Le cinéma de Benning ne vient jamais à nous ; c’est plutôt nous qui décidons d’aller vers lui. Tout comme le spectateur doit voyager, parfois avec effort et esquivant les difficultés, en vue de pouvoir contempler des œuvres de land art imaginées dans des espaces naturels lointains ou retirés, l’œuvre de James Benning attend le voyageur, bien souvent dans un lieu isolé (pays, festival, cinémathèque), impassible et évocatrice, tout comme la butte du mont Ventoux attendait Pétrarque. En ces temps d’images domestiquées et répétées ad infinitum, l’idée que Benning se fait du cinéma est celle d’un événement authentique : un devenir présent, unique, comme un événement éphémère où le film s’use physiquement, cesse progressivement d’exister à nos yeux.
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Le plus court chemin pour comprendre Benning s’ouvre avec Maya Deren et aboutit au structuralisme, en passant par le minimalisme, Michael Snow et Hollis Frampton, sans jamais délaisser le territoire de l’avant-garde américaine défini par P.Adam Sitney dans Visionary Film. Toutefois, comme aimait le dire Flaherty, le cinéma est bien souvent le chemin le plus long entre deux points. Et c’est la question. Il faut avant tout préciser qu’il y a plusieurs Benning en Benning. Et, aussi, qu’on attend toujours un travail herméneutique, critique, pour le sauver des clichés et lui donner la place centrale qu’il mérite dans le cinéma contemporain. L’intention de ce texte n’est donc pas de fixer des certitudes ni des lignes droites ; elle est purement exploratoire et intuitive…