Couverture de RFDC_065

Article de revue

L'identité de la personne devant le Conseil constitutionnel

Pages 73 à 95

Notes

  • [1]
    Louis Favoreu, et al., Droit des libertés fondamentales, Dalloz, 2005,3e éd., 576 p.; voir par exemple l’atelier n°2 du Congrès de l’Association française de Droit constitutionnel dirigé par les professeurs Laurence Burgorgue-Larsen et Joseph Pini dont est issue cette livraison. Pour une approche générale Xavier Bioy et Stéphane Mouton, « Les (r)évolutions du droit constitutionnel, propos introductifs », in Regards critiques sur quelques (r)évolutions récentes du droit, J. Krynen et M. Theron (dir.), tome 2, coll. Les travaux de l’Institut fédératif de recherche, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 2005, p. 543.
  • [2]
    Mme Champeil-Desplats estime ainsi que cette probabilité est inversement proportionnelle au recours aux articles 2 et 4 DDHC pour fonder des droits constitutionnels de la personnalité, « Le code civil, source de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ? », in Code civil et constitution(s), sous la direction de M. Verpeaux, Economica-PUAM, coll. Droit public positif, 2005,126 p., p. 15.
  • [3]
    Éric Millard, Famille et droit public, LGDJ, 1995, Bibliothèque de droit public, tome 182, 502 p. et « La problématique des intérêts familiaux en droit public », Annales de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 1996, p. 105; Hubert Alcaraz, « La notion de famille dans les jurisprudences constitutionnelles allemande, espagnole et française », Annuaire international de justice constitutionnelle, XV-1999, Paris, Economica- PUAM, 2000, p. 19-33.
  • [4]
    In « L’utilisation de principes législatifs du Code civil comme norme de référence dans le cadre du contrôle de constitutionnalité », in Code civil et constitution(s), op. cit., p. 29.
  • [5]
    Catherine Halpern et alii, Identité(s), l’individu, le groupe, la société, Éditions Sciences humaines, 2004,391 p.
  • [6]
    « Identification sociale, personnalisation et processus identitaires », in L’identité de la personne humaine, Étude de droit français et de droit comparé, sous la direction de Jacqueline Pousson-Petit, Bruylant, 2002,1001 p., p. 93.
  • [7]
    Le sentiment d’identité, préc., p. 9.
  • [8]
    Voir not. Daniel Gutmann, Le sentiment d’identité. Étude de droit des personnes et de la famille, thèse droit privé, LGDJ, Bibliothèque de droit privé, tome 327,2000,520 p.; Myriam Hunter-Henin, Pour une redéfinition du statut personnel, PUAM, 2004,601 p.; Valérie Sagne, L’identité de la personne humaine, thèse droit, Toulouse, 2003,452 p.
  • [9]
    André Roux, La protection de la vie privée dans les rapports entre l’État et les particuliers, Économica, coll. Droit public positif, 1983,279 p.
  • [10]
    Voir la thèse de Hubert Alcaraz, Le droit à l’intimité devant les juges constitutionnels français et espagnol, Université Paul Cézanne Aix-Marseille III.
  • [11]
    Ferdinand Mélin-Soucramanien, L’égalité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1997; Yaël Attal-Galy, Droits de l’homme et catégories d’individus, LGDJ, Bibliothèque de droit public, tome 237,2004,638 p.; Olivia Bui-Xuan, Le droit public français entre universalisme et différencialisme, Économica, Corpus Essais, 2004,535 p.
  • [12]
    Louis Favoreu, « La constitutionnalisation du droit », in L’unité du droit. Mélanges Roland Drago, Économica, 1996, p. 25; Christian Atias, « La civilisation du droit constitutionnel », et Jean-Yves Cherot, « Les rapports du droit civil et du droit constitutionnel, réponse à Ch. Atias », cette Revue, 1990, p. 435 et s.; Marc Frangi, Constitution et droit privé, les droits individuels et les droits économiques, Economica- PUAM, 1992; Stéphane Mouton, La constitutionnalisation du droit ; rationalisation du pouvoir et production normative, thèse droit, Toulouse, 1998.
  • [13]
    Philippe Blacher, « Droit constitutionnel et identité féminine », RA, n° 289, p. 38.
  • [14]
    Olivia Bui-Xuan, Le droit public français…, préc.
  • [15]
    CA, Paris, 24 février 1977, Defrénois, 1978, art. 31-590, p. 49.; D. 1978, Juris. p. 168, note Massip.
  • [16]
    TGI Lille, 28 septembre 1995, LPA, 8 août 1997, note Massip; D. 1997, p. 2, note Labbée.
  • [17]
    Jean-Jacques Lemouland, « Le choix du prénom et du nom en droit français », L’identité de la personne humaine, préc., p. 631.
  • [18]
    Op. cit., p. 321.
  • [19]
    Décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991, cons. 16,17,27,31.
  • [20]
    Michelle Gobert, « Le nom ou la redécouverte d’un masque », JCP, 1980, I, 2966.
  • [21]
    Alain Finkielkraut décrit, après Hannah Arendt le XXe siècle comme celui dont les guerres ont gommé le « nom », l’anonymat des guerres de ce siècle a nié la personnalité, le caractère unique de chacun, établissant le règne de l’un et du tout (in L’humanité perdue. Essai sur le XXe siècle, Éditions du Seuil, collection Points-Essai, 1996,169 p.).
  • [22]
    François Luchaire, « Les fondements constitutionnels du droit civil », préc., p. 258.
  • [23]
    Bertrand Mathieu, « Droit constitutionnel civil », p. 15; également Marc Frangi, Constitution et droit privé. Les droits individuels et les droits économiques, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1992,317 p.
  • [24]
    Voir les interventions de Sabine Corneloup et Thierry Di Manno in Code civil et constitution(s), précité, mais aussi Françoise Furkel, in L’identité de la personne humaine, préc., p. 671.
  • [25]
    Ord. n° 716,23 juin 1988. Citée par Th. Di Manno, op. cit., p. 112.
  • [26]
    Aff. 30 mars 1993, Konstantidinis ; CEDH, 22 février 1994, Burghartz c/Suisse, Série A, 250; 24 octobre 1996, Guillot c/France, RTDC 1997, p. 551, obs. Marguénaud (pour le prénom), 17 juin 2003, Mustafa c/France (pour le nom).
  • [27]
    CC, 80-127 DC du 19-20 janvier 1981, « Sécurité et liberté », RJC-I, p. 91.
  • [28]
    Louis Favoreu, « La constitutionnalisation du droit pénal et de la procédure pénale, vers un droit constitutionnel pénal », Mélanges André Vitu, Cujas, 1989, p. 169; Valérie Sommaco, « De quelques effets de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les décisions des cours et tribunaux en matière de protection de la liberté individuelle », Gaz. Pal., 27-29 juin 1999, p. 6; Agnès Sauviat, « Émergence et mérites de la constitutionnalisation du droit privé », LPA, n° 214,26 octobre 2000.
  • [29]
    Contra : Emmanuel Putman, « Contrôles d’identité des étrangers dans les zones frontières : les limites de la constitutionnalisation du droit répressif », Personnes et famille, n° 10, octobre 2001, p. 12.
  • [30]
    Annabelle Pena-Gaïa, Les rapports entre la liberté individuelle et la liberté d’aller et venir dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, thèse doct. droit, Aix-Marseille III, 1998.
  • [31]
    Déc. n° 93-323 du 5 août 1993, cons. n°9.
  • [32]
    Déc. n° 2003-467 DC, cette Revue, 56,2003, p. 760-764, note Olivier Lecucq; Dalloz, 2004 (18), pp. 1273-1274, note Séverine Nicot.
  • [33]
    Déc. n° 2004-504 DC, cons. n° 5, Les petites affiches, 15 septembre 2004 (185), p. 6-19, note Jean-Éric Schoettl.
  • [34]
    Voir Xavier Bioy, « Les crimes contre l’espèce humaine », in Stéphanie Hennette-Vauchez (dir.), Bioéthique, biopolitique et biodroit, LGDJ, coll. Droit et société, à paraître, 2005.
  • [35]
    Déc. 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, cons. 8.
  • [36]
    « En cas de procréation médicalement assistée avec tiers donneur, aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de la procréation ».
  • [37]
    Déc. Bioéthique, préc. cons. 16 et 17.
  • [38]
    Certaines jurisprudences étrangères n’ont pas fait ce choix. En Allemagne le juge constitutionnel a posé en 1989 et 1994 la connaissance des origines comme élément du libre développement de la personnalité : 31 janvier 1989 (contestation de filiation), 26 avril 1994 (condition de majorité).
  • [39]
    Le sentiment d’identité…, op. cit., p. 44.
  • [40]
    Cour constitutionnelle de Hongrie, Arrêt n° 57/1991, AB, cité in L. Tròcsànyl, « La jurisprudence constitutionnelle en Hongrie », in Verdussen (dir.), La justice en Europe centrale, Bruylant/ LGDJ, Centre d’études constitutionnelles et administratives, tome 12,1997, p. 73.
  • [41]
    Roberto Andorno, « Les droits nationaux européens face à la procréation médicalement assistée : primauté de la technique ou primauté de la personne », RIDC, 1994, p. 141.
  • [42]
    Cf. supra, réf. note 38.
  • [43]
    Dominique Schnapper, La relation à l’autre. Au cœur de la pensée sociologique, NRF, Essais Gallimard, 1998,562 p., part. chapitre I, « La pensée de la reconnaissance ».
  • [44]
    Il n’est pas besoin de revenir sur les grandes décisions qui servent de toile de fond à la position de principe contre les différencialismes des groupes, les décisions du 9 mai 1991 (Statut de la Corse), du 9 avril 1996 (Autonomie de la Polynésie française), et du 15 juin 1999 (Charte européenne des langues régionales ou minoritaires). La tradition universaliste s’opposerait à l’essor de revendications identitaires. Mais cette perception ne distingue pas les identités individuelles de l’expression des identités collectives. Cf. Ferdinand Mélin-Soucramanien, « Obs. sous CC, déc. n° 99-412 DC, Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sommaires commentés, D. 2000, n° 19, p. 198-199.
  • [45]
    L’identité a pu être qualifiée de « libératrice » (Raphaël Romi, L’étendue du droit des individus à la divergence, thèse, Toulouse I, 1981,837 p.).
  • [46]
    Cf. Michael Walzer, Sphères de justice - une défense du pluralisme et de l’égalité, Seuil, trad. Pascal Engel, 1997,475 p.
  • [47]
    « Le développement de la culture, sous ses formes les plus diverses, est perçu et présenté comme un moyen de favoriser l’insertion dans la société. L’identité culturelle est alors un aspect, ou un facteur de l’identité personnelle et de l’épanouissement personnel », Jean-Marie Pontier, « Les données juridiques de l’identité culturelle », RDP, 2000, p. 1280.
  • [48]
    Le recul de la conception restrictive de la laïcité dans la jurisprudence atteste d’une prise en compte publique des identités, rejoignant la consécration européenne de la religion comme partie intégrante de l’identité. Contre les identités religieuses, le Conseil répond « identité » de la France par la laïcité, voir Philippe Segur, « Le principe constitutionnel de laïcité », Annales de l’université des sciences sociales de Toulouse, 1997, p. 117.
  • [49]
    Il y a alors rupture entre la nationalité et le statut civil (Norbert Rouland, « Les statuts personnels et les droits coutumiers dans le droit constitutionnel français », in Droit constitutionnel local, Egalité et liberté locale dans la Constitution, Anne-Marie Le Pourhiet (dir.), Ass. Fr. des constitutionnalistes, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1999, p. 145.
  • [50]
    « Les citoyens de la République qui n’ont pas le statut civil de droit commun, seul visé à l’article 34, conservent leur statut personnel tant qu’ils n’y ont pas renoncé ».
  • [51]
    On peut admettre que la généralité de la formule qu’emploie le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-412 du 15 juin 1999, Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, peut s’opposer au développement des identités personnelles. Selon lui, la constitution s’oppose « à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d’origine, de culture, de langue et de croyance ». Cependant, le refus de reconnaître des droits collectifs n’entrave qu’indirectement la protection de l’identité personnelle.
  • [52]
    Alain Boyer, « L’article 75 de la Constitution du 4 octobre 1958 : une limite à la constitutionnalisation du statut civil de droit commun ? », RRJ, 1994, n° 2, p. 387.
  • [53]
    CE, Ass. 11 juillet 1990, Min. Intérieur c/ Mme Montcho, Rec. p. 315; AJDA, 1980, 523, chron. Feffer et Pinault ; JCP, 1981, II-19629, concl. Rougevin-Baville ; R. adm., 1980, p. 607, note Bienvenu et Rials.
  • [54]
    Décision n° 93-325 DC du 13 août 1993.
  • [55]
    Décision n° 97-389 DC du 22 avril 1997, Loi portant diverses dispositions relatives à l’immigration et décision n° 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.
  • [56]
    Norbert Rouland, Stéphane Pierré-Caps, Jacques Poumarède, Droit de minorités et des peuples autochtones, PUF, Droit fondamental, 1996,581 p., p. 309 et s.
  • [57]
    La révision relative à la Nouvelle-Calédonie et le projet polynésien attestent de la place des droits culturels dans les instruments de droit public et ce non seulement pour les territoires les plus autonomes mais encore dans le cas des DOM (cf. not. Xavier Bioy, « Le droit de l’outre-mer à la recherche de ses catégories. A propos de la loi d’orientation du 13décembre 2000 », Revue de la recherche juridique - Droit prospectif, 2001, n° 4, p.1785-1811).
  • [58]
    Stéphane Garnieri, « Le droit constitutionnel et les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle », cette Revue, n° 40-1999, p. 725 et 41-2000, p. 67.
  • [59]
    Marie-Claire Ponthoreau, « L’article 2 de la Constitution italienne et la concrétisation de droits non-écrits », AIJC, 1989, p. 97.
  • [60]
    « L’article 2 peut être tenu pour un principe général de protection de la personnalité humaine », idem, p. 115. Voir les analyses de Marie-Claire Ponthoreau, in La liberté personnelle, une autre conception de la liberté, sous la direction d’Henry Roussillon et Xavier Bioy, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, coll. de l’IFR, « Mutation des normes juridiques », à paraître en 2006.
  • [61]
    La Cour déclare à ce propos que « c’est un aspect et un facteur du développement de la personnalité. Corrélativement, les autres membres de la société sont tenus de le reconnaître par devoir de solidarité ».
  • [62]
    Même raisonnement in CEDH, 30 juillet 1998, Sheffield et Horsham c/ RU. Cette position fait désormais partie des attitudes les plus communes aux États d’Europe. Dès 1978, la Cour de Karlsruhe estimait que « la dignité humaine et le droit fondamental pour chacun de développer sa personnalité librement rendent impérative l’adaptation de la condition d’un individu au sexe auquel il appartient » (cité in Denis Salas, Sujet de chair et sujet de droit. La justice face au transsexualisme, PUF, coll. Les voies du droit, 1994). Elle précise que « l’article 1 (1) de la LF protège la dignité d’une personne telle que celle-ci se conçoit dans son individualité et sa conscience de soi. Cette protection est à rapprocher de l’idée que chacun est responsable de soi et contrôle sa propre destinée. L’article 2 (1) de la LF, combiné avec l’article 1 (1), garantit le libre développement des capacités et des atouts d’une personne. La dignité humaine et le droit constitutionnel au libre développement de la personnalité exigent donc que l’état civil d’un individu soit déterminé par le sexe auquel l’intéressé s’identifie psychologiquement et physiquement » (BerfGE, 49,286).
  • [63]
    6 novembre 1980, série A, vol. 40.
  • [64]
    Xavier Bioy, Le concept de personne humaine en droit public. Recherche sur le sujet des droits fondamentaux, « Nouvelle bibliothèque de thèses », Dalloz, Paris, 2003, tome 22, n° 1088 et s.
  • [65]
    Jacqueline Pousson-Petit, « Empreintes génétiques et filiation : les discordances et les incohérences juridiques », et Elisabeth Lajarthe, « L’identification biologique en matière pénale », in L’identité de la personne humaine, préc., p. 431 et 463.
  • [66]
    « Identifier la dignité humaine en chacun avec l’exemplaire du patrimoine génétique de l’espèce qu’il a hérité de ses parents serait nier en bloc l’unité de la personnalité (…) ce serait réduire l’ordre humain à un ordre biologique, comme lorsqu’on identifie la dignité d’un être humain avec sa vie ». Anne Fagot-Largeault, « Respect du patrimoine génétique et respect de la personne », Esprit, 1991, n° 91, p. 40.
  • [67]
    Alain Pariente, « La liberté personnelle dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel », Mélanges Lavroff, Dalloz, 2005, p. 260; Xavier Bioy, « Le libre développement de la personnalité en droit constitutionnel, essai de comparaison », RIDC, 2003, p. 123.
  • [68]
    Bertrand Mathieu, « Droit constitutionnel civil », Jurisclasseur administratif, 1997, Fascicule 1449,1990, p. 15.
  • [69]
    Rec. 119; RJC-I, p. 334; Pouvoirs, n° 48,1989, p. 185, chron. Avril et Gicquel ; RDP, 1989, n° 2, p. 399, note Louis Favoreu.
  • [70]
    Rec. 59, RJC-I, p. 358, AIJC, 1989, p. 488, chron. Bruno Genevois.
  • [71]
    Rec. p. 91, RJC-I, p. 455, cette Revue, 1991, n° 8, p. 703, chron. Patrick Gaïa.
  • [72]
    Cons. n° 49.
  • [73]
    RJC-I, p 516; cette Revue, 1993, n° 14, p. 375, chron. Favoreu, Frayssinet, Philippe, Renoux, Roux ; LPA, 2 juin 1993, n° 43, p. 4, chron. Mathieu et Verpeaux ; RFDA, 1993, n° 5, p. 902, note Pouyaud.
  • [74]
    2003-484 DC, Les petites affiches, 27 décembre 2004 (258), p. 5-8, note Bertrand Mathieu et Laeticia Janicot ; Dalloz, 2004 (20), p. 1405-1408, note Olivier Lecucq.
  • [75]
    Voir La liberté personnelle, une autre conception de la liberté, préc. note 60.
  • [76]
    Xavier Bioy, « Le libre développement de la personnalité », préc. note 67.

