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Article de revue

Le surinvestissement législatif en matière d'infractions sexuelles

Pages 31 à 43

Notes

  • [1]
    J. CARBONNIER, Essai sur les lois, 2ème éd., Répertoire du Notariat Defrénois, 1995, p. 313.
  • [2]
    Dictionnaire Le petit Robert.
  • [3]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011, p. 725.
  • [4]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d’actes incestueux, JO 9 février 2010, p. 2265.
  • [5]
    Conseil constitutionnel, Décision n°2011-163 du 16 septembre 2011, QPC.
  • [6]
    J.-C. PLANQUE, « Infractions incestueuses : Objets Pénaux Non Identifiés et conséquences identifiables », Gaz. Pal. 2012, n°110, p. 13.
  • [7]
    Pour des arrêts imposant le renvoi devant une autre cour d’assises, par exemple : Crim. 12 octobre 2011, n°10-88885 et n°10-82842 ; Crim. 4 janvier 2012, n°11-83575 ; Crim. 15 février 2012, n°11-83393. En revanche, d’autres arrêts prononcent la cassation sans renvoi : Crim. 4 janvier 2012, n° 11-87518 ; Crim. 28 mars 2012, n°12-80389. Il est d’ailleurs difficile de déterminer pour quelles raisons exactes la Cour de cassation ordonne ou non le renvoi. On peut penser que « le renvoi serait donc nécessaire parce que le texte appliqué a pu avoir une influence sur l’appréciation des circonstances de l’infraction », J.-C. PLANQUE, art. préc.
  • [8]
    V. MALABAT, « Infractions sexuelles », Répertoire pénal et de procédure pénale, Dalloz, 2010, n°1.
  • [9]
    Conseil constitutionnel, Décision n °2003-467 DC du 13 mars 2003. « Considérant, en premier lieu, que le racolage public est susceptible d’entraîner des troubles pour l’ordre public, notamment pour la tranquillité, la salubrité et la sécurité publiques ; qu’en privant le proxénétisme de sources de profit, la répression du racolage sur la voie publique fait échec au trafic des êtres humains ; que la création par le législateur d’un délit de racolage public ne se heurte dès lors à aucune règle, ni à aucun principe de valeur constitutionnelle, (Considérant 61) ». M.-H. RENAUT, « L’ordre public et la prostitution ou l’Histoire n’est qu’un perpétuel recommencement », RSC 2003. 293. Selon l’auteur, « la pénalisation du racolage public est destinée (…) à doter les forces de l’ordre d’un outil répressif pour éradiquer les zones de prostitution et retirer de la voie publique, au moyen d’un placement en garde à vue, les personnes qui se livrent à cette activité ».
  • [10]
    Pour un exemple de création d’une nouvelle infraction sexuelle, voir le délit d’incitation à commettre une infraction de nature sexuelle à l’encontre d’un mineur (article 227-28-3 du code pénal), crée par la loi n°2006-399 du 4 avril 2006. On ne recense encore aucune application jurisprudentielle de ce texte.
  • [11]
    Loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs, JO 18 juin 1998, p. 9255.
  • [12]
    Loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, JO du 18 janvier 2002, p. 1008.
  • [13]
    Loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, JO du 5 mars 2002, p.4161.
  • [14]
    Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, JO 19 mars 2003, p. 4761.
  • [15]
    Loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, JO 13 décembre 2005, p. 19152.
  • [16]
    Loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, JO 5 avril 2006, p. 5097.
  • [17]
    Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, JO 7 mars 2007, p. 4297.
  • [18]
    Loi préc.
  • [19]
    Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, JO 10 juillet 2010, p. 12762.
  • [20]
    Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, JO 18 mai 2011, p. 8537.
  • [21]
    Voir infra.
  • [22]
    Ce délit a par la suite été remanié pas moins de huit fois.
  • [23]
    Par exemple, l’article 222-24 du code pénal prévoit 12 circonstances aggravantes pour le viol et les articles 222-25 et 222-26 du code pénal incriminent respectivement le viol ayant entraîné la mort de la victime et le viol précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d’actes de barbarie.
  • [24]
    X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. P. 547. L’auteur souligne le paradoxe d’une politique sécuritaire de l’État en matière d’infractions sexuelles « quand, de façon concomitante, son libéralisme ostensible tolère une hypersexualisation des modes de communication publique et l’organisation industrielle de la pornographie ».
  • [25]
    D. ZAGURY, « “Les nouveaux monstres”, plaidoyer pour un traitement raisonné des agresseurs sexuels », in Violences sexuelles. Le soin sous contrôle judiciaire, sous la dir. d’A. CIAVALDINI, Paris, IN PRESS, 2003.
  • [26]
    X. LAMEYRE, « Les deux corps de la justice pénale. Du corps violé au corps enfermé », Revue Justices 2001. 23. L’auteur souligne que la violence sexuelle est devenue la violence de notre temps, « parce que l’atteinte au vivant ne constitue plus le mal suprême en notre monde sorti de la religion. (…) L’impératif biblique - le « Tu ne tueras pas » du Décalogue (…) - est désormais concurrencé, si ce n’est surpassé, par un nouvel interdit laïc, démocratiquement imposé : le « Touche pas à mon corps » (sans mon consentement) ».
  • [27]
    Les chiffres révélés par l’Annuaire statistique de la justice montrent que le nombre des infractions sexuelles est assez stable depuis une dizaine d’années. Ainsi, on dénombrait 1582 condamnations pour viols en 2002, 1814 condamnations pour viols en 2006 et 1370 condamnations pour viols en 2010. Les chiffres fluctuent d’une année à l’autre mais au sein d’une échelle relative.
  • [28]
    D. MAYER, « Le nouvel éclairage donné au viol par la réforme du 23 décembre 1980 », D. 1981, chron. p. 283.
  • [29]
    Idem.
  • [30]
    Idem : « Une des trois propositions de lois déposées au Sénat (…) était intitulée « proposition en vue de protéger les femmes contre le viol » ».
  • [31]
    GARCON, Code pénal annoté, 2ème éd., par ROUSSELET, PATIN, et ANCEL, 1952-1959, Sirey, n°23, « les violences exercées par le mari sur sa femme légitime, lorsqu’elles tendent aux fins légitimes du mariage, ne peuvent jamais constituer un crime de viol ».
  • [32]
    Crim. 11 juin 1992, Bull. crim. n°232 ; D. 1993.117, note M.-L. RASSAT ; JCP 1993.II.22043, note T. GARE ; RSC 1993. 330, G. LEVASSEUR. Cette solution fut reprise par le Cour européenne des droits de l’homme, CEDH, 22 novembre 1995, CR et SW contre France, RSC 1996.473, R. KOERING-JOULIN.
  • [33]
    Le problème de la preuve du défaut de consentement de la victime, en cas de relations antérieures du fait du mariage avec l’auteur des faits, demeure toutefois entier.
  • [34]
    Proposition de loi n°62, tendant à lutter contre les violences à l’égard des femmes et notamment au sein des couples par un dispositif global de prévention, d’aide aux victimes et de répression, déposée le 10 novembre 2004 par R. COURTEAU.
  • [35]
    Proposition de loi n°2121 renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, Mme Danielle BOUSQUET et M. Guy GEOFFROY, enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 novembre 2009.
  • [36]
    M.-L. RASSAT, Droit pénal spécial, Infractions du code pénal, 6ème éd., Dalloz, 2011, n°572, p. 651.
  • [37]
    L’introduction de l’inceste dans le code pénal en est une nouvelle illustration, voir infra.
  • [38]
    L. LETURMY, « La répression de la délinquance sexuelle », in Un droit pénal postmoderne ? Mise en perspective de certaines évolutions contemporaines, PUF, collection Droit et Justice, 2009, p. 127.
  • [39]
    Pour une étude approfondie du régime pénal spécial en matière d’infractions sexuelles, voir : L. LETURMY, art. préc. ; X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. 547.
  • [40]
    L. LETURMY, art. préc., p. 127.
  • [41]
    P. COUVRAT, « Le suivi socio-judiciaire, une peine pas comme les autres », RSC 1999. 376.
  • [42]
    X. LAMEYRE, « Les deux corps de la justice pénale. Du corps violé au corps enfermé », Revue Justices 2001, p. 28.
  • [43]
    X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. 547.
  • [44]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011.715. L’auteur émet une réserve quant à ce régime spécial de prescription de l’action publique : « La vérité judiciaire peut-elle éclore de procès aussi tardifs et le plus souvent intrafamiliaux ? N’y-a-t-il pas en outre pour des victimes un véritable risque insupportable de ne pas être entendues parce que le temps a effacé toute preuve ? ».
  • [45]
    V. MALABAT, « Les infractions inutiles. Plaidoyer pour une production raisonnée du droit pénal », in La réforme du code pénal et du code de procédure pénale, Opinio doctorum, Dalloz, 2009, p. 71. « Seul le retour, sinon à un régime strict, du moins à une préparation mijotée et contrôlée du droit peut enrayer le dévoiement de la loi pénale ».
  • [46]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d’actes incestueux, JO 9 février 2010, p. 2265.
  • [47]
    A. LEPAGE, « Réflexions sur l’inscription de l’inceste dans le code pénal par la loi du 8 février 2010 », JCP 2010. Doctr.335 ; O. BALDES, « Le retour de l’inceste dans le code pénal : pourquoi faire ? », Dr. pénal 2010, Étude 7 ; S. DETRAZ, « L’inceste, l’inconnu du droit positif », Gaz. Pal.2010, Étude 10765.
  • [48]
    Le terme de « surqualification » figure dans la circulaire du 9 février 2010 (Circ. Min. Justice CRIM10-3/E8 du 9 février 2010).
  • [49]
    A. LEPAGE, « La définition des agressions sexuelles incestueuses n’est pas conforme au principe de légalité en raison de son caractère imprécis », JCP 2011, Note 1160.
  • [50]
    R. PARIZOT, « Exit le délit-tautologie de harcèlement sexuel », Les Petites affiches, 24 mai 2012, n° 104, p. 3.
  • [51]
    S. DETRAZ, « Harcèlement sexuel : justification et portée de l’inconstitutionnalité », D. 2012, p. 1372 ; R. PARIZOT, art. préc. ; G. ROUJOU DE BOUBEE, « Harcèlement sexuel. Valmont doit-il aller en prison ? », D. 2012, p. 1344.
  • [52]
    P. LASCOUMES, P. PONCELA, P. LENOEL, Au nom de l’ordre, une histoire politique du code pénal, Hachette, 1989, p. 12.
  • [53]
    C. LAZERGES, « De la fonction déclarative de la loi pénale », RSC 2004. 194. « Une telle loi déclarative s’inscrirait dans une politique criminelle plus sensible aux effets d’annonce qu’à la construction d’une stratégie toujours complexe de réponses organisées, préventives et répressives au phénomène criminel ».
  • [54]
    P. LASCOUMES, P. PONCELA, P. LENOEL, op.cit., p. 12.
  • [55]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010, loi préc.
  • [56]
    M. PICHARD, Droit et morale en droit extrapatrimonial, in Droit et morale, Aspects contemporains, Dalloz, 2011, p. 152.
  • [57]
    D. MAYER, « La pudeur du droit face à l’inceste », D. 1988, Chronique p. 213. Cette pudeur du droit à l’encontre de l’inceste est toujours vraie en droit civil. L’inceste est visé lors de l’énoncé des empêchements au mariage (articles 161 à 163 du code civil), mais sans consécration directe de l’inceste. De même, en interdisant l’établissement d’une double filiation en cas d’inceste des parents (article 310-2 du code civil), la loi civile vient camoufler la relation incestueuse et éviter qu’elle soit rendue publique.
  • [58]
    A. LEPAGE, art. préc.
  • [59]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011.725, « sauf à penser à la fonction pédagogique de la loi, le législateur se substitue alors aux titulaires de l’autorité parentale pour nommer, nommer l’inceste, afficher l’inceste, tenter de définir l’inceste dans certaines seulement de ses manifestations (…). La frénésie sécuritaire s’autorise tout, même l’instrumentalisation du tabou de l’inceste ».
  • [60]
    M. PICHARD, art. préc., p. 153.
  • [61]
    J. CARBONNIER, Essai sur les lois, 2ème éd., Répertoire du Notariat Défrenois, 1995, p. 312.
« Si les bonnes lois sont d’argent, le silence législatif est d’or » [1].

1De l’investissement au surinvestissement législatif. S’il est un domaine dans lequel le silence législatif est une illusion, c’est bien celui des infractions sexuelles. En cette matière, le législateur déploie une activité législative intense qui ne cesse de s’accroître. L’investissement législatif dans la lutte contre la criminalité de nature sexuelle connaît aujourd’hui une mutation pour devenir un véritable surinvestissement. Dans son acception littérale, le surinvestissement s’entend d’un investissement supérieur aux besoins réels [2]. En raison de la gravité des infractions sexuelles, il n’est pas de notre propos de considérer que le souci constant du Parlement de légiférer est supérieur aux besoins réels en termes de lutte contre ces infractions. Il s’agit plutôt d’appréhender le terme surinvestissement dans le sens d’un investissement législatif souvent mal approprié. La production massive de normes pénales relatives aux infractions sexuelles n’est pas toujours idoine, tant les textes peuvent être mal rédigés, confus et surabondants. Le surinvestissement législatif se traduit par un « maquis des incriminations » et par « un foisonnement des exceptions procédurales » [3]. Or, à trop légiférer en ce domaine, ne risque-t-on pas d’aboutir au résultat inverse de celui recherché, à savoir l’efficacité de la répression ? L’exemple de l’inceste est à ce sujet topique. Inscrit dans le code pénal par la loi n?2010-121 du 8 février 2010 [4], puis abrogé à la faveur d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) soulevée devant le Conseil constitutionnel [5], l’inceste a eu une existence juridique très brève et pourtant a donné naissance à un nouveau contentieux judiciaire relativement aux arrêts de condamnation prononcé pour infraction incestueuse [6]. Ces arrêts, lorsqu’ils sont frappés d’un pourvoi en cassation, font l’objet d’une cassation en raison de la disparition de la qualification d’inceste et, parfois, d’un renvoi devant une autre cour d’assises [7]. Un nouveau procès s’ouvre avec à la clé de nouveaux délais, de nouveaux frais engagés et un encombrement des juridictions pénales. La répression contre l’acte incestueux et l’intérêt des victimes n’ont certainement pas été mieux garantis par ce texte de loi mal rédigé.

2La définition des infractions sexuelles. Le code pénal n’use pas de la terminologie d’infractions sexuelles. Il emploie les termes « d’agression », « d’atteinte » ou encore « d’exhibition », qualifiées expressément de « sexuelles ». La notion d’infraction sexuelle mérite donc d’être précisée. Elle regroupe « toutes les infractions qui portent atteinte à la liberté sexuelle en imposant ou en incitant à un comportement de nature sexuelle, ainsi que les infractions qui répriment des comportements sexuels ou des messages outrageants » [8]. Ce qu’il faut d’emblée mettre en exergue, c’est la grande diversité des infractions sexuelles. Certes, elles présentent le point commun d’avoir trait à la sexualité mais, elles sanctionnent des comportements qui renvoient à des intérêts sociaux très divers. Les infractions sexuelles punissent d’abord des atteintes à la liberté sexuelle de la victime par le défaut de consentement. Ensuite, elles répriment des comportements sexuels que la morale publique réprouve même s’ils ne sont pas porteurs d’atteintes à la liberté sexuelle, comme par exemple le délit de racolage (article 225-10-1 du code pénal). Le racolage vise la prévention de l’ordre public par la préservation de la tranquillité publique et, de façon plus indirecte, la lutte contre le proxénétisme privé de sources de profit [9]. Le droit pénal protège donc à la fois des intérêts privés et publics au sein des infractions sexuelles.

3Dans le code pénal, on peut référencer trois catégories d’infractions sexuelles. La première catégorie est celle consacrée aux agressions sexuelles (articles 222-22 du code pénal et suivants), qui regroupent les incriminations de viol (articles 222-23 du code pénal et suivants), des agressions sexuelles autres que le viol (articles 222-27 du code pénal et suivants) et de l’exhibition sexuelle (article 222-32 du code pénal). La deuxième catégorie concerne les infractions de proxénétisme et les incriminations qui en résultent (articles 225-5 du code pénal et suivants). La troisième catégorie consacre les infractions de mise en péril des mineurs (articles 227-12 du code pénal et suivants) qui comprennent notamment le délit de corruption de mineurs (article 227-22 du code pénal), le délit de propositions sexuelles faites par un majeur à un mineur de quinze ans par un moyen de communication électronique (article 227-22-1 du code pénal), de pornographie enfantine (articles 227-23 et 227-24 du code pénal) ou encore les atteintes sexuelles sur mineur de quinze ans (article 227-25 du code pénal) ou sur mineur de plus de quinze ans (article 227-27 du code pénal). La liste des infractions sexuelles est donc fort longue et ne cesse de s’allonger au fil des réformes [10].

4L’analyse du surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles. Eu égard aux infractions sexuelles, le constat d’un surinvestissement législatif s’impose. Depuis l’entrée en vigueur du code pénal en 1994, on comptabilise plus de dix lois modifiant le régime juridique des infractions sexuelles. Ainsi, le législateur est intervenu lors de la loi n°98-468 du 17 juin 1998 [11], la loi n°2002-73 du 17 janvier 2002 [12], la loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 [13], la loi n°2003-239 du 18 mars 2003 [14], la loi n°2005-1549 du 12 décembre 2005 [15], la loi n°2006-339 du 4 avril 2006 [16], la loi n°2007-297 du 5 mars 2007 [17], la loi n°2010-121 du 8 février 2010 [18], la loi n°2010-769 du 9 juillet 2010 [19] ou encore la loi n°2011-525 du 11 mai 2011 [20]. Cette frénésie législative interroge quant à sa raison d’être, mais aussi quant à ses conséquences sur la matière.

5L’étude du surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles suppose, d’abord, d’en rechercher les raisons (I) pour, ensuite, en analyser les incidences tant en droit pénal de fond qu’en droit pénal de forme (II).

I – Les raisons du surinvestissement législatif

6Comprendre le surinvestissement législatif. La compréhension du surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles ne peut être basée sur des certitudes. On ne peut qu’émettre des hypothèses, certaines étant plus assurées que d’autres. Selon nous, l’inflation législative trouve son fondement dans deux raisons principales. D’une part, renforcer la répression contre les auteurs d’infractions sexuelles. D’autre part, pallier par la quantité de lois le malaise latent du législateur envers cette délinquance sexuelle.

7Le renforcement de la répression. La première raison au foisonnement de lois en matière d’infractions sexuelles résulte d’une démarche répressive du législateur. Le délinquant sexuel est devenu, au fil du temps, le délinquant qui cristallise l’attention de l’opinion publique et, par voie de conséquence, du législateur. La criminalité sexuelle est au cœur d’un dispositif répressif qui n’a de cesse de s’alourdir, principalement afin d’en réduire le risque de récidive. Cette répression accrue à l’encontre des auteurs d’infractions sexuelles se manifeste par une production importante de lois pénales. Ainsi, le législateur crée régulièrement de nouvelles incriminations telles que le harcèlement sexuel introduit par le code pénal en 1994 à l’article 222-33 [21] ou encore le délit d’exploitation d’images pornographiques de mineurs à l’article 227-23 [22]. Les infractions sexuelles font également l’objet d’une aggravation constante des peines encourues. Le viol était réprimé dans l’ancien code pénal (article 332 de l’ACP) d’une peine de réclusion criminelle de cinq à dix ans. L’article 222-23 du code pénal sanctionne désormais le viol d’une peine de quinze ans de réclusion criminelle. La répression s’exprime aussi par la création récurrente de nouvelles circonstances aggravantes assortissant notamment les incriminations de viol et d’agressions sexuelles [23]. A titre d’illustration, la loi du 18 mars 2003 aggrave la peine du viol lorsqu’il est commis « à raison de l’orientation sexuelle de la personne » et la loi du 12 décembre 2005 a créé la circonstance aggravante de viols en série. L’article 222-24 du code pénal, réprimant le viol, recense dorénavant douze circonstances aggravantes, indices d’un surinvestissement législatif entièrement tourné vers l’aggravation de la répression des infractions sexuelles.

8Enfin, l’expression législative sécuritaire à l’encontre des délinquants sexuels se traduit par l’adoption de mesures spécifiquement adaptées à cette criminalité sexuelle. Il en va ainsi de l’article 706-47-2 du code de procédure pénale, introduit par la loi n°2004-204 du 9 mars 2004, qui prévoit que : « L’officier de police judiciaire, agissant au cours de l’enquête ou sur commission rogatoire, peut faire procéder sur toute personne contre laquelle il existe des indices graves ou concordants d’avoir commis un viol, une agression sexuelle ou une atteinte sexuelle prévus par les articles 222-23 à 222-26 et 227-25 à 227-27 du code pénal, à un examen médical et à une prise de sang afin de déterminer si cette personne n’est pas atteinte d’une maladie sexuellement transmissible ». Le texte précise que les résultats de cette analyse sanguine sont transmis à la victime. La loi énonce en outre que cette analyse biologique peut être réalisée sans le consentement de la personne mise en cause, c’est-à-dire éventuellement de force. Cette disposition ne manque pas de soulever la question de sa conformité avec l’inviolabilité du corps humain et avec le respect de la présomption d’innocence, la personne n’étant encore que soupçonnée de l’infraction. Enfin, la loi dispose que le refus de se soumettre au test sanguin est puni d’une peine d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Cette peine, par dérogation aux règles du concours réel d’infractions, « se cumule, sans possibilité de confusion, avec celles susceptibles d’être prononcées pour le crime ou le délit ayant fait l’objet de la procédure ». L’exception au régime légal de non cumul des peines en cas de concours réel des infractions traduit la volonté du législateur de renforcer la répression contre celui qui, après avoir agressé la victime, lui refuse une information essentielle relative à sa santé.

9Les exemples de lois favorisant une répression renforcée contre les infractions sexuelles pourraient être multipliés. Le choix d’un régime très répressif « constitue la réponse réactive et puissante d’un État qui ne répugne pas à instaurer une politique criminelle autoritaire » [24] et traduit un véritable engagement sécuritaire en matière d’infractions sexuelles. L’attention constante du législateur pour les infractions sexuelles s’explique, en partie du moins, par le fait que les délinquants sexuels sont devenus les nouveaux monstres de ce siècle [25] et le viol, « le crime total » [26]. Le législateur produit donc en quantité déraisonnable des normes pénales répressives relatives à cette délinquance, afin de tenter d’enrayer ce phénomène et de répondre aux attentes de la société.

10La démarche répressive est indéniable mais, on peut quand même s’interroger sur sa pertinence et donc son efficacité. En effet, cette activité législative intense réalisée pour aggraver l’arsenal pénal applicable aux auteurs d’infractions sexuelles n’a pas démontré sa pleine efficacité. La criminalité sexuelle ne marque pas un recul à la hauteur de la quantité de lois répressives adoptées [27].

11La frénésie législative en matière d’infractions sexuelles trouve donc sa cause première dans une tentative désordonnée de lutte contre ce qui est considéré, aujourd’hui, comme le crime absolu. Contre le crime absolu, le législateur use de l’arme absolue, le déferlement législatif aux fins de répression.

12Le malaise du législateur. A n’en pas douter, la raison première du surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles résulte d’une démarche sécuritaire. Cependant, une seconde hypothèse quant aux raisons d’un tel déferlement législatif peut être avancée. Celle-ci est de l’ordre de la supposition, de l’intuition, mais elle nous semble pouvoir être étayée par divers éléments. En effet, il est possible que la quantité de lois pénales relatives aux infractions sexuelles soit la manifestation d’un certain malaise du législateur à l’égard de cette criminalité. Malaise qu’il compenserait par une profusion de lois.

13Le malaise renvoie à une question essentielle concernant les infractions sexuelles à savoir, ces dernières ont-elles un genre, c’est-à-dire un genre féminin ou masculin ? L’histoire de l’incrimination de viol offre un éclairage intéressant sur cette question.

14Jusqu’à la loi du 23 décembre 1980, seul l’homme pouvait être l’auteur d’un viol qui consistait en la relation sexuelle d’un homme avec une femme. Le viol était alors appréhendé sous « l’aspect social d’une menace pour les structures familiales » [28]. L’infraction faisait courir le risque au sein de la famille légitime de la survenance d’une grossesse illégitime. Les caractéristiques principales du viol étaient d’être une infraction dont la victime était toujours féminine et dont la conséquence était l’atteinte à l’honneur de la famille. La réforme de 1980 a introduit un véritable bouleversement dans l’appréhension du viol. Le défaut de consentement de la victime devient l’élément central de l’incrimination. La victime peut être indifféremment un homme ou une femme et la loi permet la répression de la femme violeuse, par la définition large de la matérialité du viol qui n’est plus uniquement la relation sexuelle entre un homme et une femme, mais « un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit » (article 222-23 du code pénal). Depuis 1980, le viol n’est donc plus juridiquement une infraction féminine.

15Pourtant, et c’est tout le paradoxe de cette réforme majeure, la loi est « toute entière la loi de la femme violée » [29]. Le législateur n’est pas parvenu à s’extraire des schémas classiques de cette infraction et « le spectre de la femme violée est présent partout dans les travaux préparatoires » [30]. Le viol demeure encore une infraction de genre féminin, ce qui n’est pas anodin quant à son appréhension par le Parlement, dont la composition reste majoritairement masculine. La consécration difficile du viol entre époux en est la parfaite illustration.

16La définition du viol, telle qu’elle résulte de la loi de 1980, ne fait pas obstacle à la reconnaissance du viol entre époux. La loi exige une pénétration sexuelle contre la volonté de la victime, l’existence de relations antérieures entre la victime et l’agresseur étant indifférente à la réalisation de l’infraction. Néanmoins, la consécration du viol entre époux fut difficile en raison de la présomption civiliste de consentement aux relations sexuelles dans le couple marié. Cette présomption résulte du devoir de cohabitation imposé à l’article 215 du code civil, mais aussi, de la conception traditionnelle du mariage destiné à la création d’une famille. Dès lors, la jurisprudence et la doctrine s’accordaient pour rejeter la qualification de viol sur l’épouse [31]. Il faudra attendre un arrêt de la Chambre criminelle en date du 11 juin 1992 [32] pour que le viol entre époux soit enfin sanctionné. Par la suite, le législateur va s’emparer de la question et légiférer sur ce point à deux reprises. La loi du 4 avril 2006 introduit un deuxième alinéa au sein de l’article 222-22 qui précise que le viol et les autres agressions sexuelles peuvent être constitués « quelle que soit la nature des relations existant entre l’agresseur et sa victime, y compris s’ils sont unis par les liens du mariage ». La loi du 9 juillet 2010 supprime la précision issue de la loi de 2006 qui énonçait qu’en cas de mariage entre la victime et l’agresseur « la présomption de consentement des époux à l’acte sexuel ne vaut que jusqu’à preuve du contraire » [33].

17Que penser de ces deux lois ? D’abord, elles confirment que les infractions sexuelles, dans l’esprit du législateur, restent des infractions féminines. La loi du 4 avril 2006 renforce la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs. Cette loi résulte d’une proposition de loi tendant à lutter contre les violences à l’égard des femmes (nous soulignons) et notamment au sein des couples [34]. La loi du 9 juillet 2010 est relative aux violences faites spécifiquement aux femmes (nous soulignons), aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants. Cette loi résulte d’une proposition qui visait uniquement la répression des violences faites aux femmes [35]. L’extension aux violences au sein du couple et aux incidences sur les enfants seront retenues par la Commission après le vote de la loi en première lecture par l’Assemblée Nationale et le Sénat. Il s’agissait bien, ab initio, de lutter contre les violences, y compris sexuelles, faites aux femmes alors même que le viol, et donc le viol entre époux, est depuis 1980 une infraction qui peut être infligée aux deux sexes. Il n’est pas de notre propos de nier l’évidence, à savoir que ce sont les femmes qui sont majoritairement victimes d’agressions sexuelles, mais de souligner le paradoxe du législateur qui a voulu faire du viol une infraction applicable à tous sans distinction tout en conservant le réflexe d’une infraction féminine.

18Ensuite, la pertinence même de ces deux lois doit être soulevée. Dans l’exposé des motifs de la proposition de loi du 4 avril 2006, il est précisé que le viol entre époux peut être puni sur le fondement textuel existant. Néanmoins, le rapporteur souligne que « certaines interdictions méritent d’être mieux mises en évidence dans notre droit pénal afin de renforcer leur effet dissuasif. Il en va ainsi, du viol entre époux, concubins et partenaires liés par un P.A.C.S. ». La loi n’est pas nécessaire, mais doit permettre une meilleure prévention des viols entre époux. Le législateur est donc intervenu à deux reprises, en 2006 et en 2010 pour préciser une hypothèse particulière de viol pouvant déjà être réprimée sur le fondement de l’incrimination générale de viol de l’article 222-23 du code pénal. Pourquoi un tel surinvestissement législatif dans une matière qui ne le requiert pas ? Peut-être justement parce que cela n’est pas si évident. Peut-être que le cas spécifique du viol entre époux qui, juridiquement, ne soulève pas de difficultés depuis la loi de 1980, en pose encore dans les mentalités [36]. Le poids de la tradition est-il toujours si fort qu’il nécessite l’intervention du législateur pour dire ce qui est déjà admis par la loi ou le législateur est-il lui-même peu à l’aise sur ce sujet et s’oblige à mettre en mots ce malaise ?

19Les infractions sexuelles, justement parce qu’elles ont trait à l’intime, heurtent les consciences et mettent en lumière des tabous. Le malaise du législateur est palpable qui confond lutte contre les infractions sexuelles et lutte contre les violences faites spécifiquement aux femmes tout en multipliant les lois dont l’utilité est parfois discutable [37]. On peut penser que le malaise du Parlement pour légiférer en matière d’infractions sexuelles est une cause plausible du surinvestissement législatif. Le processus pourrait se résumer de façon un peu schématique par une tentative un peu vaine du législateur de dissimuler sa gêne par une myriade de lois. La pudeur dissimulée sous un arbre géant de lois pénales.

20Tenter de comprendre les logiques internes au surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles amène ensuite à tenter d’en déceler les incidences.

II – Les incidences du surinvestissement législatif

21Quelles incidences au surinvestissement législatif ? En premier lieu, par la profusion de lois en matière d’infractions sexuelles, le législateur cherche à protéger la société contre les auteurs d’infractions particulièrement réprouvées. « Le crime à caractère sexuel n’est plus un crime comme les autres et, en cela, il justifie que son auteur ne soit pas non plus traité comme n’importe quel autre délinquant » [38]. C’est fort de ce constat que le législateur a multiplié les régimes dérogatoires pour les infractions sexuelles. Les dérogations sont devenues tellement nombreuses qu’un véritable régime pénal spécial a émergé en matière d’infractions sexuelles. En second lieu, le foisonnement législatif est tel qu’il ne s’accompagne que rarement d’un strict respect des exigences requises par le principe de légalité. La violation de ce principe cardinal du droit pénal est devenue une constante en matière d’infractions sexuelles.

22La création d’un régime pénal spécial. Le régime pénal spécial concerne tant le droit pénal de fond que de forme. Nous ne reviendrons pas sur les multiples dérogations aux règles classiques du droit pénal, car elles sont trop nombreuses [39]. Quelques illustrations seront suffisantes pour étayer ce propos.

23En droit pénal de fond, la lutte contre les infractions sexuelles a favorisé « l’abolition des frontières traditionnelles du droit pénal » [40]. En effet, l’article 222-22 alinéa 3 du code pénal s’affranchit des règles relatives à l’application de la loi pénale française pour des faits commis à l’étranger contre un mineur par un français, afin de lutter efficacement contre le tourisme sexuel. Les exigences de la réciprocité des incriminations (article 113-6 du code pénal) et de la poursuite initiée par une requête du parquet après plainte de la victime ou dénonciation étatique officielle (article 113-8 du code pénal) sont écartées pour les agressions sexuelles. La loi du 17 juin 1998 a élargi le bénéfice de ces règles territoriales spécifiques à d’autres délits, tels le délit de corruption de mineurs, la pornographie enfantine ou les atteintes sexuelles simples ou aggravées (article 227-27-1 du code pénal).

24En droit des peines, la loi n°98-468 du 17 juin 1998 a crée le suivi-socio judiciaire (articles CP 131-36-1 et suivants du code pénal). Cette « peine pas comme les autres » [41] a été imaginée comme une protection maximale des victimes. Le suivi socio-judiciaire, applicable aux auteurs d’agressions sexuelles, « apparaît face au viol, crime total, comme une peine totale » [42]. Il présente la particularité d’adjoindre à une peine privative de liberté, une mise à l’épreuve d’une durée longue, dix ans en cas de condamnation pour un délit et vingt pour un crime (article 131-36-1 du code pénal). En cas de non respect des obligations imposées pendant la mise à l’épreuve, le condamné peut se voir infliger une nouvelle peine d’emprisonnement. Le suivi socio-judiciaire a donc été conçu comme une mesure de prévention de la récidive en matière d’infractions sexuelles.

25Enfin, en procédure pénale, le régime de la prescription de l’action publique connaît une « surdérogation » [43] qui résulte notamment de la loi du 17 juin 1998. En effet, la prescription de l’action publique en matière criminelle (article 7 du code de procédure pénale) est de vingt ans et ne commence à courir qu’à compter de la majorité de la victime (article 706-47 du code de procédure pénale), pour les infractions d’agressions ou d’atteintes sexuelles ou de proxénétisme à l’égard d’un mineur, ou de recours à la prostitution d’un mineur (articles 222-23 à 222-31, 225-7 (1°), 225-7-1, 225-12-1, 225-12-2 et 227-22 à 227-27 du code pénal). En matière délictuelle, la prescription démarre également à la majorité de la victime et pour les délits d’agressions sexuelles aggravées (article 222-30 du code pénal) ou d’atteintes sexuelles aggravées (article 227-26 du code pénal), la prescription est d’une durée de vingt ans (article 8 du code de procédure pénale). La prescription de l’action publique est donc tellement rallongée que les infractions sexuelles sont parfois considérées comme une nouvelle catégorie d’infractions imprescriptibles [44].

26Ces quelques exemples, loin d’être exhaustifs, démontrent que le surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles a eu pour conséquence de façonner, au fur et à mesure des lois nouvelles, un régime pénal spécial pour ces infractions. Ce régime spécial traduit l’appréhension particulière par le législateur de la criminalité sexuelle. Le délinquant sexuel devient une catégorie particulière d’auteur d’infractions, ce qui explique ce traitement différencié. Toutefois, cette criminalité présente-t-elle tant de spécificités pour justifier un régime dérogatoire au droit commun ou ce régime n’est-il pas plus prosaïquement le résultat d’une frénésie législative qui accumule les réformes sans réflexion approfondie sur le sujet ? La réponse du juriste penche, avec regrets, plutôt pour la seconde branche de l’option.

27L’atteinte au principe de légalité. Le constat est désormais classique en droit pénal, l’inflation législative favorise l’adoption de lois dont la rédaction est de piètre qualité. En effet, la déferlante législative ne permet plus de prendre le temps nécessaire pour rédiger des lois dont les termes seraient suffisamment précis pour répondre aux exigences du principe de légalité [45]. Les infractions sexuelles ne sont pas épargnées par ce phénomène. Deux exemples permettent d’illustrer ce constat.

28D’une part, la loi du 8 février 2010 [46] tendant « à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal ». De multiples critiques ont été formulées à l’encontre de cette loi [47], dont la finalité était de créer une « surqualification » d’inceste [48] sans aucune incidence pénale, ne créant pas de nouvelle incrimination et ne modifiant pas non plus les peines encourues. En outre, la rédaction fort confuse de la loi ne permettait pas clairement d’identifier qui pouvait être l’auteur d’un inceste, ce qui, pour une loi visant à inscrire l’inceste dans le code pénal était largement paradoxal. Le texte envisageait comme auteur potentiel « un ascendant, un frère, une sœur ou par toute autre personne, y compris s’il s’agit d’un concubin d’un membre de la famille, ayant sur la victime une autorité de droit ou de fait ». Le texte était évidemment imprécis et offrait une conception vaste de l’inceste, qui n’était plus la relation sexuelle entre membres d’une famille de sang, mais entre un mineur et « toute autre personne », ce qui élargissait considérablement les auteurs d’un acte incestueux. La riposte du Conseil constitutionnel ne s’est pas fait attendre. Par une Décision n°2011-163 du 16 septembre 2011, QPC, le Conseil a abrogé les dispositions légales relatives à l’inceste [49], en raison de l’atteinte portée au principe de légalité des délits et des peines. Dans une décision n°2011-222 du 17 février 2012, QPC, le Conseil constitutionnel a abrogé l’article 227-27-2 du code pénal relatif à la définition du délit d’atteintes sexuelles incestueuses. L’inceste a donc disparu de l’arsenal pénal, faute pour le législateur d’être parvenu à le définir avec précision.

29D’autre part, le délit de harcèlement sexuel est emblématique de l’atteinte portée par le législateur au principe de légalité. Ce délit avait été initialement introduit dans la législation pénale lors de l’entrée en vigueur du code pénal. Incriminé à l’article 222-33 du code pénal, il définissait le harcèlement sexuel comme « le fait de harceler autrui en usant d’ordres, de menaces ou de contrainte, dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle, par une personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions ». Surinvestissement législatif, ce texte datant de 1994 fut modifié à deux reprises par la loi du 17 juin 1998 et par la loi 17 janvier 2002 de modernisation sociale. En l’espace de dix ans, le délit a connu trois versions différentes. Dans sa dernière définition, le harcèlement sexuel s’apparentait à un « délit-tautologie » [50]. En effet, selon les termes de la loi, le harcèlement sexuel consistait dans « le fait de harceler autrui en vue d’obtenir des faveurs de nature sexuelles ». Harceler, pour le législateur, c’est harceler… Il était difficile d’être moins précis dans la description du comportement incriminé. Le Conseil constitutionnel a abrogé, sans surprise, ce délit dans sa Décision n°2012-240 du 4 mai 2012, QPC [51], pour méconnaissance du principe de légalité.

30Le surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles s’accompagne donc de façon presque inévitable de lois qui ne répondent pas aux exigences du principe de légalité.

31L’usage abusif de la fonction déclarative. Le droit pénal a pour vocation d’assurer la sauvegarde de valeurs sociales considérées comme essentielles pour une société donnée, à un moment donné. Dès lors, « incriminer peut avoir une fonction essentiellement symbolique » [52], le législateur usant de la loi pénale pour rappeler son attachement à certaines valeurs. Ce faisant, il offre au droit pénal une fonction expressive, celle de décrire les valeurs que la loi se doit de protéger. Or, on assiste à l’émergence d’une nouvelle fonction de la norme pénale, la fonction déclarative, qui « aurait une mission sédative. Elle naîtrait de la pression sociale de tel ou tel groupe de victimes, (…), voyant dans l’édiction de nouvelles normes, (…), la solution à leurs problèmes » [53]. Une telle utilisation de la loi pénale « relève d’une politique d’affichage et de proclamation relativement indifférente à son degré de mise en œuvre réel » [54]. Cette démarche du législateur soulève la critique, pour ne pas répondre aux finalités du droit pénal, à savoir assurer la protection de l’ordre public par la répression des comportements interdits. Or, on constate qu’une telle démarche se retrouve en matière d’infractions sexuelles.

32L’usage malhabile de la fonction déclarative du droit pénal s’est manifesté lors de la loi du 8 février 2010 [55] incriminant l’inceste commis sur les mineurs. Il s’agissait, comme l’indique l’intitulé même de la loi, « d’inscrire » l’inceste dans le code pénal, c’est-à-dire « de nommer l’inceste (…), de dire l’interdit – et son caractère fondateur » [56]. Il est logique que le droit pénal s’empare d’une atteinte majeure à l’ordre social et exprime, par le recours à une incrimination, la réprobation de la société à l’encontre d’un tel acte. La pudeur du droit pénal qui ne nommait pas cet interdit fondamental tout en le sanctionnant par le biais des circonstances aggravantes, devait laisser place à une véritable incrimination d’inceste [57]. Toutefois, c’est la méthode usitée par la loi du 8 février 2010 qui laisse dubitatif. Le législateur pénal veut dire l’inceste, le révéler, mais paradoxalement il n’y parvient pas. L’inceste était une loi d’affichage puisqu’elle ne créait ni nouvelle incrimination, ni nouvelle peine. « Présentée comme dépouillée de tout enjeu répressif, la loi pénale est alors apparue dotée d’une normativité réduite, confinée dans une pure dimension symbolique » [58]. La seule mission de la loi était symboliquement de définir pénalement l’inceste [59], de satisfaire les victimes afin qu’elles soient reconnues victimes du crime spécifique d’inceste. Mais, la définition légale était tellement imprécise que le Conseil constitutionnel a abrogé les dispositions relatives à l’inceste. L’abus de la fonction déclarative du droit pénal a peut-être empêché le législateur d’avoir une réflexion plus approfondie sur les contours juridiques de la notion d’inceste.

33Ce qu’il faut peut-être retenir de cette incursion brève de l’inceste dans le code pénal, c’est le malaise du législateur à l’endroit de ce crime si particulier. En effet, « en formulant son intervention morale dans des mots dont la portée est particulièrement discutée ou dont il adopte une approche discutable, en rendant, en somme, incertain le sens de son message moral, on peut se demander si le législateur ne se désengage pas à son insu, s’il ne désengage pas lors même qu’il entend – ou prétend ? se réengager » [60]. Le malaise du législateur est-il si grand en matière d’infractions sexuelles qu’il peine à rédiger un texte de loi suffisamment précis pour ne pas subir les foudres du Conseil constitutionnel ?

34Le surinvestissement législatif en matière d’infractions sexuelles est une réalité aux conséquences multiples. Cependant, le législateur n’en est peut-être pas le seul responsable. En effet, les auteurs d’infractions sexuelles, et spécialement lorsqu’elles sont dirigées contre les mineurs, sont devenus aujourd’hui les nouveaux monstres de la société. Or, comme le rappelait le Doyen Carbonnier, « de l’inflation législative, nous portons tous un peu le péché. A peine apercevons-nous le mal que nous exigeons le remède ; et la loi est, en apparence, le remède instantané. Qu’un scandale éclate, qu’un accident survienne, qu’un inconvénient se découvre : la faute en est aux lacunes de la législation. Il n’y a qu’à faire une loi de plus. Et on la fait. Il faudrait beaucoup de courage à un gouvernement pour refuser cette satisfaction de papier à son opinion publique » [61]. Espérons que le temps d’un tel courage, qui a tant fait défaut au législateur ces dernières années, soit enfin arrivé.

Notes

  • [1]
    J. CARBONNIER, Essai sur les lois, 2ème éd., Répertoire du Notariat Defrénois, 1995, p. 313.
  • [2]
    Dictionnaire Le petit Robert.
  • [3]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011, p. 725.
  • [4]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d’actes incestueux, JO 9 février 2010, p. 2265.
  • [5]
    Conseil constitutionnel, Décision n°2011-163 du 16 septembre 2011, QPC.
  • [6]
    J.-C. PLANQUE, « Infractions incestueuses : Objets Pénaux Non Identifiés et conséquences identifiables », Gaz. Pal. 2012, n°110, p. 13.
  • [7]
    Pour des arrêts imposant le renvoi devant une autre cour d’assises, par exemple : Crim. 12 octobre 2011, n°10-88885 et n°10-82842 ; Crim. 4 janvier 2012, n°11-83575 ; Crim. 15 février 2012, n°11-83393. En revanche, d’autres arrêts prononcent la cassation sans renvoi : Crim. 4 janvier 2012, n° 11-87518 ; Crim. 28 mars 2012, n°12-80389. Il est d’ailleurs difficile de déterminer pour quelles raisons exactes la Cour de cassation ordonne ou non le renvoi. On peut penser que « le renvoi serait donc nécessaire parce que le texte appliqué a pu avoir une influence sur l’appréciation des circonstances de l’infraction », J.-C. PLANQUE, art. préc.
  • [8]
    V. MALABAT, « Infractions sexuelles », Répertoire pénal et de procédure pénale, Dalloz, 2010, n°1.
  • [9]
    Conseil constitutionnel, Décision n °2003-467 DC du 13 mars 2003. « Considérant, en premier lieu, que le racolage public est susceptible d’entraîner des troubles pour l’ordre public, notamment pour la tranquillité, la salubrité et la sécurité publiques ; qu’en privant le proxénétisme de sources de profit, la répression du racolage sur la voie publique fait échec au trafic des êtres humains ; que la création par le législateur d’un délit de racolage public ne se heurte dès lors à aucune règle, ni à aucun principe de valeur constitutionnelle, (Considérant 61) ». M.-H. RENAUT, « L’ordre public et la prostitution ou l’Histoire n’est qu’un perpétuel recommencement », RSC 2003. 293. Selon l’auteur, « la pénalisation du racolage public est destinée (…) à doter les forces de l’ordre d’un outil répressif pour éradiquer les zones de prostitution et retirer de la voie publique, au moyen d’un placement en garde à vue, les personnes qui se livrent à cette activité ».
  • [10]
    Pour un exemple de création d’une nouvelle infraction sexuelle, voir le délit d’incitation à commettre une infraction de nature sexuelle à l’encontre d’un mineur (article 227-28-3 du code pénal), crée par la loi n°2006-399 du 4 avril 2006. On ne recense encore aucune application jurisprudentielle de ce texte.
  • [11]
    Loi n° 98-468 du 17 juin 1998 relative à la prévention et à la répression des infractions sexuelles ainsi qu’à la protection des mineurs, JO 18 juin 1998, p. 9255.
  • [12]
    Loi n° 2002-73 du 17 janvier 2002 de modernisation sociale, JO du 18 janvier 2002, p. 1008.
  • [13]
    Loi n° 2002-305 du 4 mars 2002 relative à l’autorité parentale, JO du 5 mars 2002, p.4161.
  • [14]
    Loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, JO 19 mars 2003, p. 4761.
  • [15]
    Loi n° 2005-1549 du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, JO 13 décembre 2005, p. 19152.
  • [16]
    Loi n° 2006-399 du 4 avril 2006 renforçant la prévention et la répression des violences au sein du couple ou commises contre les mineurs, JO 5 avril 2006, p. 5097.
  • [17]
    Loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, JO 7 mars 2007, p. 4297.
  • [18]
    Loi préc.
  • [19]
    Loi n° 2010-769 du 9 juillet 2010 relative aux violences faites spécifiquement aux femmes, aux violences au sein des couples et aux incidences de ces dernières sur les enfants, JO 10 juillet 2010, p. 12762.
  • [20]
    Loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit, JO 18 mai 2011, p. 8537.
  • [21]
    Voir infra.
  • [22]
    Ce délit a par la suite été remanié pas moins de huit fois.
  • [23]
    Par exemple, l’article 222-24 du code pénal prévoit 12 circonstances aggravantes pour le viol et les articles 222-25 et 222-26 du code pénal incriminent respectivement le viol ayant entraîné la mort de la victime et le viol précédé, accompagné ou suivi de tortures ou d’actes de barbarie.
  • [24]
    X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. P. 547. L’auteur souligne le paradoxe d’une politique sécuritaire de l’État en matière d’infractions sexuelles « quand, de façon concomitante, son libéralisme ostensible tolère une hypersexualisation des modes de communication publique et l’organisation industrielle de la pornographie ».
  • [25]
    D. ZAGURY, « “Les nouveaux monstres”, plaidoyer pour un traitement raisonné des agresseurs sexuels », in Violences sexuelles. Le soin sous contrôle judiciaire, sous la dir. d’A. CIAVALDINI, Paris, IN PRESS, 2003.
  • [26]
    X. LAMEYRE, « Les deux corps de la justice pénale. Du corps violé au corps enfermé », Revue Justices 2001. 23. L’auteur souligne que la violence sexuelle est devenue la violence de notre temps, « parce que l’atteinte au vivant ne constitue plus le mal suprême en notre monde sorti de la religion. (…) L’impératif biblique - le « Tu ne tueras pas » du Décalogue (…) - est désormais concurrencé, si ce n’est surpassé, par un nouvel interdit laïc, démocratiquement imposé : le « Touche pas à mon corps » (sans mon consentement) ».
  • [27]
    Les chiffres révélés par l’Annuaire statistique de la justice montrent que le nombre des infractions sexuelles est assez stable depuis une dizaine d’années. Ainsi, on dénombrait 1582 condamnations pour viols en 2002, 1814 condamnations pour viols en 2006 et 1370 condamnations pour viols en 2010. Les chiffres fluctuent d’une année à l’autre mais au sein d’une échelle relative.
  • [28]
    D. MAYER, « Le nouvel éclairage donné au viol par la réforme du 23 décembre 1980 », D. 1981, chron. p. 283.
  • [29]
    Idem.
  • [30]
    Idem : « Une des trois propositions de lois déposées au Sénat (…) était intitulée « proposition en vue de protéger les femmes contre le viol » ».
  • [31]
    GARCON, Code pénal annoté, 2ème éd., par ROUSSELET, PATIN, et ANCEL, 1952-1959, Sirey, n°23, « les violences exercées par le mari sur sa femme légitime, lorsqu’elles tendent aux fins légitimes du mariage, ne peuvent jamais constituer un crime de viol ».
  • [32]
    Crim. 11 juin 1992, Bull. crim. n°232 ; D. 1993.117, note M.-L. RASSAT ; JCP 1993.II.22043, note T. GARE ; RSC 1993. 330, G. LEVASSEUR. Cette solution fut reprise par le Cour européenne des droits de l’homme, CEDH, 22 novembre 1995, CR et SW contre France, RSC 1996.473, R. KOERING-JOULIN.
  • [33]
    Le problème de la preuve du défaut de consentement de la victime, en cas de relations antérieures du fait du mariage avec l’auteur des faits, demeure toutefois entier.
  • [34]
    Proposition de loi n°62, tendant à lutter contre les violences à l’égard des femmes et notamment au sein des couples par un dispositif global de prévention, d’aide aux victimes et de répression, déposée le 10 novembre 2004 par R. COURTEAU.
  • [35]
    Proposition de loi n°2121 renforçant la protection des victimes et la prévention et la répression des violences faites aux femmes, Mme Danielle BOUSQUET et M. Guy GEOFFROY, enregistrée à la Présidence de l’Assemblée nationale le 27 novembre 2009.
  • [36]
    M.-L. RASSAT, Droit pénal spécial, Infractions du code pénal, 6ème éd., Dalloz, 2011, n°572, p. 651.
  • [37]
    L’introduction de l’inceste dans le code pénal en est une nouvelle illustration, voir infra.
  • [38]
    L. LETURMY, « La répression de la délinquance sexuelle », in Un droit pénal postmoderne ? Mise en perspective de certaines évolutions contemporaines, PUF, collection Droit et Justice, 2009, p. 127.
  • [39]
    Pour une étude approfondie du régime pénal spécial en matière d’infractions sexuelles, voir : L. LETURMY, art. préc. ; X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. 547.
  • [40]
    L. LETURMY, art. préc., p. 127.
  • [41]
    P. COUVRAT, « Le suivi socio-judiciaire, une peine pas comme les autres », RSC 1999. 376.
  • [42]
    X. LAMEYRE, « Les deux corps de la justice pénale. Du corps violé au corps enfermé », Revue Justices 2001, p. 28.
  • [43]
    X. LAMEYRE, « Du régime pénal spécial appliqué, en France, aux auteurs d’infractions sexuelles », RSC 2002. 547.
  • [44]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011.715. L’auteur émet une réserve quant à ce régime spécial de prescription de l’action publique : « La vérité judiciaire peut-elle éclore de procès aussi tardifs et le plus souvent intrafamiliaux ? N’y-a-t-il pas en outre pour des victimes un véritable risque insupportable de ne pas être entendues parce que le temps a effacé toute preuve ? ».
  • [45]
    V. MALABAT, « Les infractions inutiles. Plaidoyer pour une production raisonnée du droit pénal », in La réforme du code pénal et du code de procédure pénale, Opinio doctorum, Dalloz, 2009, p. 71. « Seul le retour, sinon à un régime strict, du moins à une préparation mijotée et contrôlée du droit peut enrayer le dévoiement de la loi pénale ».
  • [46]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010 tendant à inscrire l’inceste commis sur les mineurs dans le code pénal et à améliorer la détection et la prise en charge des victimes d’actes incestueux, JO 9 février 2010, p. 2265.
  • [47]
    A. LEPAGE, « Réflexions sur l’inscription de l’inceste dans le code pénal par la loi du 8 février 2010 », JCP 2010. Doctr.335 ; O. BALDES, « Le retour de l’inceste dans le code pénal : pourquoi faire ? », Dr. pénal 2010, Étude 7 ; S. DETRAZ, « L’inceste, l’inconnu du droit positif », Gaz. Pal.2010, Étude 10765.
  • [48]
    Le terme de « surqualification » figure dans la circulaire du 9 février 2010 (Circ. Min. Justice CRIM10-3/E8 du 9 février 2010).
  • [49]
    A. LEPAGE, « La définition des agressions sexuelles incestueuses n’est pas conforme au principe de légalité en raison de son caractère imprécis », JCP 2011, Note 1160.
  • [50]
    R. PARIZOT, « Exit le délit-tautologie de harcèlement sexuel », Les Petites affiches, 24 mai 2012, n° 104, p. 3.
  • [51]
    S. DETRAZ, « Harcèlement sexuel : justification et portée de l’inconstitutionnalité », D. 2012, p. 1372 ; R. PARIZOT, art. préc. ; G. ROUJOU DE BOUBEE, « Harcèlement sexuel. Valmont doit-il aller en prison ? », D. 2012, p. 1344.
  • [52]
    P. LASCOUMES, P. PONCELA, P. LENOEL, Au nom de l’ordre, une histoire politique du code pénal, Hachette, 1989, p. 12.
  • [53]
    C. LAZERGES, « De la fonction déclarative de la loi pénale », RSC 2004. 194. « Une telle loi déclarative s’inscrirait dans une politique criminelle plus sensible aux effets d’annonce qu’à la construction d’une stratégie toujours complexe de réponses organisées, préventives et répressives au phénomène criminel ».
  • [54]
    P. LASCOUMES, P. PONCELA, P. LENOEL, op.cit., p. 12.
  • [55]
    Loi n°2010-121 du 8 février 2010, loi préc.
  • [56]
    M. PICHARD, Droit et morale en droit extrapatrimonial, in Droit et morale, Aspects contemporains, Dalloz, 2011, p. 152.
  • [57]
    D. MAYER, « La pudeur du droit face à l’inceste », D. 1988, Chronique p. 213. Cette pudeur du droit à l’encontre de l’inceste est toujours vraie en droit civil. L’inceste est visé lors de l’énoncé des empêchements au mariage (articles 161 à 163 du code civil), mais sans consécration directe de l’inceste. De même, en interdisant l’établissement d’une double filiation en cas d’inceste des parents (article 310-2 du code civil), la loi civile vient camoufler la relation incestueuse et éviter qu’elle soit rendue publique.
  • [58]
    A. LEPAGE, art. préc.
  • [59]
    C. LAZERGES, « Politique criminelle et droit de la pédophilie », RSC 2011.725, « sauf à penser à la fonction pédagogique de la loi, le législateur se substitue alors aux titulaires de l’autorité parentale pour nommer, nommer l’inceste, afficher l’inceste, tenter de définir l’inceste dans certaines seulement de ses manifestations (…). La frénésie sécuritaire s’autorise tout, même l’instrumentalisation du tabou de l’inceste ».
  • [60]
    M. PICHARD, art. préc., p. 153.
  • [61]
    J. CARBONNIER, Essai sur les lois, 2ème éd., Répertoire du Notariat Défrenois, 1995, p. 312.
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