Notes
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[1]
N’ayant plus accès aux données traitées par Jean-Pierre Bocquet-Appel et Lucienne Jakobi, tous deux décédés, je n’ai pu contrôler de quelles unions il s’agissait.
1L’évolution démographique des populations rurales, du xviiie siècle à nos jours, a été largement explorée et se trouve être relativement bien documentée (voir Moulinier, 1977 ; Rudolph, 1995 ; Pécout, 2005 ; Eggerickx & Devos, 2014). Les déterminants les plus souvent invoqués pour en rendre compte sont les structures familiales, tantôt considérées comme un frein tantôt comme un accélérateur du changement, la parcellisation des terres agricoles consécutive aux modifications des règles de transmissions des biens et l’attraction des centres urbains pourvoyeurs de nouveaux emplois. Cette problématique a largement profité de nombreuses approches comparatives menées en France, en Europe (Bobinska & Goy, 1981 ; Pécout, 2005 ; Eggerickx & Devos, 2014 ; Brée et al., 2016), au Québec (Bouchard et al., 1998) ou en Asie (Fauve-Chamoux & Ochiai, 1998). Elles ont permis de démontrer comment les différences d’histoire locale, de tradition familiale et de conditions socio-économiques affectent les transitions démographiques au cours des derniers siècles.
2Cependant, la plupart de ces travaux ignorent généralement un facteur qui, pourtant, peut jouer un rôle déterminant dans l’évolution démographique : la possible transmission des comportements reproducteurs d’une génération à la suivante, que cette transmission soit de nature culturelle ou génétique, qu’elle soit consciente ou non.
3L’objet du présent article est de tester cette hypothèse en redonnant vie à une enquête datant des années 1970 et portant sur une petite communauté insérée dans l’espace rural du piémont pyrénéen, espace bien connu pour ses particularismes sociaux et culturels en matière de transmission des biens, de droit d’aînesse et de statut de la femme dans la société (Le Play, 1857, 1871 ; Bourdieu, 1972 ; Chamoux, 1984 ; Bonnain, 1996 ; Gratacos, 1987, 1998 ; Arrizabalaga, 2002a, b, 2004, 2005, 2009 ; Bonnain-Dulon, 2011).
La transmission de la fécondité
4Les premières observations sur la possibilité d’une transmission intergénérationnelle de la fécondité dans l’espèce humaine remontent, il y a plus d’un siècle, aux travaux des eugénistes. La question était alors de savoir si les couples ayant beaucoup d’enfants tendaient à avoir des enfants engendrant, à leur tour, plus d’enfants que la moyenne. Cette problématique de la fécondité différentielle préoccupait particulièrement Francis Galton (1892), fondateur de l’eugénisme, dans le contexte de l’Angleterre du xixe siècle. Pour lui, la réponse positive ne faisait pas de doute. La conséquence d’une telle transmission héréditaire était d’entraîner une baisse de la « qualité » de la population dans la mesure où les classes laborieuses, supposées de moindre qualité, étaient plus fécondes que les classes éduquées. Sur cette question des relations entre eugénisme et fécondité, on peut renvoyer à l’analyse historique de Richard A. Soloway (1990) qui place cette relation dans le contexte social, politique et religieux de la Grande-Bretagne au xixe et xxe siècles.
5En 1899, Karl Pearson, disciple de Galton, aborda également la question de la transmission de la fécondité et conclut que celle-ci existait bien, même si la corrélation entre la fécondité des parents et celle de leurs enfants restait relativement faible. Il insista cependant sur les nombreux biais et chausse-trappes dans lesquels risquait de tomber ce genre d’investigations et sur la difficulté de tirer des conclusions incontestables en raison des nombreux facteurs susceptibles d’interférer avec les résultats : l’âge au mariage, la durée de la vie reproductive, la possibilité de « restriction volontaire de la fécondité » par quelque moyen contraceptif, la difficulté d’avoir des informations non tronquées entre deux générations successives, l’éventualité d’apparentement généalogique entre les parents, les tendances séculaires aux variations de la fécondité, ou encore les modifications de l’environnement. Ces difficultés méthodologiques inhérentes à la nature des données furent réexaminées bien plus tard (Mayo et al., 1978).
6Les résultats de Pearson furent repris par le généticien Ronald Fisher en 1930. Selon les travaux de ce dernier, la régression donnant l’estimation du nombre d’enfants d’une personne à partir du nombre d’enfants de ses parents représentait moins de la moitié de la valeur 0,50 à laquelle on s’attendrait si la transmission de la fécondité était totalement génétique.
7À la suite de Fisher, les études sur ce thème de la transmission de la fécondité estimée par la corrélation familiale du nombre d’enfants se sont poursuivies jusqu’à nos jours. Les résultats fluctuent en fonction des échantillons, de leurs effectifs, de leurs origines et selon que les corrélations impliquent le père ou la mère, les fils ou les filles. Cependant, ces corrélations restent globalement faibles, rarement au-dessus de r = 0,20. On conviendra que de tels niveaux de corrélation ne laissent la place qu’à un déterminisme génétique extrêmement faible, s’il existe, ce qui, dans une perspective évolutionniste, ne laisserait que peu de prise à la sélection. Cela amène à considérer comme plus plausible une transmission sociale ou culturelle, elle-même fort réduite.
Dans une enquête de l’Ined sur la mobilité sociale et la dimension de la famille, datant de 1948, Marcel Bresard (1950) conclut que « les personnes appartenant à des familles nombreuses descendent plus fréquemment de parents appartenant eux-mêmes à des familles nombreuses et inversement, les influences tant paternelles que maternelles se manifestant avec une intensité très voisine, phénomène manifeste dans tous les groupes professionnels ».
