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Article de revue

La construction du métier d’ingénieur des Mines à l’épreuve du terrain pendant la Révolution et l’Empire

Pages 47 à 66

Notes

  • [1]
    Sur l’évolution de l’administration des Mines en Europe à la fin du XVIIIe siècle, voir Donata Brianta, Europa mineraria. Circolazione delle élites e trasferimento tecnologico (secoli XVIII-XIX), Milan, Franco Angeli, 2007 ; Hartmut Schleiff, Peter Konečný (ed.), Staat, Bergbau und Bergakademie : Montanexperten im 18. und frühen 19. Jahrhundert, Stuttgart, Franz Steiner, 2013.
  • [2]
    À partir des années 1740, les bureaux du Contrôle général se préoccupent de l’exploitation des ressources minérales, un département des mines se met en place au cours des années 1770. Puis, en 1781, quatre inspecteurs des Mines sont nommés ; deux années plus tard une intendance des Mines est censée coordonner leurs travaux. Elle disparaît après quatre années de fonctionnement et l’administration des mines reste fantomatique jusqu’à la création en juillet 1794 de l’Agence des mines. Le 22 octobre 1795, elle est remplacée par le Conseil des mines. En 1810, le statut du corps impérial des Mines est fixé par la loi du 18 novembre. Sur cette question, on verra notamment Anne-Françoise Garçon, Bruno Belhoste (dir.), Les ingénieurs des Mines : cultures, pouvoirs, pratiques. Colloque des 7 et 8 octobre 2010, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2012.
  • [3]
    Sur l’impact du caméralisme, on verra notamment Pascale Laborier et al. (éd.), Les sciences camérales. Activités pratiques et histoire des dispositifs publics, Paris, PUF, 2011.
  • [4]
    Valeria Pansini, « Pour une histoire concrète du “talent” : les sélections méritocratiques et le coup d’œil du topographe », AHRF, n° 354, 2008, p. 5-27.
  • [5]
    L’académie minière de Freiberg apparaît alors comme le modèle d’une exploitation rationnelle des ressources où les États européens envoient leurs émissaires pour prendre exemple. Donata Brianta, « Stato moderno, corpi tecnici e academie minerarie : influenze e scambi nell’Europa dei Lumi e in età napoleonica », dans Luigi Blanco (dir.), Amministrazione, formazione e professione : gli ingegneri in Italia tra Sette e Ottecento, Bologna, Il Mulino, 2000, p. 397-538 ; Idem, « Education and Training in the Mining Industry, 1750-1860 : European Models and the Italian Case », Annals of Science, 57, 2000, p. 267-300.
  • [6]
    L’usage de cette expression s’est généralisé dans la langue française au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, en particulier après la publication de l’ouvrage éponyme publié par Gabriel Jars (Voyages métallurgiques ou recherches et observations sur les mines) dont les trois volumes ont paru entre 1774 et 1781. Comme l’écrit Daniel Roche, avec les Voyages métallurgiques, « on voit mobilité administrative et mobilité savante se joindre et fonder une pratique raisonnée de la technique établie sur l’expérience et la comparaison physico-chimiques », Daniel Roche, Humeurs vagabondes. De la circulation des hommes et de l’utilité des voyages, Paris, Fayard, 2003, p. 307.
  • [7]
    Gilles Bertrand, Pierre Serna (dir.), La République en voyage, 1770-1830, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013.
  • [8]
    Isabelle Laboulais, La Maison des mines. La genèse révolutionnaire d’un corps d’ingénieurs civils (1794-1814), Rennes, Presses universitaires de Rennes, Coll. Carnot, 2012.
  • [9]
    Marie-Noëlle Bourguet, « Voyage, enquête, statistique : les Polytechniciens et la construction de l’espace au début XIXe siècle », dans Bruno Belhoste, Amy Dahan Dalmedico, Dominique Pestre, Antoine Picon (dir.), La France des X. Deux siècles d’histoire, Paris, Économica, 1995, p. 215-230.
  • [10]
    AN, F 14 2727/2, Dossier de carrière d’Hassenfratz, instruction du 25 pluviôse an III/13 février 1795.
  • [11]
    Ibidem, 2714/2, Dossier de carrière de Blavier, instruction du 2e sans-culottide de l’an II.
  • [12]
    Cathy Hecker et Isabelle Laboulais, « Le journal épistolaire du voyage d’Alexandre Brongniart en Provence et dans les Alpes (1795) », Sources, n° 6, juin 2015, p. 101-108 (introduction), p. 109-158 (édition critique).
  • [13]
    Bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle, ms 2351/4, Lettre du 20 germinal an III/9 avril 1795, fol. 4.
  • [14]
    Alix Cooper, « From the Alps to Egypt (and back again) : Dolomieu, Scientific Voyaging, and the Construction of the Field in the Eighteenth-Century Natural History », dans Crosbie Smith and John Agar (dir.), Making Space for Science. Territorial Themes in the Shaping of Knowledge, Londres, Macmillan Press, 1998, p. 51.
  • [15]
    AN, F14 2116/2, Dossier de carrière d’A. Brongniart.
  • [16]
    Isabelle Laboulais, « Notre métier est de décrire. L’écriture des sciences en question pendant la mission dans les Alpes de l’ingénieur des Mines Alexandre Brongniart (1795) », Études sur le 18e siècle, n° 42, 2015, p. 97-111.
  • [17]
    AN, F14 1301 B, « Compte rendu par les membres du corps des Mines », le 22 frimaire an VIII/13 décembre 1799.
  • [18]
    AN, F14 1301 A, « Compte rendu par le Conseil des mines au ministre de l’Intérieur, en exécution de l’arrêté du Directoire exécutif du 19 frimaire an IV », le 7 thermidor an IV/25 juillet 1796.
  • [19]
    AN, F14 1301 B, « Compte rendu par les membres du corps des Mines », le 22 frimaire an VIII/13 décembre 1799.
  • [20]
    Jakob Vogel, « Reform unter staatlicher Aufsicht. Wirtschafts- und Sozialgeschichte des deutschen Bergbaus und des Salzwesens in der frühen Industrialisierung », dans Wolfhard Weber (éd.), Geschichte des deutschen Bergbaus, vol. 2 : Salze, Erze, Kohlen. Der Aufbruch in die Moderne im 18. und frühen 19. Jahrhundert, Münster, Aschendorff, p. 11-110, p. 39-42.
  • [21]
    AN, F14 1302 A, « Rapport du Conseil des mines au ministre de l’Intérieur sur le mouvement de l’inspection », 25 germinal an VI/14 avril 1798.
  • [22]
    Daniel Nordman, Marie-Vic Ozouf-Marignier, Atlas de la Révolution française, t. 4, Le territoire (1), Paris, Éditions de l’EHESS, 1989, p. 61.
  • [23]
    AN, F14 2734/1, Dossier de carrière d’Alexandre Miché, « Instruction du 28 floréal an X/18 mai 1802 ».
  • [24]
    Loi du 21 avril 1810, Titre IX, art. 88 et 89.
  • [25]
    « Instruction pour MM. les ingénieurs en chef des Mines », Journal des mines, juin 1815, vol. XXXVII, n° 222, p. 439.
  • [26]
    Ce document est censé contenir un « état des procès-verbaux dressés sur accidens ou contravensions ; un état des blessés, estropiés ou morts par suite d’accidens ; un état des affaires en instance devant les tribunaux ; un état des jugemens rendus par les tribunaux ; un état des affaires en instance devant les conseils de préfecture […] ; un état des jugemens et amendes prononcées par les conseils de préfecture en matière de tourbières », Ibidem, p. 459.
  • [27]
    AN, F14 2712/2, Dossier de carrière de D’Aubuisson de Voisins, lettre du 21 juillet 1814.
  • [28]
    AN, F17 2734/1, Dossier de carrière d’Alexandre Miché, « Instruction du 28 floréal an X/18 mai 1802 ».
  • [29]
    Sur la notion de contiguïté et sur ses conséquences dans la façon d’appréhender l’espace, on se reportera aux analyses essentielles développées par Daniel Nordman dans la conclusion de Frontières de France. De l’espace au territoire XVIe-XIXe siècle, Paris, Gallimard, 1998, p. 511-527.
  • [30]
    Jacques Marie Muthuon, « Rapport sur les Forges conquis en Espagne, dans les Pyrénées occidentales », Journal des Mines, 1794/5, vol. 2, n° 11, p. 1-18.
  • [31]
    Ibidem, p. 2.
  • [32]
    « Suite de la description des mines de mercure du Palatinat et du Pays de Deux-Ponts », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 2, n° 7, p. 3-27.
  • [33]
    « Description des mines de mercure dans le Palatinat et le comté de Deux-Ponts », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 1, n° 6, p. 69-78.
  • [34]
    Jean Godefroy Schreiber, « Rapport sur les Mines situés dans le grand baillage de Trarbach », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 2, n° 11, p. 43-68.
  • [35]
    Idem, « Rapport sur les mines de Mercure de Landsberg près de Obermoschel », Journal des Mines, 1795/1796, vol. 1, n° 17, p. 33-51.
  • [36]
    Note du rédacteur de l’article Jean Baptiste Beurard, « Rapport sur quelques Mines des Mercure situées dans les nouveaux départements de la rive gauche du Rhin », Journal des Mines, 1797/1798, vol.7, n° 41, p. 321-360, p. 328.
  • [37]
    Ibidem.
  • [38]
    Sur son parcours, voyez son dossier personnel aux AN, F14 2740/1, Dossier de carrière de Héron de Villefosse. La carrière de Villefosse et son séjour dans le Harz sont présentés dans la thèse récente de Hans-Geog Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse und sein Wirken in der europäischen Montanregion Harz. Montanistisches erkenntnisstreben im Spannungsfeld napoleonischer Expansionspolitik, (Montanregion Harz, vol. 12), Bochum, Bergbaumuseum, 2015.
  • [39]
    Hans-Georg Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse, op. cit., p. 69.
  • [40]
    Ibidem, p. 104-107.
  • [41]
    AN, F14 2740/1, Dossier de carrière de Héron de Villefosse, notice du Conseil des mines du 19 août 1808.
  • [42]
    Pour le contexte des conflits avec Daru voir Hans-Georg Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse, op. cit., p. 89-91.
  • [43]
    Antoine-Marie Héron de Villefosse, De la Richesse minérale, considérations sur les mines, usines et salines des différents États, et particulièrement du royaume de Westphalie, pris pour terme de comparaison, Paris, Levrault, 1810.
  • [44]
    L’Atlas de la richesse minérale. Recueil des faits géognostiques et des faits industriels, Paris, Imprimerie royale, 1819.
  • [45]
    Philippe Minard, La fortune du colbertisme. État et industrie dans la France des Lumières, Paris, Fayard, 1998, p. 37 et p. 44.
  • [46]
    Marie-Noëlle Bourguet, « La collecte du monde : voyage et histoire naturelle (fin XVIIe siècle-début XIXe siècle) », dans Claude Blanckaert et al. (dir.), Le Muséum au premier siècle de son histoire, Paris, Éditions du Muséum, 1997, p. 136-198.
  • [47]
    Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine : L’École des Mines de Saint-Étienne au XIXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004.
  • [48]
    François Antoine, Jean-Pierre Jessenne, Annie Jourdan et Hervé Leuwers (dir.), L’Empire napoléonien. Une expérience européenne ?, Paris, Armand Colin, 2014.

