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Article de revue

L'Organisation de Résistance de l'Armée dans le Morbihan 1940-1944. Le cas du 2e bataillon ORA

Pages 47 à 76

Notes

  • [1]
    Nom donné aux habitants d’Auray.
  • [2]
    Bro Erec, nom du comté, créé au vie siècle par les Bretons cornouaillais aux dépens de l’ancienne cité gallo-romaine des Vénètes dans la région de Vannes-Auray.
  • [3]
    Archives nationales, 7AJ166, Dossier “Panier de cerises”.
  • [4]
    Service Historique de la Défense, division Gendarmerie, 56E106, Brigade territoriale de Pluvigner, registre de correspondance courante au départ (R/2), 4 janvier 1939 au 6 février 1942, p. 310.
  • [5]
    Idem.
  • [6]
    SHD-DIMI Résistance-xP56-1 2e bataillon FFI.
  • [7]
    Nom de baptême du maquis de Saint-Marcel.
  • [8]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, pp. 274-275.
  • [9]
    Témoignage de René Le Mentec, septembre 2009.
  • [10]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, p. 267.
  • [11]
    Décret “Keitel Befehl” du 16 septembre 1941.
  • [12]
    SHD, DIMI Résistance, dossier FFI André Kergosien, cote 16P 318404.
  • [13]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, p. 265.

1Le 18 juin 1944, la Résistance bretonne livra dans la lande armoricaine un combat encore aujourd’hui méconnu du grand public. Quatre ans, jour pour jour, après l’appel historique du général de Gaulle, un petit village du Morbihan, Saint-Marcel, va être le théâtre d’un affrontement majeur impliquant plusieurs milliers de combattants français et allemands. Aux côtés des parachutistes de la France Libre, une unité va particulièrement se distinguer, le 2e bataillon ORA du Morbihan, commandé par le chef d’escadron Yves Le Garrec. Né de la fusion d’organisations opérant dans le Morbihan depuis octobre 1940, le bataillon fut constitué dans la clandestinité au début de l’année 1944. Sous l’égide de l’ORA puis des Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), il va contribuer, avec onze autres bataillons morbihannais, à la Libération de la Bretagne Sud. Après plusieurs mois de lutte, le bataillon achèvera son parcours opérationnel au contact des troupes allemandes encerclées dans la poche de Lorient.

2Alors que tout semble avoir été dit sur la période, pourquoi étudier ce bataillon en particulier ?

3L’histoire du 2e bataillon ORA du Morbihan, c’est tout d’abord l’histoire complexe de la Résistance dans une région de Bretagne à la fois enracinée dans le massif des Landes de Lanvaux et ouverte sur l’océan. Centrée sur Auray, elle correspond globalement à la partie de territoire comprise entre Lorient et Vannes.

4C’est aussi l’histoire d’un amalgame réussi entre des hommes que peu de choses prédisposaient à se réunir sous une même bannière. Au final, hommes de mer et hommes de terre, communistes et anciens de réseaux proches de Vichy feront cause commune pour obtenir la libération de leur région.

5Enfin, sur le plan opérationnel, c’est un exemple d’adaptation continue à une forme de combat basée sur le principe de l’action du faible au fort. Dans des conditions souvent défavorables, des hommes et quelques femmes, que rien n’avait préparés à un tel engagement, vont apprendre, dans l’épreuve, la cruelle réalité du combat insurrectionnel. Face à un adversaire constitué de troupes rompues aux techniques de contre-guérilla, le pays d’Auray va mener, entre 1940 et 1944, un combat articulé en trois phases. Agents de renseignement ou activistes politiques entre 1940 et 1941, les volontaires deviendront saboteurs en 1942. À partir de 1943, un bataillon d’infanterie légère sera constitué afin de participer à la phase ultime de la guérilla puis de contrôle de la poche de Lorient.

6Au bilan, le bataillon d’Auray perdra près de 10 % de son effectif. Ce chiffre en fait le bataillon FFI le plus éprouvé du Morbihan et témoigne indéniablement de l’intensité des opérations auxquelles il participa.

