Notes
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[1]
Les agents politique de la ville et développeurs économiques présents à cette rencontre : Nathalie Altmann, Matthieu Arrondeau, Marc Bourdon, Gaëlle Buatois, Véronique Cadet, Édith Gatuing, Raphaël Petiot et Guillaume Try. Étaient également présents, Bernard Pecqueur et Cyril Kretzschmar aux côtés de Sylvain Brun, Fabien Bressan et Claudine Pilton.
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La politique de la ville est désormais mise en oeuvre par les intercommunalités tout comme le développement économique.
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[3]
Cf. « Conjuguer les compétences pour construire le volet développement économique », les cahiers du Développement Social Urbain, n°60, 2014, p. 28.
1Le croisement entre développement économique et politique de la ville n’est pas nouveau mais la réforme de cette dernière en 2014 a remis cette question sur le devant de la scène, réinterrogeant à la fois les dynamiques locales dans les quartiers et les postures des acteurs économiques et du développement social urbain. Pour ces deux corps professionnels, invités à travailler ensemble, comment construire des collaborations efficaces ? Autour de quels objectifs ? Comment cela impacte-t-il leurs pratiques, leurs postures ? Doit-on les définir à l’aune d’un nouveau métier ?
2Au fil des échanges, les chefs de projet politique de la ville et développeurs économiques se sont démarqués assez nettement des spécificités de leurs fonctions qui se redessinent en permanence. En échangeant sur le sens de leur action, ils se sont retrouvés sous l’appellation « développeurs locaux ». Ce pas de côté a permis le temps d’une table ronde d’entrevoir un rapprochement entre deux cultures professionnelles, situées désormais à la même échelle d’intervention [2], et partageant un objectif commun : révéler et résoudre collectivement des problématiques identifiées sur un territoire.
Créer de nouvelles formes de transversalité pour agir dans les quartiers
3Plusieurs grandes collectivités ont imaginé des coopérations nouvelles pour traiter les enjeux économiques dans les quartiers : c’est le cas de la Métropole de Lyon qui a fait le choix de connecter son équipe de développeurs économiques aux quatre grands projets de ville (GPV). Dans cet esprit, la municipalité de Vaulx-en-Velin a récemment créé un poste de chargé de projet économie/ emploi, rattaché à l’équipe GPV et en lien fonctionnel avec la direction économique. Cette transversalité permet d’interpeller et d’agir sur les objectifs du contrat de ville, en cohérence avec la stratégie de développement économique et d’emploi de la commune. La Métro de Grenoble a également porté une fonction de développement économique des quartiers au sein de la direction politique de la ville avant de la rattacher récemment à sa politique de cohésion économique et sociale. À Saint-Étienne Métropole, le chef de projet politique de la ville et la développeuse économique ont été mandatés pour construire conjointement le volet développement économique du contrat de ville [3].
4À côté de ces exemples métropolitains, les sites dotés d’une faible ingénierie n’ont souvent pas d’autre choix que d’agir en transversalité pour des questions de temps et de compétence technique : c’est le cas de l’équipe politique de la ville du Grand Lac (Savoie) qui travaille étroitement avec la direction économique sur l’entrepreneuriat dans les quartiers et sur des opportunités de redynamisation commerciale en lien avec des enseignes privées.
5Enfin, d’autres sites qui découvrent la politique de la ville - les sites entrants - sont paradoxalement plus enclins à agir en transversalité ; et pour cause, les préoccupations locales en matière d’emploi et d’économie préexistaient à l’entrée en géographie prioritaire, avec des dynamiques partenariales instituées.
6Lorsqu’il y a transversalité, les équipes agissent avec efficacité en s’appuyant sur une vision plus globale et une meilleure connaissance des problématiques et acteurs de leur territoire. Les équipes sont donc en capacité de porter ou de soutenir de réels projets de développement local endogène et non plus simplement d’administrer une politique de la ville trop souvent perçue comme réparatrice et dont les effets sont parfois même remis en cause.
