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Article de revue

Mode verbal et expression de la conjecture dans les aventures de Bob Morane

Pages 7 à 36

NOTES

  • [*]
    Université Libre de Bruxelles
  • [1]
    Recensement arrêté au 31 décembre 2005 ; trois volumes s’ajoutent chaque année à la liste.
  • [2]
    C’est pourquoi nous n’avons procédé au dépouillement que d’un petit nombre des textes récents. Pour la liste des textes lus, nous renvoyons à la bibliographie en fin d’article.
  • [3]
    Nous avons retenu les expressions unipersonnelles exclusivement pour éviter d’avoir à traiter d’éventuelles interférences entre le concept de possible-certain et celui de la personne.
  • [4]
    Dans nos relevés, le « conditionnel » est assimilé à une forme de l’indicatif ; le « conditionnel passé 2e forme » est ramené à un subjonctif. Ce choix nous est imposé par la morphologie : le « conditionnel » combine les marques flexionnelles du futur et de l’imparfait, deux temps de l’indicatif ; le « conditionnel passé 2e forme » emprunte ses formes au subjonctif plus-que-parfait. Pour le détail de l’organisation du système verbal, on se reportera à Wilmet 2003.
  • [5]
    Le dénombrement porte au départ sur les seules formes verbales des complétives. Lorsque plusieurs formes verbales sont concaténées ou coordonnées dans une complétive, elles sont comptabilisées distinctement. Dans ces cas particuliers, nous avons considéré, de manière artificielle, que l’expression conjecturale distributive apparaissait autant de fois qu’il y avait de formes concaténées ou coordonnées, ce qui nous permettait d’harmoniser le nombre des occurrences de formes verbales et celui des expressions conjecturales.
  • [6]
    Et ce, de l’édition originale à l’ultime réédition.
  • [7]
    L’expression il est réel que, intégrée dans le schéma guillaumien, n’apparaît pas dans les textes qui ont servi à l’établissement du corpus.
  • [8]
    Plus si on prend en considération quelques variantes syntagmatiques (ponctuation, incise…).
  • [9]
    Bien que la synonymie ne soit pas sûre, les expressions du type il est même possible/probable n’ont pas été différenciées de il est possible/probable même.
  • [10]
    Le schéma guillaumien est, lui, sans nuance pour le domaine du possible.
  • [11]
    Qui plus est, l’étude d’un corpus sur la fiabilité duquel nous avons nous-même émis quelques réserves.
  • [12]
    Sont alors concernées les expressions il est possible/fort possible/probable/probable sinon certain/fort probable/certain, qui représentent à elles seules 703 occurrences sur les 826 que compte le corpus (85,1 %).
  • [13]
    Pour les raisons qui incitent à ne pas traiter distinctement ces 3 « tiroirs » verbaux, autrement dit pour une approche unitaire du futur, nous renvoyons à Wilmet (2003 : §§ 481-487 & 521-534).
  • [14]
    Une variante sans pour ne nous a pas semblée exclue, raison pour laquelle nous avons assimilé cette construction à une complétive.
  • [15]
    Les exemples concernés ici illustrent par ailleurs une construction personnelle. Ils sont donc doublement marginaux dans notre corpus.
  • [16]
    Cette réversibilité est absente de l’hypothèse guillaumienne, du fait sans doute que celle-ci s’inscrit dans le cadre de la chronogénèse : le temps est irréversible.
  • [17]
    La présence de « ne » nous semble ici intempestive.
  • [18]
    Nous tendons à nous rallier à l’opinion de Brunot (1953 : 782) selon laquelle de telles règles n’existent pas en français.
  • [19]
    Nous faisons ici l’économie des variantes composées et surcomposées de ces paradigmes.
  • [20]
    Ici encore, confusion vraisemblable d’homophones.
  • [21]
    En d’autres termes, l’erreur orthographique consiste davantage à omettre l’accent circonflexe là où il serait nécessaire qu’à l’ajouter là où il n’en faut pas.

1 – Introduction

1 Une des spécificités des récits qu’Henri Vernes a consacrés aux aventures de Bob Morane est que leurs personnages, impliqués (généralement malgré eux) dans des événements qui les dépassent, s’y perdent immanquablement en conjectures :

[1]
Avant le soir, Bill Ballantine serait peut-être arrivé d’Écosse et, avec son aide, Bob verrait augmenter ses chances de triompher de l’adversaire. Sir Archibald Baywatter aurait sans doute également prévenu la police française.
(La revanche de l’Ombre Jaune, p. 57)
[2]
Peut-être est-ce un camp militaire ou, plus probablement encore, une base scientifique…
(Les vapeurs du passé, p. 23)
Au fil des pages, l’attention du lecteur est ainsi retenue par la récurrence de certaines expressions :
[3]
Bill Ballantine était plutôt porté sur le sommeil et il était assez improbable qu’il eût quitté sa chambre ainsi, dès potron-minet. […] Bien sûr, Bill pouvait avoir refait son lit avant de sortir mais, comme il était plutôt du genre négligent, il était fort improbable qu’il eût accompli avec autant de diligence, et de si grand matin, la besogne des femmes de chambre. […] Il est possible que Bill ait été assommé, ligoté et caché quelque part, soliloqua-t-il. […] De toute façon, il est probable que le commissaire du port pourra me renseigner à ce sujet… […] De toute façon, de nombreux dockers s’affairaient un peu partout à présent et il était probable, sinon certain, que si Ballantine avait été quelque part dans les parages, il eût déjà été découvert.
(Les crapauds de la mort, p. 25-28)
Lorsque l’amateur d’aventure est aussi lecteur féru de psychomécanique du langage, il trouve là une occasion inespérée de tester l’une des idées-phares de Gustave Guillaume sur la distribution des modes indicatif et subjonctif en français, développée dès 1929 dans Temps et Verbe (1929 : 31-32) :
[…] si les époques se présentent distinctes dans le mode indicatif et indistinctes dans le mode subjonctif, la cause en pourrait être que le premier inclurait l’actualité dans le temps mais que le second l’en exclurait.
Dans l’affirmative, la théorie particulière des modes de chaque langue reviendrait à savoir quelles idées, lorsque la visée les traverse, mènent à l’actualité et quelles n’y mènent pas. […]
L’invitation se fait d’autant plus pressante que c’est Guillaume lui-même qui la lance, en ces termes (1929 : 32) :
L’hypothèse qu’on vient d’envisager appelle une large vérification expérimentale, une vérification exhaustive. Mais au début, si l’on veut écarter le risque de dérober l’essentiel sous l’accessoire, il est prudent de borner l’examen, – qu’il sera toujours loisible d’étendre ensuite, – aux idées universelles les plus nécessaires à l’existence même de la pensée. Quatre idées offrent à cet égard toutes garanties : possible, probable, certain et réel.
et que s’il en amorce la vérification (1929 : 32) :
De ces quatre idées la première seule gouverne le subjonctif : Il est possible qu’il vienne. Les trois autres gouvernent l’indicatif : Il est probable qu’il viendra. Il est certain qu’il viendra. Il est réel qu’il est venu. D’après ce qui vient d’être exposé, la notion de possible exclurait donc l’actualité, tandis que les notions de probable, de certain et de réel l’incluraient.
Il va être démontré qu’il en est ainsi.
s’il va même jusqu’à établir une gradation du possible le plus possible au réel le plus réel (1929 : 34) :

figure im1

2 aucune des expressions de la langue française qu’il examine en détail dans la suite de son analyse (1929 : 37-50) n’intègre plus les mots possible, probable ou certain sur lesquels repose toute son hypothèse.

2 – Constitution d’un corpus

3 Les Aventures de Bob Morane semblent bien fournir les éléments nécessaires à une vérification expérimentale fouillée de l’hypothèse formulée par Gustave Guillaume sur la distribution des modes en français.

4 Une plongée dans les aventures du héros de notre adolescence révèle que l’intuition d’un « tic d’écriture » sous la plume d’Henri Vernes est fondée. Les expressions de la conjecture prolifèrent dans chacun des textes lus (104 sur les 205 Bob Morane recensés [1]), du moins jusque dans les années soixante-dix. Ultérieurement, les occurrences sont moins nombreuses, le « tic » semble s’être quelque peu épuisé. [2]

2.1 – Le relevé

5 Les extraits [1]-[3] cités ci-dessus le montrent à suffisance, le lexique lié à l’expression de la conjecture chez Henri Vernes est fort diversifié. Pour la constitution du corpus, nous avons choisi d’être relativement sélective et de ne retenir que les occurrences des expressions unipersonnelles [3] contenant un des termes suivants : possible, probable, vraisemblable, certain, sûr ainsi que la locution il se peut, suivies d’une complétive avec un verbe à l’indicatif ou au subjonctif [4]. Cela nous a permis de constituer un corpus de 826 formes verbales [5].

