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L’archive et le document

Matériaux pour une histoire des sciences sociales (note critique)

Pages 779 à 800

Notes

  • [*]
    Gilles LAFERTÉ, Paul PASQUALI et Nicolas RENAHY (dir.), Le laboratoire des sciences sociales. Histoires d’enquêtes et revisites, Paris, Raisons d’agir, 2018, 290 p.
  • [1]
    Roxanne Silberman, « Rapport : les sciences sociales et leurs données », ministère de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, 1999, https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/004000935.pdf. Cette initiative s’inscrit dans un contexte international plus large : pour un état des lieux en 1993, voir Angela Dale, « Le rôle de l’analyse secondaire dans la recherche en sciences sociales », Sociétés contemporaines, 14-15, 1993, p. 7-21 ; pour une mise au point récente en France, voir Arianna Caporali, Amandine Morisset et Stéphane Legleye, « La mise à disposition des enquêtes quantitatives en sciences sociales : l’exemple de l’Ined », Population, 70-3, 2015, p. 567-597.
  • [2]
    Dans le cas de la statistique, voir les travaux d’Alain Desrosières, « L’histoire de la statistique comme genre. Styles d’écritures et usages sociaux », Genèses, 39, 2000, p. 121-137 ; pour une période plus ancienne : Éric Brian, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, 1994.
  • [3]
    Si, du côté de la sociologie, l’enquête de Donald Roy revisitée par Michael Burawoy est connue assez tôt par l’article de Pierre Fournier, « Deux regards sur le travail ouvrier. À propos de Roy et Burawoy, 1945-1975 », Actes de la recherche en sciences sociales, 115, 1996, p. 80-93, une réflexion collective semble émerger surtout à partir des années 2000 : voir Françoise Cribier et Élise Feller, « Projet de conservation des données qualitatives des sciences sociales recueillies en France auprès de la ‘société civile’. Rapport présenté au ministère délégué à la Recherche et aux nouvelles technologies », Lasmas, 2003. Le premier colloque organisé en France sur ces questions a eu lieu en 2005 : Magdalini Dargentas et al., « Compte-rendu des journées internationales de l’analyse secondaire en recherche qualitative », Bulletin de méthodologie sociologique, 90, 2006, p. 43-55. Sur les argumentaires favorables ou opposés à l’analyse secondaire de ce type d’enquête, voir Sophie Duchesne, « De l’analyse secondaire à la réanalyse. Une innovation méthodologique en débats », Recherches qualitatives, 21, 2017, p. 7-28.
  • [4]
    Dans le prolongement du colloque organisé du 4 au 6 novembre 1999 par l’Ehess, le Cnrs et la Maison des sciences de l’homme (Msh), intitulé « Histoire de la recherche collective en sciences sociales au xxe siècle », et sur le contexte de cette enquête collective réflexive sur les pratiques du travail collectif, voir Paul-André Rosental, « Introduction. Modèles, usages, effets du collectif dans les sciences sociales », no spécial « Pour une histoire de la recherche collective en sciences sociales », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, p. 3-29 ainsi que le reste du numéro.
  • [5]
    Étienne Anheim et Olivier Poncet, « Fabrique des archives, fabrique de l’histoire », n° spécial « Fabrique des archives, fabrique de l’histoire », Revue de synthèse, 125, 2004, p. 1-14 ainsi que le reste du numéro.
  • [6]
    Bertrand Müller, « À la recherche des archives de la recherche. Problèmes de sens et enjeux scientifiques », Genèses, 63-2, 2006, p. 4-24.
  • [7]
    Gilles Laferté, Paul Pasquali et Nicolas Renahy, « Pour une réflexivité historienne dans les sciences sociales contemporaines », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 7-38, ici p. 13.
  • [8]
    Benoît Trépied, Une mairie dans la France coloniale. Koné, Nouvelle-Calédonie, Paris, Karthala, 2010 ; Laure Pitti, « Ouvriers algériens à Renault-Billancourt de la guerre d’Algérie aux grèves d’Os des années 1970. Contribution à l’histoire sociale et politique des ouvriers étrangers en France », thèse de doctorat, université Paris 8, 2002 ; Michel Bozon et François Héran, La formation du couple. Textes essentiels pour la sociologie de la famille, Paris, La Découverte, 2006.
  • [9]
    Anni Borzeix et Gwenaële Rot, Genèse d’une discipline, naissance d’une revue. Sociologie du travail, Nanterre, Presses universitaires de Paris-Ouest, 2010 ; François Vatin, « Marxisme, machinisme, humanisme. Georges Friedmann avant et après-guerre », Sociologie du travail, 46, 2004, p. 205-223 ; Id., « Pierre Naville et la ‘passion dans le calcul’. De la métrologie sociale à la sociologique », in F. Blum (dir.), Les vies de Pierre Naville, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2006, p. 247-265 ; Id., « Le travail et sa sociologie », Raison présente, 162, 2007, p. 83-97.
  • [10]
    Pierre Bourdieu, « La cause de la science », Actes de la recherche en sciences sociales, 106-107, 1995, p. 3-10, cité dans G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 15.
  • [11]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 18.
  • [12]
    Étienne Anheim, « L’historiographie est-elle une forme d’histoire intellectuelle ? La controverse de 1934 entre Lucien Febvre et Henri Jassemin », Revue d’histoire moderne & contemporaine, 59-4bis, 2012, p. 105-130, ici p. 107.
  • [13]
    Gilles Laferté, « L’ethnographie historique ou le programme d’unification des sciences sociales reçu en héritage », in F. Buton et N. Mariot (dir.), Pratiques et méthodes de la socio-histoire, Paris, Puf, 2009, p. 45-68, ici p. 48.
  • [14]
    Christian Topalov, Histoires d’enquêtes, Londres, Paris, Chicago (1880-1930), Paris, Classiques Garnier, 2015 ; Id., « Pour une réflexivité historienne dans les sciences sociales contemporaines », in B. Lepetit et C. Topalov (dir.), La ville des sciences sociales, Paris, Belin, 2001, p. 307-313. Sur les sciences studies et Pierre Bourdieu, voir Christian Topalov, « La boîte de Pandore et l’histoire sociale des sciences humaines », Genèses, 2015, 100/101-3, 2015, p. 238-246.
  • [15]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 24-26.
  • [16]
    Dans des domaines très différents, voir Claire Lemercier, « Une histoire sans sciences sociales ? », Annales HSS, 70-2, 2015, p. 345-357 et Étienne Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? Histoire et anthropologie au début du xxie siècle », L’Homme, 203-204, 2012, p. 399-427.
  • [17]
    Voir Roger Chartier (dir.), Pratiques de la lecture, Marseille, Rivages, 1985 ; Roger Chartier (dir.), Les usages de l’imprimé, xve-xixe siècle, Paris, Fayard, 1987 ; Roger Chartier (dir.), Lectures et lecteurs dans la France d’Ancien Régime, Paris, Éd. du Seuil, 1987.
  • [18]
    Pierre Chastang, « L’archéologie du texte médiéval. Autour de travaux récents sur l’écrit au Moyen Âge », Annales HSS, 63-2, 2008, p. 245-269.
  • [19]
    Pour ne prendre que le cas de l’histoire médiévale, qui m’est plus familier, on peut citer, en France, le colloque tenu en 2004 (et publié quatre ans plus tard), qui marque le point de départ d’un profond renouvellement : Claude Gauvard (dir.), L’enquête au Moyen Âge, Rome, École française de Rome, 2008 ; voir aussi Thierry Pécout (dir.), Quand gouverner, c’est enquêter. Les pratiques politiques de l’enquête princière (Occident, xiiie-xive siècles). Actes du colloque international d’Aix-en-Provence et Marseille, 2007, Paris, De Boccard, 2010. Dans des domaines différents et parmi de nombreux exemples, voir Didier Lett, Un procès de canonisation au Moyen Âge. Essai d’histoire sociale, Paris, Puf, 2008 ; Valérie Theis, Le gouvernement pontifical du Comtat Venaissin vers 1270-vers 1350, Rome, École française de Rome, 2012 ; Marie Dejoux, Les enquêtes de Saint Louis. Gouverner et sauver son âme, Paris, Puf, 2014.
  • [20]
    Frédéric Graber, « Enquêtes publiques, 1820-1830. Définir l’utilité publique pour justifier le sacrifice dans un monde de projets », Revue d’histoire moderne & contemporaine, 63-3, 2016, p. 31-63.
  • [21]
    Pierre Chastang, Lire, écrire, transcrire. Le travail des rédacteurs de cartulaires en Bas-Languedoc, xie-xiiie siècles, Paris, Éd. du Cths, 2002.
  • [22]
    Florence Weber, « Ethnologues à Minot. Quelques questions sur la structure sociale d’un village bourguignon », Revue française de sociologie, 22-2, 1981, p. 247-262.
  • [23]
    Laurent Amiotte-Suchet et al., n° spécial « Enquêtes collectives : histoires et pratiques contemporaines », ethnographiques.org, 32, 2016, https://www.ethnographiques.org/2016/Amiotte-Suchet-Laferte-Lauriere-Renahy.
  • [24]
    Gilles Laferté, « Des archives d’enquêtes ethnographiques pour quoi faire ? Les conditions d’une revisite », Genèses, 63-2, 2006, p. 25-45.
  • [25]
    Voir, par exemple, Antoinette Molinié et Marie-Dominique Mouton, « L’ethnologue aux prises avec les archives – Introduction », Ateliers du LESC, 32, 2008 ainsi que le numéro spécial « Enquêtes collectives… » déjà cité.
  • [26]
    Voir le numéro spécial « Hommage à Jacques Ozouf », Cahiers du Centre de recherches historiques, 43, 2009 et en particulier les contributions de Marie-Laurence Netter, « Les enquêtes collectives. Une utopie scientifique ? », p. 11-17 et Dominique Julia et Jacques Revel, « Lire et écrire. Une enquête, un moment historiographique », p. 35-56.
  • [27]
    Robert Hertz, Sociologie religieuse et anthropologie. Deux enquêtes de terrain, 1912-1915, éd. par S. Baciocchi et N. Mariot, Paris, Puf, 2015 ; Jacques Dalarun et Patrick Boucheron (dir.), Georges Duby. Portrait de l’historien en ses archives, Paris, Gallimard, 2015, cité dans G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 15 et 18.
  • [28]
    Jérôme Bourdieu, Lionel Kesztenbaum et Gilles Postel-Vinay, L’enquête TRA, histoire d’un outil, outil pour l’histoire, t. 1, 1793-1902, Paris, Ined, 2014.
  • [29]
    Principaux matériaux mobilisés, ces correspondances sont tirées du fonds Pierre Naville déposé au Musée social à Paris, des archives Michel Crozier conservées au Centre de sociologie des organisations et aux Archives nationales et des archives privées de Bernard Mottez, l’un des deux enquêteurs de l’enquête conduite par Jean-Daniel Reynaud et Alain Touraine.
  • [30]
    Gwenaële Rot et François Vatin, « Sociologie du travail et travail sociologique », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 117-148, ici p. 147.
  • [31]
    Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire, « Proximité spatiale et distance sociale : les grands ensembles et leur peuplement », Revue française de sociologie, 11-1, 1970, p. 3-33 ; Jean-Claude Chamboredon, « La délinquance juvénile, essai de construction d’objet », Revue française de sociologie, 12-3, 1971, p. 335-377.
  • [32]
    C’est aussi le cas de l’ouvrage de C. Topalov, Histoires d’enquêtes…, op. cit., annexes 1 et 2, p. 415-422.
  • [33]
    Paul Pasquali, « Une ‘école de Chicago’ en banlieue parisienne ? Jean-Claude Chamboredon et la délinquance juvénile, de l’enquête à l’article », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 235-282, ici p. 242, n. 487.
  • [34]
    Bertrand Müller et Serge Wolikow, « Sciences sociales : archives de la recherche », Genèses, 63-2, 2006, p. 2-3, ici p. 2 ; voir également Marie-Dominique Mouton, « Dans les archives des ethnologues. La recherche autrement », in M. Cornu, J. Fromageau et B. Müller (dir.), Archives de la recherche. Problèmes et enjeux de la construction du savoir scientifique, Paris, L’Harmattan, 2014, p. 135-145.
  • [35]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 31. Sur la question de l’engagement subjectif du chercheur, initiée par l’anthropologie pragmatique mais partagée par tous les chercheurs en sciences sociales, voir É. Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? », art. cit., ici p. 414-420 (sur la « fiction de distance » que l’historien aurait avec son objet).
  • [36]
    Voir Bernard Walliser (dir.), La cumulativité du savoir en sciences sociales. En hommage à Jean-Michel Berthelot, Paris, Éd. de l’Ehess, 2009.
  • [37]
    Michael Burawoy, « Revisiter les terrains. Esquisse d’une théorie de l’ethnographie réflexive », in D. Céfaï (dir.), L’engagement ethnographique, Paris, Éd. de l’Ehess, 2010, p. 295-351 (l’article original est paru dans American Sociological Review, 68, 2003, p. 645-679).
  • [38]
    Id., Produire le consentement, trad. par Q. Ravelli, Montreuil, La ville brûle, [1979] 2015.
  • [39]
    Sophie Duchesne, « Développement de l’analyse secondaire et des méthodes d’analyse qualitative : une chance à saisir ? », in M. Brugidou et al. (dir.), L’analyse secondaire en recherche qualitative. Une nouvelle pratique en sciences humaines et sociales, Paris, Lavoisier, 2010, p. 1-18 ; Id., « De l’analyse secondaire… », art. cit.
  • [40]
    Voir, à partir de l’analyse secondaire de leurs propres enquêtes, les conclusions assez radicales de Natasha S. Mauthner, Odette Parry et Kathryn Backett-Milburn, « The Data are Out There, or Are They ? Implications for Archiving and Revisiting Qualitative Data », Sociology, 32-4, 1998, p. 733-745.
  • [41]
    Paul Thompson, The Edwardians: The Remaking of British Society, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1975 ; Mildred Blaxter et Elizabeth Paterson, Mothers and Daughters: A Three-Generation Study Of Health Attitudes and Behaviour, Londres, Heinemann, 1982.
  • [42]
    Libby Bishop, « A Reflexive Account of Reusing Qualitative Data: Beyond Primary/Secondary Dualism », Sociological Research Online, 12-3, 2007, p. 43-56, https://doi.org/10.5153/sro.1553.
  • [43]
    La plupart des expérimentations réunies dans Le laboratoire des sciences sociales peuvent se lire comme la mise à l’épreuve de la conclusion de l’article de G. Laferté, « Des archives d’enquêtes ethnographiques… », art. cit., ici p. 45 : « Une nouvelle lecture [des enquêtes passées] conduit à porter un autre regard, souvent inattendu, sur ce qui a été dit, parce que le temps a passé, et que les questions que l’on se pose se sont déplacées. » C’est également le cœur de la démonstration de l’article de Paul Pasquali, publié dans la même revue six ans plus tard, « Deux sociologues en banlieue. L’enquête sur les grands ensembles de Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire (1966-1970) », Genèses, 87-2, 2012, p. 113-135.
  • [44]
    « Antony, c’était la partie émergée d’un iceberg. L’iceberg, c’était… ça devait être […] un grand projet, analogue à une nouvelle école de Chicago si on peut dire, qui finalement ne s’est pas réalisé complètement, qui aurait été un terrain commun à tous les chercheurs du Cse […]. [M]on travail à Antony, c’était les bases morphologiques de ce grand projet », entretien réalisé par Samir Hadj-Belgacem et Paul Pasquali, 20 février 2009, in P. Pasquali, « Une ‘école de Chicago’…», art. cit., ici p. 239. Si l’enquête de Jean-Claude Chamboredon se déroule entre 1966 et 1970, ce n’est qu’à partir de 1979 que l’École de Chicago apparaît comme courant clairement identifié en France avec le recueil de traductions publié par Yves Grafmeyer et Isaac Joseph, L’École de Chicago, Paris, Champ urbain, 1979 : voir P. Pasquali, « Une ‘école de Chicago’…», art. cit., ici p. 240.
  • [45]
    Michel Naepels, « Anthropologie et histoire : de l’autre côté du miroir disciplinaire », Annales HSS, 4, 2010, p. 873-884 ; É. Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? », art. cit.
  • [46]
    Sophie Duchesne, « De l’analyse secondaire… », art. cit., ici p. 8.
  • [47]
    Henri Omont, « La collection Doat à la Bibliothèque nationale. Documents sur les recherches de Doat dans les archives du sud-ouest de la France de 1663 à 1670 », Bibliothèque de l’école des chartes, t. 77, 1916, p. 286-336 ; Gian Luca Borghese, « Les registres de la chancellerie angevine de Naples. Un exemple de destruction et reconstitution de sources archivistiques à travers les siècles », Médiévales, 69, 2015, p. 171-182. Je remercie Étienne Anheim pour ces références et, plus largement, pour nos échanges de ces dernières années auxquels doit beaucoup cette note critique.
  • [48]
    James Hinton, The Mass Observers: A History, 1937-1949, Oxford, Oxford University Press, 2013.
  • [49]
    Ariane Mak, « En grève et en guerre. Les mineurs britanniques au prisme des enquêtes du Mass Observation (1939-1945) », thèse de doctorat, Ehess, 2018 ; Id., « Le Mass Observation. Retour sur un singulier collectif d’enquête britannique (1937-1949) », ethnographiques.org, 32, 2016, https://www.ethnographiques.org/2016/Mak.
  • [50]
    Stéphane Baciocchi, Alain Cottereau et Marie-Paule Hille (dir.), Le pouvoir des gouvernés. Ethnographies de savoir-faire politiques, observés sur quatre continents, Bruxelles, Peter Lang, 2018.
  • [51]
    Voir respectivement Sylvain Piron, « L’enquête sur les ordres Mendiants et l’urbanisation », in É. Anheim, A. Feniello et S. Gioanni (dir.), Jacques Le Goff et l’Italie, Rome, École française de Rome/Isime 2017, p. 57-72 ; Jean-Paul Aron, Paul Dumont et Emmanuel Le Roy Ladurie, Anthropologie du conscrit français d’après les comptes numériques et sommaires du recrutement de l’armée (1819-1826). Présentation cartographique, Paris, Mouton, 1972 ; François Furet et Jacques Ozouf, Lire et écrire. L’alphabétisation des Français de Calvin à Jules Ferry, Paris, Éd. de Minuit, 2 vol., 1977.
  • [52]
    Raphaëlle Branche, « Le sexe, le genre et la parole. Quand une femme interroge des hommes sur les violences infligées », in F. Thébaud et G. Dermenjian (dir.), Quand les femmes témoignent. Histoire orale. Histoire des femmes. Mémoire des femmes, Paris, Publisud, 2009, p. 217-226.
  • [53]
    Véronique Ginouvès et Isabelle Gras (dir.), La diffusion numérique des données SHS. Guide des bonnes pratiques éthiques et juridiques, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2018.
  • [54]
    S. Duchesne, « De l’analyse secondaire… », art. cit., ici p. 13.
  • [55]
    Voir le dossier « Archivari » que Françoise Zonabend a coordonné avec Jean Jamin dans Gradhiva, 30-31, 2001-2002.
  • [56]
    Françoise Zonabend, « Des femmes, des terrains, des archives. Un retour réflexif sur les pratiques ethnographiques en anthropologie du proche », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 41-78, ici p. 74.
  • [57]
    Ibid.
  • [58]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire..., op. cit., p. 109.
  • [59]
    Marie Scot, « Les archives britanniques des sciences sociales. Deux études de cas : UK Data Archive (UKDA) et Qualidata », Genèses, 63-2, 2006, p. 46-65.
  • [60]
    Mike Savage, Identities and Social Change in Britain since 1940: The Politics of Method, Oxford, Oxford University Press, 2010.
  • [61]
    Information recueillie lors de la table ronde « Diffuser des données aujourd’hui : enjeux juridiques et éthiques », animée par Philippe Mouron et Isabelle Gras avec l’équipe de beQuali, le 3 octobre 2019, à l’occasion de la journée d’étude « Diffuser les données numériques en Shs : le droit et l’éthique comme alliés » à la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (Mmsh) d’Aix-en-Provence. Pour une présentation détaillée du projet, voir Selma Bendjaballah et al., « Anonymat et confidentialité des données. L’expérience de beQuali », in V. Ginouvès et I. Gras (dir.), La diffusion numérique…, op. cit., p. 207-222.
  • [62]
    Florence Descamps, « Utiliser et réutiliser les archives orales. Comment faire des archives orales un outil de recherche collectif ? », Les carnets de la phonothèque, 2016, https://phonotheque.hypotheses.org/17821. Ces questions ont été également au cœur de ma thèse : Bénedicte Girault, « Mémoires d’un ministère. Une analyse secondaire de l’enquête orale du Service d’histoire de l’éducation (c. 1950-c. 2010) », thèse de doctorat, université de Cergy-Pontoise, 2018.
  • [63]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 25.
  • [64]
    Association des amis d’Abdelmalek Sayad, Actualité de la pensée d’Abdelmalek Sayad, Casablanca, Éd. Le Fennec, 2010.
  • [65]
    F. Zonabend, « Des femmes, des terrains, des archives… », art. cit., ici p. 70 ; Id., Le Laboratoire d’anthropologie sociale. 50 ans d’histoire (1960-2010), Paris, Cnrs/Ehess/Collège de France, 2010.
  • [66]
    A. Borzeix et G. Rot, Genèse d’une discipline…, op. cit.
  • [67]
    Voir l’objectivation quantitative de ce reflux réalisée par Claire Lemercier à partir de l’analyse des rapports d’activités du Crh : Claire Lemercier, « Le Centre de recherches historiques comme ‘structure fédérative’ ? », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, https://doi.org/10.4000/ccrh.3069.
  • [68]
    André Burguière, « Plozévet, une mystique de l’interdisciplinarité ? », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, https://doi.org/10.4000/ccrh.3065.

