« L’enseignement de l’histoire aux tout petits doit être une suite d’histoires comme les racontent les grands-pères à leurs petits-enfants », peut-on lire sur la couverture des manuels d’histoire d’Ernest Lavisse du cours élémentaire en 1913. Si Lavisse constitue le référent permanent à cette idée du « roman national »*, le poncif d’une nécessité de la « Grande Histoire de France » supposée unifier les Français autour d’une vision commune de son passé perdure. Reprenant les bases des ouvrages lavissiens depuis 1870, l’école aurait vocation à inscrire l’élève dans la continuité d’un discours traversant les âges depuis le passé gaulois et dont l’acmé serait la IIIe République, dernier temps d’un enseignement de l’histoire perçu à sa juste valeur. En 2013, les éditions Armand Colin relançaient un « petit Lavisse » en incluant les pages d’un « roman national » ayant perduré, de la défaite de 1870 à nos jours. Demande sociale, opportunisme éditorial ou message idéologique ?
La multiplicité d’enquêtes d’opinion autour de la « mémoire nationale » menées depuis l’après-guerre (sondage de l’IFOP sur la connaissance des grands personnages de l’histoire de France en 1948, reconduit en 1980 par le magazine L’Histoire) démontre un attachement supposé (l’orientation des questions laissant dubitatif) des Français aux « grands Hommes » de la nation. Ainsi, au début des années 1990, le terme de « roman national » fait son apparition. L’histoire se fait roman, nourrissant un imaginaire commun…