2.2 – Quelques précautions élémentaires

6 La récurrence des expressions conjecturales n’est pas la seule caractéristique des aventures de Bob Morane qui retient l’attention du grammairien. Elles regorgent également de coquilles, bourdons et fautes de français de tout crin [6] – inadvertances qu’on pourrait taire si elles n’étaient pas sans conséquence sur l’objet de notre étude.

7 Parmi les nombreuses hésitations orthographiques, il en est en effet une qui touche directement l’identification des modes ; il s’agit du flou dans l’usage de l’accent circonflexe :

[4]
[…] le cours d’eau était trop large pour qu’il put le franchir.
(La piste de l’Ivoire, p. 100)
[5]
Déjà, Ballantine s’était précipité sur Tawoureh et l’avait désarmé et immobilisé comme il eut fait d’un enfant.
(La vallée infernale, p. 58)
Si ce flou ne touchait dans les aventures de Bob Morane que les formes du « passé simple » et du « subjonctif imparfait », nous pourrions conclure à un manque de maîtrise de l’usage des modes, d’ailleurs confirmé par des exemples comme les suivants :
[6]
– Parés ! dit ce dernier quand, après cette dernière vérification, les voyageurs se fussent assurés qu’aucune erreur n’était possible.
(Les tours de cristal, p. 146)
[7]
Tout en parlant, il tirait de son sac un silencieux qu’il avait emporté au cas où, si ses compagnons et lui devaient chasser pour s’approvisionner, ils puissent le faire sans effaroucher le gibier.
(Les semeurs de foudre, p. 96)
Une semblable conclusion nous empêcherait inévitablement d’aller plus loin dans notre démarche.

8 Toutefois, les hésitations touchent l’ensemble des mots et s’étendent à d’autres accents que circonflexe (pour ne rester que dans ce territoire strictement délimité dans le domaine de l’orthographe qu’est l’accent graphique), constatation qui incite à considérer le corpus avec une double prudence :

  1. L’hypothèse d’une maîtrise imparfaite du système graphique semblant être fondée, nous devrons relativiser nos observations et considérer comme formes indifférenciées en mode les formes verbales homophones pour lesquelles des graphies seulement distinctes par l’accent sont rencontrées. Ainsi, la forme eut sera-t-elle considérée comme indifférenciée en mode, du fait que, chez notre auteur, elle peut alterner librement avec eût, et inversement.
  2. L’hypothèse d’une maîtrise incomplète de l’usage des modes ne pouvant pas être totalement écartée (v. supra exemples [6] & [7]), les éventuelles conclusions que nous en viendrons à formuler seront nécessairement considérées avec réserve.
Moyennant cette double précaution, nous pouvons aborder l’étude de notre corpus.

3 – Organisation du corpus

3.1 – Inventaire des expressions de la conjecture

9 Des différentes expressions que nous avons choisi de retenir pour composer notre corpus – il est possible / probable / vraisemblable / certain / sûr, il se peut, soit les plus proches de celles que l’on trouve dans l’hypothèse guillaumienne [7] – c’est il est probable que qui est la plus employée par Henri Vernes : ses 377 occurrences représentent plus de 40 % du corpus étudié.

10 Les concepts de « possible », « probable » et « certain » connaissent toutefois sous sa plume des modulations d’une grande amplitude. En tout, ce sont quelque 41 [8] formulations différentes que nous avons répertoriées, dont nous donnons ci-dessous la liste alphabétique, accompagnée de l’indication de répartition des occurrences :

Tableau A
Tableau A
Formulation Occ. Formulation Occ. à peu près impossible 1 pas possible 3 assez improbable 3 pas si certain 1 bien improbable 1 pas sûr… de beaucoup 1 bien improbable sinon impossible 1 peu probable 17 certain 52 plus probable 3 de moins en moins certain 1 plus que probable voire certain 1 fort improbable 9 possible 170 fort peu probable 4 possible mais non certain 1 fort possible 44 possible même 4 fort possible même 9 1 possible sinon certain 5 fort possible sinon certain 7 possible sinon probable 4 fort possible sinon probable 1 presque certain 2 fort probable 38 probable 377 fort probable sinon certain 3 probable et même certain 1 grandes probabilités 1 probable même 7 hors de doute 1 probable sinon certain 22 impossible 8 probable voire certain 3 improbable 6 quasi certain 7 pas certain 5 il se peut (il se peut) 4 pas impossible 4 tout à fait improbable 1 …/… vraisemblable 1

3.2 – Agencement des expressions de la conjecture entre les deux pôles du possible et du certain

11 Si on veut agencer les expressions répertoriées entre les deux pôles du possible et du certain, c’est-à-dire les inscrire de manière ordonnée dans un schéma tel le schéma guillaumien reproduit au § 1 où l’on part du possible le plus possible pour aller vers le certain le plus certain, on bute sur une première difficulté : les expressions négatives (dont la négation peut être exprimée par un préfixe – il est impossible / improbable /… – ou par un morphème indépendant – il n’est pas certain / pas possible…, voire par le seul sémantisme – il est peu probable, il est de moins en moins certain…) sont difficiles à placer sur le même schéma que les autres, à l’exception peut-être de l’expression il n’est pas impossible, doublement négative. Certes, il est relativement aisé de les agencer entre elles, mais il est nettement moins aisé de les placer entre les deux pôles du « possible » et du « certain ».

Tableau B
Tableau B
Du possible De l’impossible il se peut impossible possible pas possible possible même à peu près impossible pas impossible bien improbable sinon impossible possible mais non certain bien improbable possible sinon probable assez improbable possible sinon certain fort improbable fort possible fort peu probable fort possible même peu probable fort possible sinon probable improbable fort possible sinon certain tout à fait improbable vraisemblable pas sûr… de beaucoup probable même de moins en moins certain probable pas certain probable sinon certain pas si certain probable voire certain grandes probabilités plus probable fort probable fort probable sinon certain probable et même certain plus que probable voire certain presque certain quasi certain hors de doute certain v Au certain À l’incertain
Par commodité, nous avons procédé à un agencement distinct des deux listes. Nous reviendrons ultérieurement sur cette dissociation pour apprécier si elle a une quelconque incidence théorique.
Nous sommes pleinement consciente du caractère peu rigoureux, presque intuitif, et par là contestable, de notre échelonnement ; mais ceci est délibéré. Nous verrons que dans nombre de cas les expressions recensées peuvent être modulées par différents éléments contextuels, parmi lesquels figure le mode utilisé en complétive ; une occurrence donnée pourra ainsi selon le cas monter ou descendre sur l’échelle, pour se rapprocher ou s’éloigner du possible ou du certain. Étant donné l’objectif de notre étude, nous ne pouvons prendre ces modulations en considération, cela reviendrait à mettre la charrue avant les bœufs.

4 – Distribution des modes

12 Examinons le corpus sur le plan de la distribution des modes gouvernés par l’ensemble des expressions relevées. La répartition est la suivante :

Tableau C
Tableau C
Mode Occ. % Indicatifs 465 56,3 Formes indifférenciées 150 18,1 Subjonctifs 211 25,5 826 100

13 Mis en regard du tableau A, le tableau révèle d’emblée que les choses ne sont pas aussi simples dans le corpus que dans l’hypothèse guillaumienne. On s’attendrait en effet à trouver dans notre corpus autant d’occurrences de il est possible[9] que d’occurrences de subjonctifs ; or, les chiffres sont de 170 occ. de l’une pour 211 de l’autre.

14 Si on prend en considération les nombreuses modulations de il est possible qu’atteste le corpus [10] (il est possible mais non certain, possible sinon probable, possible sinon certain, fort possible…), on ne trouve pas davantage l’équilibre : les chiffres sont de 237 occ. d’expressions impliquant l’adjectif possible pour 211 subjonctifs.

15 Ce premier constat contraint à un retour à l’hypothèse guillaumienne, où l’on décèlera un conflit entre le développement théorique et le schéma qui est supposé en rendre compte. Car si Guillaume échelonne les différents degrés du « probable » entre le « possible » et le « certain » (1929 : 33), il donne expressément le « probable » comme l’égal du « certain » (l’équation « Probable = Certain » de la page 33 est sans ambiguïté). Bien qu’il s’explique sur cette conclusion d’identité, nous nous demandons si Guillaume n’a pas postulé, plutôt que proprement constaté, l’idée selon laquelle « probable » et « certain » gouvernent le même mode indicatif. Nous ne prétendrons pas qu’une étude de corpus comme celle que nous développons ici [11] puisse valider ou invalider la démarche guillaumienne, mais au vu de nos exemples, nous préférons opter pour une interprétation différente du schéma guillaumien.

