La pensée psychanalytique contemporaine utilise beaucoup la différenciation entre l’analyse « classique » du champ névrotique, sur le modèle du rêve et du principe de plaisir, et celle du champ dit non névrotique, marqué de contrainte et de difficulté à penser. Si l’on tente de décrire ce qui nous semble opérant dans la complexité des traitements analytiques, c’est l’articulation de ces deux modes d’élaboration qui s’impose. On constate en effet que dans de nombreuses situations cliniques ils se manifestent alternativement, et qu’au cours d’une séquence on ne peut comprendre ce qui anime l’un sans tenir compte de l’autre. La possibilité de mise en latence est un des éléments principaux qui différencie ces deux registres.
En effet, dans le champ dit névrotique, l’élaboration des contenus psychiques par la figuration, la mise en images selon les processus primaires du rêve, se fait à la faveur d’une passivité du moi, d’une mise au repos de la motricité et de l’action en général, qui suppose une tranquillité, une absence de menaces trop intenses. Cette tranquillité correspond sur le versant interne à une organisation défensive sous-jacente capable de traiter suffisamment les menaces traumatiques, et sur le versant externe à un dispositif garant de sécurité affective, la bienveillance, et de prévisibilité, le cadre des séances. Alors le processus de figuration, de symbolisation, de développement du préconscient se fait majoritairement selon le principe de plaisir et les mécanismes décrits par Freud à propos du travail du rêve : condensation, déplacement et dramatisation, sur la scène des représentations (Freud, 1900a, 1901a)…