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Chapitre d’ouvrage

Imaginer l’avenir de l’habitat : du Pan 14 et de l’Europan 1 jusqu’à aujourd’hui

Pages 125 à 156

Notes

  • [1]
    Voir notre ouvrage avec Lionel Engrand, La Maison des Français. Discours, imaginaires, modèles (1918-1970), Bruxelles, Mardaga, 2020.
  • [2]
    Après avoir été membre du jury du Pan 14 au ministère de l’Équipement et du Logement, je l’ai analysé (avec Anne-Marie Châtelet et Thierry Mandoul) dans l’ouvrage Penser l’habité. Le logement en questions (PAN 14, 1987), [1988, 1990], Liège/Paris, Mardaga, 1995. Membre du Comité français de l’Europan en 1988, j’ai analysé (avec Anne-Marie Châtelet, Jean-Claude Garcias, Thierry Mandoul et Claude Prélorenzo) le premier concours, dans l’ouvrage L’Habitation en projets. De la France à l’Europe. Europan 1989, Liège/Paris, Mardaga, 1990. En 1995, j’étais membre du Comité français de l’Europan du ministère de L’Équipement et du Logement.
  • [3]
    Entretien avec Danièle Valabrègue, chef de projet du programme conception et usage de l’habitat au Plan Urbanisme, Construction et Architecture (Puca), responsable de la session française de l’Europan : « Du PAN à l’EUROPAN », EUROPAN France, journal édité à l’occasion de l’exposition sur les projets de l’Europan France à la Maison de l’architecture du 30 mai au 24 juin 1989, supplément de Plan Construction Actualités n° 34, p. 1-2.
  • [4]
    Ibid., p. 2. Voir aussi Monique Eleb « Le suivi d’expérimentations, un levier d’évolution des pratiques et de la recherche », Premier Plan (Puca), dossier « L’innovation architecturale à travers la recherche et l’expérimentation. Treize regards sur l’architecture en hommage à Danièle Valabrègue », n°35, octobre 2016-janvier 2017.
  • [5]
    Voir Jean-Louis Cohen, La Coupure entre architectes et intellectuels, ou les enseignements de l’italophilie, [In Extenso, 1984], Bruxelles, Mardaga, 2015.
  • [6]
    Entretien avec Danièle Valabrègue, op. cit., note 3, p. 2.
  • [7]
    « Habitat groupé », Natura Maison, n°3, mars-avril 2014.
  • [8]
    Margot Guislain, « Comme des maisons superposées : 75 logements sociaux à Paris, par Jean et Aline Harari », site internet d’AMC, article mis en ligne le 9 avril 2019.
  • [9]
    « TOA architectes associés », Archistorm, hors-série n°34, octobre 2018.
  • [10]
    Nous remercions Didier Bellan, maître d’ouvrage de la SNI Sud-Ouest de Bordeaux, qui nous a fourni des documents au cours de la construction du bâtiment.
  • [11]
    Voir nos analyses et les exemples construits dans L’Invention de l’habitation moderne, Paris, 1880-1914. Architectures de la vie privée, suite (avec Anne Debarre), [1995], Paris/Bruxelles, Hazan/Archives d’architecture moderne, 2000.
  • [12]
    Voir notre ouvrage avec Sabri Bendimérad, Ensemble et séparément. Des lieux pour cohabiter, Bruxelles, Mardaga, 2018.
  • [13]
    Coopérative de l’habitat associatif de Suisse romande, voir Julien Grisel et Nicolas Bassand, « Typologie, participation et réversibilité », Tracés, n° 11, 27 mai 2016, p.12-16.
  • [14]
    Ibid., p. 12.
  • [15]
    Ibid., p. 16.
  • [16]
    Voir plus haut « Les maisons communautaires professionnelles » de Télémaque, à l’Europan 1.
  • [17]
    Voir l’analyse percutante de Jean-Claude Garcias, in L’Habitation en projets. De la France à l’Europe. Europan 1989, Bruxelles, Pierre Mardaga éditeur, 1990, p. 105-106.
  • [18]
    25 % de logements locatifs intermédiaires, 25 % de logements pour primo-accédants et 25 % de logements en accession à prix maîtrisé.

1Les concours Pan (Programme architecture nouvelle) sont nés au début des années 1970 avec la création du Plan Construction du ministère de l’Équipement (1971) et visaient à la fois à stimuler l’innovation, à orienter le débat d’idées et les politiques de l’habitat et à découvrir de jeunes talents, car ils étaient réservés à des architectes français de moins de 40 ans. Il s’agissait aussi de les faire accéder à la commande publique. Danièle Valabrègue, du Secrétariat du Plan Construction en a été la cheville ouvrière dès 1972.

2Le Plan Construction s’est d’emblée attaché à soutenir les innovations techniques, dans la continuité des politiques du ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (MRU) de l’après-guerre, mais un tournant s’était opéré auparavant, au milieu des années 1960 (notamment au moment de Villagexpo en 1966), avec l’arrivée de nouveaux ingénieurs plus ouverts aux questions urbaines [1]. Dès sa création, le Plan Construction s’intéresse aussi à la réception des innovations spatiales ou techniques par les habitants en commandant à des chercheurs, souvent sociologues, des suivis d’expérimentations.

3Pensé comme un concours d’idées sans territoire, le Pan se transformera en 1989, après le Pan 14 de 1987 (qui portait sur « Le logement en questions, type, contexte, modification »), en Europan [2] puisque celui-ci s’ouvrira aux candidats de neuf pays européens (y compris la Suisse) qui lanceront simultanément le même concours. Il se transformera ensuite en concours plus opérationnel et centré sur l’urbain. En effet, des territoires français et européens seront alors proposés aux candidats, souvent en liaison avec des élus, mais le passage d’un concours d’idées à une réalisation n’est pas aisé, comme en témoigne le faible nombre de réalisations, malgré l’intérêt que le concours suscitera.

4Mais le premier Europan est encore centré sur un certain type de prospective sur l’habitat. Son thème « Évolution des modes de vie et architecture du logement » est très proche du dernier Pan réservé aux candidats français. Certains pays vont aussitôt proposer des terrains (comme l’Italie, la Grèce, l’Autriche ou l’Espagne). Didier Rebois sera chargé de la coordination européenne.

5Donc, si l’habitat était relativement central dans certaines sessions des premières années du Pan, jamais cependant, le regard ne s’était fait si attentif au logement, dans le premier Europan, jamais il n’y avait eu tant d’insistance à suggérer aux concurrents d’analyser les usages et les manières de vivre en devenir, d’envisager avec soin le plan de chaque appartement, de s’interroger sur chaque pièce, sa fonction, sa place et ses relations.

6Les jeunes architectes qui ont répondu à ces deux concours percevaient avec une acuité particulière les changements sociaux et la nécessité de leur donner un cadre spatial.

7Plutôt que de proposer simplement d’agrandir les surfaces, les architectes ont opté pour une requalification des pièces et de leurs liaisons, pour une réflexion sur la partition des espaces : le regroupement des parties techniques et de service qui dégagent les pièces, etc., ce qui n’exclut d’ailleurs pas de souhaiter l’agrandissement des surfaces, qui sont, en France, plus réduites que dans la plupart des pays d’Europe.

8Danièle Valabrègue, qui présente ce premier Europan au moment de l’exposition sur les résultats français en 1989 [3], insiste sur le fait que dans tous les pays « les modes de vie connaissent des bouleversement rapides ». Elle emploie souvent le terme de « mutation sociale » et précise que « les modèles figés ne fonctionnent plus ». Mais elle s’illusionne alors sur la dérive formaliste des architectes, voire sur leur fascination pour la grande échelle, qu’elle espère passagère, et qui durera bien longtemps après cet Europan. Mais cela n’est qu’une des raisons qui empêcheront de voir se déployer des espaces adaptés aux nouveaux modes de vie. Les nouvelles évolutions de ceux-ci ne sont prises en compte que depuis peu de temps, comme celles des nouvelles formes de familles, la diffusion du travail chez soi ou la mutualisation des espaces de l’immeuble. Valabrègue annonce, en effet, car elle veut y croire, comme beaucoup d’entre nous à l’époque, que « la référence formelle sur l’architecture coïncide avec une attention plus éveillée aux modes de vie [4] ».

Concepts et idéologies

9Mais revenons aux attendus théoriques et idéologiques des Pan pour mieux mesurer les multiples passages d’une réflexion centrée sur le logement à une réflexion sur l’habitat, c’est-à-dire le logement et son environnement, et surtout sur l’urbanisme qui sera pour longtemps, et jusqu’à aujourd’hui, le thème privilégié d’Europan.

10Les réponses aux premiers Pan étaient une étrange association d’utopie sociale et d’objets architecturaux dont les composants techniques étaient parfois minutieusement pensés, dans la droite ligne des préoccupations de cette période, certains étant fascinés par la préfabrication dans la foulée des objectifs de la Reconstruction. Comme au moment des premiers CIAM de la fin des années 1920, les architectes font alors appel aux évolutions techniques pour modifier les modes de vie, ou encore ils espèrent que les techniques vont générer des modes de vie innovants.