En 1953, Jerzy Berent publie un travail portant sur un échantillon de près de 1 500 familles, à partir desquelles il estime la corrélation entre le nombre de frères ou sœurs de la mère (ou du père) et le nombre de leurs enfants (après 15 ans de mariage). Ces corrélations sont faiblement plus élevées lorsqu’elles impliquent la mère plutôt que le père. Globalement, la corrélation se situe autour de 0,187 et varie légèrement en fonction de la classe sociale.
Pus tard, Yoko Imaizumi et Masatoshi Nei relèvent en 1970, à partir de l’étude d’une communauté japonaise de 1880 à 1930, des corrélations significatives mais faibles entre la fécondité des frères et sœurs (r = 0,088) mais non entre celle des mères ou des pères et celle de leurs enfants.
Cette possible transmission de la fécondité conduisit les généticiens à envisager les conséquences d’une telle transmission sur l’évolution génétique des populations. Masatoshi Nei et Motoi Murata (1966), se basant sur les travaux de Fisher (donc les résultats de Pearson), indiquent, par des simulations, qu’une augmentation de la corrélation entre mère et fille pour la taille de leur fratrie conduirait, au fil des générations, à une réduction progressive de la taille de la population effective, c’est-à-dire la partie de la population qui participe génétiquement à la génération suivante. De leur coté, Frédéric Austerlitz et Evelyne Heyer (1998) confirment ce résultat à partir des généalogies de la population québécoise du Saguenay-Lac Saint-Jean. Ils calculent également la corrélation de la taille efficace des familles d’une génération à la suivante et trouvent une valeur de 0,161 pour les couples mariés entre 1870 et 1930, valeur qui s’avère plus élevée, 0,34, pour les périodes antérieures plus proches des origines des généalogies. Cette transmission sociale de la fécondité modifie par dérive génétique la distribution des fréquences alléliques, ce qui expliquerait les hautes fréquences de certaines maladies génétiques dans cette population réduite en nombre (Bouchard & de Braekeleer, 1991 ; Austerlitz & Heyer, 1998).
Une synthèse de ces différentes études a été proposée par Michael Murphy en 1999. En 2005, Pettay et al. (2005) présentent un travail fondé sur des histoires de vie construites à partir de généalogies finnoises sur 4 générations, entre 1745 et 1900. Parmi les traits étudiés, la fécondité, mesurée par le nombre d’enfants survivant au-delà de 15 ans, présente une héritabilité (rapport de la variance génétique additive sur la variance totale du trait) élevée chez les femmes (h2a = 0,31) mais nulle chez les hommes (h2a = 0,02). Les auteurs avancent comme explication la plus plausible le fait que, dans cette société monogame, les traits reliés à la reproduction seraient sous le contrôle de la femme. Gülüm Kosova et al. (2010) observent, sur un échantillon de 450 couples huttérites du Sud Dakota, particulièrement féconds (une moyenne de 7,14 enfants), que l’héritabilité de la taille de la fratrie a une composante additive nulle chez les femmes, bien que l’héritabilité globale, incluant additivité, dominance, et additivité liée au chromosome X, soit à la limite de la signification (p = 0,06). En revanche, ils trouvent une héritabilité additive significative chez les hommes, bien que faible (h2a = 0,11), et une héritabilité globale très élevée (H2 = 0,68). Les auteurs interprètent l’absence de résultats significatifs chez la femme par le fait que la variabilité environnementale est beaucoup plus élevée chez elle que chez l’homme (dans un rapport de 2,5 à 1). Une observation du même ordre avait été rapportée en 2007, également chez des Huttérites (Pulzhnikov et al., 2007). La corrélation s’avérait significative (r = 0,29) entre la taille effective d’un couple et celle du couple de leurs fils, plus élevée que celle avec leurs filles (r = 0,18).
Plus récemment, Martin Kolk (2014) analyse de façon multi-générationnelle les données des personnes nées entre 1970 et 1982 tirées des registres suédois de population. L’originalité des résultats vient de ce qu’ils lui permettent de tester la relation entre la fécondité des parents, des enfants et des grands-parents. Le résultat rapporté par l’auteur fait mention d’une association qu’il juge « forte » entre la fécondité de l’enfant et celle de sa mère (pourtant, r = 0,12) ainsi qu’avec celle de son père (r = 0,10) mais ne signale pas d’association significatives avec les grands-parents et les oncles ou tantes.
En 2016, Eva Beaujouan et Anne Solaz présentent des résultats tirés de l’« Enquête famille et logements » de l’Ined et INSEE (2011). Elles trouvent des résultats comparables à ceux des études précédentes, avec des corrélations de rang de Spearman pour la fécondité de r = 0,162 et 0,120 entre les parents et leur fille et fils respectivement, corrélations toujours supérieures pour les filles et diminuant globalement de la première cohorte étudiée (1922-1926) à la dernière (1962-1966).
Dans la plupart des études précédemment décrites, les effectifs sont généralement très élevés, fondés sur des cohortes tirées de bases de données nationales, si bien que des corrélations aussi faibles que r = 0,02 (Kolk, 2014) ou que r = 0,03 (Beaujouan et Solaz, 2016) peuvent être significatives.
