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Article de revue

Médecins en guerre : du témoignage au « tapage médiatique » (1968-1970)

Pages 114 à 126

Notes

  • [1]
    David Rieff, « L’échec de Bernard Kouchner », Le Monde, 16 décembre 1999.
  • [2]
    Daniel C. Bach, « Nigeria », Encyclopaedia Universalis, 2002, T. 16, p. 209.
  • [3]
    Pierre Georges, « Civilement vôtre », Le Monde, 26 juin 1991.
  • [4]
    Jean-Pierre Langellier, « Bernard Kouchner, du Biafra au Kosovo », Le Monde, 4 juillet 1999.
  • [5]
    Bernard Guetta, « L’ingérence, la foi du nouveau siècle ? », Le Temps, 2 novembre 1999.
  • [6]
    Les dates entre parenthèses sont celles des numéros du Monde.
  • [7]
    P. Grellety Bosviel, « Bloc-notes d’un médecin au Biafra », La Croix, 13 mars 1969.
  • [8]
    Corinne Lesnes, Franck Nouchi, Claire Tréan, « MSF : les défis d’une génération », Le Monde, 17 octobre 1999.
  • [9]
    Bernard Kouchner, « Poète et militant de toutes les libertés », Le Monde, 1er janvier 2004.
  • [10]
    Bernard Kouchner, « Vive la vie ! », Le Monde, 11 décembre 1999.
  • [11]
    Cité in Corinne Lesnes, Franck Nouchi, Claire Tréan, « MSF : les défis d’une génération », Le Monde, 17 octobre 1999.
  • [12]
    L’ancien chef de la délégation du Biafra en France critiquera d’ailleurs la thèse des autorités séparatistes dans « Souveraineté ou suicide collectif » (L. M., 5 juillet 1969).
  • [13]
    Bernard Kouchner, « Un médecin accuse » (ITW Pierre Bénichou), Le Nouvel Observateur, 19 janvier 1970.
  • [14]
    Philippe Decraene, « Tumulte à la mutualité ou la solitude du Biafra », Le Monde, 14 mars 1969.
  • [15]
    Rony Brauman (ITW René Backmann), « Le sacre des rebelles », Le Nouvel Observateur, 21 octobre 1999.

1Dans la mémoire collective, le Biafra évoque un éphémère État, en guerre contre la Fédération du Nigeria dont il s’était séparé le 30 mai 1967, et la famine qui en résulta. L’événement marque une césure dans l’histoire des organisations humanitaires, où on distingue une « nouvelle génération (…), celle d’après le Biafra » [1] ; césure liée aussi à une forte médiatisation : « Le drame vécu par les populations civiles fait l’objet d’une large couverture dans les médias internationaux, ce qui contribue à une mobilisation des opinions publiques et à des actions d’intervention humanitaire qui inaugurent un nouveau type d’approche » [2].

2Pour y avoir été médecin de la Croix-Rouge, Bernard Kouchner s’est, à « L’heure de vérité » en juin 1991, déclaré « né au Biafra » [3]. La vulgate journalistique utilise volontiers la métaphore baptismale pour dire le caractère fondateur pour lui de cette expérience. « Le Biafra, c’est l’acte de baptême humanitaire de Bernard Kouchner » [4]. Ou encore, sur un registre plus militaire, le Biafra est présenté comme le « baptême du feu de l’humanitaire » [5].

3Par-delà les versions hagiographiques ou polémiques de la genèse de l’humanitaire moderne, la relecture de la presse et du Monde en particulier, où Bernard Kouchner témoigna alors, permet d’en restituer les étapes publiques et les modalités. Le basculement vers un traitement compassionnel des conflits s’accompagne d’une évolution des rôles des médecins sur la scène journalistique.

Vers la mobilisation de l’opinion

4Jusque fin juin 1968, la guerre du Biafra reste lointaine, bien que l’hypothèse de sa brièveté s’estompe après la dernière rodomontade du gouvernement fédéral qui voulait la « terminer en trois mois » [6] (3 janvier 1968). Les échos des opérations militaires proviennent de dépêches d’agence. Le Monde s’intéresse plus aux missions diplomatiques et aux tentatives de négociation. L’aspect humanitaire est quasi absent. C’est dans une dépêche AFP, titrée « Le gouvernement de Lagos fait état de victoires sur la rive orientale du Niger » (19 janvier), que le lecteur découvre une situation alimentaire et sanitaire, « dramatique » et « tragique », adjectifs peu habituels dans le lexique des agenciers : « Les risques de maladie et la disette de protéines prennent un caractère dramatique pour les 12 millions d’habitants du Biafra, soumis depuis sept mois au blocus fédéral. (…), la pénurie de médicaments et la désorganisation des services sanitaires sont particulièrement sensibles et ont pris des proportions tragiques pour cette population qui compte deux millions d’enfants de moins de cinq ans ».