11Le vocabulaire employé par les architectes et les buts annoncés permettent de comprendre l’évolution des Pan et les idéologies sous-jacentes. Au début des années 1970, dans les réponses aux Pan, le logement pour tous ne tient pas compte de spécificités fines en termes de groupes sociaux. Il est conçu pour le plus grand nombre et pour un grand nombre d’habitants par opérations. Puis vient le temps, quelques années plus tard, de « l’appropriation du logement ou de l’espace » par les habitants, qui devient un cliché obsessionnel. Les architectes adoptent souvent une position morale ou éthique et militante, prennent le ton de réformateurs sociaux, et l’idée sous-jacente de rendre actifs les habitants, de ne pas leur confisquer la capacité de laisser leurs traces, va aller chez certains architectes jusqu’à accepter de partager la paternité des moindres détails de conception à travers les premières expériences de participation, qui seront bien décevantes dans la réalité.

12Ces préoccupations des Pan du début des années 1970, centrées presque exclusivement sur l’intérieur du logement et les modes constructifs, se transformeront au Pan 7 (1975) et le titre du projet lauréat d’Yves Lion et de Jean-Paul Rayon assure parfaitement la transition : « Recherche d’un tissu urbain où le logement joue sa carte. » Ils remarquent que « la recherche d’une typologie de l’habitat est une opération d’autant moins neutre qu’elle implique et doit assumer une conception de l’urbanité ». C’est donc la rue qui « doit devenir l’espace global de l’appropriation ». Un espace central, extérieur cette fois, la place publique, sera pour Christian de Portzamparc, « appropriable par ses habitants », lauréat cette même année, avec « Virage Urbain. Les Hautes-Formes ». Le contexte théorique de l’époque, ce grand moment d’italophilie [5], influe sur les thématiques des réponses, Bernard Huet, Jean Castex et Philippe Panerai, notamment, renouvellent la pensée urbaine en France, par une critique du zoning et un regard neuf sur la ville traditionnelle. C’est l’architecture dite urbaine qui mobilise l’attention et fait l’objet de débats et de prises de position. Aussi, la question du logement est-elle relativement mise à l’écart des réflexions. Comme le remarque Danièle Valabrègue, pendant cette période, « le logement apparaissait trop souvent comme la résultante de la forme urbaine. La réflexion sur la ville avait occulté la réflexion sur la vie [6] », ce qui explique le retour, au moment du Pan 14 (1987) et du premier Europan (1989), des thématiques sur la « dimension sociale et culturelle de l’habiter… qui est, elle aussi, une dimension de la ville, une dimension de l’Europe ». Et, mouvement de balancier, c’est avec le deuxième Europan que le changement d’échelle sera patent dans les termes du concours où l’on repasse de l’habitat à l’urbain.

13Loger le peuple était un slogan des premiers Pan, alors qu’au Pan 14 (1987) et au premier Europan, on peut observer un glissement de l’intérêt des architectes vers la classe moyenne ou les « professions intermédiaires », dont ils sont souvent eux-mêmes issus. De nombreux lauréats s’intéressent aussi aux statuts émergents (comme le stéréotype du jeune artiste célibataire) voire aux marginaux, peut-être parce qu’ils sont perçus comme plus aptes à accepter ou à se reconnaître dans les solutions porteuses d’innovations, qu’elles soient techniques ou relatives aux modes de vie.

14Dès le Pan 14 avec une accentuation dans les réponses au premier Europan, les architectes partent de figures d’habitants aux statuts les plus divers, suivant en cela les évolutions démographiques, avec un intérêt certain pour la cohabitation. Le but poursuivi n’est plus seulement de permettre une bonne appropriation du logement mais de proposer une partition de l’espace (travail éminemment architectural) qui permette d’être « ensemble mais séparément », (selon l’expression de l’équipe HARO au Pan 14). On perçoit aussi une tendance plus nette (fondée sur la crainte du ghetto), à prôner le mélange des populations, dans une même opération de logement. L’Européen est décrit le plus souvent comme un urbain, mobile, aimant son travail, dynamique et jeune, recherchant les contacts sociaux.

Des idées qui ont fait leur chemin

15Des thèmes apparaissent donc de façon récurrente, comme celui de la prise en compte des rythmes familiaux, celui de la flexibilité du logement ou de la mobilité interne et à travers l’Europe. Certains architectes reconsidèrent la notion de famille et proposent des immeubles à logements divers comme celui composé de deux parties, un « espace primordial » et un « espace complémentaire », en tenant compte de la présence prolongée des jeunes adultes dans l’appartement familial et de celle des grands-parents, logement qui peut jouxter un appartement pour famille recomposée.

16Certaines équipes fondent leur projet sur le fait que les solidarités distendues peuvent se transformer dans les pratiques quotidiennes de voisinage et notamment dans les moments de transition (divorce, recomposition familiale, etc.). Elles tiennent compte aussi des pratiques, émergentes alors et qui se sont diffusées, comme la cohabitation entre pairs ou non et à tous âges, ou l’augmentation de la monoparentalitéfig. a. Ainsi, Vincent Lacaille propose-t-il, à l’Europan 1, des immeubles destinés, entre autres, au « retraité », aux « deux copines », à « la mère célibataire » et « au jeune cadre dynamique ».

17Considérant, comme le faisait déjà Palladio, que la maison doit répondre aux désirs antinomiques d’individualisme et de sociabilité, beaucoup de candidats aux deux concours proposent des types de logements communautaires et familiaux, mais qui protègent l’intimité de chacun, ainsi que des logements pour célibataires, couples sans enfant, personnes dépendantes, ou personnes désirant travailler chez elles. C’est aujourd’hui l’évolution la plus nette du logement en Europe, et l’on voit émerger en France des projets qui vont dans ce sens.

18Je vais donc oser les comparaisons et mettre en regard, à propos des principaux thèmes traités, des réponses à ces concours et des expériences récentes, qui ont émergé et se sont parfois déjà diffusées. En effet, ces dernières années, des thématiques qui semblaient bien abstraites en 1989 se sont matérialisées et on a vu se construire en Europe, en Asie ou ailleurs, des dispositifs présentés comme avant-gardistes que l’on avait pourtant vus être développés par des équipes répondant, entre 1987 et 1989, au Pan 14 et à l’Europan 1. Il est d’ailleurs remarquable que certaines d’entre elles, parfois lauréates de ces concours, additionnent les réflexions sur une évolution des modes de vie qu’elles percevaient comme contemporaines mais qui, en réalité, ne sont devenues désirables et pertinentes, aux yeux de certains groupes sociaux, ainsi que de toute la chaîne de production du logement, que quelque trente ans plus tard.

Plan de l’immeuble de l’équipe de Vincent Lacaille, « La mixité d’âge et de statut », Europan 1.

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Plan de l’immeuble de l’équipe de Vincent Lacaille, « La mixité d’âge et de statut », Europan 1.

Dessin de Télémaque « Stratégie de cohabitation », Europan 1.

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Dessin de Télémaque « Stratégie de cohabitation », Europan 1.

Dessin de Benoît Carrié, Thierry Roze, « La cour ouverte, le vestibule, le corridor », Europan 1.

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Dessin de Benoît Carrié, Thierry Roze, « La cour ouverte, le vestibule, le corridor », Europan 1.

Des immeubles équipés et mixtes

19En 1989, comme aujourd’hui, la réflexion sur l’adaptation du logement aux différentes phases de la vie et à certains moments de turbulence menait de nombreux jeunes architectes à proposer un immeuble équipé offrant divers services, soutien à des personnes fragilisées par un divorce, un célibat prolongé avec sensation de solitude, etc., dont la vie quotidienne peut se trouver ainsi très améliorée. Ces solutions peuvent accentuer une sociabilité de voisinage, « le trajet pantoufle », qu’évoquent Vincent Bastié et Aude Bruguière, et l’immeuble est alors, pour nombre de candidats, censé aider à lutter contre le repli domestique.

20L’équipe Télémaque (« Stratégie de cohabitation » dans le technopôle de Metz, Europan 1) va aussi dans ce sens en imaginant « 3 séquences d’un espace à vocation collective » qui allie à des logements des « locaux associatifs », des « services domestiques partagés », ainsi que des « services professionnels partagés » suivis d’une « pépinière d’entreprises »fig. b. On reconnaît là des dispositifs émergents dans toute l’Europe aujourd’hui, comme notamment la Station F (de Xavier Niel), dans le 13e arrondissement de Paris qui s’en rapproche, même si l’on peut regretter la mise au pas, par un bâtiment, de la vie de jeunes gens attelés au travail, qui nous rappellent les mauvais souvenirs de l’habitat patronal du xix e siècle, et même si le consentement des protagonistes semble acquis.