1 En France, comme dans nombreux autres pays européens [1], le métier d’ingénieur des Mines est façonné au tournant du XVIIIe et du XIXsiècle [2], c’est-à-dire à un moment où le projet de concilier la connaissance des ressources minérales et le contrôle des exploitations s’impose dans l’action publique [3]. Se préoccuper des mines consiste alors à s’informer et à disposer des moyens de contrôle pour organiser une meilleure exploitation des richesses du sol. Au cours de la deuxième moitié du XVIIIsiècle, le Contrôle général s’inspire de pratiques déjà courantes en Saxe et dans l’Empire des Habsbourg et finance trois types de voyage. Le voyage d’étude permet à des jeunes gens censés compléter leur formation théorique d’observer le fonctionnement des principales mines en activité, et de construire leur « coup d’œil » [4]. Les voyages d’enquête, motivés par la recherche de l’innovation technique, conduisent les ingénieurs des Mines dans les zones les plus réputées d’Europe en matière d’exploitations minières et deviennent des vecteurs importants de transferts technologiques. C’est dans ce cadre que se constitue le voyage à Freiberg dont Donata Brianta a bien étudié la diffusion en Europe [5]. Enfin, les voyages d’inspection conduisent les premiers inspecteurs des Mines à contrôler le fonctionnement des grandes exploitations du royaume mais restent encore assez rares. Ces trois types de « voyages métallurgiques » [6] se perpétuent pendant la période révolutionnaire et l’Empire, mais les nouveaux cadres qui sont assignés au travail de terrain des ingénieurs ainsi que les bouleversements du contexte politique européen modifient cette typologie et transforment les savoirs qui en résultent [7].

Les voyages d’enquête des ingénieurs des Mines mis au service d’un inventaire des ressources minérales de la République (1794-1796)

2 Dès la création de l’Agence des mines, en juillet 1794, ses membres sont censés voyager sur le territoire de la République pendant huit mois de l’année (du 1er ventôse au 30 vendémiaire) et ne passer à Paris que les quatre mois d’hiver (du 1er brumaire au 30 pluviôse) [8]. Chaque ingénieur est placé sous l’autorité d’un inspecteur et tous deux se voient confier l’un des huit arrondissements définis spécifiquement pour l’administration des mines. Il s’agit d’entités présentées comme naturelles qui sont délimitées, de manière classique, par des cours d’eau, des chaînes de montagnes ou par le littoral. Chaque arrondissement est doté d’un « lieu central » (Giromagny, Roanne, Gap, Rodez, Tarbes, Limoges, Rennes, Châlons). Dès la fin de l’an IV (juillet 1796), ce système est réformé en raison des coûts trop élevés qu’imposent les voyages.

3 Si brève que soit cette période, elle modifie pourtant les finalités assignées aux voyages d’enquête : il ne s’agit plus, comme sous l’Ancien Régime, de se rendre à l’étranger pour observer les modalités d’exploitation des ressources mais de parcourir le territoire français pour identifier son potentiel minier [9]. Pour cela, les ingénieurs des Mines font des « tournées » qui leur permettent de collecter des informations jugées essentielles par l’administration. À cette occasion, les ingénieurs prennent connaissance de tout ou partie de l’arrondissement minéralogique, ils reçoivent avant leur départ une instruction qui énumère les passages obligés, les sites à visiter. Ces documents sont établis par les membres de l’Agence des mines en fonction des données centralisées dans les bureaux et des lacunes que ces dossiers font apparaître. Les instructions établissent la liste des exploitations à visiter – et par là-même déterminent l’itinéraire suivi par l’ingénieur à partir de Paris –, elles énumèrent les préconisations à transmettre aux directeurs des travaux, pour que les ouvriers soient en sûreté. Le travail de terrain effectué lors des tournées implique également d’encourager les habitants à exploiter des mines récemment découvertes. Certaines instructions imposent à cet égard des missions impératives qui viennent s’ajouter aux tâches que recouvre l’inspection d’une région minéralogique. Ainsi, le 25 pluviôse an III, l’Agence des mines charge Jean-Henri Hassenfratz à la fois de la région minéralogique n° 1 et de se rendre dans les salines du Jura pour « y activer la fabrication du sulfate de soude » [10]. Si l’on s’en tient aux instructions, la visite des sites exploités ou à exploiter tient une place importante dans les tournées des ingénieurs des Mines. C’est le cas pour Jean Blavier qui est chargé à la fin de l’an II de se rendre aux mines de charbon d’Anzin. Alors que les ingénieurs sont tenus de transmettre tous les dix jours à l’Agence des mines les résultats de leurs observations et les améliorations qu’ils ont recommandées aux exploitants, Blavier doit envoyer les résultats de son travail de terrain à l’Agence des mines tous les deux jours [11], délai qui suggère l’urgence associée à la valorisation économique de ces ressources.

