Notes
-
[1]
O. Douville, « Adolescence entre errance et métamorphose », intervention au Congrès Adolescence et métamorphose, le 9 décembre 2009, Bruxelles.
-
[2]
Par exemple, R. Cahn, dans Adolescence et folie (Paris, Puf, 2004), décrit la « problématique » centrale de l’adolescence comme une « catastrophe psychotique » émaillée de liaisons/déliaisons. D’autres parlent d’une « tentative de forclusion propre à cet âge » (C. Melman)…
-
[3]
S. Freud (1905), Trois essais sur la théorie sexuelle, Paris, Folio, Gallimard, 1987.
-
[4]
J.-C. Maleval, « Le déclenchement de la psychose lors de la période post-pubertaire », dans Structure en psychopathologie : psychose et déclenchement, Les cahiers de cliniques psychologiques, 1993, n° 19, Rennes, université de Haute-Bretagne, p. 26.
-
[5]
F. Sauvagnat, « L’entrée dans la psychose à l’adolescence : perspectives et enjeux théoriques », dans Structure en psychopathologie, op. cit., p. 31-38. Des études montrent que seulement un tiers des sujets psychotiques sont détectés lors de la première consultation. Malgré cela, des signes précurseurs de l’entrée dans la psychose au moment de l’adolescence peuvent être identifiés : antécédents, « tréma » et prodromes d’allures psychopathiques, ou prodromes et « avant-postes » négatifs, perplexité angoissée…
-
[6]
W. Blankenburg (1971), La perte de l’évidence naturelle, Paris, Puf, 1991.
-
[7]
Cette « boussole », c’est le rapport à l’œdipe et à sa forclusion : le signifiant de la loi n’étant pas introjecté, dans la psychose, le sujet se doit d’en passer par autre chose pour soutenir son existence.
-
[8]
Sullivan, Blos, Laufer. Dans des travaux récents, ce dernier récuse l’extension abusive du terme de « psychose » pour qualifier les « troubles de l’adolescence » (1966).
-
[9]
M. Katan, « Aspects structuraux d’un cas de schizophrénie », Les psychoses, revue La psychanalyse, Paris, Puf, n° 4, 1958.
-
[10]
Ce travail de suivi psychologique fait suite à un travail thérapeutique de groupe à partir de la médiation des contes. Cet atelier est animé conjointement par une psychologue clinicienne et une éducatrice spécialisée. Le groupe accueille de quatre à cinq enfants.
-
[11]
Elle va faire, en parallèle, une demande urgente à un pédopsychiatre. Un déplacement dans la demande va se produire ; elle évoque les difficultés de son fils, auprès du médecin, comme liées à la séparation du couple.
-
[12]
Maison des adolescents.
-
[13]
La voix comme premier objet d’investissement maternel.
-
[14]
F. Sauvagnat, op. cit., p. 37.
-
[15]
Lors d’un repas éducatif extérieur, il a mis 10 minutes à se positionner sur un lieu de restauration.
-
[16]
« On m’a pas dit ! » verbalise-t-il, en parlant de sa mère.
-
[17]
Mes explications passent par la réalisation de schémas. Il demande toujours à repartir avec les feuilles annotées.
« Les mots savent de nous des choses que nous ignorons d’eux. »
1L’adolescence est une période charnière dans la vie d’un individu. Des bouleversements émotionnels, corporels, biologiques et hormonaux nécessitent, pour ceux qui en sont l’objet, un réaménagement des investissements libidinaux, et subjectifs. Cette période peut apporter un tel chamboulement affectif, social et sexuel que certains cliniciens parlent de l’adolescence comme d’une métamorphose régulée par le « grand carrousel des émotions et des inclinaisons érotiques [1] ».
2Entre Charybde et Scylla, la navigation de l’adolescent n’est pas sans risque. Coincé entre ces deux monstres mythiques, il peut être avalé ou repoussé contre les rochers : la boussole n’indique pas toujours le cap à prendre. Des décompensations psychiques peuvent avoir lieu en ce temps de reconstruction subjective.