8Les données généalogiques recueillies sur le long terme par Lucienne Jakobi dans le contexte d’un village du Béarn, entre le xviiie et le xxe siècle permettent de formuler de nouvelles hypothèses explicatives de la transmission de la fécondité. Cette enquête rentrait initialement dans le cadre de celles menées dans les années 1960-70 sur les populations isolées, considérées comme des sortes de « laboratoire » offrant l’opportunité d’étudier in vivo l’évolution génétique et démographique des populations humaines, et plus particulièrement les connexions entre consanguinité, dérive génétique et modalités du choix du conjoint (Sutter & Tabah, 1948, 1951 ; Sutter & Goux, 1961 ; Jacquard, 1976 ; Berlivet et al., 2019).
9Sur la transmission de la fécondité, Jean-Pierre Bocquet-Appel et Lucienne Jakobi ont déjà publié des résultats à partir de ce corpus béarnais de données généalogiques (Bocquet-Appel & Jakobi, 1993a, b). Leur analyse à partir de modèles linéaires de transmission (analyse des pistes, voir Li et al., 1975) montrait l’absence de corrélations familiales du nombre d’enfants. L’objet du présent article est donc de revisiter ces données en proposant de nouvelles analyses, sans doute moins sophistiquées sur le plan des méthodes statistiques, mais qui complexifient les variables explicatives en intégrant les variations temporelles, le degré de parenté des unions, l’activité professionnelle et les modalités de transmission des règles de mariage et des biens propres à la société béarnaise.
La population, les familles, les méthodes
10Les généalogies du village béarnais d’Arthez-d’Asson (Pyrénées-Atlantiques) entre 1652 et 1970 ont été reconstituées par Lucienne Jakobi. Sa motivation principale était d’apporter une contribution originale aux études sur les « isolats ». De nombreux travaux ont déjà porté sur cette population (Fernet et al., 1975 ; Mosnier, 1975 ; Jakobi et al., 1976 ; Serre et al., 1989 ; Jakobi & Darlu, 1988 ; Bocquet-Appel & Jakobi, 1990, 1993a, b ; Darlu et al., 1994 ; Segrestin et al., 2007).
11Les unions contractées à Arthez-d’Asson entre conjoints nés au village ont été retenues dans ce travail, soit 1 548 unions, avec les informations d’intérêt suivantes :
121) L’activité professionnelle. Depuis le xviiie siècle, près de 140 professions différentes ont été répertoriées et codées. Les familles d’agriculteurs, majoritaires, ont été distinguées des autres familles. Les couples dont un membre au moins fait profession d’agriculteur ont été classés comme « agriculteurs ». Ce sont le plus souvent des propriétaires, ce qui leur confère un statut différent des professions classées dans la catégorie « non agriculteur ». Ces dernières regroupent des artisans-commerçants, des journaliers (ouvriers ou bergers), employés ou professions libérales, ces dernières signalées seulement après 1825.
132) Le statut d’héritier. Il est précisé si le conjoint (ou la conjointe) a hérité des biens et/ou de la maison de ses parents. Il (ou elle) est alors considéré comme « héritier », par opposition à celui (ou celle) qui a fondé une nouvelle maison, alors considéré comme « non héritier ». L’alternative « conjoint ou conjointe » renvoie à une spécificité culturelle bien documentée qui veut qu’en Béarn les biens, en particulier la « maison », se transmettent par le premier né quel que soit son sexe (Poumarède, 1979). La réalité, statistique du moins, est loin d’être aussi simple (Darlu et al., 1994). Le statut d’héritier a été scrupuleusement vérifié par Lucienne Jakobi en combinant sources d’état civil, actes notariés et enquêtes orales.
143) Le nombre d’enfants issus de l’union. On distingue le nombre d’enfants total Nt et le nombre d’enfants « utiles » Nu, pour reprendre une terminologie qui n’est pas très heureuse mais usuelle en génétique (voir Heyer & Cazes, 1999). L’accent est porté ici sur les enfants « utiles », ceux mettant eux-mêmes au monde des enfants, dans la mesure où ce sont eux qui transmettent leurs gènes aux générations suivantes. C’est donc un paramètre important classiquement convoqué pour rendre compte de l’évolution génétique des populations. Cela exclut les enfants mort-nés ou décédés avant la reproduction, les célibataires sans enfants et les enfants ayant migré et dont les histoires sont perdues pour le devenir démographique de la communauté. En prenant en compte uniquement la corrélation entre nombre d’enfants « utiles » des parents et nombre d’enfants « utiles » de leurs enfants, on se focalise sur la réalité effective de la dynamique démographique, même si l’on se borne ainsi aux seuls « résultats » démographiques, sans accéder directement aux « projets parentaux » ou à l’expérience vécue des familles.
154) L’âge au mariage, pour les hommes et pour les femmes.
165) Le degré de parenté, estimé par le coefficient de parenté obtenu à partir des relations généalogiques (Serre et al., 1989). Deux catégories ont été retenues (voir figure 1), selon que le coefficient de parenté des unions (ifm et jfm) est différent de 0 (les enfants sont alors classés comme « consanguins ») ou qu’il est égal à 0 (les enfants sont alors classés comme « non consanguins »). Lorsque ce coefficient de parenté n’est pas nul, cela signifie qu’il y a, dans l’histoire généalogique des membres du couple, des ancêtres communs à eux deux, donc des boucles dites de « consanguinité ». Il reste difficile de savoir si de telles boucles résultent d’une stratégie familiale intentionnelle destinée à favoriser des unions entre apparentés ou s’il s’agit d’unions réalisées « au hasard » mais cependant contractées entre apparentés, car au sein d’une population isolée de faible effectif se trouve nécessairement un bon nombre d’apparentés (Jacquard, 1977). Comme il s’agit de consanguinité calculée à partir des généalogies, il faut s’attendre à un manque d’information généalogique pour les générations les plus anciennes, car aucune information n’est disponible sur les parents avant 1652. Cela peut entraîner un biais dans l’estimation de la consanguinité, avec une part de consanguinité lointaine réduite ou nulle par rapport à celle de la consanguinité proche (Serre et al., 1989).
