Notes
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[1]
Le rapport entre le taux de chômage des jeunes et celui des adultes mesure le désavantage relatif des premiers par rapport aux seconds, sans considérer pourtant le taux moyen. Ce qui peut se vérifier, en effet, c’est un rapport très bas, même face à un taux de chômage élevé parmi les jeunes, si les mêmes conditions caractérisent aussi les adultes. Ainsi, un fort désavantage relatif signifie que la difficulté des plus jeunes n’est pas due aux effets d’une stagnation d’ensemble, mais, plutôt, aux facteurs institutionnels qui les affectent.
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[2]
Voir, par exemple, l’élargissement progressif de l’alternance école-travail aux étudiants et aux étudiantes des trois dernières années du cycle supérieure introduit par la loi 107 de 2015.
-
[3]
Plus que par le pouvoir disciplinaire, le capitalisme néolibéral exprime son pouvoir sur les hommes par la production d’une rationalité, des discours et, plus généralement, des technologies de gouvernement, conduisant à un autogouvernement inspiré par le modèle de l’entreprise. Par « torsion biopolitique », on entend l’introduction et le renforcement de ce genre de technologie.
-
[4]
Art. 18, L. 196/1997 (traduction des auteurs).
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[5]
Ex. Art. 1, C. 2 [traduction des auteurs].
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[6]
Voir l’accord signé entre CGIL, CISL, UIL et Autogrill le 20 juin 2017 (www.flcgil.it/files/pdf/20170627/verbale-di-accordo-autogrill-sindacati-per-alternanza-scuola-lavoro-del-20-giugno-2017.pdf).
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[7]
Voir MasterChef et d’autres émissions.
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[8]
En Italie, le système des chèques emploi a été généralisé pour tous les secteurs et tous les travailleurs (De Angelis, Marrone, 2017).
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[9]
L’interviewée a donné elle-même des exemples : « Une fois, je souriais, et le patron m’a demandé si j’étais si heureuse car j’avais… Tu as compris, non ? »
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[10]
En Italie on peut distinguer deux classes de stages : les stages formatifs, comme ceux des interviewés, complètement intégrés dans le parcours de formation, et les stages à l’extérieur des parcours de formation (il en existe des formatifs pour des catégories désavantagées comme les chômeurs ou pour les placements professionnels). Pour les stages à l’intérieur de la première classe, la rémunération n’est pas prévue. En ce qui concerne la deuxième classe, au contraire, il faudrait distinguer différentes formes, mais, généralement, on peut dire que les stages ne durent pas plus de six mois, ou douze mois pour ceux de réinsertion, pour une indemnité de participation qui ne peut pas être inférieure à 300 euros bruts par mois.
Introduction
1Il s’agit, dans cet article, d’interroger la relation au travail de jeunes sans diplôme étudiant dans un centre de formation professionnelle de Bologne, dans la région italienne de l’Émilie-Romagne. Leur expérience formative, constituée de plusieurs périodes de stage, représente un poste d’observation privilégié pour remonter aux origines des conditions subjectives qui justifient le travail gratuit ou, dans la dynamique du processus, la gratuitisation du travail.
2Dans une première partie, nous présenterons les caractéristiques du marché du travail juvénile en Italie, en revenant brièvement sur la progression des dispositifs normatifs qui favorisent le mélange entre formation et emploi, comme celui des stages et, plus généralement, de l’alternance. Dans une deuxième partie, à l’aide de données recueillies dans une recherche exploratoire de terrain en cours, nous décrirons les principales dimensions émergeant du terrain dans le rapport au travail des jeunes interrogés.
Jeunes et marché du travail, une relation difficile
3Le marché du travail italien, par rapport à celui d’autres pays européens, se caractérise par plusieurs faiblesses structurelles (Reyneri, 2011). C’est à partir des années 1980 qu’est attesté le passage à la phase postindustrielle du capitalisme occidental, pour laquelle la littérature en sciences sociales identifie trois facteurs de faiblesse institutionnelle : la faible capacité de création d’emplois ; la forte différenciation territoriale et la fragmentation dans la production industrielle (forte proportion de petites entreprises et très forte proportion de travailleurs indépendants) ; et le niveau peu élevé de qualification d’un marché du travail centré sur des activités manuelles. Ces trois éléments ont, en outre, alimenté la diffusion de l’économie informelle, caractérisée par le travail irrégulier et au noir (Fellini, 2015).
4Paradoxalement, dans ce scénario, le manque de croissance de l’activité ne va pas de pair avec des taux de chômage élevés. Malgré de forts taux d’inactivité dans certaines régions du sud de l’Italie, c’est seulement à partir de la moitié des années 1990 et après le début de la crise économique (surtout à partir de 2012) que le taux de chômage au niveau national dépasse 10 %.