1La doctrine évoque souvent depuis plus d’une vingtaine d’années un renouveau du droit constitutionnel par les droits fondamentaux [1]. Dans cette perspective le subjectivisme des droits fondamentaux rencontre l’objectivisme du droit des personnes si imprégné d’ordre public et si consubstantiel à l’État. Pourtant force est de constater que le droit des personnes n’a pas réellement développé de bases constitutionnelles. Le code civil n’est pas source de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République [2] et la Constitution demeure avare quand il s’agit de donner des assises au droit de la famille (hormis le droit à une vie familiale normale, ce qui suppose une famille constituée) ou au droit de la personnalité stricto sensu (hors liberté du mariage, de la vie privée, etc.) [3]. Bertrand Mathieu montre ainsi que cette rareté de la source constitutionnelle amène le Conseil constitutionnel à recourir aux sources législatives pour interpréter et nourrir des principes et notions constitutionnelles à mettre en œuvre [4]. Contrairement aux droits constitutionnels animés par un recours par voie d’exception, le droit constitutionnel français ne s’ancre guère dans les questions civiles. La question de l’identité, particulièrement, constitue pourtant le premier bastion à prendre pour un droit constitutionnel des droits fondamentaux. Il suffira de rappeler à quel point les régimes totalitaires se présentent d’abord comme négateurs des identités personnelles, de la spécificité de chacun.

2Identité s’entend de l’identification (individualisation) mais aussi de la personnalité (dire qui l’on est, à quoi on appartient, à quoi on croit). L’identité peut se comprendre comme une liste de données identifiantes, mais selon deux dimensions bien différentes : d’une part l’inscription dans un état civil, même largement compris comme étendu aux données réelles qui le sous-tendent (filiation naturelle, données génétiques), d’autre part les choix personnels en matière sexuelle, religieuse, culturelle, politique… On peut se poser ici la question du lien entre ces deux dimensions qui ne sont pas étrangères l’une à l’autre. La seconde se fonde souvent sur la première et celle-ci peut faire l’objet d’exigences individuelles au titre de la seconde. A la croisée, les données génétiques forment un point central : données corporelles infalsifiables, elles permettent d’individualiser scientifiquement ; naturelles, elles font l’objet de revendications en vérité contre les montages artificiels de l’État qui reconstruit généralement les identités dans l’intérêt standardisé de l’enfant. Au titre des droits fondamentaux, notre droit constitutionnel offre-t-il des passerelles entre l’identification voulue par l’État et l’identité vécue par le sujet ? Cette scission interne à la notion d’identité doit d’abord être approfondie.