L’union ij formée de l’homme i et de la femme j a abouti à un nombre total d’enfants et à un nombre d’enfants « utiles » respectivement Nt(ij) et Nu(ij). L’union ifm des parents de i a abouti à Nt(ifm) et Nu(ifm). Même convention pour l’union des parents de j
L’union ij formée de l’homme i et de la femme j a abouti à un nombre total d’enfants et à un nombre d’enfants « utiles » respectivement Nt(ij) et Nu(ij). L’union ifm des parents de i a abouti à Nt(ifm) et Nu(ifm). Même convention pour l’union des parents de j
176) La période 1652-1974 est découpée en générations successives de 25 ans, mais aussi regroupée en deux périodes : la première s’étend de 1652 à 1825, la seconde de 1826 à 1974. Cette coupure s’avérait nécessaire pour assurer un nombre significatif d’unions par période. Cette date de 1825 correspond à la génération marquée par l’industrialisation et par l’ouverture de la vallée aux pôles urbains voisins. C’est également celle à partir de laquelle la transition entre les règles coutumières du xviiie siècle et celles issues de la Révolution commencent à rentrer dans les faits (Poumarède, 1979), même s’il est bien documenté, en particulier au Pays basque, que les habitants ont su mettre en place des stratégies d’évitement du partage égal, pour assurer l’intégrité de la « maison » (Arrizabalaga, 2005).
18La structure des familles est représentée selon la figure 1 où nous distinguons l’union ij (i pour le conjoint et j pour la conjointe). Leurs parents sont signalés par l’ajout f (= father) ou m (= mother) : if et im pour le père et la mère de i ; jf et jm pour le père et la mère de j. Selon ce principe, ifm exprime l’union entre if et im ; jfm celle entre jf et jm. Nt(ifm) et Nu(ifm) sont respectivement le nombre total d’enfants et le nombre d’enfants « utiles » de l’union ifm. Même notation pour le couple jfm. Nt(ij) et Nu(ij) sont respectivement le nombre total d’enfants et le nombre d’enfants « utiles » de l’union ij.
19Les analyses statistiques (Siegel, Castellan Jr, 1988 ; Schwartz, 1993) reposent essentiellement sur des tests de Mann-Whitney et des corrélations de rang de Spearman (tenant compte des ex æquo), plutôt que des corrélations de Bravais-Pearson en raison de la discontinuité du nombre d’enfants (entre 0 et 10 pour Nu et entre 1 et 15 pour Nt) et de la normalité fortement altérée des distributions.
20La figure 2 donne la distribution du nombre d’enfants utiles pour les couples ifm et jfm. Compte tenu du mode d’échantillonnage, ces couples ont tous au moins un enfant « utile », alors que les couples ij peuvent ne pas avoir d’enfants « utiles ». Par ailleurs, le fait que plusieurs frères ou sœurs figurent dans le fichier en tant que descendant d’un même couple (ifm ou jfm) crée une possible redondance d’information et donc des biais d’estimation des corrélations. C’est le cas lorsque des parents, ifm ou jfm, ont plusieurs enfants documentés. La figure 2 montre, en effet, que 21,5 % des parents ont deux enfants (i ou j), 55 % ont trois enfants et plus, alors que seulement 23 % des couples ifm ou jfm n’ont qu’un enfant, i ou j, inclus dans la base de données. L’effet de la redondance de cette information est d’autant plus marqué qu’il existe une forte relation intra-fratrie pour le nombre d’enfants, c’est-à-dire lorsque les fratries les plus nombreuses sont composées de frères et sœurs ayant eux-mêmes plus d’enfants que la moyenne. Le traitement statistique de cette difficulté a été abordé par Oscar Kempthorne et Oudh B. Tandon (1953) (voir aussi Ollivier, 1974 ; Folley, 1981), dans le cadre de l’estimation de la régression entre parents et enfants. Deux approches sont possibles : l’approche A qui considère autant de couples parents-enfant qu’il y a d’enfants par parents ; et l’approche B qui ne considère que les couples formés des parents et d’un « enfant moyen ». D’après Kempthorne et Tandon, pour obtenir une estimation non biaisée, il faut partir de l’approche A et effectuer de façon itérative une pondération qui prenne en compte la corrélation r intra-fratrie. Si cette corrélation est nulle, l’approche A est non biaisée. Si elle est égale à 1, c’est l’approche B qui est non biaisée, mais avec un degré de liberté plus faible. Si les corrélations estimées selon les approches A et B sont proches, on peut considérer que la corrélation r est faible et ne biaise que peu ou pas la corrélation. Les résultats de ces deux approches seront ici confrontés.