5Les raisons de ce phénomène peuvent être trouvées dans la diffusion d’un sentiment de découragement – en particulier parmi les femmes et dans les régions du sud – et dans la faiblesse des politiques d’activation. Cependant, si l’on déplace notre attention des donnés moyennes relatives à toute la population active vers les caractéristiques de l’occupation juvénile, la lecture du taux de chômage est complètement différente et montre que les jeunes sont pénalisés par une forte probabilité de devenir chômeur (De Luigi et al., 2012). Or, même si le taux de chômage des jeunes reste très élevé dans tous les pays européens (excepté en Allemagne, au Danemark et aux Pays Bas), l’Italie est le pays européen où les jeunes sont le plus touchés par rapport aux adultes : en 2016, ce désavantage relatif des jeunes est plus de trois fois supérieur, alors qu’au niveau européen (Union européenne à 28 pays) il ne l’est pas plus de deux fois [1]. Même en période de forte croissance d’activité, entre 1995 et 2008, dans un contexte caractérisé, il ne faut pas l’oublier, par une forte déréglementation, l’entrée des jeunes sur le marché du travail a été très difficile (De Luigi, 2011). Le taux de chômage des 15-24 ans n’est jamais descendu sous le seuil des 20 % et, depuis 2008, il a même augmenté pour atteindre 42,7 % en 2014 (Istituto nazionale di statistica [ISTAT]).
6En Italie, le marché du travail a donc toujours été peu accueillant pour les nouvelles générations. La crise économique de fin 2008 a aggravé une situation qui leur était déjà largement défavorable. Si à l’âge, on ajoute la zone géographique de résidence et le genre, les difficultés d’emploi s’exacerbent. Le phénomène est évident lorsque l’on observe le taux de chômage des jeunes femmes dans les régions du sud de l’Italie qui a atteint 50 % pendant les années de crise.
7Un taux de chômage de 33 % ne signifie pas qu’un tiers des jeunes est à la recherche d’un emploi et n’arrive pas à en obtenir un. La part de ceux qui cherchent un emploi sur la totalité de la population juvénile est en fait sensiblement moins élevée (en 2016, elle représente 10 %, face à une moyenne de 7,7 % pour les 28 pays européens) : on peut parler, alors, d’un scénario moins dramatique que si l’on ne prenait en compte que la seule population au travail. Il s’agit de l’effet de la croissance en termes de scolarisation des jeunes Italiens. Parmi les jeunes âgés de 15 à 24 ans, les étudiants représentent en effet plus de la moitié de la population et, pendant les années de la crise, l’augmentation de cette part n’est pas négligeable (de 52,8 % en 2006 à 59 % en 2016). Dans ce scénario, évidemment, ceux qui sortent du système scolaire sans diplôme sont plus pénalisés que les autres, car les conditions sur le marché du travail sont particulièrement dures pour les plus jeunes. À ce propos, des enquêtes en sciences sociales ont récemment révélé que la crise financière a fait augmenter l’écart entre les jeunes les plus éduqués et les moins éduqués par rapport aux risques du chômage (Reyneri, Pintaldi, 2013).
8À partir de la moitié des années 1990, dans le but de modifier un tel scénario et de rééquilibrer les opportunités entre les divers groupes sociaux, les gouvernements ont mis en place plusieurs interventions sur le marché du travail et dans le système éducatif. Ces politiques visaient, d’une part, à rendre le marché du travail italien moins rigide par l’introduction de formes flexibles d’insertion et l’abolition des normes qui protégeaient les travailleurs du risque de licenciement et, d’autre part, à renforcer ledit « capital humain » des jeunes, non seulement par des programmes de formation générale fournis par les institutions scolaires traditionnelles, mais aussi en l’enrichissant de compétences spécifiquement orientées vers le monde du travail grâce à des expériences en entreprise développées parallèlement aux parcours d’études. Pour ce qui concerne la première dimension, les discours qui la justifient soutiennent sans réserve – comme le soulignent plusieurs études (Toffanin, 2017) – qu’il existe une relation directe entre égalité des droits et travail et que, par conséquent, par la différenciation des coûts du travail et des droits sociaux, on pourrait obtenir une augmentation des opportunités pour les plus désavantagés, par exemple les jeunes. L’hypothèse, autrement dit, c’est que le travail à durée limitée et, d’une manière plus générale, l’augmentation des emplois à droits réduits peuvent constituer une meilleure alternative à la situation de chômage prolongé.