7En abordant la genèse du bataillon Le Garrec, nous tâcherons de comprendre dans quel état d’esprit furent conduites les premières actions. Dans un deuxième temps, il s’agira d’analyser l’organisation du bataillon en détaillant sa structure et ses modes d’action. Enfin, les engagements opérationnels seront évoqués et confrontés aux méthodes allemandes de contre-guérilla.

Genèse

La zone d’action

8Avant de débuter l’étude des organisations, analysons la géographie du Morbihan sous le prisme des caractéristiques militaires.

9Bordée au sud par l’océan Atlantique, la zone qui nous intéresse est globalement comprise dans un quadrilatère incluant Lorient, Pontivy, Ploërmel et La Roche Bernard. Ce découpage permet d’intégrer le secteur de recrutement du pays d’Auray, la zone d’action principale étendue aux Landes de Lanvaux et les secteurs des bataillons voisins, dont l’action influait directement ou indirectement sur la situation des combattants alréens [1].

10Du point de vue tactique, cette zone comprenait deux sous-ensembles, séparés par les Landes de Lanvaux. Au sud de cette ligne de crête caractéristique, se dessinait un étroit couloir de mobilité et au nord une vaste zone de bocage compartimentée.

Le couloir sud

11Le couloir sud correspond schématiquement à l’ancien Bro Erec [2]. Il prend appui sur la côte atlantique puis vient épouser le versant sud des Landes de Lanvaux.

12Au plan militaire, la côte morbihannaise présente deux intérêts, ses plages et le port en eau profonde de Lorient. Sur le plan urbain, Lorient, Vannes et Auray dominent la région qui nous intéresse. Lorient constituait, en 1940, le principal pôle aggloméré du Morbihan.

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13La préfecture de Vannes et la ville d’Auray s’affichaient quant à elles en retrait. Par sa localisation sur une rivière à la limite entre les eaux salées du golfe du Morbihan et les eaux claires du Loch, Auray occupait le premier point de franchissement depuis l’embouchure située quinze kilomètres en aval. L’histoire nous rappelle que ce point de passage fut disputé militairement à maintes reprises. Bataille pour la succession du duché de Bretagne en septembre 1364, combats sur la tête de pont de Landévant-Auray lors de l’expédition contre-révolutionnaire de Quiberon en juin 1795, affrontement lors de la petite Chouannerie en juin 1815, ces exemples illustrent l’intérêt tactique de la ville. Entre 1940 et 1944, elle resta donc un point-clé, dont le contrôle permettait d’une part l’accès au secteur défensif de Quiberon et d’autre part la liaison avec la base sous-marine de Saint-Nazaire.

14S’agissant des axes de mobilité, une route principale traverse la zone. Parallèle à la côte, la fonction militaire de la route nationale 165 ne fait aucun doute. Elle reprend presque intégralement le tracé de la voie Nantes-Quimper, dessinée au ve siècle par l’administration gallo-romaine pour contrer les incursions des pirates saxons. En 1940, elle devint, selon la terminologie militaire, une rocade destinée à assurer les transferts rapides de troupes en direction des secteurs côtiers.

Le bocage nord

15La partie nord de la zone d’opération présente une plus grande homogénéité géographique que le couloir sud. Il s’agit d’une vaste zone de bocage très dense. Parsemée de nombreux espaces forestiers, elle est bordée au sud par les terres de bruyère des Landes de Lanvaux.

16Ces landes forment une crête évasée, globalement orientée est-ouest. L’altitude moyenne ne dépasse pas 150 mètres dans la partie orientale. Dans les années 1940, la crête conservait son caractère ancestral, fait de paysages de landes pauvres, dominées par les genêts et les bruyères. Le terrain offrait à la vue de multiples blocs granitiques, mais également des perspectives visuelles très dégagées. À côté de ces landes, le paysage présentait l’aspect d’un profond massif boisé. Véritable région naturelle où l’on retrouve des traits paysagers similaires, le pays de Lanvaux représenta donc une zone d’opération potentielle très favorable pour mener une guérilla. Notons que la région fut, pendant la période révolutionnaire, le territoire du redoutable chef chouan Pierre Guillemot. Mais, en 1943-1944, elle constitua surtout le sanctuaire dont tous les mouvements de nature insurrectionnelle ont besoin pour se conditionner avant de passer à l’action. Pour la Résistance du Morbihan, elle devait donc être tenue, d’où les efforts déployés pour y implanter des maquis, des caches d’armes et des zones de parachutage.