3L’identité, selon Ricœur, se nourrit tout autant d’ipse (perception de soi comme être unique) que d’idem (continuité du sujet dans le temps et l’espace) ; elle se nourrit d’universalité et de personnalité : c’est tout à la fois ce qui spécifie, qui différencie chacun, mais aussi ce qui se construit sur des données communes, sur des affiliations à des groupes porteurs d’identité. L’identité, on le sait, fait l’objet de très nombreuses interrogations dans nos sociétés individualistes où chacun est « en quête de soi » [5]. L’identité est un objet de revendications juridiques fort, ce que Gérard Neyran appelle les « stratégies promotionnelles du narcissisme » [6]. On se rangera alors aux côtés du professeur Gutmann [7] pour préférer parler de « sentiment d’identité » pour ne pas stationner sur l’identification posée par l’État, mais pour ne pas tomber non plus dans la pure identité psychologiquement vécue qui échappe au droit. Le droit civil et le droit administratif de l’état civil raisonnaient habituellement en termes « d’identification ». Ce schéma évolue aujourd’hui, notamment sous la pression du droit international des droits de l’homme, vers une logique « d’identité ». Désormais, la lecture de ces questions à l’aune des droits fondamentaux insiste sur la dignité de la personne vivant une identité qui l’insère dans un lien social, d’abord communautaire, l’inscrit dans une lignée qui peut porter un statut social, c’est-à-dire une place « à soi » dans le collectif. Cette approche de l’identité en termes de droits fondamentaux s’oppose à un courant doctrinal fort que l’on peut nommer le « statutisme » : contre le pluralisme et l’autonomisation des données identifiantes, il s’agit de poser que l’identité est trop importante pour fluctuer et qu’il y va de l’intérêt même de la personne de s’en remettre à l’État, seul garant de la stabilité caractéristique de l’identité. Dans cette perspective, on verra que l’absence de prise de position du Conseil constitutionnel donne entière satisfaction à ce courant [8]. Selon Mme Hunter-Henin, le « statutisme est la réponse à l’impérialisme des droits fondamentaux »; elle en appelle néanmoins à un bilatéralisme, l’identification s’ouvrant à l’identité pour faire une place à la loi du for. Il peut ainsi y avoir un lien entre les deux : soit par la revendication d’une reconnaissance identifiante en raison d’une identité vécue, soit par ce qu’à l’occasion d’une activité liée à la revendication identitaire se trouverait révélée l’identité protégée au titre de la vie privée. Cette conciliation pourrait trouver place dans la jurisprudence constitutionnelle par la mise en œuvre de normes favorables à l’inscription de données d’identité dans le statut.

4Il s’agit donc de mesurer la place accordée par le droit constitutionnel à ce sentiment d’identité. En matière d’identité, le droit constitutionnel demeure en France sur la réserve. Il laisse place au jeu de la source internationale et de la loi et n’oppose guère de principes favorables à une lecture subjective des prérogatives relatives à l’établissement et à l’accès des données identitaires et identifiantes. Le Conseil constitutionnel entend se concentrer sur la maîtrise de l’accès aux données identifiantes, si souvent synonymes de vie privée [9] et de liberté individuelle, mais n’indique rien sur le droit à une identité ou sur l’expression de celle-ci.

5En France, la nature du contentieux constitutionnel réduit considérablement les possibilités de développement d’un droit constitutionnel de la personnalité. La liberté individuelle, au sens large, regroupe un ensemble de libertés qui le traduisent d’une certaine manière, indirectement. La jurisprudence constitutionnelle n’est donc pas très impliquée dans les questions d’identité alors même que celles-ci peuvent faire l’objet d’une lecture individuelle en terme de droits fondamentaux et le font parfois chez nos voisins européens. Le droit comparé enseigne en effet que les questions d’identité de la personne peuvent relever des droits fondamentaux.

6Statistiquement, le terme d’identité n’apparaît presque pas sous la plume du juge constitutionnel. Il en est fait mention d’abord pour des questions de contrôle d’identité dans le cadre des lois de police. Il s’agit alors de vérifier le rapport de proportionnalité effectué par la loi entre la nécessité de savoir qui fait quoi dans l’espace public et la liberté individuelle de chacun. Dans cette configuration, il ne s’agit pas vraiment d’une question d’identité mais d’accès inopiné aux données identifiantes, procédure qui pourrait entraver la liberté d’aller et venir ou la vie privée au sens d’intimité [10]. Viennent ensuite les questions d’identité culturelle reconnue à des groupes. Pour le Conseil, il est alors question de territoires, de religions, de liberté d’expression ou de privilèges collectifs. Les compétences des collectivités territoriales de la République en matière de culture et de patrimoine, de langues et d’héritages spécifiques heurtent alors l’égalité républicaine. D’un autre côté, l’identité culturelle se voit indirectement prise en compte par les dispositifs de lutte contre les discriminations ou les ouvertures vers des dispositifs d’affirmation positive [11].

7Inversement, les aspects centraux de l’identité (autant au sens d’identification que de personnalité) ne sont pas abordés par le prisme de l’identité vécue. On pense en premier lieu, pour l’identification, au nom, à la filiation, à l’accès ou aux modifications des données génétiques, au sexe et peut-être à son choix. Ce traitement classique de l’identité, celui de l’état des personnes, de l’état civil ou encore du droit de la nationalité (alors qu’il s’agit de questions différentes) n’appartient d’ailleurs pas au droit constitutionnel. On pense en second lieu, pour la personnalité, à l’adhésion à une communauté, l’adhésion à des codes et comportements identitaires ; mais on rencontre là une relative indifférence. Le droit traite ces différents aspects par des droits ou libertés spécifiques : religion et laïcité, langue et unité de la Nation, liberté corporelle et indisponibilité de la personne… On peut se demander pourtant dans quelle mesure il ne serait pas utile, voire nécessaire, de dégager les linéaments d’une approche spécifique de l’identité dans ses aspects les plus centraux.

8D’abord la question pourrait se poser, par exemple, en cas de saisine relative à une loi prohibant, aussi peu probable que cela paraisse, le changement de sexe, posant l’interdiction de rechercher ses origines familiales, ou encore remettant en cause frontalement les statuts personnels ou enfin refusant toute souplesse au traitement du nom ou du prénom. Si ce genre de configuration s’est déjà présentée au Conseil, on le verra, il faut constater que le Conseil constitutionnel a éludé la question des fondements de l’identité.

9Ensuite, au-delà de cet aspect négatif, le législateur pourrait anticiper sur les fondements constitutionnels en choisissant positivement des dispositifs favorisant le développement identitaire. Des dispositifs tels que le libre épanouissement de la personnalité, présent dans la récente Charte de l’environnement, peuvent se lire comme des normes d’habilitation voire d’incitation pour le législateur. On parle ainsi parfois de « constitution programmatique ». Le Conseil d’État et la Cour de cassation pourraient ainsi fonder sur cet acquis des solutions jusque là purement prétoriennes. Le dialogue des juges y gagnerait en cohérence.

10Pour pertinente qu’elle soit, on le voit, cette question n’a guère été posée en doctrine. La toile de fond de la constitutionnalisation du droit, en particulier du droit civil [12] n’a pas suscité de développement sur ce versant. Même du côté des thuriféraires de la constitutionnalisation, l’approche des droits constitutionnels fondamentaux en termes de droits relatifs à l’identité se révèle presque inexistante [13]. En effet, l’identité est une question qui inquiète en France, elle apparaît toujours menaçante pour le pacte républicain. Cette approche fait pourtant peu de cas de la différence entre identité communautaire et identité strictement individuelle comme l’accès aux origines biologiques. Certes, les identités communautaires se vivent individuellement et on sait que notre droit public se montre de plus en plus ouvert à des aménagements de l’universalisme au profit de différencialismes divers [14]; mais ces identités d’appartenance vécue ne s’inscrivent pas directement dans l’identité au sens strict qui sera ici retenue ; elles n’entrent pas dans l’identification. Si le traitement de l’identité peut se lire au travers du principe d’égalité ou de non-dis-crimination, si l’identité se perçoit comme une tolérance ou une liberté par la protection négative des modes de vie identitaires, il convient d’entendre ici identité objectivement comme statut déterminé par l’État et accordant plus ou moins d’attention aux choix individuels. Cette approche se justifie notamment par le fait que les différencialismes instaurés en France le sont surtout par la loi ou la Constitution, fort peu par la jurisprudence.

11La jurisprudence constitutionnelle témoigne de ce que l’identité est essentiellement perçue comme un moyen d’individualiser et non comme un moyen d’épanouissement individuel. Pour le percevoir, on devra se livrer à une entreprise de lecture « en creux », par les questions qui n’ont pas été posées au Conseil, les questions qu’il n’a pas voulu voir (problème de l’accès aux origines et de la réalité de la filiation naturelle) ou encore celles qui, étant traitées, font l’objet d’une approche restrictive ou indirecte.

12Il existe pourtant des fondements constitutionnels possibles ou probables pour des prérogatives individuelles déjà existantes grâce à la loi ou au droit international en particulier du côté de la Cour européenne des droits de l’homme ouvrant plus largement la vie privée aux questions d’identité (le cas du transsexualisme est révélateur).

13Il s’agira donc de montrer en quoi les quelques éléments de la jurisprudence constitutionnelle française attestent d’une réelle fidélité au « statutisme » en matière d’identité. Abordant le domaine de l’identité par la question du régime des données identifiantes, du don d’une identité à l’accès aux données identifiantes, on verra qu’elle se pense avant tout comme identification et donc comme une prérogative de l’État. Comme telle elle ne relève que d’une défense constitutionnelle de la liberté individuelle et de la vie privée au titre des comportements et non de l’identification. On montrera cependant que la question de la constitution juridique volontaire d’une identité, telle qu’elle est vécue, a été parfois soulevée indirectement devant le Conseil qui l’a le plus souvent écartée purement et simplement en dépit de la possibilité d’établir des liens entre identification et identité.

14Le régime des données identifiantes (I) s’ouvre sur la question de ses liens avec la constitution juridique de l’identité (II).

I – LE RÉGIME DES DONNÉES IDENTIFIANTES

15Pour le Conseil constitutionnel, l’identité c’est avant tout l’identification qui assure la continuité du sujet individuel et permet de la saisir à tout moment. Il faut partir de cet aspect traditionnel qui oppose à la nécessité de l’identification la protection de la liberté et de la vie privée (A). Mais la dimension personnelle de l’ipse n’est pas totalement étrangère à cet aspect classique quand l’identification permettrait d’accéder à l’identité (B).

A – L’IDENTITÉ « IDEM » : L’INDIVIDUALISATION PAR L’ÉTAT

16L’aspect dominant, celui de l’identification, associe identité et État. Ce qui invite, dans une perspective classique de libertés publiques, à y adjoindre la liberté individuelle.