21Comment entre-t-on dans l’immeuble se sont demandé un certain nombre d’équipes ? Le rez-de-chaussée de l’immeuble a souvent été pensé comme un lieu de rencontre, comme un potentiel susceptible de créer un plaisir quotidien, par exemple, celui d’être entre deux jardins et donc d’avoir un hall accueillant, très bien éclairé, et / ou de bénéficier d’une grande cour. L’équipe d’É. Cellier, (Europan 1) dessine un « côté jardin » et un « côté cour ». Ces espaces sont pensés comme des lieux de socialisation, de rencontres ou de fêtes. C’est aussi le cas de l’équipe de « Fenêtre sur cour » qui conçoit une cour fédératrice, dans un immeuble mêlant les classes d’âge, les statuts et, par là, des pratiques et des modes de vie spécifiques, et dont les modalités de pratiques communes sont à inventer par les protagonistes. D’autres comme Benoît Carrié et Thierry Roze, (« La cour ouverte, le vestibule, le corridor », Europan 1) revisitent un type, ici, la cour ouverte, et multiplient les espaces intermédiaires entre dedans et dehorsfig. c.

22On est aussi revenu aux terrasses ouvrant sur une très grande cour-jardin, qui est parfois une pièce à part entière, un « intérieur extériorisé », comme Piano et Plattner dans leur immeuble à terrasses et grande cour-jardin plantée de bouleaux de la rue de Meauxfig. d, qui avouent leur référence aux logements des fondations philanthropiques du début du xxe siècle.

Photo d’un séjour à terrasse donnant sur un jardin de bouleaux. Architectes : Piano et Plattner, vers 1990.

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Photo d’un séjour à terrasse donnant sur un jardin de bouleaux. Architectes : Piano et Plattner, vers 1990.

Plan du rez-de-chaussée commun et équipé, agence Tekhnê. « La Salière », habitat participatif à Grenoble, 2002-2010.

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Plan du rez-de-chaussée commun et équipé, agence Tekhnê. « La Salière », habitat participatif à Grenoble, 2002-2010.

23La sociabilité se construit souvent autour des activités des enfants et les espaces qui leur sont dédiés sont étudiés aussi par rapport à la présence des parents. Les cours sont également des espaces de pratiques, calmes (bancs) ou plus actives et les habitants supportent mal les espaces « verts » dédiés uniquement à la représentation.

24La question des espaces et des équipements mutualisés est souvent traitée, car on peut observer dans plusieurs propositions un traitement du socle commun de l’immeuble partagé par tous les occupants : un local rangement/bricolage et une salle commune. Par exemple, Jacques Ferrier installe des services communs sous les pilotis de son immeuble avec « laverie automatique, atelier, salle de jeu » et sur le toit « une salle d’exercice et un sauna » (Pan 14).

25La proposition de Catherine Clarisse et Sandra Planchez (situé dans le 10e arrondissement de Paris, Europan 1) est dans la même veine ; elles installent sous les pilotis, les services communs, mais « sur la terrasse, le jardin d’hiver devient le domaine des enfants ».

26En plus d’espaces de services qui facilitent la vie de tous, commence à se diffuser, souvent au rez-de-chaussée d’un petit immeuble, un studio à retenir à l’occasion de visites, qui demande une gestion conviviale entre copropriétaires ou locataires [7]. Dans une opération d’autopromotion (« La Salière », habitat participatif, 2002-2010), à Grenoble, conduite avec l’architecte Christian Charignon de l’agence Tekhnê, le rez-de-chaussée mutualisé comporte un séjour commun, un studio pour invités à disposition des propriétaires et une salle des machinesfig. e.

27Ces solutions sont plus faciles à mettre en place dans l’habitat participatif. On en rencontre aussi aujourd’hui dans les résidences en difficulté qui peuvent y trouver, par la location de ce studio, une source de revenus. Cette potentialité implique dans les grands immeubles qu’un gestionnaire attentif, ou l’un de ces « nouveaux concierges » qui facilitent la vie quotidienne des habitants d’un immeuble ou d’un quartier, soit présent et s’occupe du bon fonctionnement de ce partage.

28Dans le premier projet du bâtiment B2-02 à Lyon Confluence (Clément Vergely, Roger Diener, architectes, OGIC), le socle du petit plot en accession à la propriété en fait véritablement un immeuble équipé avec conciergerie, chambre d’hôtes et laverie, atelier de réparation associé au garage à vélo. De plus, quelques logements bénéficient d’un atelier d’artiste et un commerce s’ouvre sur la rue. Aux deux derniers niveaux, un petit bureau d’environ 11 m2 (rangé dans la catégorie SOHO — Small Office Home Office) peut être acheté ou loué, bien pratique en cette période d’augmentation du télétravail.

29Autre dispositif vu au concours de 1989 et revisité, de larges paliers communs à deux appartements formant terrasse ont été proposés par KOZ à Courbevoie, avec un escalier éclairé naturellement et leur appropriation est visible par l’installation de plantes, d’objets d’usage quotidien comme des poussettes ou de paniers de courses à roulettes.

30Dans des cas d’opérations plus importantes, on peut dissocier les immeubles de logements et les espaces de rencontre en proposant un petit plot composé de jardins et de salles partagées, toutes solutions envisagées dans les deux concours et que l’on commence à voir aujourd’hui avec des petites tours végétales permettant la rencontre avec parfois des salles de travail.

31Autre question mais qui concerne toujours l’équipement de l’immeuble lui-même et l’occultation des façades, l’équipe HOSI (Pan 14) propose de régler la question du confort d’hiver et d’été en installant ce que nous nommons aujourd’hui des « rideaux thermiques », sous forme de panneaux de « qualité “occultante” diverses (opaques, translucides, transparents à faible émissivité, etc.) » qui changent selon la journée et les saisons. HOSI remarque que, outre la dimension thermique, leur utilisation « produit un maximum de situations spatiales inédites et crée un paysage intérieur en mouvement ».

32Cette solution est aujourd’hui plus connue comme signature d’Anne Lacaton et de Jean-Philippe Vassal (avec Frédéric Druot pour la réhabilitation de la tour du Bois-le-Prêtre, 2009-2011 à Paris, mais aussi à Bordeaux notamment). Ces rideaux remplacent de fait, pour la protection thermique seulement, les vitres à très hautes performances qui ont peut-être un coût trop élevé pour le logement social. Mais comme prévu par HOSI, les différences de matières et de qualité d’occultation maîtrisées par l’habitant lui-même ont une efficacité certaine et créent, en effet, des atmosphères de qualité changeante selon les saisons, appréciées par les habitants rencontrés, au-delà de la protection thermique.

Un intérieur extériorisé ou l’inverse

33L’appétit de « nature » des urbains n’a fait que croître, ces dernières années, mais il avait été déjà bien perçu par les architectes répondant aux deux concours à la fin des années 1980. La « réinstallation » de la nature dans des villes perçues comme trop minérales et son rôle supposé de vecteur de santé constituent l’idéal de nombre d’urbains.

34Cet engouement de citadins a encouragé les architectes à inventer ou à revisiter des dispositifs qui introduisent la végétation et les matériaux naturels dans la vie quotidienne des habitants du logement collectif : multiplication des terrasses, serres, jardins d’hiver, loggias, et aujourd’hui, murs végétaux, bois en façade, terrasses végétalisées avant l’arrivée des habitants etc., auxquels ils donnent une respiration. La double peau, la façade épaisse (avec loggia et brise-soleil, ventelles, etc.), deux termes des années 1980, la « cinquième façade », les « maisons sur le toit » avec terrasse, font désormais partie du vocabulaire courant.

35De plus en plus présents, les espaces extérieurs aux logements ou partagés par les occupants d’un immeuble sont devenus de solides arguments de vente. Ce sont aussi des ressources, pour les candidats aux concours, afin de valoriser les façades des bâtiments imaginés. Dans la proposition de l’équipe « Habiter la Croix-Rousse » (équipe de P. Fontaine, lauréate, Pan 14), l’immeuble est surmonté d’une toiture-serre et une terrasse commune est réservée à deux logements. De plus, un grand espace commun résidentiel, encore dénommé LCR (local commun résidentiel) est conçu pour des activités de tout ordre (gymnastique, yoga, devoirs, rencontres et fêtes, etc.). Ici, il est ouvert sur l’espace central du rez-de-chaussée.

36Un bâtiment de Bruno Rollet, « Le Candide », à Vitry-sur Seine en 2012, ou une des opérations livrées à Paris 13e par Jean et Aline Harari en 2017 [8] ont été très remarqués avec leurs terrasses sur le toit et leurs serres et carrés pour plantations, préparant les jardins potagers partagés, qui correspondent à une demande de plus en plus fortefig. f. Et même si tous les habitants ne jardinent pas, ils ont l’occasion de profiter du plein air et de se détendre. Des toits-terrasses plantés peuvent aussi être partagés avec une association de quartier, dont les membres passent par un escalier extérieur. C’est le cas du jardin participatif pensé par TOA architectes, en 2015, rue des Haies à Paris 20e, au-dessus de logements sociaux. Ce double accès permet des relations de voisinage élargies [9].

37Regroupant plusieurs de ces dispositifs, le projet de Jean-Baptiste Lacoudre Architectures (lauréat du Pan 14, et équipe « Fondation Architectes de l’urgence »), pour le concours Réinventer Paris en 2016, propose un immeuble entre deux jardins accessibles depuis les locaux d’activité en rez-de-chaussée et rez-de-jardin. L’équipe imagine aussi la création d’une terrasse-potager au niveau R + 5 ainsi que sur la toiture « délivrée des équipements techniques ». Ces extérieurs de l’immeuble permettent la rencontre et l’échange, en plus de l’aspect thérapeutique du jardinage.