Distribution du nombre d’enfants utiles (Nu) par famille (ifm et jfm)
Distribution du nombre d’enfants utiles (Nu) par famille (ifm et jfm)
Résultats
Variations du nombre d’enfants utiles
21Le premier résultat concerne l’âge au mariage. Comme cet âge est susceptible de jouer sur le nombre d’enfants, il était important de vérifier si cet âge au mariage variait avec le temps. Il s’avère que cet âge ne varie pas significativement (ρ = 0,52) au cours des générations pour les femmes. Il varie faiblement et de manière non linéaire chez les hommes qui sont légèrement plus jeunes au moment du mariage dans la période 1820-1830. En revanche, sur l’ensemble de la période considérée, les mariages se font assez tard, autour de 29,85 ans en moyenne pour les hommes et de 25,5 ans pour les femmes, et les âges au mariage des époux sont significativement corrélés (ρ = 0,431), corrélation qu’on aurait pu attendre plus élevée (r = 0,95, par exemple dans un échantillon de couples belges, voir Suzanne, 1967). Comme attendu, le nombre total d’enfants et le nombre d’enfants « utiles » d’une part et l’âge au mariage d’autre part sont corré lés négativement et significativement chez les femmes (ρ = −0,233 pour Nu et ρ = −0,314 pour Nt), et peu corrélés chez les hommes (ρ = −0,153 pour Nu et ρ = -0,190 pour Nt). L’ensemble de ces résultats traduit une stabilité importante dans les comportements de cette société dont les stratégies d’union conduisent à des mariages plutôt tardifs sur la période qui nous occupe, même si, comme l’avait noté Lucienne Jakobi, il existe une présence non négligeable d’enfants nés avant mariage et reconnus, parfois tardivement, par le père (Segrestin et al., 2007).
22Les trois premiers tableaux et la figure 3 concernent les variations du nombre d’enfants selon les périodes et selon les catégories. Les interactions statistiques entre les trois critères de classification, « agriculteur / non agriculteur », « héritier / non héritier » et « consanguin / non consanguin » sont a priori testables, mais les effectifs de chaque sous-catégorie tombent alors dans des valeurs si faibles que les tests perdent toute puissance. Seules sont donc discutées ici les comparaisons à un (tableau 3a) et deux critères de classification (tableau 3b).
Variation selon les périodes de la moyenne m du nombre d’enfants « utiles » Nu pour le couple des parents de i (ifm), de j (jfm) et pour le couple ij
Variation selon les périodes de la moyenne m du nombre d’enfants « utiles » Nu pour le couple des parents de i (ifm), de j (jfm) et pour le couple ij
23Compte-tenu du mode de sélection des données, les couples ifm et jfm ont toujours au moins un enfant (i ou j), tandis que les couples ij peuvent ne pas avoir eu d’enfants et/ou ne pas avoir eu d’enfants « utiles », ce qui explique pourquoi le nombre de leurs enfants Nt(ij) et Nu(ij) est moins élevé que ceux de leurs parents. Le tableau 1 et la figure 3 montrent une baisse significative du nombre d’enfants « utiles » entre le milieu du xviiie siècle et celui du xxe siècle, et notamment entre les deux périodes, avant 1825 et après 1825. Cette baisse est systématique quel que soit le statut professionnel (« agriculteur » ou « non agriculteur »), la situation d’héritier ou de non héritier ou le niveau de consanguinité. Aussi, les résultats qui suivent ne seront pas partitionnées selon ces périodes. Par ailleurs, seuls les résultats concernant le nombre d’enfants « utiles » Nu, largement corrélés au nombre total d’enfants Nt, (ρ = 0,81, 0,82 et 0,79 respectivement pour ifm, jfm et ij) seront reportés, puisque Nu constitue la variable d’intérêt, celle dont on souhaite tester ici la transmission.
Variation des moyennes (m) et des écarts-types (sd) du nombre total d’enfants Nt et du nombre d’enfants « utiles » Nu pour les unions ifm, jfm et ij (voir figure 1) et par période
Variation des moyennes (m) et des écarts-types (sd) du nombre total d’enfants Nt et du nombre d’enfants « utiles » Nu pour les unions ifm, jfm et ij (voir figure 1) et par période
24Les tableaux 2 et 3a montrent que les ij « agriculteurs » présentent un nombre d’enfants « utiles » significativement plus faible que les « non agriculteurs ». Les ij « héritiers » ont plus d’enfants « utiles » que les « non héritiers », sauf pour la filiation par le père ifm. Les ij « non consanguins » ont moins d’enfants « utiles » que les ij ayant au moins un membre « consanguin ».
Effectifs (n), moyennes (m) et écarts-types (sd) du nombre d’enfants utiles (Nu) par type d’union (ifm, jfm, ij, voir figure 1) et selon les catégories (agriculteur vs non agriculteur, héritier vs non héritier, consanguin vs non consanguin)
Effectifs (n), moyennes (m) et écarts-types (sd) du nombre d’enfants utiles (Nu) par type d’union (ifm, jfm, ij, voir figure 1) et selon les catégories (agriculteur vs non agriculteur, héritier vs non héritier, consanguin vs non consanguin)
Orientation des différences (<, > ou =) dans le nombre moyen d’enfants « utiles » en fonction d’un (a) ou de deux (b) critères de classification des couples ij. Le calcul procède des données du tableau 2. Les probabilités p des significations sont données par des U test de Mann-Whitney (ns pour non significatif)
Orientation des différences (<, > ou =) dans le nombre moyen d’enfants « utiles » en fonction d’un (a) ou de deux (b) critères de classification des couples ij. Le calcul procède des données du tableau 2. Les probabilités p des significations sont données par des U test de Mann-Whitney (ns pour non significatif)
25Le tableau 3b permet de pousser plus loin l’analyse. En effet, on constate un contraste significatif entre le nombre de frères ou sœurs « utiles » du conjoint i et celui de la conjointe j en fonction du statut d’« héritier », avec de plus petites fratries pour i « héritier » (Nu(ifm) = 2,45) que pour i « non héritier » (Nu(ifm) = 3,02), tandis que pour la conjointe j on observe l’inverse (Nu(jfm) = 3,16 et 2,44 respectivement). Cette même tendance s’observe chez les agriculteurs comme chez les non agriculteurs. Il semble donc que les couples « héritiers » ont une lignée masculine comportant moins d’enfants « utiles ». Le résultat est identique quand on distingue, parmi les couples ij « héritiers », ceux pour lesquels c’est i qui est « héritier » et ceux pour lesquels c’est j.
