Au sens de la géographie culturelle traditionnelle, la culture se comprend principalement dans sa dimension anthropologique où codes, normes, valeurs, etc., s’incarnent dans des artéfacts, des architectures ou plus généralement dans des modes de vie. La théorie dominante répond à une lecture du Monde divisé en cultures distinctes. Ce découpage grossier en aires culturelles et les critiques qui l’accompagnent ont eu raison de cette science fondatrice aujourd’hui marginalisée. De son héritage est née une « nouvelle » géographie culturelle nourrie par la multiplication des méthodes et théories après le changement de paradigme et une série de tournants qui, de droite à gauche, ont bouleversé la cartographie disciplinaire. Son succès est réel, mais, bien qu’instituée en tant que sous-champs et affichant une certaine stabilité, elle est loin de faire l’unanimité et accuse une perte de puissance progressive.
Ces géographies culturelles sont aujourd’hui débordées par une pléiade de travaux qui, sans se revendiquer nécessairement d’elles, explorent pourtant des objets qui semblaient leur être attribués. Sans prétendre à une vision réduite construisant un pré carré, ou quelconque carcan disciplinaire imposé par une science, ces travaux « oublient » de plus en plus de s’inscrire dans un sous-champ. Ils se revendiquent plutôt d’une « approche culturelle » en géographie (Claval 2015), s’inscrivent dans une géographie sociale, critique, socioculturelle ou, mieux, ne défendent aucune « champtrification » – si l’on peut se permettre ce néologisme…