Couverture de TH_654

Article de revue

La dynamique relationnelle au sein d'équipes de conception

Pages 339 à 361

Notes

  • [1]
    Les définitions proposées sont développées et testées dans Dameron (2002). Notre construction théorique se concentre ici plus spécifiquement sur l’analyse du processus coopératif.
  • [2]
    Les cinq types de groupe repérés par D. Anzieu et J.-Y. Martin sont la foule, le groupement, la bande, le groupe restreint et le groupe secondaire (la grande entreprise, par exemple). Tous ces groupes, même lorsqu’ils sont éphémères, peuvent porter le processus d’identification sociale. Nous développons ici le groupe restreint, car il est représentatif des équipes de conception, mais nous pourrions étudier, comme le font généralement les travaux cités, le phénomène d’identification sociale dans le groupe secondaire, l’entreprise par exemple ou encore les communautés professionnelles (Dubar, 1991).
  • [3]
    Ces attributs sont mis à l’épreuve du terrain dans Dameron (2002).
  • [4]
    Dans les deux cas, le remplissage de cette carte s’est fait quelque temps après le codage des incidents dans la base de données. Cette situation nous a permis d’effectuer un double codage diachronique et ainsi d’éviter au maximum les erreurs de codage liées à la fatigue et à la lassitude.
  • [5]
    Les fonctions mathématiques afférentes ont été analysées. Les séries temporelles apparaissent cependant trop courtes pour statuer sur leur nature, notamment sur leur caractère chaotique ou non.
  • [6]
    Par exemple, les membres de l’équipe de PSA ont un calendrier qui établit le compte à rebours avant la date de fin du projet semaine par semaine. De même, le calendrier établi par le chef de projet technique de SITA a comme unité de temps la semaine.
English version

I. INTRODUCTION

1Sans conteste, la complexité des problèmes à résoudre constitue une des spécificités des activités de conception ; la résolution de ces problèmes nécessite de regrouper au sein d’un même collectif de travail des compétences multiples. L’équipe projet est en ce sens caractéristique ; elle réunit des acteurs porteurs de compétences diverses, sans lien hiérarchique, impliqués le plus en amont possible d’une innovation. La structure de ces équipes favorise ainsi explicitement le développement de relations de coopération.

2Or la dynamique des relations coopératives au sein des équipes de conception reste encore peu étudiée. Ainsi, selon une étude de B. Ulri et D. Ulri (2000), les travaux sur la gestion de projet portent plutôt sur les outils afférents ainsi que sur le mode de fonctionnement de ces équipes et son impact sur les structures organisationnelles. Lorsque la dynamique coopérative est analysée, les travaux se penchent essentiellement sur les modalités d’apprentissage qui permettent la combinaison de nouveaux savoirs et la production de connaissances (Midler, 1993 ; Nonaka, 1994 ; Charue-Duboc, 1995 ; Hatchuel, 1996 ; de Terssac & Friedberg, 1996). Les recherches se concentrent alors sur le processus de co-élaboration du projet, mais sans décortiquer de manière systématique la dynamique relationnelle sous-jacente.

3C’est l’objet de cet article. Il faut cependant préciser que l’approche choisie s’écarte d’autres types d’analyse des activités coopératives de conception. Certaines recherches les caractérisent en effet en fonction de la diversité et de la nature des tâches (Schmidt, 1991 ; Soubie, Buratto, & Chabaud 1996), d’autres suivant le caractère cognitif ou opératoire des communications (Falzon, 1994 ; Darses & Falzon, 1996). Parce que la coopération est un opérateur non seulement de connaissances sur le projet commun, mais aussi de relations spécifiques entre les experts, nous avons choisi de creuser la nature du lien social entre les partenaires et d’en étudier la dynamique.

4Pour cela, nous présentons dans une première partie une double perspective sur la coopération. La première repose sur une rationalité calculatoire et peut être conceptualisée notamment grâce aux théories économiques sur les contrats et grâce à la sociologie de l’acteur ; la seconde repose sur une rationalité identitaire, elle trouve ses fondements théoriques dans l’école des relations humaines en gestion et dans les travaux sur la dynamique de groupe en psychosociologie. Cette définition a priori dualiste des relations de coopération a été testée dans Dameron (2002) ; elle constitue notre grille de lecture pour étudier, dans une seconde partie, la dynamique relationnelle au sein de deux équipes projet dans deux entreprises différentes, PSA, appartenant à l’industrie automobile, et SITA, filiale de la Lyonnaise des Eaux, spécialisée dans le traitement des déchets. Nous explicitons notre démarche méthodologique et la modélisation de la dynamique coopérative à laquelle nous aboutissons dans le cas des activités de conception.

II. VERS UNE GRILLE DE LECTURE RELATIONNELLE DE LA DYNAMIQUE COOPÉRATIVE DANS L’ORGANISATION

5Au regard de son étymologie, coopérer c’est travailler ensemble, conjointement. Cette notion de travail conjoint peut être précisée par le fait de « concourir à une œuvre commune » (Le Larousse). Parce que la coopération relève de l’action collective finalisée, elle nécessite de partager consciemment entre individus une tâche commune dans des relations de dépendance mutuelle.

6Fondatrice du lien social, la notion de coopération est centrale dans la réflexion sociologique (Bernoux, 1999). Or ce lien social est analysé suivant une perspective duale (Weber, 1917 ; Durkheim, 1930) résumée par la distinction entre le paradigme holiste et le paradigme individualiste (Boudon & Bourricaud, 1982). L’objet de cette première partie est de transposer cette dichotomie classique en sociologie à l’analyse de la dynamique des relations coopératives.

7À partir des théories des organisations, nous construisons deux perspectives apparemment antinomiques : la coopération complémentaire, fondée sur une rationalité calculatoire et le partage de ressources, et la coopération communautaire, fondée sur une rationalité identitaire et une communauté de valeurs et d’objectifs [1]. Quand on s’intéresse à la dynamique coopérative, la dichotomie entre les deux formes de coopération devient ambivalente et nécessite d’être confrontée au terrain.