17Ce descriptif de la zone d’action du 2e bataillon FFI distingue deux espaces opérationnels différents. Mais l’un comme l’autre présentent des caractéristiques militaires (bocage, refuges boisés) favorables à une action de type insurrectionnel.

18Il met en relief les multiples atouts tactiques offerts par la zone sur le lieu même de constitution du bataillon. Il montre également que le dispositif du 2e bataillon ORA bénéficiait dans le massif de Lanvaux d’une profondeur tactique extrêmement salutaire dans l’hypothèse d’un repli.

L’esprit de résistance

19Comment caractériser l’état d’esprit des populations alréennes face à l’occupation ?

20A posteriori, l’exercice se révèle difficile. L’instinct nous porte à rechercher dans les premiers actes anti-allemands les signes d’un large consensus quant aux idées défendues par les patriotes, appellation en usage à l’époque pour désigner l’ensemble des acteurs de la Résistance. En janvier 1941, le préfet du Morbihan faisait état, dans une note confidentielle, de l’hostilité récurrente des populations à l’égard du régime de Vichy. La réalité d’ensemble est plus complexe à percevoir.

La population alréenne et l’occupation

21Contrairement à de nombreuses régions françaises, l’occupation fut ici un phénomène tangible. Tout au long de la guerre, des divisions allemandes en stationnement dans le pays d’Auray vont se succéder. Au premier semestre 1943, le réseau de renseignement du commandant de gendarmerie Maurice Guillaudot évaluera à 200 000 hommes [3] le volume des troupes d’occupation dans le Morbihan. En conséquence, l’immense majorité des habitants hésita longtemps à engager une quelconque forme de résistance.

22L’occupation prit par ailleurs une dimension économique. L’organisation TODT multiplia ses implantations afin de garantir le rythme des travaux de fortification de la côte. L’économie locale fut dopée par ces activités. Dès 1941, les rapports mensuels des gendarmeries du pays d’Auray soulignaient que “le chômage n’est pas connu” [4]. En fin d’année, le chômage dans le Morbihan, comme dans le reste de la Bretagne, était totalement résorbé, ce qui constitua, en période de restriction, un motif de légitime satisfaction.

23Enfin, dans les premiers temps de l’occupation, les Allemands vont pratiquer un jeu de séduction propre à brouiller les cartes. Partout, les témoignages recueillis concordent pour affirmer que le comportement des Feldgraus fut initialement très correct. Disciplinée par nature, l’armée allemande respecta scrupuleusement les consignes prescrites vis à vis des populations locales, notamment rurales. Plus que tout, la Wehrmacht redoutait en effet d’avoir à affronter, hors zones urbaines, le harcèlement de groupes armés.

24Dans sa majorité, le pays d’Auray afficha par conséquent une prudente neutralité face à un adversaire ambigu, dont la puissance était manifeste.

L’opposition populations rurales – populations de la côte

25Un second facteur, prenant en compte la distinction entre les populations rurales et les populations côtières, permet de réaliser une analyse plus fine des réactions face à l’occupation allemande.

26S’agissant des communes rurales, on observe globalement que celles-ci adhérèrent avec conviction aux idées de la “Révolution nationale” prônées par le gouvernement de Vichy. Les rapports de gendarmerie des circonscriptions rurales du pays d’Auray sont sans équivoque. L’action et les décisions du gouvernement sont plutôt favorablement accueillies par la population. La situation économique du pays, sans être florissante, donne satisfaction aux agriculteurs. Tout au long de l’année 1941, les rapports confirmeront cette tendance. On y soulignait que “la population ayant une entière confiance dans le chef de l’État, son moral est excellent” et que si elle manifeste son attention, “c’est plutôt en faveur du gouvernement” [5]. Par ailleurs, les rapports avec l’occupant furent jugés très corrects.