9Pour ce qui concerne la deuxième dimension, les rhétoriques inspirées du work-based learning program issu des États-Unis, diffusées au niveau européen et favorisées par les dernières interventions de la Commission européenne, ont infléchi le changement des programmes éducatifs des pays membres dans un sens néolibéral (Cillo, 2017). Il ne s’agit pas simplement de la colonisation des discours sociaux par des rhétoriques économiques, mais d’une véritable prise de position qui reporte sur les plus faibles, les jeunes en l’occurrence, la responsabilité de leur éventuelle inactivité et, d’une manière plus générale, qui reporte sur les systèmes éducatifs le manque de compétitivité des marchés du travail. C’est à travers cette dynamique que l’on peut lire la centralité accordée à l’employabilité parmi les objectifs du système formatif italien, explicitée dans les dernières interventions en matière de formation [2], dans lesquelles l’attention accordée aux compétences transversales nécessaires à l’adaptabilité des futurs travailleurs aux exigences du marché intègre les interventions normatives en matière de travail.
Éducation et travail, quelles limites en Italie ?
10Bien que la superposition des expériences formatives et professionnelles remonte à la période préindustrielle (Marrone, 2017), c’est surtout par la torsion « biopolitique [3] » (Foucault, 2004) du capitalisme contemporain que la dimension économique et productive des vies déborde, en poussant de plus en plus l’action productive en dehors du terrain de la reconnaissance économique. Il s’agit d’un véritable processus de gratuitisation du travail (Krinsky, Simonet, 2012, p. 71), qui, à partir du durcissement des conditions objectives du marché, se rejoue sur le plan subjectif, grâce à une dynamique de renouvellement de la signification de la dimension productive du travail qui minimise la portée économique (De Angelis, 2015 et 2017) de l’action productive.
11C’est dans cette perspective surtout que l’on peut interpréter les interventions législatives de la deuxième moitié des années 1990. À partir de 1997, les politiques gouvernementales italiennes redéfinissent la relation entre éducation et travail. En fait, la loi de 1996-1997, au-delà de la réorganisation de l’apprentissage et de la formation professionnelle, prévoit l’introduction de stages et de formes d’alternance entre éducation et travail dans le but de favoriser l’orientation et « les choix professionnels par la connaissance directe du monde du travail [4] ». Bien que la loi de 1997 définisse ces objectifs, il faut attendre 2005 pour voir se généraliser l’alternance dans tous les parcours éducatifs, tant en ce qui concerne la formation professionnelle que dans les parcours lycéens (D. L. 77/2005). Il s’agit, prévoit la loi, « des parcours projetés, mis en place, vérifiés et évalués sous la responsabilité de l’institution éducative ou formative, sur la base des conventions spécifiques avec les entreprises, ou les organisations qui les représentent […], ou avec les institutions publiques et privées, du tiers secteur, disponibles pour accueillir les étudiants pour des périodes de formation en condition de travail qui ne constituent pas des relations individuelles de travail [5] ». Cette perspective du législateur trouve sa consolidation dans la loi 107 de 2015 (dite « loi de la buona scuola », la « bonne école »), laquelle, entre autres, « prévoit la valorisation de l’école en tant que communauté active, ouverte au territoire et capable de développer et d’augmenter l’interaction avec les familles et avec la communauté locale, entreprises et organisations du tiers secteur comprises ; [et] l’incrémentation de l’alternance école-travail dans les parcours du troisième degré » (art. 1). La « bonne école » poursuit en somme, à travers les expériences de « travail en dehors de l’emploi » et l’élargissement des institutions et des organisations productives susceptibles d’accueillir les sujets en formation, la production de la subjectivité néolibérale non des citoyens, mais des autoentrepreneurs ; non dociles, mais adaptables ; non stables, mais en transition permanente.
12Deux ans après son entrée en vigueur, mis à part une grande attention des entreprises vis-à-vis de l’opportunité d’une main d’œuvre gratuite, nous n’avons pas encore eu l’occasion d’apprécier les effets de la loi en termes de création d’emploi. En revanche, la diffusion du recours à l’alternance dans les entreprises incite le législateur à de nouvelles interventions pour définir les droits des étudiants et limiter l’opposition des organisations qui critiquent la pauvreté des contenus éducatifs prévus dans les conventions signées avec les entreprises (telle McDonald’s) ou, encore, le risque de substitution du travail rémunéré, qui oblige les syndicats à aller vers de nouveaux territoires de la représentation [6] dans lesquels la protection des travailleurs passe par la signature des conventions de travail qui affectent le « hors-travail » (De Angelis, 2015).
L’expérience du stage dans un centre de formation professionnelle à Bologne
13Notre enquête vise notamment à identifier et à qualifier les coordonnées de la conformation subjective aux dynamiques objectives qu’on a synthétisées par rapport à l’éducation et au marché du travail.