4 Si techniques qu’elles soient, les tournées sont également consacrées à l’identification des ressources du sol français. C’est pourquoi les ingénieurs des Mines doivent, à cette occasion, rassembler toutes les substances fossiles qui existent dans leur arrondissement et en envoyer la collection à Paris. Leurs observations sont censées nourrir le tableau des substances minérales de la République. L’objectif de ce projet est précisément fixé dès l’an III : il s’agit d’inventorier les ressources minérales et de les hiérarchiser en fonction de leurs conditions d’exploitation. Cette initiative est guidée par la volonté de dénombrer les richesses, de manière à dresser un bilan de la situation économique. À partir de thermidor an IV (juillet-août 1796), elle trouve un écho dans le Journal des mines, avec la publication d’une grande notice des richesses minérales de la République française par ordre de département. Cependant, dans les lettres rédigées par les ingénieurs des Mines au cours de leurs tournées, ils déplorent souvent le manque de temps dont ils disposent pour s’attacher à l’étude minéralogique de leur arrondissement, sauf s’ils font le choix de s’écarter des consignes contenues dans leurs instructions.

5 C’est le cas d’Alexandre Brongniart. Cet ancien élève de l’École royale des mines est nommé ingénieur en 1794 et immédiatement chargé d’une tournée minéralogique dans la Manche, le Calvados et la Seine-inférieure. En germinal an III (mars 1795), à 25 ans, il se voit confier la région minéralogique n° 3. Alexandre Brongniart quitte rapidement Paris. Après avoir traversé la Bourgogne début avril, il parcourt le Rhône, l’Isère, la Drôme, le Vaucluse, les Bouches-du- Rhône, le Var, les Alpes-de-Haute-Provence, puis à la fin du mois d’août, il rejoint Dieudonné Sylvain Guy Tancrède Gratet de Dolomieu à Genève. Le célèbre minéralogiste fait alors partie des savants qui ont trouvé en quelque sorte un refuge au sein de l’Agence des mines créée à la fin de l’an II. Comme René Just Haüy, Dolomieu n’est pas membre du corps, mais il est supposé mettre ses compétences de minéralogiste au service de l’Agence des mines. Pendant un mois, il parcourt le Mont-Blanc avec Brongniart. Après quoi celui-ci se rend sur le site de la mine d’argent d’Allemont avant de regagner Paris en novembre 1795. Au cours de ce périple, Brongniart écrit très régulièrement à sa famille et à l’Agence des mines [12].

6 Cette double correspondance permet de découvrir tous les aspects de la mission de terrain d’un ingénieur. Elle montre notamment qu’à cette période, on peut être membre de l’inspection des Mines et passer plusieurs journées consécutives loin de toute exploitation. Pour Brongniart, l’essentiel du temps se passe à faire « jouer nos marteaux sur toutes les pierres que nous rencontrions » [13], c’est-à-dire à traquer des filons, identifier des ressources, plutôt qu’à inspecter les exploitations qui se trouvent dans l’arrondissement. C’est à l’évidence un voyage minéralogique – et non pas métallurgique – qu’effectue Brongniart à cette époque. Dolomieu l’encourage d’ailleurs dans cette voie et lui suggère de ne pas prendre les demandes des administrateurs trop au sérieux, de voyager en respectant son « propre style » [14]. De telles pratiques concourent à l’émergence d’un nouveau modèle de travail de terrain : les courses. Alors que les tournées sont organisées en fonction de la localisation des principales exploitations, les courses désignent des missions de courte durée effectuées dans une partie de l’arrondissement et le plus souvent consacrées à des observations minéralogiques, parfois liées à l’élaboration des collections minéralogiques. Avant d’entreprendre avec Dolomieu sa course minéralogique dans le Mont-Blanc, Brongniart sollicite l’autorisation de l’Agence des mines, elle lui est accordée avec toutefois quelques recommandations qui en disent long sur la distinction qu’opère l’administration entre le voyage de l’ingénieur des Mines et celui du minéralogiste :

7

« Il faut sans doute une méthode pour classer les objets que l’on rencontre, mais notre métier est de décrire, parce que c’est le moyen le plus sûr d’être toujours utile, au lieu que les systèmes les plus beaux se trouvent par la suite effacés par de plus beaux encore » [15].

8 L’Agence des mines oppose deux manières bien différentes d’aborder le travail de terrain [16]. À ses yeux, l’exigence d’intelligibilité – associée ici de manière péjorative à l’esprit de système – ne fait pas partie des missions que l’administration assigne aux ingénieurs des Mines, même lorsqu’elle leur demande de dresser le tableau des substances minérales de la République. La description que doit produire l’ingénieur des Mines est censée contribuer à dresser l’inventaire des ressources, outil indispensable pour faire face à l’urgence économique. Elle ne doit en aucun cas proposer une analyse de la configuration des terrains.

9 À la frustration exprimée par certains ingénieurs, s’ajoute le sentiment d’incompréhension qu’ils ressentent lorsque leurs demandes de remboursement ne sont pas suivies d’effets, comme si, depuis Paris, les membres de l’Agence des mines ne pouvaient pas percevoir les conditions de voyage à la fois éprouvantes et épuisantes imposées aux hommes envoyés sur le terrain. Les sommes allouées aux ingénieurs pour leurs frais de voyage évoluent au fil du temps mais, si l’on en croit les lettres que les ingénieurs envoient à l’Agence des mines au cours de leurs tournées, elles ne suffisent pas à vivre convenablement sur le terrain. En dépit des restrictions successivement appliquées aux frais de voyage, au début de l’an V, le ministère de l’Intérieur les juge trop élevés si bien que la plupart des ingénieurs et des inspecteurs sont contraints de rester à Paris, mettant en péril les missions de l’inspection des Mines [17]. Le stationnement est alors imaginé pour assurer la présence des ingénieurs dans les départements français tout en dispensant l’administration de leur verser des frais de voyage.

La mise en place du stationnement et la codification des voyages d’inspection (1796-1814)

10 À partir du 16 messidor an IV/4 juillet 1796, le ministre de l’Intérieur a le pouvoir de désigner des ingénieurs stationnaires dans les différents arrondissements minéralogiques « où le bien du service l’exigera » [18]. En 1799, voici comment le Conseil des mines – qui depuis l’an IV a remplacé l’Agence des mines – rend compte a posteriori de cette proposition :

11

« Dès l’an IV, le Conseil avait proposé le stationnement d’une partie des ingénieurs dans des arrondissements minéralogiques comme une mesure moins dispendieuse que des voyages rapides et au moins aussi propre à faire bien connaître l’état de ces contrées ; elle devait d’ailleurs faciliter la surveillance des exploitations et la propagation des lumières acquises. Ces arrondissements sont tels qu’ils peuvent être visités peu à peu sans beaucoup de frais et complettement connus en peu d’années. Les ingénieurs stationnaires ont la facilité de transmettre aux chefs d’établissement leurs idées d’amélioration par des communications fréquentes qui établissent entre eux des liaisons et la confiance indispensable pour faire admettre les innovations utiles. Cette mesure a été adoptée par le gouvernement et on a eu journellement à se louer de ses effets quoique les circonstances n’ayant permis son exécution que très incomplètement et que la pénurie de finances publiques ait laissé les ingénieurs stationnaires dans un dénuement déplorable » [19].