38Remarquons que ces thèmes, très présents dans ces concours, ne mettent pas véritablement en question la forme de l’immeuble. Ainsi, les terrasses qui donnaient en 1970 des formes pyramidales aux bâtiments sont-elles intégrées à toutes sortes de formes d’immeubles.

39De la rue au balcon, le végétal, les jardins par lesquels on passe ou par lesquels on arrive chez soi structuraient déjà les territoires imaginés par les candidats, en ajoutant au plaisir du lieu et en accompagnant les cheminements. L’une des équipes lauréates du Pan 14, « Regard privé » (A. Casanova, J. Read et G. Roquelaure), propose d’entrer par la terrasse et sous-titre son dessin « Il vient de franchir le pas de la porte », pour montrer la rupture mentale entre dehors et dedans que permet cet espace de transitionfig. g. Entrer dans l’immeuble par une serre après une cour-jardin se voit aujourd’hui dans des projets construits ou en cours, et l’idée d’entrer chez soi par une terrasse gagne du terrainfig. h.

40De larges balcons deviennent de véritables pièces à vivre, rendant les façades habitées et verdies, et les serres à double hauteur, les jardins d’hiver et les terrasses plantées font sas thermique. Tous ces dispositifs sont aussi un des potentiels pour une ville verte plus saine et une innovation fortement souhaitée par les habitants du collectif en ville qui désirent posséder un bout de ciel, déjeuner dehors tout en étant chez soi et retrouver, par le jardinage, le passage des saisons. Soulignons que la largeur d’un balcon est primordiale, car les habitants ne l’apprécient que si on peut y manger ; donc, il faut pouvoir y installer une table et des chaises. Ce rapport à un « extérieur intériorisé » ou l’inverse [Eleb, 1984] s’explique aussi par la réduction de la taille des logements collectifs et celle des potentiels d’innovation dans le logement lui-même, trop rares aujourd’hui. Puisqu’on ne peut donner de la surface intérieure, on donne un espace extérieur moins coûteux.

Photo de la terrasse et des potagers de l’immeuble de 75 logements BBC, avenue de France, Paris 13e, Jean et Aline Harari, 2017.

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Photo de la terrasse et des potagers de l’immeuble de 75 logements BBC, avenue de France, Paris 13e, Jean et Aline Harari, 2017.

Plan de l’agence Clément Vergély, « Entrer par la terrasse », Lyon Confluence 1, 2010.

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Plan de l’agence Clément Vergély, « Entrer par la terrasse », Lyon Confluence 1, 2010.

41D’autres initiatives renvoient à la nécessité de donner au collectif les qualités de la maison individuelle. Quelles sont-elles ? Un « intérieur extériorisé », c’est-à-dire un espace extérieur appropriable et privatisable, des espaces de rangement, de bricolage, une division public/privé très nette, rendue possible, de préférence, par la différence de niveaux, et une surface plus grande que celle du collectif.

42Pour conclure sur cette question, réfléchir à la qualité des abords et des espaces extérieurs ne permet certes pas d’offrir des mètres carrés supplémentaires, mais cela peut aider à compenser la petite surface des logements. Certains lieux tirent tout leur charme d’un rapport bien pensé entre bâti et espaces plantés bien composés. C’est le cas de l’immeuble végétalisé de Manuelle Gautrand dans le 13e arrondissement de Paris (2020, concours « Réinventer Paris 1 ») où 14 jardinières en moyenne sont préplantées dans les 21 logements avant l’installation des habitants pour lesquels des petits carrés de terre sont aussi réservés sur le toit.

43Dans le même esprit, on peut noter, ces dernières années, le très remarqué immeuble de Castro et associés, « Habiter le ciel. Emblématik », à Aubervilliers, inauguré en 2019, aux terrasses à double hauteur dont certaines sont partagées par les habitants de l’immeuble, ou « L’Arbre blanc » de Sou Foujimoto et Manal Rachdi de l’agence OXO, à Montpellier (2019), dont les façades subliment les terrasses projetées, privées ou semi-privées, elles aussi, surmontées de brise-soleil aux derniers étages.

L’immeuble adapté et adaptable par la structure

44Obtenir « l’espace ouvert » des logements de l’immeuble proposé par HOSI au Pan 14 est permis par le passage des réseaux dans un plancher à dalles alvéolaires en béton, associé à des « murs techniques » perpendiculaires aux façades, et les rangements humides et secs sont situés le long des murs latéraux et libèrent un espace central traversant ce qui produit une impression de fluidité et de volume plus importantfig. i.

45Cette solution, très originale alors, a été reprise peu ou prou pour des bâtiments de MVRDV à Rotterdam ou ailleurs et par Édouard François à Montpellier ou à Paris, dans les quinze dernières années, avec réseaux placés centralement ou latéralement qui permettent la transformation dans le temps.

46Un exemple plus récent de ce retour de l’immeuble adapté et adaptable par la structure est une opération juste achevée en 2020, l’« Urbik’s Cube » du quartier Brazza à Bordeaux, un immeuble en bois de 7 étages. Selon ses auteurs, c’est un « immeuble urbain adaptatif, reprogrammable en bureau ou logement ». L’atelier Marc Barani (avec Didier Bellan, SNI Sud-Ouest) a fait ce projet dans le cadre du concours du Lab CDC « Architecture de la transformation » en 2016. L’immeuble est dit « capable » car susceptible d’accueillir logements, bureaux, parkings au cours de sa vie. Il obéit donc aux notions d’adaptabilité, de flexibilité, de réversibilité, et certains éléments sont préfabriqués. Il est aussi capable de répondre aux attentes actuelles et plein de potentiel pour les besoins futurs. La notice de la SNI évoque la « Programmation adaptative au cours de la vie de l’immeuble ».

47Ce bâtiment innove non seulement sur le mode constructif — les étages sont libres d’éléments porteurs, car les gaines sont reportées sur une des façades et les fluides sont intégrés au plancher —, mais aussi sur les usages puisque des dispositifs tiennent compte autant des pratiques quotidiennes en mutation que de la gestion de ses divers espaces dans le tempsfig. j.

48En effet, des annexes au logement sont proposées à la carte, « pièces basculantes » entre logements qui peuvent donc être louées ou vendues à l’un ou l’autre des logements contigus, à l’occasion des déménagements, et logements « extensibles » et « élastiques », agrandis par « une pièce supplémentaire » : bureau/atelier, cellier ou chambre d’invités [10]. Les parkings sont aussi transformables en bureaux et logements. On y trouve donc une mixité fonctionnelle : activités, parking en temps partagé, bureaux et logements et entreprises à rez-de-chaussée.

Le succès d’un dispositif : un immeuble composé d’appartements principaux avec studio associé

49Pour s’adapter à ce qu’on a nommé, ces dernières années, les « nouvelles » familles ou parfois « familles complexes », les concourants avaient alors imaginé de nombreuses solutions dont on peut retrouver les traces aujourd’hui tandis que leur nombre a augmenté. Ainsi l’équipe SAXO, « Le singulier pluriel », propose-t-elle au Pan 14, une chambre autonome dans l’appartement avec accès différencié près de la porte d’entrée, équipée d’une douche et d’un W.-C., pour adolescents ou personnes âgées. Son but est de voir se « modifier les usages suivant la personnalité des habitants » et permettre « des logiques distributives diverses », innovantes ou conventionnelles, mais qui puissent, grâce à des « améliorations locales », s’adapter aux divers modes de vie et pratiques évoluant dans le tempsfig. k.

50Dans l’un des scénarios proposés, il est possible, grâce à un escalier extérieur, de coupler un studio pour personnes âgées à un appartement familial : c’est le principe « proche mais indépendant » qui est spatialisé ici, ainsi que l’esquisse d’une cohabitation intergénérationnelle qui se développe aujourd’hui.

51D’autres équipes, notamment deux répondant au Pan 14 — celle de C. Lauvergeat et T. Nabères, « Un + Un. Comment réussir sa cohabitation », et celle de HARO, « Logements, architectures d’usages » —, fixent leur attention sur tous les moments d’instabilité, de « turbulence » ou de passage de la vie mais aussi sur des figures nouvelles de cohabitations, que nous évoquons plus loin, ou bien déclinent tous les types de relations familiales classiques ou alternatives. Ils tiennent compte également de l’augmentation de la monoparentalité qui nécessite de réfléchir aux dispositifs respectant l’intimité nécessaire à chacun et dessinent des espaces qui leur sont adaptésfig. l.

Plans de l’équipe HARO (Loïc Julienne et Jean-Marie Mondon) : « Ado : typologie d’une liberté », « Divorcé(e) : typologie de l’absence » et « Troisième âge : typologie de la solitude », Pan 14.

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Plans de l’équipe HARO (Loïc Julienne et Jean-Marie Mondon) : « Ado : typologie d’une liberté », « Divorcé(e) : typologie de l’absence » et « Troisième âge : typologie de la solitude », Pan 14.

