Gregory Bateson est le fondateur de l’école de Palo Alto (Californie), creuset d’une intense réflexion sur les interactions sociales, la communication et les thérapies familiales. Les essais qu’il a rassemblés en 1972 (Vers une écologie de l’esprit) abordent tour à tour l’anthropologie, la théorie de l’apprentissage, la schizophrénie, l’évolution des espèces ou encore la dynamique des écosystèmes. Ils illustrent l’ambition de l’auteur de faire de l’analyse systémique une pince universelle pour saisir aussi bien la structure que la dynamique des relations interindividuelles et sociales.
Dans un premier ouvrage, La Cérémonie du Naven (1936), Bateson définissait l’individu comme l’ensemble des relations qui le lient à son environnement, ce que traduit la notion d’« écologie de l’esprit ». Pour Bateson, les conduites individuelles n’ont pas de sens en dehors du contexte et des processus concrets d’interactions. C’est donc sur ce niveau que porte l’analyse. Bateson s’attache, dans son ethnographie des Iatmuls, peuple de Nouvelle-Guinée, à décrire les interactions entre les individus, et met en évidence un « système de gestes », une expression codifiée des émotions et des attitudes, l’« ethos », qu’il oppose à l’« eidos » (processus cognitifs). Il observe au sein du peuple iatmul l’existence d’une intense rivalité entre les clans. Elle donne lieu à des interactions symétriques, c’est-à-dire des séquences de provocations qui peuvent mener à l’affrontement. C’est ce que Bateson appelle la « schismogenèse »…