27Près de la côte, l’esprit est différent. Très tôt, une multitude d’actes d’opposition au gouvernement de Vichy et aux troupes d’occupation vont y être observés. Une étude sociologique permettrait d’établir un lien entre la psychologie du marin, épris de liberté, et le refus de se soumettre à une troupe d’occupation étrangère. Sans écarter cet aspect, nous nous contenterons de rappeler que la côte fut déclarée zone interdite au cours de l’année 1941. Tout individu non résidant devait disposer d’une autorisation de circulation délivrée par la Kreiskommandantur de Lorient. De plus, en raison de l’intérêt tactique porté par les Allemands aux secteurs côtiers, un contrôle plus étroit de la population s’exerça tout au long de l’occupation.

28Dans un tel contexte, tout concourait à souhaiter le départ des Allemands et à prêter une oreille attentive aux mouvements patriotiques. Carnac, Quiberon, la Trinité-sur-Mer et Auray furent considérés comme des fiefs gaullistes ou communistes. La fête nationale du 14 juillet 1941 fut d’ailleurs l’occasion de manifester son patriotisme. Trois communes, Carnac, Quiberon et Belz, furent particulièrement concernées, soulignant combien les populations côtières restaient sensibles à toute forme d’action patriotique.

29Cet exposé montre que les populations alréennes adoptèrent une posture mentale complexe à l’égard des troupes d’occupation. Au moins jusqu’en 1942, les zones rurales s’accommodèrent plutôt bien de la nouvelle situation. À partir de 1943, on observa une nette bascule des opinions. En ce sens, le service du travail obligatoire (STO) joua un rôle de catalyseur. En réaction, ce fut donc l’ensemble de la population qui bascula. Le 26 juillet 1943, le sermon de l’évêque de Vannes devant la foule des pèlerins de Sainte-Anne d’Auray déclencha la Marseillaise. Mais le témoignage le plus révélateur de l’état d’esprit des populations alréennes nous vient d’un pilote américain, Joseph Boyle, abattu en mai 1943 au-dessus de Brech. Capturé, il fut interrogé à Auray par un jeune officier allemand qui lui décrivit combien l’hostilité de la population locale était palpable. Selon ses propos, “quand il marchait dans la rue, personne ne le regardait, ni ne lui adressait la parole et il s’attendait à être abattu dans le dos”.

Les organisations pionnières

30Dans ce contexte, le 2e bataillon est né de la fusion de multiples organisations de résistance qui, dès 1940, esquissèrent les premiers gestes anti-allemands. Si, en 1944, le bataillon d’Auray adopta, sous l’influence de son chef, la bannière de l’ORA, force est de constater que les hommes furent à l’origine recrutés par des mouvements ou réseaux aux origines les plus diverses. Cinq structures, le réseau “Hector”, le Front national, Libération-Nord, le réseau action de la mission du Bureau Central de Recherche et d’Action (BCRA) Cockle et le Service national Maquis vont contribuer, après d’âpres négociations politiques, à la formation du bataillon d’Auray. Ces cinq structures vont apparaître entre 1940 et 1943 sur la scène résistante morbihannaise. Les deux premières organisations furent indéniablement le réseau “Hector” et le Front national (FN), mouvement d’obédience communiste. Elles furent suivies par Cockle, Libération-Nord et enfin le Service national Maquis en septembre 1943.

Hector

31Dès l’été 1940, les services de renseignement de Vichy vont implanter dans le Morbihan plusieurs réseaux de renseignement. Le réseau “Hector” va en particulier accueillir de futurs cadres de l’ORA et du 2e bataillon FFI. Créé sous l’impulsion du colonel Alfred Heurteaux, “Hector” fut un réseau de renseignement stratégique piloté par la branche Air des services de renseignement de l’armée d’armistice. Au niveau national, les premiers contacts mirent en relation le colonel Heurteaux avec une majorité d’officiers issus de l’armée d’armistice ou proches des plus hautes autorités du Vichy. Selon Heurteaux, le maréchal Pétain fut personnellement tenu informé de ces activités par son conseiller et médecin personnel, le docteur Ménétrel.