16 Notre hypothèse de travail, nuançant l’hypothèse guillaumienne, sera que les expressions situées au plus près du pôle du « possible » tendent à gouverner le subjonctif ; celles qui se trouvent au plus près du pôle du « certain » (dont celles du probable) tendent à gouverner l’indicatif. Selon cette hypothèse, plus on s’éloigne du pôle du « possible », plus la tendance à gouverner le subjonctif devrait s’affaiblir au bénéfice de l’indicatif – et inversement. Cette hypothèse, moins monolithique que l’hypothèse guillaumienne de 1929, trouverait parfaitement sa place dans les développements ultérieurs de la psychomécanique, exacerbant le concept de continuum.

17 L’étude à laquelle nous allons nous livrer consistera dès lors à rechercher les corrélations entre le mode gouverné et la polarité (attraction vers le pôle du possible ou vers celui du certain) de chaque expression relevée.

4.1 – Tendances du corpus

18 Au vu de la distribution des modes dans le corpus, et abstraction faite des formes verbales indifférenciées (sur lesquelles nous reviendrons en toute fin d’étude), l’expression de la conjecture dans les aventures de Bob Morane s’orienterait plus vers le pôle du « certain » : les indicatifs représentent plus de la moitié du corpus étudié, alors que les subjonctifs n’en représentent que le quart.

19 Si nous dissocions les verbes gouvernés par les expressions négatives et non négatives, nous obtenons les répartitions suivantes :

Tableau D
Tableau D
Expressions non négatives Mode Occ. % Indicatifs 459 61 Formes indifférenciées 132 17,3 Subjonctifs 173 22,6 764 100 Expressions négatives Mode Occ. % Indicatifs 4 6,5 Formes indifférenciées 20 32,2 Subjonctifs 38 61,3 62 100

20 La tendance relevée sur l’ensemble du corpus s’accuse légèrement dans l’environnement des expressions non négatives, mais s’inverse totalement dans celui des expressions négatives.

21 Ces dernières n’avaient pas trouvé leur place dans le schéma guillaumien. L’inversion de tendance constatée conduirait à les regrouper du côté où sévit le subjonctif, à savoir du côté du pôle du « possible ». À ce point-ci de notre étude, il s’agit d’une nouvelle hypothèse qui demande, elle aussi, une vérification expérimentale, et qui est en outre logiquement contrainte : elle ne peut être vraie que si l’hypothèse guillaumienne se vérifie. Nous traiterons donc distinctement les chiffres liés aux expressions non négatives et négatives, de même que les chiffres liés aux formes indifférenciées.

4.2 – Expressions non négatives

22 Considérons tout d’abord les expressions non négatives (cf. tableau en annexe pour le détail) :

Tableau E
Tableau E
Expressions non négatives Mode Occ. % Indicatifs 459 61 Formes indifférenciées 132 17,3 Subjonctifs 173 22,6 764 100

23 La distribution des modes qu’elles gouvernent appelle différents commentaires.

4.2.1 – Gouvernant l’indicatif

4.2.1.1 –

24 Tout d’abord, nous observons une concentration des indicatifs à proximité du pôle du « certain ». La fréquence d’emploi de ce mode culmine avec des expressions, peu fréquentes il est vrai, comme il est hors de doute, il est presque certain, il est quasi certain,il est plus que probable voire certain :

[8]
Il est hors de doute que, dans de telles circonstances, ils devaient connaître également l’emplacement de la caisse.
(Formule X33, p. 21)
[9]
[…] car la région n’était pas très habitée et il était plus que probable, voire certain, qu’à des kilomètres à la ronde, il n’existait aucun restaurant chinois ou autre digne de ce nom.
(Le dragon des Fenstone, p. 13)
Si nous ne considérons que les expressions dont la fréquence est suffisamment élevée (nous fixons arbitrairement le minimum à 20 occurrences [12]), nous relevons que les indicatifs culminent avec il est probable sinon certain (90,9 %), il est probable (80,9 %) et il est certain (80,8 %) :
[10]
Il est en France pour l’instant, mais il est probable, sinon certain, qu’il a toujours des complices en Angleterre qui agissent en son lieu et place.
(Le châtiment de l’Ombre Jaune, p. 60)
[11]
Il était donc probable que l’homme-aux-regards-qui-tuent ne pouvait, lui non plus, apercevoir les fuyards.
(Les Yeux de l’Ombre Jaune, p. 127)
[12]
Il est certain que la personne qui a téléphoné à Rawes ignorait la mort de celui-ci…
(Escale à Felecidad, p. 75)
Voilà qui corrobore notre hypothèse de travail.

4.2.1.2 –

25 Toutefois, si nous classons les expressions relevées en fonction de leur affinité avec l’indicatif :

Tableau F
Tableau F
% Occ. ind. Total occ. possible sinon certain 100 5 5 fort possible sinon probable 100 1 1 vraisemblable 100 1 1 plus que probable voire certain 100 1 1 presque certain 100 2 2 quasi certain 100 7 7 hors de doute 100 1 1 probable sinon certain 90,9 20 22 probable 80,9 305 377 certain 80,8 42 52 probable voire certain 66,7 2 3 plus probable 66,7 2 3 fort probable sinon certain 66,7 2 3 fort probable 63,2 24 38 probable même 57,1 4 7 il se peut 50 2 4 possible même 50 2 4 fort possible sinon certain 28,6 2 7 possible 17,6 30 170 fort possible 9,1 4 44 pas impossible 0 0 4 possible mais non certain 0 0 1 possible sinon probable 0 0 4 fort possible même 0 0 1 grandes probabilités 0 0 1 probable et même certain 0 0 1

26 nous ne pouvons que nous étonner de la marge importante d’indicatifs générés par des expressions comme il est possible (17,6 %) ou il est fort possible (9,1 %) – ces déviances apparaissent en italiques dans le tableau F.

27 Les exemples demandent ici quelques éclaircissements.

4.2.1.3 –

28 Dans la plupart des cas déviants concernés (22 sur 40 cas retenus comme tels, soit 55 %), les verbes à l’indicatif gouvernés par ces expressions du pôle du « possible » sont au futur (futur simple, futur du passé et futur périphrastique [13]) :

[13]
Il est possible, messieurs, que l’on vous demandera de témoigner contre eux.
(L’œil d’émeraude, p. 55)
[14]
En effet, Sailor et son compagnon devaient, logiquement, se trouver dans les parages et il était possible qu’il faudrait se défendre contre leurs attaques.
(La voix du mainate, p. 120)
[15]
Il est fort possible qu’ils vont tenter de nous poursuivre…
(Mission à Orly, p. 126)
Il semble donc que nous ayons affaire ici à un mécanisme compensatoire entre l’expression modale de la conjecture et son expression temporelle, la première étant abandonnée ici au profit de la seconde.

4.2.1.4 –

29 Tous les cas marginaux du corpus ne s’expliquent toutefois pas de la sorte.

30 On pourrait alléguer que pour certains des exemples résiduels, l’indicatif (avec son découpage en trois époques temporelles) semble apte à exprimer plus subtilement que ne l’aurait fait le subjonctif (avec ses deux visées) les rapports temporels d’antériorité, de simultanéité et de postériorité :

[16]
Il est possible aussi que cette épave dérangeait quelqu’un
(L’île du passé, p. 28)
[17]
Il était possible qu’elle somnolait.
(La piste de l’ivoire, p. 57-8)
hypothèse qui s’appliquerait semblablement aux cas de futur traités ci-dessus :
[18]
[…] il est fort possible que nous aurons un gros effort à fournir au cours des jours à venir.
(Le masque de jade, p. 73)
Une autre hypothèse consisterait à expliquer ces discordances entre le pôle du « possible » et les indicatifs relevés en leur conférant un statut énonciatif distinct : le doute (trahi par les expressions conjecturales) appartiendrait aux personnages alors que la certitude (trahie par l’indicatif) appartiendrait au narrateur. Cette discordance serait alors un procédé utilisé par le narrateur pour préserver son omniscience, pour nous faire comprendre qu’il est le seul à avoir une complète maîtrise des événements. Notre constat s’inscrirait alors dans une caractéristique générale de l’écriture, du « style », de notre auteur – un style qu’il conviendrait alors d’analyser plus en profondeur, à la recherche d’autres indices d’éventuelles manifestations de l’auteur dans son texte. Contrairement à la première hypothèse, qui peut s’appuyer sur une théorie du verbe de type guillaumien, la seconde ne s’appuie sur rien de fondé : l’étude du « style » d’Henri Vernes reste à produire.