Plans des bâtiments à « passerelles pour familles recomposées » de l’équipe de R. Hondelatte et M. Laporte, Mantes-la-Ville, 2011.

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Plans des bâtiments à « passerelles pour familles recomposées » de l’équipe de R. Hondelatte et M. Laporte, Mantes-la-Ville, 2011.

52Partant, elle aussi, de l’idée de la diversité des modes de vie dans un même immeuble, une des équipes lauréates du Pan 14, HARO (Loïc Julienne et Jean-Marie Mondon), propose, en étudiant très précisément la position des pièces, ou en en ajoutant, de concevoir sur-mesure un logement adapté à des aspirations diverses, voire opposées, pour configuration particulière du groupe domestique à un moment donné mais aussi spécifique à chaque phase de la vie. On peut parfois s’étonner des stéréotypes véhiculés par certaines de ces figures, notamment l’évidence du lien entre vieillesse et solitude.

53Dans ce projet, des scénarios comme « tous ensemble » ou « chacun chez soi » s’enrichissent de pièces ou d’espaces communs, comme une terrasse partagée.

54De même, l’équipe du « Principe de résidence » décline les types de familles : « parentalité et conjugalité » ou « famille monoparentale » par exemple, et compose l’immeuble en partant de ces situations précises. L’idée est aussi de proposer une mixité de population décidée à choisir un espace favorisant ses pratiques quotidiennes.

55Pour ces familles recomposées à regroupement stable ou aléatoire selon les semaines ou le week-end, le studio séparé est aussi la « soupape de sécurité ». Dans un exemple construit en 2011 par R. Hondelatte et M. Laporte, des immeubles sont reliés par une passerelle qui permet la liaison entre logement parental et celui pour jeune adulte avec entrées dans deux plots distincts. Et cela convient aussi pour accueillir un ascendantfig. m.

La pièce en plus

56Le plus souvent, cette pièce en plus est un bureau ou un studio pour invités, et si cette idée est banalement proposée dans les deux concours, elle aussi a fait son chemin. Certains « pensent social » et conçoivent de grands logements pour familles d’émigrés aux nombreux enfants dans des immeubles habités par des classes populaires et moyennes. L’équipe de P. Diaz et F. Lebail (Europan 1), annonçant qu’elle « refuse de verser dans le misérabilisme », propose un duplex pour « familles complexes » avec une pièce en plus. Elle offre de grandes surfaces et des pièces en plus dans le logement social, ce qui existait dans nombre de tours de grands ensembles jusque dans les années 1970, de même que des espaces partagés dans l’immeuble (dénommés alors LCR) et parfois une crèche à RDC. Ce projet conviendrait aussi très bien à des familles recomposées, de plus en plus nombreuses aujourd’hui.

57L’équipe de V. Bastié et A. Bruguière (Europan 1), qui conçoit un « Espace primordial » à niveau décalé pouvant s’associer à un espace complémentaire de 25 m2, souligne le fait que ce dernier, autonome, peut être utilisé dans de très nombreuses situations de la vie, car il permet la bonne distance, du fait que l’on reste proche tout en étant indépendant.

58C’est ce dispositif qui a le plus grand succès actuellement pour répondre aux fluctuations de la taille et des modes de vie différenciés du groupe domestique. Sans reproduire des exemples historiques à l’identique [11], et sans nostalgie, des réalisations récentes ont renouvelé le type en proposant une pièce dissociée, « à l’entrée », avant ou après la porte. Ce dispositif convient à tous ceux qui veulent donner une relative indépendance à un enfant ou accueillir un ascendant à demeure mais autonome, loger la jeune fille au pair, etc. Ces dispositifs conviennent à un groupe domestique constitué de façons diverses, comme à une famille accueillant un tiers. Ils empêchent la surveillance des allées et venues et garantissent l’intimité de tous, car on peut ainsi entrer et sortir sans être vu. L’existence de deux portes facilite les organisations spatiales et, de ce fait, les comportements et gestuels du quotidien.

59La pièce peut aussi se situer entre deux logements et être associable à l’un d’eux, au gré des déménagements. C’est le cas dans les logements de la résidence « La Sécherie » à La Bottière-Chênaie (Nantes), pensés par Boskop architectes (F. Delhay, S. Delhay et al.) et construits en 2008, où une pièce en face du logement principal est autonome ainsi qu’une pièce contiguë, à celui-ci. Cette « pièce + » bien isolée peut augmenter la surface de deux logements principaux, selon la demande. Une dizaine d’années plus tard, en 2020, Sophie Delhaye propose, dans un immeuble de logements boulevard Vincent-Auriol à Paris 14e, « une pièce + connectée au reste du logement par la loggia […] qui peut être rendue indépendante dans le temps grâce à son entrée individuelle »fig. n.

60On peut ainsi louer ou acheter une pièce supplémentaire ou la céder au moment de l’arrivée ou du départ des enfants, ce qui permet la réversibilité. Elle est donc aussi adaptée aujourd’hui au télétravail, car l’un ou l’autre des membres de la famille peut ainsi être proche mais indépendant. Cette « pièce en plus », « à la demande » ou « à usage variable » correspond aussi à la montée des loisirs créatifs chez soi — bricolages en tous genres, peinture, jeux sur écran solitaires ou en groupe — et tient compte de l’augmentation de la présence chez soi qui s’est notamment allongée avec la loi sur les 35 heures par semaine.

61Dernière utilisation, mais pas des moindres, en ces temps d’allongement de la vie ou en cas d’accident ou de handicap, elle peut être occupée par une personne aidante. Dans ce cas, elle devient un véritable studio annexe de l’appartement principal.

Plan d’une « studette » connectée à un logement, agence Sophie Delhay, boulevard Vincent-Auriol, Paris 14e, « Évolutivités », 2020.

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Plan d’une « studette » connectée à un logement, agence Sophie Delhay, boulevard Vincent-Auriol, Paris 14e, « Évolutivités », 2020.

Plan de la « chambre de nuit » et de la « chambre de jour » de l’équipe SAXO, « L’espace-temps », Pan 14.

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Plan de la « chambre de nuit » et de la « chambre de jour » de l’équipe SAXO, « L’espace-temps », Pan 14.

62R. Hondelatte et M. Laporte proposent aussi, en 2011, la solution de l’appartement principal avec pièce associée à l’étage supérieur, à entrée séparée ; en fait, un duplex. Cette solution a failli disparaître avec la réglementation pour les PMR, car une deuxième porte à l’étage augmente les coûts, ce qui faisait particulièrement reculer les responsables du logement social.

63Par ailleurs, un studio à la demande (avec SDB) disponible dans l’immeuble, partagé par les copropriétaires, pour recevoir, à l’occasion, la famille ou les amis, commence à se diffuser, nous l’avons vu. Cette potentialité implique qu’un gestionnaire attentif soit présent et s’occupe du bon fonctionnement de ce partage. On observe, comme nous l’évoquions plus haut, de plus en plus un traitement du socle commun de l’immeuble partagé par tous les occupants : un local rangement/bricolage et une salle commune, parfois un studio disponible à tous, à la demande. L’un de ces « nouveaux concierges », qui facilitent la vie quotidienne des habitants d’un immeuble ou d’un quartier, serait ici tout indiqué. Cette pièce en plus se révèle aussi repensée spatialement, notamment du point de vue de sa position dans l’appartement ou dans l’immeuble, pour convenir à toutes les formes de cohabitation.

Cohabitation et vie communautaire

64L’autre thème fortement développé en 1989, et qui va voir des infinités de dispositifs se mettre en place, est celui de la vie communautaire, qu’elle soit cohabitation à deux ou en plus grands groupes, permettant la mixité d’âge, de sexe, de statut voire de classe sociale ou d’ethnie, mais souvent avec tout ce que cela suppose de retrouver un entre-soi rassurant. Ainsi, ces jeunes gens parient sur la cohabitation qui ne se développera vraiment que ces dix dernières années et mêlent choix financiers et lutte contre la solitude des grandes villes [12]. Des candidats font de la cohabitation, souvent entre pairs, le thème central de leur réponse.

65C’est le cas de l’équipe « Un + Un ou comment réussir sa cohabitation » (C. Lauvergeat et T. Nabères, Pan 14), qui imagine deux studios avec chacun sa porte. Les entrées et les chambres séparées sont reliées à la pièce commune et les pièces humides regroupées sont communes à deux cohabitantes.

66Dans la proposition de l’équipe SAXO, « L’espace-temps » (Pan 14) la préoccupation de sauvegarder l’intimité des cohabitants les conduit à proposer une « chambre de nuit » et une « chambre de jour » ; plus ouverte sur les espaces partagés par des cloisons mobiles. Notons que la salle de bains-détente a les dimensions d’une chambrefig. o.

67Certains de ces dispositifs soutiennent des groupes domestiques qui ne sont pas des couples mais plutôt des nouvelles familles choisies, entre pairs ou intergénérationnels ou encore familles recomposées ou monoparentales. En somme, un groupe qui a choisi d’être « Ensemble mais séparément », selon l’expression de l’équipe HARO au Pan 14.

