« Poésie » est un mot dont l’usage traverse bien des œuvres d’écrivains algériens, sans pour autant que leurs pratiques d’écriture puissent clairement être définies comme poétiques, du moins pour un regard extérieur au contexte et aux modes d’autodéfinition des écrivains disponibles dans l’espace algérien. Kateb Yacine se considérait avant tout comme un poète, ce qui n’est pas une identification que suffit à justifier la part de ses textes composés en vers, ni même la prise en compte de ses projets de livres de poèmes, après Soliloques, en 1946, ou même un recueil antérieur, dévoilé par Charles Bonn. Aussi, dans cette enquête préliminaire sur la poésie dans la littérature algérienne depuis la fin de la guerre civile, il ne saurait s’agir de parler de la poésie seulement comme d’un genre du discours littéraire. L’usage de la référence à la poésie par un nombre important d’écrivains algériens reste inaccessible à une approche étroitement générique. D’ailleurs, si l’on considère la poésie en elle-même, elle est minoritaire, voire « pauvre » dans l’espace littéraire algérien. Indéniablement, comme l’écrit Hervé Sanson en faisant un état des lieux de la littérature algérienne récente, du moins de la littérature algérienne francophone : « La poésie, à notre époque, est plus que jamais le parent pauvre de la création littéraire. » Mais qu’en est-il si l’on envisage la poésie de manière extensive, la poésie quand elle cesse d’être poésie, soit que le texte fasse encore référence à la poésie, soit qu’il se donne comme poétique sans être de la poésie, autrement dit, quand on envisage, avec la poésie, la non-poésie, et ceci en tenant compte de manière différenciée de ce qui se produit dans la pluralité des langues de l’Algérie …