Introduction et positionnement du compte rendu
1Remettre en cause les principaux « dogmes-postulats » de la science moderne, voici l’objectif affirmé du volumineux essai de Rupert Sheldrake (1942-), docteur en biochimie de l’université de Cambridge, qui fut professeur de biologie pendant plusieurs années au sein des universités de Cambridge et Harvard. Cet ouvrage participe du projet plus général développé par Sheldrake d’une critique de la logique matérialiste des modes de preuve dans les sciences d’une part, et de développement d’une théorie alternative fondée sur la notion de champ morphogénétique d’autre part, lié au développement des recherches sur les perceptions extrasensorielles dans le développement et le comportement des êtres vivants notamment. La réception de l’œuvre de Rupert Sheldrake suscite depuis plusieurs années une controverse virulente entre les voix critiques pointant son caractère iconoclaste et non-scientifique, voire sa dimension de propagande, et les supporters qui y voient une contribution critique systématique de l’épistémologie et de l’organisation du monde académique contemporain ainsi qu’une théorisation alternative qui permettrait de les renouveler en profondeur. Si pour Deepak Chopra par exemple, Sheldrake est un pionnier qui ouvre la voie aux sciences de demain, Robert Todd Carroll estime pour sa part, que la théorie de la résonance morphique développée par Sheldrake relève moins des sciences conventionnelles que de la « pensée magique ». La traduction de l’ouvrage dans une multitude de langues dont l’arabe, le danois, le finnois, l’allemand, l’italien, le japonais, le coréen, le polonais, l’espagnol, etc., suggère néanmoins le grand succès de l’ouvrage auprès d’un large public au-delà même des chercheurs.
2Dans ce contexte, ce compte-rendu vise à permettre au lecteur de la Revue d’Anthropologie des Connaissances de mieux se saisir des lignes argumentatives d’un ouvrage intéressant de par la provocation qu’il constitue vis-à-vis des sciences rationalistes, tout en conservant une distance critique vis-à-vis de la portée des thèses de l’auteur et tout particulièrement vis-à-vis de leur positionnement à l’égard du champ des Sciences studies (philosophie, histoire et sociologie des sciences). S’il importe de rendre compte du phénomène que constitue la publication d’un tel ouvrage, notre intention n’est nullement de relayer les thèses critiques de l’ouvrage, mais bien de les exposer dans l’objectif d’éclairer et de questionner la trajectoire académique à la fois prestigieuse et violemment controversée des thèses de l’auteur dans le monde scientifique.
3Inscrivant son travail dans le cadre du « scepticisme radical » (p. 23), comme peut l’être celui de L. Smolin (2006) en physique, la méthode promue par Ruppert Sheldrake consiste à transformer chaque dogme de la doctrine matérialiste en une question. La doctrine matérialiste se fonde, selon l’auteur, sur « le présupposé fondamental que tout est matériel ou physique, même l’esprit. Le matérialisme est une croyance et non pas la science [comme le pensent beaucoup de scientifiques lesquels ont absorbé cette croyance.] » (p. 22). Mais c’est moins aux effets comportementaux (individualisme, consumérisme, etc. promus par la philosophie et l’idéologie matérialistes) qu’aux postulats scientifiques du matérialisme que s’intéresse Sheldrake. C’est de cette manière qu’il fonde le regard critique qu’il porte sur les travaux de ses pairs qui cherchent à promouvoir « une vision scientifique » du monde (Hawking 1980 ; Hawking et Mlodinow, 2011). Son ouvrage a donc pour objectif de questionner ce qu’il conçoit comme des présupposés, des postulats devenus à la fois des dogmes et des tabous, empêchant aujourd’hui selon lui les sciences de progresser. Car selon lui « la science se porterait mieux sans eux [ces dogmes], serait plus libre, plus intéressante, plus amusante aussi. » (p. 20).
