Couverture de ADH_138

Article de revue

Introduction : pour un dialogue entre démographie historique et histoire sociale

Pages 7 à 20

Notes

  • [1]
    On trouve quelques mentions des réalités démographiques dans les thèses « classiques » d’histoire sociale comme celles de Rolande Trempé (1970) ou d’Yves Lequin (1977). Mais il est frappant de constater que, même attachée à dépeindre le « quotidien » ou l’histoire « ordinaire » des hommes et des femmes (Vigna, 2012), l’histoire ouvrière ait si peu abordé la question.
  • [2]
    On peut trouver chez Halbwachs, comme plus tard chez Bourdieu et Darbel, l’idée que le groupe ou la classe d’appartenance joue un rôle structurant, notamment dans la transmission de valeurs, mais ces travaux n’ont guère débouché sur des investigations empiriques.
  • [3]
    Nous avons suggéré, par souci de simplicité, de réserver la notion de « classe sociale » aux situations de forte polarité / conflictualité et de forte conscience collective, pour privilégier celle moins connotée et plus ajustable de « groupe social », en particulier lorsque les différenciations internes (les « fractions de classe » dans le vocabulaire de Pierre Bourdieu) sont mises au centre de l’analyse ; la notion de « statut socio-économique » a été jugée plus appropriée à des divisions objectivistes comme le niveau de revenu.
  • [4]
    Dans l’article présenté dans ce volume, les individus ou les ménages ne sont pas suivis d’un recensement à l’autre, tout se passe comme s’il s’agissait d’individus totalement différents. Des projets en cours visent à remédier à cette limite en reliant les personnes de dix ans en dix ans. D’autres encore tentent d’unifier recensements décennaux et enregistrement des événements vitaux dans l’état civil, voir ainsi le projet LIFE-M (Longitudinal, Intergenerational Family Electronic Micro-Database) : https://sites.lsa.umich.edu/life-m/ (consulté le 20/12/2019).
  • [5]
    On pense par exemple aux fameux Huttérites, dont la position au cœur des modèles standards de fécondité a pour pendant le peu de réflexion sur l’histoire, la structure et la position de ce groupe.
  • [6]
    Voir à cet égard la manière dont Jack London (1903, rééd. 1999) – dont le ton compassionnel est teinté de malthusianisme et d’eugénisme – aborde le sujet à propos des bas-fonds de l’East End.
English version

1Un lit trop fécond, car lieu d’incontrôle. Des fratries débordantes, excédant les ressources financières du ménage, les dimensions du foyer, les capacités éducatives des parents. Des naissances rythmées par les aléas de l’économie ou de l’emploi ouvrier, ou subordonnées aux exigences du patrimoine. Des esprits trop frustes pour anticiper l’avenir mais suffisamment calculateurs pour engendrer à dessein des mendiants ou ce qu’il faut d’« à charge » à déclarer pour rafler le maximum de subsides publics… Ces différents clichés qui trouvent leurs racines entre la fin du xviiie et la fin du xixe siècle s’additionnent parfois, se contredisent souvent, mais pèsent toujours sur les représentations ordinaires de la fécondité des catégories modestes.

2Depuis Malthus au moins, qu’elle valorise ou condamne la restriction des naissances, la démographie a largement contribué à la propagation de tels stéréotypes. En témoigne ainsi, pour la France, le motif récurrent de la « courbe en U » ou en « J inversé » (Desplanques, 1985 ; Dupâquier, 1995), reliant fécondité et milieu social, et que d’aucuns supposent si intangible qu’ils en recherchent la trace dans les données empiriques même lorsqu’elle n’apparaît pas spontanément (par exemple Ekert-Jaffé et al., 2002). Pourtant, la stabilité de ce motif dans le temps et l’espace est discutable : la comparaison, via une méthodologie identique, de contextes géographiques divers met en évidence la grande variabilité des relations entre fécondité et groupes sociaux (Dribe, Oris et Pozzi, 2014) et l’idée, souvent avancée, rarement testée correctement, d’une plus forte fécondité de certains groupes ne résiste pas toujours à l’analyse (Dribe et al., 2017).