12 Cette disposition installe l’ingénieur dans une posture d’intermédiaire entre les acteurs locaux et l’administration, et tend même à faire de lui un acteur de la vie locale. Elle s’inspire de dispositifs similaires mis en œuvre dans d’autres États européens à la fin du XVIIIe siècle afin d’établir des liens entre l’administration centrale et les différentes régions minières. En Prusse, par exemple, dès les années 1780, l’administration crée un réseau de plusieurs « Oberbergämter », système conceptualisé à partir de la tradition germanique des « Bergämter » qui, de taille et de compétences parfois très différents, étaient en charge de l’administration territoriale des mines [20].

13 Quoique jugé pertinent, le système du stationnement arrêté en l’an IV (16 messidor an IV/4 juillet 1796) n’est pas mis en œuvre en raison du coût qu’il aurait représenté. Faute de pouvoir l’étendre à l’ensemble du territoire, un nouveau rapport suggère, en germinal an VI, d’affecter les ingénieurs des Mines dans « des points de la République qui exigent une urgente surveillance ». Parmi ces points, se trouve par exemple le territoire de Nassau-Saarburck, « les départements réunis de la ci-devant Belgique, ou encore la partie ci-devant espagnole de Saint-Domingue, mais aussi des villes comme Douai, Giromagny, Allemont » [21]. Il s’agit de la conséquence de la décision prise le 20 brumaire an IV/11 novembre 1795 d’appliquer à tous les territoires réunis à la République la loi de 1791 relative aux mines – c’est-à-dire que « les mines et les minières, tant métalliques que non-métalliques, ainsi que les bitumes, charbons de terre et pyrites, sont à la disposition de la Nation, en ce sens seulement que des substances ne pourront être exploitées que de son consentement et sous sa surveillance » –. En germinal an VI, le Conseil des mines charge ainsi l’inspecteur Nicolas Baillet des départements réunis à la République et l’ingénieur Joseph Champeaux est placé en station à Liège. Il s’agit de déployer les hommes de l’inspection des mines là où les ressources semblent les plus prometteuses pour la République ; l’urgence n’est plus d’identifier des gîtes de minerais mais de s’assurer du bon fonctionnement des exploitations en activité. Cette logique explique que des unités disparates tant au niveau de leur taille que de leur situation géographique soient imaginées et que les zones minières – y compris dans les nouveaux départements – soient privilégiées. Cette décision contribue à accentuer la fonction incitative que les ingénieurs des Mines sont supposés incarner localement aux yeux des exploitants.

14 À cette période, les membres du Conseil des mines sont certes affectés dans des arrondissements minéralogiques mais leur résidence principale reste parisienne. Ainsi, en prévoyant que les inspecteurs passent la moitié de l’année sur le terrain, que les ingénieurs y restent toute l’année et les élèves cinq mois, cette organisation contraint à prévoir un budget de 50 220 francs pour financer les voyages. C’est afin de réduire cette dépense qu’en 1802, le ministère de l’Intérieur décide de généraliser le stationnement.

15 L’application de ce dispositif permet de revenir à une couverture plus homogène du territoire [22]. Bien que les dix-huit arrondissements délimités en 1802 ne couvrent pas le territoire de manière exhaustive, le maillage départemental sert de trame à ce nouveau découpage : chaque arrondissement minéralogique réunit plusieurs départements. Sous l’effet de cette réforme, les ingénieurs des Mines sont peu à peu présentés localement comme des experts et comme les agents chargés de la surveillance des mines. Ils interviennent dans l’administration des demandes de concessions, comme dans les dossiers qui concernent l’exploitation du minerai de fer, c’est sur l’avis de l’ingénieur des Mines que le préfet transmet le sien au ministre de l’Intérieur ; de même l’ingénieur des Mines est censé vérifier le plan de la surface de la concession avant qu’il ne soit transmis au préfet. Dès lors, les instructions sont standardisées et non plus établies en fonction des spécificités d’une destination. Elles reprennent d’ailleurs l’article X de l’arrêté du 18 messidor an II et énumèrent les missions des ingénieurs des Mines : visiter les mines exploitées, donner des conseils aux directeurs des travaux, s’assurer de la sûreté des travaux qui y sont effectués. On demande également à chacun d’entre eux de « tracer sur des cartes les découvertes qu’il fera, de décrire les procédés employés dans les mines, et dans les manufactures dépendantes des mines, de tenir le journal des lieux qu’il parcourra » [23]. Les instructions ne sont plus établies en fonction des lacunes à combler ou des incertitudes à vérifier mais elles énumèrent les tâches à accomplir, comme s’il fallait, à l’image de la statistique des préfets, standardiser les informations collectées sur le terrain et transmises au Conseil des mines (état des produits, état des mines, etc.). L’insertion dans les dispositifs de l’administration est d’ailleurs rappelée dès le début des instructions ; elles précisent qu’en arrivant sur le lieu de sa station, chaque ingénieur doit se présenter au préfet et lui remettre son instruction. Ce texte se termine par l’injonction de « ne point quitter l’arrondissement où il est envoyé, sans des ordres du Conseil ». Cette nouvelle obligation prive l’ingénieur des Mines de son statut de voyageur.

16 À partir de 1810, chaque département français est pourvu d’un ingénieur en station. Le décret du 18 novembre qui organise le corps impérial des Mines renforce les fonctions de contrôle assignées aux ingénieurs des Mines. Il maintient le principe du stationnement mais instaure dix divisions territoriales relatives au service des mines et prévoit de répartir les ingénieurs entre elles. L’ancrage des ingénieurs dans leurs arrondissements respectifs détermine désormais l’exercice de leur métier, au point que les instructions n’ont plus lieu d’être puisque les ingénieurs ne voyagent plus. Ils sont en station et leurs missions sont définies par le décret. D’ailleurs, ce décret prévoit de leur verser des frais de fournitures et de loyers de bureaux, des frais pouvant aller de 400 à 1 000 francs. Il stipule enfin dans les « dispositions générales » qu’un inventaire sera effectué de tous les plans, papiers, cartes et instruments conservés dans les bureaux des ingénieurs. Le lieu de travail change mais les gestes évoluent aussi.

17 Les ingénieurs désormais doivent se déplacer régulièrement pour inspecter les travaux et s’assurer que les concessionnaires remplissent les conditions fixées par la loi, ils doivent également s’assurer que les redevances fixes et proportionnelles sont régulièrement acquittées. Les missions des ingénieurs des Mines changent alors en partie de nature ; une large part de leur temps est désormais accaparée par la correspondance (avec la direction des mines, avec le préfet, avec les exploitants, avec les autres ingénieurs des mines) et le travail administratif, plus que par l’encouragement de la production ; ils se consacrent à la police des mines et deviennent, à ce titre, des interlocuteurs ancrés dans leur arrondissement ou leur station où ils effectuent des inspections de manière régulière. En 1810, les ingénieurs des Mines font partie, ainsi que « les hommes notables et expérimentés dans le fait des mines et de leurs travaux », des experts chargés de transmettre un avis au Procureur impérial en cas de litige [24].