32Sur un plan opérationnel, la France fut découpée en deux zones d’intérêt du renseignement, la zone sud étant attribuée au réseau “Alliance” sous les ordres du commandant Loustanau-Lacau et la zone nord au réseau “Hector”. Dans un esprit de “revanche” et non pas de “résistance”, Heurteaux envoya ces émissaires constituer en zone occupée les bases de son réseau à partir de l’automne 1940. Dans le Morbihan, les premiers contacts furent établis à cette époque avec des officiers de cavalerie de la garnison de Vannes. Le recrutement morbihannais fut confié à un proche d’Heurteaux, le commandant René Grard. Il entra en contact avec un ancien officier de cavalerie, retiré dans une ferme de Crach près d’Auray, le chef d’escadrons Jean Muller. Celui-ci deviendra ensuite le responsable lorientais d’“Hector” puis le chef départemental de l’ORA. En 1942, l’antenne vannetaise d’“Hector” recrutera le futur chef du 2e bataillon, Yves Le Garrec. Quatre secteurs de recherche, Lorient, Vannes-Auray, Pontivy et Josselin seront déterminés et resteront plus ou moins actifs jusqu’à 1943. L’ORA prendra ensuite appui sur cette structure pour constituer ses quatre bataillons.

Le Front national

33La seconde organisation à avoir employé de futurs hommes de troupe du bataillon Le Garrec fut le Front national. Dans le pays d’Auray, trois cellules communistes, Auray, Quiberon et Camors vont, entre 1940 et 1944, se restructurer clandestinement pour conduire successivement des actions de subversion politique, des activités de sabotage et enfin des opérations de guérilla ouverte. À la Libération, les hommes de Quiberon constitueront une compagnie autonome qui sera rattachée au bataillon lors des opérations de la poche de Lorient. Les militants alréens rejoindront massivement Le Garrec au moment du débarquement. Enfin, la cellule communiste de Camors fournira des éléments au mouvement Libération-Nord qui rejoindront ensuite les unités FTP du centre Morbihan. Après une phase intense d’activisme politique, ces militants vont adopter en 1942 une tactique de harcèlement déclinée du modèle de guérilla urbaine appliqué dans l’agglomération lorientaise. La structure en trinôme, dite du “triangle”, fera ainsi son apparition dans les groupes de sabotage du pays d’Auray. En 1943, le FN expérimentera une structure originale en constituant dans des communes rurales proches d’Auray (Brech, Pluvigner, Landaul et Landévant) une compagnie de guérilla qui sera rattachée à un bataillon FTP implanté quarante kilomètres plus au nord, dans le secteur de Locminé. L’expérience ne fut toutefois pas concluante, car ces hommes furent incorporés au 2e bataillon après le débarquement.

Le réseau “Action” de la mission BCRA Cockle

34À partir de 1943, de nouvelles structures vont redonner vigueur à la Résistance morbihannaise. En décembre 1942, le bureau des opérations aériennes (BOA) du BCRA parachuta dans le nord du Morbihan une équipe chargée d’armer et encadrer les groupes morbihannais. Sous la direction d’un ancien du même régiment de chars que Jean Muller, Guy Lenfant, la mission “Cockle” va contribuer à armer les hommes, mais surtout établir des contacts réguliers avec Londres. L’ORA utilisera notamment la station radio du BOA pour obtenir à son profit un parachutage d’armes en mars 1944. Parallèlement, le chef d’escadron Guillaudot, commandant la compagnie de gendarmerie du Morbihan, va mettre à disposition de Guy Lenfant une partie de ses hommes. Dans un premier temps, la mission des gendarmes consista à recueillir le renseignement au profit de Londres. À partir de 1943, ces volontaires vont débuter un lent travail de recrutement et d’encadrement en ciblant principalement les jeunes concernés par le STO. Au moment de la Libération, les gendarmes donneront un commandant d’unité et plusieurs chefs de sections au bataillon d’Auray.

