallo/patois dans leur français usuel ?

66Exemples ?
6.1. Et des prononciations venues du gallo/patois ? Exemples ?

677.0. A quoi reconnait-on un Breton quand il parle ?
7.1. Est-ce que la Bretagne est représentée par des langues, dialectes,
patois particuliers ?

68Lesquels ?
7.2. Est-ce que le gallo/patois est associé à la Bretagne ?
7.3. Est-ce qu’il y a des façons de parler qui ressemblent à celui d’ici ?

69Lesquels ?
7.4. Est-ce qu’il y a en France d’autres régions où on rencontre une situation comme ici ?

70Exemples ?

718.0. Qu’en pensez-vous ? (du texte ci-dessous)
Les États membres s’engagent à prendre les mesures appropriées pour diffuser largement la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle et pour encourager son application effective, en coopérant notamment à la réalisation des objectifs suivants

72– Sauvegarder le patrimoine linguistique de l’humanité et soutenir l’expression, la création, et la diffusion dans le plus grand nombre possible de langues ;

73– Encourager la diversité linguistique – dans le respect de la langue maternelle – à tous les niveaux de l’éducation, partout où c’est possible, et stimuler l’apprentissage du plurilinguisme dès le plus jeune âge

748.1. Il y a des gens qui disent que le patois (qu’on appelle aussi gallo) est une langue comme les autres. Si on admet que c’est une vraie langue, par exemple comme le breton qu’est ce que vous identifieriez comme action allant dans le sens de la Déclaration de l’Unesco vis-à-vis du breton et du gallo ?
8.3. Percevez-vous une différence de traitement dans le gallo et le breton en Bretagne ?
8.4. Qu’en pensez-vous ?
8.5. Quelles actions communes ou spécifiques à chacune d’elles mettriezvous en place pour valoriser
9. Avez-vous quelque chose à préciser ?

Bibliographie

  • ANGOUJARD, J.-P. et MANZANO, F. (Dir.), 2008, Autour du gallo : état des lieux, analyses et perspectives, Cahiers de Sociolinguistique n° 12, Rennes, Presses Universitaires de Rennes. En ligne sur http://www.cairn.info/revue-cahiers-de-sociolinguistique-2007-1.htm
  • AUZANNEAU, M., 1995, « Français, patois, mélange… ou variétés de discours en Poitou », dans Langage et Société n° 71, p. 35-64, BERT, M. et COSTA, J., 2009, Francoprovençal et Occitan en Rhône-Alpes, rapport de recherche disponible sur http://icar.univ-lyon2.fr/projets/ledra/documents/Etude_FORA_rapport_définitif.pdf
  • BLANCHET, Ph. et WALTER, H., (1999), Dictionnaire du français régional de Haute-Bretagne, Paris, Bonneton.
  • BLANCHET, Ph., 2005, « Minorations, minorisations, minorités : Essai de théorisation d’un processus complexe », dans HUCK et BLANCHET (Dir.), Minorations, minorisations, minorités. Etudes exploratoires. Cahiers de Sociolinguistique n°10, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 17-47.
  • BLANCHET, Ph., 2012, Linguistique de terrain, méthode et théorie. Une approche ethno-sociolinguistique de la complexité, édition revue et complétée, Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
  • BLANCHET, Ph., et LE COQ, A., 2006, Pratiques et représentations de la langue et de la culture régionale en Haute Bretagne, rapport de recherche réalisée sous convention avec le Ministère de la Culture (Observatoire des Pratiques Linguistiques de la DGLFLF), le Conseil régional de Bretagne et l’Association des enseignants de gallo, CREDILIF Rennes 2 (publié dans Blanchet et Le Coq, 2008).
  • BLANCHET, Ph., et LE COQ, A., 2008, « Où en est le gallo ? résultats d’enquêtes réalisées à l’université de Haute Bretagne, dans ANGOUJARD et MANZANO (Dir.), Autour du gallo : état des lieux, analyses et perspectives, Cahiers de Sociolinguistique n°12, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 11-29, En ligne sur http://www.cairn.info/revue-cahiers-de-sociolinguistique-2007-1-page-11.htm
  • BULOT, T., 2008, « Le gallo, une langue urbaine ? Ou les discours sur l’espace et les langues bretonnes à Rennes », Cahiers de Sociolinguistique n°12, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 51-74. [Conseil Culturel de Bretagne], 2015, Gallo : étude et préconisations, en ligne sur http://www.bretagne.bzh/upload/docs/binary/octet-stream/2015-10/rapport_gallo_octobre2015.pdf
  • DIAZ, A., 2018, « Gallos » et « Bretons » : Représentations de l’autre et mobilisation de la frontière linguistique dans les processus de construction identitaire. Une approche anthropologique de la limite entre Haute et Basse-Bretagne. Thèse de Doctorat de Langue, littérature et culture bretonnes, sous la direction de Ronan LE COADIC et Philippe PESTEIL, université Rennes 2.
  • HUCK, D. et BLANCHET, Ph. (Dir.), 2005, Minorations, minorisations, minorités. Études exploratoires. Cahiers de Sociolinguistique n°10, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, 276p.
  • MANZANO, F., (Dir.), 1996, Langues et parlers de l’Ouest, Rennes, Presses Universitaires de Rennes.
  • MARCHADOUR, M. et BLANCHET, Ph., 2015, Enquête de réception sur la terminologie en gallo pour l’affichage du Conseil Régional de Bretagne, rapport de recherche PREFICS pour la Région Bretagne, 36 p.
  • MIGNEROT, A. et BLANCHET, Ph., 2016, Bretons et Gallo : Enquête sur les pratiques, les représentations et la demande sociale de langue régionale en Bretagne gallo, rapport de recherche PREFICS pour la Région Bretagne, 75 p.
  • TRÉHEL, N. et BLANCHET, Ph., 2003, « Pratiques linguistiques régionales d’élèves du primaire et de collège en zones suburbaines de Bretagne gallo. Premiers résultats d’enquêtes », dans J. Billiez (Dir.), Contacts de langues, modèles, typologies, interventions, Paris, L’Harmattan, p. 61-78.
  • WALTER, H., 1994, L’aventure des langues en Occident, Paris, Laffont.