14Comme nous venons de le formuler, le processus de gratuitisation du travail est mis en place tant sur le plan objectif, au niveau normatif et du marché, que subjectif. Dans cet article, nous allons surtout enquêter sur la dimension subjective, enrichissant ainsi la recherche autour des dynamiques de gratuitisation du travail menée dans le monde syndical ou académique (De Angelis, 2016a et 2016b ; De Angelis, Marrone, 2017). Cette enquête sur laquelle nous nous appuyons est la première phase, exploratoire, d’une recherche qui, à partir d’un cadre théorique mobilisé pour comprendre les transformations du capitalisme contemporain, vise à identifier des problèmes ou des propriétés de situations ou d’événements complexes. Ici, en particulier, nous allons présenter une partie des réflexions issues de l’analyse des entretiens menés dans un centre de formation professionnelle (CFP) offrant à des jeunes sortis du système scolaire une formation spécifique dans le secteur de l’hôtellerie. Les raisons qui nous ont orientés vers ce choix reposent sur trois éléments : la supposée homogénéité des élèves par rapport aux conditions économiques et aux aspirations professionnelles ; l’expérience confirmée du CFP dans l’intégration des parcours formatifs et professionnels ; les spécificités du secteur de la restauration qui croise plusieurs facteurs de transformation du marché du travail tels un engagement relationnel élevé, une forte fragmentation des structures productives et des parcours professionnels, un secteur traditionnellement peu reconnu (Fellay, 2010) mais qui recueille fortement l’attention des médias [7]. À cet égard, précisons que les réflexions que nous proposons ici sont limitées à un groupe spécifique parmi les jeunes sans diplôme en Italie. Il faut souligner, également, qu’il s’agit d’un approfondissement empirique exclusivement exploratoire, comme le déterminent les caractères inédit et informel du phénomène et qui empêchent, à ce stade, toute ambition de généralisation.
15Les entretiens, semi-directifs et d’une durée d’une heure environ chacun, menés avec des jeunes élèves âgés de 15 à 18 ans ayant déjà réalisé entre 300 et 700 heures de stage, visaient à interroger leur expérience au sein des institutions scolaires et de la formation en se focalisant, en particulier, sur les conditions du travail pendant les expériences de stage et le mécanisme des attentes et des déceptions qui les qualifient, jusqu’à identifier les représentations que les élèves leur attribuent. L’analyse que nous proposons ici concerne donc une des dimensions abordées dans les entretiens, en la décomposant en trois sous-dimensions principales : la première concerne l’importance que les élèves accordent aux expériences de stage ; la deuxième, la concrétisation de ces expériences ; la troisième, leurs attentes.
16Le CFP, institution privée conventionnée avec le système d’éducation et de formation professionnelle régional, offre pour les jeunes jusqu’à 18 ans des cours d’une durée de trois ans, aboutissant à une qualification de niveau régional. Les expériences de stage représentent un tiers de la durée du cours annuel et se déroulent sur les deux dernières années : deux stages de 200 heures la deuxième année et un de 300 heures la troisième. Cela signifie, plus ou moins, cinq mois par an pendant lesquels il y a quatre jours de travail et deux d’école. La plupart des élèves sont des garçons et des filles aux parcours scolaires fragmentés par l’émigration, par des retards dans les premières années d’école, ou simplement des jeunes qui ont préféré, comment nous le verrons, un parcours directement professionnalisant ou simplement qui les passionne.
Principales informations signalétiques sur les interviewés
Principales informations signalétiques sur les interviewés
Le stage à l’épreuve de l’action
17En vue de mieux orienter les élèves dans leur choix professionnels, au sein du programme du CFP, il existe trois périodes de stage : à la cuisine, en salle et au bar, et la dernière en pâtisserie. À la différence de ce que nous avons vu dans le parcours d’alternance en France (Farvaque, 2009), le CFP cherche la meilleure combinaison entre élèves et employeurs qui se proposent d’accueillir les stagiaires. Les critères de cette combinaison concernent la distance entre l’entreprise et la résidence des élèves, mais aussi leur inclination personnelle. Le stage, en fait, favorise la naissance de l’intérêt des élèves pour les contenus des parcours de formation et leur permet de confirmer leur choix de suivre ce genre de parcours professionnel. Tous ceux et toutes celles que nous avons interviewés nous ont montré un fort engagement dans les métiers de la restauration, mais aussi une forte conscience des difficultés et des sacrifices que ce type de profession implique dans la vie sociale.