5De façon symptomatique, cette information émane du Conseil des Églises du Nigeria. En effet, acteurs majeurs de la solidarité avec les victimes directes ou indirectes du conflit, les Églises de toutes dénominations firent appel à l’opinion internationale. Dans son premier article de l’année sur « le gouvernement séparatiste du Biafra » (31 janvier), Philippe Decraene en note le timide éveil, du fait des missionnaires, catholiques aux États-Unis, protestants en Grande-Bretagne : « (…), lente à s’émouvoir, l’opinion mondiale commence à s’interroger sur les causes de la résistance biafraise ».

6Puis, le 23 mai, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) lance l’opération « SOS Biafra ». « Six cent mille réfugiés meurent de faim et d’épuisement au Biafra », indique sa conférence de presse mensuelle dont Le Monde (29 mai) se fait discrètement l’écho, sans doute en raison de l’actualité nationale que l’on sait. Dès le lendemain, un officiel nigérian « reproche à la Croix-Rouge de “prendre parti” » (30 mai). Celle-ci attend la conférence de presse suivante pour confirmer son chiffre (26 juin).

7Dans Le Monde du 30 juin, le Biafra accède, pour la première fois de l’année, à la « une ». Jacques Madaule y plaide « Pour le Biafra ». Avec une rhétorique prudentielle, l’écrivain catholique de gauche qualifie le conflit de « génocide » : « (…) il faut bien appeler les choses par leur nom (…). On a beaucoup usé et abusé de ce terme de génocide, mais je crains qu’il ne s’applique très exactement à ce qui se passe au pays des Ibos ».

8La reprise de la thèse biafraise caractérise la manière très politique, et, de fait, très partisane, dont, en France, de nombreux acteurs vont entrer en solidarité avec le Biafra. L’appel du grand rabbin de France (8 août) lui donnera une pleine légitimité morale : « Nous qui avons été victimes du plus effroyable génocide de l’histoire, nous nous sentons solidaires de ceux qui sont menacés du même sort ».

9Jacques Madaule donne aussi quitus à la Croix-Rouge, critiquée notamment par les autorités de Lagos, car « conformément à sa vocation, (elle) s’efforce, au milieu des pires difficultés, d’aider le peuple biafrais à ne pas mourir ».

10Désormais la famine, résultat du blocus nigérian, tient une place régulière dans Le Monde attentif au vaste mouvement de médiatisation et de solidarité qui se développe, en Europe du Nord tout particulièrement. Dès le 1er juillet, News of the World titrait à la une en caractères d’affiche : « Pour l’amour de Dieu, envoyez-leur de l’aide et vite » (5 juillet).

11En France, des organisations se mobilisent. Après l’appel du Grand Orient de France (9), l’UNICEF et le Secours populaire français fournissent leurs coordonnées dans un encadré « L’aide aux Biafrais » (19). Les autres pays ne sont pas en reste : États-Unis avec l’appel du président Johnson (13), Israël (25). Surtout à l’initiative des Églises luthériennes, une vague de solidarité submerge l’Europe du Nord dont Le Monde retrace la progression : conférence du Conseil Œcuménique des Églises à Upsal (17), Danemark et Islande (18, 23).

Les médecins et les chiffres

12Les secours au Biafra sont l’enjeu et le moyen d’une concurrence entre des organisations qu’alors, on ne disait pas toutes humanitaires. En juillet 1968, les médecins jouent un rôle d’experts ; ils analysent la situation sanitaire et surtout valident les pronostics de mortalité. Dans « La tragédie des réfugiés biafrais » (24 juillet), exceptionnellement signée, David Mazarelle, AFP, un médecin biafrais redoute une catastrophe absolue ; si les secours n’arrivent pas très vite, « il n’y aura plus un enfant au Biafra dans trois mois » car, déjà, « plusieurs milliers meurent chaque jour ». Sans référence médicale, une autre dépêche AFP (7 août) avance des chiffres plus modérés : « Des centaines, sinon des milliers de réfugiés, seraient d’avance condamnés à mourir de faim et de maladie, leur état ne laissant aucun espoir de les sauver, même si des secours étaient immédiatement disponibles ».

13Chiffrer les victimes potentielles lors des conférences de presse des organisations humanitaires pour lesquelles ils travaillent, tel est le rôle des médecins européens. Ainsi, pour Terre des hommes, un médecin néerlandais procède à une évaluation très dramatique : « 100 000 personnes au moins mourront ces deux prochains mois au Biafra. Si des secours massifs n’arrivent pas, il faut s’attendre à 500 000 ou 600 000 décès » (1er août).

14Les médecins œuvrant pour le Comité œcuménique des Églises « estiment que le taux de mortalité (infantile) s’élèvera à 50 % et ceux parmi eux qui ont une expérience clinique africaine affirment que ce taux atteindra 80 % si les vivres ne peuvent pas être distribués à temps et en quantité suffisante » (2 août).

