Notes
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[1]
Poète, qui trouva la mort à l’âge de vingt-neuf ans, le 10 avril 1917, dans une tranchée du bois d’Urvilliers; ses restes furent ramenés dans l’île de Groix, sa terre natale.
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[2]
Cette part d’énigme de l’amour n’empêche pas, certes, la recherche, et même elle la stimule, mais cette recherche, y compris dans les travaux neurophysiologiques les plus récents, ne saurait avoir ici justement le dernier mot, réduite qu’elle se trouve alors à ignorer la langue, et se cantonnant donc, pour ce qu’il en est de l’amour, à un agréable divertissement scientifique. Pour preuve, je rapporterai ce mot d’un chercheur estimé, spécialiste des passions, qui dans une interview récente déclarait : « Ma seule psychanalyste a été une guenon. » On ne saurait mieux dire… non pas tant à vouloir réduire l’amour à des processus biochimiques – ce que d’ailleurs le chercheur en question ne fait pas – qu’à refuser que la psychanalyse puisse revendiquer un « paradigme à part du savoir » (18). Parmi les auteurs qui se sont exprimés récemment à ce sujet, je citerai Jean Guillaumin : La psychanalyse, un nouveau modèle pour la science.
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[3]
Je pense à Lacan et à son commentaire du Banquet de Platon, à François Perrier et à son séminaire sur l’amour, dans La chaussée d’Antin, à Christian David, L’état amoureux, et aux études plus récentes de J.-C. Lavie, L’amour est un crime parfait, ou de J.-C. Rolland, Guérir du mal d’aimer.
O doustér en overenneu en ur chapel Ur chapelig didrous ar vezeu Breiz-Yzel.
(Ô douceur de l’Office dans une chapelle Une petite chapelle silencieuse dans la campagne bretonne…)
1Cet extrait du recueil Ar en deulin du poète Jean-Pierre Calloc’h chante l’amour, l’amour du pays natal, celui de l’enfance, les premières amours, dans un dialecte aujourd’hui disparu dont j’ai désiré vous transmettre l’incomparable douceur – dialecte d’une langue qui, d’avoir été un jour interdite, est elle-même en voie de perdition (3). En détruisant la langue, il y a un siècle, les hommes politiques, aidés en cela par des puissances économiques désireuses de mettre fin au pouvoir clérical, ignoraient qu’ils détruisaient du même coup, dans une communauté, une certaine façon de penser, et de dire, l’intime de l’amour. Il est vrai que la communauté des amants est inavouable (1). Mais avant de se perdre, la langue allait survivre quelque temps dans les conversations à voix basse dont les enfants étaient exclus. Et ces enfants-là, entre violence et douceur, devaient développer plus tard des symptômes bizarres dont l’un d’entre eux fut que le pays se mit à fabriquer des agrégés de grammaire ou de langues mortes comme le latin et le grec, dans une proportion nettement supérieure à la moyenne nationale.
2Aujourd’hui, j’aimerais que ces deux vers du dialecte vannetais ne soient pas seulement une citation introductive convenue, mais l’exemple même de la chose : ici, l’amour de la langue et l’amour des mots lorsque ceux-ci, au-delà de leur valeur communicative, sont porteurs d’une adresse et peuvent se mettre alors à dire l’amour. Et l’amour, fait de pertes et de retrouvailles, est d’abord dépaysement.
3Bien sûr, l’amour du pays natal, la nostalgie de la langue perdue, avec ses locutions familières et son accent, sont autant de traces qui témoignent de la difficulté qu’il y a à se distancer des premiers objets d’amour, difficulté que peut traduire une résistance particulière à l’analyse par l’attachement à une identité d’origine. La problématique œdipienne – à condition de ne pas la réduire à un mythe naïf – révèlera l’envers du décor : et avec l’éclosion de la haine meurtrière, adieu alors la douceur des mots et des choses. Le travail de la cure en démasquant la duplicité et l’ambivalence pourra engendrer des mobilisations, des changements et pour tout dire des transferts au sens même où ceux-ci ont d’abord été inscrits par Freud dans le domaine langagier puisque comparés à de nouvelles éditions (8). Les mots, porteurs des choses, témoins de l’histoire, des histoires, ont toujours su voyager. Leur musique, et la mélodie qui naît de leurs rencontres imprévues permet que l’on puisse entendre parfois quelque chose que l’on peut d’abord ne pas comprendre. Ainsi en serait-il de l’amour, cette « force mystérieuse, indécomposable analytiquement » dit Freud, donc intraduisible et sans doute ininterprétable. [2]
4Mais pourquoi, de mon côté, à propos de l’amour cet attrait pour les mots d’une langue étrangère, au point d’avoir voulu faire partager mon plaisir et mon interrogation ? « Il en est d’un écrit comme d’un rêve ou d’un transfert », écrit J.-B. Pontalis dans La force d’attraction, livre qu’il consacre à l’amour de transfert (25). Pour qu’il prenne corps, il lui faut une circonstance déclenchante. Pour moi, il y en eut deux. La première fut l’invitation que me fit Guy Roger de participer aux Journées scientifiques du IVe Groupe, ce dont je le remercie chaleureusement ainsi que le comité scientifique. La seconde circonstance fut de celles dont le travail journalier est parfois prodigue : une circonstance clinique.