II . 1. LA COOPÉRATION COMPLÉMENTAIRE

II . 1 . A. Ses fondements

8Une première réflexion sur les formes de coopération au sein d’une organisation productive voit le jour avec l’école classique, notamment avec Taylor (1911). La coopération transversale est ici considérée comme contre-productive, portant en elle le risque de « la flânerie collective », voire de collusion à l’encontre de la direction. L’ingénieur américain cherche en revanche à favoriser les relations de coopération entre employeur et employés en définissant des lois scientifiques qui assurent la réciprocité des gains d’une meilleure productivité.

9Cette réflexion sur une meilleure coopération verticale est développée par Barnard (1938). L’ancien dirigeant analyse en effet l’organisation comme système de coopération. Capacité de communication, objectif commun et volonté personnelle fondent la coopération dans l’organisation, où l’équipe est l’unité élémentaire de travail. La capacité de communiquer est multipliée par la combinaison de ces équipes ; elle est la contrainte structurelle de la coopération. En revanche, but commun et volonté de participer fondent les ressorts de la motivation à coopérer. Selon Barnard (1938), cette motivation dépend d’un calcul coût-avantage de la participation. Le dirigeant, ou le détenteur de l’autorité, est au centre de ce système contribution-rétribution. En tant qu’intermédiaire dans le processus d’échange, le dirigeant contrôle les stimulants ; c’est par ses efforts que des contributions sont obtenues, coordonnées et converties en stimulants. Il est le pivot de ce système, et tous les échanges passent par lui.

10L’organisation est alors comprise comme un système coopératif distribuant des récompenses incitatives, où le dirigeant a une position centrale. La coopération reste donc encore intrinsèque au modèle hiérarchique. Or la plupart des échanges ne passent pas par le leader, ont même lieu sans qu’il en ait connaissance, voire contre son gré (Gergiou, 1973).

11L’analyse des stratégies d’acteurs de Crozier et Friedberg (1977) permet d’élargir les relations de coopération à l’ensemble des interactions au sein d’une organisation ; elles y sont organisées de telle façon que la poursuite des intérêts spécifiques de chacun ne met pas en danger les résultats de l’entreprise collective, voire les améliore. La coopération est « développée vis-à-vis des autres pour maintenir, contrôler et étendre sa zone d’incertitude » (Romelaer, 1998, p. 4). Chacun monnaye dans l’entreprise sa capacité à maîtriser ce qui n’est qu’incertitude pour les autres ; cette coopération n’est accordée qu’en contrepartie de certaines ressources, suivant le jeu du « donnant-donnant ». La notion d’équipe prend sens au sein d’un système d’action concret, elle est alliance entre individus ayant des intérêts interdépendants ; c’est une coalition au sens de Cyert et March (1963).

II . 1 . B. Son organisation et la nature de son processus

12Suivant la stratégie de l’acteur, ce que nous avons appelé la coopération complémentaire est générée par une stratégie de gain de pouvoir comme moyen pour accéder à certaines ressources détenues par d’autres acteurs. Elle est basée sur l’interdépendance des intérêts individuels, elle-même fondée sur la complémentarité des ressources.

13Cette complémentarité peut être précisée à l’aide de la typologie de Schmidt (1991). Suivant les formes de division du travail, l’auteur définit trois types de coopération. La coopération « augmentative » permet de dépasser les capacités d’un seul individu ; elle repose sur la division du travail de premier degré définie par Durkheim (1930). La coopération « intégrative » est fondée sur la complémentarité des expertises, tandis que la coopération « débative » prend forme dans la confrontation des points de vue ; la deuxième forme de coopération peut s’organiser dans des situations de conception distribuée, tandis que la troisième nécessite des situations de co-conception. Ces deux derniers types de coopération sont fondés sur une division du travail de second degré (Durkheim, 1930).

14Le problème intrinsèque à l’organisation de la coopération complémentaire est la question de la congruence des objectifs des acteurs, sous l’hypothèse d’opportunisme en situation d’incertitude. Les théories économiques des contrats cherchent à y répondre. Pour Charreaux (1987), la coopération est une relation d’agence et donne lieu nécessairement à des contrats incomplets. La théorie des coûts de transaction permet de spécifier la nature du contrat coopératif (Williamson, 1991), forme hybride entre le marché et la hiérarchie. La coopération est une relation où la spécificité des actifs est forte, mais où la transaction est trop peu fréquente pour être réalisée dans le cadre d’une hiérarchie ; elle donne ainsi lieu à des contrats néoclassiques « dans lesquels les parties maintiennent leur autonomie mais sont bilatéralement et conséquemment dépendantes. L’identité [de chacune des parties] importe (...) ces contrats facilitent la continuité et permettent une adaptation efficiente » (Williamson, 1991, p. 271).

15À partir de cette analyse, nous pouvons construire la définition suivante de la coopération complémentaire : la coopération complémentaire se génère dans le partage d’une tâche commune, entre deux individus guidés par une stratégie individuelle de gain de pouvoir pour l’accès à des ressources complémentaires (sociologie de l’acteur) ; la congruence des intérêts individuels, et ainsi la réciprocité des rapports (Barnard, 1938) est assurée par des engagements interindividuels (théories contractuelles).

II . 1 . C. L’ambivalence de la dynamique de la coopération complémentaire

16Dans un tel environnement d’incertitude, les recherches de Nakhla et Soler (1994, 1996) sur les modalités de contractualisation au sein de groupes de conception mettent en avant les processus de négociation entre les acteurs dans la mise en cohérence des objectifs individuels. Ainsi, « le contrat ne tient rien pour définitivement établi (...) il fournit moins un objectif à tenir que des points de repère sur la base desquels mettre en œuvre les modes de pilotage de l’équipe » (Nakhla & Soler, 1996, p. 28). Dans la dynamique coopérative, on assiste en fait à un déplacement de la fonction du contrat : il n’est pas structurant par son fond, mais par sa construction collective.

