Il existe un mythe serbe du Kosovo. Non pas en tant que construction légendaire, mais en tant qu’interprétation particulière d’un événement historique. Celle-ci a bien la fonction d’un mythe, dans la mesure où elle est tenue par la majorité des Serbes pour indiscutable, où elle légitime des valeurs, donne sens au vécu, inspire des représentations et des conduites. Mais il s’agit aussi d’une création continue, que l’on a adaptée aux nécessités politiques de chaque époque. Le dernier de ses utilisateurs est Slobodan Milošević.
Les Serbes sont l’un des peuples slaves venus du nord qui, franchissant le Danube, sont entrés aux VIe et VIIe siècles dans les Balkans. Convertis au christianisme orthodoxe, ils fondent leurs premiers États, la Zeta et la Rascie, plus ou moins vassaux de Byzance, sur un espace correspondant à peu près au Monténégro et à la Serbie centrale actuels. À la fin du XIIe siècle, profitant de l’affaiblissement politique de Byzance, ils prennent le contrôle du Kosovo. Celui-ci devient alors, aux XIII-XIVe siècles, le cœur de l’État de la dynastie serbe des Nemanjić, dont le représentant le plus puissant, Dusan (1331-1355), se proclamera « tsar des Serbes et des Grecs » et dominera des territoires s’étendant du Danube à la mer Égée et à l’Adriatique, incluant l’Albanie et la Grèce du Nord actuelles.
Le Kosovo se couvre alors de monastères dont certains, comme Decani et Gracanica, ont conservé jusqu’à nos jours d’admirables fresques. À Peć, se fixe au XII…