Libération-Nord

35Constitué en novembre 1941, Libération-Nord fut l’un des principaux mouvements de résistance de la zone nord. Membre historique du Conseil national de la Résistance (CNR), Libération-Nord développa à partir de 1942 une composante de lutte armée placée sous le contrôle du BCRA. En zone nord, elle fut connue sous le nom de “Cohors-Asturies” et fut notamment active dans la région de Lorient. Parallèlement, le mouvement organisa début 1943 ses propres groupes armés. C’est dans ce cadre que sera constituée, dans la région de Vannes-Auray, la branche morbihannaise du mouvement. Parmi les figures historiques, on retrouve le capitaine de vaisseau Eugène Desforges, ancien membre du réseau “Hector” et ami du commandant Le Garrec, mais surtout Joseph Rollo, directeur d’école dans le quartier de la gare à Auray. Celui-ci recrutera le futur commandant de la 2e compagnie du bataillon, le capitaine Cosquer et l’adjoint de Le Garrec, Yves Kerroux. Il constituera également des groupes armés à partir de la cellule communiste de Camors et d’une équipe d’agents de renseignement travaillant pour le futur capitaine de la 6e compagnie, le docteur Jaffré. Lorsque Rollo sera arrêté en mars 1944, l’ensemble de la composante alréenne rejoindra le 2e bataillon.

Service National Maquis

36Parmi les mouvements avec lesquels l’ORA tissa des liens particuliers figure le Service National Maquis (SNM). Destiné à organiser le soutien aux jeunes hommes concernés par le STO, cet organisme s’implanta dans le Morbihan en septembre 1943. Il fut notamment à l’origine du concept de “maquis pilote”. Par ce moyen, il chercha à former les cadres des futurs maquis armés du Morbihan. Un maquis pilote fut ainsi créé dans le centre du Morbihan près de Baud. L’expérience tourna court, car le campement fut attaqué en février 1944. L’essai permit cependant de disposer de cadres aguerris. On les retrouvera ensuite dans divers autres unités FFI ou maquis des landes de Lanvaux. Plusieurs cadres rejoindront dans un premier temps l’ORA, marquant ainsi la communauté de vue qui unissait les deux formations. Outre l’expérience et ses larges moyens financiers, le SNM apporta surtout au Morbihan des idées sur la formation des maquis.

37Ce court panorama des principales organisations à partir desquelles se constitua le 2e bataillon ORA illustre l’ancienneté de la filiation opérationnelle de l’unité. Il montre également toute la complexité des rapprochements rendus nécessaires pour constituer les bataillons de guérilla au moment du débarquement.

Organisation

Le bataillon ORA

38La fusion de la Résistance morbihannaise s’opéra entre décembre 1943 et mai 1944. Dans un premier temps, les directives nationales furent appliquées sans grandes difficultés. Elles aboutirent à la fusion au sein de l’Armée Secrète du mouvement Libération-Nord, du Service National Maquis, des groupes rattachés à la France Libre et de diverses autres entités dont le réseau “Vengeance”. Seuls les FTP et l’ORA manquèrent à l’appel. Les groupes communistes restèrent autonomes jusqu’à la Libération. Après de multiples négociations, l’ORA adhérera aux Forces Françaises de l’Intérieur en mai 1944.

La structure nationale

39Au niveau national, l’ORA fut créée le 31 janvier 1943 en réaction à la dissolution de l’Armée d’armistice, en regroupant une majorité de cadres qui en étaient issus. Son premier chef fut le général Frère. Comme son successeur, le général Verneau, il fut arrêté au cours de l’année 1943 et mourut en déportation. Le mouvement sera conduit à la victoire par le général Revers, lequel avait été un camarade de régiment de l’un des deux principaux responsables morbihannais de l’ORA, l’alréen Paul Manceau. Grâce aux cadres et à l’armement camouflé par l’Armée d’armistice, elle bénéficia en zone sud de conditions extrêmement favorables pour se développer. Tout en conservant son autonomie, elle fusionna officiellement en février 1944 avec l’Armée Secrète (AS) et les FTP pour former les FFI. Proche du général Giraud, l’organisation revendiqua toujours son apolitisme et s’affirma comme le prolongement en France occupée de l’armée française d’Afrique.