5Pendant longtemps, une femme m’a rendu visite trois fois par semaine, à heures fixes; c’était la rythmicité immuable de son analyse. Et invariablement ses premiers mots étaient ceux d’une langue qui m’est totalement inconnue, sa langue maternelle. Elle n’en donnait jamais la moindre traduction, ce qui ne m’avait pas empêché de songer à ce qu’elle pouvait, de cette façon, vouloir me signifier : n’était-ce pas sa façon à elle de maintenir dans la cure, envers et contre tout, une résistance du type : « à cela, tu ne toucheras pas »? Cette résistance pouvait bien traduire le maintien d’un lien d’amour, d’un lien érotique avec sa mère, lien où venait se condenser une problématique phallique. N’avait-elle pas un jour dit son étrange désir : « J’aurais voulu être l’homme de ma mère… »?
6Que reste-t-il alors de ce que certains ont pu dire à propos du transfert (et donc de l’amour dans la cure), à savoir qu’« il se comporte (justement) en étranger dans la théorie et dans le champ de la connaissance où, ainsi qu’il le fait de la personne de l’analyste en séance, il met la psychanalyse en situation irrégulière »? (18) Cette femme, qui se plaignait amèrement d’ignorer jusqu’aux noms des lettrés de son pays, avait le plus grand mal à exercer son métier : orthophoniste, elle devait traiter les troubles de la parole dans une langue qu’elle avait elle-même apprise à ses parents : « c’était le monde à l’envers », disait-elle. C’était aussi une trahison, comme de renoncer si peu que ce fût à l’attachement à sa mère. L’inhibition dont elle souffrait fut en bonne voie d’être levée lorsque je perçus en outre et lui transmis qu’elle désirait vraiment me traiter comme, dans son pays d’origine, certains membres de sa famille avaient été traités autrefois par la police, et comme elle-même avait été battue par son père à l’adolescence.
7Devant les interdictions et la censure, devant la honte aussi, les professeurs bretons agrégés de grammaire française, nouveaux philologues, avaient eux inventé une autre parade : un amour passionné pour la langue conquérante. Ils avaient transféré dans l’étude des mots et de leur agencement la question plus intime et secrète de l’origine : que font-ils ensemble ? D’où viennent-ils ?
8Y a-t-il une métapsychologie de l’amour ? En tout cas la réflexion de quelques auteurs s’est résolument orientée dans ce sens [3]. J.-C. Rolland a su montrer combien l’attention portée à l’investissement pulsionnel des mots de la langue est un élément essentiel de l’écoute analytique et de l’interprétation. Freud, lui, va jusqu’à douter parfois de l’existence de « cette force mystérieuse… dont les poètes parlent tant ». En fait Freud parle souvent de l’amour et pas seulement dans les articles que l’éditeur de la traduction française a voulu réunir sous le titre Contributions à la psychologie de la vie amoureuse (10). Ces réflexions concernent à la fois la relation d’objet et le narcissisme, tout en complexifiant l’une et l’autre de ces deux notions, qui par leur intrication, font jouer également l’attente, donc la temporalité et l’histoire personnelle.
9À la relation d’objet appartient ce que Guy Rosolato a joliment nommé, sur le mode d’une interprétation musicale, La portée du désir (c’est le titre de son livre). L’approche freudienne est plus prosaïque : « L’amour ne saurait être que l’investissement de l’objet par la pulsion en vue de sa réalisation, investissement qui disparaît lorsque le but est atteint » (22). Cette définition implique d’emblée le sexuel et répond en écho à ce que Freud disait encore dans les Conférences du Mercredi, à savoir qu’il usait des « trois termes que sont l’amour, la sexualité et l’érotisme de façon interchangeable ». Freud ne paraît guère gêné par le glissement des concepts, tel qu’on peut l’observer dans l’utilisation de la langue, et qu’il associe d’ailleurs à ces petits changements de signification qui sont facilités dans l’inconscient.
10Peut-on trouver ici de preuve plus éclatante de ce que certains écrits psychanalytiques contemporains ont si bien montré : à savoir que la langue, lorsqu’elle est saisie par le discours, donc par l’adresse, se laisse du même coup infiltrer par les processus primaires; ceux-ci feront prendre en compte, dans la parole, une complexité qui va bien au-delà du simple contenu communicationnel.
11Le concept de libido, venu lui aussi d’une langue perdue, est là, avec son origine étrangère, intraduit et intraduisible, pour affirmer avec force, et d’abord face à Jung, la nature sexuelle de la capacité d’aimer; capacité d’aimer dont on sait que la restitution – si elle a été perdue – pourra constituer l’une des conséquences heureuses de la cure. Freud cependant s’interroge sur le devenir de l’investissement d’objet lorsque le désir n’est plus là, et « l’assurance de pouvoir compter sur le réveil du besoin qui vient de s’éteindre doit bien avoir été le motif premier pour porter sur l’objet sexuel un investissement durable et pour l’aimer aussi dans les intervalles exempts de désir. » (15 bis).