1En prenant certaines grandes enquêtes de sciences sociales réalisées en France entre 1950 et 1980 à la fois comme objets et expériences collectives à historiciser (« histoire d’enquêtes ») et comme matériaux pour de nouvelles recherches (« revisites »), l’ouvrage collectif Le laboratoire des sciences sociales. Histoires d’enquêtes et revisites, coordonné par Gilles Laferté, Paul Pasquali et Nicolas Renahy, pose de manière originale et empirique la question des archives de la recherche en sciences sociales. Parce qu’elle associe étroitement opération historiographique et analyse secondaire, cette publication récente est l’occasion de revenir sur les problèmes spécifiques que soulèvent ces archives pour l’histoire et la pratique des sciences sociales.

2Depuis les années 1990, la question des archives de la recherche s’est structurée en France autour d’une double exigence. D’une part, la réutilisation par de nouveaux chercheurs de données produites lors d’enquêtes passées implique de connaître les conditions de leur production ; elle lie donc intimement, d’un point de vue méthodo logique, la contextualisation de l’enquête à son exploitation, la seconde étant impossible sans la première. Cette prise de conscience collective s’est cristallisée à partir de 1986, avec la diffusion aux chercheurs des enquêtes issues de la statistique publique par le Centre d’études sociologiques (Ces), puis par le Laboratoire d’analyses et de méthodes appliquées à la sociologie (Lasmas) – devenu le Centre Maurice Halbwachs (Chm) depuis sa fusion avec le Laboratoire des sciences sociales de l’École normale supérieure (Ens) en 2004 –, dont le rapport de Roxane Silberman sur « Les sciences sociales et leurs données » résume les enjeux et les défis [1]. Pour réutiliser scientifiquement ces gisements de données quantitatives, les dispositifs et les pratiques d’enquêtes comme la construction des catégories d’analyse doivent pouvoir être interrogés et nécessitent, par conséquent, d’être documentés [2]. Les archives des sociologues deviennent un enjeu pour mettre à disposition les coulisses de l’enquête, en vue d’une nouvelle exploitation des données produites. À partir des années 2000, les enquêtes qualitatives font l’objet d’un même mouvement impliquant les autres sciences sociales, non sans susciter un certain nombre de débats sur les possibilités de réutilisation de ces données co-construites dans des dispositifs d’enquêtes à chaque fois singuliers [3].