18 En 1814, la France connaît un nouveau découpage minéralogique : le territoire est divisé en cinq inspections, elles-mêmes subdivisées en dix-huit arrondissements et trente-six stations. La responsabilité de chacune de ces circonscriptions correspond à des grades spécifiques. Cette division rigide et hiérarchisée du territoire suggère bien la volonté de mettre en œuvre une police des mines plus stricte. Comme le prévoyait le décret du 18 novembre 1810, une instruction est signée par le directeur général des mines le 1er septembre 1814, afin d'« achever le plus promptement possible l’organisation du système administratif de la Direction générale des mines » [25]. Il apparaît de manière très évidente à la lecture de ce texte que ce « système administratif » est désormais organisé de manière décentralisée, autour des arrondissements et des stations. Le directeur général des Mines s’attache en effet à préciser l’organisation des bureaux qui se trouveront dans chaque nouvelle station. C’est là que le corps des Mines conserve l’ensemble des textes législatifs et des instructions, les cahiers des charges des concessions, les procès-verbaux, l’état des exploitations, etc.

19 La dimension systématique de cette organisation transparaît dans le classement unique imposé à tous les bureaux : les pièces doivent être rangées par département, puis en suivant la nature des exploitations. Chaque mine devra disposer d’un dossier propre organisé, lui aussi, de manière uniforme. Les papiers de ces bureaux semblent dotés du statut d’archives puisque deux registres doivent permettre de consigner les entrées et les sorties de documents (plans, mémoires, etc.). L’instruction ne donne aucune précision quant au nombre de commis censés être employés dans ces bureaux ; en revanche le texte précise qu’il serait souhaitable que ces derniers soient formés à la levée des plans. Cette instruction vise à imposer aux exploitations un contrôle plus étroit et rappelle aux ingénieurs leurs obligations à cet égard, notamment l’établissement de l’état des usines de chaque département. En plus des états de produits que les ingénieurs doivent transmettre à la direction générale des mines, ils doivent dresser des « états relatifs à la surveillance de police » [26]. Les inventaires réalisés en 1816 dans les bureaux des ingénieurs des Mines installés en province témoignent de la mise en œuvre rapide et générale des décisions de 1814.

20 Alors qu’au début de la Révolution, il semblait primordial d’éviter les travers du localisme en limitant à deux années l’affectation d’un ingénieur au sein d’un même arrondissement, l’ancrage local est de plus en plus marqué sous l’Empire, et parfois même revendiqué, notamment lorsqu’un ingénieur demande à être affecté dans un arrondissement particulier. C’est le cas notamment de Jean-François d’Aubuisson de Voisins qui, en 1814, à un moment où les affectations des ingénieurs dans les arrondissements sont remises en cause, demande à rester en poste dans l’arrondissement de Toulouse où il a ses propriétés et qui constitue sa « patrie », puis il ajoute : « Je ne crois pas que ces liens qui m’attachent tant à ce pays aient porté le moindre obstacle à l’activité que vous pouvez désirer de vos ingénieurs » [27]. La résidence contribue à installer l’ingénieur des Mines dans la société locale. Cet ancrage favorise sa connaissance des lieux et lui donne accès aux savoirs vernaculaires. Le stationnement apparaît donc comme un dispositif qui permet de saisir la médiation propre aux ingénieurs des Mines entre les sociétés locales et l’État.

21 Dans ce contexte profondément transformé, les courses, communes entre 1794 et 1796, ne concernent plus que les élèves des Mines et quelques ingénieurs au profil spécifique. Tous les élèves effectuent pendant la Révolution et l’Empire des courses minéralogiques. Elles occupent une partie importante des voyages de formation. Celles organisées en Savoie, à partir de l’école pratique de Pesay, permettent même de constituer progressivement les collections de la nouvelle École des mines. Mais une fois nommés ingénieurs, seuls quelques individus au profil particulier se voient confier des courses par le Conseil des mines. Cordier, à son retour d’Égypte, parvient à échapper au stationnement. Il réside le plus souvent à Paris et lorsqu’il est contraint de quitter la ville, il s’efforce toujours d’obtenir l’autorisation de réaliser une course. C’est le cas au cours de l’été 1802 pendant lequel il parcourt le Sud-Ouest de la France, l’Espagne et le Portugal. Il effectue ainsi un grand nombre de missions extraordinaires jusqu’à ce qu’il soit promu inspecteur divisionnaire en 1810 et que sa résidence soit définitivement fixée à Paris d’où il peut poursuivre sa carrière de savant.

22 À partir de 1802, et a fortiori de 1810, le travail de terrain des ingénieurs en station est presque totalement happé par la police des mines. Leurs déplacements s’organisent en fonction des inspections que les ingénieurs doivent programmer avec régularité puisque chacun d’eux est censé visiter chaque année les mines de son arrondissement. Les inspections donnent lieu à la rédaction des classiques procès-verbaux de visite qui ont été codifiés dès les années 1780 et dont la forme est reprise dans les ordonnances qui régissent le fonctionnement du corps impérial des Mines. Les courses ne subsistent plus que pour permettre aux ingénieurs d'« acquérir les connaissances minéralogiques de son arrondissement, pour pouvoir coopérer à la statistique de ce même arrondissement et pour s’occuper de la collection des objets qui doivent entrer dans la confection des cabinets du Conseil et de l’École des mines, ainsi que de la Préfecture du département » [28]. C’est dans ce cadre que certains ingénieurs des Mines se lancent dans la rédaction d’une statistique minéralogique d’un des départements dont ils ont la charge, et que d’autres, à la fin des années 1820, dressent la carte géologique de leur département. Les inspections que réalise tous les ans chaque ingénieur lui permettent d’acquérir une connaissance plus approfondie de son arrondissement. Les effets de la résidence sur l’appréhension de l’espace parcouru ne sont donc pas anodins ; ce rapport de l’ingénieur des Mines à « son » territoire distingue son « coup d’œil » de celui des membres de l’administration centrale. Si ceux-là disposent d’un regard surplombant sur l’espace national qui leur permet de resituer les ressources des arrondissements minéralogiques dans les dispositifs qui se déploient à l’échelle du territoire, les ingénieurs des Mines, dès lors qu’ils sont stationnés et cantonnés aux voyages d’inspection, semblent contraints de regarder de près l’espace qui leur est confié ce qui complique, voire empêche leur perception de la contiguïté [29].

23 À partir du Directoire, le Conseil de Mines a continuellement adapté sa manière d’investir le territoire et progressivement renoncé à la constitution d’unités jugées cohérentes du point de vue de la minéralogie pour se mettre, en 1810, au diapason du maillage départemental. Au cours de cette même période, l’expansion territoriale a offert aux ingénieurs des Mines un contexte favorable pour réinvestir les voyages d’enquête et rassembler des connaissances sur les modalités d’exploitation des mines conduites hors des anciens territoires français, en particulier dans l’espace germanique.

