Quand Stéphane Rials m’a proposé de prendre position sur Carl Schmitt à propos de la controverse née l’an dernier, lors de la publication du Léviathan et poursuivie depuis, en raison notamment de la publication dans la revue Cités de certains de ses articles datant de sa période nazie, j’ai été partagé – on me pardonnera, je l’espère, de m’exprimer ici à la première personne du singulier – entre des sentiments contradictoires. D’un côté, je n’avais plus envie de me replonger dans cet auteur, sur lequel j’avais certes beaucoup travaillé, parce que cela m’obligerait à délaisser des travaux en cours sur lesquels je voulais me concentrer. Mais d’un autre côté, la vigueur et l’importance de la controverse semblaient m’imposer de prendre position puisque, à la différence de Stéphane Rials qui fut seulement son éditeur, je fus, en tant que préfacier de la Verfassungslehre
, l’un de ceux qui contribuèrent à la réception de l’œuvre juridique de Carl Schmitt en France, ce qu’on pourrait me reprocher aujourd’hui en estimant que j’aurais ainsi participé à la reconnaissance d’un auteur nazi. Cette dernière considération m’a convaincu de tenter de clarifier – si ce n’était pas suffisamment clair auparavant – ma position à l’égard d’un auteur aussi suspect.
Le soupçon d’avoir contribué à la diffusion d’une pensée qui serait “ authentiquement ” ou “ potentiellement ” nazie me trouble beaucoup, tant cette idéologie est aux antipodes de ma vision du monde et de mes idées politiques. Mais avouer ce trouble ne répond pas à la question de savoir si le fait d’avoir diffusé en France la pensée schmittienne est compatible avec le sentiment de la responsabilité que tout auteur – que ce soit un homme de lettres ou un “ universitaire ” – devrait avoir pour ses propres écrits…
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