3D’autre part, la réflexion sur les archives des sciences sociales s’enracine dans une histoire des sciences sociales archivistiquement documentée, autrement dit qui ne s’écrirait pas à partir des seuls résultats de la recherche et des processus de canonisation de grandes figures tutélaires, mais qui se saisirait des opérations savantes au ras des pratiques et rendrait compte des interactions entre les différents mondes – scientifiques, institutionnels et politiques – dans lesquels s’inscrit le chercheur. En 1999, le cinquantième anniversaire du Centre de recherches historiques (Crh) donna ainsi lieu, dans le cadre d’un séminaire puis d’un colloque, à un retour sur l’histoire du laboratoire, en interrogeant la revendication d’un travail collectif constitutif de son identité scientifique – et, avec lui, de celle des Annales – mené en lien avec un dépouillement de ses archives [4].

4Ce double mouvement correspond à la double nature des archives de la recherche, à la fois matériaux, y compris secondaires, d’une pratique des sciences sociales et sources d’une histoire sociale de la discipline, de ses acteurs et de ses savoirs. Si l’étude de la fabrication des données relève de la méthode critique classique, de préliminaires méthodologiques, elle est aussi devenue un objet de recherche à part entière, entendant participer à cette écriture de l’histoire des sciences sociales. D’emblée se fait jour une interrogation : s’il demeure essentiel, du point de vue méthodologique, de repenser la place des archives dans l’histoire des sciences sociales, la double nature des archives de la recherche n’est-elle pas, du point de vue épistémologique, partagée par toutes les sources, en particulier celles des historiens, quelle que soit la période ? Plus simplement, les questions que posent les enquêtes anciennes étudiées par les historiens, les archéologues ou d’autres spécialistes sont-elles différentes de celles soulevées par les enquêtes des sciences sociales, au sens de la sociologie et de l’anthropologie ? La démarche de Pasquali, Laferté et Renahy conduit à revenir sur la définition même de l’« archive », sur sa place dans l’opération historiographique et sur ce qui la distingue de la notion de document. Car toute « trace » exhumée ne constitue pas pour autant une archive. Les archives sont le résultat d’une double temporalité : le premier moment correspond à celui de la production de ce qui est un document, le second à sa transformation en archives par la transmission, la sélection, la conservation, le classement et l’indexation de ce document dans un fonds déposé dans une institution. Ni neutre ni transparent, l’archivage fait partie de la critique des sources, qui ne se réduit pas, malgré la tradition héritée des discours méthodiques du xixe siècle, à celle du document [5]. Les archives des sciences sociales ne font pas exception : les documents produits par le chercheur ne deviennent des archives qu’au terme d’un processus qui épouse des logiques personnelles, disciplinaires, institutionnelles et mémorielles qui méritent d’être étudiées en tant que telles.

5Les archives des sciences sociales semblent aujourd’hui un observatoire original pour comprendre le renouvellement de ces disciplines et leur rapport à l’archivage et à la documentation, non seulement celle qu’elles produisent, mais aussi la documentation qu’elles mobilisent, en général. En 2006, la revue Genèses a consacré un dossier spécial à ces questions en soulignant le retard français tant en matière d’archivage que d’analyse secondaire, marquant la fin d’un premier moment de réflexion [6]. Depuis, ce champ de recherche a suscité un certain nombre de travaux empiriques et de propositions méthodologiques dans l’espace francophone. Mise en œuvre expérimentale des pistes ouvertes par une histoire des sciences sociales à partir d’histoires et de revisites d’enquêtes dans un effort de réflexivité et de cumulativité, Le laboratoire des sciences sociales éclaire à nouveaux frais ce déplacement, ses enjeux et ses effets sur les pratiques de recherche actuelles, issues de configurations socio-intellectuelles propres à la France et à ses institutions, même si l’on peut les mettre ponctuellement en regard d’autres horizons, en particulier celui du Royaume-Uni.

Une expérimentation collective sur la fabrique des enquêtes

6L’ouvrage se présente comme le résultat d’une « expérimentation collective [7] » initiée dans le cadre du séminaire « Histoires d’enquêtes. Pratiques, carrières et division du travail scientifique en sociologie », tenu à l’École des hautes études en sciences sociales (Ehess) de 2012 à 2014 par les trois codirecteurs. Il réunit six contributions qui, chacune, retracent l’histoire d’une ou de plusieurs enquêtes réalisées par des chercheurs français entre 1950 et 1980 pour nourrir une histoire sociale des sciences sociales, attentive aux modalités concrètes du travail scientifique. Les champs couverts par les enquêtes revisitées embrassent un large spectre : sociologie du travail (enquêtes sur les laminoirs de Mont-Saint-Martin en Lorraine dirigée par Jean-Daniel Reynaud et Alain Touraine, sur l’automation par Pierre Naville, sur les personnels du ministre des Anciens combattants par Michel Crozier et sur les ouvriers spécialisés (Os) dans l’industrie automobile dans le cadre d’un « contrat de connaissance » signé entre l’entreprise Renault et le Centre national de la recherche scientifique (Cnrs)), sociologie urbaine et de la délinquance (enquête sur le grand ensemble d’Antony par Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire au sein du Centre de sociologie européenne (Cse)), sociologie de la famille (enquête sur le choix du conjoint par Alain Girard, prolongée par celle sur la formation du couple par Michel Bozon et François Héran à l’Institut national d’études démographiques (Ined)), anthropologie du proche (enquête sur la communauté villageoise de Minot par Tina Jolas, Marie-Claude Pingaud, Yvonne Verdier et Françoise Zonabend du Laboratoire d’anthropologie sociale (Las)), et sur les riverains et les travailleurs du site de La Hague par Zonabend) et anthropologie du lointain (les Kanak de Nouvelle-Calédonie par Alban Bensa). À la diversité des champs, des institutions de recherche et des objets s’ajoute l’hétérogénéité des modalités de la recherche, aussi bien pour les enquêtes premières – dans la mesure où se côtoient enquêtes individuelles (Bensa, Zonabend) et grandes enquêtes collectives plus ou moins connues – que pour les revisites, parfois réalisées par leurs propres auteurs (Bozon, Zonabend), mais le plus souvent entreprises par de nouveaux chercheurs. Pour ces derniers, les liens qui les unissent à l’enquête première sont de deux natures, qui se recouvrent parfois : soit il s’agit de l’objet de l’enquête lui-même qui est partagé et dont la revisite est liée à leurs propres recherches (les Kanak pour Benoît Trépied, les ouvriers étrangers pour Laure Pitti, la formation du couple pour Bozon [8]), soit le lien repose sur les acteurs individuels et institutionnels de l’enquête (le Cse et Pierre Bourdieu pour Pasquali, le Las pour Zonabend, la revue Sociologie du travail et ses fondateurs pour Gwenaëlle Rot et François Vatin [9]). Derrière chaque enquête se devine une histoire singulière d’archives, prise entre les résultats d’une enquête d’un premier chercheur et la revisite, parfois fortuite, d’un second chercheur. Les étapes sont, elles aussi, diverses, mais le schéma le plus récurrent semble avoir comme point de départ des résultats publiés ou des données archivées d’une enquête appréhendée en tant que source pour une nouvelle enquête, qui conduit, dans un second temps, à la recherche des archives de l’enquête première (notes de séminaires, correspondances, questionnaires, etc.) pour en éclairer le contexte et les modes de production, et débouche, dans le cadre de l’ouvrage, sur l’écriture d’une page de l’histoire des sciences sociales.

7L’introduction présente les clés de la démarche qui donne son unité au livre. Pour les coordinateurs, l’histoire sociale des sciences sociales est, pour reprendre les mots de Bourdieu, « l’instrument privilégié de la réflexivité critique, condition impérative de la lucidité collective, et aussi individuelle [10] ». L’ouvrage peut alors se lire comme un manifeste et une mise à l’épreuve de cette « réflexivité historienne » qui a vocation à être une « pratique ordinaire et non [une] sous-branche de l’histoire des sciences sociales [11] » en intégrant l’histoire des pratiques, des savoirs et des schèmes de pensée dans la science du présent. Cette vocation formulée par les sociologues rapproche leur démarche de l’intervention historiographique d’historiens dont ce n’est pas la spécialité et qu’on peut lier à une commune exigence de réflexivité. Cependant, comme le notait Étienne Anheim, « les historiens qui ont un domaine de spécialisation auquel s’ajoute l’historiographie n’emploient pas toujours les mêmes outils conceptuels et les mêmes méthodes dans les deux facettes de leur production [12] ». Quelles sont les règles de la méthode adoptées par les contributeurs du Laboratoire des sciences sociales pour mettre en œuvre cette « réflexivité historienne » ?

La « réflexivité historienne » comme pratique ordinaire

8On peut commencer par s’interroger sur la situation du volume dans l’espace théorique des sciences sociales. Étudiants du Laboratoire des sciences sociales de l’Ens dans les années 1990, les codirecteurs de l’ouvrage ont reçu « le projet d’unification des sciences sociales en héritage [13] ». Si le titre de l’ouvrage, en mobilisant la métaphore du laboratoire, rappelle la sociologie des sciences développée à l’université d’Édimbourg autour du programme fort de David Bloor ou, en France, le travail de Bruno Latour, le sous-titre fait écho au dernier ouvrage de Christian Topalov, Histoires d’enquêtes, Londres, Paris, Chicago (1880-1930), publié en 2015, et le titre de l’introduction, « Pour une réflexivité historienne dans les sciences sociales contemporaines », renvoie au post-scriptum « Des livres et des enquêtes. Pour un historicisme réflexif » avec lequel Topalov concluait le livre publié en hommage à Bernard Lepetit, La ville des sciences sociales, en 2001 [14]. Cette triple filiation – bourdieusienne, des sciences studies et du pragmatisme socio-historique –, qui réunit des courants ayant pu s’opposer dans le passé, témoigne d’une recomposition méthodologique originale, dont plusieurs revues proches de l’Ehess, et parfois concurrentes, ont été les « laboratoires » dans les années 1990-2000, non seulement les Annales, mais aussi la Revue de synthèse ou Genèses, à la création de laquelle Topalov, justement, a pris une part importante.

9Les auteurs du collectif partagent la même volonté de ne pas réduire l’histoire des sciences sociales à une histoire des idées, des concepts et des écoles, mais de restituer et d’historiciser les pratiques concrètes des chercheurs. L’introduction offre une riche synthèse des différentes expériences d’écriture de l’histoire des sciences sociales, menées ces dernières années tant par des sociologues que par des historiens ou des anthropologues, qui ont inspiré les codirecteurs, dans une perspective de cumulativité critique. Les propositions de méthode esquissées par Topalov dans La ville des sciences sociales, formalisées dans le décalogue qui ouvre ses Histoires d’enquêtes – désencombrer les textes, transformer les textes en documents, environner les œuvres avec des archives, sortir du tunnel, identifier des conversations, situer la science, décrire les pratiques –, constituent une référence particulièrement développée [15]. Si ce programme rencontre la tendance générale des sciences sociales depuis une trentaine d’années à s’interroger sur la construction des données [16], le décalogue de Topalov porte aussi l’empreinte de ce qu’on appelle parfois le « tournant documentaire » qui serait engagé par les historiens depuis les années 1990. Plutôt qu’aux recherches sur les archives ou la scripturalité, le décalogue fait explicitement référence aux travaux parallèles sur l’histoire du livre et de la lecture menés autour de Roger Chartier [17]. Pourtant, par bien des traits, le programme méthodologique décliné par Topalov et les auteurs du Laboratoire des sciences sociales se présente comme une « archéologie des textes [18] » produits par les enquêtes pour resituer et restituer les questions et le programme des chercheurs, avec une attention particulière accordée à la matérialité des textes, notamment aux dispositifs visuels d’exposition des données et des argumentaires. Le travail sur les notes de bas de page, les tableaux, les graphiques, la place des citations, les remerciements vis-à-vis des publications qui renseignent les stratégies d’édition est complété par l’analyse des notes d’observation, des carnets de recherche, des transcriptions d’entretiens, des procédures de codage, des notes de séminaires, des correspondances, qui sont autant d’éléments de description des collectifs de chercheurs. Cependant, les deux entreprises diffèrent en termes de sources : les archives clairement identifiées et accessibles dans des lieux dédiés utilisées par Topalov se distinguent des corpus ouverts et instables des contributeurs du Laboratoire des sciences sociales.