3Quelle que soit l’adéquation de cette représentation des écarts de fécondité avec les données, le fait est qu’elle entretient le sens commun sans dire grand chose des logiques sociales susceptibles d’expliquer les situations de surfécondité relative. Les grands lignages aristocratiques et les classes moyennes en quête d’ascension sociale seraient-elles les seules catégories dont la fécondité soit associée à des normes morales, des pratiques conscientisées et des stratégies individuelles ou collectives ? Répondre à cette question par les voies du travail historique semble d’autant plus nécessaire que l’histoire sociale (en particulier ouvrière) n’a jusqu’à présent guère investi le domaine de la fécondité [1], la démographie française (démographie historique incluse) s’étant quant à elle montrée peu encline à aborder les phénomènes de population au prisme des différenciations socio-économiques. Pour des raisons tenant à la fois à son rapport distant au marxisme et au poids déterminant des paradigmes médical, physico-anthropologique et familialiste dans la constitution de la discipline [2], cette dernière a rarement fait des groupes sociaux des entités structurantes de l’analyse – ce qui, il est vrai, n’était guère facilité par une statistique publique nationale peu adaptée à l’analyse sociologique, au moins jusqu’à la création des catégories socio-professionnelles (CSP) en 1954. Si les vital statistics britanniques ont, a contrario, placé la fécondité différentielle au cœur de leur objet – à la fin du xixe siècle, les niveaux de fécondité étaient systématiquement reliés aux appartenances de classe – c’est principalement dans le cadre d’un agenda eugéniste : la compréhension proprement sociale du phénomène, noyée sous de funestes élucubrations autour des fit et des unfit, des lignées d’exception et du human waste, n’en fut qu’obscurcie. En France, comme en Grande-Bretagne, la quantité différentielle fut presque toujours pensée en lien avec la « qualité » relative : il n’est qu’à relire, par exemple, la manière dont Louis Chevalier (1958) lie concubinage ouvrier, mise au monde de bâtards et criminalité urbaine.

4La première motivation à l’origine de ce dossier des Annales de démographie historique consistait à retravailler, sur des fondements aussi exempts que possible de ces préjugés scientifiques et moraux, la question du rapport populaire à la constitution de familles et de descendances. La seconde, d’aspect plus diachronique, touchait aux dynamiques de la fécondité sur les deux derniers siècles et aux limites maintes fois soulignées (par exemple dans une livraison récente, 2016/2, de cette même revue) de la théorie de la transition démographique. Dans sa formulation conventionnelle, cette dernière présuppose une uniformisation tendancielle des comportements : un chemin unique, à la fois nécessaire et souhaitable, conduirait presque inexorablement, à travers différents mécanismes tels que la diffusion verticale des innovations techniques et des changements sociétaux, les populations vers un horizon commun. Pourtant, la convergence des comportements reproductifs que les indicateurs démographiques classiques (taux de natalité, indice synthétique de fécondité, descendance finale…), maniés de façon grossière, semblent attester, n’embrasse pas, loin s’en faut, la multiplicité des changements historiques à l’œuvre. Qui se donne la peine de scruter d’assez près les faits démographiques ne peut manquer de constater que malgré la réduction de la variance statistique, les « dénivellations » (Lepetit, 1986), qu’elles soient sociales ou spatiales, subsistent, résistent, se recréent. Dans les pratiques conjugales comme dans leurs conséquences objectivées, l’uniformisation apparente s’accompagne d’une variabilité constante.

5Pour s’affranchir du modèle transitionnel comme des idées préconçues sur la profusion des démunis, il convient de réinterroger en profondeur les sources et les outils de la démographie historique en reprenant le contact, plusieurs fois esquissé mais trop souvent interrompu (en France tout au moins), avec l’histoire sociale, la sociologie et l’anthropologie. Disons-le d’emblée : se donner comme seul objectif d’expliquer par tel ou tel paramètre la valeur prise par une variable dépendante, en l’occurrence le niveau de fécondité, ne peut plus constituer un programme de recherche véritablement pertinent. Les innombrables recherches menées en ce sens ne se sont jamais avérées concluantes et, l’auraient-elles été en termes strictement statistiques, elles manqueraient toujours l’essentiel : la façon dont les rapports sociaux et les cadres de l’expérience orientent les comportements et leur donnent sens (Oris, 2008). Certes, le chemin est parsemé de difficultés. Se mêler de structure sociale expose l’historien à de nombreuses « chausse-trappes » (Prost, 2014) et il a tôt fait de retomber dans les errements épistémologiques et méthodologiques du passé en recherchant, consciemment ou non, une « essence » des classes (populaires en particulier), avec tous les risques afférents : réification, populisme et misérabilisme (Grignon & Passeron, 1989). L’historien des phénomènes démographiques se doit d’aborder avec vigilance les nomenclatures préconstruites. Il lui faut se demander, préalablement à toute opération d’enquête, sur quel objet exact il entend se concentrer et ce que les sources qu’il a en main lui permettent de toucher : d’un côté, classe, fraction de classe, groupe social, statut socio-économique ou catégorie professionnelle (Jarrige, 2012) ; de l’autre, nombre des enfants mis au monde, nombre des enfants à domicile déclarés au moment d’un recensement ou nombre des enfants élevés (qui ne sont pas nécessairement des descendants biologiques)… C’est l’un des apports les plus précieux de la micro-histoire, de l’histoire sociale de la famille et de l’histoire du genre que d’avoir déblayé les grandes catégories conceptuelles et statistiques pour mettre au jour la contribution aux décisions individuelles de fécondité de formations sociales telles que la communauté locale, la famille et le réseau élargi de parenté, ou le métier.

