Sait-on jamais quand précisément un écrivain a commencé à devenir écrivain ? Pour Matéo Maximoff (1917-1999), la chose pourrait pourtant être datée assez précisément. Et voici comment cette histoire littéraire commence : le 6 septembre 1938, Maximoff, qui est devenu orphelin de père et de mère, rend visite à sa famille maternelle à Charbonnier-les-Mines près d’Issoire (Puy-de-Dôme). Là, il se trouve pris au cœur d’une échauffourée familiale très violente faisant trois morts, et passe trois mois et demi en prison en préventive (jusqu’à un non-lieu). Son avocat, stagiaire, est un certain Jacques Isorni. Découvrant par hasard que son client sait non seulement lire, écrire et compter, mais aussi conter, c’est lui qui l’encouragera de façon répétée et sur plusieurs années à écrire, et lui qui l’introduira chez un éditeur. Maximoff en témoigne dans son journal intime, à ce jour inédit (consultable à la médiathèque de la Fnasat). C’est ainsi que paraît huit ans plus tard chez Flammarion le résultat de sa rédaction carcérale, Les Ursitory, le premier livre de celui qui est devenu ce qu’il avait en somme toujours été : l’écrivain Matéo Maximoff. Gérard Gartner a une formule heureuse à propos de la publication des Ursitory par Maximoff : « Tu écris ton premier ouvrage comme on lance un cri. » (Carnets de route, p. 60)
Il est très étonnant, pour ne pas dire extraordinaire, que Maximoff ait choisi la voie de l’écriture. Cette voie, sacerdotale, peut aller de soi dans un contexte familial fort lettré, mais elle est d’autant plus remarquable quand le contexte familial est illettré voire analphabète…