En ce début de XXIe siècle, la nécessité d’une « transition énergétique » est largement partagée dans les discours politiques sur l’environnement. Celle-ci devrait mener d’une économie fondée sur les énergies fossiles à une autre fondée sur les énergies dites « renouvelables » et « décarbonées » dans un futur plus ou moins proche. La notion de « transition énergétique » a été critiquée parce que son contenu est ambigu et faussement alternatif. Elle est relayée par des discours qui gomment les dimensions politiques, sociales, environnementales et symboliques de l’énergie et offrent la perspective linéaire et illusoire d’un changement sans rupture. L’une des confusions du débat tient au fait que ces discours considèrent l’exploitation d’énergies renouvelables comme une alternative en soi. Cette idée est démentie aujourd’hui par les mouvements d’opposition aux grands parcs éoliens, qui refusent l’échelle industrielle des gigantesques « fermes éoliennes » et promeuvent des installations éoliennes de taille réduite. En d’autres termes, deux convertisseurs d’une même source d’énergie peuvent servir des projets politiques fort différents car inscrits dans des contextes sociopolitiques singuliers.
L’histoire des énergies renouvelables en France doit être menée selon cette perspective. La période 1940-1970 voit ainsi la mise en place de plusieurs phénomènes sociopolitiques d’ampleur : une recherche effrénée de nouvelles sources d’énergie ; une planification économique à l’échelle nationale, selon des objectifs productivistes et modernisateurs ; des mouvements de décolonisation accompagnés et suivis par des stratégies de maintien d’une division internationale du travail sous couvert de « développement » ; une compétition technico-économique féroce entre pays du Nord dans le contexte de la guerre mondiale puis de la guerre froide…