Revisiter les postures professionnelles
7Lorsqu’il s’agit des quartiers, les élus ont d’abord comme priorité politique l’emploi et l’insertion des habitants. Sans remettre en cause ces enjeux très prégnants pour ces territoires, le rôle des développeurs locaux consiste également à interpeller leurs élus de référence et en convaincre d’autres pour amplifier l’intervention publique sur d’autres volets économiques tels que l’entrepreneuriat ou le commerce qui participent aussi à la cohésion sociale et territoriale. Les mandats politiques qui croisent plusieurs thèmes et incarnent cette volonté de transversalité sont souvent des leviers forts pour les développeurs locaux.
8Globalement, ces professionnels ont à connecter, mettre en synergie des acteurs et des ressources extérieurs à l’institution, notamment le monde du privé (les entreprises) souvent absent des débats. Cela nécessite d’aller à leur rencontre et d’instaurer des espaces d’échanges pour faire émerger une connaissance partagée des besoins locaux. Les professionnels de la politique de la ville peuvent également faire valoir leur connaissance des acteurs associatifs locaux et des habitants. Directement impliqués dans les politiques publiques (par exemple comme bénéficiaires), ces acteurs peuvent être captés dans des espaces d’expression démocratique tels que les conseils citoyens.
9Souvent perçu comme une « porte d’entrée, un relais, une personne ressource », le développeur local est à la fois dedans et dehors, tout autant légitime à impulser qu’à soutenir des initiatives. Ainsi, les savoir-être semblent tout aussi importants que les savoir-faire : il faut être entrepreneur, et, à l’heure où le mariage public/ privé s’affirme de plus en plus comme une priorité, un peu entremetteur. Sur ce point, les développeurs économiques ont un rôle important à jouer. Il faut ensuite parvenir à passer le cap de l’interconnaissance pour construire de l’interaction. Dans le cadre de l’élaboration du projet de territoire des quartiers du 8e arrondissement de Lyon par exemple, des acteurs associatifs, des représentants d’entreprises et des habitants ont travaillé ensemble sur les atouts et potentiels du quartier grâce à une animation partagée entre la chef de projet politique de la ville, le développeur économique et l’antenne locale de la maison de l’emploi et de la formation.
Le contrat de ville donne le tempo
10En matière de coopération, il est souvent question de temps. Le contrat de ville offre aux professionnels cinq ans pour faire bouger les lignes : amorcer les relations, façonner les interfaces au sein de la collectivité ou avec l’extérieur, proposer et suivre des projets. Le temps est aussi garant de constance et de montée en compétence de l’institution publique. L’évolution de certains chefs de projet politique de la ville vers des postes de direction en est une illustration.
11Pour autant, les situations d’urgence sociale et les agendas politiques obligent à agir vite. Par ailleurs, l’émergence d’une nouvelle génération d’acteurs (publics ou privés) bouscule les logiques d’intervention. Ces phénomènes ne sont pas sans effets sur les pratiques professionnelles, les dynamiques locales et le travail avec les habitants.
12Le quartier peut être vu aussi comme un support d’expérimentation, de mobilisation et d’apprentissage. Le mode projet se généralise et tente de mieux conjuguer temps court et temps long comme en témoignent certaines dynamiques spontanées, itératives voire éphémères qui trouvent place au milieu des grandes mutations urbaines aujourd’hui à l’œuvre.
Notes
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[1]
Les agents politique de la ville et développeurs économiques présents à cette rencontre : Nathalie Altmann, Matthieu Arrondeau, Marc Bourdon, Gaëlle Buatois, Véronique Cadet, Édith Gatuing, Raphaël Petiot et Guillaume Try. Étaient également présents, Bernard Pecqueur et Cyril Kretzschmar aux côtés de Sylvain Brun, Fabien Bressan et Claudine Pilton.
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[2]
La politique de la ville est désormais mise en oeuvre par les intercommunalités tout comme le développement économique.
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[3]
Cf. « Conjuguer les compétences pour construire le volet développement économique », les cahiers du Développement Social Urbain, n°60, 2014, p. 28.