6La publication de Fertility, class, and gender de Simon Szreter (1996), a marqué en cela un tournant historiographique dont l’importance est insuffisamment mesurée en France. Après avoir retracé la genèse des grandes enquêtes sur la fécondité des Britanniques à la fin du xixe siècle, l’auteur y procédait à un réexamen minutieux des données du recensement de 1911, aboutissant à une remise en cause radicale du « modèle hiérarchique » hérité de la Belle Époque. À la place de cet « artefact créé par agrégation » – modelé par l’eugénisme, durci par la théorie transitionnelle – Szreter s’attachait à confectionner, à un « niveau de résolution » beaucoup plus fin, un découpage se voulant plus conforme à la distribution des données. L’entreprise allait bien au-delà d’un simple changement de tamis statistique : elle s’appuyait sur un certain nombre d’hypothèses théoriques et de choix méthodologiques forts. Plutôt que de mesurer la simple « parité », dont des valeurs numériques similaires peuvent de toute évidence dissimuler des logiques ou des processus plus hétérogènes, Szreter plaçait au centre de l’analyse la maternité (childbearing), c’est-à-dire la mise au monde d’enfants, et surtout l’anticipation des coûts relatifs engendrés par les soins éducatifs (childrearing), en tenant compte à la fois des rapports entre générations, des opportunités économiques et des institutions collectives, politiques publiques nationales et autres mesures d’aide locales. L’analyse attribuait donc une importance essentielle à la perception, socialement située, des rôles et des responsabilités parentaux.

7Au fil de Fertility, class, and gender, la population britannique du xixe siècle n’apparaît plus comme une superposition de tranches mais comme une mosaïque de communautés locales relativement autonomes les unes par rapport aux autres dont les dynamiques reproductives dépendent à la fois des structures professionnelles, de l’offre d’emploi et des fluctuations salariales. Au niveau des ménages, les décisions procréatrices y apparaissent comme modulées par les négociations intraconjugales (un argument approfondi par Kate Fisher, 2006, dans son étude des pratiques de restriction des naissances) et par l’insertion des couples dans des « communautés de communication » (communication communities, concept développé et précisé par la suite, voir par exemple Szreter, 2015a).

8On ne saurait cependant considérer que l’approche micro-analytique résolve tous les problèmes posés par l’analyse de la fécondité différentielle ou que les modèles plus usuels de stratification, fussent-ils orientés et imparfaits, soient totalement dénués de pertinence analytique et d’utilité pratique, du moins lorsqu’ils sont maniés à bon escient. Les discussions critiques suscitées par les thèses de Szreter ont le mérite de rappeler qu’aucun modèle explicatif n’est irréprochable et d’attirer l’attention sur certains écueils. Dans un compte rendu détaillé de l’ouvrage, Charles Tilly (1996) reprochait à Szreter d’inférer des processus dynamiques à partir de données transversales. Tout en acquiesçant à la critique d’un supposé ruissellement des innovations contraceptives, il l’accusait de céder à une approche « particulariste » délaissant la recherche de régularités. Plus récemment, Geoffrey Barnes et Timothy Guinnane (2012), reprenaient avec une méthode sophistiquée de décomposition de la variance les données initiales mobilisées par Szreter et montraient que les valeurs centrales de la fécondité pour chacune des cinq classes du recensement de 1911 étaient très nettement distinctes. Ils en venaient donc à réhabiliter le « modèle hiérarchique » dans sa capacité à restituer la fécondité par classes sociales. Dans sa réponse, Simon Szreter (2015b) critique l’emploi d’un indicateur statistique unique qui oblitère la signification historique des données et confond fécondité moyenne de groupes professionnels prédéfinis et processus de changement de la taille des familles de tous les couples mariés.