26Le nombre d’enfants utiles est également moindre pour les unions ij dont l’un au moins est consanguin (Nu(ij) = 0,93 vs 1,64), chez les agriculteurs comme chez les « non agriculteurs » (Nu(ij) = 1,58 vs 1,81). Enfin, les unions classées « héritier » et « non consanguin » montrent des fratries de j plus importantes (m = 3,60) que chez les héritiers consanguins de j (m = 3,14).
Corrélations familiales entre enfants utiles
27Les tableaux 4 et 5 donnent les corrélations de Spearman entre le nombre Nu(ij) d’enfants utiles de l’union ij et ceux, Nu(ifm) et Nu(jfm), des unions de leurs parents respectifs ifm et jfm, autrement dit le nombre de frères ou sœurs « utiles » de i et j respectivement. Les résultats du tableau 4 sont obtenus selon l’approche A (autant de couples parents-enfant pris en considération qu’il y a d’enfants par couple), tandis que les résultats du tableau 5 sont obtenus par l’approche B (corrélations parents – enfant moyen). Ils sont décomposés par période et selon les autres critères : agriculteur, héritier ou consanguin. Les corrélations entre les nombres d’enfants utiles des parents de i et de j sont nulles, signifiant que le nombre de frères ou sœurs de i et de j n’est pas corrélé. Il n’y a donc pas d’unions préférentielles entre familles ayant beaucoup d’enfants, ou entre familles en ayant un nombre réduit, sauf, très faiblement (ρ = 0,085, p < 0,05), dans le cas où le couple ij est en position d’héritier. Toutes les autres corrélations, entre le nombre d’enfants « utiles » des parents (ifm ou jfm) et celui de l’union ij, sont significativement différentes de zéro, à l’exception de la corrélation chez les agriculteurs entre le nombre de frères ou sœurs « utiles » de j (Nu(jfm)) et ce même nombre pour l’union ij (tableau 4, ρ = 0,098). Les corrélations entre nombres d’enfants « utiles » peuvent être relativement élevées, comme dans le cas des relations entre ij et ifm, chez les agriculteurs, héritiers et consanguins (respectivement ρ = 0,247, 0,227 et 0,187).
Corrélations de Spearman (ρ) entre les nombres d’enfants utiles de ifm, jfm et ij. ( ! : les effectifs varient selon la proportion de coefficients de parenté non nuls des différentes catégories (1 283 et 265 pour ifm ; 1 227 et 321 pour jfm ; 1 122 et 426 pour ij)
Corrélations de Spearman (ρ) entre les nombres d’enfants utiles de ifm, jfm et ij. ( ! : les effectifs varient selon la proportion de coefficients de parenté non nuls des différentes catégories (1 283 et 265 pour ifm ; 1 227 et 321 pour jfm ; 1 122 et 426 pour ij)
*** p < 0,0001. ** p < 0,001. * p < 0,01. † p < 0,05. ns p > 0,05.Corrélations de Spearman (ρ) entre les nombres d’enfants utiles de ifm, jfm et le nombre moyen d’enfants utiles de leur descendance (donc des frères et sœurs de i et j, respectivement). Les statuts sont ceux de i et j et non ceux de leurs germains
Corrélations de Spearman (ρ) entre les nombres d’enfants utiles de ifm, jfm et le nombre moyen d’enfants utiles de leur descendance (donc des frères et sœurs de i et j, respectivement). Les statuts sont ceux de i et j et non ceux de leurs germains
28Les résultats du tableau 5 (approche B) confortent largement ceux du tableau 4. Ils indiquent la corrélation entre le nombre moyen d’enfants « utiles » mNu des parents (ifm) de i et le nombre moyen d’enfants « utiles » de i lui-même, de même pour la corrélation du côté de la conjointe j. On constate une absence de corrélations avant 1825 et des corrélations du même ordre de grandeur pour la période après 1825. Comme pour l’approche A, la corrélation est légèrement supérieure quand elle implique i par rapport à celles qui impliquent j.
29Les deux approches A et B donnent globalement des résultats compatibles, ce qui laisse supposer que les corrélations intra-fratries qui distinguent ces deux approches sont faibles. Pourtant la corrélation intra-classe r (rapport entre la variance du nombre d’enfants intrafratrie et la variance totale du nombre d’enfants) dont Kempthorne et Tandon préconisent la prise en compte est loin d’être négligeable (r = 0,65 pour les frères et sœurs de i et r = 0,64 pour ceux de j). Cependant ces corrélations intraclasses sont établies à partir de variances calculées sur des distributions loin de la normalité (en particulier près de 25 % des fratries ne sont représentées que par un individu, donc avec une variance intra-fratrie nulle), si bien que l’interprétation de ces corrélations intra-classe reste sujette à caution.