4.2.1.5 –

31 D’autres pistes doivent en revanche être écartées. Ainsi, dans les cotextes au passé :

[19]
Il était possible également que le simple contact de la couronne lui procurait une sorte de griserie, de sensation de pouvoir qu’il ne désirait pas voir s’étendre.
(La couronne de Golconde, p. 124)
ne peut-on invoquer une répugnance présumée à utiliser les formes obsolètes des subjonctifs imparfait et plus-que-parfait concordantiels, généreusement attestées par ailleurs :
[20]
Pourtant, il renonça à cette tentative, car il était possible, sinon probable, que cette porte fût gardée et que, essayant de la franchir, Nathalie et lui essuyassent des coups de feu.
(La rivière de perles, p. 76)
[21]
Il était possible d’ailleurs que ces derniers, la superstition l’emportant sur leur instinct combatif, hésitassent à pénétrer dans l’ancien sanctuaire.
(Les vapeurs du passé, p. 78)

4.2.2 – Gouvernant le subjonctif

32 Considérons maintenant les cas de subjonctifs relevés dans l’environnement des expressions non négatives.

4.2.2.1 –

33 Si on procède au classement des expressions conjecturales en fonction de leur affinité avec le subjonctif, on est à nouveau surpris de la marge importante de subjonctifs gouvernés par des expressions que nous avions rencontrées à proximité du pôle du certain :

Tableau G
Tableau G
% Occ. subj. Total occ. possible mais non certain 100 1 1 grandes probabilités 100 1 1 fort possible sinon certain 57,1 4 7 possible 50,6 86 170 il se peut 50 2 4 pas impossible 50 2 4 fort possible 45,5 20 44 probable voire certain 33,3 1 3 plus probable 33,3 1 3 fort probable sinon certain 33,3 1 3 possible sinon probable 25 1 4 fort probable 18,4 7 38 probable même 14,3 1 7 certain 11,5 6 52 probable 10,1 38 377 probable sinon certain 4,5 1 22 possible sinon certain 0 0 5 fort possible sinon probable 0 0 1 vraisemblable 0 0 1 plus que probable voire certain 0 0 1 presque certain 0 0 2 quasi certain 0 0 7 hors de doute 0 0 1 possible même 0 0 4 fort possible même 0 0 1 probable et même certain 0 0 1

34 En effet, si la présence parmi les expressions gouvernant majoritairement le subjonctif de il est possible n’a rien pour surprendre :

[22]
Pourtant, ils n’étaient encore qu’à mi-pente et il était possible que les deux scélérats se fussent cachés parmi les sapins.
(La voix du mainate, p. 129)
on s’attend moins à la rencontrer dans notre dernier tableau au voisinage de il est fort possible sinon certain :
[23]
Il est fort possible, sinon certain, que quelqu’un travaillant ici, à Bomba, pour la Compagnie, ait partie liée avec les ennemis de celle-ci, et ce quelqu’un peut être n’importe lequel d’entre vous.
(La griffe de feu, p. 50)
Si on ne considère que les expressions les plus fréquentes, on s’étonnera encore qu’une expression comme il est fort probable gouverne tant de subjonctifs (18,4 % des occurrences de cette expression sont concernées) ou plus simplement il est probable (10,1 %) :
[24]
S’il s’agit bien de Ming, songeait-il, il est fort probable que je sois déjà repéré, car il n’est pas homme à se laisser ainsi prendre en défaut.
(La revanche de l’Ombre Jaune, p. 25)
[25]
Il est probable qu’à l’heure actuelle elle soit morte…
(La forteresse de l’Ombre Jaune, p. 28)
Ici encore, les écarts appellent quelques commentaires, d’autant que les cas déviants de subjonctifs, c’est-à-dire de subjonctifs dans le pôle du certain constituent près d’un tiers (31,8 %) des subjonctifs relevés.

4.2.2.2 –

35 Écartons d’emblée l’entorse que constitue la seule occurrence de il y a de grandes probabilités :

[26]
Il y a de grandes probabilités en effet pour qu’il en soit ainsi, Bill, reconnut Morane.
(Les Semeurs de foudre, p. 38)
le subjonctif y semble davantage lié à la conjonction pour que qu’à l’expression conjecturale elle-même [14].

36 D’autres cas pourront être écartés presque aussi aisément.

37 Il y a tout d’abord ceux dont l’expression conjecturale, bien que localisée à proximité du pôle du « certain », est inscrite dans une construction interrogative (5 cas sur les 76 subjonctifs déviants que nous nous donnons à commenter) :

[27]
Êtes-vous [15] certain qu’il s’agisse de lui ?
(L’espion aux cent visages, p. 112)
Une mise en débat du « certain » ne saurait plus être du « certain », les subjonctifs sont alors tout à fait légitimes.

38 Même facilité à rendre compte des cas (13 sur 76) où le subjonctif est davantage lié à la formulation d’une hypothèse dans la complétive qu’à l’expression conjecturale :

[28]
Il était probable que, s’ils n’avaient pas couru pliés en deux, ils eussent été touchés.
(Escale à Felecidad, p. 49)
[29]
Sans elle, il est probable que nous eussions péri sous les coups des dacoïts…
(Les yeux de l’Ombre Jaune, p. 139)
voire à la présence d’une expression réorientant la conjecture vers la supposition (2 cas) :
[30]
Il est probable, supposa-t-il, que voilà un certain nombre d’années, ces deux hommes se soient entre-tués pour la possession du petit trésor que l’un d’eux portait.
(L’œil d’émeraude, p. 27)
Nous retrouvons également un subjonctif dans l’environnement d’un repère temporel futur :
[31]
Probable que dans quelques jours, justement, nous ayons affaire à des fauves bien plus dangereux…
(La panthère des Hauts Plateaux, p. 532)
Contrairement à ce qu’on a vu plus haut (§ 4.2.1.3.), il n’y a pas ici de mécanisme compensatoire mais plutôt une augmentation de la charge conjecturale, d’où une attraction de probable vers le pôle du possible (et du subjonctif).

4.2.2.3 –

39 Toutefois, une grande part des subjonctifs déviants qui ont retenu notre attention échappe à toutes ces explications. Et prolonger ici le raisonnement que nous tenions plus haut sur le statut énonciatif des exemples en cause (pour dire que, de temps en temps, le narrateur semble renoncer, ou feindre renoncer, à son omniscience) n’est guère convaincant – faute de pouvoir nous appuyer sur une étude globale du « style » d’Henri Vernes.

40 Il ne nous paraît toutefois pas inopportun de signaler, pour prendre une piste alternative, que l’ensemble des cas résiduels est lié à la présence du terme probable :

[32]
Il est probable que le monstre l’ait emporté au plus profond des marais, pour s’en repaître à son aise…
(Le dragon des Fenstone, p. 54)
Un raisonnement de type logicien rendrait compte sans difficulté de tels cas puisque la logique considère le probable comme une valeur liminaire, en équilibre instable sur la frontière entre possible et certain, susceptible de basculer tantôt d’un côté, tantôt de l’autre.

41 L’exemple suivant donnerait une parfaite illustration de ce fait :

[33]
Il est probable que le professeur ait besoin de tout son personnel à bord du Désirade, supposa-t-il, et qu’il a emmené domestiques et cuisinier…
(Opération Smog, p. 9)
La logique permettrait ainsi de réduire le caractère exceptionnel de ce groupe d’exemples, tout en restant dans une certaine forme d’orthodoxie guillaumienne, la notion de seuil y occupant une place de choix.

42 Ces exemples-ci sont encore intéressants dans le cadre de notre hypothèse. Nous soulignions en effet lorsque nous la formulions (§ 4) la réversibilité du principe (plus on s’éloigne du pôle du possible, plus la tendance à gouverner le subjonctif devrait s’affaiblir au bénéfice de l’indicatif – et inversement) [16]. Des exemples comme ceux que nous venons de traiter cautionnent cette idée de réversibilité, en nous montrant clairement que s’il est vrai que tout ce qui est plus que possible tend vers l’indicatif, tout ce qui est moins que certain tend vers le subjonctif.

4.3 – Les expressions négatives

43 Venons-en aux expressions négatives.

Tableau H
Tableau H
De l’impossible + impossible pas possible à peu près impossible bien improbable sinon impossible bien improbable assez improbable fort improbable fort peu probable peu probable improbable tout à fait improbable pas sûr… de beaucoup pas certain pas si certain À l’incertain -

44 Peu fréquentes dans notre corpus (bien que fort diversifiées), elles ont comme principale caractéristique de gouverner davantage de subjonctifs que d’indicatifs :

Tableau I
Tableau I
Expressions négatives Mode Occ. % Indicatifs 4 6,5 Formes indifférenciées 20 32,2 Subjonctifs 38 61,3 62 100

45 inversant la tendance générale de notre corpus d’une manière suffisamment nette pour justifier un traitement distinct.

