La notion de capital social s’est imposée comme le seul moyen de désigner le principe d’effets sociaux qui, bien qu’on les saisisse clairement au niveau des agents singuliers – où se situe inévitablement l’enquête statistique –, ne se laissent pas réduire à l’ensemble des propriétés individuelles possédées par un agent déterminé : ces effets, où la sociologie spontanée reconnaît volontiers l’action des « relations », sont particulièrement visibles dans tous les cas où différents individus obtiennent un rendement très inégal d’un capital (économique ou culturel) à peu près équivalent selon le degré auquel ils peuvent mobiliser par procuration le capital d’un groupe (famille, anciens élèves d’écoles d’« élite », club select, noblesse, etc.) plus ou moins constitué comme tel et plus ou moins pourvu de capital.
Le capital social est l’ensemble des ressources actuelles ou potentielles qui sont liées à la possession d’un réseau durable de relations plus ou moins institutionnalisées d’interconnaissance et d’interreconnaissance ; ou, en d’autres termes, à l’appartenance à un groupe comme ensemble d’agents qui ne sont pas seulement dotés de propriétés communes (susceptibles d’être perçues par l’observateur, par les autres ou par eux-mêmes) mais sont aussi unis par des liaisons permanentes et utiles. Ces liaisons sont irréductibles aux relations objectives de proximité dans l’espace physique (géographique) ou même dans l’espace économique et social parce qu’elles sont fondées sur des échanges inséparablement matériels et symboliques dont l’instauration et la perpétuation supposent la re-connaissance de cette proximité…