Aujourd’hui un professionnel est souvent hanté par l’objectivité qu’il se devrait d’atteindre. Cet impératif colore et son action et sa pensée. L’objectivité lui serait garantie par les approches théoriques, par ce qui relève de la science, par ce qu’affirment les scientifiques. Il lui faudrait donc penser selon la science, agir d’après ses hypothèses et ses certitudes, s’y conformer dans ses paroles et ses actes. Certains se sentent en faute de ne pas y souscrire, et souffrent même parfois de ne pas y arriver. D’autres se révoltent. D’autres se désespèrent. Quelques-uns sont, eux, assurés d’atteindre une telle objectivité garante de la justesse de leur action, et évidemment de leur pensée.
Cette exigence d’objectivité par une caution scientifique se donne à entendre chez presque tous les étudiants, professionnels jeunes ou aguerris, même chez ceux qui ont choisi d’approcher leur objet d’étude par une démarche clinique. La butée dessine une opposition qui devrait se résoudre par l’exclusion d’un des deux termes : objectivité/subjectivité. Nous pourrions invoquer ici l’influence et la responsabilité d’une certaine idéologie scientifique sur leur pensée, mais cela ne suffit pas. Il nous faut également évoquer une interprétation très normative de la science, avec une peine éprouvée de trouver une légitimité hors de ce qu’ils conçoivent comme étant précisément la doxa scientifique applicable dans la recherche comme dans l’action.
Le fait est là, répétitif, insistant, et presque inéluctable…