9On peut retenir de ces divers débats qu’il n’y a pas de discussion possible sans un minimum d’accord initial sur les concepts (celui de « classe » n’a pas le même sens selon que l’on se situe dans un registre marxien, weberien, halbwachsien ou bourdieusien etc.) et qu’une construction théorique ne se déduit pas d’un jeu de données, pas plus que ce dernier ne l’invalide parce qu’il s’en écarte ponctuellement.

10Les contributeurs du présent dossier ont été encouragés à limiter au strict nécessaire les considérations proprement théoriques ou conceptuelles au profit d’une réflexivité sur les dispositifs empiriques et d’un ancrage de leur objet dans la réalité des lieux, des territoires, des pratiques et des corps [3]. Sans tourner le dos à la tradition de la démographie historique, dont l’apport concernant la fécondité des populations du passé est inestimable, ils ont relevé le défi et réinvesti leurs objets sous un angle social. Les textes qui en résultent constituent autant de possibles pour revisiter la question de la fécondité différentielle en s’écartant des schèmes dominants de la littérature – linéarité de la « transition démographique », caractère mécanique de la « diffusion », logique strictement adaptative des comportements. Pour cela, différentes stratégies ont été suivies : développer des approches intermédiaires qui permettent de s’extraire de l’alternative macro / micro, que ce soit en décomposant la population en différents sous-groupes (Kreager, Schröder-Butterfill, Fithry, Dewi et Rahayuningtyas) ou en étudiant plus en détail un groupe particulier (Harton, Richard, Marcoux et St-Hilaire) ; recourir à la géolocalisation fine pour analyser à nouveau frais le rôle de la proximité spatiale dans le changement des pratiques (Junkka ou Harton et al.) ou l’influence de la famille élargie sur le nombre d’enfants (Hacker et Roberts) ; se réemparer d’enquêtes existantes, qu’il s’agisse d’enquêtes anthropologiques au long cours réexaminées sous un angle neuf (Darlu) ou de jeux de données plus récents mobilisés de façon rétrospective (Bourguignon, Brée, Eggerickx et Sanderson).

11L’article de Philip Kreager, Elisabeth Schröder-Butterfill, Tengku Syawila Fithry, Vita Priantina Dewi et Dyah Rahayuningtyas plaide pour une démographie « compositionnelle » comme moyen d’échapper à une double impasse : assigner un jeu de données à une stratification préfabriquée et reconstruire une ou des sous-population(s) sur le seul critère de la fécondité mesurée. La composition dont il est question ici peut s’entendre au double sens d’agglomérat – les évolutions lues dans les indicateurs démographiques agrégés résultent des variations au sein de différents sous-groupes – et de combinaison – les sous-groupes sont imbriqués entre eux et s’influencent mutuellement. Comme l’expliquent les auteurs, prendre en compte les relations entre les différents groupes dans lequel chaque individu est inséré et impliqué aide à réconcilier tendances « macro » et observations « micro ». Il faut pour cela spécifier le plus précisément possible les sous-populations considérées (groupes sociaux ; réseaux familiaux, de parenté ou de voisinage ; cohortes de naissance ; groupes linguistiques, religieux ou ethniques ; collectifs de travail, secteurs, types et formes d’emploi, etc.) et examiner de près les relations qui les unissent. Dans l’exemple traité – trois communautés des îles de Java et de Sumatra – l’analyse au niveau micro conjuguée à l’utilisation raisonnée d’observations ethnographiques conduit à mettre en évidence le maintien de variations (variants) dans les pratiques de fécondité, analysées grâce à une décomposition fine des structures sociales locales et de leurs évolutions au cours du temps. Cela permet d’établir la façon dont la transmission de positions inégales dans la communauté contribue à maintenir des différences de fécondité entre les sous-populations.