3Mais la période de l’adolescence peut être aussi une période féconde, source de créativité.
4Nous verrons à partir de la rencontre avec un jeune adolescent comment nous pouvons nous saisir de ses productions pour l’accompagner dans son traitement. Grâce à un « travail à plusieurs » et à l’adhésion de la famille, les enjeux du mal-être de ce jeune ont pu être analysés et… ont pu s’apaiser progressivement.
L’adolescence : entre impasse subjective et créativité
5La période de l’adolescence est l’objet de nombreuses controverses de la part des chercheurs [2]. Avant d’ouvrir notre propos, il convient ici de préciser que l’adolescence n’est pas un concept psychanalytique ; ce passage entre l’enfance et l’âge adulte n’apporte pas toujours une « crise psychique » censée caractériser un « phénomène adolescent ».
6La « crise d’adolescence » n’est donc pas systématique, ni universelle. Les psychanalystes en font l’étude à partir de ce qui pourrait la spécifier quant aux mutations du désir qu’elle produit. À partir des Trois essais, Freud s’oriente vers les conséquences de la puberté chez le sujet adolescent ; considérant les modifications corporelles et psychiques comme secondaires, il met plutôt l’accent sur l’adolescence comme réactualisation d’une problématique antérieure. Il n’appréhende pas cette période comme l’effet d’une poussée endocrinologique susceptible de générer un « état de folie pulsionnelle », mais comme « un temps faisant intervenir un processus d’après-coup [3] ». En effet, les gestes de tendresse les plus banals peuvent prendre soudainement un sens nouveau. Avec la puberté, ils peuvent être chargés d’une valeur sexuelle. C’est le « dépassement » de la dialectique œdipienne (par l’introjection de la loi) qui permettra au sujet de se constituer une « barrière contre l’inceste ». Dans le cas contraire, celui-ci restera livré à la jouissance de l’Autre, ce qui peut réactiver des décompensations ou le retour de phénomènes élémentaires envahissants.
7La théorie freudienne est très claire sur ce point ; d’un côté, un enfant, de l’autre, un adulte (portant en lui de « l’enfant »), et entre les deux, la puberté ; la période pubertaire étant ce moment où le désir se décide, en fonction des potentialités déjà inscrites dans la structure. Ce moment peut être fructueux, créatif pour certains. Mais il peut être ravageant pour d’autres…
Décompensations psychotiques et adolescence
8En matière d’observations cliniques, il est reconnu que cette période de la puberté s’avère particulièrement propice au déclenchement de la psychose. En effet, durant cette transition entre le statut d’enfant et celui d’adulte, le sujet fait l’expérience de l’appel pubertaire à la jouissance. En fonction de ses modalités d’ancrages œdipiens, l’adolescent peut être l’objet de l’éclosion de troubles psychotiques : « […] d’abord parce qu’elle constitue une période lors de laquelle s’impose un appel à la jouissance, mais aussi parce qu’elle fait du sujet un objet sexuel potentiel, et parce qu’elle incite à des choix existentiels [4]. » L’adolescent en grandes difficultés psychologiques peut se révéler comme une triple énigme pour son entourage ; soit celui-ci ne peut livrer un vécu douloureux et indéfinissable, soit l’avancée du diagnostic en lui-même est compliqué au regard des symptômes psychiatriques, lesquels se présentent de façon informe et instable à cet âge-là. Soit le professionnel hésite à poser un diagnostic de psychose de peur de stigmatiser un jeune et sa famille. Pourtant, l’ébauche d’un diagnostic en termes structuraux permettrait d’authentifier le vécu énigmatique de l’adolescent psychotique afin de procéder à un traitement adéquat [5].