17C’est donc dans la dynamique de négociation que se construit la coopération ; or celle-ci n’est pas explicitée par l’analyse contractuelle. Les théories relationnelles, dénonçant la sous-socialisation des approches contractuelles, tentent de pallier ce déficit en introduisant la notion de confiance (Granovetter, 1985 ; Ring & Van de Ven, 1992, 1994). La coopération complémentaire dans sa démarche contractuelle se construit dans un processus de dévoilement dont l’intérêt est éclairé par la notion de confiance où les co-contractants développent « un état psychologique où l’individu accepte d’être vulnérable, car il a des attentes positives concernant les intentions ou les comportements d’un autre » (Rousseau, Sitkin, Burt, & Camerer, 1998, p. 395). La confiance est le pendant psychologique de la dynamique des relations coopératives ; elle joue le rôle de mécanisme de gouvernance dans des relations encastrées dans des réseaux sociaux (Ring & Van de Ven, 1992). Cependant, l’existence de réseaux sociaux dépasse la seule logique calculatoire ; des partenaires d’un même réseau continuent de s’entraider même s’il n’y a pas d’intérêts particuliers et immédiats à le faire (Uzzi, 1996, 1997). Ces phénomènes de « dons gratuits » renvoient non pas au calcul mais bien plutôt à un comportement de défense d’une identité partagée au sein du réseau, à une forme de coopération que nous qualifions de « communautaire ».

II . 2. LA COOPÉRATION COMMUNAUTAIRE

II . 2 . A. Ses fondements

18La vision des rapports coopératifs générés par la seule rationalité calculatoire est fortement critiquée par les expériences de Hawthorne (Mayo, 1933), lesquelles débouchent sur ce qu’il est coutume d’appeler l’école des relations humaines (Bouilloud & Lecuyer, 1994). Ce mouvement met en évidence l’importance du facteur humain dans les organisations et notamment l’existence d’une vie de groupe. Les comportements des membres d’un même groupe vont en effet avoir tendance à converger, ces derniers adoptant des normes communes informelles. Plutôt que la complémentarité, c’est bien la recherche d’une certaine homogénéité qui fonde les résultats de ces expériences. Elles introduisent ainsi un autre éclairage de la coopération autour des notions d’identité et de ressemblance. Le besoin d’appartenance au groupe est ici un aspect puissant de la vie sociale (Maslow, 1954). La construction identitaire, à travers l’appartenance à une communauté, s’oppose au calcul instrumental individualiste.

19Les théories de l’identité sociale précisent ce mécanisme générateur de coopération. Selon ces dernières, les individus se définissent à partir des groupes auxquels ils appartiennent (Sainsaulieu, 1977 ; Tajfel & Turner, 1979 ; Asforth & Mael, 1989 ; Hogg & Abrams, 1988 ; Tyler, 1999). L’identité renvoie en effet à la création de soi à travers l’expérience de la socialisation ; c’est pourquoi « la coopération avec un autre est une manière de lui dire que l’on appartient au même univers que lui, que nos identités sont proches » (Bernoux, 1999, p. 11). Les individus coopèrent entre eux dans un processus de développement et de protection d’une identité commune dont le collectif est porteur. La définition d’une identité sociale se construit dans des interactions avec un groupe et suit une double voie, l’autocatégorisation et la comparaison sociale (Hogg & Abrams, 1988 ; Elsbach, 1999). Le mécanisme d’autocatégorisation est celui par lequel l’individu définit ses groupes d’appartenance suivant son jugement sur les différents groupes avec lesquels il interagit. Le groupe auquel il s’identifie s’appelle l’ingroup, ou groupe d’appartenance, tandis que les groupes dans lesquels il ne s’intègre pas constituent l’outgroup. Le mécanisme de comparaison sociale est celui par lequel l’individu cherche à maximiser la distinction entre l’ingroup et l’outgroup dans un sens favorable à son groupe d’appartenance.

20Si ces théories permettent de mieux comprendre le mécanisme d’identification sociale nécessaire pour favoriser des comportements coopératifs au sein d’un groupe, une seule recherche empirique à cette date étudie explicitement les relations entre l’identité sociale et les comportements coopératifs (Tyler, 1999).

21Ces courants apportent ainsi un autre éclairage de la coopération ; elle n’est pas seulement comportements opportunistes, mais aussi développement et protection d’une identité commune. Comment cette forme de coopération se structure-t-elle ?

II . 2 . B. Son organisation et la nature de son processus

22Le groupe, porteur de l’identité commune, est l’élément premier dans la coopération communautaire. Les développements théoriques en dynamique de groupe nous éclairent quant à ses caractéristiques. Des cinq catégories distinguées par Anzieu et Martin (1997, p. 161), le groupe restreint définit la structure d’une équipe dans une organisation économique [2] ; c’est en effet « un ensemble d’individus dont l’effectif est tel qu’il permet à ceux-ci des communications explicites et des perceptions réciproques, dans la poursuite de buts communs ». Il se caractérise par un nombre restreint de membres et par la poursuite en commun des mêmes buts. Le groupe restreint favorise des relations affectives qui peuvent entraîner la constitution de sous-groupes d’affinités. Il y apparaît une différenciation des rôles entre les membres ainsi que des normes et des rites propres au groupe (Anzieu & Martin, 1997).

23Le groupe qui développe des formes de coopération de type communautaire incorpore des valeurs comme la loyauté, le respect et la fierté (Tyler, 1999 ; Elsbach, 1999). Il peut être apparenté au clan défini par Ouchi (1980). La régulation ne s’y fait pas à travers des contrats ou une autorité hiérarchique, mais plutôt à travers une croyance très forte en l’absorption de l’intérêt individuel dans les objectifs communs. Ses membres doivent y reconnaître ses traditions et respecter la réciprocité de l’échange, les valeurs et croyances communes ainsi que l’autorité légitimée par la tradition. Le leader tient en effet une place essentielle dans ce type de structure en tant que guide (Korskaard, Schweiger, & Sapienza, 1995).