12Une deuxième approche consiste à centrer l’étude sur un groupe social particulier pour saisir comment les relations en son sein contribuent à déterminer les choix de fécondité. Le travail de Marie-Ève Harton, Laurent Richard, Richard Marcoux et Marc St-Hilaire prend le contre-pied des habitudes héritées d’une démographie focalisée sur les groupes sociaux les plus favorisés (voir par exemple l’étude de Genève par Louis Henry, 1956) et tendant, ce faisant, à renforcer l’idée d’une transition par ruissellement, accomplie par une sorte de porosité sociale. Il s’agit non seulement de s’intéresser à un groupe plus dominé mais également d’analyser comment l’interaction entre l’appartenance au groupe et l’ancrage spatial fabrique la fécondité observée in fine. Centré sur des classes populaires urbaines – les travailleurs du cuir dans la ville de Québec en 1911 –, ce travail s’appuie sur la notion de communication communities pour analyser la diversité des pratiques à l’intérieur d’un groupe à la fois cohésif et concentré géographiquement. Grâce à la localisation très précise de chaque ménage à l’intérieur de l’espace urbain, les auteurs démontrent que les attaches familiales et la proximité spatiale de la parenté jouent un rôle important dans les stratégies de fécondité.

13La question de l’ancrage spatial des pratiques démographiques soulève elle-même d’autres difficultés, à la fois conceptuelles et analytiques. C’est ce que montre le travail de Johan Junkka sur l’évolution de la fécondité dans la région de Skellefteå, au nord de la Suède, depuis le milieu du xixe siècle. Cet article se situe dans la lignée des théories diffusionnistes mais tente d’en dépasser les limites en précisant mieux, grâce à la géolocalisation, l’articulation entre structures sociales (via le socio-economic status) et structures spatiales. La proximité spatiale étant également sociale, la diffusion des comportements de prévoyance en matière de fécondité peut autant s’interpréter comme côtoiement spatial que comme imitation de classe. Pour échapper à cette difficulté, l’article procède à une série de comparaisons complémentaires, entre des quartiers limitrophes et entre des couples résidant à proximité. Il tend à suggérer que le voisinage joue bien un rôle spécifique mais que ses effets varient dans le temps : dans la période où la fécondité baisse, la réduction de la taille de la famille est plus forte chez les couples dont les voisins ont eux-mêmes diminué leur descendance – indépendamment des facteurs socioéconomiques –, tandis qu’avant et après la période de transition il y a plus de similitude en termes de fécondité pour des couples appartenant aux mêmes groupes sociaux, même s’ils ne résident pas forcément à proximité. Les mécanismes sous-jacents sont en réalité eux-mêmes pluriels et historiquement situés, impliquant une propension à apprendre des autres (social learning) ainsi que des échanges d’informations et de connaissances (Matthys, 2013).

14Les liens entre ancrage spatial et contexte socio-historique sont également au cœur de l’article de Pierre Darlu, consacré à la transmission des comportements de fécondité entre générations. Redonnant vie à une reconstitution intégrale des généalogies d’un village du Béarn (Arthez-d’Asson) de 1652 à 1975, établie par Jean-Pierre Bocquet-Appel et Lucienne Jakobi à la fin des années 1970, ce travail s’attache à différencier les pratiques de fécondité selon la position sociale, en lien avec les pratiques successorales spécifiques au Béarn. Pour ce faire, l’article recourt à la notion « d’enfants utiles » – enfants ayant eux-mêmes mis au monde des enfants (dans le village) – afin de mieux saisir la dynamique intergénérationnelle en se centrant sur les individus qui restent dans la localité. En comparant la transmission des comportements de fécondité selon le type de propriété et d’activité, l’auteur parvient à montrer la spécificité des groupes familiaux associés à une « maison » et liés à la propriété terrienne et à l’activité agricole : on relève dans ces groupes une corrélation plus élevée entre le nombre d’« enfants utiles » des parents et celui de leurs enfants, reflet possible d’une plus forte transmission des pratiques de fécondité.