9Ce que le courant phénoménologique a décrit comme « perte de la stance », en essayant de rendre compte des phénomènes déficitaires (ou hébéphréniques) au moment de l’entrée dans la psychose, est une conception très proche de l’orientation psychanalytique. La perplexité ressentie par le sujet arrivé devant « le trou », l’abîme, ressemble à ce que Lacan décrit en termes de forclusion. L’exemple d’Anna Rau témoigne de ce que cette « perte de l’évidence naturelle » peut engendrer chez un sujet ; elle explique qu’il lui a manqué « des bases » pour « savoir comment l’on devient adulte ». Elle ne peut pas s’animer sauf à être directement connectée au désir de sa mère : « Quand maman vient, alors ça a simplement du sens. » Elle a passé le plus clair de son temps à éviter les amusements, et la fréquentation des jeunes de son âge. Cela met en évidence le souci précoce et constant de la patiente d’éviter toute confrontation avec le désir sexuel. Anna Rau fait preuve d’un savoir inconscient qui la détermine comme sujet et qui oriente ses actes [6].
10L’absence d’une fonction fondamentale, œuvrant comme boussole, dans la psychose rend (parfois) le sujet dans l’impossibilité d’assumer des choses élémentaires de la vie, comme assouvir des désirs d’autonomie, rencontrer un partenaire amoureux, parler en son nom propre [7].
11Depuis les années 1950, il existe une tendance à concevoir la « crise de l’adolescence » comme le produit de troubles psychotiques [8]. La psychanalyse a toujours eu à cœur de repérer ce qu’il en est des phénomènes psychotiques authentiques, à partir d’une approche structurale. Cette démarche rigoureuse nous permet (malgré le caractère inquiétant d’un tel diagnostic) d’affiner la lecture clinique des coordonnées subjectives du symptôme afin d’en dégager les types de suppléances possibles, dans chaque cas.
12François Sauvagnat nous explique qu’il en existe trois sortes : la suppléance réelle (les toxicomanies, les jeux de hasard, ainsi que les diverses formes de passage à l’acte) ; les suppléances (symboliques) par le délire ou l’écriture. La systématisation d’un délire autour d’un persécuteur vise une tentative d’autoguérison chez le psychotique. L’ordonnancement du délire ou la création d’œuvres artistiques permettent de contrer les phénomènes élémentaires ; enfin, les suppléances imaginaires de style « personnalités comme si » (Hélène Deutsch) permettent au sujet de n’avoir pas à parler en son nom propre. Le cas le plus connu d’une stabilisation prépsychotique est celui de Maurits Katan. Le psychiatre raconte le cas d’un adolescent qui s’est maintenu dans l’existence grâce à l’identification « trait pour trait » à un camarade de son âge. Suite à la rupture de ce lien, l’adolescent décompense d’une façon spectaculaire [9].
Léal et la voix
13Léal a 12 ans lorsque je le rencontre pour la première fois en entretien individuel [10]. La demande émane de l’équipe pluridisciplinaire du sessad (Service d’éducation spécialisée et de soins à domicile) et de ses parents. Peu avant les vacances d’été, la mère demande que son fils soit reçu en entretien psychologique d’urgence. Une séparation brutale et conflictuelle du couple semble être à l’origine de son mal-être. Dans un état de grande panique, la mère m’interpelle pour me signifier qu’il s’est passé « un événement grave ». Sans comprendre les enjeux de cet événement, j’entends qu’il est question d’un acte « sexualisé » posé à l’égard d’une jeune fille. Le discours de la mère reste flou sur les circonstances du déclenchement, et sur la nature de l’acte en lui-même. La discussion a lieu, sur le trottoir, en raccompagnant Léal après son rendez-vous. J’invite alors la mère à venir en parler au cours d’une rencontre au service, avec son fils. La rencontre aura bien lieu mais la mère, pressée, me signifie d’emblée qu’elle doit accompagner Léal au foot. La discussion est écourtée, faisant, ainsi, fi de l’événement, et la question sexuelle s’inscrit comme « non-dit [11] ».