15Quoique incohérente (de 600 000 enfants à 1 800 000), cette macabre comptabilité atteint son objectif. L’opinion internationale « s’émeut » et réclame l’ouverture d’un « corridor de la pitié » que d’autres appellent « de la charité », ou encore « couloir de sécurité » (7 août). Une deuxième vague d’aide se débloque alors : UNICEF, Secours catholique (5).

La télévision se mobilise

16À la mi-août, la deuxième chaîne de télévision fait événement avec une émission spéciale Biafra qui entraîne l’une des premières déprogrammations (« Chapeau melon et bottes de cuir »). On y annonce qu’un « million de personnes vont mourir si le monde “civilisé” n’intervient pas ». Sous le titre « Un peuple en train de mourir de faim » (15 août), Jacques Siclier, chroniqueur spécialisé, en rend compte à la rubrique Biafra en convoquant le souvenir des camps de concentration : « Jamais images plus terribles n’ont été filmées depuis celles de la découverte des camps de concentration de l’Allemagne de 1945. Des corps d’enfant squelettiques ou déformés par les œdèmes, des visages où se lit l’hébétude résignée d’une agonie prochaine, des femmes décharnées demi-nues, serrant d’un geste instinctif la pauvre créature qu’elles ne peuvent plus nourrir. Un enfer ».

17Le 21 août, à la « une », « Un génocide » souligne « le plus affreux génocide qui ait été perpétré depuis la Deuxième Guerre mondiale se poursuit. Et cette fois tout le monde le sait ».

18Or, pour acheminer l’aide, les organisations humanitaires adoptent des attitudes divergentes face au gouvernement nigérian. Caritas reproche à la Croix-Rouge son « juridisme » (19 août). Le correspondant du Monde à Berne évoque les « luttes d’influence » dont est la cible une Croix-Rouge « critiquée pour sa prudence, que d’aucuns jugent excessive ». Dans une « Libre opinion », « De Prague au Biafra » (27 août), Jacques Madaule dénonce « l’idole sanglante de la souveraineté ». À la Croix-Rouge qui hésite à forcer le blocus nigérian, l’écrivain oppose un argument promis à un bel avenir : « le droit souverain des États ne saurait être opposable aux droits de l’homme ».

19Au terme de ces deux mois de mobilisation de l’opinion dont Le Monde est plus témoin qu’acteur, la guerre du Biafra a contribué, en France, à réactiver dans le débat public la mémoire de l’extermination des Juifs par Hitler, la culpabilité latente du silence dont ce génocide a été entouré. Le choc de l’invasion de la Tchécoslovaquie par l’URSS s’y combine et suggère, au nom des Droits de l’homme, l’idée de limitation de la souveraineté étatique, sinon d’ingérence.

L’invention de la « loi du tapage médiatique »

20La situation empirant, la Croix-Rouge demande « du personnel médical : médecins, chirurgiens, anesthésistes, pharmaciens et infirmiers, et également des chauffeurs de poids lourds, des mécaniciens-dépanneurs, des opérateurs et des techniciens radio-télégraphistes » (21 juillet). Début septembre, faute de candidats en nombre suffisant, elle multiplie les appels aux volontaires « sur Europe n°1 et à la télévision » [7].

21Une équipe part le 4 septembre de Genève. Fait rare, la correspondante du Monde à Genève, Isabelle Vichniac signale le nom de deux de ses membres : « Le mercredi matin, deux jeunes français, les docteurs Bernard Kouchner et Patrick Valas, ont quitté Genève à bord d’un avion affrété par le Comité international de la Croix-Rouge ».

22Selon des témoignages ultérieurs dont les versions varient légèrement, elle aurait indirectement été à l’origine du départ de Bernard Kouchner : « Août 68 : (…). Il [B. K.] dîne chez son ami Marek Halter. (…). En plein dîner, le téléphone sonne. C’est Isabelle Vichniac, la correspondante du Monde à Genève. Elle leur apprend que la Croix-Rouge cherche des médecins pour le Biafra. Kouchner décide de partir sur le champ. Il file au siège parisien de la Croix-Rouge et signe son contrat » [8].

23En tout cas, son mari et elle accueillirent Bernard Kouchner avant son départ pour le Biafra : « C’est de chez eux qu’en 1968, je suis parti pour le Biafra » [9].