« Quand tu entres dans une cuisine, 90 % des fois le chef te dit de ne pas faire ce travail. Parce que c’est un travail qui te détruit. Le chef que j’ai connu, il m’a dit qu’aujourd’hui il ne sait pas s’il aurait fait le même choix. Mais, j’ai beaucoup d’envie de commencer ce travail, donc… Je ne sais pas si dans dix ans je me repentirais, mais j’espère que non. »
19La reconnaissance symbolique des employeurs et des clients du futur professionnel est une étape fondamentale du parcours de production sociale de vocation à la restauration ou, comme le dit Charles Suaud, d’« inculcation d’un habitus » (1974, p. 96), qui légitime les sacrifices et les éventuels manques de reconnaissance auxquels le jeune devra faire face dans son parcours :
« C’était le deuxième jour de stage et il [l’employeur] m’a demandé : “Tu sais faire le tiramisu ?” J’ai confirmé et il m’a demandé d’en préparer un. Je venais de le faire quand il m’a dit “c’est parfait” et il le prend et l’expose dans la vitrine. Moi, j’étais trop gênée [elle rit pendant l’entretien], car jamais j’avais fait un tiramisu “parfait” et voir qu’il l’a exposé c’était… [incrédulité, elle rit encore de satisfaction]. »
21Franca est très satisfaite du résultat de son travail. La reconnaissance symbolique que son employeur lui accorde, en mettant en vente ce qu’elle a produit, ou celle que l’employeur d’Ivan lui a accordée avec des félicitations dès le premier jour suffisent à leur procurer entière satisfaction et justifient leur travail même face au manque total de reconnaissance économique.
22Le témoignage de Franca est particulier, car cette élève de 17 ans a grandi avec l’exemple de sa mère, cuisinière elle aussi. Mais, pour la plupart des élèves, l’expérience pratique du stage est limitée aux opérations de base et de préparation au « vrai boulot » (Bidet, 2010) dans la cuisine :
« On peut dire que le travail dans la cuisine en tant que stagiaire est toujours le même. On fait les petits boulots que les autres travailleurs ne veulent pas faire. On coupe les légumes, les oignons, on les met sous vide. Tu fais ce que le chef te dit. On peut dire que c’est plutôt à toi de voler avec les yeux. Car ils sont payés pour travailler et suivre le stagiaire c’est une chose en plus. Donc, c’est à toi […]. »
24Les expériences se différencient surtout dans le rythme de travail, dans l’instrumentation technique et dans les relations avec les employeurs et les collègues. Si les deux premières dimensions sont évoquées surtout par ceux qui ont travaillé dans des organisations structurées, les relations, par contre, ont eu un poids majeur chez ceux qui ont travaillé dans des cuisines petites ou peu structurées. Ce qui est remarquable, en tout cas, c’est l’individualisation de l’expérience éducative par rapport à des différenciations structurelles des entreprises ou personnelles :
« On l’a appris ici et, oui, il y a ceux qui te traitent comme une stagiaire, car le dernier arrivé est toujours le plus esclave, entre guillemets. Mais si toi tu fais la preuve que tu es intelligente… Car je ne veux pas nettoyer seulement. S’ils me disent de le faire, je le fais, mais pas toujours. Parce que [le risque c’est que] quand tu ne sais rien faire, ils te font simplement éplucher les pommes de terre, faire la vaisselle, passer le balai et nettoyer les toilettes. Donc je démontrais déjà au premier jour que cela ce n’était pas mon niveau. Parce que, à l’école, j’ai appris des choses, donc je ne veux pas m’enfermer à faire de la vaisselle, je veux arriver à… Je n’en sais rien, plus en haut. Car il s’agit d’une expérience que je dois aimer, je ne suis pas ici parce que j’ai été rejetée à l’école. »
26C’est surtout pour faire face à ce genre de questions que le CFP prévoit un moment de confrontation collective, de partage et de discussion de l’expérience de stage. Mais, d’après les élèves interviewés, la seule opportunité d’amélioration des conditions de travail est de changer d’entreprise lorsqu’ils ne sont pas satisfaits, même si cela signifie sacrifier l’alternance prévue entre cuisine, salle et bar. Il s’agit donc d’une solution individuelle conditionnée aux attentes de chacun et aux dispositions qui les ont amenés au CFP.
L’importance de l’expérience pratique
27Pour ceux qui n’aiment pas les parcours d’études exigeants sur le plan intellectuel, la formation professionnelle offre l’opportunité d’une préparation spécifiquement orientée vers le marché du travail. Les élèves interviewés reconnaissent cette opportunité et préfèrent une formation plus pratique que celle offerte par les écoles hôtelières. Dans la région de l’Émilie-Romagne, plusieurs écoles et centres de formation offrent en effet une formation similaire, mais c’est dans les CFP que l’on atteint le niveau d’expérience pratique le plus élevé, un argument qui a convaincu plusieurs interviewés :
« [Je suis venue ici car] ils te donnent une formation rapide, toi tu apprends un métier décent et quand tu vas sortir d’ici tu as déjà un travail, une qualification professionnelle et j’aimais cette idée. »
« Je suis venu ici car je n’aimais pas trop étudier et cela ne me semblait pas une chose trop difficile, bien qu’il faille quand même s’engager. Ensuite, on peut trouver un travail plus rapidement, sans conclure des écoles plus élevées, comme l’école hôtelière qui prend cinq années. »
30Même si la rapidité d’obtention de la qualification suscite l’intérêt des élèves qui montrent plus de facilité à s’orienter sur le marché du travail qu’à s’engager dans un long parcours d’études, aucun des interviewés ne minimise l’importance de l’expérience pratique offerte par le CFP. Plus que la vitesse du parcours de qualification, ils soulignent l’importance de cette formation pratique, garantie par le centre à travers plusieurs périodes de stage dont la compilation enrichira leur CV. Un même souci d’étoffer celui-ci préside au choix de ceux qui vont participer à un prolongement expérimental du parcours leur permettant d’obtenir une spécialisation pour le travail en salle, sachant que pour les techniciens de cuisine il n’y a pas de diplôme ou de certification de ce niveau. Mais la confiance de la plupart des interviewés ne repose pas tant sur les titres et les qualifications que sur l’expérience pratique.