Les chapitres de l’ouvrage
4Nous présenterons successivement l’essentiel des douze chapitres formant le livre en insistant sur les derniers, et en particulier sur celui que Sheldrake consacre à l’avenir de la science. Dans « La nature est-elle une machine ? » (chapitre 1), l’auteur interroge la théorie mécaniciste basée sur la métaphore de la machine. Pour l’auteur « ce n’est qu’une métaphore » dans la mesure où les systèmes organisés sont marqués par des niveaux de complexité plus ou moins variables, que la métaphore de la machine est loin d’épuiser. « À la lumière de la théorie du Big Bang, l’univers tout entier ressemble davantage à un organisme vivant et croissant qu’à une machine s’essoufflant lentement faute de carburant. » (p. 98-99).
5Dans « la quantité de matière et d’énergie est-elle constante ? » (chap. 2), l’auteur explique que la cosmologie moderne considère désormais que la matière noire et l’énergie noire constituent 96 % de la réalité. Mais nul ne sait ce qu’elles sont ni comment elles fonctionnent, ni comment elles interagissent avec la matière et l’énergie que nous connaissons. La quantité d’énergie noire semble augmenter à mesure que l’univers s’étend et il se pourrait plutôt, propose l’auteur, qu’un « champ de quintessence donne naissance à de la matière ou de l’énergie nouvelles, à certains endroits plus qu’à d’autres. »
6Le troisième chapitre est intitulé « Les lois de la nature sont-elles immuables ? ». À cette question fondamentale Sheldrake apporte quelques éléments de réponse, mais surtout une somme d’interrogations suggérant que l’idée, qui veut que les « lois de la nature » soient fixes tandis que l’univers évolue, serait une supposition datant de la cosmologie pré-évolutive. Les « constantes fondamentales » pourraient bien être variables, et leurs valeurs n’ont peut-être pas été fixées au moment du Big Bang.
7Pour ce qui est du quatrième chapitre « La matière est-elle inconsciente ? », Sheldrake y rappelle que « la science mécaniste du XVIIe siècle avait défini la matière comme inconsciente, l’esprit conscient étant réservé aux humains, aux esprits, aux anges et à Dieu. Il y avait dualité de la matière et de l’esprit. » Il ajoute que, aujourd’hui, « certains philosophes ont exploré l’idée selon laquelle tous les systèmes matériels auto-organisés présentent un double aspect, physique et immatériel. » Enfin d’après lui, « la relation corps-esprit a plus à voir avec le temps qu’avec l’espace. Le mental choisit entre les futurs possibles, sa causalité va en sens inverse de la causalité matérielle, énergétique : des futurs virtuels vers le passé plutôt que du passé vers le futur [1]. » (p. 214)
8Sheldrake poursuit sa réflexion dans « La nature est-elle sans but ? », le titre-question du cinquième chapitre, dans lequel il soutient la thèse suivant laquelle « les systèmes auto-organisés ont leurs propres buts et finalités, attracteurs vers lesquels ils tendent ». La croissance autant des plantes que des animaux est dirigée vers des fins ou « actes de consommation ». Pareillement chez les humains pour lesquels « les comportements intentionnels sont généralement inconscients » ; « c’est l’habitude qui dirige le plus souvent les intentions et les objectifs. Plusieurs théoriciens quantiques soutiennent par ailleurs l’idée que la causalité s’exerce autant du futur vers le passé que du passé vers le futur. » (p. 255) Dans « Tout héritage biologique est-il matériel ? » (chap. 6), Sheldrake considère que « l’on surévalue les gènes, dans la mesure où ils ne « codent » ni ne « programment » la forme et le comportement des organismes vivants. (…) D’après lui, « le Projet Génome Humain et autres projets génomiques se sont montrés décevants, aussi bien scientifiquement que financièrement, parce qu’ils étaient fondés sur une conception fausse de ce que les gènes peuvent accomplir. L’hérédité du développement et du comportement dépend peut-être de champs organisateurs bénéficiant d’une mémoire interne. »