24Le 30 septembre, deux médecins du CICR sont assassinés dans leur hôpital et deux autres blessés par les forces nigérianes. Les dirigeants de la Croix-Rouge décident alors d’évacuer le personnel hospitalier. Celui-ci refuse et contacte les journalistes. Le Monde (5 octobre) indique : « Un grave mécontentement se développe parmi les personnels des organismes humanitaires au Biafra ». Le journal ne cite pas de nom. Mais Bernard Kouchner fut de ceux qui choisirent « de rester sur place quoi qu’il arrive pour protéger ce qui peut l’être par la présence de la Croix-Rouge, mais que faire des malades qui veulent fuir comme le reste de la population ? »

25Trente ans plus tard, Bernard Kouchner reconnaît avoir contacté les journalistes : « Nous voulûmes le faire savoir afin que l’opinion publique protégeât nos blessés mieux que notre faible présence ne pouvait y parvenir. Nous inventâmes ainsi la loi du tapage médiatique à laquelle la Croix-Rouge était hostile » [10].

26La formule de « tapage médiatique » semble ici bien forte. Mais l’épisode marque une double prise de distance avec le CICR : refus des consignes d’évacuation et première transgression du principe de discrétion.

27Alors que l’Association des journalistes pour l’information sur le développement (AJID) venait de juger nécessaire d’accroître les efforts pour sensibiliser une opinion mondiale qui, « un moment émue, donne des signes de désintéressement » (17 novembre), Le Monde (27) titre, fait exceptionnel, sur six colonnes : « Deux médecins français témoignent, Par les docteurs Max Récamier et Bernard Kouchner ».

28Or, par contrat avec la Croix-Rouge, tous deux s’étaient engagés à « (s)’astreindre à la plus grande discrétion et notamment à (s)’abstenir, sans autorisation préalable du CICR, de toutes communications et de tous commentaires sur (leur) mission, même après la fin de celle-ci » [11]. Cette prise publique de parole confère un caractère éclatant à leur rupture avec les règles du CICR.

29Rentrés à Paris « après (…) deux mois au Biafra », les deux médecins livrent un témoignage parfois rempli d’odeurs, de sons, d’images, de petits détails concrets qui permettent de ressentir, par exemple, l’ambiance des « formalités de douane accompagnées de thé chaud et sucré, breuvage rarissime ». La spécificité de leur travail hospitalier est évoquée avec une grande sobriété : « Chirurgie de guerre où il faut aller au plus pressé, sauver le malade d’abord, stopper les hémorragies, prévenir la gangrène qui survient en quelques jours et surtout éviter le tétanos mortel à grand renfort de sérum, car personne ici n’est vacciné ».

30Rares sont les détails qui attestent de conditions matérielles difficiles : « Le malheureux stérilisateur à pétrole ne peut suffire malgré l’activité des infirmières et c’est souvent torse nu avec seulement une paire de gants que nous terminons ces séances nocturnes ».

31Pour ces humanitaires, le problème crucial est de choisir ceux qui bénéficieront d’un secours, en l’occurrence les enfants à envoyer dans un hôpital du CICR au Gabon : « (…) faut-il évacuer les plus atteints, dont certains présentent des lésions irréversibles, faut-il prendre ceux qui entrent dans la maladie ? »

32Bernard Kouchner et Max Récamier expertisent aussi le nombre des victimes : « autour de trois cent mille » enfants atteints du kwashiorkor. Pour les réfugiés, ils font preuve d’une extrême prudence : « Un million de personnes vivent dans des camps de réfugiés dont les organisations humanitaires ont la charge. Mais les villages démesurément grossis, la brousse et le bord des routes abritent plusieurs millions de personnes déplacées qui ne sont pas toujours touchées par les efforts des secouristes ».

33Pourtant le mot « génocide » n’est pas utilisé.

34Enfin les deux médecins explicitent le sens, politique, de leur action, la solidarité avec un peuple, et non pas la seule volonté de soulager les corps : « Nous avons tenté d’apporter une aide à un peuple qui subit avec courage et détermination les effroyables ravages de cette guerre. Nous avons essayé de porter secours aux enfants, victimes privilégiées de ce conflit, et dont l’opinion mondiale connaît la dramatique épreuve ».

35Une certitude les anime ; la solution des problèmes humanitaires n’est pas technique mais bien politique : « La poursuite de la guerre ou l’arrêt des hostilités commande la solution médicale du kwashiorkor. Tout ce qui est fait actuellement permet aux enfants une survie. Leur avenir dépend des solutions politiques ».

36Leur témoignage prend une valeur incitative dans Le Monde qui le fait suivre d’une brève sur « L’aide humanitaire au Biafra : tous ceux qui veulent participer à l’action humanitaire en faveur des populations biafraises peuvent s’adresser à la Croix-Rouge (…) ».

37D’octobre à novembre, l’usage des médias par Bernard Kouchner et ses amis marque leur évolution. Contestant d’abord une consigne opérationnelle, ils restent anonymes. Ensuite, signant un témoignage, ils remettent en cause une norme déontologique de la Croix-Rouge dans une stratégie de tension qui, d’ailleurs, n’ira pas jusqu’à la rupture puisqu’ils repartiront pour elle au Biafra. Dans les deux cas, conscients des ressources spécifiques de l’opinion publique, ils entendent les utiliser au bénéfice de leurs seuls malades d’abord, du Biafra ensuite dans un engagement où l’humanitaire s’accomplit en politique.