24L’acceptation au sein d’un groupe ou le passage d’une forme identitaire à une autre se réalise dans un processus de socialisation (Dubar, 1991). Selon Ouchi (1980), ce processus résulte d’un long apprentissage des traditions au cœur desquelles se trouve le principe d’adhésion à des objectifs collectifs. Cette adhésion à des objectifs communs est au cœur de la notion de communauté selon Boudon et Bourricaud (1982, p. 84) : « Lorsque la survie d’un groupe devient pour ses membres un objectif opposable à leurs yeux aux objectifs individuels que de leur côté ils se considèrent comme autorisés à poursuivre, on dira que ce groupement peut constituer une communauté ou qu’il est en voie de communalisation. »

25À partir de cette analyse, nous pouvons construire la définition suivante de la coopération communautaire : la coopération communautaire s’instaure dans le partage d’une tâche commune au sein d’un groupe restreint (Anzieu & Martin, 1997) entre des individus soucieux d’être reconnus par les autres membres comme faisant partie d’un même groupe (courants des relations humaines et de l’identité sociale), désirant préserver et développer cette identité commune, autour notamment d’objectifs partagés (Ouchi, 1980), dans un espace d’interactions avec d’autres groupes (courant de l’identité sociale).

II . 2 . C. L’ambivalence de la dynamique de la coopération communautaire

26La coopération communautaire est par nature dynamique du fait du processus endogène d’identification sociale à un groupe. Mais l’étude du changement dans le groupe donne des résultats contradictoires. Si les travaux en psychologie sociale trouvent certaines régularités dans l’ordre d’apparition des étapes (Lewin, 1959 ; Anzieu & Martin, 1997), ceux sur les processus organisationnels contredisent la pertinence d’un modèle linéaire de développement de groupe (Gersick, 1988, 1989). La seule récurrence est celle de l’équilibre ponctué, c’est-à-dire que, lorsque la durée de vie d’un groupe est prédéterminée, l’existence d’une phase de « décristallisation » est repérée en milieu de période.

27Cependant le développement de relations coopératives communautaires au sein d’un groupe n’est pas sans risques liés à des attitudes de conformisme vis-à-vis du groupe (Janis, 1972). Pour pallier ces risques, Moscovici et Riviere (1979) montrent le rôle des minorités considérées en tant que source d’innovation et de changement social. Ces considérations conduisent à mettre en valeur l’importance du conflit comme facteur d’évolution sociale (Simmel, 1908 ; Sainsaulieu, 1977 ; Anzieu & Martin, 1997 ; Allard-Poesi, 1997). Le changement dans le groupe oblige à intégrer la dimension conflictuelle et ainsi la divergence d’intérêts et d’opinions ; de même, il faut prendre en compte la différenciation progressive des membres du groupe, l’émergence de rôles, ne serait-ce que celui de leader. S’intéresser au processus de coopération communautaire conduit à s’interroger sur l’hétérogénéité des membres du groupe, et donc sur des éléments propres à la coopération complémentaire. Si les deux perspectives divergent sur la détermination des fondements et des conditions de génération de l’action coopérative, la frontière qui les sépare est ainsi bien moins évidente quand on s’intéresse au processus coopératif, pourtant inhérent à la coopération comme action.

28En conclusion, le tableau ci-dessous résume notre construction théorique et le caractère apparemment dualiste des activités coopératives. Tout particulièrement, les deux définitions de la coopération issues de notre analyse donnent respectivement trois attributs nécessaires et suffisants [3]. Ces attributs de la coopération seront au centre du codage de la dynamique coopérative au sein de collectifs de conception.

Tableau 1
TABLEAU 1 :
Comparaison des deux formes de coopération
Comparison of the two kinds of cooperation

29Si les deux perspectives divergent sur la détermination des fondements et des conditions de génération de l’action coopérative, la frontière qui les sépare est ainsi bien moins évidente quand on s’intéresse au processus coopératif, pourtant inhérent aux équipes de conception.

30Comment se déroule alors le processus coopératif au sein de ces équipes ? Plus précisément, comment les deux formes d’action collective évoluent-elles dans le temps ? La coopération complémentaire prédomine-t-elle sur la coopération communautaire et inversement ? Les deux formes de coopération suivent-elles le même processus ?

III. MODÉLISATION DE LA DYNAMIQUE COOPÉRATIVE DANS LE CAS D’ÉQUIPES PROJET

III . 1. MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

31Nous cherchons à explorer et à réconcilier deux formes d’action coopérative dont les fondements épistémologiques s’opposent ; notre positionnement a pour objectif de sortir du clivage entre l’individu et la structure pour interroger les interactions entre acteurs (Weick, 1979 ; Giddens, 1987).

III . 1 . A. Choix des cas

32Nous étudions la dynamique coopérative, sous l’angle relationnel, dans les activités de conception. Nous avons choisi le cas d’équipes projet mêlant des expertises diverses au sein d’un groupe restreint dans des situations de co-conception et de conception distribuée. Pour nos questions de recherche, de type exploratoire, un seul cas suffit (Yin, 1990 ; Strauss & Corbin, 1998). Cependant, notre objet d’étude, l’équipe projet, est fortement contextualisé ; ainsi Briner et Geddes (1989) l’interprètent comme un système ouvert autour duquel gravitent plusieurs types d’acteurs : les partenaires de l’organisation, des clients ou les sponsors du projet dans l’entreprise. Face à cette contextualisation de l’équipe projet, il est intéressant de vérifier si notre grille de lecture peut être applicable à différents contextes et de comparer les résultats trouvés.

33Deux équipes projet dans deux entreprises différentes correspondent à la population théorique définie (Clark & Wheelwright, 1992) et ont en même temps des contextes suffisamment éloignés pour tester la capacité de réplication de la grille de lecture.