L’expansion territoriale et les enjeux des voyages d’enquête des ingénieurs des Mines français en Europe

24 Au cours de l’an II, avant même la création de l’Agence des mines, la Commission des armes et des poudres envoie des « commissaires » dans les territoires conquis pour y observer les sites qui paraissaient particulièrement intéressants d’un point de vue industriel. L’année suivante, les premiers numéros du Journal des Mines publient les rapports rédigés par ces hommes au cours des voyages effectués dans les territoires nouvellement acquis à la France. En 1795, le Journal des Mines publie ainsi le « Rapport sur les Forges conquises en Espagne, dans les Pyrénées occidentales » avec un bilan sur la production de fer dans la région de Navarre et dans le pays basque espagnol. L’auteur, Jacques Marie Muthuon, avait été chargé de cette mission par la Commission des armes seulement quinze jours après la victoire française aux Aldudes, le 18 juin 1794 [30]. Son voyage s’est déroulé si peu de temps après les combats dans la région que l’auteur note : « Je n’ai pas eu la satisfaction de voir travailler une seule forge du pays conquis ; la crainte qu’inspira l’entrée des Français, fit émigrer une partie des habitans [sic], et notamment les ferriers » [31]. La même année, paraît un article qui s’appuie sur les rapports rédigés par Jean Godefroy Schreiber sur les mines de mercure dans le Palatinat et le comté de Deux-Ponts « que la valeur des armées françaises a mis au pouvoir de la République » [32]. Profitant de ses compétences linguistiques (Schreiber était d’origine saxonne), le Comité de salut public l’envoie après l’occupation de la région par l’Armée du Rhin pour y « surveiller l’exploitation » notamment des mines du Potzberg et du Donnersberg [33]. Schreiber séjourne quelques mois plus tard de nouveau dans les territoires qui, en 1798, constituent le département du Mont-Tonnerre, puis en mai dans la vallée de la Moselle, dans le Hunsrück pour y observer des mines de cuivre dans le grand baillage de Trarbach [34], enfin, en septembre, il poursuit son enquête dans la région de Meisenheim, connue pour les mines de mercure du Landsberg [35]. Les observations qu’il a collectées au cours de chacun de ses voyages sont publiées dans le Journal des mines. Le périodique ne compte pas seulement sur les travaux produits par les ingénieurs des Mines, il mobilise aussi les résultats des enquêtes initiées par le Comité de salut public en l’an II et publie les rapports rédigés par des tiers. En pluviôse VI (janvier/février 1798), le mémoire que Jean-Baptiste Beurard, professeur d’allemand et traducteur, consacre à « quelques mines des mercure situées dans les nouveaux départements de la rive gauche du Rhin » est publié. Dans une note de bas de page, le rédacteur, Coquebert de Montbret, insiste sur le souci particulier du périodique de « faire connaître la valeur et l’importance des mines situées dans les pays conquis, aux époques où nous avons cru que cette connaissance pourrait être utile aux citoyens chargés des grands intérêts de la République, et où il convenait de fixer leur attention sur un genre de richesses territoriales bien dignes d’entrer dans les calculs de la politique » [36]. Puis il donne le bilan provisoire de cette entreprise :

25

« Lorsqu’en commençant ce Journal, le 1er vendémiaire de l’an 3, nous donnions un aperçu des richesses minérales connues à cette époque sur le territoire de la République, afin de déterminer, disions-nous, le point d’où le peuple français était parti, et faire mieux apprécier l’espace que ses nouvelles destinées lui auraient quelque jour fait franchir, qui nous eût dit qu’avant trois ans révolus, la victoire aurait pris soin d’ajouter à ce catalogue les riches mines de houille de la Belgique, du pays de Liège et de celui de Nassau Saarbruck [sic] ; les forges importantes du duché de Luxembourg, & c. ; les mines de mercure du Palatinat et du duché de Deux-Ponts, les plus considérables de l’Europe après celles d’Ydria et d’Almaden ; l’inépuisable mine de calamine du duché de Limbourg, celles de plomb de Vedrin près de Namur, et de Pezai en Savoie, dont la dernière mérite le nom de mine d’argent, par la quantité de ce métal qu’on en extrait ; et une multitude d’autres mines et usines qui, quoique d’un intérêt moins marqué, concourent à grossir la somme des tributs que la France retirera désormais du règne minéral » [37].

26 Lorsqu’en ventôse an X (février 1802), le Conseil des mines intègre les nouveaux départements créés au-delà des frontières dites « naturelles » aux arrondissements minéralogiques, il ne fait qu’entériner la nouvelle géographie de la France minière préfigurée par le Journal des Mines. La répartition des ingénieurs est révélatrice des enjeux miniers que représentent les différents territoires : l’arrondissement qui réunit les départements de la Sarre, du Mont-Tonnerre, de la Moselle, de Rhin-et-Moselle, de la Meurthe et du Bas-Rhin mobilise en 1802 trois hommes : Jean-Baptiste Duhamel, Augustin-Henri de Bonnard et Antoine-Marie Héron de Villefosse.

27 Cette affectation permet aux trois ingénieurs de faire une brillante carrière au sein du corps. Le parcours de Héron de Villefosse le montre bien. Nommé en 1801 ingénieur surnuméraire des Mines et stationné en Moselle, il devient l’année suivante ingénieur ordinaire. Dès 1803, il est nommé « commissaire du gouvernement français sur les mines et usines du Hartz, dans le pays de Hanovre ». Pendant toutes ces années, Héron de Villefosse parcourt les régions au centre de ce « territoire » que les ingénieurs de Mines français nomment communément « l’Allemagne » sans que cela corresponde à une définition géographique ou politique claire [38]. Accompagné par Beurard, il est d’abord envoyé en résidence dans le chef-lieu de la région minière du Harz anglais, Clausthal, avec la mission d’y collecter « tous les renseignements relatifs à la nature et à la disposition de ces mines » pour adresser au Conseil des mines « un tableau exact de leurs produits mois par mois » et pour envoyer « des suites des minerais provenant des diverses mines exploitées et une suite présentant le tableau général de la géologie du pays et du gisement des minerais » [39]. Ses instructions reprennent les caractéristiques des voyages d’enquête de l’an II mais leur portée est particulièrement stratégique. Après la défaite prussienne en 1807, Héron de Villefosse est promu « Ingénieur en chef » au grand quartier général de la Grande armée. En janvier 1807, il part vers Varsovie puis vers Berlin afin d’y rencontrer les responsables du service des Mines prussiens. Il parcourt les territoires prussiens occupés par les troupes françaises ainsi que les territoires incorporés au Royaume de Westphalie créé par Napoléon après le traité de Tilsit en août 1807. De ces voyages d’enquête résultent non seulement une première carte de la région située entre le Rhin et l’Elbe qui constitue le territoire du Royaume, mais aussi un long rapport sur « l’état actuel des mines en Allemagne » qu’il adresse d’abord au gouvernement français puis, qu’il enrichit avec des suggestions sur l’organisation de l’administration de Mines du Royaume de Westphalie avant de l’envoyer au roi Jérôme [40]. Ses recommandations sont formulées en étroite concertation avec les spécialistes de la région de sorte qu’on peut vraiment parler d’une co-construction des savoirs entre l’ingénieur français et ses homologues allemands. La position singulière qu’occupe Héron de Villefosse lui permet de proposer au Conseil des mines, en 1808, un voyage d’enquête en Silésie et en Hongrie afin d’approfondir ses connaissances sur ces importantes régions minières de l’Empire autrichien [41]. Le séjour de Héron de Villefosse dans l’Empire autrichien lui permet d’échapper aux tensions avec l’intendant-général Pierre Daru, chargé de l’administration des anciens territoires de la Prusse non annexés à la Westphalie, qui soutient une politique plus directive à l’égard de la population que l’ingénieur des Mines [42].

