Une croyance commune veut qu’un enfant battu devienne fatalement violent. La réalité est pourtant plus complexe, note Gérard Lopez, psychiatre et président fondateur de l’Institut de victimologie de Paris : « S’il est rare de trouver un agresseur qui n’ait pas été maltraité, tous les enfants maltraités ne deviennent pas des agresseurs. Il n’y a heureusement pas de déterminisme dans ce sens, ce qui ruinerait toute velléité de combat contre la maltraitance. »
Claude Halmos, psychanalyste spécialiste de la maltraitance, enfonce le clou : « On ne devient pas bourreau parce que l’on a été victime. C’est un discours mis en avant par les bourreaux pour se dédouaner. Ce que l’on peut affirmer, c’est que le tissage qui mène à la violence est extrêmement complexe, que personne n’est génétiquement bourreau, que cela suppose une histoire où l’on a été soit victime de violence soi-même, soit témoin de violence sur des proches, et que cette histoire, parce qu’elle n’a pas été prise en charge correctement, n’a pu être dépassée. » Pas de fatalité, donc, et pourtant, un terrain propice. En effet, les psys s’accordent à dire que l’enfant ne peut pas concevoir qu’un parent le batte pour sa jouissance. L’enfant violenté se sent donc toujours coupable et se construit avec une image négative de lui-même. Il se dit que s’il n’avait pas fait de bêtise, il ne recevrait pas ces coups de ceinture. Qu’il est juste bon à déclencher la haine de l’autre et que, parfois, la seule façon de ne pas mourir des coups, c’est d’en jouir et de devenir soi-même ce personnage mauvais qui frappe à son tour……