9« Nos souvenirs sont-ils stockés sous forme matérielle ? » constitue le septième chapitre où Sheldrake aborde les questions posées par le fonctionnement de la mémoire. Il défend l’idée que la mémoire soit un phénomène de résonance. L’apprentissage animal et humain serait transmis par résonance morphique à travers l’espace et le temps. « La théorie de la résonance prévoit notamment le fait que si des animaux, des rats par exemple, apprennent quelque chose quelque part, à Harvard par exemple, les rats du monde entier devraient l’apprendre plus vite ensuite. »
10« La conscience se limite-t-elle à l’activité cérébrale ? » est le titre du huitième chapitre, et l’auteur répond à la question qu’il y pose par la négative, en suggérant que
« ce que nous voyons autour de nous est dans notre esprit sans être dans notre cerveau. Quand nous regardons un objet, en un sens notre esprit le touche. Cela peut aider à comprendre la sensation d’être observé. (…) La capacité de détecter ce regard [d’être observé] semble réelle – comme l’ont montré de nombreuses expériences scientifiques, elle semble même fonctionner par « télévision » interposée. L’esprit s’étend au-delà du cerveau non seulement dans l’espace mais aussi dans le temps, il nous relie à notre propre passé par la mémoire et aux futurs virtuels parmi lesquels nous choisissons. »
12Quant au neuvième chapitre « les phénomènes ‘paranormaux’ sont-ils tous illusoires ? », l’auteur y cite plusieurs exemples concrets dans lesquels des animaux ont pu présager, par leurs comportements, la survenue de catastrophes naturelles (tremblements de terre, tsunamis, etc.), et des cas où des chiens ont pu pressentir l’imminence de bombardements aériens comme durant la Seconde Guerre mondiale. Mais pour l’auteur « à quelques exceptions près, les scientifiques occidentaux ont totalement ignoré la capacité animale à anticiper une catastrophe : le sujet est tabou. » (p. 401-2) Sheldrake évoque, en outre, plusieurs débats et rencontres, sur la télépathie humaine qu’il a eus avec des scientifiques dogmatiquement « rationnels » comme Lewis Wolpert, Jan Nienhuys et Richard Dawkins, qui tous rejettent ces phénomènes « irrationnels », en écartant simplement les faits, preuves statistiques ainsi que les travaux scientifiques qui leur sont opposés.
13Le chapitre 10 s’intitule « La médecine mécaniste est-elle la seule qui marche vraiment ? » Sheldrake y résume ses idées essentielles en admettant de prime abord le fait que la médecine moderne a connu des « succès fantastiques » : elle a pu réduire la mortalité infantile, allonger l’espérance de vie, et elle connaît de plus en plus le corps humain, etc. Cependant, « de nombreux facteurs psychologiques, émotionnels, sociaux et spirituels affectent la santé », d’où l’intérêt, d’après lui, de les prendre au sérieux, en citant par exemple, chiffres à l’appui, que « les gens qui pratiquent la prière ou la méditation tendent à être en meilleure santé et à vivre plus longtemps que les autres. » Par ailleurs, il promeut « les médecines alternatives et complémentaires qui guérissent parfois certains malades », et encourage, dans ce sens, des recherches comparatives concernant leur efficacité.
14Le onzième chapitre traite de « l’illusion de l’objectivité » qui, suivant l’auteur, « rend les scientifiques aussi décevants que déçus : elle va à l’encontre de ce noble idéal qu’est la recherche de la vérité. » (p. 469) Soulignant l’humanité somme toute des scientifiques, Sheldrake y écrit :
« parmi les scientifiques que je connais, certains sont d’impitoyables ambitieux, d’autres sont gentils et généreux, certains sont ennuyeux de pédanterie, d’autres excitants de curiosité ; il y a des lâches et des courageux, des méticuleux et des négligents, des honnêtes et des perfides ; certains sont ouverts et d’autres sont secrets, il y a des originaux et d’autres qui le sont moins. Autrement dit, ce sont des gens. Ils diffèrent les uns des autres comme tout le monde. ».