« Comment valoriser mes compétences ? Par les expériences de travail surtout. Les stages. Il s’agit de places connues et il faut les mettre sur le CV car ils [les employeurs potentiels] peuvent le considérer. Il y a les expériences de travail aussi. Celles irrégulières, non. Il ne faut pas les mettre. Mais pour la plupart, je les ai écrites sur le CV. Plus tu as des expériences, plus ils voient que tu sais faire quelque chose, car ils ne s’intéressent pas à l’école. Ils regardent ce que tu sais faire. Personne ne te demande quelle école tu as fait, mais ce que tu sais faire. Ils te demandent si tu sais faire quelque chose, ils te mettent à la machine à café et ils te demandent si tu sais comment l’utiliser. Ils veulent savoir ce que tu sais faire, pas d’où tu viens. »
32Finalement, il faut considérer une troisième dimension évoquée par les interviewés et qui concerne la création des réseaux utiles à la recherche de travail. Au-delà de l’opportunité formative, les stages sont effectivement considérés par les élèves comme des occasions de visibilité, tant directes, chez les employeurs qui les accueillent, qu’indirectes, chez les employeurs qui liront leurs expériences dans les CV.
33Cette conviction vient soit de l’expérience personnelle du jeune ou de celle des collègues ou des amis. Pour ce qui concerne l’expérience directe, les interviewés qui ont été embauchés par les employeurs chez lesquels ils ont d’abord fait un stage expliquent qu’il ne s’agit pas d’embauches durables. Il s’agit, plutôt, de petits boulots d’été ou de fin de semaine, dans des conditions à la limite de l’informel :
« Après le premier stage, ils m’ont appelée pour travailler. J’ai travaillé un mois, à peu près, après, j’ai repris l’école. L’été suivant, ils m’ont appelée encore. Il s’agissait surtout des contrats de travail occasionnels ou alors, sinon, j’étais payée par des chèques emploi [8]. Mais il y eu un autre stage aussi et, dans ce cas, ils m’ont prise informellement. Ils m’appelaient quand ils en avaient besoin. »
35Bien sûr, la possibilité d’une embauche, même précaire, par les employeurs qui les ont déjà accueillis en stage, favorise la disposition des élèves à satisfaire leurs attentes. Mais il est très important d’observer comment, pour certains d’entre eux, ce conditionnement va au-delà de la relation directe avec l’employeur et peut aller jusqu’à inclure des contacts de l’employeur. Au niveau pratique, on peut traduire cette dynamique simplement par la peur d’entacher sa propre réputation. C’est le cas surtout, parmi nos interviewés, d’une jeune fille de 16 ans qui justifie par cette peur sa persévérance face aux conseils que lui donnaient ses parents et ses copains d’interrompre l’une de ses expériences de stage, vu les mauvaises conditions de travail rencontrées, parfois à la limite de la violence [9] :
« Je disais que c’était mieux de le conclure. Mieux ça qu’une mauvaise réputation sur le CV ou quelque chose de pareil pour l’avenir. J’avais peur de tout car l’employeur, cette personne, c’est… un connard. Donc, il pouvait aussi dire à l’école quelque chose de faux, je venais de comprendre comme il était fait. Donc j’avais peur et je me taisais, aussi trop. […] Il m’intimidait, il faisait un peu le terroriste en me disant : “Si tu ne fais pas ça, je vais appeler ta directrice, ou celui-ci ou celui-là.” Donc il m’intimidait car je ne voulais pas qu’il appelle personne et j’obéissais. Mauvaise expérience. »
37Il faut dire que la peur de Sandra pour sa propre réputation est enracinée dans une autre expérience qu’elle a vécue. Bien que n’étant pas encore une travailleuse officielle, elle a connu l’humiliation d’un « licenciement » pendant l’une de ses expériences de stage :
« Tout le travail était très rapide. Il s’agissait d’un bar dans un centre commercial et donc tout le monde était très pressé. Moi, peut être que j’étais un peu maladroite car les premiers jours je n’arrivais pas à… Et le responsable me dit : « Tu es très douée et je suis heureux que tu sois ici. Mais je préfère que tu ailles dans un bar où le mouvement n’est pas si rapide et peut-être qu’ils arrivent à t’aider et tu arrives à comprendre quelque chose en plus.” Ça m’a blessée parce que j’aimais beaucoup ce bar-là […] car il y avait des moments où je faisais le café, après, la propriétaire me disait de balayer la salle ou de déménager les tables, ou de servir. Donc je faisais un peu tout. »