10Les six études de cas que constituent les histoires d’enquêtes et leur(s) revisite(s) réunies dans l’ouvrage de Pasquali, Laferté et Renahy explorent la diversité des terrains, des objets et des échelles possibles pour une telle démarche, tout en s’inscrivant dans un moment historiographique plus large. En effet, prendre l’enquête comme objet d’histoire a suscité ces dernières années des recherches d’une remarquable fécondité [19]. Concernant l’histoire du Moyen Âge, les enquêtes – inquisitoriales, pastorales ou administratives – et les archives qui la documentent apparaissent comme des sources irremplaçables pour saisir les gestes les plus routiniers de ceux qui s’y livrent dans le cas de leur activité professionnelle, mais on peut aussi songer à l’exploitation d’enquêtes aussi diverses que celles sur la noblesse ou sur les intendants au xviie siècle, ou encore aux enquêtes de travaux publics étudiées par Frédéric Graber [20]. C’est le cas des enquêtes anciennes et, au-delà, de bien d’autres sources : les cartulaires médiévaux, par exemple, peuvent s’utiliser non seulement pour une exploitation secondaire des données rassemblées par les clercs qui les ont constitués, dans une perspective d’histoire économique et sociale traditionnelle, mais aussi pour une exploitation réflexive qui s’interroge sur le processus de construction de la source, de « cartularisation », comme l’a pratiquée Pierre Chastang en retraçant la logique des producteurs dans une perspective d’histoire culturelle [21]. Pour les mêmes raisons, les histoires d’enquêtes de sciences sociales permettent d’interroger et d’historiciser la division du travail dans les formes collectives de la recherche et d’identifier tout ce qui, de la dynamique de l’enquête, est invisibilisé dans les productions scientifiques finales. Elles offrent ainsi la possibilité d’entrer dans la boîte noire de la production des données, avec une dimension réflexive supplémentaire, puisqu’il s’agit de revenir sur des entreprises de connaissance issues des sciences sociales et non de l’Église, de l’État ou d’une institution souveraine, comme c’est souvent le cas pour les enquêtes médiévales et modernes.

11Cette réflexivité est précisément le point de départ de l’entreprise des coordinateurs. En 2006, dans le cadre d’un projet « jeunes chercheurs » financé par l’Agence nationale de la recherche (Anr), deux d’entre eux, Laferté et Renahy, sont engagés dans une enquête collective sur un terrain, le Châtillonais et la région de Montbard, déjà investi à la fin des années 1960 par une Recherche coopérative sur programme (Rcp) du Cnrs, puis par quatre chercheuses du Las (l’enquête de Minot, sur laquelle nous reviendrons) et revisité dix ans plus tard par Florence Weber [22]. Or Laferté et Renahy racontent avoir pris conscience que « l’histoire des sciences sociales ne proposait pas d’exemple d’enquêtes collectives auxquelles [ils] pouv[aient] [s’]identifier [23] ». Dans la nouvelle configuration du financement de la recherche sur projet qui s’impose dans les années 2000, les questions pratiques et théoriques que pose un collectif de recherche deviennent pourtant essentielles. Les grandes enquêtes menées dans les années 1960-1970 apparaissent à la fois comme des sources à revisiter et des expériences à méditer. Dans le numéro de Genèses déjà évoqué, Laferté consacre un article largement programmatique à ces questions, en insistant sur l’enjeu que présentent les pratiques de l’archivage scientifique [24]. En retraçant l’histoire de la constitution des trois fonds liés au terrain revisité (le fonds de la Rcp du Châtillonnais conservé au Musée national des Arts et Traditions populaires, le fonds Minot du Las, le fonds Montbard constitué des données de terrain de Weber), il met à jour à la fois la complexité et la diversité des logiques d’archivages et « le flou » du statut de ces archives qui ne peuvent épouser les catégories juridiques « publiques » et « privées ». Les interrogations qu’il soulève ne sont pas isolées : elles témoignent d’un mouvement de renouveau des pratiques d’enquêtes collectives, dont rend compte, dix ans plus tard, un numéro spécial de la revue électronique ethnographiques.org[25]. Cependant, force est de constater qu’aujourd’hui encore, la masse des données recueillies pendant l’âge d’or des enquêtes collectives reste largement dispersée et inexploitée, et l’histoire de ces si nombreuses enquêtes marginale ou liée à des événements commémoratifs comme l’hommage rendu à Jacques Ozouf en 2009 [26].

12Sans être explicitement définie dans l’ouvrage, la notion d’enquête recouvre l’ensemble des opérations du chercheur ou du collectif, depuis la construction de son objet et de ses questions jusqu’à la production de ses résultats, en passant par le recueil des données et leur traitement. Selon la focale adoptée dans les différentes contributions, toutes ces opérations ne sont pas analysées au même degré. Prendre l’enquête comme objet d’investigation présente un autre intérêt : chaque contribution prend en charge un périmètre institutionnel spécifique et s’intéresse à une conjoncture scientifique et politique originale. C’est, à chaque fois, une topographie en même temps qu’un moment d’histoire que « l’enquête sur l’enquête » permet de saisir, dans une perspective historiographique fondée sur l’observation du travail ordinaire du chercheur. Outre les travaux de Topalov déjà évoqués, le projet rappelle la remarquable édition critique des enquêtes de Robert Hertz par Stéphane Baciocchi et Nicolas Mariot, et, plus encore, par sa dimension d’expérimentation collective, le livre réalisé autour des archives de Georges Duby, sous la direction de Jacques Dalarun et de Patrick Boucheron, publié en 2015, auquel se réfèrent explicitement les coordinateurs dans leur introduction [27]. Il est toutefois une différence importante, puisque le volume ne s’intéresse pas à la production individuelle de grands auteurs, mais au travail collectif d’équipes de recherche impliquant des acteurs parfois plus obscurs, comme ce fut le cas pour le travail réalisé autour de l’enquête TRA [28], autre exemple d’enquête réflexive que l’on peut rapprocher de l’ouvrage dirigé par Pasquali, Laferté et Renahy. Ainsi, dans Le laboratoire des sciences sociales, à partir de trois enquêtes menées à distance par les quatre figures dominantes du champ de la sociologie du travail durant les années 1950 – Reynaud, Touraine, Naville, Crozier –, Rot et Vatin éclairent non seulement le travail sociologique au quotidien et dans sa matérialité, mais aussi la division du travail et les conditions d’entrée dans la carrière de recherche en sociologie. En tirant parti notamment des correspondances épistolaires [29] engendrées par la distance géographique entre les directeurs et les enquêteurs de terrain, les deux auteurs reconstituent les trajectoires des trois jeunes chercheurs à qui sont confiées les enquêtes de terrain, et montrent combien, dans les années 1950, les cadres intellectuels, les méthodes d’enquête et les institutions de recherche étaient encore en construction [30]. Replacées dans une chaîne de production, ces enquêtes documentées par les archives en cours d’inventaire des directeurs et les archives privées de l’enquêteur permettent de saisir les différents acteurs dans leurs interactions – ou leurs « conversations », selon le terme de Topalov – avec les différents mondes sociaux dans lesquels ils sont engagés.

13En dévoilant les coulisses de la recherche, la contribution de Pasquali apporte quant à elle deux éclairages nouveaux. D’une part, elle montre comment l’enquête collective sur Antony dans les années 1960 – à l’origine des deux articles, devenus classiques, « Proximité spatiale et distance sociale » et « La délinquance juvénile, essai de construction d’objet » [31] – est née de la rencontre entre les projets de réformateurs locaux liés à la mairie d’Antony et les sociologues du Cse par l’intermédiaire de Bourdieu, grâce aux archives communales d’Antony et à celles du fonds du Cse. D’autre part, l’article explore, à partir des transcriptions ronéotées des séminaires du Cse et des notes de participants, comment se noue une « conversation à distance » entre les enquêteurs d’Antony et les sociologues de Chicago. Ces deux exemples sont révélateurs de la diversité des types de documents mobilisés dans le Laboratoire des sciences sociales et peut-être de l’ambivalence des archives utilisées dans le cadre de ces enquêtes sur l’enquête. Entre les archives de la ville d’Antony, les archives de l’enquête conservées dans le fonds du Cse, les archives de chercheurs en cours d’inventaire (par exemple celles de Bourdieu) et les notes de séminaires émanant de papiers privés d’anciens membres du Centre, il y a en effet une différence de nature qui découpe un périmètre excédant la notion d’archives.

Archiver pour l’histoire et pour l’avenir des sciences sociales

14Alors que les sources mobilisées par les historiens ont toutes connu les opérations d’archivage classiques de tri, de classement et d’inventaire [32], celles des contributeurs du Laboratoire des sciences sociales ont un statut plus ambigu du fait du raccourcissement temporel entre le moment de la production de l’enquête et celui de son histoire et de sa revisite. Chez les contributeurs, le plus souvent, l’archivage ne précède pas l’histoire d’enquête mais en est concomitant, voire en résulte, ce qui n’est pas sans interagir avec la construction des archives et, partant, avec la transmission et la conservation de ces matériaux pour l’histoire de la discipline. Au-delà des archives constituées, l’enquête sur l’enquête produit elle-même de nouveaux documents, virtuellement destinés à devenir à leur tour des archives de la recherche. Ainsi, pour les besoins de son enquête sur l’enquête d’Antony, Pasquali procède à des entretiens oraux avec les enquêteurs premiers, Chamboredon et Lemaire, avant et après le dépouillement des archives, afin de préciser le contexte de l’enquête, de mieux l’inscrire dans la trajectoire biographique des chercheurs et d’éclairer les « enjeux invisibles tant dans les archives que dans leurs publications [33] ». C’est peut-être là que s’observe la principale distinction entre les archives des historiens qui s’intéressent à des enquêtes passées – celles-ci formant un ensemble clos, produit de différentes stratégies archivistiques et mémorielles – et celles des enquêtes de sciences sociales récentes, qui peuvent être documentées en suscitant de nouveaux dépôts, en exhumant des papiers privés endormis dans des caves, voire en créant de toutes pièces de nouvelles archives, comme la collecte de témoignages oraux.

15C’est là aussi que se manifeste le déplacement le plus significatif en matière d’archivage des sciences sociales. La pratique est ancienne et l’on pourrait en décrire la généalogie, depuis les papiers des érudits des xviie et xviiie siècles jusqu’à la création d’institutions spécialisées, comme l’Institut Mémoires de l’édition contemporaine (Imec) en 1988, en passant par les archives des savants du xixe siècle recueillies aux Archives nationales (An) ou à la bibliothèque de l’Institut de France. Cependant, alors que la démarche était avant tout conservatoire et patrimoniale et concernait l’histoire des sciences sociales, celle des coordinateurs du Laboratoire des sciences sociales, dans le prolongement direct des premières lignes du numéro de Genèses « Pourquoi archiver les sciences sociales ? », a pour ambition de « contribuer aux débats actuels sur la scientificité des sciences sociales [en engageant] leur avenir plus que leur passé [34] ». Cette contribution aux débats actuels se décline sous deux angles différents : la scientificité et l’historicité des pratiques en sciences sociales, et les conditions d’un retour sur les données des enquêtes pour d’éventuelles nouvelles recherches.