16Renouant avec le type de critique développé dans les années 1970 quant à la rhétorique particulière prévalant dans l’écriture des articles de revues scientifiques (Latour et Fabbri, 1977), Sheldrake s’en prend aussi à l’écriture courante de travaux scientifiques à la forme passive, pour dire par exemple « une technique a été utilisée » au lieu d’écrire « j’ai utilisé une technique ». Il promeut alors le passage de la forme passive à la forme active qui serait, selon ses mots, « une réforme simple ne coûtant rien et rend le discours scientifique plus honnête et plus lisible. » (p. 483) Soulignant le poids de stratégies personnelles de notoriété et d’accumulation de divers types de capital scientifique (Latour, 1977). Sheldrake écrit :
« Très peu de patrons de laboratoire ou de directeurs de recherche sont intéressés par le savoir en lui-même. Quand un scientifique sollicite des fonds, il prétend presque toujours que ses recherches seront utiles. Les faits qu’il espère découvrir auront de la valeur pour défendre le pays, lutter contre la maladie, améliorer la navigation, augmenter les profits, le rendement agricole, le prestige national ou autre chose encore. La valeur espérée vient avant les faits, la valeur promise permet à la recherche d’être financée et aux faits d’être démontrés. »
18L’auteur propose enfin que « ceux qui ont tendance à idéaliser l’objectivité des scientifiques sont des gens qui ne savent rien ou presque de la science et qui, voyant en elle un espoir de salut, en font une sorte de religion. » (p. 480-81) Si Sheldrake ne prétend pas apporter des réponses « assurées », il entend néanmoins poser des questions dérangeantes et provocatrices aux matérialistes [2], les invitant à remettre en cause leurs dogmes et postulats, telles que par exemple : « Si les lois de la nature existaient avant le Big Bang et l’ont dirigé dès son premier instant, où étaient-elles ? » (chap. 2) ; « Si la nature n’a aucun but, comment se fait-il que vous en ayez vous ? » (chap. 5), etc.
19« L’avenir de la science » constitue le dernier chapitre. Sheldrake y développe les principaux éléments de sa vision du futur des sciences au pluriel. La fragmentation de « la » science a donné naissance à nombre de disciplines et de spécialisations, avec pour corollaire le fait que « le spécialiste [devient] quelqu’un qui en sait de plus en plus sur de moins en moins de choses. » (p. 516) Par ailleurs, la tendance à dissimuler les dissensions, que l’auteur identifie comme corrélat de la recherche d’autorité scientifique, prévaudrait autant dans les sciences dites dures que dans les sciences sociales. Pour Sheldrake, et a contrario des résultats de nombreux travaux de science studies sur la valorisation de la controverse et du doute par les chercheurs, le désaccord et le débat seraient pour la science « une menace. Le besoin de préserver son autorité pousse à dissimuler les dissensions [3]. » (p. 522) Elle la pousserait également à dissimuler la subjectivité et les intérêts de ses chercheurs quelle que soit leur discipline.
20Faisant de même fi de tout un corpus de travaux sur le mouvement de professionnalisation des sciences au XXe siècle ainsi que sur l’incommensurabilité des divers régimes de production scientifique au cours de l’histoire (Pestre 2003), Sheldrake agite l’image du « chercheur indépendant », prenant l’exemple de Charles Darwin au XIXe siècle, et des recherches originales, et indépendantes de tout financement extérieur qu’il aurait menées, pour remarquer : « Ce genre d’indépendance et de liberté est rare aujourd’hui. Les comités de financement déterminent ce qui pourra arriver en recherche. Le pouvoir dans ces comités est concentré dans les mains de scientifiques âgés bien placés politiquement, de membres de l’administration et de représentants des grandes entreprises » (p. 529) L’auteur rappelle alors que « plus les sources de financement sont diverses, plus la liberté des sciences est grande. Il existe heureusement toute une gamme de sources non gouvernementales, allant des entreprises aux fondations caritatives, et certaines financent déjà des domaines qui restent tabous aux yeux des instances officielles. » (p. 534)
21Les sciences futures, telles que l’auteur les imagine, ont à apprendre des autres cultures d’Asie, d’Afrique, de leurs croyances, de leurs médecines, ainsi que des religions elles-mêmes, en cessant de les regarder de haut. Car selon lui « ce programme matérialiste [s’il] a été libérateur et enthousiasmant, il est aujourd’hui déprimant. Ceux qui y adhérent nient leur propre existence. » Sheldrake en arrive, dans cette perspective, à conclure que « nous aurons plus de chances de faire de nouvelles découvertes si nous nous aventurons hors des sentiers battus de la recherche conventionnelle, si nous posons des questions qui ont été interdites par les dogmes et les tabous. » (p. 546) Et d’ajouter : « Se rendre compte que les sciences ne connaissent pas toutes les réponses fondamentales conduit à l’humilité plutôt qu’à l’arrogance, à l’ouverture d’esprit plutôt qu’au dogmatisme. » (p. 547) – conclusion dans laquelle, paradoxalement, de nombreux chercheurs contemporains se reconnaîtraient aisément sans aucune doute.