12Un autre élément va enrichir la théorisation de l’amour : c’est ici, avec la prise en compte du temps, l’importance de l’histoire, « la très remarquable histoire de la vie amoureuse de l’homme »… Et, avec la découverte de la sexualité infantile, cette notion, proclamée avec force que bien avant la puberté, et la reproduction mise à part, l’enfant est capable d’accomplir tous les exploits psychiques d’une vie amoureuse. En 1919, Hélène Deutsch avait écrit un article intitulé : la première peine d’amour d’un enfant de deux ans.
13L’évolution du complexe d’Œdipe impliquera ensuite des mécanismes spécifiques en particulier le refoulement. À vrai dire, il n’y aura jamais de guérison parfaite. Comme la sonorité des mots de la langue perdue demeure, des traces subsisteront, traces dont témoigne par exemple, cet élément clivé du sexuel qu’est la tendresse; en même temps que naîtra, avec le phénomène de la surestimation amoureuse, l’idéalisation de l’objet aimé. Alors, que personne ici ne soit dupe : le choix de l’objet aimé est toujours et d’abord un choix sexuel, et non un choix pour des motifs psychologiques ou intellectuels. Ces derniers, lorsqu’ils sont mis en avant, ne peuvent être que secondaires. C’est de l’intensité du clivage entre le courant tendre et le courant sensuel, et de ses conséquences que naîtra cette interrogation « sur le plus général des rabaissements de la vie amoureuse chez l’homme » (10).
14Rabaissement ou ravissement de la vie amoureuse ?
15Je ne saurais mieux faire que de citer ici un fragment de la correspondance d’Héloïse avec le grand théologien qui fut son maître spirituel. Voici ce qu’elle écrit à Abélard :
« Jamais, Dieu le sait, je n’ai cherché en toi rien d’autre que toi. Ce ne sont pas les liens du mariage ni un projet quelconque que j’attendais, et ce ne sont ni mes volontés, ni mes voluptés, mais, et tu le sais bien toi-même, les tiennes que j’ai eu à cœur de satisfaire. Certes le nom d’épouse semble plus sacré et plus fort, mais j’ai toujours mieux aimé celui de maîtresse, ou, si tu me pardonnes de le dire, celui de concubine et de prostituée. » (19)
17Lorsque Freud, en 1914, s’avise de prendre en compte le fait que le choix d’objet amoureux puisse se porter sur le corps propre, il introduit le narcissisme secondaire qui l’amènera à postuler un narcissisme primaire, antérieur sur le plan génétique à la relation d’objet, un état anobjectal. Ici encore l’intérêt de Freud se porte, plus que sur l’amour proprement dit, sur la nécessaire complexification du moi qu’implique donc cette notion de narcissisme avec la description du moi idéal et de l’idéal du moi. De même, seront décrites ces deux façons d’aimer que sont l’amour par étayage et l’amour narcissique; et sera précisée la nature de la libido : libido d’objet et libido du moi. Dès lors, la théorie de la libido va apparaître comme une théorie de la sexualité humaine, plus que comme une théorie de l’amour humain. Et ceci malgré la richesse des points de vue clinique et génétique des Contributions à la psychologie de la vie amoureuse.
18Alors Freud aurait-il tenu à observer une certaine réserve à propos de l’amour, comme pour récuser préventivement une théorie interprétative potentiellement réductrice ?
19Cette réserve avait-elle déjà été celle de Socrate, lorsque invité par Agathon, le poète, au « Banquet » (24), il se tient un long moment immobile à l’entrée de la demeure de son hôte. Sait-il déjà que tous les discours sur l’amour qui vont être émis ne sont certes pas sans valeur, mais qu’ils ne vaudront finalement pas grand-chose devant la révélation que lui, Socrate, ne manquera pas de faire à Alcibiade, invité de la dernière heure : au guerrier athénien qui se plaint amèrement d’avoir été déçu comme amoureux éconduit et sexuellement rejeté, Socrate dira l’essentiel, lui révélant celui à qui son discours s’adresse, celui qu’il aime sans le savoir, Agathon.
20« Je ne suis pas le capitaine cruel » avait dit Freud, lui, à l’homme aux rats, oublieux peut-être de la composante sadique de l’amour, mais que la forme dénégative peut tout de même faire entendre : « J’entends ce que tu dis, mais surtout je sais qui tu aimes », dit Socrate, « l’objet du plus long transfert de l’histoire », dira Lacan.
21Je ne m’étendrai pas ici sur les vertus de l’agalma et des agalmata. Je rappellerai simplement que les agalmata sont ces parures qui ornaient l’intérieur de certaines statues. Le mot agalma est à entendre, dans le récit de Platon, au sens métaphorique de pouvoir de séduction : Socrate était un va-nu-pieds mais il avait un charme fou. La langue française, qui abonde en racines grecques, n’a pas retenu le mot. Mais je n’ai pu éviter de penser qu’un autre mot, bien français celui-là, mais d’origine arabe, en est presque l’anagramme : l’amalgame, qui signifie alliage (de deux métaux), mélange. Serait-ce cet alliage qui rend si attachants certains êtres qu’il devient presque impossible de s’en détacher ?