46 Signalons d’emblée que la tendance modale relevée ici était déjà signalée par Guillaume, au moins pour ce qui relève de la « probabilité négative » (1929 : 45) :

La négation jointe au probable a pour effet de détruire l’excès positif de chances d’être que contient cette notion. On est ainsi ramené à l’égalité des chances d’être et de non-être qui caractérise la notion de possible.
De là l’emploi du mode subjonctif : il n’est pas probable qu’il vienne.
Un Guillaume qui ajoute (1929 : 45) :
Toutefois le mode subjonctif n’est pas ici de rigueur et l’on dit également : Il n’est pas probable qu’il viendra […].
Cette dernière construction signifie que l’excès de chances d’être contenu dans la notion de probable n’était pas entièrement détruit par la négation au moment où le verbe a pris rang dans la chaîne parlée.
Si on transporte le raisonnement de Guillaume au domaine de la « possibilité négative », la difficulté rencontrée à localiser les expressions négatives entre les pôles du « possible » et du « certain » viendrait de ce qu’elles représentent un en-deçà du pôle du « possible ». Le subjonctif est alors plus que légitime (nous sommes en éloignement maximal du pôle du « certain ») ; ce sont les indicatifs qui appellent une justification.

47 Dans le corpus, nous relevons 4 fois l’indicatif gouverné par une expression conjecturale négative :

[34]
Je vais me rendre immédiatement au consulat de France mais, s’il n’est pas sûr que j’y arrive, il n’est pas certain non plus que les choses tourneront comme l’espèrent Helbra et ses complices…
(Les joyaux du maharajah, p. 53)
[35]
Il n’était pas certain, en outre, que ses appels seraient entendus avec ce maudit smog qui ouatait les sons.
(Les sosies de l’Ombre Jaune, p. 28)
[36]
Peut-être trouverait-il une échelle d’incendie, mais il était peu probable qu’on lui laisserait le temps de la descendre.
(Le club des longs couteaux, p. 94)
[37]
Il devenait en effet de moins en moins certain que Xhatan finirait par respecter ses engagements, et Morane et Ballantine envisageaient une action désespérée.
(Le Mystérieux Docteur Xhatan, p. 118)
La première observation qu’amènent ces exemples est qu’ils impliquent tous des expressions conjecturales qui, abstraction faite de la négation, tendraient à gouverner l’indicatif – certain, probable, c’est-à-dire des expressions qui, dans le continuum, occupent la position la moins éloignée du pôle du « certain ». L’analyse proposée par Guillaume dans le cadre de la « probabilité négative » (1929 : 45) leur est donc directement transportable.

48 Une seconde observation est que dans tous les cas nous nous trouvons face à des indicatifs futur simple ([34]) ou futur du passé [35]-[37]). Nous retrouvons donc ici le mécanisme compensatoire entre expression modale et expression temporelle de la conjecture déjà rencontré précédemment (§ 4.2.1.3.).

5 – Les formes indifférenciées

49 Il reste à considérer la portion du corpus d’étude constituée des formes verbales que nous avons appelées indifférenciées.

50 Rappelons qu’après avoir constaté un grand flou orthographique dans les Aventures de Bob Morane, nous avons été amenée à ranger ici deux variétés de formes verbales :

  1. aux côtés des formes verbales indifférenciées en mode dont l’indifférenciation graphique est légitimée par l’usage (80 cas sur les 150 recensés, soit 53 %) :
[38]
Probable que le nommé Trapero n’aime pas voyager sans emporter de la lecture…
(Mission à Orly, p. 49)
[39]
Il est probable qu’on nous mène à l’Ombre Jaune.
(Les papillons de l’Ombre Jaune, p. 85)
  1. des formes verbales graphiquement différenciées dans l’usage, mais homophones (70 cas, soit 47 % des formes dites indifférenciées) et pour cette raison peut-être mal orthographiées dans le corpus :
[40]
De toute façon, à cause de la distance et du ton assez bas, il était probable qu’il lui eût été difficile de comprendre quoi que ce fût.
(Opération Smog, p. 117)
[41]
Il était même probable qu’à la suite de la grande attaque simulée par les forces des États-Unis, Tchan eut passé toute la nuit à veiller pour dépouiller les nouvelles qui lui parvenaient.
(Les dents du Tigre, p. 248)
Nous allons dissocier ces deux types de formes, qui appellent des traitements distincts. En effet, pour les premières formes, la question à laquelle nous devrons tenter de répondre est la suivante : « à quel mode sont-elles ? », en d’autres termes : « peut-on orienter l’interprétation modale de ces formes en fonction de l’expression conjecturale qui les gouverne ? » En revanche, pour les secondes, nous aurons à nous demander si la forme graphique adoptée coïncide avec les prévisions sur le mode que l’on peut faire lorsqu’on prend en considération l’expression conjecturale qui les gouverne.

5.1 – Formes homographiques

51 L’indifférenciation graphique touche essentiellement les verbes en –er, dont toutes les formes du subjonctif présent coïncident soit avec des formes de l’indicatif présent (trois personnes du singulier et 3e du pluriel), soit avec des formes de l’indicatif imparfait (1re et 2e personnes du pluriel).

52 On retrouve ces formes homographiques associées aux expressions conjecturales suivantes :

Tableau J
Tableau J
Expressions Occ. certain 3 probable et même certain 1 fort probable 4 probable même 1 probable 20 fort possible 10 fort possible sinon certain 1 possible sinon probable 2 pas impossible 2 possible 27 peu probable 6 fort improbable 2 impossible 1

5.1.1 –

53 En tenant compte de ce qui précède, on pourra orienter vers l’indicatif l’interprétation des formes homographiques gouvernées par des expressions conjecturales au plus proche du pôle du « certain » :

[42]
Il est certain que ces vieilles pierres datent d’une époque jusqu’à laquelle ne remontent pas les souvenirs de l’humanité.
(Les vapeurs du passé, p. 28)
[43]
Il est probable, et même certain, que les hommes-crapauds nous guettent au-dehors…
(L’empreinte du crapaud, p. 137)

5.1.2 –

54 On pourra de même orienter vers le subjonctif l’interprétation des formes homographiques gouvernées par des expressions conjecturales au plus proche du pôle du « possible » :

[44]
Il n’est donc pas impossible, comme l’affirment les indigènes habitant l’archipel inconnu, qu’un ou plusieurs spécimens vivants ne [17] hantent encore les parages…
(La croisière du Mégophias, p. 21)
[45]
Il est possible qu’au moment du partage ils se rebiffent.
(La couronne de Golconde, p. 48)
ou en deçà de ce pôle :
[46]
Il est impossible que votre police, qui se prétend la meilleure du monde, ne possède pas quelque renseignement sur elle !
(Les masques de soie, p. 102)
[47]
Il est en effet fort improbable que les ptéranodons se nettoient les dents tous les jours…
(Le secret de l’Antarctique, p. 73)

5.1.3 –

55 Restent les expressions gravitant autour du concept de « probable » (à savoir essentiellement celles qui impliquent le terme probable). Notre corpus de formes différenciées les montre gouvernant majoritairement des indicatifs, ce qui peut nous inciter à orienter en ce sens les nombreuses formes indifférenciées que nous avons relevées :

[48]
Si nous avons échappé aux Diables Volants, il est probable que le Masque Bleu et les Ot-Donon nous attendent au-dehors pour régler définitivement notre sort…
(Le masque bleu, p. 77)
Cette option, dictée par les seules statistiques, est davantage convaincante lorsque ces expressions sont modulées pour se rapprocher du pôle du « certain » :
[49]
Il est donc fort probable que les Morcegos ne connaissent pas l’usage du fer, ni d’aucun autre métal.
(Sur la piste de Fawcett, p. 65)
Le corpus nous les montre toutefois basculant facilement vers le subjonctif. C’est de cette manière que l’on serait tenté de comprendre l’exemple [50] :
[50]
Mais ne demeurons pas ici car, il est probable que, tôt ou tard, le reste de la bande nous tombe sur le dos…
(L’ennemi masqué, p. 135)
où le subjonctif est plus défendable que l’indicatif en raison de repères temporels du futur (tôt ou tard) – qui s’accommodent plus aisément du subjonctif à visée prospective que de l’indicatif présent.