Des médecins en lutte à Paris

38Dans cette logique politique, Bernard Kouchner crée le Comité de lutte contre le génocide au Biafra (14 décembre), avec des techniciens, des pilotes et des médecins qui, de retour de ce pays, témoignent dans des quotidiens.

39Dans Le Figaro (7 janvier 1969) qui préconise d’« aider au maximum les sinistrés » et surtout de « mettre fin au conflit », « un médecin français à son retour du Biafra » s’écrie : « La pitié ne suffit pas ; il faut arrêter le massacre ». Il en appelle à l’opinion mondiale : « Quand enfin le monde se sentira-t-il concerné par cet immense camp de concentration où des hommes luttent pour leur survie ? »

40Puis il stigmatise une « pitié » qui méconnaît la « dignité » des Biafrais, qu’attestent leur « noblesse de (…) comportement » et « la grande organisation » du pays, notamment de ses hôpitaux « respectant encore strictement les règles de stérilisation, avec des infirmières biafraises souvent très compétentes et des médecins biafrais dont la technique n’a rien à envier aux hôpitaux parisiens ».

41Cédant la place au polémiste, le médecin ironise. Soutiens des fédéraux, Anglais et Américains « croient pouvoir se dédouaner (…) en envoyant quelque argent à la Croix-Rouge Internationale ». Avec les Soviétiques, ils jugent la stratégie biafraise un « suicide collectif [12] ». Or, pour l’auteur, il s’agit d’un « génocide au “sens de l’histoire” », ce qui doit susciter une action multiforme : « Qu’il soit juste ou injuste, qu’il soit ou non “dans le sens de l’histoire”, un génocide se dénonce et se combat par tous les moyens ».

42L’anonyme « jeune médecin parisien » pourrait être Bernard Kouchner car l’argumentaire est proche de celui utilisé à la fin de la guerre, en janvier 1970. Dans Le Nouvel Observateur, il dénoncera le massacre des Biafrais comme « le plus grand massacre de l’histoire moderne après celui des juifs » et s’en prendra aux puissances anglo-saxonnes comme aux Soviétiques qui « crient à la victoire de la lutte anti-impérialiste » tout en ayant « largement contribué au massacre, aux côtés des impérialistes traditionnels » [13].

43Dans Le Figaro, apparaissent deux thèmes récurrents ensuite chez Bernard Kouchner, l’ancien « Italien » de l’Union des étudiants communistes : la disqualification de la « pitié » ; la rupture avec l’URSS.

44Un mois plus tard, le Comité de lutte contre le génocide au Biafra adresse une lettre ouverte à la délégation parlementaire française et aux délégations de l’ONU et de l’OUA, qui venaient de se rendre au Nigeria (Combat, 10 février ; Le Monde, 12) ; parmi les signataires, outre Bernard Kouchner et P. Valas, le docteur Jean-François Lacronique, futur collaborateur médical du Monde. Dénonçant le blocus, « arme de guerre » pour « décimer un peuple », ces témoins de l’horreur interpellent vivement des délégations aux déplacements trop officiels : « Êtes-vous allés dans ces villages du Biafra, dans ces camps de la mort que nous avons vus pour y avoir travaillé plusieurs mois (…) ? »

45Demandant un « cessez-le-feu sans condition », ils invitent à l’abandon des querelles sémantiques : « Si le terme “génocide” ne vous convient pas, appelez-le massacre ou trouvez-lui, Messieurs, le nom qui vous plaira, mais il est temps que cesse cette discussion académique ».

Une semaine polémique pour le Biafra

46La « Semaine nationale de secours au Biafra » s’ouvre, le 12 mars, par un meeting à la Mutualité. Entre l’abbé Pierre et le pasteur Bonnot, Bernard Kouchner « témoigne de l’ampleur des souffrances des populations civiles biafraises » et légitime la sécession du jeune État : « Il s’est créé à la faveur de la guerre une unité du peuple biafrais » [14].

47Les 13 et 14 mars, La Croix publie le « Bloc-notes d’un médecin au Biafra », Pascal Grellety Bosviel qui y est resté jusqu’en décembre 1968. De sa description très médicale du Kwashiorkor, disparaît la note d’espoir qui concluait son évocation par Bernard Kouchner : « En l’absence de traitement, la mortalité atteint 80 à 90 %. Traitée, l’évolution est parfois spectaculaire ».

48Le Comité international de lutte contre le génocide lance un appel au cessez-le-feu et au « règlement politique » du conflit (15 mars). Signé par des intellectuels, « une quarantaine d’ethnologues », des « médecins retour du Biafra » et des journalistes, il dénonce l’apathie d’une opinion qui se contente de la charité : « Faudra-t-il un million de victimes supplémentaires pour donner à un problème une dimension qui dépasse une “charité” insuffisante ? ».