22Serait-ce le moment d’évoquer ici, au risque de l’amalgame peut-être,
l’amitié, dont il faut bien rappeler qu’elle n’est pas dénuée de passion et revêt
un caractère amoureux, souvent exclusif ? Peut-on encore aujourd’hui s’étonner
de la liberté de penser dont témoigne Freud à propos de l’amour homosexuel
dans une lettre à Stefan Zweig, son ami, le 4 septembre 1926 :
« Pourquoi l’homme ne peut-il pas accepter l’amour physique de l’homme,
même lorsqu’il se sent très fortement lié à lui sur le plan psychique ? Ce ne serait
pas contre la nature d’Éros qui, avec le dépassement de la rivalité naturelle
entre hommes (attitude de jalousie), connaîtrait un triomphe remarquable.
L’amour d’homme à homme serait aussi plus facile sur le plan du développement historique, il serait même plus satisfaisant étant donné qu’il n’aurait pas
à dépasser ce supplément de sadisme qui envenime les relations des deux sexes.
Il n’est pas non plus contre la ‘nature’humaine, car celle-ci est bisexuelle. » (16)
Ainsi l’amour hétérosexuel ne serait-il pas le plus facile mais il demeurerait le
plus redoutable par la confrontation qu’il implique avec l’altérité la plus fondamentale, celle de la différence des sexes – et le plus aimable aussi sans doute,
car le plus porteur d’inconnu.
23Ces hésitations, cette ambiguïté peut-être, voire cet amalgame sont super-bement illustrés dans À la recherche du temps perdu lorsque le narrateur, faisant état de son amitié pour Saint-Loup, le bel officier si viril qui l’accueillera dans sa caserne à Doncières, est d’abord décrit comme « homme à femmes » avant d’apparaître comme notoirement homosexuel dans ses choix amoureux. Le lecteur est alors gagné lui-même par cette incertitude, L’incertitude d’Éros. Elle est comme l’ombre de l’éclat d’un autre discours, dont la violence grossière demeure aussi celle du discours amoureux, lorsque Jupien, le palefrenier, apostrophe Charlus, le baron au cœur d’artichaut : « Eh bien, vous en avez un gros pétard !» (5)
24Il n’était sans doute pas trop difficile de décrire l’amour, d’en énoncer les variétés (les modalités cliniques en somme), par exemple dans le choix amoureux, d’en dénoncer aussi les ravages, comme dans l’érotomanie : pure projection délirante du désir amoureux; voire encore dans le délire paranoïde de Schreber et jusqu’à la parenté signalée par Freud, dans Deuil et mélancolie entre la passion amoureuse la plus extrême et le suicide : lorsque l’ombre de l’objet en tombant sur le moi entraîne ce dernier dans sa chute et le réduit à n’être plus que l’ombre de lui-même jusqu’à l’anéantir dans un dernier éclat, un éclat meurtrier.
25Il était plus délicat d’établir la nature de l’amour. C’est peut-être l’une des raisons qui conduisirent Freud, pour ce faire, à conseiller de s’adresser aux amoureux de la langue, les poètes, eux « qui ont cette fine sensibilité qui leur fait percevoir les mouvements cachés de l’âme d’autrui, et le courage de laisser parler leur propre inconscient ». Ici, Freud rejoignait une autre recommandation faite aux protagonistes de la cure – présentée d’ailleurs comme une innovation technique dès le début de l’analyse de l’« homme aux rats ». Il s’agissait de suivre le cheminement des pensées qui viennent, sans but préétabli, d’accepter en somme les sentiers qui se présentent sans s’interdire l’imprévu des rencontres. Le risque de se perdre est toujours là, dans la parole, dans l’écriture aussi, comme dans la vie lorsque règne le « désordre amoureux ». Mais ce désordre n’est qu’apparent : un fil invisible, dont une interprétation parfois sera le révélateur, est le témoin des mouvements obscurs de l’inconscient et d’une nouvelle topologie que rend possible le transfert : cette topologie rendra obsolète toute nosographie basée sur une description distanciée.
26Il ne s’agit pas ici d’une alliance au sens strict, fût-elle de travail ou thérapeutique – d’ailleurs lorsque Freud parle d’alliance c’est sous la forme de mésalliance pour désigner justement le transfert amoureux. Mais déjà le mot avait été utilisé pour désigner les fausses connexions, les liens causaux fictifs et encore le destin parfois différent de la représentation et de l’affect. Ainsi plutôt que d’alliance, il s’agirait, en utilisant un mot de J.L. Nancy, dans un autre contexte, d’une « Communauté désœuvrée » à entendre au sens le plus littéral, c’est-à-dire sans but préétabli (cité par M. Blanchot) (1). Alors, qu’ils soient violents ou tendres, les mots, dans la cure ou dans un récit, à se mettre ensemble, vont faire des histoires : ce seront parfois des histoires d’amour, parfois aussi des histoires qui tournent mal.