5.1.4 –

56 L’analyse peut encore être orientée, dans un sens ou dans l’autre, lorsque la forme homographique est coordonnée avec une forme différenciée dont le mode est sans ambiguïté :

[51]
Il est probable que les complices de Yan Mandreza dorment encore et qu’il y ait un veilleur installé dans la dunette, veilleur que nous ne pouvons apercevoir d’où nous nous trouvons…
(Le Roi des Archipels, p. 44)
[52]
Il est probable, dit-il finalement, que les Toungouses pensent que ces galeries, et le temple qui en est le centre, sont hantés par les mauvais esprits.
(Les vapeurs du passé, p. 84)

5.1.5 –

57 En revanche, les « règles » de concordance des temps ne sont d’aucun secours dans l’orientation de l’interprétation des formes homographiques. Examinons deux exemples.

58 Le premier implique une expression conjecturale construite autour d’un verbe à l’indicatif présent – cas de figure le plus fréquent dans le corpus :

[53]
Eh bien ! petite fille, il est probable que vous ne pensiez pas qu’il me serait possible de faire passer ce luxueux et encombrant carrosse à travers le chas d’une aiguille !
(Les mangeurs d’âmes, p. 132)
Le fait que pensiez régisse un verbe au futur du passé (serait) peut inciter à l’interpréter comme un passé, c’est-à-dire comme un indicatif imparfait ; il y aurait alors un rapport d’antériorité entre vous pensiez et il est probable ; l’exemple signifierait « il est probable qu’avant l’instant présent, vous ne pensiez pas/avez pas pensé que… ». Toutefois, les formes du futur du passé peuvent s’accommoder d’autres cotextes temporels, et la présence de serait n’exclut pas l’analyse de pensiez en terme de subjonctif présent ; l’exemple signifierait « il est probable que vous ne pens(i)ez pas en ce moment que… ».

59 Le second exemple implique l’unique occurrence relevée d’expression du « probable » à l’imparfait gouvernant une forme non différenciée :

[54]
Il était donc probable que vous n’accomplissiez pas ce voyage à reculons par vos propres moyens…
(Les captifs de l’Ombre Jaune, p. 126)
La concordance des temps voudrait que la forme gouvernée soit interprétée comme une forme du passé. Toutefois une telle orientation de l’interprétation de la forme indifférenciée ne serait garantie que pour autant que les règles de la concordance des temps, si tant est qu’il existe de telles règles en français [18], soient strictement appliquées dans les textes étudiés, ce qui est loin d’être le cas, que le cotexte soit au passé ou au présent :
[55]
En homme habitué à ce que sa volonté tienne lieu de loi et à ce que ses ordres fussent exécutés sans discussion, le colonel Sangart n’avait pas formulé de commentaire à ces dernières paroles.
(Le secret de l’Antarctique, p. 122)
[56]
Il vous faudra détruire cette machinerie, mais il est possible que, pour y parvenir, vous dussiez vous heurter à Monsieur Ming lui-même.
(Les jardins de l’Ombre Jaune, p. 131)
Et quand bien même, le seul exemple dont nous disposons implique une forme verbale également indifférenciée au subjonctif présent et au subjonctif imparfait. On ne peut donc rien en tirer.

5.1.6 –

60 Pour conclure, on dira donc que la polarité des expressions conjecturales en cause et les tendances statistiques dégagées par l’étude de la partie du corpus dont les formes peuvent être étiquetées sans ambiguïté permettent souvent de désambiguïser les formes verbales homographiques, mais que d’autres informations peuvent venir tantôt renforcer tantôt réorienter l’interprétation.

5.2 – Formes homophones

61 Le traitement des formes homophones sera, comme annoncé, tout à fait différent de celui des formes homographiques, légitimement indifférenciées.

62 En admettant que la graphie adoptée par l’auteur soit dans tous les cas conforme au mode souhaité, les 70 formes homophoniques se distribueraient comme suit :

Tableau K
Tableau K
Expression Ind. Subj. certain 1 probable sinon certain 1 fort probable 2 probable même 1 probable 4 10 possible sinon probable 1 fort possible même 1 fort possible 4 7 possible même 2 possible 8 17 peu probable 2 fort peu probable 1 assez improbable 3 fort improbable 2 improbable 1 1 impossible 1

63 Ce tableau appelle des commentaires variés.

5.2.1 – Verbes adoptant la forme graphique du subjonctif

64 Globalement, les subjonctifs seraient ici beaucoup plus nombreux que les indicatifs : on dénombre en effet 74 % de subjonctifs (52 occ.) pour 26 % d’indicatifs (18 occ.), alors que la répartition des modes sur l’ensemble du corpus (hors formes indifférenciées) donne 31 % de subjonctifs pour 69 % d’indicatifs.

65 Si cette proportion est conforme à la tendance générale dans le cas des expressions conjecturales négatives (90 % de subjonctifs pour 10 % d’indicatifs ici, quand pour le reste du corpus, abstraction faite des formes dites indifférenciées, le rapport est de 93 % / 7 %) :

[57]
Il était assurément impossible que Bob Morane s’adressât à quelqu’un de mieux renseigné que Sir Archibald Baywatter, qui n’é tait autre que le commissioner – le commissaire en chef – de Scotland Yard, donc un des plus hauts magistrats britanniques.
(S.S.S., p. 55)
[58]
[…] il était assez improbable que, dans cet état, le Mongol se fût assuré la collaboration d’un aveugle.
(La forteresse de l’Ombre Jaune, p. 110)
elle ne l’est pas pour les formes non négatives (72 % de subjonctifs pour 28 % d’indicatifs ici, alors que pour le reste, le rapport est de 27 % / 73 %).

66 Il ne faut pas perdre de vue cependant que l’homophonie étudiée ici ne concerne de fait que les formes du passé simple et du subjonctif imparfait, qui plus est à la seule 3e personne du singulier. Pour le reste du corpus, 2 paradigmes du subjonctif (présent et imparfait) [19] affrontent 6 paradigmes de l’indicatif (passé simple, imparfait, présent, futur, futur périphrastique et futur du passé), ce qui laisse présager un rapport de forces en faveur des seconds. Dans le cas des formes homophones, la lutte est égale : une forme du subjonctif face à une forme de l’indicatif.

67 Mais cette modification du rapport de forces n’explique pas tout. Si on examine les choses de près, c’est-à-dire en mettant les formes verbales en relation avec les expressions conjecturales qui les gouvernent, on a une impression de désordre total. On relève par exemple que il est probable gouverne ici une majorité de subjonctifs graphiques et que plus on s’approche du pôle du « certain », plus la proportion de ces subjonctifs augmente :

[59]
De toute façon, de nombreux dockers s’affairaient un peu partout à présent et il était probable, sinon certain, que si Ballantine avait été quelque part dans les parages, il eût déjà été découvert.
(Les crapauds de la mort, p. 25-28)
[60]
Il était certain que, s’il n’avait pas été bâillonné, il se fût mis à hurler.
(Les semeurs de foudre, p. 142)
[61]
Il eût pu tenter à nouveau d’empêcher Morane et Ballantine de partir et, cette fois, il était probable qu’il eût employé des moyens plus énergiques que précédemment.
(La guerre des baleines, p. 55)
Cette déviance s’efface toutefois devant l’observation que les subjonctifs graphiques relevés dans la suite des expressions proches du pôle du « certain » sont tous impliqués dans des constructions hypothétiques (cf. § 4.2.2.2), comme le montrent les trois exemples ci-dessus, échantillons tout à fait représentatifs.

5.2.2 – Verbes adoptant la forme graphique de l’indicatif

68 La plupart des indicatifs graphiques que nous rencontrons dans la suite d’expressions localisées à proximité du pôle du « possible » sont, eux, clairement déviants.

69 Si à la rigueur, sut pourrait être considéré comme une variante, inattendue, de savait dans l’exemple ci-dessous :

[62]
Et puis, Forceville paraissait sincère, et il était fort possible que, réellement, il ne sut pas où se trouvait Van Horn.
(Trafic aux Caraïbes, p. 30)
l’indicatif est difficile à maintenir dans [63] :
[63]
Sans le lépreux aveugle et sa compagne, qui l’avaient tiré de plusieurs situations désespérées, il était possible qu’il n’eut jamais atteint son but.
(Le châtiment de l’Ombre Jaune, p. 109)
où la forme verbale s’inscrit dans un système hypothétique (la condition étant sans le lépreux aveugle et sa femme) et véhicule un effet de sens potentiel incompatible avec le passé simple.