1 – Un acquis de la puissance étatique : État et droit des personnes

17Comme l’explique Jean-Paul Branlard, l’État donne à la personne son image juridique et la classe dans une catégorie de sujets dont elle ne saurait s’extraire. Par ailleurs, le lien toujours entretenu, bien qu’assailli de toutes parts, entre sexe et filiation, vient poser des limites d’un autre ordre. Le droit à un état civil relève d’une construction civiliste dont la réalité repose plutôt sur l’obligation d’avoir un état. Mesure d’ordre public, voulue par l’État dans un souci de connaissance et d’emprise sur les sujets de droit présents sur son territoire. On rencontre une logique de droit public à la base de la constitution de la personne. La jurisprudence judiciaire a entériné ses exigences de l’ordre public des personnes. En 1977, la Cour d’appel de Paris a estimé qu’un intérêt public s’attachait à ce que tout individu vivant en France, même étranger, ait un état civil [15]. Mais le versant subjectif n’est pas pour autant ignoré. Le TGI de Lille a récemment renouvelé ce type de décision : « l’impossibilité d’établir un état civil place [la personne] dans une situation administrative inextricable et la prive des droits attachés à la personne humaine, tels que la liberté d’aller et venir (tout contrôle d’identité conduisant systématiquement à son arrestation, faute de pouvoir justifier de son identité), le droit de travailler, d’avoir un logement, de fonder une famille » [16]. L’État se retrouve donc doublement débiteur de l’obligation de fournir et protéger les éléments de l’identification. Pourtant le juge constitutionnel n’a guère donné d’éléments sur ce sujet.

18La question du nom patronymique [17] n’a pas fait l’objet de jurisprudence en dépit des modifications législatives intervenues. L’usage du nom dévoile une palette de préoccupations individuelles que Daniel Gutmann organise autour des fonctions de dénotation et de connotation [18]. L’argument d’un droit au libre usage du nom a pourtant été avancé devant le juge mais dans un cadre peu adéquat pour le développer. Lors de la saisine portant sur la loi relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme [19], les requérants estimaient que l’interdiction de la publicité pour le tabac ou l’alcool, donc pour leurs marques, portait atteinte au libre usage du nom fondé sur les articles 1er et 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Ils entendaient ainsi montrer en quoi le droit au nom et à sa maîtrise relève de la structure même des droits de l’homme, d’une condition de leur existence. Le Conseil ne les a, bien sûr, pas suivi. Il n’a pas rejeté le principe d’un tel droit au fond, mais a estimé qu’en l’espèce ce n’était pas le nom « en tant qu’élément d’individualisation et d’identification d’une personne physique » qui se trouvait en cause. Le Conseil n’a pas eu à intervenir dans un sens positif dans la mesure où les différentes réformes du Code civil relatives au nom vont dans le sens d’une certaine subjectivisation, d’une certaine maîtrise de l’identification. Les droits concernant le nom, ou « droit au nom », peuvent se réclamer de la personnalité [20], du concept de personne humaine [21]. Bertrand Mathieu estime, avec François Luchaire [22], qu’aucune norme constitutionnelle ne fonde de telles prérogatives mais, qu’à l’occasion, la loi du 11 germinal an III et la loi du 22 juillet 1922, affirmant le droit de tout individu à s’opposer à ce qu’une autre personne prenne son nom, pourrait fournir un principe fondamental reconnu par les lois de la République [23].

19Cette vacuité de jurisprudence contraste avec les décisions rendues en Allemagne ou en Italie, relatives à l’usage du nom en cas de divorce ou l’usage du double nom des parents par un enfant [24]. La Cour italienne a même reconnu un authentique droit constitutionnel au nom qui implique par exemple qu’un enfant tardivement reconnu par son père a le choix de porter son nom et-ou celui porté jusque-là [25]. En Allemagne, une loi du 16 février 2001 prévoit que les membres d’un couple homosexuel portent le même nom, l’identification étant un connotant de l’identité. Même contraste au regard de la jurisprudence européenne. De son côté, la Cour européenne des droits de l’homme lit en effet ces éléments à l’aune de l’article 8 [26], faisant du nom, de l’identité, un élément du mode de vie, de l’expression identitaire de soi. Sous le droit public, l’identité se révèle donc source d’exigences personnelles.

20Il n’est pas besoin de développer la question de la filiation, c’est-à-dire d’un éventuel droit à une filiation devant le Conseil. Dans la première décision « bioéthique », elle fait l’objet d’une fin de non recevoir : « Considérant que les dispositions de cette loi n’ont eu ni pour objet ni pour effet de régir les conditions d’attribution de paternité en cas d’assistance médicale à la procréation; qu’aucune disposition ni aucun principe à valeur constitutionnelle ne prohibe les interdictions prescrites par le législateur d’établir un lien de filiation entre l’enfant issu de la procréation et l’auteur du don et d’exercer une action en responsabilité à l’encontre de celui-ci ; que, par suite, les griefs des requérants ne sauraient qu’être écartés ». En renvoyant une nouvelle fois dos à dos la thèse du self-restraint du Conseil et les dénonciations de jurisprudence manquées, on regrettera que le Conseil n’ait pas saisi ici l’occasion de poser un lien entre personnalité et identité. Soucieux de protection de la vie privée des personnes, il n’estime pas nécessaire de lire la loi au-delà de ce qu’elle pose et néglige l’identité. Avant de percevoir certains de ces aspects sous l’angle de la vie privée, le Conseil traite essentiellement d’identité au titre des lois de police.

2 – La question de l’accès aux données identifiantes comme médium de protection de la liberté individuelle

21Depuis 1981 [27], le contentieux constitutionnel des contrôles d’identité est l’un des domaines où la constitutionnalisation des branches du droit est des plus effectives [28]. Le juge judiciaire se montre généralement sensible aux indications interprétatives du Conseil [29]. Le Conseil constitutionnel n’admet les contrôles d’identité que sous réserve de justifications circonstancielles relatives à l’ordre public. Les contrôles généralisés et discrétionnaires seraient contraires à la liberté individuelle, d’abord dans sa composante liberté d’aller et venir [30]. Le Conseil estime en outre nécessaire de pouvoir quitter le territoire à tout instant et de pouvoir ainsi obtenir la remise des documents éventuellement retenus. La formule utilisée depuis 1993 laisse entendre que la vérification d’identité porte en elle-même atteinte à la liberté individuelle et à d’autres libertés constitutionnellement garanties [31]. A ce titre, elle doit demeurer fortement encadrée et ne pas entraver les libertés non liées à un séjour régulier. Pouvoir prouver son identité à tout instant n’est donc pas seulement une question de régularité du séjour. Avoir une identité implique d’être toujours en mesure de la prouver. Le Conseil constitutionnel s’assure ainsi, en cas de rétention de certains documents identifiants relatifs au séjour des étrangers, de la remise d’un document provisoire attestant de l’identité. C’est également une garantie du droit à une vie familiale normale et non seulement un élément de l’ordre public.

22La question de l’accès des autorités publiques ou privées aux données identifiantes ne se conçoit plus de façon isolée. Il n’y est pas seulement question de liberté individuelle et d’identification par les services d’autorité de l’État mais aussi de personnalité. Le lien entre identification et données personnelles a été établi par le Conseil constitutionnel à l’occasion d’une réserve d’interprétation formulée dans la décision relative à la loi sur la sécurité intérieure [32]. En son considérant 32, il précise « qu’aucune norme constitutionnelle ne s’oppose par principe à l’utilisation à des fins administratives de données nominatives recueillies dans le cadre d’activités de police judiciaire; que, toutefois, cette utilisation méconnaîtrait les exigences résultant des articles 2,4,9 et 16 de la Déclaration de 1789 si, par son caractère excessif, elle portait atteinte aux droits ou aux intérêts légitimes des personnes concernées ». Selon lui, l’article 2 de la loi du 6 janvier 1978 relative aux fichiers et aux libertés, celui-là même qui refuse le traitement automatisé donnant une définition du profil ou de la personnalité de l’intéressé en cas de décision administrative impliquant une appréciation sur un comportement humain, est applicable aux informations nominatives des services de police et gendarmerie. Ainsi que le remarque Bertrand Mathieu, cette loi de 1978 a fait à maintes reprises l’objet d’une invocation par le juge constitutionnel comme nourrissant les « garanties plancher » de la vie privée par l’identité. L’article 8 de cette loi met bien en parallèle les deux dimensions de l’identité, fortement liées : il interdit en principe de collecter ou de traiter des données à caractère personnel qui font apparaître les origines raciales ou ethniques, les opinions politiques, philosophiques ou religieuses ou l’appartenance syndicale des personnes, ou qui sont relatives à la santé ou la vie sexuelle de celles-ci. Il prévoit toutefois des dérogations à cette interdiction, dans la mesure où la finalité du traitement l’exige, dans certaines hypothèses limitativement énumérées, dont les « traitements nécessaires à la constatation, à l’exercice ou à la défense d’un droit en justice ». Ainsi, en pratique, la jurisprudence constitutionnelle admet que la vie privée est préservée si les détenteurs de données relatives à la pratique des internautes ne sont pas également les détenteurs des adresses IP (Internet Protocol), seules identifiantes.

23Apparaît ainsi le lien entre les deux dimensions de l’identité. Mais le versant personnel de l’identité n’est guère traité en tant que tel dans la jurisprudence constitutionnelle.

B – L’IDENTITÉ IPSE : LA MISE À DISTANCE DE LA PERSONNALITÉ

24N’aborder l’identité que sous l’angle de la vie privée se prolonge par l’absence d’examen de la question du droit à rechercher une identité différente qui relève plutôt d’une conception large de la vie privée, encore largement ignorée.

1 – L’identité assimilée à la vie privée

25Le problème de l’identité, on l’a vu, dépasse de très loin le cadre des droits circonscrits. Il n’en demeure pas moins que le Conseil ne traite de l’identité ipse que sous l’angle de la vie privée, ce qui peut paraître réducteur. Les données dites « personnelles » sont celles qui, en même temps, permettent d’associer un individu identifié et des comportements ou des informations de nature privée. La plupart de ces données ne concerne en effet que l’intimité du sujet, mais d’autres au contraire peuvent faire partie d’une identité revendiquée, de comportements qui ne s’arrêtent pas à la frontière de la sphère privée.

26Une analyse classique consiste à refuser l’accès à l’identité quand celle-ci donnerait accès à la vie privée : un exemple est fourni par la décision 99-424 DC du 29 décembre 1999 – Loi de finances pour l’année 2000 – où le Conseil valide le dispositif qui consiste à écarter des informations que peuvent demander les agents des impôts aux dépositaires du secret professionnel concernant leurs recettes les données qui peuvent porter sur l’identité des clients. La vie privée est ainsi préservée. Le même type de raisonnement est à l’œuvre dans la décision 2004-499 DC du 29 juillet 2004, relative à la protection des données personnelles, où le Conseil s’assure de garde-fous à l’accès à l’identité pour garantir la vie privée : en particulier que les fichiers autorisés ne comportent pas de données dites « sensibles » listées à l’article 8 de la loi de 1978. Le Conseil admet en revanche, au titre de la sécurité publique, que figure dans un fichier automatisé l’identité des auteurs de certaines infractions sexuelles. Les administrations chargées de l’agrément de professions au contact de mineurs pourront ainsi les consulter. Cette mesure de police lui paraît suffisamment nécessaire et encadrée pour ne pas trop porter atteinte à la vie privée (déc. 2004-492 DC – loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité). Le Conseil laisse en la matière une large autonomie au législateur qui peut modifier en profondeur une procédure protégeant la vie privée, à charge pour lui d’en ériger une nouvelle, aussi protectrice. Lors de la décision Couverture maladie universelle du 23 juillet 1999 (n° 99-416 DC ), il a admis que des dérogations à l’anonymat des données de santé publique puissent être accordées par la CNIL.