341 / Une équipe projet se situe dans l’industrie automobile, chez PSA, exemplaire dans la mise en place de ce mode de gestion de la conception ; elle a en charge le développement d’un nouveau moteur dont la réussite peut constituer un tournant dans les gammes de produits proposés. Il s’agit de concevoir une nouvelle forme d’injection essence ainsi qu’une chaîne de montage spécifique à ce moteur. Ce projet dure deux ans. Nous en suivons la première partie qui s’étale sur dix-huit semaines, avec la conception de la première version du moteur et en parallèle la définition du cahier des charges de la nouvelle ligne de montage. Cette équipe réunit sur un même « plateau » des chefs de projet ingénierie, achats, production, produit et des responsables coûts, qualité et délai ; le « noyau dur » est constitué de dix personnes.

352 / La deuxième équipe s’inscrit au sein du groupe SITA, filiale environnement de la société Lyonnaise des Eaux. Le projet est fondé ici sur la conception collective d’un dossier de réponse à un appel d’offre d’un conseil régional concernant le retraitement des déchets. La réalisation de ce dossier nécessite de trouver et de proposer des sites d’enfouissement de déchets pertinents non seulement d’un point de vue géologique, mais également sur le plan politique. Une équipe ad hoc de six personnes est ainsi créée rassemblant des experts en lobbying et en géologie. Cette équipe dispose de seize semaines pour faire aboutir le projet.

III . 1 . B. La collecte des données

36Pour répondre aux questions de recherche, il est nécessaire de constituer l’histoire des relations de coopération au sein du collectif à travers les activités observables de conception. Nous cherchons à retracer dans le temps les modes de coordination entre les membres de l’équipe étudiée. Ces activités sont qualifiées par le terme générique d’interaction. La collecte des données connaît alors quatre étapes.

371 / Un entretien ouvert avec le sponsor de la recherche dans chaque entreprise est réalisé. Ces deux entretiens ont permis de situer le fonctionnement général de l’entreprise et de ses projets, le choix d’une équipe projet et, enfin, la nature de l’intervention dans l’entreprise.

382 / L’observation participante est notre principale source de données. L’observation d’une équipe est rendue possible par notre participation au projet, au minimum comme assistante stagiaire du directeur de projet. La fréquence de la présence sur le site est liée aux réunions internes, elle est en moyenne d’une journée par semaine. Les faits observés et les remarques issues des différents types d’interaction formelle et informelle sont notés systématiquement dans un « journal de recherche » propre à chaque cas. De même, les documents et archives internes concernant l’équipe et son projet sont systématiquement dépouillés.

393 / Des entretiens semi-directifs sont réalisés en fin de période avec le directeur de projet, les acteurs projet et quelques acteurs métiers intervenant sur le projet. Ces entretiens durent entre une heure et trois heures. Il est demandé aux acteurs de raconter leur expérience au sein de l’équipe projet. Ces entretiens, systématiquement enregistrés et retranscrits, permettent de compléter, de préciser et de valider le tracé des faits qui ont ponctué le travail de conception de l’équipe.

404 / Enfin, la dernière étape est concentrée sur la validation interne des données collectées. Un historique des interactions ayant affecté le fonctionnement du groupe et le déroulement du projet est présenté aux membres de l’équipe afin d’être validé. Les réactions à cette présentation sont notées et répercutées dans le tracé des interactions. Dans tous les cas, les modifications se sont avérées marginales.

41Au total, cette collecte aura duré plus d’un an, avec quelques cinquante journées sur le terrain, la participation à 48 réunions et séminaires et 36 entretiens formalisés (durant entre une heure et cinq heures), sans compter les multiples interactions informelles permises par le travail d’observation participante et retracées dans le journal de recherche. Une fois les données collectées, nous avons procédé au traitement de ces dernières.

III . 1 . C. Traitement des données

42Pour analyser le processus, le traitement des données connaît cinq étapes :

431 / Une base de données chronologiques est tout d’abord constituée pour chaque cas (Miles & Huberman, 1991). Cette base de données répertorie, au jour le jour, l’ensemble des interactions qui affectent l’équipe. Elle est constituée d’un tableau à six colonnes où sont précisés l’inscription temporelle de l’interaction, l’interaction en elle-même, les verbatim sur l’interaction s’ils existent et/ou des informations complémentaires, le premier codage ouvert, le codage en termes d’événements et enfin le codage suivant les attributs de la coopération.

442 / Le codage de cette base de données est effectué par le biais de la construction d’événements qui opérationnalisent les six attributs de la coopération. Ces attributs sont issus de notre grille de lecture relationnelle de la coopération, grille de lecture synthétisée dans le « tableau comparatif des deux formes de coopération » (tableau 1). Un premier codage inductif, sans a priori, des observations est réalisé afin de faire émerger une liste réduite des types d’activités menées par les membres de l’équipe. Ce codage suit la méthode du « codage ouvert » décrite par Strauss et Corbin (1998). Ensuite, nous avons recherché à quels attributs de la coopération ces activités se rapportaient. La réponse à cette question se traduit sous la forme d’événements ; chaque interaction peut être codée suivant plusieurs événements, de même chaque attribut peut être décrit par plusieurs événements (Van de Ven & Huber, 1990 ; Van de Ven, 1992). Par exemple, l’attribut « Engagements internes » se concrétise par trois types d’activités, que nous qualifions d’événements : « partage d’information », « définition de procédures », « suivi des objectifs ». Au total, quinze événements permettent d’opérationnaliser les six attributs.

Tableau 2
TABLEAU 2 :
Extrait de la base de données chronologiques
Extract of the processual data base

453 / À partir de ce codage de la base de données du processus est constituée une carte du processus (Langley, 1999). Cette carte s’inspire des matrices chronologiques proposées par Miles et Huberman (1991) ; c’est une matrice avec en colonne les interactions réparties chronologiquement et en ligne les attributs de la coopération définis dans la première partie. Grâce à la base de données chronologiques, les interactions sont codées selon qu’elles affectent tel ou tel attribut (on notera 1 dans ce cas) ou pas (on notera alors 0).