15À l’autre pôle du jeu d’échelles, le travail de David Hacker et Evan Roberts s’intéresse à l’évolution de la fécondité américaine sur près d’un siècle, en mettant l’accent sur la proximité de l’environnement familial et sur l’immigration, dans la lignée de leurs précédents travaux (Hacker & Roberts, 2017). L’étude historique de la fécondité américaine pâtit généralement de la faiblesse des sources : jusqu’au début du xxe siècle, l’enregistrement de l’état civil est d’une qualité et d’une exhaustivité inégale selon les États fédérés. Faute de mieux, c’est le recensement fédéral décennal, étudié par des techniques spécifiques de mesure de la fécondité (own child method), qui sert de base aux analyses de démographie historique. Le dépouillement intégral des recensements américains par IPUMS (Integrated public use microdata series) offre de nouvelles perspectives d’analyse comme le montre l’exploitation par Hacker et Roberts de quatre recensements – 1850, 1880, 1910 et 1930 – traités en coupe pour étudier le rôle des proximités familiales dans les pratiques de fécondité et, plus particulièrement, dans leurs évolutions au cours du temps [4]. La corésidence ou la proximité de résidence de la mère de l’époux contribue à augmenter le nombre d’enfants du couple ; c’est l’inverse lorsqu’il s’agit de la mère ou de la sœur de l’épouse, le nombre d’enfants est plus faible, ce qui suppose certainement des influences et négociations intrafamiliales différentes. Au final, l’article plaide pour une meilleure prise en considération des facteurs non-économiques dans le recul de la fécondité : les différences fortes dans la chronologie de la transition entre immigrés et natifs américains mais aussi entre différents groupes immigrés indiquent que les pratiques et perceptions culturelles jouent sans doute un rôle plus important que l’on a pu le supposer.

16Les données individuelles tirées du recensement constituent une source importante pour l’étude de la fécondité car, même si elles ne semblent pas de prime abord les mieux adaptées, elles ont l’avantage d’être d’accès relativement facile et d’offrir au regard l’ensemble de la population. C’est ce qui explique que ce type de sources soit de plus en plus fréquemment mobilisé pour analyser la fécondité dans la longue durée, comme pour l’Italie (Breschi et al., 2016) ou la Belgique (Van Bavel, 2014). Mélanie Bourguignon, Sandra Brée, Thierry Eggerickx et Jean-Paul Sanderson tirent parti des questions détaillées posées aux femmes, dans certains recensements, sur l’ensemble de leur vie féconde. Révélant les possibilités d’analyse à partir de telles sources rétrospectives, ils comparent l’évolution de la fécondité au xxe siècle en France et en Belgique. Les auteurs partent de l’hypothèse de comportements démographiques différenciés selon le niveau d’instruction des femmes, considéré comme un indicateur de leur catégorie sociale, et ils étudient leurs évolutions au cours de la transition. Dans l’ensemble les différences selon l’éducation sont relativement limitées et évoluent peu au cours de la transition.

17Nous proposons, avant de refermer cette introduction, quelques pistes complémentaires pour prolonger l’exploration des dimensions sociales des faits démographiques – sans limitation d’ailleurs aux questions de fécondité – de même que des dimensions démographiques des faits sociaux. Que l’on opte pour une approche « micro » et inductive ou que l’on prenne appui sur une définition préalable du groupe étudié ; que l’on parte de convergences démographiques observées ou d’entités sociales préexistantes (les démarches n’étant pas nécessairement exclusives les unes des autres), une chose est sûre : l’effort serait vain s’il ne visait qu’à revenir à une stratification plate, lisse, désincarnée, à une classification oublieuse des conflits et relations de pouvoir, ignorante des représentations mutuelles (notamment sous la forme « eux et nous » bien identifiée par Richard Hoggart, 1981, 2013) et des interactions individuelles ou collectives. Pour l’historien, les polarités n’existent qu’« en situation », telles qu’elles sont perçues par les acteurs sociaux et partiellement modifiées par leurs interventions, à commencer par celle (aussi limitée et relative soit-elle) qu’ils exercent sur leur propre destin. Cet horizon de travail offre l’occasion, toujours stimulante, de décloisonner approches quantitatives et approches qualitatives ; en particulier de mêler les bases de données statistiques – issues de sources classiques telles que l’état civil ou les recensements, ou d’enquêtes originales – à d’autres types de matériaux comme les enquêtes (Geerkens et al., 2019) et les productions savantes anciennes qui peuvent compacter des sommes gigantesques d’informations (pensons aux travaux de l’économiste et statisticien du xixe siècle Émile Levasseur), ainsi que les sources imprimées, fonds archivistiques et récits de vie plus proches de la pratique et de l’individu (sources médicales, sources de l’intime, sources relatives aux modes de vie privée et aux sociabilités, etc.). Multiplier ainsi les angles d’attaque pour confronter groupes théoriques, groupes sur le papier et pratiques observées, peut aider à se prémunir à la fois contre des catégorisations sclérosées et contre une induction désarmée et naïve.