49Le 16, à la veille de la « Quête nationale pour le Biafra », Max Récamier, « chef de l’équipe médicale française de la Croix-Rouge internationale au Biafra », s’interroge dans Le Figaro : « Le “cessez-le-feu” viendra-t-il trop tard ? ». Le chrétien tiers-mondiste se démarque des thèses de Bernard Kouchner. Il affiche, comme le CICR, une préoccupation impartiale des victimes de deux camps et se distancie de médias à la stratégie morbide et peu efficace : « (…) le drame continue et les enfants continuent à mourir des deux côtés du front, même si l’on se lasse de l’entendre répéter presque complaisamment ».

50Enfin, mû par l’urgence de mobiliser « l’opinion publique et internationale pour imposer un “cessez-le-feu” », sans pour autant « ralentir ou même stopper notre aide médicale et alimentaire », il disqualifie la polémique qui sourd sur les « motivations des uns ou des autres », le souci de « chercher qui a tort ou raison ».

Dante n’avait rien vu

51Le 9 avril, à la « une » du Monde, dépassant le seul cadre biafrais, Jacques Madaule proclame : « Il n’y a pas de victimes privilégiées » et rappelle le devoir d’universalité de l’indignation et de la pitié. Contre le « malheur d’être homme », l’auteur ne trouve qu’une « panacée : l’amour dont saint Paul disait qu’il ne se réjouit pas d’injustice, mais qu’il met sa joie dans la vérité ».

52Allusion à Dante, « Le “premier cercle” » (7 mai 1969) de Philippe Decraene relate la vie de l’hôpital d’Awo Ommama. L’un des médecins se pense projeté au début du xixe siècle : « Nous réinventons les méthodes du baron Larrey et des chirurgiens des armées napoléoniennes ».

53Un second évoque crûment les techniques médicales mises en œuvre en l’absence de ressources modernes comme la suturation des blessures : « Nous laissons donc les blessures bourgeonner de l’intérieur, ce qui est impraticable dans la vie civile mais donne pourtant des plaies plus propres, la chair pourrissant à l’air libre ».

54Loin de tout « idéalisme », le troisième vit « une expérience comme (il a) toujours rêvé d’en faire au moins une ».

55Un mois plus tard, dans une lettre au Monde (5 juin), l’équipe médicale s’étonne de « cette vision “cauchemardesque” » : « Aucun détail de cette description dantesque n’est inexact, mais l’ensemble laisse une impression qui n’est pas celle que nous ressentons ».

56Cet écart est expliqué par l’inexpérience hospitalière du journaliste : « Sans doute sommes-nous plus habitués et moins sensibles à l’odeur et à la vue du sang, des suppurations, des vomissures qui composent l’environnement habituel des hôpitaux ; ici les tropiques apportent en plus la chaleur et les mouches ».

L’enlisement

57Malgré la Semaine d’action, les reportages, les appels, la « lassitude de l’opinion » préoccupe les responsables de l’aide, tel le professeur Jacques Freymond, vice-président du CICR (1er juin 1969).

58Lors des longues et inabouties tractations entre les autorités fédérales et le CICR, accusé de soutenir les Biafrais, Philippe Decraene juge non-pertinent le principe de neutralité, norme du CICR, car « totalement étranger à la mentalité africaine » (17 juillet).

59La Croix-Rouge peinant toujours à recruter, Bernard Kouchner et Max Récamier repartent au Biafra (12 octobre). À Paris, le combat continue. Le 14 octobre, le Comité de lutte contre le génocide au Biafra, l’association France-Biafra, présidée par Robert Buron, et le Comité d’action pour le Biafra de Raymond Offroy, ancien ambassadeur au Nigeria, manifestent ensemble contre l’arrêt des vols du CICR et pour la sauvegarde des populations.

60Le mois suivant, une « dizaine » de médecins constatent la désastreuse situation alimentaire et ses effets sur les enfants : « Il y a trois mois, les populations, en particulier les enfants, souffraient de malnutrition. Aujourd’hui, ils sont victimes de dénutrition ».

61Même en assurant tous les vols de secours (CICR, Églises), seulement « 5 % environ des besoins nutritionnels élémentaires » pourraient être satisfaits. Le nombre de morts hebdomadaires est évalué à 20 000 ou 30 000 (9 novembre).

62Le Comité de lutte contre le génocide au Biafra fusionne avec France-Biafra en un Mouvement pour la paix au Nigéria-Biafra (11 novembre), dont la dénomination indique un rééquilibrage de la stratégie envers Lagos. Ancien ministre du général de Gaulle, son président, Robert Buron, lui assure un poids politique face au Comité de Raymond Offroy. Le 12, lors de la première conférence de presse du Mouvement, celui-ci énonce un principe fondateur de l’humanitaire moderne : « Une action humanitaire qui ne débouche pas sur une action politique débouche sur le vide ». Par ailleurs, il appelle en vain à une « désescalade réciproque dans les fournitures d’armes aux belligérants » (14 novembre).