Discussion
30La manière d’aborder la question de la transmission de la fécondité, ou plus précisément ici du nombre d’enfants « utiles », diffère largement de celle déployée par Bocquet-Appel et Jakobi dans leurs travaux de 1993 (a et b), bien qu’il s’agisse exactement des mêmes données (à 10 mariages près sur 1 548 [1]). En effet, il nous a paru intéressant de réexaminer ces données, en intégrant davantage d’informations, en particulier pour tenir compte du fait que cette transmission a pu évoluer entre le xviiie siècle et le milieu du xxe siècle, en fonction des contextes sociaux et historiques. De plus, l’indicateur de fécondité qui est retenu ici est le nombre d’enfants « utiles », un nombre qui n’est pas exactement le nombre d’enfants par famille retenu par Bocquet-Appel et Jakobi (1993a, b), bien que la corrélation entre nombre total d’enfants et nombre d’enfants utiles soit très élevée (ρ = 0,80).
31Arthez-d’Asson est un village où règne le clivage social largement répandu entre les propriétaires agricoles d’une part, leurs employés et les quelques artisans ou fonctionnaires vivant à leurs côtés, d’autre part. Le mode de transmission du patrimoine était censé obéir à une règle coutumière en vigueur en Béarn (Bourdieu, 1972 ; Poumarède, 1979 ; Bonnain, 1996 ; Bonnain-Dulon, 2011) comme en Pays basque (Arrazabalaga, 2002, 2004, 2005), selon laquelle l’héritier est le premier né de la fratrie, quel que soit son sexe, l’héritage étant constitué généralement des terres et de la « maison », concept central en Béarn (Soulet, 1974 ; Jakobi et al., 1976 ; Bonnain, 1996 ; Bourdieu, 1962, 1972, 2002). Ces règles de mariage et ces pratiques successorales fondées sur la primogéniture sont liées à l’économie agro-pastorale de la région qui nécessite le maintien d’une certaine intégrité du patrimoine agricole de chaque maison pour se perpétuer. Ces règles et pratiques sont en évidente contradiction avec les lois issues de la Révolution, celle de l’abolition du droit d’aînesse (15 mars 1790) et celle instituant un partage égalitaire dans les successions.
32Lorsque les unions ij sont classées comme « agriculteur », il est probable que les parents, au moins l’un de ceux de i, de j ou même des deux, soient également agriculteurs-propriétaires. La nature de ce statut est loin d’être transmissible, du moins aux époques étudiées et dans le contexte social et environnemental du Béarn. La transmission du statut d’héritier est plus incertaine car si i ou j ont pu hériter de leurs parents, ces derniers n’ont pas nécessairement hérité de leurs propres parents. Quant au critère de consanguinité, il signifie que le père et la mère de i, ou de j, ont des ancêtres en commun, plus ou moins éloignés, et sont donc apparentés. Le degré de consanguinité de i ou j se situe entre 0,077 (plus que cousins germains) et 0,002 (parenté lointaine). 87,5 % des personnes ont un degré de consanguinité nul.
33La réalité de ces règles de transmission est à relativiser. Dans cette même communauté villageoise, Pierre Darlu et al. (1994) ont démontré que les traditions et coutumes liées à la transmission des biens n’étaient pas aussi rigoureuses que supposé. Elles subsistent davantage dans la conscience collective que dans la réalité des faits. Car c’est bien l’homme, en tant qu’agriculteur, qui cumule le plus de chances de se marier au sein du village et de recevoir l’héritage, la femme n’héritant le plus souvent qu’en cas de circonstances particulières (enfant unique ou frères trop jeunes par exemple).
34La baisse progressive du nombre d’enfants depuis le milieu du xviiie siècle n’est pas une surprise et a été relevée à de multiples occasions (Toutain, 1963 ; Henry, 1975 ; Van de Walle, 1985). Localement, Bocquet-Appel et Jakobi (1993a, b) attestent une telle baisse dès la fin du xviiie siècle, suivie par une stabilisation autour de 5 enfants en moyenne pendant le xixe siècle et une chute après 1880 pour atteindre 3 enfants au début du xixe siècle. Pour les Pyrénées-Atlantiques et pour les Hautes-Pyrénées, les données démographiques rapportent un nombre moyen respectif d’enfants de 2,89 et 3,16 en 1860, de 2,34 et 2,97 en 1910, et de 2,07 et 2,16 en 1954 (Le Bras & Todd, 1981). Rappelons qu’Arthez-d’Asson, bien que situé administrativement dans les Pyrénées-Atlantiques, se situe à la limite des Hautes-Pyrénées. Il semble que le nombre total d’enfants y soit légèrement plus élevé que ce qui est relevé dans les moyennes de ces deux départements. Par ailleurs, les variations temporelles du nombre d’enfants « utiles » (figure 3) sont bien moins fluctuantes que les variations du nombre total d’enfants telles que relevées par Bocquet-Appel et Jakobi. Mais on peut considérer que le nombre d’enfants « utiles » informe davantage sur les modifications démographiques concernant les personnes assurant une continuité dans le village. En effet, ces enfants « utiles » comptabilisent peu les cadets dont on sait qu’ils sont les premiers à migrer vers les zones d’emploi ou même vers l’Amérique du sud ou du nord (Arrizabalaga, 2002, pour le Pays basque ; Foucrier, 2001, pour le Béarn ; Anonyme, 2017). Cette migration résulte partiellement de pratiques successorales dont la conséquence est d’assurer le maintien, sur des terres difficiles, d’un nombre optimal de personnes.