27Un homme et une femme marchent sur une plage. Ils sont un peu à l’écart l’un de l’autre car leur humeur est à l’image du temps : maussade. Un temps bouché, l’horizon a disparu. Des débris jonchent le sable, dernières traces de la tempête de la nuit. La plage est immense, battue par le vent d’Ouest. Au Sud, un vieux fort qui protège la côte des invasions, s’érige sur un rocher qui n’a valeur d’îlot qu’à marée haute. En face du « Fort bloqué », c’est son nom, à quelques milles au large, « Er groez », l’île de la sorcière. Au Nord l’estuaire d’une rivière très belle qui s’alanguit dans son lit. Son nom évoque un sourire : la Laïta, mais sa rencontre avec la mer, un peu au large, ne se fait pas sans dommage : il se produit, comme on dit, une « barre »: de violents courants rendant la navigation dangereuse creusent le sable et façonnent des gouffres obscurs qui ont donné au site le nom de « Poul-du »: le trou noir.
28Les pas de l’homme et de la femme les conduisent vers le Nord, justement, et après avoir franchi un ruisseau, le « Loch », leur malaise s’accentue lorsqu’ils aperçoivent, sur la dune, une maison isolée, entourée de hauts murs, plantée là toute seule, face à l’océan.
29Revenus auprès de leurs proches, les promeneurs apprennent l’histoire de la maison : la villa du Loch est la « maison du crime ». Un jeune couple vivait là : l’homme élevait des renards argentés. Un jour, il avait tué sa femme dans des conditions obscures : l’histoire avait mis en émoi la ville toute proche, car cet homme était le fils du procureur de la république célèbre dans toute la région pour sa sévérité : on l’avait surnommé « le procureur maximum ». Le père, pour sauver son fils, avait tenté en vain d’orienter l’enquête de la police sur les traces d’un rôdeur. Et la légende s’était emparée du fait divers : une chanson triste, une complainte était née qui décrivait le meurtrier comme ayant l’esprit dérangé.
30Malgré la tristesse du temps, nous sommes en été : la promenade est datée très précisément : le 24 juillet 1936. Vous aurez sans doute reconnu dans le promeneur sur la plage André Breton, lequel raconte cette histoire dans L’amour fou (2) et déclare avoir toujours été frappé par les méfaits de la discorde propres à l’amour.
31Raconter une promenade d’amoureux, en commençant par la description d’une déchirure entre deux êtres, n’est certes pas innocent. Et ce d’autant plus que cette promenade sur la plage nous conduit à l’évocation d’un crime. L’amour, amor, la mort : la consonance phonétique des mots de la langue et de la langue d’origine, pour ressassée qu’elle soit, n’en a pas moins l’intérêt de porter en elle une question théorique qui est celle de la relation de l’amour à la haine et au meurtre. Ainsi l’amour peut-il être parfois la condition même du refoulement de la haine : chez l’homme aux rats, c’est l’amour intense pour le père qui ne permet pas à la haine d’être consciente. Celle-ci cependant ne manquera pas de surgir en un éclair, clairement exprimée, et contre lequel l’obsessionnel devra lutter sans fin en usant de commandements magiques et de stratagèmes.
32Dans ce récit de L’amour fou, la déchirure entre les deux promeneurs est bien plus que portée par la métaphore d’une blessure passagère. Elle est cet écart, intraitable, peut-être même inscrutable, qui sépare fondamentalement deux êtres aussi différents que le sont deux personnes marquées dans leur corps par cette différence qui est celle des sexes. L’amour serait-il une tentative, heureuse souvent, tragique parfois, de traiter cet écart ? le traiter autrement que par le refus, ou la mise à distance, ou encore par le choix d’un être anatomiquement identique : c’est la solution homosexuelle (dont Freud, nous l’avons vu, a noté la facilité, et dont il s’étonne qu’elle ne soit pas plus souvent à l’œuvre) – autrement enfin que par la familiarité banale de la vie qui tentera toujours de colmater l’étrange.
33L’étrange, c’est ce que Breton a tenté et réussi souvent à transmettre : Breton a exalté l’attente amoureuse. Il a su donner à l’inconnu et au fugitif de la rencontre la qualité d’« un trouble physique caractérisé par la sensation d’une aigrette de vent aux tempes susceptible d’entraîner un véritable frisson ». (2) Breton croyait en la puissance magique des mots; une magie qui ne fut pas décolorée, comme Freud pouvait le regretter, Freud qui justement, à propos de l’amour, recommande de faire confiance à la langue. Le début de L’amour fou est à cet égard évocateur, par la poésie des mots que le poète n’hésite pas à faire jouer ensemble : c’est vrai par exemple lors de sa rencontre avec une jeune serveuse : une « ondine » dit-il dans un restaurant par ailleurs bien banal mais dont l’enseigne va déclencher la rêverie amoureuse : « Ici, l’on-dine ».