28 Profitant de la période de paix relative qui règne entre les deux empires avant la campagne de 1809, Héron de Villefosse élabore son projet de faire paraître l’ensemble des savoirs tirés de ses voyages, à l’image des Voyages métallurgiques de Gabriel Jars publiés entre 1774 et 1781. Le premier tome De la Richesse minérale paraît en 1810 [43]. Consacré aux voyages menés dans les mines du territoire du royaume de la Westphalie, il propose de donner un tableau général des connaissances sur les mines en offrant une étude comparée et systématique de ce territoire avec les pratiques observées dans d’autres états et régions. Le contexte politique interrompt la publication. Puis, en 1819, paraît l’édition complète avec un atlas contenant « des faits géognostiques et des faits industriels » des territoires de l’ancien royaume de Westphalie [44]. En choisissant de publier une partie importante des savoirs réunis par Héron de Villefosse au cours de ses voyages d’enquête, le corps royal des Mines de la Restauration valorise l’importance des expériences « étrangères » et se met en scène publiquement comme l’héritier d’une période qui a contribué à forger sa réputation auprès de ses homologues européens.

29    

30 L’apparition du stationnement en 1802, la codification des inspections et la généralisation des tournées en 1810 transforment le rapport des ingénieurs des Mines au terrain. Ces changements conduisent à un glissement progressif du « modèle ambulatoire » vers le « modèle territorial ». Proposée par Philippe Minard pour rendre compte du rapport au terrain mis en œuvre par l’inspection des manufactures au XVIIIsiècle, cette grille de lecture semble pouvoir s’appliquer au corps des Mines. Dans le cadre du « modèle ambulatoire », les inspecteurs n’ont pas de « résidence fixe ni d’ancrage territorial », ils sont envoyés d’une zone à l’autre pour effectuer des inspections au gré des besoins [45]. Ce modèle, à l’œuvre en 1794 lorsque l’Agence des mines est créée, paraît, à certains égards, compatible avec d’autres attendus du voyage savant pratiqué par les minéralogistes depuis le milieu du XVIIIsiècle [46]. Le « modèle territorial » est quant à lui fondé sur le découpage de circonscriptions clairement délimitées, pas trop étendues, à l’intérieur desquelles les opérations de contrôle sont placées sous la responsabilité d’inspecteurs qui y résident en permanence. Cette grille de lecture est opératoire pour les ingénieurs des Mines qui, jusqu’en 1796, sont ambulants et qui, par la suite, et de manière plus stricte à partir de 1802, sont au contraire en station dans un territoire spécifique. Chaque ingénieur des Mines se voit désormais attaché à un arrondissement minéralogique : la résidence lui donne un ancrage stable et fait de lui un acteur de la vie locale, et non plus un voyageur. Le passage du modèle ambulatoire au modèle territorial a modifié les pratiques de circulation : les courses minéralogiques sont devenues rares chez les ingénieurs des Mines, au contraire, les tournées d’inspection se sont généralisées au gré de la mise en place du stationnement. Mais, face à cette normalisation des pratiques de terrain constitutives du métier d’ingénieur des Mines, certains territoires conquis par la France sont devenus des terrains privilégiés pour des voyages d’enquête menés par quelques ingénieurs au parcours exceptionnel. Comme le montre celui d’Héron de Villefosse, les voyages d’enquête menés dans les territoires « étrangers » ont contribué à intégrer un savoir international à la science des mines mobilisée par l’administration française des Mines. L’ouverture en 1816 de l’École des Mines de Saint-Étienne, créée d’après le modèle de celle de Geislautern, offre un bon exemple des réformes issues de la mobilité des ingénieurs [47]. Observer les différentes formes d’acquisition et de circulation des savoirs liées aux voyages des ingénieurs de Mines permet d’intégrer l’histoire de ce corps structuré pendant la Révolution dans une histoire européenne et connectée [48] où l’urgence économique et les reconfigurations territoriales ont contribué à forger une identité professionnelle.


