Sur tous les continents et quel que soit le secteur d’activité, le recours à la sous-traitance par les grandes entreprises s’est généralisé depuis la fin des années 1970. Les activités industrielles sous-traitées des pays membres de l’Union européenne, par exemple, ont représenté en 2012 un marché de 492 milliards d’euros, les deux pays les plus concernés étant l’Allemagne et la France.
Cette sous-traitance à l’échelle nationale ou européenne est complémentaire de la sous-traitance internationale qui culmine dans certaines filières telles que le textile (Chine, Inde, Bangladesh, mais aussi Tunisie) ou la gestion des déchets et équipements industriels en fin de vie, par exemple le démantèlement des navires sur les plages des pays du Sud-Est asiatique (voir l’article de Patricia Heidegger et al. dans cet ouvrage). Cet immense marché de la sous-traitance internationale n’est invoqué comme tel dans les médias qu’à l’occasion de catastrophes impossibles à dissimuler à l’opinion publique mondiale. Survenu à Dacca (Bangladesh), le 24 avril 2013, l’effondrement de l’immeuble du Rana Plaza – faisant 1 127 morts parmi les ouvriers et ouvrières qui y travaillaient – a fait apparaître au grand jour les conditions, inhumaines, de travail et de salaire des travailleurs bangladais employés par des sous-traitants de firmes européennes du textile (Camaïeu, Benetton, Zara) et de la grande distribution (Auchan, Carrefour). Ce crime industriel impuni fait écho à celui survenu la nuit du 3 décembre 1984 à Bhopal en Inde, lorsque l’usine d’engrais Union Carbide a explosé, dégageant sur la ville 40 tonnes d’isocyanate de méthyle…