14Plusieurs mois après, elle interpelle, à nouveau, la mda [12] autour d’un « incident ». Rentrée plus tôt de son travail, elle trouve son fils seul dans la maison. Dans le jardin, des bonbons de couleurs vives sont éparpillés. Léal précisera à sa mère qu’il croyait que les bonbons étaient périmés et qu’il entend une voix.
15Une rencontre avec l’infirmier et le médecin pédopsychiatre qui suit périodiquement Léal à la mda me permettra de mieux comprendre la problématique de ce jeune adolescent. Des signes cliniques de la psychose sont repérables : lenteur excessive, fixité du regard, immuabilité, arrêt dans le processus de pensée. De plus, il semble y avoir un retour de la pulsion invoquante [13] dans le réel, c’est-à-dire sous la forme d’hallucinations auditives. Léal me précisera ce que dit la voix : « Elle a dit balance. » Alors Léal, asservi à cette injonction, a jeté les bonbons.
16S’agit-il, ici, d’une décompensation ? A-t-il obéi compulsivement à l’ordre qui lui a été donné par la voix ? Ou bien, dans l’éparpillement des bonbons, y a-t-il un mode opératoire ? A-t-il suivi scrupuleusement les directives d’un délire ?…
17François Sauvagnat nous explique que les phénomènes psychotiques premiers se présentent souvent sous une forme énigmatique qui s’impose au sujet. De l’extérieur, ils peuvent être difficilement distinguables d’un changement d’humeur. Le sujet reste peu enclin à en parler : « Dans beaucoup de cas, ces phénomènes élémentaires apparaissent comme des “non-sens” qui néanmoins, lorsqu’ils se cristallisent dans un signifiant “dans le réel”, provoqueront certains effets de signification susceptibles de s’organiser dans un délire. » L’auteur cite, à ce propos, une jeune fille qui entend une voix lui dire « sors ! ». Quelque temps après, elle développe un délire dans lequel elle dit être possédée par des « sorts [14] ».
Tempo
18L’adolescent est accueilli en ulis (Unité localisée pour l’inclusion scolaire) dans un collège. Quelques intégrations, avec une auxiliaire de vie scolaire, ont lieu dans un groupe piscine en 6e segpa et 6e « ordinaire ». L’enseignante qui le suivait déjà l’année précédente le présente comme un enfant motivé mais « paumé », submergé par les conflits parentaux liés à la séparation du couple. La garde alternée ne facilite pas l’organisation de Léal. Des difficultés cognitives sont à l’origine de son retard scolaire. Sur un plan relationnel, le garçon semble isolé. Son éducatrice du sessad me signale une inhibition dans des situations de groupe (au début), des attitudes de « toute-puissance », un discours parfois « dégradant » sur les femmes, et une difficulté à faire des choix [15]. L’adolescent développe une fascination adhésive pour la déviance de certains camarades. Il cherche à s’affirmer par la « violence », par l’opposition : « Je veux devenir méchant ! », dit-il.
19Des « bizarreries comportementales » sont à noter, comme une lenteur excessive, une paralysie face à certains changements [16], un arrêt soudain dans le processus de l’action. Par exemple, en « atelier pâtisserie », il peut exécuter la première consigne mais ne peut enchaîner sur les consignes suivantes sans aide de l’adulte. Il reste comme « bloqué » dans son mouvement.
20En entretien psychologique, l’adolescent progresse tranquillement et toujours sur le même « tempo » ; d’abord sur la réserve, il semble évaluer la situation, puis se lance au bout de quelques minutes. Malgré une inhibition majeure, Léal peut s’appuyer sur une relation de confiance pour extraire ses propres questions. Très souvent, il a besoin d’en passer par une explication ou un support concret pour pouvoir se représenter les choses et l’organisation du monde qui l’entoure [17]. En parallèle, l’éducatrice travaille avec un support-planning regroupant toutes ses activités de semaine. Ce support lui permet de « ramasser » les différents morceaux de vie en visualisant les différents lieux, et d’avoir ainsi une prise sur les événements à venir.