Notes

  • [1]
    Dans l’Ouest de la France, on désigne traditionnellement l’ouest par la notion de haut et l’est par la notion de bas, en se fondant sur le mouvement apparent du soleil, au point qu’en Bretagne, autrefois, les cartes étaient positionnées avec l’est en haut et l’ouest en bas. Le sud et la droite d’une part, le nord et la gauche d’autre part, étant associés dans diverses dénominations et croyances (Diaz, 2018).
  • [2]
  • [3]
    Enquête 2013 de l’Observatoire sur les stratégies d’information des jeunes Bretons du CRIJ Bretagne (en ligne sur http://www.ij-bretagne.com/img_bzh/enquete2013.pdf) et enquête TMO-Ouest pour Bretagne Culture Diversité de 2014 en ligne sur http://www.bcd.bzh/fr/les-resultats-du-sondage-bcd-en-ligne/.
  • [4]
    Blanchet, Ph. et Le Coq, A., 2008 « Où en est le gallo ? Résultats d’enquêtes réalisées à l’université de Haute Bretagne », dans Autour du gallo : état des lieux, analyses et perspectives, Cahiers de Sociolinguistique n° 12, Rennes, Presses Universitaires de Rennes, p. 11-29 ; Blanchet Ph. et Le Coq, A., 2008, « Où en est aujourd’hui la pratique du gallo ? », revue Bretagnes n° 11, p. 72-75.
  • [5]
  • [6]
    La Région Bretagne a commandé en 2018 une enquête quantitative sur les pratiques du breton et, pour la première fois, du gallo, à un institut de sondage (TMO Ouest). Le PREFICS participe aux comités technique et de pilotage de cette enquête avec le CRBC (Centre de Recherche Bretonne et Celtique des universités Rennes 2 et de Brest).
  • [7]
    Le protocole d’enquête est donné en annexe.
  • [8]
    Dans ce texte, nous avons choisi d’utiliser gallo plutôt que gallo / patois, sauf bien sûr dans les citations des témoins.
  • [9]
  • [10]
    Notre enquête de 2006, confirmée par des enquêtes quantitatives (cf. supra), donnait environ 5 % de locuteurs et locutrices dans la population bretonne, soit 200.000 personnes et 10 fois moins que dans la population ciblée ici.
  • [11]
    Les formulations employées révèlent souvent une comparaison implicite avec le français posé comme référence (ainsi tourjou présenté comme « une inversion » par rapport au français toujour(s), alors que bien sûr on pourrait tout à fait dire les choses en sens inverse ou ne pas comparer)
  • [12]
    Dans les représentations circulantes, fréquemment entendues dans l’ensemble de la Bretagne, les Breton•ne•s de la zone bretonnante sont perçu•e•s comme « les vrai•e•s Breton•ne•s », ceux de la zone gallo comme des « faux/fausses Breton•ne•s » voire, expression plus rare, comme des « sots Bretons » (la forme féminine n’est pas attestée à notre connaissance). On rencontre toutefois des affirmations identitaires fortes en Haute Bretagne, dont la formulation la plus célèbre est celles relative à St. Malo « Malouin, d’abord, Breton ensuite, Français s’il en reste ».
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.9.175

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions