On apprend de la correspondance de Michel Foucault conservée dans les archives de la Bibliothèque nationale de France (BNF) qu’en 1952 le jeune philosophe avait rédigé des « Remarques sur l’enseignement de la phénoménologie » pour la Revue de l’enseignement philosophique. Dans cet article – qui fut rejeté par la revue puisque « ne convenant pas au caractère de celle-ci » – Foucault regrettait dans les « classes de Philosophie » une opposition entre « “deux” phénoménologies », l’une – la véritable science rigoureuse d’Edmund Husserl – « ardue dans son vocabulaire, sinueuse dans son évolution, et mise en partie seulement à la disposition du lecteur français », et l’autre ayant « un côté plus humain, plus “aimable” ». Celle-ci – que Foucault identifiait avec les ouvrages de psychiatres et psychologues tels qu’Eugène Minkowski et que Frederick J. J. Buytendijk – ne fournirait à ses yeux que des « descriptions, en technicolor littéraire, “d’expériences vécues”, analyses pointilleuses de pseudo-émotions et de quasi-sentiments ». Se référant également à Georges Gusdorf, Foucault observait en outre, sur un ton sarcastique, que « la description phénoménologique n’est pas un florilège, un herbier d’expériences vécues, et séchées entre les feuillets des journaux intimes ou des protocoles psychiatriques ». D’où la conclusion qu’« il faudra bien, un jour, écrire sur Husserl, un ouvrage où l’exactitude ne sera plus synonyme d’ésotérisme ».
L’idée que la phénoménologie, notamment dans sa forme husserlienne, ne doive pas être confondue avec les diverses formes d’anthropologie issues de l’existentialisme est un thème courant dans les manuscrits foucaldiens des années 1950. Dans un passage du volume posthum…