Tableau 3
TABLEAU 3 :
Structure de la carte du processus
Processual map

464 / Ce codage permet de construire des courbes de fréquence d’apparition dans le temps des attributs de la coopération (Lewin, 1959 ; Gersick, 1989) et de tracer l’évolution des formes de coopération durant le projet [4]. La carte du processus permet en effet de comptabiliser le nombre d’événements affectant chaque attribut durant la même semaine [5]. Le choix de cette unité de temps est structurant pour les résultats de la recherche (Zaheer, Albert, & Zaheer, 1999). Il correspond à la fois à l’unité de temps utilisée par les membres des équipes [6] étudiées et à la périodicité de notre présence sur le site.

475 / La fiabilité de notre traitement est testée par le recours au double codage par un autre chercheur. Sur la base d’un « dictionnaire des attributs », récapitulant les événements spécifiques à chaque attribut, le second codeur code l’ensemble des interactions. Les deux codages sont comparés interaction par interaction sur la base de la carte du processus. Le double codage donne un taux d’accord proche de 75 %, ce taux étant le rapport entre le nombre d’interactions où les deux codeurs sont en total accord sur le nombre total d’interactions. De même, les courbes de fréquence issues des deux codages sont comparées ; elles suivent les mêmes tendances.

48Ce qui nous intéresse ici, c’est de comparer la présence et les évolutions respectives de chaque forme de coopération, cela afin de statuer sur la dynamique relationnelle dans les activités de conception.

III . 2. MODÉLISATION DE LA DYNAMIQUE COOPÉRATIVE AU SEIN D’ÉQUIPES TRANSVERSALES DE CONCEPTION

49L’analyse longitudinale des deux cas permet de confirmer empiriquement la pertinence de notre construction théorique des deux formes de génération de la coopération et de préciser des conditions de leur développement au sein d’équipes projet. Sur l’ensemble du processus, la coopération complémentaire et la coopération communautaire sont présentes dans les deux cas sans qu’aucune apparaisse sensiblement dominer l’autre.

Tableau 4
TABLEAU 4 :
Répartition des deux formes de coopération
Distribution of the two cooperation modes

50Les deux formes de coopération sont présentes tout au long du projet. Cependant, suivant le degré d’avancement du projet, une forme de coopération domine l’autre. Cet enchaînement s’effectue suivant trois phases, qualifiées d’Initialisation, de Transformation et de Cristallisation. Si, dans un premier temps, les interactions entre acteurs développent majoritairement une forme communautaire de coopération, elles deviennent en milieu de projet principalement de type complémentaire, pour finalement redéfinir les formes communautaires de la coopération en fin de projet. C’est lors de cette seconde transition que se concrétise tout particulièrement le projet.

Figure 5
Fig. 1.
Schématisation du processus coopératif dans les cas SITA et PSA
Pattern of cooperative relationships dynamic in SITA and PSA cases

III . 2 . A. La phase d’Initialisation

51La première phase est qualifiée de phase d’initialisation, parce qu’elle initie le travail en équipe nécessaire à la production du projet. Cette période dure environ le quart de la durée totale du processus. Elle est dominée par la coopération communautaire qui représente respectivement 72 % et 67 % des événements de cette phase pour le cas SITA et le cas PSA. La proximité de la composition de cette phase entre les deux cas est frappante.

52Que ce soit au sein de l’entreprise SITA ou PSA, les interactions de l’équipe ont essentiellement pour objet la finalisation du recrutement des membres de l’équipe, la négociation avec des partenaires externes et la définition partagée des objectifs du projet. Ces activités représentent en moyenne 10 %, 33 % et 27 % des événements de cette période. Si la coopération communautaire domine, les attributs de la coopération complémentaire sont également présents durant cette période mais de façon minoritaire. Les membres de l’équipe définissent en effet un premier partage des tâches ; cependant ce dernier est facilité par l’ancrage organisationnel commun, l’appartenance à des métiers et des expertises connus par les membres du groupe. Quant aux règles internes au groupe, les membres de l’équipe s’appuient essentiellement sur les règles organisationnelles existantes.

III . 2 . B. Transition entre la phase d’Initialisation et la phase de Transformation

53Le passage d’une phase à une autre se réalise, dans les deux cas, par la conclusion d’accords externes. Chez PSA, cette phase se termine également par la diffusion du planning de l’équipe avec les principales réunions et les différents stades de développement du projet. Sur cette base, la seconde phase démarre avec les premiers travaux spécialisés et une redéfinition du partage des tâches.

54La coopération complémentaire passe dans les deux cas de 20 % à 80 % des événements en une semaine.

55Les engagements externes apparaissent structurants pour la coopération communautaire. C’est dans la confrontation avec les groupes externes que l’équipe se définit à la fois en termes de frontière et d’objectifs ; la négociation des engagements nécessite d’expliciter et de définir ce que doit être le projet. La définition des attributs communautaires de la coopération semble ainsi nécessaire pour la montée en puissance de la deuxième forme de coopération et le passage à la phase de transformation dominée par le travail productif proprement dit.

III . 2 . C. La phase de Transformation

56La deuxième phase est qualifiée de « Transformation » ; elle identifie en effet une période où les acteurs interagissent spécifiquement pour la production du projet. Cette phase démarre entre le quart et le tiers de la période. Elle est dominée par la coopération complémentaire, avec respectivement 72 % et 69 % des événements. C’est aussi une phase marquée par la turbulence, puisqu’elle représente dans les deux cas un plus grand nombre d’événements que les deux autres phases, avec respectivement 47,5 % et 39 % de la totalité des événements.