« Le foot, c’est sa passion »
21Léal arrivait en retard tous les matins au collège ; sa mère étant obligée de l’accompagner jusqu’à sa classe car il ne voulait pas traverser l’accueil, la grille de la cour étant fermée. Aujourd’hui, il peut le faire seul. De plus, il vient seul en bus à ses entretiens psychologiques au sessad. Dans cet espace, le garçon s’est construit une solution « originale » pour faire face à un retour intempestif de la jouissance dans le réel. Pour parer au retour des hallucinations, l’adolescent a élaboré un savoir consistant sur un jeu collectif. Les règles, dont il se fait le gardien invétéré, lui permettent de réguler ses rapports à l’Autre. Par l’entremise d’un respect rigide de celles-ci et d’un quadrillage des joueurs sur le terrain, il opère une mise à distance du désir de l’Autre susceptible de l’angoisser massivement.
22« Le foot, c’est sa passion ! », m’avait dit son éducatrice référente en début de travail ; indication clinique majeure dont je me servirai largement dans le travail thérapeutique de Léal.
23Aujourd’hui, Léal commence à s’intéresser aux autres enfants. Il dit avoir des « copains ». Nous savons la fonction soutenante que peuvent revêtir les identifications conformistes aux petits autres dans la psychose : mise à l’écart de la question sexuelle et évitement de devoir prendre la parole en son nom. Ici, les copains dont nous parle Léal (à la différence de l’année dernière) sont des élèves moins happés par les « débordements », et plus stables dans leur rapport à l’autorité.
24Deux axes de travail principaux vont nous orienter auprès de cet adolescent en grande difficulté ; l’un consiste à lui apporter un contenant de pensée dans la réalité, et le second contribue à le réinscrire dans une logique où il y a de l’Autre. C’est à partir d’un « travail à plusieurs » que nous pouvons faire circuler de la parole, du signifiant susceptible de lui indiquer qu’une relation est faite d’altérité. Se faire « partenaire » du sujet psychotique implique non seulement de pouvoir relever rigoureusement la position subjective d’un parlêtre, mais aussi de travailler à partir d’un désir. C’est par l’expérimentation de ce désir (trouvé chez le professionnel) qu’un sujet « vide », inconsistant, peut être réanimé psychiquement.
Des bonbons et des hommes
25L’adolescence peut être caractérisée comme la période où s’offre au sujet une grande variété de réponses possibles au surgissement de ce réel propre à la puberté. Ce réel de la puberté, c’est l’irruption d’une situation « nouvelle » marquée par un non-savoir sur le sexe, et à laquelle le sujet se doit d’inventer une réponse. En tant qu’être parlant, il aura à innover ce savoir en fonction de ce qu’il est ; cette réponse sera différente pour chacun. Léal, lui, invente sa manière d’être par l’entremise d’un discours sur la connaissance des règles d’un jeu collectif afin de « border » les angoisses internes liées à la rencontre intersubjective, et en particulier avec l’autre sexe. Un nouveau type de lien social est réinventé, lui permettant d’être admis dans un collectif à partir d’un savoir codé sur les règles de ce jeu (arbitre, coup franc, corner, etc.). Ce savoir produit lui autorise la contention des débordements auxquels il a affaire. D’autre part, l’analyse « à plusieurs » de cette situation nous permet de concevoir, avec lui et avec sa famille, son inscription dans un établissement de type impro pour la nouvelle année. L’établissement spécialisé est pensé, ici, comme « abri », au vu de la fragilité psychique du jeune adolescent.
26Concevoir « l’adolescence » au-delà de ses effets imaginaires permet de repérer la position subjective de chacun des sujets, d’entreprendre l’élaboration d’un diagnostic et d’y rechercher les possibilités de suppléances, le cas échéant. C’est ce « travail à plusieurs » concernant l’écoute de la subjectivité qui permet d’amorcer un travail d’élaboration chez nos jeunes « patients » en mesurant les effets d’une « pluralisation du transfert » dans le cas de certaines pathologies graves.