68Faut-il souligner la contemporanéité de ces dispositifs actuellement ? L’équipe Télémaque annonce dans sa « Stratégie de cohabitation », qu’elle veut loger « une population technopolitaine… qui symbolise l’imprévisibilité de plus en plus grande des cycles de vie, des carrières professionnelles et des itinéraires résidentiels ». Elle imagine des « logements à occupation indéterminée », évolutifs, en tenant compte de la désynchronisation des activités quotidiennes des différents membres du groupe domestique et, par ailleurs, des « logements à occupation déterminée », unipersonnels et très structurés. Associés à ces logements ils conçoivent comme sur le dessin plus haut (« Stratégie de cohabitation », Télémaque, Europan 1), des « plots de communautés professionnelles » ou étudiantes qui parfois travaillent et habitent à la même adresse.

69Des appartements communautaires, intergénérationnels et familiaux sont donc construits aujourd’hui dans la droite ligne de ceux imaginés dans les deux concours. Ainsi, à Genève, dans un immeuble nommé « Social Loft », les architectes Yves Dreier et Eik Frenzel ont proposé en 2010, à une coopérative d’habitants, Coop Genève, des logements communautaires atypiques après dialogue avec les habitants [13]. Grâce à un système constructif composé de poteaux et de dalles, ils ont pu proposer « des spatialités plus généreuses et évolutives, pouvant s’apparenter à des lofts [14] », en fait, une architecture de plateaux superposés avec partie publique réservée à tous et parties composées de logements privés.

70La mixité de population est organisée volontairement dans cet immeuble de 115 logements (de 8 à 26 pièces par plateau) et va de personnes âgées vivant seules à des familles recomposées, en passant par des colocataires vivant de façon intergénérationnelle. Les appartements communautaires sont situés aux premier et second étages sur un plateau, et chaque logement privé nommé cluster, formant enclave, comprend une ou deux chambres, une salle d’eau, une petite cuisine et, parfois, un petit salon. Les espaces communs ouverts à tous et adaptés au nombre de cohabitants, qui comprennent un séjour, une cuisine mais aussi deux pièces polyvalentes, un bureau et une pièce pour invités, permettent que ceux-ci s’ouvrent à la vie en communauté s’ils le souhaitent. Une salle de bains collective y est aussi installéefig. p.

71Les habitants peuvent déménager au sein de l’immeuble au cours de l’évolution de leur vie. Julien Grisel et Nicolas Bassand, auteurs d’un article sur cette expérience, évoquent « l’envie de reformer des groupements d’individus partageant des valeurs communes », idéal déjà proclamé dans les années 1960-1970 qui avait abouti à des expériences semblables. Ils se demandent aussi si ces clusters ne pourraient pas « remplacer les homes pour personnes âgées », nommés Ehpad en France, et s’ils « deviendront une norme dans le monde du logement qui peine à offrir des appartements pour les familles recomposées [15] ». Ces expériences ouvrent des voies nouvelles pour améliorer le logement courant.

Plan d’un plateau avec logements de cohabitants, Yves Dreier et Eik Frenzel , « Social Loft », Genève, 2015.

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Plan d’un plateau avec logements de cohabitants, Yves Dreier et Eik Frenzel , « Social Loft », Genève, 2015.

Le temps chez soi et le rapport au travail

72Aujourd’hui, comme de nombreux candidats l’avaient perçu, les temps du quotidien ont changé et c’est chez soi que se font plus souvent les loisirs et, de plus en plus, le travail. Des actions que nous effectuions à l’extérieur se font maintenant à l’intérieur : on parle d’internalisation, notamment des loisirs (multiplication des écrans, télévision ou home cinéma). Les chiffres des personnes déclarant travailler chez elles sont bas par rapport au reste de l’Europe, mais on peut penser qu’ils vont augmenter, car la crise de la Covid-19 a prouvé à certains qu’il était possible de le faire chez soi par choix ou nécessité, même si cela impliquait une restructuration de l’espace, du temps quotidien et des interactions au sein du groupe domestique. Le développement du télétravail et l’évolution mentale du rapport au travail des nouvelles générations ont été prévus par nombre de candidats dans les deux concours. Il leur semble, en général, préférable de créer une certaine distance entre l’appartement principal et le lieu de travail, et de prévoir des portes distinctes. Sage solution si l’on en croit les enquêtes durant le confinement de 2020 où travailler chez soi en orchestrant tous les niveaux du quotidien a été difficile.

73Par ailleurs, la réglementation sur les 35 heures de travail par semaine a contribué à renforcer cette augmentation de la présence chez soi et a permis de porter une attention nouvelle au décor et à l’ambiance du foyer, tout comme d’ailleurs ces moments de confinement qui ont conduit hommes et femmes à percevoir tous les défauts d’organisation de leur chez-soi et le manque de confort de certains dispositifs si le travail s’y ajoutait. L’idée d’un sas, d’une zone de passage qui permet de quitter le chez-soi par un palier, une cour ou même par une passerelle, est alors proposée.

74La porosité entre vie privée et vie publique est donc à considérer, ainsi que la restructuration entre le travail, sa qualité, ses temporalités et la vie privée, ce qu’on appelle le mode de vie, qui remodèle aussi notre rapport au temps. L’équipe d’Alter Ego (Jean Musseau et Thierry Peltrault) choisit, à l’Europan 1, d’installer des bureaux avec équipements partagés dans une sorte de tour, à l’angle du bâtiment de logement, qu’elle dénomme « silo de travail », ce qui implique de sortir de chez soi, et instaure une différence spatiale appréciée, en généralfig. q.

75Le lieu de travail peut aussi se trouver dans l’immeuble, parfois de l’autre côté du palier. C’est ce que propose l’équipe de « Double mixte » (J.-P. Calori, Europan 1). Mais d’autres recherchent d’emblée un esprit communautaire pour retrouver la capacité de se socialiser au travail tout en maintenant la possibilité de s’isoler, comme Télémaque [16] le souligne au Pan 14fig. r. Les pièces de travail se situent à côté des logements qui se réduisent alors à des cellules, des « modules habitat ». La population visée est comme celle de certains Fab labs d’aujourd’hui, de jeunes travailleurs du tertiaire, célibataires, parfois tentant la création d’entreprise et ne vivant souvent que pour leur travail dans ce moment de leur vie.

Dessin de la façade de l’immeuble à « modules associés et silo de travail » à l’angle. Équipe de J. Musseau et T. Peltrault, Europan 1.

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Dessin de la façade de l’immeuble à « modules associés et silo de travail » à l’angle. Équipe de J. Musseau et T. Peltrault, Europan 1.

Plans « Une structure de base, une structure triple », équipe « Alter Ego » de J. Musseau et T. Peltrault, Paris 15e, Europan 1.

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Plans « Une structure de base, une structure triple », équipe « Alter Ego » de J. Musseau et T. Peltrault, Paris 15e, Europan 1.

76Par ailleurs, on observe aujourd’hui une désynchronie des activités et des comportements à l’intérieur du groupe domestique. Ses rythmes, qu’ils concernent ce dernier ou des membres d’une famille, sont particuliers à chacun, qui « vit sa vie ». L’idéal d’épanouissement personnel est, en général, accepté, même si les moments de partage et de rencontre restent valorisés. Donc, l’usage de la maison, les rites des repas, par exemple, ont changé ou sont en train de changer, selon les groupes sociaux. Or, l’espace proposé n’est pas organisé pour cela, car les modalités de vie chez soi se sont multipliées selon l’âge des membres du groupe. L’équipe HARO propose donc des mobiles de cuisine ou de repas, déplaçables et une table roulante qui permet de dîner tous ensemble si l’on le souhaite, ou sur la table basse du séjour ou dans la chambre, si on est arrivé trop tard pour le dîner. De même, si l’on ne veut pas interrompre son travail, ou encore qu’on préfère être seul pour regarder sa série. On reconnaît bien là des comportements contemporains, mais les mobiles de cuisine ne se sont pas diffusés, alors même qu’ils étaient proposés dès les années 1950.

Base commune modulaire, cloisons déplaçables et choix distributifs

77Les meubles cloisonnants et mobiles proposés aux deux concours rendent possible le jeu selon le temps et conviennent particulièrement aux diverses formes de familles ou de groupes domestiques d’aujourd’hui, car ces parois coulissantes reconfigurent l’organisation du logement suivant les phases de la vie et les recompositions.

78Pour l’aménagement intérieur, on retrouve, dans ces expérimentations, les références au wagon de train et à la cabine de bateau, aux recherches sur le minimum vital des années 1920 et 1930 qui consistait à penser la forme en même temps que le mode constructif et les usages en proposant un mobilier « de construction ». Il s’agit, en somme, de revisiter l’idée de « meubles meublants », faisant corps avec le bâti et dégageant l’espace qui, de ce fait, peut être petit. Cette question des cloisons équipées qui libèrent l’espace a souvent été traitée dans ces concours — notamment par l’équipe de M.-E. Nicoleau et R. Scoffier à l’Europan 1 — et elle rebondit actuellement. Ces derniers soulignent que ces meubles meublants, pour eux des cloisons à étagères sur roulettes, qu’ils dénomment « meubles cloisonnants », attribuent, de fait, leur fonction aux espaces. Par ailleurs, la question des rangements se trouve bien réglée par ces cloisons-étagères déplaçables ou pas, surtout pour les petits logements rarement bien équipés.