39C’est aussi face à ce genre d’expériences, les mauvaises expériences, que les interviewés reconnaissent l’importance du stage. Il ne s’agit pas d’une opportunité de formation simplement professionnelle, mais humaine et sociale aussi. Au-delà des techniques de travail, les élèves apprennent à accepter les inégalités du marché du travail. Ils apprennent à cuisiner, mais aussi à se taire ou à être patient, comme l’explique bien une autre interviewée :
« Les stagiaires sont toujours harcelés. Car ils [les patrons] ne payent pas un stagiaire. Ils ne lui donnent pas leur argent. Si les stagiaires étaient payés, les patrons auraient plus de respect pour eux. »
Les attentes, entre sacrifice, inégalité et culture de l’autoentreprenariat
41Avant même les conditions de travail des stagiaires, l’une des questions qui nous ont amenés à réaliser cette enquête est l’origine de la capacité des élèves à accepter que leur stage ne soit pas rémunéré [10], mais aussi différentes formes de travail gratuit, ou peu rémunéré, dont on trouve trace dans les CV des plus jeunes. Dans les entretiens, nous leur avons demandé s’ils avaient eu d’autres expériences de travail mis à part les stages. À cette question, deux des jeunes interviewés (Anna et Ivan) ont répondu par une autre question : « Travail, vous dites un travail payé ? » Il s’agit d’une question remarquable, car c’est là justement que la culture néolibérale du travail se manifeste.
42Si parmi les objectifs de la dernière réforme de l’instruction en Italie figure l’accroissement des compétences transversales par l’alternance de parcours scolaires et de parcours professionnels, on peut en voir ici une petite partie des résultats, qui sont d’ailleurs proches de ce qu’on a aussi pu observer en France (Dhume-Sonzogni, 2014). Des élèves inégaux devant l’épreuve du marché du travail apprennent à vivre les inégalités avec résignation et impuissance. Ils éprouvent le manque de reconnaissance de leur travail avant même qu’on puisse les considérer comme des travailleurs, ce qui accentue encore leur invisibilité (Bigi et al., 2015). On l’a vu dans les derniers témoignages cités, où la dimension collective de l’inégalité se trouve minimisée par l’individualité de la mauvaise expérience. Mais on le voit aussi dans la diversité des attentes des élèves pour leur avenir, polarisées entre ceux qui voient le succès professionnel à leur portée et ceux qui, bien qu’ayant les mêmes rêves, croient ne pas avoir de véritable possibilité de les réaliser. Pour illustrer ces deux pôles, on peut considérer le cas de deux de nos interviewés. Le premier, un jeune homme de 17 ans, italien, a un père responsable dans une société coopérative et une mère ménagère. Le deuxième, une jeune femme de 16 ans, italienne, a un père ouvrier du bâtiment et une mère femme de ménage. À la question « Qu’est-ce que tu feras dans dix ans ? », le premier a expliqué son projet d’une sorte de petite cité commerciale dédiée exclusivement à la nourriture (« juste food », a-t-il dit en anglais), en Italie – « grand comme un petit village, donc très difficile à réaliser » –, et la deuxième a répondu simplement :
« Je voudrais un emploi stable. Avec une maison à moi, avec une vie à moi. […] Je ne veux pas devoir me disputer avec les autres salariés, je ne sais rien, mais si j’imagine un boulot que je devrais faire pour toute ma vie, j’en voudrais un qui me permette de me sentir à l’aise. Je ne veux pas aller chaque matin stressée et fâchée avec tout le monde. Ce doit être un boulot où je peux aller en souriant. »
44Le thème de la stabilité ressort plus d’une fois chez les interviewés, parfois relié au travail, parfois à la maison et, dans un seul cas, à la dimension sentimentale (Franca, jeune femme, 17 ans). Cette remarque vaut surtout pour ceux qui viennent d’un milieu familial fortement exposé au risque d’instabilité économique due à la précarité.
45Pour ce qui concerne l’emploi et les conditions de travail, l’idée de l’autoentrepreneuriat semble moins répandue que ce que l’on pensait face à un parcours de professionnalisation orienté vers un secteur structurellement très fragmenté comme celui de la restauration. Il y a bien sûr ceux qui pensent en grand, comme Giovanni, qui rêve d’un « pôle dédié exclusivement à la nourriture » qui comprendrait plusieurs entreprises pour séparer les risques et les investissements ; mais ceux qui évoquent la possibilité de devenir entrepreneur ne le considèrent pas comme un but. À l’exception de Rose, qui nous a parlé de son rêve d’ouvrir un restaurant lui permettant de s’organiser librement, sans hiérarchie. Un restaurant ici, avec sa mère, pour commencer, et, plus tard, au Maroc, pour promouvoir la fusion des cultures.