27Depuis le début de l’écriture de ce texte, Léal nous fait penser au héros du roman de John Steinbeck Des souris et des hommes. Lennie, le personnage principal, est, de par ses modalités d’inscription subjective dans l’existence, le prototype même de cette adolescence interminable, symptôme de notre époque contemporaine.
28« Des bonbons » faisant retour dans le réel, pour Léal, d’une question non symbolisée, celle d’un non-savoir sur la relation à l’Autre. Le savoir (inconscient) de cet adolescent psychotique concerne la rencontre sexuelle, laquelle est pour lui une rencontre traumatique.
Notes
-
[1]
O. Douville, « Adolescence entre errance et métamorphose », intervention au Congrès Adolescence et métamorphose, le 9 décembre 2009, Bruxelles.
-
[2]
Par exemple, R. Cahn, dans Adolescence et folie (Paris, Puf, 2004), décrit la « problématique » centrale de l’adolescence comme une « catastrophe psychotique » émaillée de liaisons/déliaisons. D’autres parlent d’une « tentative de forclusion propre à cet âge » (C. Melman)…
-
[3]
S. Freud (1905), Trois essais sur la théorie sexuelle, Paris, Folio, Gallimard, 1987.
-
[4]
J.-C. Maleval, « Le déclenchement de la psychose lors de la période post-pubertaire », dans Structure en psychopathologie : psychose et déclenchement, Les cahiers de cliniques psychologiques, 1993, n° 19, Rennes, université de Haute-Bretagne, p. 26.
-
[5]
F. Sauvagnat, « L’entrée dans la psychose à l’adolescence : perspectives et enjeux théoriques », dans Structure en psychopathologie, op. cit., p. 31-38. Des études montrent que seulement un tiers des sujets psychotiques sont détectés lors de la première consultation. Malgré cela, des signes précurseurs de l’entrée dans la psychose au moment de l’adolescence peuvent être identifiés : antécédents, « tréma » et prodromes d’allures psychopathiques, ou prodromes et « avant-postes » négatifs, perplexité angoissée…
-
[6]
W. Blankenburg (1971), La perte de l’évidence naturelle, Paris, Puf, 1991.
-
[7]
Cette « boussole », c’est le rapport à l’œdipe et à sa forclusion : le signifiant de la loi n’étant pas introjecté, dans la psychose, le sujet se doit d’en passer par autre chose pour soutenir son existence.
-
[8]
Sullivan, Blos, Laufer. Dans des travaux récents, ce dernier récuse l’extension abusive du terme de « psychose » pour qualifier les « troubles de l’adolescence » (1966).
-
[9]
M. Katan, « Aspects structuraux d’un cas de schizophrénie », Les psychoses, revue La psychanalyse, Paris, Puf, n° 4, 1958.
-
[10]
Ce travail de suivi psychologique fait suite à un travail thérapeutique de groupe à partir de la médiation des contes. Cet atelier est animé conjointement par une psychologue clinicienne et une éducatrice spécialisée. Le groupe accueille de quatre à cinq enfants.
-
[11]
Elle va faire, en parallèle, une demande urgente à un pédopsychiatre. Un déplacement dans la demande va se produire ; elle évoque les difficultés de son fils, auprès du médecin, comme liées à la séparation du couple.
-
[12]
Maison des adolescents.
-
[13]
La voix comme premier objet d’investissement maternel.
-
[14]
F. Sauvagnat, op. cit., p. 37.
-
[15]
Lors d’un repas éducatif extérieur, il a mis 10 minutes à se positionner sur un lieu de restauration.
-
[16]
« On m’a pas dit ! » verbalise-t-il, en parlant de sa mère.
-
[17]
Mes explications passent par la réalisation de schémas. Il demande toujours à repartir avec les feuilles annotées.