34Si l’analyste est sensible aux signifiants, à leur agencement que permet l’adresse qui les sous-tend, Breton, lui, croyait aux signes, à leur foisonnement, à ceux qui font de certains êtres rencontrés non pas des revenants mais des « survenants ». Il clamait haut et fort que « le délire d’interprétation ne commence qu’où l’homme mal préparé prend peur dans cette forêt d’indices. » Cette croyance, cette sensibilité que la psychiatrie appellerait sans doute paranoïde – et à l’archaïsme de laquelle, j’imagine, chacun pense avoir définitivement échappé – devait faire retour chez moi d’une étrange façon : alors que je faisais découvrir cette partie de la côte bretonne à une amie, cette dernière qui, pour avoir lu Breton, connaissait l’histoire de la villa du Loch, se précipita vers l’étrange maison dès qu’elle l’aperçut sur la dune, et je ne pus m’empêcher alors de lui crier : « Pas si vite, c’est dangereux !»
35Après l’effroi de Breuer devant les cris de douleur de sa jeune patiente qui déclarait accoucher d’un enfant de lui, c’est bien à l’audace, au courage d’oser affronter le danger que Freud doit d’avoir inventé sa méthode, méthode dont nous n’avons pas fini d’explorer la manière et la productivité. C’était une étrange aventure que Freud devait alors conduire d’abord seul, sous la forme d’une équipée solitaire, suivant ce mot d’un autre marcheur amoureux des voyages, Victor Segalen. Ce dernier avait-il lu L’interprétation des rêves ? Les récits de Segalen décrivent un monde mi-réel, mi-rêvé, « raconteurs joufflus de mots sincères », écrit-il dans Equipée (28). Dans ce livre, il s’interroge sur la femme, l’unique (avec cette confidence en forme d’interrogation : « On suppose toujours à l’amour une monogamie féroce »), et sur les femmes, celles que l’on rencontre sur la Route.
36À ce propos, Breton dès les premières pages de L’amour fou n’hésite pas à livrer sa rêverie personnelle : il imagine une pièce de théâtre qu’il n’a jamais écrite mais où convergerait un point d’ombre à la chute du rideau : « la scène barrée par un rang de femmes assises, en toilettes claires, les plus touchantes qu’elles aient jamais portées… Entre un homme. Il les reconnaît : l’une après l’autre, toutes à la fois ? Ce sont les femmes qu’il a aimées, qui l’ont aimé, celle-ci des années, celle-là un jour. Comme il fait noir. »
37Peut-on trouver meilleur exemple de l’infiltration de l’état amoureux par les processus primaires qui sont ceux du rêve comme ceux du symptôme : le déplacement, la condensation, les figurations successives ou même la figure composite. Mais la métapsychologie, si elle reste une sorcière, porte ici de gros sabots : elle risque toujours de détruire le poème.
38Après l’abandon de Breuer, bien plus tard, Freud poursuivant sa route lui aussi, devait reprendre ses considérations sur l’état amoureux en le comparant à l’hypnose. Il voulait récuser cette dernière en raison de l’allégeance qu’elle impliquait envers le thérapeute et dont quelques manifestations, en particulier chez Bernheim, l’avaient révulsé. Ces considérations sur l’amour se situent dans Psychologie des masses et analyse du moi (15), où le pouvoir du leader – expert à provoquer l’amour des foules et l’attachement collectif et exclusif des frères – est dénoncé, pressentiment des années noires à venir… Par ailleurs, Freud a toujours montré une répugnance profonde à être un pasteur d’âmes. Une grande rigueur devait marquer le protocole de la cure et d’abord sur le plan matériel :la position asymétrique des deux partenaires avec l’abandon du face-à-face (« pour qu’une analyse ne soit pas une psychothérapie à œillères », écrira avec humour F. Perrier) (23), la règle d’abstinence, celle de libre association, correspondant à une attitude intérieure :l’attention en égal suspens. Sur le plan méthodologique, ce fut l’élaboration progressive d’une métapsychologie qui allait constituer un autre cadre, théorique celui-là, aux interventions de l’analyste.
39Ces éléments allaient-ils pouvoir assurer une sorte d’aseptisation de la cure ? On sait qu’il n’en fut rien : l’amour, le dieu Éros, chassé par la grande porte, revenait par la fenêtre. Et ainsi, cette situation était en somme la plus insolite qui puisse être : seule une pratique familière peut aujourd’hui en obscurcir l’étrangeté. L’artifice du cadre allait faire se déclencher un feu qui n’avait rien d’un feu d’artifice mais qui risquait de devenir un véritable incendie. Et d’une méthode donc artificielle et qui, malgré sa grande rigueur, ne pouvait pas toujours éviter d’être frôlée par l’accusation d’imposture (17), allait naître un sentiment vrai et authentique, dont les qualités n’avaient rien à envier à celles de l’amour vécu par chacun dans la vie ou celui chanté par les poètes. Certes l’adresse n’était pas la bonne, ou avait-elle été perdue. Mais cet amour était vrai, même s’il n’était pas réel, en ce sens où son déclenchement ne tenait pas aux qualités propres de l’analyste dont la présence était pourtant indispensable : peut-on aimer en effigie ? Le déclenchement tenait à une situation artificiellement construite. Et en fait d’asepsie, c’est une stérilisation au moins passagère de la cure qui risquait d’apparaître par arrêt du travail élaboratif. Rien d’autre ne comptait plus que d’aimer.
