Vivre isolé dans un milieu sauvage : un camp de base d’expédition himalayenne. À 4 500 mètres dans le massif des Annapurnas (Népal), le camp de base implique de conserver la nourriture et de se nourrir en autonomie dans un environnement extrême (isolement, altitude, froid, vent…).
L’itinérance sportive en espace naturel (expédition, trekking, randonnée) s’est fortement développée ces dernières décennies. Depuis les cimes himalayennes où des dizaines de milliers d’himalayistes tentent d’atteindre un culmen terrestre jusqu’aux forêts, montagnes ou déserts traversés par des millions de randonneurs itinérants (1,5 million d’adeptes en France), la problématique de la conservation alimentaire lorsque le mangeur se déplace prend des formes originales. Randonner ou grimper dans des milieux sauvages, affrontés volontairement, implique de (sur)vivre et se déplacer de quelques jours à plusieurs semaines dans un environnement isolé. Dans des contraintes environnementales fortes (chaleur/froid excessifs, humidité, altitude, contamination, souillure), les pratiquants se démunissent des systèmes sociotechniques usuels de conservation alimentaire (chaîne du froid, approvisionnement permanent, habitat sédentaire). Le système culinaire (Mahias 1985) et les procédés de conservation alimentaire recouvrent alors des enjeux considérables. Certains sont fonctionnels : transportabilité et allègement ; qualité sanitaire, durabilité et protection des rations ; diététique et nutrition de l’effort. D’autres enjeux sont plus fortement spécifiés culturellement (Poulain 2002) : appétence, plaisir et goût ; rapports sociaux (commensalité autour du partage d’un mets « trésor ») ou distinctifs (partisans et adversaires des « lyophilisés ») ; aspects symboliques (aliment sain ou souillé)…