70 Improbable indicatif aussi que la forme put gouvernée par une expression conjecturale négative :

[64]
Instinctivement, bien qu’il fut [20] bien improbable que le récipient put l’atteindre à travers l’étroite ouverture lui servant de meurtrière, instinctivement donc, Bob se baissa.
(Formule X33, p. 126)
ou encore que cette forme fut, gouvernée par une expression bien du pôle du « certain » (il est possible + mise en débat par l’interrogation) :
[65]
Était-il possible que Tania, qui connaissait bien son parent, se fut laissé abuser aussi grossièrement ?
(Le retour de l’Ombre Jaune, p. 76)

5.2.3 – Bilan

71 Que conclure de l’examen rapide de ces derniers exemples ?

72 Si par précaution, craignant des interférences du fait du nombre impressionnant de « coquilles » rencontrées dans les aventures de Bob Morane, nous avions isolé les formes verbales homophones du reste de notre corpus, les déviances relevées vont toutes dans le même sens : la plupart des formes homophones orthographiées comme des passés simples doivent être interprétées comme des subjonctifs imparfaits, alors que les formes homophones orthographiées comme des subjonctifs imparfaits sont réellement des subjonctifs imparfaits. [21]

6 – Conclusion

73 L’hypothèse guillaumienne de la distribution des modes associait le subjonctif au concept de possible et l’indicatif au concept de certain, dont celui de probable était donné comme une des facettes.

74 Après avoir agencé intuitivement les expressions conjecturales que nous avons relevées dans les aventures de Bob Morane entre les pôles du possible et du certain, nous avons, dans l’examen des corrélations entre expressions conjecturales et mode, noté :

  1. une concentration des indicatifs à proximité du pôle du certain et une concentration (moins nette, mais aussi sur un corpus moins nombreux) des subjonctifs à proximité du pôle du possible ;
  2. une dilution progressive à mesure que l’on s’écarte de l’un et l’autre de ces deux pôles
Ce double constat corrobore l’hypothèse guillaumienne. L’étude de corpus révèle toutefois qu’il est plus judicieux de considérer, comme le font les logiciens, le probable comme un concept équidistant situé entre les deux pôles du possible et du certain, plutôt que comme une variante du certain, comme le fait Guillaume, ou, vu sous l’angle de la distribution des modes, comme le seuil où on bascule tantôt du côté du subjonctif, tantôt du côté de l’indicatif. L’idée d’une valeur liminaire conserve d’ailleurs pleinement sa pertinence psychomécanique (cf. Moignet, 1981 : § 94) : le concept de « seuil » est en effet omniprésent dans les analyses de Guillaume et de ceux qui se réclament de la psychomécanique du langage (sur ce point, cf. par exemple Wilmet, 1978).

75 Toutefois, même au contact des deux pôles du possible et du certain, nous avons relevé des écarts : des indicatifs gouvernés par l’expression sans ambiguïté du possible, des subjonctifs gouvernés par l’expression sans ambiguïté du certain. Différents facteurs entrent alors en considération :

  1. l’indicatif peut être préféré au subjonctif en raison de son raffinement temporel ou, mais cela reste à vérifier, pour des raisons relevant de la stratégie d’écriture (narrateur omniscient) ;
  2. le subjonctif peut être préféré à l’indicatif en raison d’interférences avec différents processus syntaxiques (construction hypothétique, imbrication des constructions conjecturales…) ou sémantiques (mise sous débat, négation).
Ces deux derniers constats débordent largement l’hypothèse guillaumienne ; ils restent toutefois, eux aussi, pertinents dans la cadre de la psychomécanique, et soulignent la cohérence et la puissance du système verbal construit par Guillaume, un système qui n’a pas fini d’inspirer les grammairiens (nos constats recoupent ainsi ceux de Wilmet, 2003 : § 383).

76 Que les cas soient conformes à l’hypothèse ou déviants, les corrélations révélées par notre corpus sont si fortes et si régulières que l’on peut faire des prévisions fiables sur le choix du mode. Cela nous a permis :

  1. d’orienter l’interprétation des formes verbales qui adoptent une graphie proprement indifférenciées en mode (homographie stricte) ;
  2. de réinterpréter les formes verbales qui adoptent une graphie improprement indifférenciée en mode en raison d’une maîtrise imparfaite du système graphique (homophonie seule).


7. Annexe
tableau im13
Occurrences % expression % mode % corpus Expressions non négatives I II III I II III I II III I II III il se peut 4 2 2 50 0 50 0,4 0 0,9 0,2 0 0,2 possible 170 30 54 86 17,6 31,8 50,6 6,5 36,0 40,8 3,6 6,5 10,4 possible même 4 2 2 50 50 0 0,4 1,3 0 0,2 0,2 0 pas impossible 4 2 2 0 50 50 0 1,3 0,9 0 0,2 0,2 possible mais non certain 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 possible sinon certain 5 5 100 0 0 1,1 0 0 0,6 0 0 possible sinon probable 4 3 1 0 75 25 0 2 0,5 0 0,4 0,1 fort possible 44 4 20 20 9,1 45,5 45,5 0,9 13,3 9,5 0,5 2,4 2,4 fort possible même 1 1 0 100 0 0 0,7 0 0 0,1 0 fort possible sinon probable 1 1 100 0 0 0,2 0 0 0,1 0 0 Occurrences % expression % mode % corpus fort possible sinon certain 7 2 1 4 28,6 14,3 57,1 0,4 0,7 1,9 0,2 0,1 0,5 vraisemblable 1 1 100 0 0 0,2 0 0 0,1 0 0 probable même 7 4 2 1 57,1 28,6 14,3 0,9 1,3 0,5 0,5 0,2 0,1 probable 377 305 34 38 80,9 9 10,1 65,6 22,7 18 36,9 4,1 4,6 probable sinon certain 22 20 1 1 90,9 4,5 4,5 4,3 0,7 0,5 2,4 0,1 0,1 probable voire certain 3 2 1 66,7 0 33,3 0,4 0 0,5 0,2 0 0,1 plus probable 3 2 1 66,7 0 33,3 0,4 0 0,5 0,2 0 0,1 grandes probabilités 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 fort probable 38 24 7 7 63,2 18,4 18,4 5,2 4,7 3,3 2,9 0,8 0,8 fort probable sinon certain 3 2 1 66,7 0 33,3 0,4 0 0,5 0,2 0 0,1 probable et même certain 1 1 0 100 0 0 0,7 0 0 0,1 0 plus que probable voire certain 1 1 100 0 0 0,2 0 0 0,1 0 0 presque certain 2 2 100 0 0 0,4 0 0 0,2 0 0 quasi certain 7 7 100 0 0 1,5 0 0 0,8 0 0 hors de doute 1 1 100 0 0 0,2 0 0 0,1 0 0 certain 52 42 4 6 80,8 7,7 11,5 9 2,7 2,8 5,1 0,5 0,7 Expressions négatives impossible 8 2 6 0 25 75 0 1,3 2,8 0 0,2 0,7 pas possible 3 3 0 0 100 0 0 1,4 0 0 0,4 à peu près impossible 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 bien improbable sinon impossible 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 bien improbable 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 assez improbable 3 3 0 100 0 0 2 0 0 0,4 0 fort improbable 9 4 5 0 44,4 55,6 0 2,7 2,4 0 0,5 0,6 fort peu probable 4 1 3 0 25 75 0 0,7 1,4 0 0,1 0,4 peu probable 17 1 8 8 5,9 47,1 47,1 0,2 5,3 3,8 0,1 1 1 improbable 6 2 4 0 33,3 66,7 0 1,3 1,9 0 0,2 0,5 tout à fait improbable 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 pas sûr… de beaucoup 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 de moins en moins certain 1 1 100 0 0 0,2 0 0 0,1 0 0 pas certain 5 2 3 40 0 60 0,4 0 1,4 0,2 0 0,4 pas si certain 1 1 0 0 100 0 0 0,5 0 0 0,1 826 465 150 211 56,3 18,2 25,5
Légende
Occurrences = nombre total d’occurrences relevées pour chaque expression-source ; Répartion : répartition des occurrences entre les différents modes ; % expression = conversion en % du nombre d’occurrences ; % mode = conversion en % du nombre d’occurrences par rapport au nombre total d’occurrences pour chaque mode ; % corpus = conversion en % du nombre d’occurrences par rapport au nombre total d’occurrences du corpus
I = nombre d’occurrences de l’expression gouvernant l’indicatif ; II = nombre d’occurrences de l’expression gouvernant une forme indifférenciée ; III = nombre d’occurrences de l’expression gouvernant une forme au subjonctif