35Cette même explication peut rendre compte du fait qu’il y a significativement moins d’enfants « utiles » chez les agriculteurs que chez les autres professions. Cela se vérifie pour la génération des parents ifm et jfm et, de manière moindre, pour celle de leurs enfants ij. Ce résultat pourrait s’interpréter, dans la lignée des travaux pionniers de Le Play au xixe siècle, comme la mise en application d’une stratégie évitant la parcellisation trop importante des terres qu’imposeraient leur répartition strictement égalitaire et leur transmission. Cette fragmentation des surfaces agricoles serait d’autant moins bienvenue qu’elle s’appliquerait dans un contexte montagnard où les bonnes terres sont rares. En réalité, une analyse plus approfondie montre que les agriculteurs qui sont à la fois « héritiers » et « consanguins » ont significativement plus d’enfants « utiles » (m = 1,59) que les agriculteurs non héritiers et non consanguins (m = 0,80). Une explication pourrait être que les alliances entre familles conduisant à un certain degré de consanguinité permettent de réduire la dispersion des biens soumis à héritage et laissent donc plus de latitude pour avoir un plus grand nombre d’enfants « utiles », un nombre restant cependant faible par rapport aux non agriculteurs.
36On a noté également que les unions ij qui héritent des biens ont plus d’enfants « utiles » que celles qui n’héritent pas. En réalité, comme souligné plus haut, le statut d’héritier est propre au couple ij et il ne présume en rien du statut, héritier ou non, de leurs parents. Il n’est donc pas possible de juger de la transmission du nombre d’enfants utiles selon que les parents sont ou ne sont pas héritiers. En revanche, on peut remarquer que la différence entre le nombre d’enfants utiles chez les héritiers et les non héritiers est bien plus marqué chez les non agriculteurs (entre m = 1,90 pour les unions « héritier » contre m = 1,46 pour les unions « non héritier ») alors que ce contraste est moindre (m = 1,39 et m = 1,27) et non significatif respectivement chez les agriculteurs héritiers et non héritiers.
37On peut aussi souligner que le couple ij a davantage de frères et sœurs du côté de la mère (jfm) que du côté du père (ifm) (tableau 1). Cela est vérifié chez les agriculteurs comme chez les non agriculteurs, héritiers ou pas, et conforte ainsi une stratégie conduisant à un nombre réduit d’enfants utiles en lignée masculine, lignée dont on sait qu’elle est la voie privilégiée de transmission des biens à la descendance, en dépit de ce que laisse entendre la coutume qui voudrait que la transmission des biens se fasse de manière égalitaire entre sexes (Segrestin et al., 2007).
38La consanguinité est également un critère qui présente des contrastes significatifs pour le nombre d’enfants utiles. Bien que les résultats soient difficiles à interpréter, on remarque que ce sont les unions ifm et ij qui présentent un nombre d’enfants utiles significativement plus élevé chez les consanguins que chez les non consanguins. Comme ce résultat est plus sensible chez les non héritiers que chez les héritiers, on pourrait avancer l’interprétation selon laquelle les unions ij possédant à la fois le statut d’héritier et de consanguin ont une implantation locale plus stable à la fois pour des raisons généalogiques et en termes de possession de biens, ce qui leur permet d’assumer une descendance plus nombreuse. Ce lien entre consanguinité et nombre d’enfants a déjà été évoqué sans qu’une conclusion nette n’apparaisse (Robert et al., 2009). Ces auteurs remarquent que la consanguinité n’affecterait la reproduction qu’en interaction avec l’âge, c’est-à-dire avec une plus nette réduction de la reproduction des parents dans la seconde période de leur vie.
39Globalement, les relations entre la fécondité des parents et celle de leurs enfants, telles qu’elles ont été décrites dans la littérature et rappelées en introduction, montrent de faibles valeurs. En termes de corrélations, elles excèdent très rarement ρ = 0,3. Sur ces mêmes données, mais dans les conditions d’analyse menées par Bocquet-Appel et Jakobi (1993a, b), la corrélation entre parents et enfants estimée par analyse des pistes est même nulle (r = 0,015) et seule la corrélation entre frères et sœurs est significative (0,185).
40Le résultat remarquable que soulève notre étude est la plus forte corrélation entre le nombre d’enfants « utiles » du père (ifm) et celui de ses enfants ij lorsque les unions ij sont à la fois « agriculteur » et « héritier » (ρ = 0,291), ou « agriculteur » et « consanguin » (ρ = 0,301), ou « héritier » et « consanguin » (ρ = 0,283), et surtout « agriculteur », « héritier » et « consanguin » (ρ = 0,359), bien que, dans ce derniers cas, ces unions ne soient qu’en nombre très limité (n = 76). Dans les situations impliquant la mère et non plus le père, ces corrélations sont respectivement de 0,139, 0,131 et 0,071.
41Ainsi est-on amené au constat que les unions dont l’activité est centrée sur « l’agriculture propriétaire » et qui sont associées à une « maison » ou à des terres transmises préférentiellement en lignée paternelle au travers d’un réseau généalogique imbriqué, tendent à répliquer, des parents aux enfants, un même modèle de fécondité. Ce modèle peut perdurer, même lors de la réduction du nombre d’enfants constatée après 1800, dans la mesure où un aîné et un cadet suffisent à assurer, pour chaque famille propriétaire, la transmission des biens et la perpétuation des règles d’alliance entre maisons. Il favorise donc, au fil des générations, une certaine stabilité de l’entité familiale nécessaire à la préservation de la propriété et à la survie économique dans le contexte d’un milieu rural difficile et austère.
Bibliographie
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Notes
-
[1]
N’ayant plus accès aux données traitées par Jean-Pierre Bocquet-Appel et Lucienne Jakobi, tous deux décédés, je n’ai pu contrôler de quelles unions il s’agissait.