18Une première direction appellerait à produire de nouvelles études fouillées sur des sous-groupes spécifiques aux comportements de fécondité marqués. Le diagramme publié dans le tome 4 de l’Histoire de la population française (Dupâquier, 1995, 296), issu des données de la Statistique Générale de la France, attire par exemple le regard sur trois catégories dont la fécondité est encore, au début du xxe siècle, très au-dessus de la moyenne : les « salariés agricoles », les « manœuvres » et les « mineurs ». À notre connaissance, personne ne s’est jamais penché de près sur la démographie des sous-populations en question, par exemple pour reprendre, au besoin en les critiquant, les hypothèses de Philippe Ariès (1971) sur le rôle du paternalisme dans le maintien d’une fécondité élevée chez les mineurs du « pays noir » (Pas-de-Calais) au xixe siècle, dispensés du « besoin de prévoir ». Si l’approche par les cadres sociaux était bienvenue, la tendance d’Ariès à réduire aux injonctions du paternalisme industriel tous les faits et gestes des ouvriers (Gacon & Jarrige, 2014) était manifeste. Comme le montre le travail sur Québec dans ce volume, il y a beaucoup à apprendre des cas minoritaires ou des situations atypiques, sans les réduire au statut de réfutations ou de résidus. Une réflexion sur les groupes à très forte fécondité, leur(s) représentation(s) dans les diffé rentes sociétés, voire leur utilisation – on pourrait presque dire instrumentalisation – par la démographie reste à mener [5].

19L’article sur l’Indonésie dans ce volume suggère qu’il y a également beaucoup à tirer d’une analyse des relations entre groupes ; groupes qu’il s’agit de penser dans un espace social multidimensionnel et non comme un empilement ou une juxtaposition d’ensembles hermétiques. Un inconvénient de la notion de communication community est d’induire une vision parcellisée du social, occultant les jeux de différenciation ou de mimétisme. Un angle d’approche peut consister à s’intéresser au regard, très chargé moralement, que les groupes portent les uns sur les autres (pour un exemple sur la question de la consommation, voir Albert & Rossigneux-Méheust, 2013), et donc à la signification et la valeur attribuées, dans la propension à « se classer en classant », à la taille de la famille et aux rôles parentaux qui vont de pair [6]. De ce point de vue, l’étude du vocabulaire utilisé, y compris vernaculaire et argotique, pour qualifier l’enfant, la parentalité, la famille ou encore la grossesse constitue une voie sans doute porteuse pour saisir les enjeux de respectabilité, pour mesurer à quel point le fait de fonder une famille, voire d’élever une famille nombreuse, peut répondre à une recherche de conformité aux valeurs du groupe d’appartenance ou de légitimation morale auprès des catégories supérieures. Les représentations ne sont, précisons-le, jamais fixes : la forte fécondité d’un groupe n’est méjugée que pour autant qu’il connaît une marginalisation sociale, économique et/ou symbolique. En tenant compte des acquis des dernières décennies en sociologie et en histoire sociale, on doit s’efforcer d’injecter dans l’analyse des lignes de différenciation – niveau d’études et surtout degré de socialisation scolaire, origine géographique, insertion et implication religieuse, « gens du privé » vs « gens du public », « ouvriers à statut » vs précaires, etc. – qui, en matière de comportements familiaux et/ou démographique peuvent s’avérer tout aussi structurantes que les appartenances macro-sociales postulées ou apparentes. On accordera aussi aux formes de parenté et aux histoires de familles un regard minutieux.

20Autre point capital, la recherche doit veiller à ne pas isoler artificiellement les choix ou pratiques de fécondité, mais au contraire à mettre en lumière leurs relations avec d’autres domaines de la pratique ou de l’existence : mariage, prévoyance individuelle et protection sociale, hygiène et santé, migration, mise en nourrice, domesticité, scolarisation, travail, gestion budgétaire ou encore épargne. Une telle attention aux pratiques dans leur intersection permettrait de s’écarter des équations abstraites liant moindre quantité et meilleure « qualité » de l’enfant pour analyser les comportements de calcul – budgets prévisionnels, estimations de coûts ou bénéfices, approches comptables des transferts sociaux, arbitrages entre travail des femmes et maternité – tels qu’ils se déploient et non tels qu’ils sont recodés par les modèles analytiques standards. On étudiera en particulier comment les inégalités économiques conditionnent les possibilités de contrôle biographique et biologique (l’accès au marché contraceptif).