79L’équipe « La maison comme réponse », au Pan14, souligne l’adaptation de ces cloisons équipées au temps de la journée et le fait que les transformations ne sont jamais irréversibles. Elles sont, de plus, « utilisées comme éléments de graduation de l’intimité » entre différentes pièces.

80La cloison épaisse qui fait mur en stratifié ou en bois a été aussi plusieurs fois proposée dans ces concours. C’est un module autonome contenant tous les équipements domestiques. Certains comme SAXO ou l’équipe « Le singulier pluriel » y voient une économie, car ces éléments sont préfabriqués en usine.

81Solution très appréciée dans le cas de logements petits ou minimums, les « murs épais » équipés refont donc leur apparition pour libérer l’espace puisque les équipements sont installés le long des cloisons ou des murs. Quant à l’équipe HOSI (proposition d’un « Habitat ouvert à services intégrés » de J.-F. Delsalle et J.-B. Lacoudre) au Pan 14, elle propose que les éléments comme la cuisine et la salle de bains soient intégrés le long des parois dans un ensemble de rangements « humides » qui fait face à des rangements « secs » ; en somme, des placards en tous genres. Jean Nouvel a proposé ces solutions dans l’immeuble « Nemausus » à Nîmes en 1987.

82On peut proposer ainsi un logement « prêt à habiter » où l’on n’a plus qu’un lit à acheter. C’est une solution à envisager pour loger les classes populaires les plus pauvres et pour lesquelles le logement social est encore d’un coût trop élevé, ou pour les travailleurs itinérants ou les cadres « nomades ». Jean Prouvé avait innové sur ce dispositif dans ses maisons des années 1950-1960.

83Cette forme de plan libre dégage des surfaces habitées des contraintes en condensant les services et rangements. HOSI souligne que l’on peut manipuler le fixe et le mobile, grâce à cette différence entre structure et cloisonnement : cette « construction et services » forment le cadre stable « im-meuble » du logement, tandis que les cloisons glissent dans le domaine du meuble, du temporaire et du mouvant. On trouve là des « murs techniques à durée déterminée » et, de l’autre côté, « des partitions légères à durée déterminée ».

84Ces solutions ont été reprises par de jeunes équipes européennes, ces dernières années, comme les Madrilènes de l’Agence PKMN qui, en 2014, proposent une « All I Own House », c’est-à-dire un appartement modulable composé de murs-placards épais, montés sur rail. Les appareils sanitaires, les équipements de cuisine et la plomberie sont les seuls éléments statiques. Les structures en bois sur-mesure constituent les murs mouvants qui forment des pièces différentes selon le moment de la journée.

La flexibilité en tous genres

85Le renouveau de la réflexion sur la flexibilité, fondée, comme la plupart des thèmes abordés, sur une critique des expériences antérieures, est une réponse à l’incertitude que les candidats éprouvent face aux transformations ou à l’instabilité des modes de vie, mais aussi à leur difficulté à cerner les pratiques et façons de vivre des différentes classes et groupes sociaux. Ainsi, ceux qui proposent des modules les dessinent-ils identiques, associables, d’autres réunissent des pièces contiguës à louer ou à céder pour s’adapter à la taille de la famille, aux phases de la vie et aux diverses circonstances, par exemple, l’arrivée et le départ des enfants.

86En matière d’offre de logement, deux voies sont explorées, soit proposer des logements de tailles différentes, que les habitants quittent, s’ils le peuvent, dès que la taille de la famille augmente, soit concevoir des logements évolutifs, flexibles en utilisant divers dispositifs.

87J. Musseau et T. Peltrault (« Alter Ego ») choisissent, à l’Europan 1, la notion de modules identiques et assemblables pour un projet dans le 15e arrondissement de Parisfig. s.

88Des bâtiments devenus icônes de l’architecture du xxe siècle avaient expérimenté ces solutions (par exemple, le Narkomfin de Moscou de Ginzbourg et Milinis en 1928-1930). On peut remarquer que l’idée des modules associables ne s’est pas diffusée. Lourdeur de gestion pour les maîtres d’ouvrage qui craignent des difficultés de commercialisation ? Pourtant, la banalisation du télétravail trouverait là une solution spatiale, puisqu’il est possible alors d’ajouter ou de soustraire, si l’on n’en a plus l’usage, un module au logement de base.

89Penser en amont la possibilité d’associer deux petits logements pour en créer un plus grand est aujourd’hui, en cette période où l’on réhabilite de plus en plus les logements, une bonne solution pour les grandes familles, recomposées ou pas. L’équipe SAXO (Pan 14) qui décline les situations et dessine des logements qui vont du studio aux espaces adaptés aux personnes âgées, prévoit aussi que deux petits logements soient transformables en un grand en installant des portes entre deux comme dans les appartements haussmanniens au xixe siècle.

90Certaines équipes prévoient des cloisonnements légers ou évolutifs, des systèmes constructifs porteurs (murs périphériques, par exemple) permettant de dégager des grandes surfaces et de varier l’usage des pièces polyvalentes, selon les besoins ou les saisons.

91Par ailleurs, dans ces deux concours, certains portent une attention très grande aux célibataires, notamment à la situation des travailleurs nomades, à ceux qui suivent des chantiers à durée limitée et parcourent parfois l’Europe. Cette réflexion sera aussi celle de l’équipe de Dominique Perrault pour l’Atelier du Grand Paris à partir de 2009 qui propose « un dispositif », « L’Hôtel Métropole », adapté à ces nouveaux modes d’habiter et de travailler.

92Cette réflexion sur les jeunes, célibataires ou non, conduira quelques candidats à concevoir des « espaces autres », comme des logements-wagons, sur rail, qui mêlent habitat et mobilité pour des Européens à la recherche d’emploi, où qu’ils se trouvent. Cette veine est celle qui a été la moins suivie d’effets actuellement, peut-être trop marquée par une histoire sinistre [17].

Hédonisme et rapport au corps

93Des thèmes que l’on pensait acquis, comme une grande attention au confort corporel dans la maison, et notamment dans la salle de bains, ne se sont pas vraiment développés dans le logement collectif, si ce n’est l’augmentation de la surface de celle-ci, grâce à la réglementation pour les PMR. Mais elle reste toujours le plus souvent dans le collectif une pièce noire, non éclairée ni aérée naturellement. Parallèlement s’est développée la mal nommée « douche à l’italienne » (qui existe depuis longtemps aux États-Unis et dans nombre de pays en voie de développement) sous prétexte que c’est la seule solution pour les personnes âgées.

94Elle constitue, de fait, un recul par rapport au « bain détente » et au « bain de vapeur » bien plus efficients à la fois du point de vue du repos après la tension du travail et de la propreté, puisque seule la vapeur est efficace pour ouvrir les pores de la peau. Par ailleurs, l’hédonisme dans le rapport à l’eau n’est pas pris en compte dans la douche rapide centrée sur la propreté. Des solutions combinées sont à l’étude actuellement et pourraient bientôt être commercialisées.

95Et c’est plutôt la salle de bains que les candidats proposent de transformer pour mieux vivre en accord avec l’idéologie du corps sain ou pour donner une meilleure place à la sensualité dans la vie quotidienne.

96Une expérience rare aujourd’hui dans l’habitat collectif social, qui augmente singulièrement le confort du logement, est à signaler : la salle de bains de la taille d’une pièce avec vue sur Paris et rideaux thermiques, des logements de l’immeuble d’Anne Lacaton et Jean-Philippe Vassal, rue de l’Ourcq, à Paris 19e, en 2016.

97Certaines pièces sont plus touchées que d’autres par une volonté de transformation liée à l’analyse que font les concurrents de l’évolution des mentalités : la nécessité de la « retraite » individuelle, le désir d’une sociabilité maîtrisée, les conduisent à revoir la conception de la chambre et de la salle de bains ainsi que leurs relations, mais aussi celle de la pièce de séjour. L’équipe de G. Harmignies et P. Courcier propose ainsi, au Pan 14, un « séjour de chambre » qui reconstitue l’appartement : la chambre a ses annexes, la salle de bains et la terrasse. Et l’équipe autour de Florence Lipsky dénomme, aussi au Pan 14, ce « séjour de chambre » une « insula ».

98Ce changement concerne plus précisément une évolution interne à la personne et à son rapport avec les autres. La montée de l’individualisme, nouvelle appellation d’un mouvement de fond commencé au xviie siècle dans notre société, et qui se marque dans l’habitation, la recherche de l’autonomie et de l’épanouissement personnel, ainsi qu’un autre type de rapport à son corps source de plaisir (narcissisme et autoérotisme sont alors présents), toutes ces variables influent sur les projets. L. Mayeur et D. Renaud, dans leur proposition au Pan 14, « Le type de la terrasse », tracent sur leur plan un axe de l’intimité qui inclue une chambre, une salle de bains, un « dressing » et une terrasse.