Revisite et cumulativité des savoirs

16Dans cette perspective, Le laboratoire des sciences sociales est profondément original dans ses finalités, la recontextualisation de l’enquête ne constituant qu’une première étape d’une histoire des sciences sociales qui engage le chercheur qui s’y livre. Si Topalov utilisait la méthode historienne pour mettre à distance des enquêtes dont les méthodes et les questions posées ne seraient plus les nôtres, les contributeurs du Laboratoire des sciences sociales entretiennent avec les enquêtes dont ils font l’histoire des liens intimes scientifiques et/ou affectifs, même quand il ne s’agit pas de leurs propres enquêtes, et revendiquent une commune « posture non légitimiste [35] ». Ils assument la part d’affects inhérente au processus de revisite pour mieux l’objectiver et privilégient l’histoire des « prédécesseurs immédiats » plutôt que des généalogies sélectives, biaisées par des héritages et des dettes envers des « pionniers » ou des « fondateurs » consacrés par l’histoire des sciences sociales. En définitive, la singularité de l’ouvrage collectif dans le paysage actuel de la recherche en France réside dans l’ambition, à travers la revisite d’enquêtes passées, d’éclairer les pratiques de recherche et de produire de nouveaux savoirs. Tel est le moyen de conjurer la téléologie des sciences sociales sans pour autant renoncer à une certaine cumulativité [36].

17Longtemps inexistante en France, la pratique de la revisite, ou plus largement de l’analyse secondaire, est bien plus courante dans le monde anglophone. L’introduction du Laboratoire des sciences sociales fait d’ailleurs référence aux travaux du sociologue Michael Burawoy et à son article de 2003 « Revisits: An Outline of a Theory of Reflexive Ethnography », traduit en français en 2010 [37]. Sa réflexion théorique découle de sa pratique personnelle de l’analyse secondaire, dont il a fait l’expérience à l’occasion de sa thèse dont est issu son livre, Manufacturing Consent, publié il y a quarante ans et récemment traduit en français, qui reposait sur une enquête réalisée sur le même terrain trente ans auparavant par Donald Roy [38]. Dans cet article fondateur, le sociologue britannique propose une typologie des formes que peut prendre l’analyse secondaire, en distinguant la « revisite » (comparaison, à deux périodes différentes, d’un même site d’enquête, par le même enquêteur ou par d’autres qui reviennent sur « son » terrain) du « réexamen » (questionnement d’une enquête passée, sans réaliser de nouvelle enquête), de l’« actualisation » (usage d’une enquête antérieure à l’aune de nouvelles questions ou données, sans la mettre au centre de la recherche) et de la « réplication » (reproduction à l’identique, que Burawoy estime impossible en ethnographie). S’ils recourent au terme « revisite » dans le sous-titre du livre, les coordinateurs du Laboratoire des sciences sociales optent toutefois pour une définition élargie, qui englobe toutes les modalités que peut prendre l’analyse secondaire d’une enquête passée et qui associe étroitement objectif historiographique et production de nouvelles enquêtes.

18Si la revisite entend restituer à la fois l’historicité des données de l’enquête première et celle du regard du chercheur au moment de l’enquête, elle vise toujours à interroger les liens de la science du passé avec la science contemporaine. Ce positionnement assumé reprend en partie les termes du débat autour de l’analyse secondaire tel qu’il a été posé, en France, par Sophie Duchesne [39]. Cette dernière distingue deux conceptions en la matière : la première, résolument « constructiviste », réunit tous ceux pour qui le contexte, la situation de l’enquête et la co-construction des données rendent impossible leur réexploitation par un autre chercheur autour d’une nouvelle problématique [40] ; la seconde, davantage « positiviste », est partagée par ceux pour qui les enquêtes qualitatives, à condition d’être documentées, représentent une source comme les autres, soulevant les mêmes difficultés et nécessitant un travail critique similaire – il serait possible, dans ce cas, de réutiliser les enquêtes qualitatives passées en leur posant de nouvelles questions, comme l’a démontré Libby Bishop à partir de la revisite de deux enquêtes classiques (The Edwardians de Paul Thompson et, surtout, Mothers and Daughters de Mildred Blaxter et Elizabeth Paterson, un livre d’entretiens réalisés avec des grands-mères dans les années 1970 [41]) pour une nouvelle enquête sur les pratiques alimentaires [42]. Ce sont cependant moins ces effets cumulatifs en termes de connaissances que cherchent à démontrer les contributeurs du Laboratoire des sciences sociales que les gains méthodo logiques et épistémologiques apportés par la revisite. Leur pari est que la distance temporelle entre l’enquête première et l’enquête seconde crée non pas une irréductible discontinuité mais de nouvelles problématiques qui peuvent participer à une plus grande scientificité de la recherche [43].

19Ainsi, le décalage temporel qu’implique la revisite est exploité comme un révélateur des biais passés inaperçus au moment de l’enquête. C’est le cas de la revisite par Zonabend de ses propres enquêtes, qui fournit l’occasion d’analyser ce que le genre fait à l’enquête, à l’écriture ethnographique et à la discipline, ou de celle menée par Pitti qui, en recontextualisant historiquement et scientifiquement une enquête oubliée sur les Os dans l’industrie automobile, menée entre 1984 et 1986 en réponse à une commande publique dans le cadre des contrats de connaissance engagés par le gouvernement socialiste, analyse le glissement de la question initiale des Os à celle des immigrés. À partir d’une configuration documentaire originale qui croise les résultats publiés de l’enquête, les archives de l’entreprise Renault et celles d’Abdelmalek Sayad, l’un des trente-sept chercheurs et vacataires impliqués dans cette enquête, elle montre que la racialisation de la question repose en partie sur un effet de postures scientifiques et de clivages politiques, au moment où s’autonomise l’immigration comme objet de recherche dans le contexte des premières restructurations industrielles. À travers les métamorphoses que connaissent les enquêtes dans leur déroulement, les déplacements méthodologiques et les glissements thématiques, c’est toute la contingence de la recherche qui est exhumée et les effets sur l’enquête du lien entre le(s) chercheur(s) et la construction de leur objet qui sont interrogés. Les enquêtes sur l’enquête et la production d’archives qu’elles peuvent susciter ouvrent des pistes imprévues, que ce soit pour l’histoire des sciences sociales ou pour la production de nouvelles enquêtes. Dans le cadre de l’enquête sur le grand ensemble d’Antony revisitée par Pasquali, c’est un entretien biographique avec Chamboredon, à quarante ans de distance, qui met le chercheur sur la piste d’une « École de Chicago à Paris », quinze ans avant que le syntagme ne s’impose en France [44]. La revisite permetalors une fine analyse de la construction rétrospective de la mémoire à partir des traces écrites sur lesquelles elle s’est édifiée.

20Si la pratique de la revisite est courante dans l’histoire de l’anthropologie océaniste, l’enquête sur l’enquête de son directeur de thèse ne faisait pas partie du projet initial de Trépied. Revenir, trente ans plus tard, sur le terrain de Bensa lui fait prendre conscience de la manière dont les rivalités locales se sont rejouées dans l’enquête ethnographique, perçue par les enquêtés comme un enjeu d’histoire et de mémoire de deux lignages concurrents. En historicisant le travail de terrain et d’écriture de Bensa par son itinéraire ethnographique, intellectuel et politique, Trépied met au jour l’écart entre les objectifs scientifiques de Bensa et ce qui s’est joué localement entre deux clans kanaks – point aveugle d’une recherche conçue comme la démonstration d’une anthropologie contextualisée des mythes contre le structuralisme dominant et le récit historiographique colonial de la Nouvelle-Calédonie reléguant les Kanak à l’arrière-plan de la trame narrative. Bensa fut en effet victime, à son insu, d’informateurs qui privilégièrent la mémoire d’un clan kanak aux dépens d’un autre. Au-delà de cette correction bienvenue, la revisite permet d’éclairer la co-construction des données (entre enquêteur et enquêtés) que représente, au-delà de l’anthropologie, toute enquête qualitative en sciences sociales [45].

21Le lien entre histoire des sciences sociales et revisite d’enquêtes pour produire de nouveaux savoirs tend à s’imposer comme « une méthode d’enquête à part entière [46] » dont Le laboratoire des sciences sociales n’est qu’un échantillon des approches possibles. Là aussi, le volume fait écho à des réemplois concernant des périodes plus anciennes, a fortiori quand les archives originales ont disparu et qu’elles ne sont connues que par des enquêtes érudites – qu’il s’agisse de la collection Doat réunie au xviie siècle, aujourd’hui conservée à la Bibliothèque nationale de France (BnF), ou encore des « archives reconstituées » de la Naples angevine, compilées à partir des notes de chercheurs de la première moitié du xxe siècle, à la suite de l’incendie du fonds en 1943 [47]. Soutenue en 2018, la thèse d’Ariane Mak offre une belle illustration de la pratique historienne de la revisite et des effets cumulatifs d’une telle méthode. En étudiant les grèves minières britanniques entre 1940 et 1944 à partir des enquêtes produites pendant le conflit par le Mass Observation, une organisation indépendante de recherches en sciences sociales [48], la chercheuse a retracé un épisode méconnu de l’histoire des sciences sociales britanniques tout en produisant une histoire renouvelée de ces mouvements sociaux : en historicisant les dispositifs des enquêtes passées et en les complétant par une revisite du terrain à l’aide d’une nouvelle enquête orale, l’historienne a montré, au plus près des acteurs et de leur quotidien, comment la guerre a exacerbé le conflit entre patriotisme et justice sociale [49]. Qualifiée d’ « ethnographie historique » par son autrice, cette démarche s’inscrit dans un collectif de recherche participant au séminaire « Pratiques d’enquête et sens de la réalité sociale : approche sociologique, anthropologique et historique », dirigé par Alain Cottereau et Stéphane Baciocchi, là encore à l’Ehess, dans le cadre d’un programme de revisite d’enquêtes initié en 2007 [50].

L’injonction à documenter et à archiver

22D’un point de vue disciplinaire, la pierre que le volume apporte à l’édifice de l’histoire des sciences sociales concerne principalement la sociologie (quatre des six contributions) et, secondairement, l’anthropologie. Si la réflexivité historienne est le mot d’ordre des auteurs, l’absence d’historiens n’en est pas moins étonnante au regard de la riche tradition d’enquêtes collectives en ce domaine à l’Ehess – comme celle lancée par Jacques Le Goff en 1968 sur l’implantation des ordres mendiants et le fait urbain dans la France médiévale, celle sur l’anthropologie du conscrit français dirigée par Jean-Paul Aron, Paul Dumont et Emmanuel Le Roy Ladurie (elle-même une revisite des comptes numériques et sommaires du recrutement de l’armée de 1819 à 1826) ou encore celle sur l’alphabétisation pilotée par François Furet et Jacques Ozouf [51].

23La première explication de cette absence réside peut-être dans la nature différente des archives mobilisées par les chercheurs selon les disciplines. Alors que le sociologue et l’anthropologue, en complément des archives disponibles, produisent leurs propres sources dans le cadre de l’enquête, l’historien travaille le plus souvent sur des archives déjà constituées et destinées à d’autres usages sociaux : il se trouve toujours, d’une certaine manière, dans la position d’une « revisite ». Cependant, cette distinction disparaît pour tous les contemporanéistes qui mènent des entretiens et qui fabriquent donc des sources orales pour leur propre usage, en fonction de leur problématique de recherche. Dans ce cas, la question du dépôt des archives du chercheur se pose pour l’historien avec la même vivacité que pour le sociologue et l’anthropologue dans la perspective d’une réexploitation des entretiens réalisés. Si certains, comme Raphaëlle Branche, ont déjà souligné la nécessité de déposer les entretiens collectés – une analyse secondaire pouvant dévoiler des éléments qui avaient échappé au premier chercheur [52] –, la pratique reste rare et pose des questions éthiques encore débattues, à commencer par celle du pacte qui lie l’enquêteur aux enquêtés [53]. On peut s’interroger aussi sur l’obligation, pour les enquêtes financées sur des fonds publics, d’un dépôt des archives de l’enquête, disposition qui a été retenue et imposée en Grande-Bretagne [54]. Une telle mesure a beau revêtir un intérêt indéniable dans la perspective d’une revisite, elle n’est pas sans effets sur l’enquête elle-même et sur la qualité des archives de la recherche – filtrées et normalisées –, sans parler du sentiment de dépossession que cela peut représenter pour le chercheur comme pour les enquêtés. Les questions que soulèvent ces « ego-archives » trouvent un écho dans les choix que Zonabend, pourtant très engagée dans les entreprises d’archivages de la recherche [55], confie avoir opérés pour ses propres archives, notamment ses papiers de terrain ou ses journaux d’enquête, en se confrontant aux frontières poreuses entre l’intime, ou « l’identitaire [56]», le service de la science et le dévoilement de soi au risque du narcissisme. Ces écrits hybrides, à la fois scientifiques et introspectifs, relèvent d’une « archivistique inventée par chaque chercheur [57] » jouant avec la limite, toujours fragile, entre archives et documentation.