27A l’inverse, la vie privée protège indirectement l’identité personnelle quand, au vu de comportements intimes connus mais anonymes, il devient possible de remonter à l’identité d’une personne (ainsi les données médicales qui porteraient sur des cas de pathologies rares permettant par recoupements d’identifier des personnes). Dans sa décision du 12 août 2004, le Conseil s’est montré assez clairvoyant en posant que le droit à la vie privée « requiert que soit observée une particulière vigilance dans la collecte et le traitement de données à caractère personnel de nature médicale » [33].

28Mais vouloir toujours cantonner l’identité à l’intime la prive d’un support plus large. Ainsi, certaines pathologies, certains handicaps, peuvent faire partie de l’identité psychologique vécue, voire revendiquée, de la personne. Celle-ci peut avoir fait de son cas un combat public, une cause politique. L’identité dépasse le cadre de la vie privée au sens que le droit français lui donne d’intimité. Allant au bout du raisonnement, l’identité en tant que droit fondamental est encore méconnue quand il serait nécessaire de la protéger objectivement, parce que le sujet n’est pas à même de le faire au titre de sa vie privée, parce que son identité est « volée ». On pense au cas, encore heureusement fictif, du clonage reproductif. On sait bien que le clone serait une personne à part entière, à la filiation quelque peu perturbée, mais avec son identité civile et sa dignité de personne unique. Pourtant, la condamnation pénale et internationale unanime actuelle repose sur l’idée que le fait d’avoir été préconditionné pour et par un génome précis et connu prive le clone d’unicité et d’autonomie (au sens de la capacité de se doter de ses propres fins), c’est-à-dire d’identité propre. Le clone n’est pas privé d’intimité mais d’identité propre dans la mesure où il a été pensé tel quel par d’autres. Lors du contrôle de la seconde loi Bioéthique, le Conseil n’a pas eu à donner de fondement constitutionnel au nouveau crime contre l’espèce humaine qu’est le clonage reproductif. Admettant la nouvelle incrimination, il a admis la protection de l’identité sans qu’il soit nécessaire d’en indiquer le fondement. Confronté à un texte qui autoriserait le clonage reproductif, notre droit constitutionnel recourrait sans doute à la dignité de la personne, mais on sent bien que ce fondement serait logiquement subsidiaire, mal adapté car trop tourné vers le collectif humain. Le même reproche peut être fait à l’incrimination du crime contre l’espèce humaine actuellement en vigueur [34]. Une disposition constitutionnelle protectrice de l’identité personnelle serait mieux adaptée.

2 – L’absence d’examen de la question du droit à rechercher une identité différente

29On touche ici au cœur du problème. Lors de la première décision Bioéthique de 1994 [35], les rédacteurs de la saisine entendaient soulever la question du droit à une identité à travers la remise en cause de la disposition qui interdisait aux enfants nés d’une fécondation in vitro avec tiers donneur de connaître leur identité génétique et leurs parents naturels : l’article 311-19 alinéa premier du Code civil [36]. Les auteurs de la saisine contestaient cette interdiction sur le fondement d’un éventuel droit à la connaissance de ses origines lié au principe du libre épanouissement de l’enfant. Ils souhaitaient par ailleurs voir consacré un principe fondamental reconnu par les lois de la République issu de la loi du 16 novembre 1912 permettant à l’enfant de rechercher la paternité hors mariage sous certaines conditions. Le Conseil n’a pas souhaité intervenir en matière de filiation, à propos d’un texte dont ce n’était selon lui pas l’objet, il relève ensuite l’absence de principe constitutionnel opposé à ce type d’interdiction [37]. Cependant, on doit constater que le Conseil ne s’est pas engagé sur la voie possible de la dignité de la personne comprise comme le libre épanouissement de la personnalité, ce dont il peut sans doute être félicité, ayant ainsi évité de réduire la filiation à ses aspects biologiques [38]. La doctrine développe pourtant ce type d’argumentation. Ainsi Daniel Gutmann écrit qu’ « on pourrait alléguer qu’il est contraire à la dignité humaine de cantonner quelqu’un dans l’ignorance d’une information sur soi-même que d’autres connaissent » [39]. Le Conseil n’a pas répondu à l’argument de façon générale. Résumant l’accès aux origines à la question de la connaissance des antécédents médicaux et génétiques, le Conseil a bien sûr posé que l’ignorance de ces données ne méconnaissait pas le droit à la santé.

30Il est regrettable que la loi du 10 janvier 2002 relative à l’accès aux origines personnelles n’ait pas fait l’objet d’une saisine. Le Conseil aurait peut-être alors lu la conciliation des droits au secret de la mère et au droit de savoir de l’enfant à la lumière de la Constitution. L’article 2 pose que l’on doit informer la mère, qui demande le secret, de l’importance pour toute personne de la connaissance de ses origines. Cette loi, en incitant les mères accouchant « sous X » à laisser une trace identifiante et en instituant des procédures de levée du secret, va incontestablement dans le sens de la reconnaissance de l’importance des données d’identité. L’exposé des motifs n’affilie pas cet objectif à un fondement constitutionnel mais à l’article 7 de la Convention internationale des droits de l’enfant du 20 novembre 1989; pourtant des fondements existent.

31La Cour constitutionnelle de Hongrie a par exemple consacré, sur le fondement de la dignité de la personne humaine, le droit de connaître ses origines : « Toute personne a le droit le plus personnel de rechercher son origine parentale, de contester ou de rechercher son vrai statut de parenté, comme tout individu a droit à ce que personne – en dehors de ceux qui sont directement concernés par les liens de parenté avec cette personne – conteste son origine parentale » [40]. Le droit comparé semble attester de la correspondance entre connaissance des origines et restriction aux procréations médicalement assistées ; les pays ouverts aux recherches sur l’embryon, aux maternités de substitution se montrent au contraire fermés à l’accès aux origines [41].

32La question de l’accès de la personne à la connaissance de ses origines biologiques a également été située d’emblée dans la plupart des pays sur le terrain de l’épanouissement de la personnalité. L’Allemagne s’est montrée très explicite sur ce point. Deux décisions ont lié dignité et personnalité pour censurer des limites que le législateur entendait apporter à la connaissance des origines biologiques d’enfants adoptés [42].

33Ainsi abordée, la lecture constitutionnelle de l’accès aux données identifiantes (aussi bien au sens de se doter d’une identité qu’au sens de l’accès à la connaissance de ces données) atteste d’une certaine faiblesse. Il ne faut guère attendre plus quand il s’agit de fonder des prérogatives permettant à l’individu de se constituer une identité vécue.

II – LA CONSTITUTION DE L’IDENTITÉ

34L’unité de la personne dans le temps peut amener le droit à reconnaître publiquement des choix privés. La forme ultime de cette reconnaissance demeure l’institutionnalisation, c’est-à-dire doter des comportements jusque-là « a-juridiques » d’un statut qui en fixe les modalités et les limites. Les cas sont nombreux, certains attestent d’un certain différencialisme tel que Dominique Schnapper a pu le décrire [43]. Mais, là encore, la jurisprudence du Conseil ne sépare pas identité personnelle et identité des groupes. Le « sentiment d’identité » forme un bloc indistinct, perçu avec circonspection au détriment de normes déterminant des lignes directrices en matière d’identité.

35La réticence traditionnelle (A) peut se confronter à des occurrences nouvelles et des fondements possibles, favorables à une évolution (B).

A – UNE RÉTICENCE TRADITIONNELLE FACE À LA RECONNAISSANCE PUBLIQUE DE L’IDENTITÉ PERSONNELLE

36Ce second aspect du phénomène identitaire en droit, moins connu sous l’angle du sujet de droit qu’il ne l’est dans les débats sociologiques ou juridiques relatifs à l’espace public, n’en comporte pas moins un lien avec les droits les plus fondamentaux de la personne. En effet, le passage de la sphère privée, où la personne exprime pleinement son identité, à la sphère publique, où traditionnellement la République attend la mise à l’écart des groupes intermédiaires et des choix personnels, constitue une césure dans la vie personnelle. L’identité culturelle se situe au croisement de ces questions. Elle ne nous intéresse ici que sous l’angle de l’individu et non de celui des groupes ; non pas comme deux points de vues concurrents, mais pour limiter cette étude aux données identifiantes et non aux comportements liés à une pratique culturelle identitaire [44]. Le problème des statuts personnels illustre cet aspect. Mais le chemin inverse existe : celui où des choix intimes, notamment sexuels, tendent à servir de base à la fondation de communautés.

1 – Identités culturelles et identification civile

37L’identité culturelle situe la personne et la constitue dans la société globale [45]. Elle se présente comme un élément majeur de l’intégration aux groupes [46]. Tenant compte de l’unité de la personne, le droit entend désormais protéger et régir cet aspect de la personnalité humaine en conciliant droits de la personne et impératifs d’unité nationale. Jean-Marie Pontier synthétise fort justement l’orientation actuelle du droit en la matière [47]. Le mouvement contemporain de défense de l’identité comme droit fondamental en liaison avec le concept de personne conduit à la reconnaissance du thème de l’identité personnelle appelant une politique positive de l’État allant bien au-delà de la seule tolérance. Il se heurte à la vigilance du Conseil constitutionnel qui se montre fervent défenseur du pacte républicain, décelant sous chaque revendication identitaire la poussée d’un groupe concurrent du peuple français. La question de la laïcité entre ici en jeu mais ne relève pas de cette étude dans la mesure où elle n’entraîne pas, en tant que telle, de donnée identifiante officielle [48].