Conclusion
46À la fin de la crise financière, le marché du travail italien n’a pas réduit les clivages territoriaux et de genre qui le caractérisent traditionnellement. Au contraire, l’analyse des données rappelées au début de cet article permet d’identifier de nouvelles lignes de fracture, surtout en ce qui concerne la dynamique de pénalisation des plus jeunes. D’une part, les réponses à ces dynamiques structurelles semblent faibles ; la flexibilisation du marché du travail accroît les difficultés des jeunes qui entrent sur le marché du travail. D’autre part, les mesures destinées à renforcer leur position sur le marché, notamment les politiques d’activation, ne créent pas les effets prévus. Au contraire, on observe une intensification des dynamiques de manque de reconnaissance et de dégradation du travail.
47Dans cette perspective, le processus de gratuitisation du travail, qui émerge sur le plan objectif, se consolide sur le plan subjectif par la multiplication des expériences professionnelles en dehors du travail, dès les années de formation. Cette analyse est fortement étayée par les entretiens avec les élèves du CFP de Bologne. L’éducation des travailleurs de demain passe par la non-reconnaissance de leur travail développé en dehors de l’emploi. Le mépris ressenti en cas de renvoi, les inégalités, le chantage à la réputation et le sentiment de subordination sont une partie des phénomènes marquants évoqués par les jeunes travailleurs sans emploi de 16 à 18 ans. Ce qui reste, c’est la dimension la plus violente du travail en dehors de l’emploi : la reconnaissance symbolique et informelle sur le lieu de travail, en fournissant une justification individualisée, déclenche également la conformation des individus à un régime vocationnel du travail, fondé sur le sacrifice et la dégradation, qui prend corps sur le plan collectif.
Bibliographie
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Notes
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[1]
Le rapport entre le taux de chômage des jeunes et celui des adultes mesure le désavantage relatif des premiers par rapport aux seconds, sans considérer pourtant le taux moyen. Ce qui peut se vérifier, en effet, c’est un rapport très bas, même face à un taux de chômage élevé parmi les jeunes, si les mêmes conditions caractérisent aussi les adultes. Ainsi, un fort désavantage relatif signifie que la difficulté des plus jeunes n’est pas due aux effets d’une stagnation d’ensemble, mais, plutôt, aux facteurs institutionnels qui les affectent.
-
[2]
Voir, par exemple, l’élargissement progressif de l’alternance école-travail aux étudiants et aux étudiantes des trois dernières années du cycle supérieure introduit par la loi 107 de 2015.
-
[3]
Plus que par le pouvoir disciplinaire, le capitalisme néolibéral exprime son pouvoir sur les hommes par la production d’une rationalité, des discours et, plus généralement, des technologies de gouvernement, conduisant à un autogouvernement inspiré par le modèle de l’entreprise. Par « torsion biopolitique », on entend l’introduction et le renforcement de ce genre de technologie.
-
[4]
Art. 18, L. 196/1997 (traduction des auteurs).
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[5]
Ex. Art. 1, C. 2 [traduction des auteurs].
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[6]
Voir l’accord signé entre CGIL, CISL, UIL et Autogrill le 20 juin 2017 (www.flcgil.it/files/pdf/20170627/verbale-di-accordo-autogrill-sindacati-per-alternanza-scuola-lavoro-del-20-giugno-2017.pdf).
-
[7]
Voir MasterChef et d’autres émissions.
-
[8]
En Italie, le système des chèques emploi a été généralisé pour tous les secteurs et tous les travailleurs (De Angelis, Marrone, 2017).
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[9]
L’interviewée a donné elle-même des exemples : « Une fois, je souriais, et le patron m’a demandé si j’étais si heureuse car j’avais… Tu as compris, non ? »
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[10]
En Italie on peut distinguer deux classes de stages : les stages formatifs, comme ceux des interviewés, complètement intégrés dans le parcours de formation, et les stages à l’extérieur des parcours de formation (il en existe des formatifs pour des catégories désavantagées comme les chômeurs ou pour les placements professionnels). Pour les stages à l’intérieur de la première classe, la rémunération n’est pas prévue. En ce qui concerne la deuxième classe, au contraire, il faudrait distinguer différentes formes, mais, généralement, on peut dire que les stages ne durent pas plus de six mois, ou douze mois pour ceux de réinsertion, pour une indemnité de participation qui ne peut pas être inférieure à 300 euros bruts par mois.