Depuis la Renaissance, la propension à la délinquance selon les divers états de pauvreté a fait l’objet d’une abondante littérature. Le gueux ordinaire était considéré comme un cas typique de servitude volontaire décrite par La Boétie, que dénonçait à son tour Antoine de Montchrestien. Il devenait un coupable en acte, un Français déchu de sa franchise native. La mobilité était un facteur aggravant et les textes de la pratique judiciaire suggéraient un accouplement obligé entre le vagabondage et la criminalité. Si la nécessité temporaire pouvait justifier la mise en route, la « fainéantise » favorisait la volonté de vivre sur le pays au détriment du bien et de la sécurité d’autrui (Geremek, 1991). Parmi les vagabonds d’habitude, les légistes insistaient sur le rôle des « Bohémiens ou Egyptiens » qui couraient le pays et seraient les champions de l’errance agressive (Geremek, 1992). Leurs bandes devaient être soumises à une étroite surveillance, d’autant que les femmes s’exerçant au « métier de bohémienne », offrait un commerce tentateur au peuple crédule.
Cependant la législation royale édictée contre les Bohémiens s’inscrit dans un registre plus complexe que la répression du vagabondage (Asséo, 1974 ; 1996 ; 2008). Les « mesnages d’Egyptiens ou Boesmiens » étaient attachés à un corps d’armée ou bien au service particulier d’un noble belliqueux. Ils furent accueillis ou révoqués comme compagnies militaires selon des lignes mouvantes des troubles de guerre. Depuis le premier édit de François …