21Le rôle des agents médiateurs susceptibles de peser sur les décisions et pratiques de fécondité constitue une autre voie porteuse. Ces agents incluent à la fois les différents réseaux, de sociabilité (Keim, Klärner & Bernardi, 2009) et de parenté (Hilevych, 2016), mais aussi les intermédiaires sociaux tels que les sages-femmes (Sage-Pranchère, 2014 ; Lazuka, 2017) ou encore les assistantes sociales (Zappi, 2019). Saisir la façon dont ces acteurs interviennent dans des situations et des milieux socioéconomiques différents est essentiel pour comprendre les mécanismes qui relient choix ou pratiques de fécondité et appartenances sociales.

22Toutes ces pistes ne doivent pas faire oublier l’importance d’un cadre général à même de restituer les trajectoires, individuelles comme familiales, au sein desquelles se déploie la construction du « désir d’enfant » et évoluent les manières d’être parents (Geay & Humeau, 2016). Les implications de l’approche longitudinale sont multiples puisqu’elles renvoient aux effets, souvent oubliés ou sous-estimés, de la parentalité ou des charges familiales sur les autres activités, par exemple des cycles d’engagement et de désengagement syndical ou politique.

23Il y a tout lieu de penser que les situations de fécondité élevée sont moins l’effet d’un faible contrôle de la volonté sur le corps (idée sur laquelle reposent l’argument malthusien, les thèses d’Arsène Dumont ou encore le modèle eugéniste) que d’une rationalité pratique (Zelizer, 1994) et de processus sociaux allant de la compensation affective face aux duretés de la vie à une volonté d’insertion ou de reconnaissance sociales (Schwartz, 1990). En finir avec le préjugé d’une non-civilisation et d’une irrationalité des humbles ne doit cependant pas conduire à exclure les mécanismes psycho-sociaux – fatalisme, passivité, sentiment de dépassement – susceptibles de mener certains ménages, et pas simplement les plus désaffiliés, à une perte objective de maîtrise sur les événements : à cet égard, le destin des époux Bac (condamnés par la justice, au milieu des années 1950, après avoir laissé mourir par carence de soins leur quatrième enfant), dépeint par Danièle Voldman et Annette Wieviorka (2019) pourrait constituer une sorte d’idéal-type.

Nous remercions vivement Marion Fontaine et Michel Oris pour leur relecture attentive de ce texte et leurs précieux commentaires et suggestions.

Bibliographie

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Notes

  • [1]
    On trouve quelques mentions des réalités démographiques dans les thèses « classiques » d’histoire sociale comme celles de Rolande Trempé (1970) ou d’Yves Lequin (1977). Mais il est frappant de constater que, même attachée à dépeindre le « quotidien » ou l’histoire « ordinaire » des hommes et des femmes (Vigna, 2012), l’histoire ouvrière ait si peu abordé la question.
  • [2]
    On peut trouver chez Halbwachs, comme plus tard chez Bourdieu et Darbel, l’idée que le groupe ou la classe d’appartenance joue un rôle structurant, notamment dans la transmission de valeurs, mais ces travaux n’ont guère débouché sur des investigations empiriques.
  • [3]
    Nous avons suggéré, par souci de simplicité, de réserver la notion de « classe sociale » aux situations de forte polarité / conflictualité et de forte conscience collective, pour privilégier celle moins connotée et plus ajustable de « groupe social », en particulier lorsque les différenciations internes (les « fractions de classe » dans le vocabulaire de Pierre Bourdieu) sont mises au centre de l’analyse ; la notion de « statut socio-économique » a été jugée plus appropriée à des divisions objectivistes comme le niveau de revenu.
  • [4]
    Dans l’article présenté dans ce volume, les individus ou les ménages ne sont pas suivis d’un recensement à l’autre, tout se passe comme s’il s’agissait d’individus totalement différents. Des projets en cours visent à remédier à cette limite en reliant les personnes de dix ans en dix ans. D’autres encore tentent d’unifier recensements décennaux et enregistrement des événements vitaux dans l’état civil, voir ainsi le projet LIFE-M (Longitudinal, Intergenerational Family Electronic Micro-Database) : https://sites.lsa.umich.edu/life-m/ (consulté le 20/12/2019).
  • [5]
    On pense par exemple aux fameux Huttérites, dont la position au cœur des modèles standards de fécondité a pour pendant le peu de réflexion sur l’histoire, la structure et la position de ce groupe.
  • [6]
    Voir à cet égard la manière dont Jack London (1903, rééd. 1999) – dont le ton compassionnel est teinté de malthusianisme et d’eugénisme – aborde le sujet à propos des bas-fonds de l’East End.
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