40Au moins l’amour, ainsi que les autres sentiments apparus et exprimés verbalement allaient-ils pouvoir, sans être nullement désavoués, éclairer la névrose infantile dans sa réactualisation transférentielle, au sein de la cure, et non plus simplement dans la symptomatologie clinique. Transfert est d’abord déplacement. Pourrait-on alors considérer l’amour de transfert comme un amour déplacé ?En tout cas, c’est bien le transfert (l’amour, la haine, parfois les deux) qui devaient, en gardant à l’analyse son caractère subversif, lui éviter le risque d’une reproductibilité technique.
41Le 28 décembre 1914, la guerre a commencé. Freud adresse, en réponse à sa demande, une courte lettre au Dr Frédéric Van Eeden, psychothérapeute néerlandais qu’il a connu pendant son séjour à Paris (12) et qui veut connaître sa position sur le conflit mondial. Dans sa lettre, Freud rappelle que la psychanalyse, à partir de l’étude des rêves et des symptômes, a conclu « que les impulsions primitives, sauvages et mauvaises de l’humanité n’ont disparu chez aucun individu, mais qu’elles continuent au contraire à exister, quoique refoulées, dans l’inconscient… et attendent les occasions d’entrer de nouveau en activité. » Dans les O.C.F. cette lettre précède immédiatement Actuelles sur la guerre et la mort,œuvre dans laquelle Freud écrit que « nous devons les plus beaux épanouissements de notre vie amoureuse à la réaction contre l’impulsion hostile que nous ressentons. »
42Ainsi l’amour le plus sophistiqué, le plus courtois (le plus « sublimé »?), ne peut éviter que persistent dans l’inconscient les désirs de meurtre. L’amour ne peut renier l’autre versant, la haine, antérieure à l’amour sur le plan psycho-génétique, contemporaine de la naissance de l’objet, par « récusation », du narcissisme. Et cela concerne aussi l’objet en tant qu’objet de transfert.
43Mais il est encore une autre façon, pour l’amour, de se présenter à l’analyse, ou dans la vie, lorsqu’il est totalement absent de la scène. On se souvient que Freud déjà, à propos de la jeune fille homosexuelle, avait signalé le risque pour la cure de se résumer à une promenade dans un musée. Dans un ouvrage saisissant, La maladie de la mort (7), Marguerite Duras tente de décrire ce que serait cette autre sorte de maladie : le manque d’amour.
44Ce n’est pas vraiment un récit, plutôt un long poème triste, sorte de rhapsodie, ou texte pour la scène à deux personnages : un homme et une femme, dans lequel l’auteur, une femme, donne ses instructions à l’homme, un peu comme un metteur en scène : d’abord elle lui prescrit de rencontrer une femme dont elle dit : « Vous ne devez pas la connaître, l’avoir trouvée partout à la fois, dans un hôtel, dans une rue, dans un train, dans un bar, dans un livre, dans un film, en vous-même… » Un contrat devra s’établir entre l’homme et la femme, « indéterminée, inconnue, irréelle, en cela imprenable dans sa passivité, absente dans sa présence endormie et éternellement passagère » (1) (je cite ici Maurice Blanchot qui a fait un long commentaire de ce texte). L’homme n’aurait jamais connu que ses semblables, c’est-à-dire d’autres hommes qui ne sont que la multiplication de lui-même. Mais il serait certainement réducteur de traiter cet homme d’homosexuel et cette femme de prostituée (en raison du contrat). Ce dont l’homme souffre, car il souffre, c’est de l’absence d’amour. Il n’est pas impuissant sexuellement, et cette belle femme, totalement disponible, est capable de lui faire entendre « le grondement sourd et lointain de sa jouissance à travers sa respiration ». Alors comment pourrait survenir le sentiment d’aimer ? C’est la femme, un jour, ou une nuit, qui répond : « Peut-être d’une faille soudaine dans la logique de l’Univers, par exemple d’une erreur. »
45Le style de Duras, généralement dépouillé, l’est ici plus encore, sans doute par volonté de faire strictement correspondre la forme et le fond. Or la rencontre amoureuse implique un certain climat, une atmosphère de rêve, et généralement pas l’établissement d’un contrat. Peut-on imaginer la rencontre avec Albertine sans les couleurs du temps, sans l’éclat de la mer et son miroitement infini, sans l’ombre des peupliers bruissant au vent qui dévoilent le clocher de Combray, sans la promenade sur la jetée à Balbec où les jeunes filles en fleur viennent ranger leurs vélos ? Déjà le déclenchement de l’excitation amoureuse, chez Swann, était inséparable d’un fond musical. Le narrateur, en « inventant » la sonate de Vinteuil, a l’élégance de laisser à chacun le choix de sa « petite phrase » et qu’importe alors qu’elle soit de Franck, Fauré, Debussy ou Lekeu.