38A la croisée des questions d’identité culturelle et personnelle, comme attestant du caractère artificiel de leur séparation, se trouve le domaine des statuts personnels. En 1946, comme en 1958, l’inscription de la conservation du statut personnel dans la Constitution ne relevait pas d’une logique de droits fondamentaux mais d’une stratégie cherchant un bénéfice international et relevant encore du colonialisme assimilateur [49]. On avait en vue un moyen terme à l’issue duquel les particularismes de l’outre-mer auraient dû disparaître. La consécration de l’article 75 de la Constitution [50], liée à l’extension de la citoyenneté française à tout l’outre-mer, s’analyse certainement comme une tolérance ne devant pas entraver l’égalité apportée par l’application de la loi commune. Le droit public, malgré la standardisation et l’uniformisation qui en principe le caractérisent [51], tient pourtant compte des traditions et des coutumes, éléments essentiels de l’identité de territoires appartenant à la République, que sont les statuts personnels [52]. Les statuts personnels butent également sur l’ordre public. Certaines pratiques liées au statut musulman, comme l’excision, sont écartées de longue date, même hors métropole ; d’autres ne se heurtent qu’aux règles communes comme la polygamie. D’une manière générale, le raisonnement des juges de droit commun tendait à suivre le droit concernant les étrangers et à admettre des dérogations à l’interdiction de contracter plusieurs mariages. Le Conseil d’État, dans un arrêt retentissant, était allé jusqu’à admettre l’exercice du droit au regroupement familial dans le cas d’un étranger polygame [53]. Mais la décision Maîtrise de l’immigration [54] du Conseil constitutionnel estime au contraire que le regroupement familial doit se faire selon l’ordre public du pays d’accueil, donc sans polygamie. Il maintient encore récemment cette position [55]. La position française en matière de droits spécifiques aux minorités se résume à les considérer comme des questions de droit privé, sans reconnaissance de droits collectifs. Or, l’article 75 de la Constitution pourrait bien peu à peu servir de fondement à une conception différente, de droit public, personnelle et liée à une culture collective [56]. Si le statut personnel demeure bien sûr dans le giron du droit des personnes, la nature constitutionnelle de sa consécration et sa réitération au plan du droit de la décentralisation lui confère une dimension publique importante [57].

39Mais, là encore, le Conseil constitutionnel n’entend pas donner cette résonance : ainsi dans sa décision n° 2003-474 DC du 17 juillet 2003, Loi de programme pour l’outre-mer. L’article 68 de cette loi posait que « l’exercice des droits, individuels ou collectifs, afférents au statut civil de droit local ne peut, en aucun cas, contrarier ou limiter les droits et libertés attachés à la qualité de citoyen français ». Aux requérants qui soutiennent que les dispositions du deuxième alinéa de cet article 52-1 sont contraires à l’article 75 de la Constitution, le Conseil répond que le législateur n’a pas méconnu l’article 75 de la Constitution; que, dès lors qu’il ne remettait pas en cause l’existence même du statut civil de droit local, le législateur pouvait adopter des dispositions de nature à en faire évoluer les règles dans le but de les rendre compatibles avec les principes et droits constitutionnellement protégés. La suppression de la polygamie à Mayotte relève d’une évolution largement tournée vers l’intégration culturelle contre les identités.

2 – Les identités sexuelles

40On ne trouve guère de référence à l’identité sexuelle dans la jurisprudence constitutionnelle, si ce n’est en matière d’égalité et de non discrimination [58]. Le droit électoral et la parité arrivent en tête. Du point de vue de l’identité, toujours la même réserve. Seule la décision relative au pacte civil de solidarité (PaCS) a pu apparaître, ni plus ni moins que la loi elle-même, comme autorisant une officialisation des couples homosexuels. Mais cette remarque s’opère sous réserve de ce que la formule du PaCS tend justement à refuser le statut de droit commun du mariage en raison même de l’expression identitaire que cela entraînerait. Encore une fois, l’Italie dispose d’une « norme ouverte » [59] permettant de consacrer certaines libertés liées à la personnalité [60], en particulier l’identité sexuelle (1985) et la liberté sexuelle (1987) [61]. La Constitution dans son article 3 assigne à la République l’objectif fondamental d’« écarter les obstacles d’ordre économique et social qui, en limitant dans les faits la liberté et l’égalité des citoyens, s’opposent au plein épanouissement de la personne humaine (…) ». L’article 2 évoque également la personnalité de l’individu en liaison avec les « formations sociales ». La jurisprudence de la Cour constitutionnelle italienne entend alors parfois joindre les deux, même si cette référence est loin d’être systématique.

41En somme, notre jurisprudence constitutionnelle, faute de quitter les normes relatives aux comportements pour une approche strictement en terme d’identité, demeure réticente à admettre l’inscription dans l’identification de choix identitaires personnels au-delà. Mais d’autres voies seraient envisageables.

B – LES FONDEMENTS D’UN PASSAGE DE L’IPSE À L’IDEM : LA RECONNAISSANCE IDENTIFIANTE DE L’IDENTITÉ PERSONNELLE

42Si la question de l’identité en droit constitutionnel alimente une histoire de l’identité marquée par l’indisponibilité d’un état qui s’étend à l’indisponibilité de toutes les formes d’identité, on doit aussi constater que la source européenne et parfois les droits constitutionnels européens ouvrent des possibilités que notre droit constitutionnel n’est pas à même de suivre. Quelques cas et quelques fondements possibles peuvent être évoqués.

1 – Les cas possibles

43On pense à des hypothèses où l’identité réelle, vécue, peut se substituer à celle offerte par l’État grâce à des voies jurisprudentielles ouvertes notamment par la Cour de Strasbourg sans que notre droit constitutionnel puisse offrir un fondement (le transsexualisme), ou encore à d’autres cas où la question se pose sans encore de réponse : adoption ou assistance médicale à la procréation avec donneur. Dans l’affaire qui a engendré l’évolution du droit français en matière de transsexualisme (B c/ France), la Cour estimait que le fait de devoir administrativement justifier d’un sexe qui ne correspond pas aux apparences données était inconfortable et violait l’intimité de la personne [62]. Il faut entendre par là la personnalité. Cette attitude, favorable à l’épanouissement de la personne, sous réserve d’assimiler celui-ci à l’autodétermination et à la libre disposition de soi, remet en cause l’approche habituelle du cantonnement de la sexualité dans la sphère de la vie privée. Elle était cependant en germe dans la nature relationnelle de la sexualité qui engage désormais le choix de son identité sexuelle par la personne elle-même. Par un arrêt Daniel Van Oosterwijck c/ Belgique [63], le juge européen des droits de l’homme a estimé nécessaire le changement d’état civil au motif que « le droit à la vie privée est le droit de vivre autant qu’on le désire à l’abri des regards étrangers, d’établir et d’entretenir des relations avec d’autres êtres humains pour le développement et l’accomplissement de sa propre personnalité ». La jurisprudence constitutionnelle française n’offre pas de source de solution à ce type d’interrogation faute d’avoir été saisie et faute d’une attitude volontariste lorsqu’était en cause l’identité biologique de la personne en 1994 et 2004. Des fondements textuels et jurisprudentiels existent pourtant.

2 – Les fondements possibles

44On en retiendra trois.

a) La dignité de la personne

45A comprendre la personne comme l’unité de la socialisation et de l’individualisation, on perçoit qu’une identité se construit par rapport à une offre identitaire : une famille, un groupe. Priver un individu d’identité revient à nier sa personnalité (on peut comparer cela avec la protection internationale de l’apatride [64] ). Si l’identité posée par l’État se limite à identifier un individu, à l’objectiver, à l’inverse la construction de l’identité par l’individu, tendant à se singulariser, atteste d’une éminente dignité.

46Le problème de l’identité génétique se pose ainsi en partie en ces termes. La loi autorise l’État à identifier génétiquement les personnes, tant dans le cadre de procédures civiles (pour établir une filiation par exemple) que dans le cadre pénal [65]. Le droit contemporain trouve dans la génétique la preuve de l’unicité de chacun. Le génome se comprend avant tout comme une information sur la personne et son environnement, mais il n’est pas toute la personne. Pressentant la dérive inadmissible de la réduction de la personne à ses gènes, non du point de vue de la dignité humaine, mais de celui de la dignité de la personne [66], les rédacteurs de la Déclaration universelle de l’UNESCO sur le génome humain et les droits de l’homme ont établi à l’article 2 (b) que : « Cette dignité impose de ne pas réduire les individus à leurs caractéristiques génétiques et de respecter leur caractère unique et leur diversité ». C’est dans le cadre de la révision des lois de bioéthique que cet aspect est revenu devant le Conseil constitutionnel. En effet, on peut lire l’autorisation de breveter des séquences génétiques rares ou la modification par manipulations somatiques ou germinales comme autant d’éléments liés à l’identité de la personne. Le Conseil a validé dans sa décision 2004-498 DC du 29 juillet 2004, Loi bioéthique II, l’argumentation du gouvernement relative à la brevetabilité des inventions génétiques. Les garanties offertes par la non brevetabilité directe des éléments du corps humain ainsi que l’interdiction de breveter les procédés de modification de l’identité génétique de l’être humain ont suffi à écarter les risques de dérives. On remarquera qu’ici le Conseil s’est retranché derrière la directive européenne qui faisait l’objet d’une transposition, tel qu’il sera amené à le faire de plus en plus. Mais le caractère très général et souvent contradictoire du principe de dignité amène à examiner d’autres sources.

b) La liberté personnelle [67]

47Le lien entre identité et vie privée se prolonge vers la liberté personnelle, elle aussi fondée en partie sur l’article 2 de la Déclaration de 1789. Elle s’appuie aussi bien sur l’intimité que sur l’expression publique des choix personnels : l’identité. Selon la formule de Daniel Gutmann, il s’agit d’être « moins connu et toujours plus reconnu ». Née en droit constitutionnel social, la liberté personnelle peut se définir comme le « droit à ne pas subir de contrainte sociale excessive » quand est en jeu la personnalité [68]. Ce fût d’abord le cas dans la décision 88-244 DC du 20 juillet 1988 [69] qui ouvre le champ des relations du travail à la notion de liberté personnelle. La décision 89-257 DC du 25 juillet 1989 [70] a confirmé ce premier mouvement, dans le même domaine, estimant que la liberté syndicale avait comme corollaire la liberté de n’adhérer à aucun syndicat. Du droit à la convenance personnelle, la liberté personnelle évolue vers la « vie personnelle » ou droit à l’indifférence lorsque la personnalité s’exprime dans la sphère publique. La protection des données personnelles protège aussi cette part d’identité. La décision 91-294 DC du 25 juillet 1991 [71] fait mention de la liberté personnelle pour estimer que l’utilisation par les États de l’espace Schengen ne violait pas la liberté personnelle. Était en effet en cause le « système d’information Schengen » qui, selon les requérants, n’aurait pas respecté les libertés individuelles en ne limitant pas suffisamment l’utilisation nationale des données à caractère personnel et en n’interdisant pas les interconnexions avec d’autres fichiers. Le Conseil a au contraire estimé que la Convention « comporte un dispositif très important de mesures à même d’assurer le respect de la liberté personnelle » [72]. Ce faisant, le juge constitutionnel s’engage dans l’intégration de tout un pan de la vie privée dans la liberté personnelle. La décision n° 92-316 DC du 20 janvier 1993 [73], dite Prévention de la corruption, utilise cette fois la liberté personnelle comme motif de sanction. En effet, les dispositions relatives au « service central de prévention de la corruption » étaient accusées de créer un service judiciaire hors séparation des pouvoirs et privant les personnes du recours à l’autorité judiciaire gardienne de la liberté individuelle, alors même que ce service serait dépositaire de documents de toutes natures relatifs au comportement des personnes. La liberté personnelle a enfin intégré la liberté du mariage lors de la décision du 20 novembre 2003 [74]. Les potentialités de cette notion du point de vue de l’identité, non encore avérées, sont pourtant bien réelles si le versant « protection de la personnalité » se confirmait [75].

c) Le libre développement de la personnalité [76]

48La notion de libre développement de la personnalité n’appartient pas à la jurisprudence du Conseil constitutionnel mais aux notions communes à nombre de textes constitutionnels européens. Elle s’attache directement à la construction du sujet en droit. Elle donne au système juridique une entrée, un moyen d’intégration, des particularismes individuels à la structure du sujet de droit qui en fait par principe abstraction. Cette notion, en associant liberté et personnalité, concourt à l’institution du sujet de droit. Le libre développement de la personnalité participe à la fois à l’assise d’un sujet de droit individuel adapté au mécanisme des droits fondamentaux et à la finalisation de ceux-ci. Il se révèle tout autant téléologique et institutif.