Conclusion : regard critique sur l’ouvrage en lien avec les contributions des science studies
22Il s’agit certes d’un livre grand public, dont un certain nombre d’affirmations ne manqueront pas de faire sourire (ou grincer des dents) le praticien des science studies de par leur caractère naïf et généralisateur, dénotant à plusieurs reprises une indifférence forte vis-à-vis de ce qui fait sens et « compte » pour la majorité des chercheurs contemporains. Sheldrake ne fait pas toutefois l’économie de rappeler quelques courants/auteurs essentiels de la littérature épistémologique, historique et sociologique des sciences, notamment La Structure des révolutions scientifiques de Thomas Kuhn. Il se sent proche également de la critique de Bruno Latour développée dans La Science en action (1989) concernant « la façon dont les chercheurs construisent des réseaux de soutien, utilisent leurs ressources et leurs résultats pour accroître leur pouvoir et leur influence, luttent pour obtenir subventions, prestige et reconnaissance. » (p. 50-51).
23Sheldrake partage en effet avec les approches de sociologie des sciences l’objectif de remettre en question la fameuse distinction entre connaissance et croyance, qui attribue aux scientifiques les connaissances assurées tandis que « le peuple » n’aurait lui que de simples croyances (distinction réaffirmée par un certain nombre de scientifiques eux-mêmes). À la différence toutefois de ces approches, et comme on aura pu le constater notamment dans les derniers chapitres, il s’attache moins à décrire la diversité contextuelle des manières de produire des connaissances dans la pluralité des mondes scientifiques, mais à une tendance, qu’il ressent comme transversale chez les acteurs et modes d’organisation contemporains de la recherche, à affirmer l’autorité et la dominance du savoir scientifique en dépit de l’existence de tensions, de doutes et plus généralement, d’autres manières de savoir. Chez Sheldrake, la critique du monde scientifique est ainsi ancrée dans une généralité du propos sur la « Science » qui ne manquera pas de trancher avec les résultats de décennies de travaux en histoire, sociologie et philosophie des sciences -et de questionner chemin faisant aussi sur la stratégie individuelle de démarcation et de valorisation qui s’articule à une telle critique radicale et généralisante des modes de faire des ‘collègues’.
24Il n’y a donc pas convergence entre la contribution de Sheldrake et celle des Science studies, dont on peut penser que les apports critiques visent plutôt à dessiner les contours d’un domaine scientifique parallèle, autonome et en dialogue avec la pratique scientifique contemporaine, plutôt qu’à en promouvoir une vision alternative de l’intérieur, c’est-à-dire paradoxalement adossée aux mêmes canons de validation et lieux de notoriété scientifique. Rendre compte de l’ouvrage de Sheldrake recèle à n’en pas douter une pluralité de niveaux d’intérêts et de lectures pour les Science studies, notamment celui de les mener à ré-interroger, par un jeu de miroir, leur propre positionnement critique vis-à-vis des sciences ainsi que la nécessité peut-être d’en baliser plus explicitement les frontières.
Bibliographie
- Hawking S. (1980). Is the End in Sight for Theoretical Physics? Cambridge: Cambridge University Press.
- Hawking S., Mlodinow L. (2011). Y a-t-il un grand architecte dans l’univers ? Paris : Odile Jacob.
- Kuhn T. (2008 [1962]). La structure des révolutions scientifiques. Paris : Flammarion.
- Latour B., Fabbri P. (1977). La rhétorique de la science. Pouvoir et devoir dans un article de science exacte, Actes de la recherche en sciences sociales, (13), 81-96.
- Pestre D. (2003). Regimes of Knowledge Production in Society: Towards a More Political and Social Reading. Minerva, 41 (3), 245-61.
- Smolin L. (2006). Rien ne va plus en physique ! L’échec de la théorie des cordes. Paris : Dunod.