Les travaux d’Oswald Hall (1970) ont montré l’importance des rapports de pouvoir entre les chefs de services et les autres médecins hospitaliers dans les années quarante aux États-Unis. Les seconds dépendent largement des premiers pour faire carrière dans les hôpitaux, comme pour réussir leur installation en médecine libérale. Il s’agit d’un système de patronage, fondé sur la compétition des médecins à l’intérieur de chaque discipline, pour accéder à certains postes clés. Progresser dans la carrière nécessite d’avoir un patron dans le « noyau central » de la profession (Hall, 1970). C’est cette élite médicale qui contrôle l’entrée de nouveaux candidats, qui en évince certains, qui en récompense d’autres, faisant respecter des règles qui modèlent le visage de la profession. Le patronage est aussi un échange de services, le patron aidant ses protégés à franchir les différentes étapes de la carrière médicale, et ceux-ci acceptant des charges de travail et des périodes probatoires importantes dans leurs différents postes hospitaliers. Le système de patronage existe-t-il avec les mêmes caractéristiques en Europe ? La répartition des postes dans le champ hospitalier obéit-elle à des mécanismes identiques d’un pays à l’autre ?
Dans une vaste enquête comparative sur les hôpitaux dans le monde, William Glaser (1963) a suggéré que le pouvoir des patrons hospitaliers sur leurs subordonnés était plus ou moins important selon les pays. Il fait l’hypothèse que dans les pays européens la dépendance des médecins juniors est plus importante qu’aux États-Unis, du fait de l’étroitesse des marchés du travail nationaux, et du cumul des chef…