49En France il pourrait faire l’objet de développements prochains : soit dans le prolongement de la liberté personnelle soit en recourant au préambule de 1946 qui, en son alinéa 10, précise bien que « la Nation assure à l’individu et à la famille les conditions nécessaires à leur développement ». Une voie récente s’ouvre encore, celle de la Charte environnementale qui évoque dans son préambule « l’épanouissement de la personne ».

50S’il est un enseignement à tirer des trente dernières années de notre droit constitutionnel, n’est-ce pas que la Constitution ne se résume peut-être pas à une norme de limite « négative » de la loi. Le développement du bloc de constitutionnalité ne permet-il pas de la voir aussi comme une norme d’habilitation, d’incitation voire d’invitation du législateur en posant des objectifs de développement individuel ? La question de l’identité invite sans nul doute à rouvrir ce chapitre de la théorie constitutionnelle.

Notes

  • [1]
    Louis Favoreu, et al., Droit des libertés fondamentales, Dalloz, 2005,3e éd., 576 p.; voir par exemple l’atelier n°2 du Congrès de l’Association française de Droit constitutionnel dirigé par les professeurs Laurence Burgorgue-Larsen et Joseph Pini dont est issue cette livraison. Pour une approche générale Xavier Bioy et Stéphane Mouton, « Les (r)évolutions du droit constitutionnel, propos introductifs », in Regards critiques sur quelques (r)évolutions récentes du droit, J. Krynen et M. Theron (dir.), tome 2, coll. Les travaux de l’Institut fédératif de recherche, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 2005, p. 543.
  • [2]
    Mme Champeil-Desplats estime ainsi que cette probabilité est inversement proportionnelle au recours aux articles 2 et 4 DDHC pour fonder des droits constitutionnels de la personnalité, « Le code civil, source de principes fondamentaux reconnus par les lois de la République ? », in Code civil et constitution(s), sous la direction de M. Verpeaux, Economica-PUAM, coll. Droit public positif, 2005,126 p., p. 15.
  • [3]
    Éric Millard, Famille et droit public, LGDJ, 1995, Bibliothèque de droit public, tome 182, 502 p. et « La problématique des intérêts familiaux en droit public », Annales de l’Université des sciences sociales de Toulouse, 1996, p. 105; Hubert Alcaraz, « La notion de famille dans les jurisprudences constitutionnelles allemande, espagnole et française », Annuaire international de justice constitutionnelle, XV-1999, Paris, Economica- PUAM, 2000, p. 19-33.
  • [4]
    In « L’utilisation de principes législatifs du Code civil comme norme de référence dans le cadre du contrôle de constitutionnalité », in Code civil et constitution(s), op. cit., p. 29.
  • [5]
    Catherine Halpern et alii, Identité(s), l’individu, le groupe, la société, Éditions Sciences humaines, 2004,391 p.
  • [6]
    « Identification sociale, personnalisation et processus identitaires », in L’identité de la personne humaine, Étude de droit français et de droit comparé, sous la direction de Jacqueline Pousson-Petit, Bruylant, 2002,1001 p., p. 93.
  • [7]
    Le sentiment d’identité, préc., p. 9.
  • [8]
    Voir not. Daniel Gutmann, Le sentiment d’identité. Étude de droit des personnes et de la famille, thèse droit privé, LGDJ, Bibliothèque de droit privé, tome 327,2000,520 p.; Myriam Hunter-Henin, Pour une redéfinition du statut personnel, PUAM, 2004,601 p.; Valérie Sagne, L’identité de la personne humaine, thèse droit, Toulouse, 2003,452 p.
  • [9]
    André Roux, La protection de la vie privée dans les rapports entre l’État et les particuliers, Économica, coll. Droit public positif, 1983,279 p.
  • [10]
    Voir la thèse de Hubert Alcaraz, Le droit à l’intimité devant les juges constitutionnels français et espagnol, Université Paul Cézanne Aix-Marseille III.
  • [11]
    Ferdinand Mélin-Soucramanien, L’égalité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1997; Yaël Attal-Galy, Droits de l’homme et catégories d’individus, LGDJ, Bibliothèque de droit public, tome 237,2004,638 p.; Olivia Bui-Xuan, Le droit public français entre universalisme et différencialisme, Économica, Corpus Essais, 2004,535 p.
  • [12]
    Louis Favoreu, « La constitutionnalisation du droit », in L’unité du droit. Mélanges Roland Drago, Économica, 1996, p. 25; Christian Atias, « La civilisation du droit constitutionnel », et Jean-Yves Cherot, « Les rapports du droit civil et du droit constitutionnel, réponse à Ch. Atias », cette Revue, 1990, p. 435 et s.; Marc Frangi, Constitution et droit privé, les droits individuels et les droits économiques, Economica- PUAM, 1992; Stéphane Mouton, La constitutionnalisation du droit ; rationalisation du pouvoir et production normative, thèse droit, Toulouse, 1998.
  • [13]
    Philippe Blacher, « Droit constitutionnel et identité féminine », RA, n° 289, p. 38.
  • [14]
    Olivia Bui-Xuan, Le droit public français…, préc.
  • [15]
    CA, Paris, 24 février 1977, Defrénois, 1978, art. 31-590, p. 49.; D. 1978, Juris. p. 168, note Massip.
  • [16]
    TGI Lille, 28 septembre 1995, LPA, 8 août 1997, note Massip; D. 1997, p. 2, note Labbée.
  • [17]
    Jean-Jacques Lemouland, « Le choix du prénom et du nom en droit français », L’identité de la personne humaine, préc., p. 631.
  • [18]
    Op. cit., p. 321.
  • [19]
    Décision n° 90-283 DC du 8 janvier 1991, cons. 16,17,27,31.
  • [20]
    Michelle Gobert, « Le nom ou la redécouverte d’un masque », JCP, 1980, I, 2966.
  • [21]
    Alain Finkielkraut décrit, après Hannah Arendt le XXe siècle comme celui dont les guerres ont gommé le « nom », l’anonymat des guerres de ce siècle a nié la personnalité, le caractère unique de chacun, établissant le règne de l’un et du tout (in L’humanité perdue. Essai sur le XXe siècle, Éditions du Seuil, collection Points-Essai, 1996,169 p.).
  • [22]
    François Luchaire, « Les fondements constitutionnels du droit civil », préc., p. 258.
  • [23]
    Bertrand Mathieu, « Droit constitutionnel civil », p. 15; également Marc Frangi, Constitution et droit privé. Les droits individuels et les droits économiques, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1992,317 p.
  • [24]
    Voir les interventions de Sabine Corneloup et Thierry Di Manno in Code civil et constitution(s), précité, mais aussi Françoise Furkel, in L’identité de la personne humaine, préc., p. 671.
  • [25]
    Ord. n° 716,23 juin 1988. Citée par Th. Di Manno, op. cit., p. 112.
  • [26]
    Aff. 30 mars 1993, Konstantidinis ; CEDH, 22 février 1994, Burghartz c/Suisse, Série A, 250; 24 octobre 1996, Guillot c/France, RTDC 1997, p. 551, obs. Marguénaud (pour le prénom), 17 juin 2003, Mustafa c/France (pour le nom).
  • [27]
    CC, 80-127 DC du 19-20 janvier 1981, « Sécurité et liberté », RJC-I, p. 91.
  • [28]
    Louis Favoreu, « La constitutionnalisation du droit pénal et de la procédure pénale, vers un droit constitutionnel pénal », Mélanges André Vitu, Cujas, 1989, p. 169; Valérie Sommaco, « De quelques effets de la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur les décisions des cours et tribunaux en matière de protection de la liberté individuelle », Gaz. Pal., 27-29 juin 1999, p. 6; Agnès Sauviat, « Émergence et mérites de la constitutionnalisation du droit privé », LPA, n° 214,26 octobre 2000.
  • [29]
    Contra : Emmanuel Putman, « Contrôles d’identité des étrangers dans les zones frontières : les limites de la constitutionnalisation du droit répressif », Personnes et famille, n° 10, octobre 2001, p. 12.
  • [30]
    Annabelle Pena-Gaïa, Les rapports entre la liberté individuelle et la liberté d’aller et venir dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, thèse doct. droit, Aix-Marseille III, 1998.
  • [31]
    Déc. n° 93-323 du 5 août 1993, cons. n°9.
  • [32]
    Déc. n° 2003-467 DC, cette Revue, 56,2003, p. 760-764, note Olivier Lecucq; Dalloz, 2004 (18), pp. 1273-1274, note Séverine Nicot.
  • [33]
    Déc. n° 2004-504 DC, cons. n° 5, Les petites affiches, 15 septembre 2004 (185), p. 6-19, note Jean-Éric Schoettl.
  • [34]
    Voir Xavier Bioy, « Les crimes contre l’espèce humaine », in Stéphanie Hennette-Vauchez (dir.), Bioéthique, biopolitique et biodroit, LGDJ, coll. Droit et société, à paraître, 2005.
  • [35]
    Déc. 94-343/344 DC du 27 juillet 1994, cons. 8.
  • [36]
    « En cas de procréation médicalement assistée avec tiers donneur, aucun lien de filiation ne peut être établi entre l’auteur du don et l’enfant issu de la procréation ».
  • [37]
    Déc. Bioéthique, préc. cons. 16 et 17.
  • [38]
    Certaines jurisprudences étrangères n’ont pas fait ce choix. En Allemagne le juge constitutionnel a posé en 1989 et 1994 la connaissance des origines comme élément du libre développement de la personnalité : 31 janvier 1989 (contestation de filiation), 26 avril 1994 (condition de majorité).
  • [39]
    Le sentiment d’identité…, op. cit., p. 44.
  • [40]
    Cour constitutionnelle de Hongrie, Arrêt n° 57/1991, AB, cité in L. Tròcsànyl, « La jurisprudence constitutionnelle en Hongrie », in Verdussen (dir.), La justice en Europe centrale, Bruylant/ LGDJ, Centre d’études constitutionnelles et administratives, tome 12,1997, p. 73.
  • [41]