57C’est une période marquée par la confrontation des expertises qui sont évaluées dans leur travail de réalisation. Les activités liées à la division du travail représentent ainsi près de 50 % des événements de cette phase : le partage des tâches se précise, tandis que se réalisent des travaux spécialisés. Dans cette valorisation des savoirs en fonction de leur travail de production du projet, les objectifs métiers sont confrontés, négociés, les ambigu ïtés soulevées. De même, l’équipe, avec le développement de l’innovation, est confrontée à des difficultés techniques ou relationnelles spécifiques au projet qui nécessitent la construction de règles propres à l’équipe.

58C’est une phase également marquée par une période de turbulence, c’est-à-dire la semaine où, sur l’ensemble de la période, il y a le plus d’événements. Encore une fois, on peut remarquer la concordance entre les deux cas dans cette phase.

III . 2 . D. La transition entre la phase de Transformation et de Cristallisation

59La seconde transition repérée marque le passage vers une nouvelle domination de la coopération communautaire. Le basculement d’une forme de coopération à une autre s’effectue en une semaine ; elle est cependant moins nette dans le cas PSA avec 56 % des événements afférant à la coopération communautaire lors de la première semaine de la phase de cristallisation.

60Le passage d’une phase à l’autre se réalise dans la concrétisation du projet, avec, dans les deux cas, une première version du projet dans son intégralité. Ainsi, l’équipe PSA expérimente le démarrage du premier moteur représentatif ; l’équipe SITA termine la rédaction d’une première version du dossier complet avec les études géologiques afférentes. De même, cette transition est la période de redéfinition en interne de la stratégie générale du projet et des modes de fonctionnement du groupe. Ces transformations nécessitent de reconstruire l’équipe sur les bases de cette nouvelle identité.

III . 2 . E. La phase de Cristallisation

61La troisième et dernière phase est nommée « Cristallisation » ; elle identifie en effet une période de gel des définitions des attributs de la coopération dans la concrétisation du projet. Cette phase concerne dans les deux cas le dernier tiers de la période de développement du projet. Elle est dominée par la coopération communautaire, avec respectivement 70 % et 65 % des événements dans les cas SITA et PSA.

62Cette période est marquée par une renégociation des engagements avec les partenaires externes, et l’arrivée de nouveaux partenaires. Cette activité d’engagements externes représente respectivement 46 % et 34 % des événements dans les cas SITA et PSA. Elle est corrélée avec une redéfinition des objectifs partagés afin de tenir compte des difficultés qui apparaissent avec la réalisation effective du projet ; sur ce point d’ailleurs, les deux cas sont particulièrement proches avec plus de 22 % des événements chacun. Les activités de définition du partage des tâches se poursuivent mais elles sont moins importantes, proportionnellement, que lors de la phase précédente ; les membres de l’équipe continuent en revanche à construire des règles internes propres aux spécificités du développement de leur projet.

63Les deux cas montrent quelques points de divergence, liés notamment au chevauchement des phases de développement de l’ensemble du projet chez PSA. Notamment, les réunions structurantes du groupe, définies comme celles où l’ensemble de l’équipe est réunie face à un outgroup, sont plus nombreuses dans cette équipe. Celle-ci démarre en effet dans le même temps une nouvelle étape du projet. Mais c’est surtout dans les engagements externes que les deux cas diffèrent, les activités dans le cas SITA étant proportionnellement plus tournées vers l’utilisation de ressources externes. Cette différence peut être reliée à la nature du projet et à la différence entre les deux dates de fin de projet. Dans le cas SITA, elle est impérative, car imposée par un client externe à l’entreprise, et elle définit de manière stricte la fin du projet. Dans l’autre cas, elle est définie par l’organisation et ne remet pas immédiatement en cause la suite du projet. Cette différence de nature de la date-butoir peut expliquer le recours ou non à des ressources externes. Lorsque la date de fin de projet est non négociable, l’équipe, n’ayant d’autres choix que de terminer le projet, va faire appel à des ressources externes ; ce n’est pas le cas de PSA.

64Cette différence sur la définition de la date-butoir influence la nature des périodes de turbulence observées dans les deux cas.

III . 2 . F. La période de turbulence

65La période de turbulence est définie comme la semaine qui comptabilise le plus d’événements sur l’ensemble du processus. Dans le cas SITA, cette semaine est au milieu du projet (8e semaine sur 18), alors que pour l’équipe PSA, elle arrive plus tardivement, presque aux deux tiers du projet et à la fin de la phase de transformation. De plus, dans le cas SITA, cette semaine compte 2,5 fois plus d’événements qu’en moyenne, alors que pour PSA, cette période se distingue moins des autres semaines, puisqu’elle comptabilise 1,7 fois plus d’événements par rapport au nombre moyen d’événements par semaine.

La nature des périodes de turbulence

66Dans le cas SITA, la période de turbulence peut être interprétée comme une phase de transition au sens de Gersick. Les travaux de Gersick (1988, 1989) montrent l’existence au sein de groupe projet d’une phase courte de transition qui se situe exactement en milieu de période et qui se caractérise par une réflexion sur le temps, un renouveau des méthodes de travail et l’appel à des ressources externes. C’est une période où tous les attributs de la coopération sont activés. Dans le cas PSA, la période de turbulence est de nature différente. Elle permet en fait de terminer la phase de transformation ; l’équipe prend du retard, elle s’en rend compte avec le jalon qui approche et multiplie les interactions où des décisions sont prises sur le projet. L’équipe rentre alors dans la phase de cristallisation.

67Ainsi, dans le cas SITA, la période de turbulence peut être comprise comme celle de transition générale en milieu de projet (Gersick, 1988, 1989) ; dans le cas de PSA, c’est plus précisément celle de transition entre la phase de transformation et celle de cristallisation.

Le rôle structurant d’un « horizon temporel » et de son intensité

68Deux enseignements peuvent être tirés de l’analyse de cette période de turbulence.