24L’absence des historiens dans le volume pourrait aussi s’expliquer par le cloisonnement disciplinaire. Si la sociologie et l’anthropologie sont depuis longtemps de larges pourvoyeuses de concepts, les données produites par leurs enquêtes empiriques restent souvent hors du champ d’investigation des historiens. Cela s’explique non seulement par une histoire des sciences sociales qui a longtemps été menée comme une histoire des idées, mais également par un déficit d’intérêt pour ce type de sources, comme le déplore Bozon, l’un des contributeurs :

25

Une déception pour moi provient de l’indifférence que les historiens du contemporain ont toujours manifestée pour ce matériau de recherche et les enquêtes quantitatives en général […] alors que les questionnaires ainsi que ceux de l’enquête de 1959 sont déposés au Centre des archives contemporaines et fournissent des données inédites sur l’histoire de la sociabilité, du mariage et des relations amoureuses depuis la Grande Guerre. Les historiens du contemporain ne s’intéressent pas aux sources secondaires que constituent les enquêtes contemporaines de la statistique publique, dont on pourrait faire une analyse critique, alors qu’ils font un usage abondant des données issues de la presse, pourtant plus problématiques à utiliser, ou de données de sondages peu fiables[58].

26En Grande-Bretagne, en revanche, la promotion de l’analyse secondaire se révèle, dès l’origine, indissociable de la politique d’archivage des matériaux de la recherche [59]. En 1994, les sociologues Paul Thompson et Louise Corti créent la première banque européenne de données qualitatives à l’université d’Essex, Qualidata, bientôt imitée dans plusieurs pays européens ; cette initiative a engendré, à partir des années 2000, de multiples analyses secondaires, non sans susciter d’importants débats méthodologiques et épistémologiques [60]. La « pratique ordinaire de la réflexivité historienne » a en effet pour corollaire un impératif de documentation, et le dossier de Genèses sur les archives de la recherche était également construit sur cette double exigence. Toutes les histoires d’enquête et les revisites impliquent d’identifier, de localiser et de réunir des archives éparses en fonction de l’inscription institutionnelle du chercheur et du site de l’enquête. Selon la focale adoptée, nous l’avons vu, les archives mobilisées par les contributeurs sont d’une grande diversité, tant par leur nature que par leur provenance, et elles soulèvent, par effet retour, la question des archives de la recherche. Les logiques institutionnelles, thématiques, géographiques de dépôt produisent de multiples fragmentations. Le cas de Zonabend est une nouvelle fois emblématique : sa revisite convoque des papiers personnels déposés dans des lieux aussi divers que la Maison des sciences de l’homme de Dijon (Msh Dijon), les archives départementales de la Manche, le fonds d’archive du Las et le site www.kinsources. Au-delà des initiatives individuelles de dépôt d’archives, des tentatives coordonnées sont mises en œuvre en France, notamment en s’appuyant sur l’expérience de la banque de données britannique Qualidata. Ainsi le Groupe de recherche énergie technologie et société (Grets) avait-il entrepris, dès 1998, de valoriser les études qualitatives et leurs matériaux dans des perspectives d’analyses secondaires. Des Journées internationales dédiées à « L’analyse secondaire en recherche qualitative. Utopies ou perspectives nouvelles ? », tenues en novembre 2005 à Grenoble, furent l’une des premières manifestations scientifiques françaises exclusivement consacrées à ce domaine. Du côté des sciences politiques, le programme beQuali (Banque d’enquêtes qualitatives en sciences humaines et sociales) – qui donna lieu, entre autres, en 2015, à un séminaire dédié à « La réutilisation d’enquêtes qualitatives en sciences sociales. Pratiques et enjeux méthodologiques » et, parallèlement, à la création d’une banque de données en ligne – met désormais à la disposition des chercheurs des entretiens qualitatifs dont les conditions de production sont solidement documentées. On y trouve d’ailleurs l’enquête « Formation des couples » de Bozon et Héran. Construite pour permettre l’analyse secondaire, beQuali est plus qu’une base de données, telles qu’elles ont tendance à se multiplier dans le cadre des Anr. Conçue comme un service national et gratuit de documentation, d’archivage et de mise à disposition en ligne d’enquêtes qualitatives en sciences humaines et sociales, elle propose non seulement des matériaux qui éclairent la construction des données, mais également un ensemble de métadonnées sur les dispositifs d’enquêtes et, en particulier, une « enquête sur l’enquête » nourrie par des entretiens ex post avec des enquêteurs premiers pour resituer l’enquête dans les trajectoires personnelles et les contextes institutionnels, et afin de compléter ce qui ne subsiste pas dans les archives de l’enquête. Au moment de la rédaction de cet article, malgré la qualité du travail réalisé, les seuls usages de la plateforme sont pédagogiques et aucune des enquêtes archivées et documentées n’a donné lieu à une analyse secondaire dans le cadre d’une nouvelle recherche [61]. Cette exigence de documentation des archives déposées se retrouve, enfin, dans l’évolution actuelle de l’histoire orale qui intègre désormais les questions de la fabrication de l’archive, de la collecte à l’archivage, voire au réemploi [62].

L’écueil mémoriel

27Enfin, les histoires d’enquêtes, qu’elles soient menées dans une perspective d’histoire des sciences sociales et/ou dans le cadre d’une revisite pour produire de nouvelles connaissances, sont en partie tributaires des politiques d’archivage et de la patrimonialisation sélective des archives de la recherche en fonction des auteurs consacrés et des thématiques. Derrière l’écriture de l’histoire des sciences sociales, les enjeux mémoriels – institutionnels, générationnels ou disciplinaires –, loin d’être ignorés, sont rappelés en introduction dans Le laboratoire des sciences sociales[63]. Dans l’ouvrage, certaines enquêtes peuvent sembler étrangères aux processus de canonisation – c’est-à-dire à l’intérêt particulier suscité par les enquêtes menées jadis par des figures devenues tutélaires des sciences sociales –, comme celle sur les Os. Pourtant, si cette dernière échappe à l’oubli, c’est par le biais des archives de Sayad, dont la mémoire a été solidement prise en charge [64]. Alors que restituer les dynamiques des enquêtes dans leur contexte et se concentrer sur les opérations concrètes de la recherche visent, en principe, à déjouer l’illusion biographique et à mettre à distance les grands récits héroïques, le risque de devenir entrepreneur mémoriel n’est jamais loin. Lorsque Zonabend revisite ses propres enquêtes et les modalités de travail du Las, elle décrit « un dispositif institutionnel et spatial » dans la construction mémorielle duquel elle est aussi directement investie, comme en témoigne le livret commémoratif qu’elle a conçu et dirigé [65]. La contribution de Rot et Vatin, quant à elle, remobilise les entretiens d’Yves Delamotte, de Jean-Daniel Reynaud et d’Alain Touraine, réalisés lors d’une autre enquête consacrée à l’histoire de la revue Sociologie du travail[66], et illustre les effets cumulatifs d’archivage autour des institutions les plus centrales et de leurs figures tutélaires. On peut ainsi lire l’ensemble de cet ouvrage comme la fabrique d’une mémoire institutionnelle et professionnelle, qui serait malgré tout celle des grandes institutions et de leurs « maîtres ». Comme pour les enquêtes premières, les analyses secondaires de l’ouvrage ont pour centre de gravité Paris et plus particulièrement l’Ehess, le Cnrs, Sciences-Po et Nanterre. Lieu central de la pratique des enquêtes collectives des années 1960 aux années 1980, la vie section de l’École pratique des hautes études (Ephe), devenue l’Ehess, a fait du travail collectif et de l’interdisciplinarité le socle de son identité. Si le tournant critique de la décennie suivante a provoqué un reflux [67], il a aussi ouvert la voie à un retour critique sur les mythes fondateurs de l’institution, comme l’illustre, à l’occasion du colloque pour le centenaire du Crh, la revisite d’André Burguière de l’enquête Plozevet à laquelle il avait participé quarante ans plus tôt [68]. L’Ehess est aussi l’un des lieux où ont été formés les trois coordinateurs du Laboratoire des sciences sociales et où s’est tenu le séminaire dont le livre est issu. Cette histoire des sciences sociales à partir des pratiques collectives se révèle donc liée à une configuration institutionnelle spécifique, centrée sur l’Ehess et les Annales – ce que reflète, en miroir, la publication de la présente note dans cette revue.

28En ce sens, pour exemplaire que soit Le laboratoire des sciences sociales, il n’est qu’un jalon d’une pratique d’enquête qui, dans le contexte actuel d’archivage et de documentation, pourrait embrasser un périmètre plus large, en prenant comme objet des enquêtes menées dans des laboratoires d’autres universités ou émanant de commandes publiques plus ordinaires. Les comités d’histoire qui multiplient, depuis les années 1990, les enquêtes orales dans une perspective patrimoniale, mémorielle et scientifique constituent à cet égard des gisements archivistiques encore largement inexploités par les chercheurs – si ce n’est de façon exploratoire, pour mener leurs propres enquêtes ou pallier certains silences des sources écrites. À condition que des chercheurs s’en saisissent, une histoire renouvelée et élargie des sciences sociales pourrait alors émerger, venant rééquilibrer la sur-représentation de l’Ehess en la matière.

29À bien des égards, Le laboratoire des sciences sociales est l’un des nombreux signes de l’âge réflexif dans lequel sont désormais entrées des sciences sociales et de la place qu’y tiennent les archives. Véritable laboratoire réflexif au carré, l’ouvrage éclaire un certain nombre de problèmes sous un nouveau jour, que ce soient les rapports interdisciplinaires, la dialectique entre recherche individuelle et recherche collective ou les liens entre passé et présent de la recherche. Il témoigne d’une certaine normalisation de l’articulation entre la pratique des sciences sociales et l’écriture de leur histoire : on fait désormais de l’histoire des sciences sociales comme on fait de l’histoire, ainsi que le montre également le développement des « enquêtes sur les enquêtes » en histoire médiévale ou moderne. Une telle démarche révèle cependant des ambiguïtés. Les histoires d’enquêtes et leurs revisites, en devenant « une pratique ordinaire », produisent des effets sur la transmission et la conservation des sciences sociales. Aux dépôts classiques entrepris par les héritiers – famille ou disciples – se superposent ou se substituent les dépôts du chercheur premier, ceux suscités par les chercheurs seconds ou encore ceux des institutions. Or les processus de construction de l’archive et ses finalités ne sont pas les mêmes selon qu’il s’agit, d’un côté, de bases de données ou de sites numériques construits dans une perspective d’ouverture des données de la recherche ou, de l’autre, de dépôts dans des institutions comme les An ou l’Imec. Néanmoins, dans tous les cas, la patrimonialisation des archives des sciences sociales reste sélective, parfois à l’insu du chercheur. Dans le cadre des histoires d’enquêtes, on a vu combien les paysages documentaires construits pour chaque revisite recomposent les archives des sciences sociales. À la fois reflet et produit des sciences sociales, nos pratiques archivistiques deviennent alors une question de méthode qui doit accompagner l’activité de recherche ; elles réclament la même réflexivité que celle à l’œuvre dans les pratiques d’enquête. Pour cette double raison, elles mériteraient d’être pleinement intégrées à la formation des étudiants en sciences sociales, même si de nombreuses questions restent encore ouvertes. En raccourcissant la distance entre documents et archives, la démarche adoptée par les auteurs du Laboratoire des sciences sociales a incontestablement des conséquences sur le travail en cours des chercheurs : à sa lecture, il devient difficile d’occulter les questions éthiques, les critères de tri, la monumentalisation mémorielle anticipée comme le risque de paralysie à force de réflexivité.