L’épuisement et la colère du médecin

63Mais les événements militaires se précipitent, et à la une du Monde du 13 janvier s’étale un titre sur 5 colonnes : « Après trente mois de guerre, Toute résistance organisée a cessé au Biafra, De nombreux gouvernements s’efforcent de venir en aide aux populations ».

64Le même numéro publie un manifeste d’intellectuels, dont Bernard Kouchner, qui dénoncent un « gangstérisme aux dimensions de la planète ». L’expérience de la Seconde Guerre mondiale où « les génocides hitlériens se sont faits avec la complicité passive des Alliés » éclaire le comportement de la « Grande-Bretagne pseudo-travailliste » et de « l’URSS pseudo-socialiste » lors de la guerre du Biafra. Pour ses « silences » et ses « informations chichement mesurées », la « presse politique ou “objective” » (donc Le Monde) est, avec les partis de gauche et les syndicats, accusée d’avoir « empêché que la question biafraise soit posée en termes politiques à la conscience des masses ».

65Le lendemain, 14, revenu à Paris depuis peu, Bernard Kouchner dit son évolution « De l’enthousiasme à l’épuisement », son indignation devant une solidarité insignifiante car aveugle à la dimension politique : « On voulait ignorer que cette résistance exprimait avant tout une volonté populaire. Les Biafrais mouraient dans l’indifférence et dans la charité ».

66La lapidaire formule finale vise à disqualifier l’éthique du « bon Samaritain » précédemment défendue dans Le Monde par l’Église luthérienne.

67Une double saturation d’images et d’a priori idéologiques ont contribué à la passivité face à la guerre : « (…) l’Europe avait déjà trop vu de photos d’enfants défaillants et parlait de guerre tribale, tant il est vrai que l’idée nationale semble réservée aux colonialistes. La gauche criait à la guerre du pétrole, ce qui était devenu en partie vrai, et attendait que le dernier Biafrais prononce les paroles usées de l’espoir socialiste pour lui venir en aide. Pour tout le monde, il semblait normal que des Noirs s’entre-tuent. On disséquait le mot génocide. On ne voulait pas s’apitoyer. Le peuple biafrais n’en finissait pas de mourir. On cessa bientôt de le plaindre ».

68Tandis que de Lagos, deux médecins, Dominique Benoît et Louis Schittly, affirment qu’il n’y a aucun « génocide » ni atrocités au Biafra, les docteurs Récamier et Lhuillier, de retour à Paris, refusent de rencontrer les journalistes (29 janvier). Après le temps de la colère, vient le temps du silence.

Par-delà la pitié et la charité

69Au cours de la guerre du Biafra, la communication change discrètement. De la logique institutionnelle des conférences de presse régulières et des communiqués (Croix-Rouge), la presse passe à une logique d’individualisation. Cessant d’être seulement des experts, alimentant la rhétorique de l’horreur quantifiée, les médecins sont interviewés et apparaissent hommes aux motivations variées. Enfin, ils accèdent aux quotidiens (Le Monde, Le Figaro, La Croix) avec des témoignages sans médiation instrumentale des journalistes. Surtout, établissant des relations avec la presse, en dehors de leurs organisations, ils rompent avec la norme de « discrétion » du CICR et découvrent le « tapage médiatique ».

70Ainsi, au-delà du classique « intérêt humain », de l’émotif ou de l’émouvant, se dessine une formule nouvelle : la restitution de paroles d’acteurs qui ne sont plus des porte-parole, et pas seulement des témoins ; paroles d’hommes divers malgré leur commun engagement dans la Croix-Rouge. Max Récamier adhère à l’éthique de la neutralité, chère au CICR, tandis que Bernard Kouchner prône une éthique humanitaire engagée aux côtés du Biafra, combat le « génocide », posture autorisée dans Le Monde par l’intervention, quelques mois plus tôt, d’un intellectuel, Jacques Madaule ; le journal retraçant le jeu croisé des mobilisations pour ou contre cette qualification.

71La thèse du « génocide » est un enjeu polémique, encore actuel. Reprenant les arguments déjà utilisés en 1969 par ses adversaires, Rony Brauman dénonce « l’instrumentalisation du témoignage » : « Il n’y a pas eu de génocide au Biafra. Défaits militairement, les indépendantistes biafrais ont cherché à redresser la situation en accusant le Nigeria de génocide et en trouvant, dans le mouvement humanitaire, des relais pour leur propagande. Le général Ojukwu, chef de la rébellion, disposait dans son réduit d’un “parc d’affamés” qui était à la disposition des caméras pour rapporter des images d’horreur. Il se déclarait d’ailleurs, à l’époque, prêt à voir mourir 14 millions de Biafrais pour que subsiste l’idée du Biafra » [15].