69L’élément commun aux deux cas repose sur l’existence d’un horizon temporel propre aux membres de l’équipe projet. La date de fin de projet (le jalon pour PSA et la remise de l’appel d’offre pour SITA) structure le travail de tous les membres de l’équipe. Cette date donne sens à la notion « d’horizon temporel », définie comme la durée dans le futur pendant laquelle l’acteur évalue les conséquences de ses actions (Ebert & Piehl, 1973).

70Cet horizon est concrétisé par les jalonnements dans le cas PSA et la date de remise des appels d’offre pour le cas SITA. Dans les deux équipes, il est de quatre mois. C’est une variable décisionnelle qui facilite la communication ; l’horizon temporel commun permet aux membres de l’équipe de travailler avec la même temporalité. Selon Gherardi et Strati (1988), il existe en effet un temps singulier, une unité de temps commune aux membres d’une même organisation. Au sein d’un collectif de conception, la dimension temporelle du projet marque une différence nette avec l’activité routinière des opérations. Les membres de l’équipe se distinguent du reste de l’organisation à travers cette perception propre du temps, socialement construite, en fonction des impératifs du projet. Cette identité temporelle commune est alors un facteur de cohésion.

71Parce que l’horizon temporel du projet structure les interactions au sein du groupe, il peut expliquer les divergences entre les deux cas sur la période de turbulence. Pour cela, il faut introduire la notion d’intensité de l’horizon temporel. Parce que la date de fin de projet est « butoir », décidée par le client externe, l’intensité de l’horizon temporel de l’équipe SITA est plus grande que celle de l’équipe PSA. Le projet de l’équipe PSA n’étant pas fondamentalement remis en cause par le dépassement du délai initialement défini, l’horizon temporel de cette équipe n’est pas suffisamment intense pour entraîner une action réflexive sur les modes de fonctionnement en milieu de projet. On peut alors émettre l’hypothèse suivante qui rajoute une variable médiatrice aux résultats de Gersick (1988, 1989) : l’existence d’une phase de transition en milieu de projet où l’équipe entreprend une action réflexive sur ses modes de fonctionnement dépend de l’intensité de l’horizon temporel de cette équipe.

IV. CONCLUSION

72Les auteurs de la conception sont tenus de coopérer étroitement pour développer une solution. La notion de coopération est ainsi centrale pour appréhender leurs activités. Parce que les activités de conception sont inscrites dans le développement d’un lien social spécifique au collectif, nous nous sommes concentrés sur la dynamique des relations coopératives au sein d’équipes de conception. Sur la base d’une élaboration théorique de deux formes de coopération appliquée à deux équipes projet, nous avons montré l’enchaînement des relations coopératives. Le processus repéré démarre essentiellement par la construction d’une forme communautaire de coopération, pour ensuite se concentrer sur la coopération complémentaire et finalement revenir vers une forme majoritairement communautaire.

73Cependant, ce modèle de la dynamique des relations de coopération au sein de collectifs de conception demande à être enrichi. Si nous avons, par ailleurs, cherché à préciser les conditions de développement de chacune des formes de coopération (Dameron, 2002), il faut désormais étudier la nature, le contenu ainsi que les modalités du passage d’une forme de coopération à l’autre. Nous pourrons alors qualifier la relation entre coopération complémentaire et communautaire. De plus, cette dynamique relationnelle des activités de conception nécessite d’être reliée plus précisément au processus de production de nouveaux savoirs sur le projet. Notre modèle pourrait ainsi être éclairé par la distinction entre la synchronisation cognitive, fondée sur une connaissance commune de l’état de la situation, et la synchronisation opératoire assurant la répartition et la séquence des tâches (Falzon, 1994 ; Darses & Falzon, 1996). La notion de référentiel opératif commun (de Terssac & Chabaud, 1990), résultat des activités de synchronisation cognitive, semble pertinente pour comprendre le passage d’une forme de coopération à une autre. Nous pouvons formuler l’hypothèse suivante : la stabilisation de ce référentiel est nécessaire pour rentrer dans une forme complémentaire de coopération suivant des activités de synchronisation opératoire, mais ces activités, en concrétisant le projet de conception, fragilisent le référentiel opératif commun et nécessitent sa refondation. Cette hypothèse demande à être testée. C’est en effet dans le lien entre la structure qui articule les compétences et la production de nouveaux savoirs que peut s’enrichir la modélisation des activités coopératives de conception.

74Manuscrit reçu : octobre 2001.
Accepté par F. Darses
après révision : juillet 2002.

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Notes

  • [1]
    Les définitions proposées sont développées et testées dans Dameron (2002). Notre construction théorique se concentre ici plus spécifiquement sur l’analyse du processus coopératif.
  • [2]
    Les cinq types de groupe repérés par D. Anzieu et J.-Y. Martin sont la foule, le groupement, la bande, le groupe restreint et le groupe secondaire (la grande entreprise, par exemple). Tous ces groupes, même lorsqu’ils sont éphémères, peuvent porter le processus d’identification sociale. Nous développons ici le groupe restreint, car il est représentatif des équipes de conception, mais nous pourrions étudier, comme le font généralement les travaux cités, le phénomène d’identification sociale dans le groupe secondaire, l’entreprise par exemple ou encore les communautés professionnelles (Dubar, 1991).
  • [3]
    Ces attributs sont mis à l’épreuve du terrain dans Dameron (2002).
  • [4]
    Dans les deux cas, le remplissage de cette carte s’est fait quelque temps après le codage des incidents dans la base de données. Cette situation nous a permis d’effectuer un double codage diachronique et ainsi d’éviter au maximum les erreurs de codage liées à la fatigue et à la lassitude.
  • [5]
    Les fonctions mathématiques afférentes ont été analysées. Les séries temporelles apparaissent cependant trop courtes pour statuer sur leur nature, notamment sur leur caractère chaotique ou non.
  • [6]
    Par exemple, les membres de l’équipe de PSA ont un calendrier qui établit le compte à rebours avant la date de fin du projet semaine par semaine. De même, le calendrier établi par le chef de projet technique de SITA a comme unité de temps la semaine.
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