Mots-clés éditeurs : enquête, voyage., ingénieur, ressources, mines

Mise en ligne 26/10/2016

Notes

  • [1]
    Sur l’évolution de l’administration des Mines en Europe à la fin du XVIIIe siècle, voir Donata Brianta, Europa mineraria. Circolazione delle élites e trasferimento tecnologico (secoli XVIII-XIX), Milan, Franco Angeli, 2007 ; Hartmut Schleiff, Peter Konečný (ed.), Staat, Bergbau und Bergakademie : Montanexperten im 18. und frühen 19. Jahrhundert, Stuttgart, Franz Steiner, 2013.
  • [2]
    À partir des années 1740, les bureaux du Contrôle général se préoccupent de l’exploitation des ressources minérales, un département des mines se met en place au cours des années 1770. Puis, en 1781, quatre inspecteurs des Mines sont nommés ; deux années plus tard une intendance des Mines est censée coordonner leurs travaux. Elle disparaît après quatre années de fonctionnement et l’administration des mines reste fantomatique jusqu’à la création en juillet 1794 de l’Agence des mines. Le 22 octobre 1795, elle est remplacée par le Conseil des mines. En 1810, le statut du corps impérial des Mines est fixé par la loi du 18 novembre. Sur cette question, on verra notamment Anne-Françoise Garçon, Bruno Belhoste (dir.), Les ingénieurs des Mines : cultures, pouvoirs, pratiques. Colloque des 7 et 8 octobre 2010, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2012.
  • [3]
    Sur l’impact du caméralisme, on verra notamment Pascale Laborier et al. (éd.), Les sciences camérales. Activités pratiques et histoire des dispositifs publics, Paris, PUF, 2011.
  • [4]
    Valeria Pansini, « Pour une histoire concrète du “talent” : les sélections méritocratiques et le coup d’œil du topographe », AHRF, n° 354, 2008, p. 5-27.
  • [5]
    L’académie minière de Freiberg apparaît alors comme le modèle d’une exploitation rationnelle des ressources où les États européens envoient leurs émissaires pour prendre exemple. Donata Brianta, « Stato moderno, corpi tecnici e academie minerarie : influenze e scambi nell’Europa dei Lumi e in età napoleonica », dans Luigi Blanco (dir.), Amministrazione, formazione e professione : gli ingegneri in Italia tra Sette e Ottecento, Bologna, Il Mulino, 2000, p. 397-538 ; Idem, « Education and Training in the Mining Industry, 1750-1860 : European Models and the Italian Case », Annals of Science, 57, 2000, p. 267-300.
  • [6]
    L’usage de cette expression s’est généralisé dans la langue française au cours de la deuxième moitié du XVIIIe siècle, en particulier après la publication de l’ouvrage éponyme publié par Gabriel Jars (Voyages métallurgiques ou recherches et observations sur les mines) dont les trois volumes ont paru entre 1774 et 1781. Comme l’écrit Daniel Roche, avec les Voyages métallurgiques, « on voit mobilité administrative et mobilité savante se joindre et fonder une pratique raisonnée de la technique établie sur l’expérience et la comparaison physico-chimiques », Daniel Roche, Humeurs vagabondes. De la circulation des hommes et de l’utilité des voyages, Paris, Fayard, 2003, p. 307.
  • [7]
    Gilles Bertrand, Pierre Serna (dir.), La République en voyage, 1770-1830, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2013.
  • [8]
    Isabelle Laboulais, La Maison des mines. La genèse révolutionnaire d’un corps d’ingénieurs civils (1794-1814), Rennes, Presses universitaires de Rennes, Coll. Carnot, 2012.
  • [9]
    Marie-Noëlle Bourguet, « Voyage, enquête, statistique : les Polytechniciens et la construction de l’espace au début XIXe siècle », dans Bruno Belhoste, Amy Dahan Dalmedico, Dominique Pestre, Antoine Picon (dir.), La France des X. Deux siècles d’histoire, Paris, Économica, 1995, p. 215-230.
  • [10]
    AN, F 14 2727/2, Dossier de carrière d’Hassenfratz, instruction du 25 pluviôse an III/13 février 1795.
  • [11]
    Ibidem, 2714/2, Dossier de carrière de Blavier, instruction du 2e sans-culottide de l’an II.
  • [12]
    Cathy Hecker et Isabelle Laboulais, « Le journal épistolaire du voyage d’Alexandre Brongniart en Provence et dans les Alpes (1795) », Sources, n° 6, juin 2015, p. 101-108 (introduction), p. 109-158 (édition critique).
  • [13]
    Bibliothèque du Muséum d’histoire naturelle, ms 2351/4, Lettre du 20 germinal an III/9 avril 1795, fol. 4.
  • [14]
    Alix Cooper, « From the Alps to Egypt (and back again) : Dolomieu, Scientific Voyaging, and the Construction of the Field in the Eighteenth-Century Natural History », dans Crosbie Smith and John Agar (dir.), Making Space for Science. Territorial Themes in the Shaping of Knowledge, Londres, Macmillan Press, 1998, p. 51.
  • [15]
    AN, F14 2116/2, Dossier de carrière d’A. Brongniart.
  • [16]
    Isabelle Laboulais, « Notre métier est de décrire. L’écriture des sciences en question pendant la mission dans les Alpes de l’ingénieur des Mines Alexandre Brongniart (1795) », Études sur le 18e siècle, n° 42, 2015, p. 97-111.
  • [17]
    AN, F14 1301 B, « Compte rendu par les membres du corps des Mines », le 22 frimaire an VIII/13 décembre 1799.
  • [18]
    AN, F14 1301 A, « Compte rendu par le Conseil des mines au ministre de l’Intérieur, en exécution de l’arrêté du Directoire exécutif du 19 frimaire an IV », le 7 thermidor an IV/25 juillet 1796.
  • [19]
    AN, F14 1301 B, « Compte rendu par les membres du corps des Mines », le 22 frimaire an VIII/13 décembre 1799.
  • [20]
    Jakob Vogel, « Reform unter staatlicher Aufsicht. Wirtschafts- und Sozialgeschichte des deutschen Bergbaus und des Salzwesens in der frühen Industrialisierung », dans Wolfhard Weber (éd.), Geschichte des deutschen Bergbaus, vol. 2 : Salze, Erze, Kohlen. Der Aufbruch in die Moderne im 18. und frühen 19. Jahrhundert, Münster, Aschendorff, p. 11-110, p. 39-42.
  • [21]
    AN, F14 1302 A, « Rapport du Conseil des mines au ministre de l’Intérieur sur le mouvement de l’inspection », 25 germinal an VI/14 avril 1798.
  • [22]
    Daniel Nordman, Marie-Vic Ozouf-Marignier, Atlas de la Révolution française, t. 4, Le territoire (1), Paris, Éditions de l’EHESS, 1989, p. 61.
  • [23]
    AN, F14 2734/1, Dossier de carrière d’Alexandre Miché, « Instruction du 28 floréal an X/18 mai 1802 ».
  • [24]
    Loi du 21 avril 1810, Titre IX, art. 88 et 89.
  • [25]
    « Instruction pour MM. les ingénieurs en chef des Mines », Journal des mines, juin 1815, vol. XXXVII, n° 222, p. 439.
  • [26]
    Ce document est censé contenir un « état des procès-verbaux dressés sur accidens ou contravensions ; un état des blessés, estropiés ou morts par suite d’accidens ; un état des affaires en instance devant les tribunaux ; un état des jugemens rendus par les tribunaux ; un état des affaires en instance devant les conseils de préfecture […] ; un état des jugemens et amendes prononcées par les conseils de préfecture en matière de tourbières », Ibidem, p. 459.
  • [27]
    AN, F14 2712/2, Dossier de carrière de D’Aubuisson de Voisins, lettre du 21 juillet 1814.
  • [28]
    AN, F17 2734/1, Dossier de carrière d’Alexandre Miché, « Instruction du 28 floréal an X/18 mai 1802 ».
  • [29]
    Sur la notion de contiguïté et sur ses conséquences dans la façon d’appréhender l’espace, on se reportera aux analyses essentielles développées par Daniel Nordman dans la conclusion de Frontières de France. De l’espace au territoire XVIe-XIXe siècle, Paris, Gallimard, 1998, p. 511-527.
  • [30]
    Jacques Marie Muthuon, « Rapport sur les Forges conquis en Espagne, dans les Pyrénées occidentales », Journal des Mines, 1794/5, vol. 2, n° 11, p. 1-18.
  • [31]
    Ibidem, p. 2.
  • [32]
    « Suite de la description des mines de mercure du Palatinat et du Pays de Deux-Ponts », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 2, n° 7, p. 3-27.
  • [33]
    « Description des mines de mercure dans le Palatinat et le comté de Deux-Ponts », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 1, n° 6, p. 69-78.
  • [34]
    Jean Godefroy Schreiber, « Rapport sur les Mines situés dans le grand baillage de Trarbach », Journal des Mines, 1794/1795, vol. 2, n° 11, p. 43-68.
  • [35]
    Idem, « Rapport sur les mines de Mercure de Landsberg près de Obermoschel », Journal des Mines, 1795/1796, vol. 1, n° 17, p. 33-51.
  • [36]
    Note du rédacteur de l’article Jean Baptiste Beurard, « Rapport sur quelques Mines des Mercure situées dans les nouveaux départements de la rive gauche du Rhin », Journal des Mines, 1797/1798, vol.7, n° 41, p. 321-360, p. 328.
  • [37]
    Ibidem.
  • [38]
    Sur son parcours, voyez son dossier personnel aux AN, F14 2740/1, Dossier de carrière de Héron de Villefosse. La carrière de Villefosse et son séjour dans le Harz sont présentés dans la thèse récente de Hans-Geog Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse und sein Wirken in der europäischen Montanregion Harz. Montanistisches erkenntnisstreben im Spannungsfeld napoleonischer Expansionspolitik, (Montanregion Harz, vol. 12), Bochum, Bergbaumuseum, 2015.
  • [39]
    Hans-Georg Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse, op. cit., p. 69.
  • [40]
    Ibidem, p. 104-107.
  • [41]
    AN, F14 2740/1, Dossier de carrière de Héron de Villefosse, notice du Conseil des mines du 19 août 1808.
  • [42]
    Pour le contexte des conflits avec Daru voir Hans-Georg Dettmer, Der Französische Bergingenieur Héron de Villefosse, op. cit., p. 89-91.
  • [43]
    Antoine-Marie Héron de Villefosse, De la Richesse minérale, considérations sur les mines, usines et salines des différents États, et particulièrement du royaume de Westphalie, pris pour terme de comparaison, Paris, Levrault, 1810.
  • [44]
    L’Atlas de la richesse minérale. Recueil des faits géognostiques et des faits industriels, Paris, Imprimerie royale, 1819.
  • [45]
    Philippe Minard, La fortune du colbertisme. État et industrie dans la France des Lumières, Paris, Fayard, 1998, p. 37 et p. 44.
  • [46]
    Marie-Noëlle Bourguet, « La collecte du monde : voyage et histoire naturelle (fin XVIIe siècle-début XIXe siècle) », dans Claude Blanckaert et al. (dir.), Le Muséum au premier siècle de son histoire, Paris, Éditions du Muséum, 1997, p. 136-198.
  • [47]
    Anne-Françoise Garçon, Entre l’État et l’usine : L’École des Mines de Saint-Étienne au XIXe siècle, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2004.
  • [48]
    François Antoine, Jean-Pierre Jessenne, Annie Jourdan et Hervé Leuwers (dir.), L’Empire napoléonien. Une expérience européenne ?, Paris, Armand Colin, 2014.
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