30Par une sorte d’effet de loupe, Le laboratoire des sciences sociales souligne certains enjeux contemporains de l’écriture de l’histoire et des sciences sociales : l’articulation entre histoire et mémoire, archives et documents, la distinction entre corpus fermé et corpus ouvert et, surtout, le rôle de la réflexivité dans la définition des sciences sociales en tant que sciences. À ce titre, l’histoire des sciences sociales n’est nullement un champ séparé de l’histoire d’un point de vue épistémologique et méthodologique : elle constitue bien un lieu stratégique pour penser la cohérence et l’unité des sciences sociales.


Date de mise en ligne : 30/10/2020

https://doi.org/10.1017/ahss.2020.58

Notes

  • [*]
    Gilles LAFERTÉ, Paul PASQUALI et Nicolas RENAHY (dir.), Le laboratoire des sciences sociales. Histoires d’enquêtes et revisites, Paris, Raisons d’agir, 2018, 290 p.
  • [1]
    Roxanne Silberman, « Rapport : les sciences sociales et leurs données », ministère de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie, 1999, https://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/004000935.pdf. Cette initiative s’inscrit dans un contexte international plus large : pour un état des lieux en 1993, voir Angela Dale, « Le rôle de l’analyse secondaire dans la recherche en sciences sociales », Sociétés contemporaines, 14-15, 1993, p. 7-21 ; pour une mise au point récente en France, voir Arianna Caporali, Amandine Morisset et Stéphane Legleye, « La mise à disposition des enquêtes quantitatives en sciences sociales : l’exemple de l’Ined », Population, 70-3, 2015, p. 567-597.
  • [2]
    Dans le cas de la statistique, voir les travaux d’Alain Desrosières, « L’histoire de la statistique comme genre. Styles d’écritures et usages sociaux », Genèses, 39, 2000, p. 121-137 ; pour une période plus ancienne : Éric Brian, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, 1994.
  • [3]
    Si, du côté de la sociologie, l’enquête de Donald Roy revisitée par Michael Burawoy est connue assez tôt par l’article de Pierre Fournier, « Deux regards sur le travail ouvrier. À propos de Roy et Burawoy, 1945-1975 », Actes de la recherche en sciences sociales, 115, 1996, p. 80-93, une réflexion collective semble émerger surtout à partir des années 2000 : voir Françoise Cribier et Élise Feller, « Projet de conservation des données qualitatives des sciences sociales recueillies en France auprès de la ‘société civile’. Rapport présenté au ministère délégué à la Recherche et aux nouvelles technologies », Lasmas, 2003. Le premier colloque organisé en France sur ces questions a eu lieu en 2005 : Magdalini Dargentas et al., « Compte-rendu des journées internationales de l’analyse secondaire en recherche qualitative », Bulletin de méthodologie sociologique, 90, 2006, p. 43-55. Sur les argumentaires favorables ou opposés à l’analyse secondaire de ce type d’enquête, voir Sophie Duchesne, « De l’analyse secondaire à la réanalyse. Une innovation méthodologique en débats », Recherches qualitatives, 21, 2017, p. 7-28.
  • [4]
    Dans le prolongement du colloque organisé du 4 au 6 novembre 1999 par l’Ehess, le Cnrs et la Maison des sciences de l’homme (Msh), intitulé « Histoire de la recherche collective en sciences sociales au xxe siècle », et sur le contexte de cette enquête collective réflexive sur les pratiques du travail collectif, voir Paul-André Rosental, « Introduction. Modèles, usages, effets du collectif dans les sciences sociales », no spécial « Pour une histoire de la recherche collective en sciences sociales », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, p. 3-29 ainsi que le reste du numéro.
  • [5]
    Étienne Anheim et Olivier Poncet, « Fabrique des archives, fabrique de l’histoire », n° spécial « Fabrique des archives, fabrique de l’histoire », Revue de synthèse, 125, 2004, p. 1-14 ainsi que le reste du numéro.
  • [6]
    Bertrand Müller, « À la recherche des archives de la recherche. Problèmes de sens et enjeux scientifiques », Genèses, 63-2, 2006, p. 4-24.
  • [7]
    Gilles Laferté, Paul Pasquali et Nicolas Renahy, « Pour une réflexivité historienne dans les sciences sociales contemporaines », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 7-38, ici p. 13.
  • [8]
    Benoît Trépied, Une mairie dans la France coloniale. Koné, Nouvelle-Calédonie, Paris, Karthala, 2010 ; Laure Pitti, « Ouvriers algériens à Renault-Billancourt de la guerre d’Algérie aux grèves d’Os des années 1970. Contribution à l’histoire sociale et politique des ouvriers étrangers en France », thèse de doctorat, université Paris 8, 2002 ; Michel Bozon et François Héran, La formation du couple. Textes essentiels pour la sociologie de la famille, Paris, La Découverte, 2006.
  • [9]
    Anni Borzeix et Gwenaële Rot, Genèse d’une discipline, naissance d’une revue. Sociologie du travail, Nanterre, Presses universitaires de Paris-Ouest, 2010 ; François Vatin, « Marxisme, machinisme, humanisme. Georges Friedmann avant et après-guerre », Sociologie du travail, 46, 2004, p. 205-223 ; Id., « Pierre Naville et la ‘passion dans le calcul’. De la métrologie sociale à la sociologique », in F. Blum (dir.), Les vies de Pierre Naville, Villeneuve-d’Ascq, Presses universitaires du Septentrion, 2006, p. 247-265 ; Id., « Le travail et sa sociologie », Raison présente, 162, 2007, p. 83-97.
  • [10]
    Pierre Bourdieu, « La cause de la science », Actes de la recherche en sciences sociales, 106-107, 1995, p. 3-10, cité dans G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 15.
  • [11]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 18.
  • [12]
    Étienne Anheim, « L’historiographie est-elle une forme d’histoire intellectuelle ? La controverse de 1934 entre Lucien Febvre et Henri Jassemin », Revue d’histoire moderne & contemporaine, 59-4bis, 2012, p. 105-130, ici p. 107.
  • [13]
    Gilles Laferté, « L’ethnographie historique ou le programme d’unification des sciences sociales reçu en héritage », in F. Buton et N. Mariot (dir.), Pratiques et méthodes de la socio-histoire, Paris, Puf, 2009, p. 45-68, ici p. 48.
  • [14]
    Christian Topalov, Histoires d’enquêtes, Londres, Paris, Chicago (1880-1930), Paris, Classiques Garnier, 2015 ; Id., « Pour une réflexivité historienne dans les sciences sociales contemporaines », in B. Lepetit et C. Topalov (dir.), La ville des sciences sociales, Paris, Belin, 2001, p. 307-313. Sur les sciences studies et Pierre Bourdieu, voir Christian Topalov, « La boîte de Pandore et l’histoire sociale des sciences humaines », Genèses, 2015, 100/101-3, 2015, p. 238-246.
  • [15]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 24-26.
  • [16]
    Dans des domaines très différents, voir Claire Lemercier, « Une histoire sans sciences sociales ? », Annales HSS, 70-2, 2015, p. 345-357 et Étienne Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? Histoire et anthropologie au début du xxie siècle », L’Homme, 203-204, 2012, p. 399-427.
  • [17]
    Voir Roger Chartier (dir.), Pratiques de la lecture, Marseille, Rivages, 1985 ; Roger Chartier (dir.), Les usages de l’imprimé, xve-xixe siècle, Paris, Fayard, 1987 ; Roger Chartier (dir.), Lectures et lecteurs dans la France d’Ancien Régime, Paris, Éd. du Seuil, 1987.
  • [18]
    Pierre Chastang, « L’archéologie du texte médiéval. Autour de travaux récents sur l’écrit au Moyen Âge », Annales HSS, 63-2, 2008, p. 245-269.
  • [19]
    Pour ne prendre que le cas de l’histoire médiévale, qui m’est plus familier, on peut citer, en France, le colloque tenu en 2004 (et publié quatre ans plus tard), qui marque le point de départ d’un profond renouvellement : Claude Gauvard (dir.), L’enquête au Moyen Âge, Rome, École française de Rome, 2008 ; voir aussi Thierry Pécout (dir.), Quand gouverner, c’est enquêter. Les pratiques politiques de l’enquête princière (Occident, xiiie-xive siècles). Actes du colloque international d’Aix-en-Provence et Marseille, 2007, Paris, De Boccard, 2010. Dans des domaines différents et parmi de nombreux exemples, voir Didier Lett, Un procès de canonisation au Moyen Âge. Essai d’histoire sociale, Paris, Puf, 2008 ; Valérie Theis, Le gouvernement pontifical du Comtat Venaissin vers 1270-vers 1350, Rome, École française de Rome, 2012 ; Marie Dejoux, Les enquêtes de Saint Louis. Gouverner et sauver son âme, Paris, Puf, 2014.
  • [20]
    Frédéric Graber, « Enquêtes publiques, 1820-1830. Définir l’utilité publique pour justifier le sacrifice dans un monde de projets », Revue d’histoire moderne & contemporaine, 63-3, 2016, p. 31-63.
  • [21]
    Pierre Chastang, Lire, écrire, transcrire. Le travail des rédacteurs de cartulaires en Bas-Languedoc, xie-xiiie siècles, Paris, Éd. du Cths, 2002.
  • [22]
    Florence Weber, « Ethnologues à Minot. Quelques questions sur la structure sociale d’un village bourguignon », Revue française de sociologie, 22-2, 1981, p. 247-262.
  • [23]
    Laurent Amiotte-Suchet et al., n° spécial « Enquêtes collectives : histoires et pratiques contemporaines », ethnographiques.org, 32, 2016, https://www.ethnographiques.org/2016/Amiotte-Suchet-Laferte-Lauriere-Renahy.
  • [24]
    Gilles Laferté, « Des archives d’enquêtes ethnographiques pour quoi faire ? Les conditions d’une revisite », Genèses, 63-2, 2006, p. 25-45.
  • [25]
    Voir, par exemple, Antoinette Molinié et Marie-Dominique Mouton, « L’ethnologue aux prises avec les archives – Introduction », Ateliers du LESC, 32, 2008 ainsi que le numéro spécial « Enquêtes collectives… » déjà cité.
  • [26]
    Voir le numéro spécial « Hommage à Jacques Ozouf », Cahiers du Centre de recherches historiques, 43, 2009 et en particulier les contributions de Marie-Laurence Netter, « Les enquêtes collectives. Une utopie scientifique ? », p. 11-17 et Dominique Julia et Jacques Revel, « Lire et écrire. Une enquête, un moment historiographique », p. 35-56.
  • [27]
    Robert Hertz, Sociologie religieuse et anthropologie. Deux enquêtes de terrain, 1912-1915, éd. par S. Baciocchi et N. Mariot, Paris, Puf, 2015 ; Jacques Dalarun et Patrick Boucheron (dir.), Georges Duby. Portrait de l’historien en ses archives, Paris, Gallimard, 2015, cité dans G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 15 et 18.
  • [28]
    Jérôme Bourdieu, Lionel Kesztenbaum et Gilles Postel-Vinay, L’enquête TRA, histoire d’un outil, outil pour l’histoire, t. 1, 1793-1902, Paris, Ined, 2014.
  • [29]
    Principaux matériaux mobilisés, ces correspondances sont tirées du fonds Pierre Naville déposé au Musée social à Paris, des archives Michel Crozier conservées au Centre de sociologie des organisations et aux Archives nationales et des archives privées de Bernard Mottez, l’un des deux enquêteurs de l’enquête conduite par Jean-Daniel Reynaud et Alain Touraine.