46Mais la femme de la maladie de la mort avait dit quelque chose de troublant à propos de l’amour, comme regrettant que ceci ne se produise pas. Elle avait dit : « c’est une faille dans l’ordre de l’univers ».
47L’analyste – dont le savoir théorique, intériorisé, interdit tout recours à la virginité (je paraphrase ici F. Perrier qui lui-même cite Saint Jérôme) – l’analyste pense à la faille corporelle, celle de la différence anatomique des sexes, dont rien ne saurait jamais gommer les traces et épuiser les conséquences psychiques: l’étrangeté, le dépaysement, voire la capacité de créer une faillite de la pensée. L’amour fait défaillir. La langue ici encore reste fidèle à la chose lorsqu’elle dit que l’on tombe amoureux.
48Mais il est une autre faille, celle du discours parfois, une trahison des mots qui dit la vérité, un lapsus bien venu comme celui que Hélène Cixous prête à Freud dans sa pièce intitulée Portrait de Dora.(4). Pensait-elle alors aussi à André Breton ?
« Et, surtout », dit le professeur à la jeune fille qui le quitte définitivement cette fois, ce dont il doit bien éprouver quelque tristesse, « et surtout… n’oubliez pas de me donner de mes nouvelles. »
Bibliographie
BIBLIOGRAPHIE
- (1) BLANCHOT M. 2001. La communauté inavouable. Paris, Éditions de Minuit.
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- (10) FREUD S. 1973. Contributions à la psychologie de la vie amoureuse, La vie sexuelle. Paris, P.U.F.
- (11) FREUD S. 1973 [1914]. Pour introduire le narcissisme, La vie sexuelle. Paris, P.U.F.
- (12) FREUD S. 1988. Lettre à Frédéric Van Eeden, du 28 décembre 1914, Œuvres complètes. Paris, P.U.F.
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- (15) FREUD S. 1991. État amoureux et hypnose; Psychologie des masses et analyse du moi. Œuvres complètes, vol. XVI. Paris, P.U.F.
- (15 bis) FREUD S. 1991. Opus cité p. 49.
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- (21) LAVIE J.-C. 1996. L’amour est un crime parfait. Paris, Gallimard, Connaissance de l’Inconscient, série Tracés.
- (22) 1978. Les premiers psychanalystes. Minutes (tomes I, II, III) de la Société psychanalytique de Vienne.
- (23) PERRIER F. 1994 [1970-1971] Séminaire sur l’amour, La Chaussée d’Antin, Paris, Albin Michel.
- (24) PLATON 1999. Le banquet ou De l’amour, traduction V. Cousin. Paris, Mille et une nuits.
- (25) PONTALIS J.-B. 1990. La force d’attraction, Paris, Le Seuil, La librairie du XXe siècle.
- (26) ROLLAND J.C. 1998. Guérir du mal d’aimer. Paris, Gallimard, Connaissance de l’Inconscient, série Tracés.
- (27) ROSOLATO G. 1996. La portée du désir ou la psychanalyse même. Paris, P.U.F.
- (28) SEGALEN V. 2001. Équipée, Paris, Gallimard, L’imaginaire.
Mots-clés éditeurs : Langue, Mots, Amour, Crime, Indifférence, Amitié
Mise en ligne 01/02/2008
https://doi.org/10.3917/top.090.0073Notes
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[1]
Poète, qui trouva la mort à l’âge de vingt-neuf ans, le 10 avril 1917, dans une tranchée du bois d’Urvilliers; ses restes furent ramenés dans l’île de Groix, sa terre natale.
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[2]
Cette part d’énigme de l’amour n’empêche pas, certes, la recherche, et même elle la stimule, mais cette recherche, y compris dans les travaux neurophysiologiques les plus récents, ne saurait avoir ici justement le dernier mot, réduite qu’elle se trouve alors à ignorer la langue, et se cantonnant donc, pour ce qu’il en est de l’amour, à un agréable divertissement scientifique. Pour preuve, je rapporterai ce mot d’un chercheur estimé, spécialiste des passions, qui dans une interview récente déclarait : « Ma seule psychanalyste a été une guenon. » On ne saurait mieux dire… non pas tant à vouloir réduire l’amour à des processus biochimiques – ce que d’ailleurs le chercheur en question ne fait pas – qu’à refuser que la psychanalyse puisse revendiquer un « paradigme à part du savoir » (18). Parmi les auteurs qui se sont exprimés récemment à ce sujet, je citerai Jean Guillaumin : La psychanalyse, un nouveau modèle pour la science.
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[3]
Je pense à Lacan et à son commentaire du Banquet de Platon, à François Perrier et à son séminaire sur l’amour, dans La chaussée d’Antin, à Christian David, L’état amoureux, et aux études plus récentes de J.-C. Lavie, L’amour est un crime parfait, ou de J.-C. Rolland, Guérir du mal d’aimer.