99Certains proposent, comme les revues de décoration, d’installer la salle de bains dans la chambre, mais il n’est pas évident que ce soit très sain, car celle-ci est trop humide et difficile à entretenir quotidiennement selon des interviewés.

100Chacun de ces dossiers est un discours sur l’art de vivre, sur la stylisation de l’existence. Beaucoup se rejoignent dans l’idée de maîtriser ses rapports avec les autres et de se protéger pour être soi-même, ce qui permet d’être mieux avec eux. Pour ce faire, ils rajoutent des gradations entre espaces publics et espaces privés et ils travaillent à proposer des espaces intermédiaires semi-publics ou semi-privés, « de l’intime au commun », comme le souligne l’équipe de B. J. Hubert et M. Roy au Pan 14, en pariant sur le désir de nouvelles formes de sociabilité, de nouveaux rapports de voisinage.

101Cette continuité entre idées et matérialisation dans des dispositifs spatiaux parfois innovants est longtemps restée occultée, les idées des architectes ne semblant pas rencontrer les aspirations des habitants ou encore les expérimentations, même bien accueillies, n’étant pas reproduites. On remarque aussi l’incapacité des habitants interviewés à imaginer une offre autre que celle qu’ils connaissent déjà, et c’est le cas surtout dans les zones tendues où ils sont obligés d’accepter l’offre proposée.

102Malgré tout, cette persistance des idées m’a semblé se matérialiser quand, à l’occasion du concours « Réinventer Paris » en 2016, un lauréat du Pan 14, Jean-Baptiste Lacoudre (HOSI), a proposé un projet-prototype sur le site Buzenval, prônant la mixité sociale qui montrait l’acharnement à poursuivre des buts toujours aussi généreux. L’immeuble proposé, destiné à des primo-accédants et à des personnes handicapées [18], est à la fois lieu de production d’agriculture urbaine et lieu d’habitation, coconçu avec et géré par les habitants. De nombreux thèmes abordés dans les deux concours se retrouvent ici. La solution toute simple des logements à pièces autonomes non mitoyennes permet une cohabitation éventuelle et le télétravail au calme.

103Peut-on en inférer que ces jeunes architectes de la fin des années 1980 ont perçu avec une très grande acuité les phénomènes sociaux et les changements de valeurs qui se préparaient en Europe ? Des bouleversements des structures familiales (dus à l’augmentation des divorces, à l’allongement de l’espérance de vie, notamment) aux changements dans les pratiques corporelles, en passant par la montée de la cohabitation, du travail chez soi ou de la mutualisation de certains espaces ou équipements, il est frappant d’observer qu’il y a plus de trente ans, ils prévoyaient ces changements et proposaient des solutions spatiales pour les soutenir. Celles-ci sont aujourd’hui encore, presque trois décennies plus tard, perçues comme des nouveautés par toute la chaîne de production du logement, qui peine encore à les mettre en place en France. J’avais l’intuition de cette situation, mais en me replongeant dans les documents des concours, j’ai été vraiment surprise du côté précurseur de ces idées que nous sommes un certain nombre d’équipes, avec des maîtres d’ouvrage et des promoteurs d’« art et d’essai », en train de mettre en place dans des opérations (ex. Lyon Confluence 2, Paris 13e, etc.) et que les architectes publiés dans l’exposition du Pavillon de l’Arsenal « Réinventer Paris » poursuivent ou reprennent.

104Certes, certains de ces thèmes ont été des idées que les architectes d’aujourd’hui ont développées, adaptées, et parfois transformées grâce à certaines des avancées relatives à des innovations ou à des exigences techniques, ou encore à l’utilisation de matériaux nouveaux ou oubliés, ainsi qu’à une autre conception du confort que les règlements incarnent. Les professionnels se sont aussi trouvés dans des conditions particulières en ce qui concerne la taille encore réduite, ces dernières années, des logements.

105Espérons que la demande sociale, ou plutôt sa perception par les acteurs du logement, aura évolué et qu’ils prendront le risque d’innover pour permettre, notamment aux urbains, de mieux vivre en accord avec leurs aspirations et leurs pratiques réelles, et qu’ils accepteront de construire au diapason de notre époque de changements parfois bouleversants que les jeunes gens de 1989 avaient si bien prévus.

Bibliographie

  • Bibliographie

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    • Eleb Monique avec Châtelet Anne-Marie, Garcias Jean-Claude, Mandoul Thierry et Prélorenzo Claude, L’Habitation en projets. De la France à l’Europe. Europan 1989, Liège/Paris, Mardaga, 1990.
    • Eleb Monique avec Lionel Engrand, La Maison des Français. Discours, imaginaires, modèles (1918-1970), Bruxelles, Mardaga, 2020.
    • Eleb Monique « Le suivi d’expérimentations, un levier d’évolution des pratiques et de la recherche », Premier Plan (Puca), dossier « L’innovation architecturale à travers la recherche et l’expérimentation, Treize regards sur l’architecture en hommage à Danièle Valabrègue », n° 35, octobre 2016-janvier 2017.
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Date de mise en ligne : 01/12/2021.

https://doi.org/10.3917/acs.bendi.2021.01.0123

Notes

  • [1]
    Voir notre ouvrage avec Lionel Engrand, La Maison des Français. Discours, imaginaires, modèles (1918-1970), Bruxelles, Mardaga, 2020.
  • [2]
    Après avoir été membre du jury du Pan 14 au ministère de l’Équipement et du Logement, je l’ai analysé (avec Anne-Marie Châtelet et Thierry Mandoul) dans l’ouvrage Penser l’habité. Le logement en questions (PAN 14, 1987), [1988, 1990], Liège/Paris, Mardaga, 1995. Membre du Comité français de l’Europan en 1988, j’ai analysé (avec Anne-Marie Châtelet, Jean-Claude Garcias, Thierry Mandoul et Claude Prélorenzo) le premier concours, dans l’ouvrage L’Habitation en projets. De la France à l’Europe. Europan 1989, Liège/Paris, Mardaga, 1990. En 1995, j’étais membre du Comité français de l’Europan du ministère de L’Équipement et du Logement.
  • [3]
    Entretien avec Danièle Valabrègue, chef de projet du programme conception et usage de l’habitat au Plan Urbanisme, Construction et Architecture (Puca), responsable de la session française de l’Europan : « Du PAN à l’EUROPAN », EUROPAN France, journal édité à l’occasion de l’exposition sur les projets de l’Europan France à la Maison de l’architecture du 30 mai au 24 juin 1989, supplément de Plan Construction Actualités n° 34, p. 1-2.
  • [4]
    Ibid., p. 2. Voir aussi Monique Eleb « Le suivi d’expérimentations, un levier d’évolution des pratiques et de la recherche », Premier Plan (Puca), dossier « L’innovation architecturale à travers la recherche et l’expérimentation. Treize regards sur l’architecture en hommage à Danièle Valabrègue », n°35, octobre 2016-janvier 2017.
  • [5]
    Voir Jean-Louis Cohen, La Coupure entre architectes et intellectuels, ou les enseignements de l’italophilie, [In Extenso, 1984], Bruxelles, Mardaga, 2015.
  • [6]
    Entretien avec Danièle Valabrègue, op. cit., note 3, p. 2.
  • [7]
    « Habitat groupé », Natura Maison, n°3, mars-avril 2014.
  • [8]
    Margot Guislain, « Comme des maisons superposées : 75 logements sociaux à Paris, par Jean et Aline Harari », site internet d’AMC, article mis en ligne le 9 avril 2019.
  • [9]
    « TOA architectes associés », Archistorm, hors-série n°34, octobre 2018.
  • [10]
    Nous remercions Didier Bellan, maître d’ouvrage de la SNI Sud-Ouest de Bordeaux, qui nous a fourni des documents au cours de la construction du bâtiment.
  • [11]
    Voir nos analyses et les exemples construits dans L’Invention de l’habitation moderne, Paris, 1880-1914. Architectures de la vie privée, suite (avec Anne Debarre), [1995], Paris/Bruxelles, Hazan/Archives d’architecture moderne, 2000.
  • [12]
    Voir notre ouvrage avec Sabri Bendimérad, Ensemble et séparément. Des lieux pour cohabiter, Bruxelles, Mardaga, 2018.
  • [13]
    Coopérative de l’habitat associatif de Suisse romande, voir Julien Grisel et Nicolas Bassand, « Typologie, participation et réversibilité », Tracés, n° 11, 27 mai 2016, p.12-16.
  • [14]
    Ibid., p. 12.
  • [15]
    Ibid., p. 16.
  • [16]
    Voir plus haut « Les maisons communautaires professionnelles » de Télémaque, à l’Europan 1.
  • [17]
    Voir l’analyse percutante de Jean-Claude Garcias, in L’Habitation en projets. De la France à l’Europe. Europan 1989, Bruxelles, Pierre Mardaga éditeur, 1990, p. 105-106.
  • [18]
    25 % de logements locatifs intermédiaires, 25 % de logements pour primo-accédants et 25 % de logements en accession à prix maîtrisé.
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