  • [30]
    Gwenaële Rot et François Vatin, « Sociologie du travail et travail sociologique », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 117-148, ici p. 147.
  • [31]
    Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire, « Proximité spatiale et distance sociale : les grands ensembles et leur peuplement », Revue française de sociologie, 11-1, 1970, p. 3-33 ; Jean-Claude Chamboredon, « La délinquance juvénile, essai de construction d’objet », Revue française de sociologie, 12-3, 1971, p. 335-377.
  • [32]
    C’est aussi le cas de l’ouvrage de C. Topalov, Histoires d’enquêtes…, op. cit., annexes 1 et 2, p. 415-422.
  • [33]
    Paul Pasquali, « Une ‘école de Chicago’ en banlieue parisienne ? Jean-Claude Chamboredon et la délinquance juvénile, de l’enquête à l’article », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 235-282, ici p. 242, n. 487.
  • [34]
    Bertrand Müller et Serge Wolikow, « Sciences sociales : archives de la recherche », Genèses, 63-2, 2006, p. 2-3, ici p. 2 ; voir également Marie-Dominique Mouton, « Dans les archives des ethnologues. La recherche autrement », in M. Cornu, J. Fromageau et B. Müller (dir.), Archives de la recherche. Problèmes et enjeux de la construction du savoir scientifique, Paris, L’Harmattan, 2014, p. 135-145.
  • [35]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 31. Sur la question de l’engagement subjectif du chercheur, initiée par l’anthropologie pragmatique mais partagée par tous les chercheurs en sciences sociales, voir É. Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? », art. cit., ici p. 414-420 (sur la « fiction de distance » que l’historien aurait avec son objet).
  • [36]
    Voir Bernard Walliser (dir.), La cumulativité du savoir en sciences sociales. En hommage à Jean-Michel Berthelot, Paris, Éd. de l’Ehess, 2009.
  • [37]
    Michael Burawoy, « Revisiter les terrains. Esquisse d’une théorie de l’ethnographie réflexive », in D. Céfaï (dir.), L’engagement ethnographique, Paris, Éd. de l’Ehess, 2010, p. 295-351 (l’article original est paru dans American Sociological Review, 68, 2003, p. 645-679).
  • [38]
    Id., Produire le consentement, trad. par Q. Ravelli, Montreuil, La ville brûle, [1979] 2015.
  • [39]
    Sophie Duchesne, « Développement de l’analyse secondaire et des méthodes d’analyse qualitative : une chance à saisir ? », in M. Brugidou et al. (dir.), L’analyse secondaire en recherche qualitative. Une nouvelle pratique en sciences humaines et sociales, Paris, Lavoisier, 2010, p. 1-18 ; Id., « De l’analyse secondaire… », art. cit.
  • [40]
    Voir, à partir de l’analyse secondaire de leurs propres enquêtes, les conclusions assez radicales de Natasha S. Mauthner, Odette Parry et Kathryn Backett-Milburn, « The Data are Out There, or Are They ? Implications for Archiving and Revisiting Qualitative Data », Sociology, 32-4, 1998, p. 733-745.
  • [41]
    Paul Thompson, The Edwardians: The Remaking of British Society, Londres, Weidenfeld & Nicolson, 1975 ; Mildred Blaxter et Elizabeth Paterson, Mothers and Daughters: A Three-Generation Study Of Health Attitudes and Behaviour, Londres, Heinemann, 1982.
  • [42]
    Libby Bishop, « A Reflexive Account of Reusing Qualitative Data: Beyond Primary/Secondary Dualism », Sociological Research Online, 12-3, 2007, p. 43-56, https://doi.org/10.5153/sro.1553.
  • [43]
    La plupart des expérimentations réunies dans Le laboratoire des sciences sociales peuvent se lire comme la mise à l’épreuve de la conclusion de l’article de G. Laferté, « Des archives d’enquêtes ethnographiques… », art. cit., ici p. 45 : « Une nouvelle lecture [des enquêtes passées] conduit à porter un autre regard, souvent inattendu, sur ce qui a été dit, parce que le temps a passé, et que les questions que l’on se pose se sont déplacées. » C’est également le cœur de la démonstration de l’article de Paul Pasquali, publié dans la même revue six ans plus tard, « Deux sociologues en banlieue. L’enquête sur les grands ensembles de Jean-Claude Chamboredon et Madeleine Lemaire (1966-1970) », Genèses, 87-2, 2012, p. 113-135.
  • [44]
    « Antony, c’était la partie émergée d’un iceberg. L’iceberg, c’était… ça devait être […] un grand projet, analogue à une nouvelle école de Chicago si on peut dire, qui finalement ne s’est pas réalisé complètement, qui aurait été un terrain commun à tous les chercheurs du Cse […]. [M]on travail à Antony, c’était les bases morphologiques de ce grand projet », entretien réalisé par Samir Hadj-Belgacem et Paul Pasquali, 20 février 2009, in P. Pasquali, « Une ‘école de Chicago’…», art. cit., ici p. 239. Si l’enquête de Jean-Claude Chamboredon se déroule entre 1966 et 1970, ce n’est qu’à partir de 1979 que l’École de Chicago apparaît comme courant clairement identifié en France avec le recueil de traductions publié par Yves Grafmeyer et Isaac Joseph, L’École de Chicago, Paris, Champ urbain, 1979 : voir P. Pasquali, « Une ‘école de Chicago’…», art. cit., ici p. 240.
  • [45]
    Michel Naepels, « Anthropologie et histoire : de l’autre côté du miroir disciplinaire », Annales HSS, 4, 2010, p. 873-884 ; É. Anheim, « L’historien au pays des merveilles ? », art. cit.
  • [46]
    Sophie Duchesne, « De l’analyse secondaire… », art. cit., ici p. 8.
  • [47]
    Henri Omont, « La collection Doat à la Bibliothèque nationale. Documents sur les recherches de Doat dans les archives du sud-ouest de la France de 1663 à 1670 », Bibliothèque de l’école des chartes, t. 77, 1916, p. 286-336 ; Gian Luca Borghese, « Les registres de la chancellerie angevine de Naples. Un exemple de destruction et reconstitution de sources archivistiques à travers les siècles », Médiévales, 69, 2015, p. 171-182. Je remercie Étienne Anheim pour ces références et, plus largement, pour nos échanges de ces dernières années auxquels doit beaucoup cette note critique.
  • [48]
    James Hinton, The Mass Observers: A History, 1937-1949, Oxford, Oxford University Press, 2013.
  • [49]
    Ariane Mak, « En grève et en guerre. Les mineurs britanniques au prisme des enquêtes du Mass Observation (1939-1945) », thèse de doctorat, Ehess, 2018 ; Id., « Le Mass Observation. Retour sur un singulier collectif d’enquête britannique (1937-1949) », ethnographiques.org, 32, 2016, https://www.ethnographiques.org/2016/Mak.
  • [50]
    Stéphane Baciocchi, Alain Cottereau et Marie-Paule Hille (dir.), Le pouvoir des gouvernés. Ethnographies de savoir-faire politiques, observés sur quatre continents, Bruxelles, Peter Lang, 2018.
  • [51]
    Voir respectivement Sylvain Piron, « L’enquête sur les ordres Mendiants et l’urbanisation », in É. Anheim, A. Feniello et S. Gioanni (dir.), Jacques Le Goff et l’Italie, Rome, École française de Rome/Isime 2017, p. 57-72 ; Jean-Paul Aron, Paul Dumont et Emmanuel Le Roy Ladurie, Anthropologie du conscrit français d’après les comptes numériques et sommaires du recrutement de l’armée (1819-1826). Présentation cartographique, Paris, Mouton, 1972 ; François Furet et Jacques Ozouf, Lire et écrire. L’alphabétisation des Français de Calvin à Jules Ferry, Paris, Éd. de Minuit, 2 vol., 1977.
  • [52]
    Raphaëlle Branche, « Le sexe, le genre et la parole. Quand une femme interroge des hommes sur les violences infligées », in F. Thébaud et G. Dermenjian (dir.), Quand les femmes témoignent. Histoire orale. Histoire des femmes. Mémoire des femmes, Paris, Publisud, 2009, p. 217-226.
  • [53]
    Véronique Ginouvès et Isabelle Gras (dir.), La diffusion numérique des données SHS. Guide des bonnes pratiques éthiques et juridiques, Aix-en-Provence, Presses universitaires de Provence, 2018.
  • [54]
    S. Duchesne, « De l’analyse secondaire… », art. cit., ici p. 13.
  • [55]
    Voir le dossier « Archivari » que Françoise Zonabend a coordonné avec Jean Jamin dans Gradhiva, 30-31, 2001-2002.
  • [56]
    Françoise Zonabend, « Des femmes, des terrains, des archives. Un retour réflexif sur les pratiques ethnographiques en anthropologie du proche », in G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire…, op. cit., p. 41-78, ici p. 74.
  • [57]
    Ibid.
  • [58]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy (dir.), Le laboratoire..., op. cit., p. 109.
  • [59]
    Marie Scot, « Les archives britanniques des sciences sociales. Deux études de cas : UK Data Archive (UKDA) et Qualidata », Genèses, 63-2, 2006, p. 46-65.
  • [60]
    Mike Savage, Identities and Social Change in Britain since 1940: The Politics of Method, Oxford, Oxford University Press, 2010.
  • [61]
    Information recueillie lors de la table ronde « Diffuser des données aujourd’hui : enjeux juridiques et éthiques », animée par Philippe Mouron et Isabelle Gras avec l’équipe de beQuali, le 3 octobre 2019, à l’occasion de la journée d’étude « Diffuser les données numériques en Shs : le droit et l’éthique comme alliés » à la Maison méditerranéenne des sciences de l’homme (Mmsh) d’Aix-en-Provence. Pour une présentation détaillée du projet, voir Selma Bendjaballah et al., « Anonymat et confidentialité des données. L’expérience de beQuali », in V. Ginouvès et I. Gras (dir.), La diffusion numérique…, op. cit., p. 207-222.
  • [62]
    Florence Descamps, « Utiliser et réutiliser les archives orales. Comment faire des archives orales un outil de recherche collectif ? », Les carnets de la phonothèque, 2016, https://phonotheque.hypotheses.org/17821. Ces questions ont été également au cœur de ma thèse : Bénedicte Girault, « Mémoires d’un ministère. Une analyse secondaire de l’enquête orale du Service d’histoire de l’éducation (c. 1950-c. 2010) », thèse de doctorat, université de Cergy-Pontoise, 2018.
  • [63]
    G. Laferté, P. Pasquali et N. Renahy, « Pour une réflexivité historienne… », art. cit., ici p. 25.
  • [64]
    Association des amis d’Abdelmalek Sayad, Actualité de la pensée d’Abdelmalek Sayad, Casablanca, Éd. Le Fennec, 2010.
  • [65]
    F. Zonabend, « Des femmes, des terrains, des archives… », art. cit., ici p. 70 ; Id., Le Laboratoire d’anthropologie sociale. 50 ans d’histoire (1960-2010), Paris, Cnrs/Ehess/Collège de France, 2010.
  • [66]
    A. Borzeix et G. Rot, Genèse d’une discipline…, op. cit.
  • [67]
    Voir l’objectivation quantitative de ce reflux réalisée par Claire Lemercier à partir de l’analyse des rapports d’activités du Crh : Claire Lemercier, « Le Centre de recherches historiques comme ‘structure fédérative’ ? », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, https://doi.org/10.4000/ccrh.3069.
  • [68]
    André Burguière, « Plozévet, une mystique de l’interdisciplinarité ? », Cahiers du Centre de recherches historiques, 36, 2005, https://doi.org/10.4000/ccrh.3065.

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