    Roberto Andorno, « Les droits nationaux européens face à la procréation médicalement assistée : primauté de la technique ou primauté de la personne », RIDC, 1994, p. 141.
  • [42]
    Cf. supra, réf. note 38.
  • [43]
    Dominique Schnapper, La relation à l’autre. Au cœur de la pensée sociologique, NRF, Essais Gallimard, 1998,562 p., part. chapitre I, « La pensée de la reconnaissance ».
  • [44]
    Il n’est pas besoin de revenir sur les grandes décisions qui servent de toile de fond à la position de principe contre les différencialismes des groupes, les décisions du 9 mai 1991 (Statut de la Corse), du 9 avril 1996 (Autonomie de la Polynésie française), et du 15 juin 1999 (Charte européenne des langues régionales ou minoritaires). La tradition universaliste s’opposerait à l’essor de revendications identitaires. Mais cette perception ne distingue pas les identités individuelles de l’expression des identités collectives. Cf. Ferdinand Mélin-Soucramanien, « Obs. sous CC, déc. n° 99-412 DC, Charte européenne des langues régionales ou minoritaires », sommaires commentés, D. 2000, n° 19, p. 198-199.
  • [45]
    L’identité a pu être qualifiée de « libératrice » (Raphaël Romi, L’étendue du droit des individus à la divergence, thèse, Toulouse I, 1981,837 p.).
  • [46]
    Cf. Michael Walzer, Sphères de justice - une défense du pluralisme et de l’égalité, Seuil, trad. Pascal Engel, 1997,475 p.
  • [47]
    « Le développement de la culture, sous ses formes les plus diverses, est perçu et présenté comme un moyen de favoriser l’insertion dans la société. L’identité culturelle est alors un aspect, ou un facteur de l’identité personnelle et de l’épanouissement personnel », Jean-Marie Pontier, « Les données juridiques de l’identité culturelle », RDP, 2000, p. 1280.
  • [48]
    Le recul de la conception restrictive de la laïcité dans la jurisprudence atteste d’une prise en compte publique des identités, rejoignant la consécration européenne de la religion comme partie intégrante de l’identité. Contre les identités religieuses, le Conseil répond « identité » de la France par la laïcité, voir Philippe Segur, « Le principe constitutionnel de laïcité », Annales de l’université des sciences sociales de Toulouse, 1997, p. 117.
  • [49]
    Il y a alors rupture entre la nationalité et le statut civil (Norbert Rouland, « Les statuts personnels et les droits coutumiers dans le droit constitutionnel français », in Droit constitutionnel local, Egalité et liberté locale dans la Constitution, Anne-Marie Le Pourhiet (dir.), Ass. Fr. des constitutionnalistes, Economica- PUAM, coll. Droit public positif, 1999, p. 145.
  • [50]
    « Les citoyens de la République qui n’ont pas le statut civil de droit commun, seul visé à l’article 34, conservent leur statut personnel tant qu’ils n’y ont pas renoncé ».
  • [51]
    On peut admettre que la généralité de la formule qu’emploie le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-412 du 15 juin 1999, Charte européenne des langues régionales ou minoritaires, peut s’opposer au développement des identités personnelles. Selon lui, la constitution s’oppose « à ce que soient reconnus des droits collectifs à quelque groupe que ce soit, défini par une communauté d’origine, de culture, de langue et de croyance ». Cependant, le refus de reconnaître des droits collectifs n’entrave qu’indirectement la protection de l’identité personnelle.
  • [52]
    Alain Boyer, « L’article 75 de la Constitution du 4 octobre 1958 : une limite à la constitutionnalisation du statut civil de droit commun ? », RRJ, 1994, n° 2, p. 387.
  • [53]
    CE, Ass. 11 juillet 1990, Min. Intérieur c/ Mme Montcho, Rec. p. 315; AJDA, 1980, 523, chron. Feffer et Pinault ; JCP, 1981, II-19629, concl. Rougevin-Baville ; R. adm., 1980, p. 607, note Bienvenu et Rials.
  • [54]
    Décision n° 93-325 DC du 13 août 1993.
  • [55]
    Décision n° 97-389 DC du 22 avril 1997, Loi portant diverses dispositions relatives à l’immigration et décision n° 2003-484 DC du 20 novembre 2003, Loi relative à la maîtrise de l’immigration, au séjour des étrangers en France et à la nationalité.
  • [56]
    Norbert Rouland, Stéphane Pierré-Caps, Jacques Poumarède, Droit de minorités et des peuples autochtones, PUF, Droit fondamental, 1996,581 p., p. 309 et s.
  • [57]
    La révision relative à la Nouvelle-Calédonie et le projet polynésien attestent de la place des droits culturels dans les instruments de droit public et ce non seulement pour les territoires les plus autonomes mais encore dans le cas des DOM (cf. not. Xavier Bioy, « Le droit de l’outre-mer à la recherche de ses catégories. A propos de la loi d’orientation du 13décembre 2000 », Revue de la recherche juridique - Droit prospectif, 2001, n° 4, p.1785-1811).
  • [58]
    Stéphane Garnieri, « Le droit constitutionnel et les discriminations fondées sur l’orientation sexuelle », cette Revue, n° 40-1999, p. 725 et 41-2000, p. 67.
  • [59]
    Marie-Claire Ponthoreau, « L’article 2 de la Constitution italienne et la concrétisation de droits non-écrits », AIJC, 1989, p. 97.
  • [60]
    « L’article 2 peut être tenu pour un principe général de protection de la personnalité humaine », idem, p. 115. Voir les analyses de Marie-Claire Ponthoreau, in La liberté personnelle, une autre conception de la liberté, sous la direction d’Henry Roussillon et Xavier Bioy, Presses de l’Université des sciences sociales de Toulouse, coll. de l’IFR, « Mutation des normes juridiques », à paraître en 2006.
  • [61]
    La Cour déclare à ce propos que « c’est un aspect et un facteur du développement de la personnalité. Corrélativement, les autres membres de la société sont tenus de le reconnaître par devoir de solidarité ».
  • [62]
    Même raisonnement in CEDH, 30 juillet 1998, Sheffield et Horsham c/ RU. Cette position fait désormais partie des attitudes les plus communes aux États d’Europe. Dès 1978, la Cour de Karlsruhe estimait que « la dignité humaine et le droit fondamental pour chacun de développer sa personnalité librement rendent impérative l’adaptation de la condition d’un individu au sexe auquel il appartient » (cité in Denis Salas, Sujet de chair et sujet de droit. La justice face au transsexualisme, PUF, coll. Les voies du droit, 1994). Elle précise que « l’article 1 (1) de la LF protège la dignité d’une personne telle que celle-ci se conçoit dans son individualité et sa conscience de soi. Cette protection est à rapprocher de l’idée que chacun est responsable de soi et contrôle sa propre destinée. L’article 2 (1) de la LF, combiné avec l’article 1 (1), garantit le libre développement des capacités et des atouts d’une personne. La dignité humaine et le droit constitutionnel au libre développement de la personnalité exigent donc que l’état civil d’un individu soit déterminé par le sexe auquel l’intéressé s’identifie psychologiquement et physiquement » (BerfGE, 49,286).
  • [63]
    6 novembre 1980, série A, vol. 40.
  • [64]
    Xavier Bioy, Le concept de personne humaine en droit public. Recherche sur le sujet des droits fondamentaux, « Nouvelle bibliothèque de thèses », Dalloz, Paris, 2003, tome 22, n° 1088 et s.
  • [65]
    Jacqueline Pousson-Petit, « Empreintes génétiques et filiation : les discordances et les incohérences juridiques », et Elisabeth Lajarthe, « L’identification biologique en matière pénale », in L’identité de la personne humaine, préc., p. 431 et 463.
  • [66]
    « Identifier la dignité humaine en chacun avec l’exemplaire du patrimoine génétique de l’espèce qu’il a hérité de ses parents serait nier en bloc l’unité de la personnalité (…) ce serait réduire l’ordre humain à un ordre biologique, comme lorsqu’on identifie la dignité d’un être humain avec sa vie ». Anne Fagot-Largeault, « Respect du patrimoine génétique et respect de la personne », Esprit, 1991, n° 91, p. 40.
  • [67]
    Alain Pariente, « La liberté personnelle dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel », Mélanges Lavroff, Dalloz, 2005, p. 260; Xavier Bioy, « Le libre développement de la personnalité en droit constitutionnel, essai de comparaison », RIDC, 2003, p. 123.
  • [68]
    Bertrand Mathieu, « Droit constitutionnel civil », Jurisclasseur administratif, 1997, Fascicule 1449,1990, p. 15.
  • [69]
    Rec. 119; RJC-I, p. 334; Pouvoirs, n° 48,1989, p. 185, chron. Avril et Gicquel ; RDP, 1989, n° 2, p. 399, note Louis Favoreu.
  • [70]
    Rec. 59, RJC-I, p. 358, AIJC, 1989, p. 488, chron. Bruno Genevois.
  • [71]
    Rec. p. 91, RJC-I, p. 455, cette Revue, 1991, n° 8, p. 703, chron. Patrick Gaïa.
  • [72]
    Cons. n° 49.
  • [73]
    RJC-I, p 516; cette Revue, 1993, n° 14, p. 375, chron. Favoreu, Frayssinet, Philippe, Renoux, Roux ; LPA, 2 juin 1993, n° 43, p. 4, chron. Mathieu et Verpeaux ; RFDA, 1993, n° 5, p. 902, note Pouyaud.
  • [74]
    2003-484 DC, Les petites affiches, 27 décembre 2004 (258), p. 5-8, note Bertrand Mathieu et Laeticia Janicot ; Dalloz, 2004 (20), p. 1405-1408, note Olivier Lecucq.
  • [75]
    Voir La liberté personnelle, une autre conception de la liberté, préc. note 60.
  • [76]
    Xavier Bioy, « Le libre développement de la personnalité », préc. note 67.
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