72De la parole des médecins pendant la guerre du Biafra ressortent trois thèmes :

731° La découverte des limites de la neutralité politique classique, mise en œuvre de façon exemplaire par la Croix-Rouge, c’est-à-dire secourir également les deux camps en présence. Dans le cas de figure très particulier d’un conflit lié au séparatisme, cela impliquait, sous peine d’ingérence, de passer par l’ancienne capitale pour faire parvenir les secours au Biafra. Déjà, des voix s’élevaient pour contester le respect inconditionnel de la souveraineté étatique. La réussite d’une position en surplomb des États, via l’ONU, marquera la réussite de l’humanitaire « à la française ».

742° Le mélange indissociable de deux discours ou de deux registres, politique et humanitaire, chez ceux qui voulaient secourir les victimes biafraises, les plus nombreuses (et pour cause), de Jacques Madaule à Bernard Kouchner. Cette association fera la fortune de l’humanitaire dans ses grandes heures. Ce choix du « bon » camp permettra, à la fin des années 90, de revisiter les théories de la guerre « juste ».

753° Le choix entre les modalités de l’humanitaire se double d’un débat éthique : d’un côté, l’éthique du « bon Samaritain » ; de l’autre, une éthique, défendue par Bernard Kouchner, de l’engagement humanitaire, dissocié de tout critère politique a priori, des « générosités orientées », et fondé sur la reconnaissance de l’autre à secourir. La première, la charité, se veut indifférente à l’identité de celui qu’elle sauve, à son passé comme à son avenir, pour ne considérer que le présent d’une souffrance. Pour la seconde, au contraire, la charité se disqualifie du fait même de cette indifférence ; ses tenants se veulent attentifs à un groupe, à son histoire, non seulement un passé mais aussi un projet. Position qui pose une interrogation sur les critères pertinents de reconnaissance de la justesse d’une cause ; pour Bernard Kouchner, ce fut « l’unité du peuple biafrais ».

76La guerre du Biafra fut un laboratoire de l’action humanitaire à venir, le temps d’expérimentation des formules futures de gestion de la lutte contre des effets de la guerre : des couloirs humanitaires aux boucliers humains, en passant par une problématique d’organisation souvent masquée par la médiatisation du rôle des médecins. Pourtant, inventeur de la « loi du tapage médiatique », Bernard Kouchner, comme d’autres, avait bien perçu les effets de saturation provenant de la répétition de messages et d’images, aussi émouvants fussent-ils.


Date de mise en ligne : 01/12/2007

https://doi.org/10.3917/tdm.004.0114

Notes

  • [1]
    David Rieff, « L’échec de Bernard Kouchner », Le Monde, 16 décembre 1999.
  • [2]
    Daniel C. Bach, « Nigeria », Encyclopaedia Universalis, 2002, T. 16, p. 209.
  • [3]
    Pierre Georges, « Civilement vôtre », Le Monde, 26 juin 1991.
  • [4]
    Jean-Pierre Langellier, « Bernard Kouchner, du Biafra au Kosovo », Le Monde, 4 juillet 1999.
  • [5]
    Bernard Guetta, « L’ingérence, la foi du nouveau siècle ? », Le Temps, 2 novembre 1999.
  • [6]
    Les dates entre parenthèses sont celles des numéros du Monde.
  • [7]
    P. Grellety Bosviel, « Bloc-notes d’un médecin au Biafra », La Croix, 13 mars 1969.
  • [8]
    Corinne Lesnes, Franck Nouchi, Claire Tréan, « MSF : les défis d’une génération », Le Monde, 17 octobre 1999.
  • [9]
    Bernard Kouchner, « Poète et militant de toutes les libertés », Le Monde, 1er janvier 2004.
  • [10]
    Bernard Kouchner, « Vive la vie ! », Le Monde, 11 décembre 1999.
  • [11]
    Cité in Corinne Lesnes, Franck Nouchi, Claire Tréan, « MSF : les défis d’une génération », Le Monde, 17 octobre 1999.
  • [12]
    L’ancien chef de la délégation du Biafra en France critiquera d’ailleurs la thèse des autorités séparatistes dans « Souveraineté ou suicide collectif » (L. M., 5 juillet 1969).
  • [13]
    Bernard Kouchner, « Un médecin accuse » (ITW Pierre Bénichou), Le Nouvel Observateur, 19 janvier 1970.
  • [14]
    Philippe Decraene, « Tumulte à la mutualité ou la solitude du Biafra », Le Monde, 14 mars 1969.
  • [15]
    Rony Brauman (ITW René Backmann), « Le sacre des rebelles », Le Nouvel Observateur, 21 octobre 1999.

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