8. Références bibliographiques

  • 8.1. Les aventures de Bob Morane

    • 8.1.1. Chez Marabout (Verviers) :
      La Vallée infernale (1953) ; L’Héritage du flibustier (1954) ; Panique dans le ciel (1954) ; Sur la piste de Fawcett (1954) ; La vallée des Brontosaures (1955) ; Le Sultan de Jarawak (1955) ; Les Secret des Mayas (1955) ; Oasis K ne répond plus (1955) ; La Cité des sables (1956) ; La Croisière du Mégophias (1956) ; La Marque de Kâli (1956) ; Le masque de jade (1956) ; Les Monstres de l’espace (1956) ; Échec à la main noire (1957) ; L’Empereur de Macao (1957) ; Les Démons des cataractes (1957) ; L’Idole verte (1957) ; Les Compagnons de Damballah (1958) ; Les Dents du tigre (1958) ; Les géants de la Taïga (1958) ; L’Orchidée noire (1958) ; Tempête sur les Andes (1958) ; La Couronne de Golconde (1959) ; L’Ombre Jaune (1959) ; La Revanche de l’Ombre Jaune (1959) ; Le Démon solitaire (1959) ; Le Maître du silence (1959) ; La Vallée des 1000 soleils (1960) ; Le Châtiment de l’Ombre Jaune (1960) ; Le Diable du Labrador (1960) ; Le Retour de l’Ombre Jaune (1960) ; L’Espion aux cent visages (1960) ; L’Homme aux dents d’or (1960) ; Le Dragon des Fenstone (1961) ; Le Temple des crocodiles (1961) ; Les Mangeurs d’atomes (1961) ; Les Sosies de l’Ombre Jaune (1961) ; Trafic aux Caraïbes (1961) ; Formule X33 (1962) ; La Galère engloutie (1962) ; La Voix du mainate (1962) ; Le Club des longs couteaux (1962) ; Le Lagon aux requins (1962) ; Le Masque bleu (1962) ; L’Ennemi invisible (1962) ; Les Semeurs de foudre (1962) ; Les Yeux de l’Ombre Jaune (1962) ; Mission pour Thulé (1962) ; La Guerre des baleines (1963) ; La Rivière de perles (1963) ; La Vapeur du passé (1963) ; Les sept Croix de plomb (1963) ; Opération Wolf (1963) ; Escale à Felicidad (1964) ; Le Camion infernal (1964) ; L’Ennemi masqué (1964) ; Les Joyaux du Maharajah (1964) ; L’Œil d’émeraude (1964) ; Mission à Orly (1964) ; S.S.S. (1964) ; La Cité de l’Ombre Jaune (1965) ; Le Président ne mourra pas (1965) ; Le Secret de l’Antarctique (1965) ; Les Guerriers de l’Ombre Jaune (1965) ; Les Jardins de l’Ombre Jaune (1965) ; Terreur à la Manicouagan (1965) ; Le Collier de Çiva (1966) ; Le Roi des archipels (1966) ; Organisation Smog (1966) ; Xhatan, Maître de la Lumière (1966) ; Le Cratère des immortels (1967) ; Le Samouraï aux 1000 soleils (1967) ; Le Talisman des Voïvodes (1967) ; Un Parfum d’Ylang-Ylang (1967) ; Les Crapauds de la mort (1967) ; L’Empreinte du crapaud (1968) ; Les Papillons de l’Ombre Jaune (1968) ; Les Satellites de l’Ombre Jaune (1968) ; Les Captifs de l’Ombre Jaune (1968) ; Alias M.D.O. (1968) ; Les Masques de soie (1969) ; Les Sortilèges de l’Ombre Jaune (1969) ; Menace sous la mer (1969) ; L’Oiseau de feu (1969) ; Les Tours de cristal (1970) ; Commando épouvante (1970) ; Les Bulles de l’Ombre Jaune (1970) ; La Piste de l’ivoire (1970) ; L’île du passé (1970) ; Rendez-vous à nulle part (1971) ; Panne sèche à Serado (1973) ; Le Secret des sept temples (1973) ; Les Requins d’acier (s.d. [1955]) ; Opération Atlantide (s.d. [1956]) ; La Fleur du sommeil (s.d. [1957]) ; L’Héritage de l’Ombre Jaune (s.d. [1963]).
    • 8.1.2. Chez Lefrancq (Bruxelles) :
      Dans le Triangle des Bermudes (1998) ; Les yeux du brouillard (1998) ; L’Exterminateur (1998) ; Le jade de Séoul (1998) ; La Panthère des hauts plateaux (1998) ; Les Démons de la Guerre (1998) ; Les larmes du soleil (1998) ; Le réveil de Kukulkan (1998).
  • 8.2 Linguistique

    • Brunot F., 19533, La pensée et la langue, Paris, Masson, 3e édition.
    • Guillaume G., 1929, Temps et verbe, Paris, Champion.
    • Martin R., 1971, Temps et aspect, Paris, Klincksieck.
    • Moignet G., 1981, Systématique de la langue française, Paris, Klincksieck.
    • Wilmet M., 1976, Étude de morphosyntaxe verbale, Paris, Klincksieck.
    • Wilmet M., 19782, Gustave Guillaume et son école linguistique, Paris-Bruxelles, Nathan-Labor.
    • Wilmet M., 20033, Grammaire critique du français, Bruxelles, Duculot, 3e édition.

Date de mise en ligne : 01/03/2006

https://doi.org/10.3917/tl.051.0007

NOTES

  • [*]
    Université Libre de Bruxelles
  • [1]
    Recensement arrêté au 31 décembre 2005 ; trois volumes s’ajoutent chaque année à la liste.
  • [2]
    C’est pourquoi nous n’avons procédé au dépouillement que d’un petit nombre des textes récents. Pour la liste des textes lus, nous renvoyons à la bibliographie en fin d’article.
  • [3]
    Nous avons retenu les expressions unipersonnelles exclusivement pour éviter d’avoir à traiter d’éventuelles interférences entre le concept de possible-certain et celui de la personne.
  • [4]
    Dans nos relevés, le « conditionnel » est assimilé à une forme de l’indicatif ; le « conditionnel passé 2e forme » est ramené à un subjonctif. Ce choix nous est imposé par la morphologie : le « conditionnel » combine les marques flexionnelles du futur et de l’imparfait, deux temps de l’indicatif ; le « conditionnel passé 2e forme » emprunte ses formes au subjonctif plus-que-parfait. Pour le détail de l’organisation du système verbal, on se reportera à Wilmet 2003.
  • [5]
    Le dénombrement porte au départ sur les seules formes verbales des complétives. Lorsque plusieurs formes verbales sont concaténées ou coordonnées dans une complétive, elles sont comptabilisées distinctement. Dans ces cas particuliers, nous avons considéré, de manière artificielle, que l’expression conjecturale distributive apparaissait autant de fois qu’il y avait de formes concaténées ou coordonnées, ce qui nous permettait d’harmoniser le nombre des occurrences de formes verbales et celui des expressions conjecturales.
  • [6]
    Et ce, de l’édition originale à l’ultime réédition.
  • [7]
    L’expression il est réel que, intégrée dans le schéma guillaumien, n’apparaît pas dans les textes qui ont servi à l’établissement du corpus.
  • [8]
    Plus si on prend en considération quelques variantes syntagmatiques (ponctuation, incise…).
  • [9]
    Bien que la synonymie ne soit pas sûre, les expressions du type il est même possible/probable n’ont pas été différenciées de il est possible/probable même.
  • [10]
    Le schéma guillaumien est, lui, sans nuance pour le domaine du possible.
  • [11]
    Qui plus est, l’étude d’un corpus sur la fiabilité duquel nous avons nous-même émis quelques réserves.
  • [12]
    Sont alors concernées les expressions il est possible/fort possible/probable/probable sinon certain/fort probable/certain, qui représentent à elles seules 703 occurrences sur les 826 que compte le corpus (85,1 %).
  • [13]
    Pour les raisons qui incitent à ne pas traiter distinctement ces 3 « tiroirs » verbaux, autrement dit pour une approche unitaire du futur, nous renvoyons à Wilmet (2003 : §§ 481-487 & 521-534).
  • [14]
    Une variante sans pour ne nous a pas semblée exclue, raison pour laquelle nous avons assimilé cette construction à une complétive.
  • [15]
    Les exemples concernés ici illustrent par ailleurs une construction personnelle. Ils sont donc doublement marginaux dans notre corpus.
  • [16]
    Cette réversibilité est absente de l’hypothèse guillaumienne, du fait sans doute que celle-ci s’inscrit dans le cadre de la chronogénèse : le temps est irréversible.
  • [17]
    La présence de « ne » nous semble ici intempestive.
  • [18]
    Nous tendons à nous rallier à l’opinion de Brunot (1953 : 782) selon laquelle de telles règles n’existent pas en français.
  • [19]
    Nous faisons ici l’économie des variantes composées et surcomposées de ces paradigmes.
  • [20]
    Ici encore, confusion vraisemblable d’homophones.
  • [21]
    En d’autres termes, l’erreur orthographique consiste davantage à omettre l’accent circonflexe là où il serait nécessaire qu’à l’ajouter là où il n’en faut pas.

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