La déclinaison régionale

40Le développement de l’ORA en Bretagne puis dans le Morbihan débuta fin 1942 sous la direction d’un simple lieutenant d’active, André de Freslon. Sur ordre de l’état-major national, il prit les premiers contacts en privilégiant les anciens du réseau “Hector”. Dans le Morbihan, deux alréens, Jean Muller et Paul Manceau, vont devenir respectivement chef et adjoint de la structure départementale. Jean Muller avait été membre du réseau “Hector”. Officier d’active à la retraite, Paul Manceau aurait été directement mandaté par son camarade Revers pour s’établir en Bretagne et agir à son profit. Devenu gérant d’un grand hôtel d’Auray, l’intéressé bénéficia alors d’une excellente couverture pour coordonner avec Muller les activités départementales de l’organisation. Morbihannais d’origine, Manceau connaissait également depuis son enfance un ancien du réseau “Hector” et futur chef du 2e bataillon, Yves Le Garrec. En 1944, alors que la structure bretonne de l’ORA avait pris un format dont le commandement dépassait les compétences de Freslon, l’état-major central désigna le colonel Masnou pour le remplacer. Là encore, on retrouve un proche du réseau “Hector”. Chef du SR Air en août 1940, Masnou avait coordonné le travail du colonel Heurteaux et du commandant Loustanau-Lacau lors de la création de leurs réseaux respectifs. Les trois hommes se connaissaient par ailleurs très bien pour avoir appartenu à la même promotion de Saint-Cyr (Montmirail 1912-1914). Dans ce cadre, l’ORA morbihannaise va contribuer à l’organisation de quatre bataillons d’infanterie légère qui s’implanteront assez logiquement dans les anciens secteurs du réseau “Hector”.

Le recrutement du bataillon

41À côté des volontaires opérant depuis 1940 dans les organisations dont nous avons parlé plus haut, le recrutement du bataillon s’effectua globalement en trois temps ; identification de la ressource humaine, recrutement des volontaires les plus motivés et enfin mobilisation massive au moment du débarquement.

42L’identification fut tout d’abord le fait de cadres locaux qui, par leurs responsabilités professionnelles, étaient capables de jauger la ressource disponible. Ce travail fut en particulier effectué par les gendarmes. On parla souvent de recrutement dès cette phase mais, dans les faits, il s’agissait plutôt de suivi et d’assistance, notamment au profit des jeunes hommes concernés par le STO. Le recrutement proprement dit intervint dans un second temps. Pour des raisons évidentes de sécurité, il fut limité aux individus les plus résolus. Dans un rapport daté de mai 1944, les Allemands parlèrent de structure en “rayon”, pour désigner ces équipes composées d’une dizaine d’hommes qui, sans organisation particulière, étaient rattachés à un responsable local qu’ils connaissaient bien. Ce chef pouvait être le secrétaire de mairie, comme à Brech, un agriculteur ou un meunier comme à Landaul ou Landévant, un prêtre à Crach, un médecin à Etel, un officier de marine marchande à Baden ou un ostréiculteur à Mendon. Ces hommes exerçaient une autorité certaine sur leurs recrues, mais manquaient souvent d’expérience militaire. Ils jouèrent un rôle proche des “capitaines de paroisses” de la période contre-révolutionnaire de la Chouannerie.

43Sur le plan de la méthode, chaque responsable partait des échanges oraux qu’il avait pu avoir. Aucun contrôle nominatif n’était tenu. Aucun document écrit n’était non plus signé par des individus dont la motivation pouvait par ailleurs évoluer avec le temps. Il faudra attendre le regroupement de Saint-Marcel pour que l’engagement des recrues soit formalisé de manière administrative avec inscription sur des tableaux d’effectifs réglementaires et attribution d’un numéro de matricule. Les règles de la clandestinité étant ce qu’elles sont, les recrues passèrent ensuite une longue période à attendre une action qui, pour la grande majorité, ne vint qu’après le débarquement. Incorporé à la 2e compagnie, François Le Boulaire de Brech fut ainsi contacté à l’été 1943 et ne réalisera ses premières missions qu’en avril 1944. Cette attente permettait donc de méditer la décision prise et au final soit de renoncer, soit de basculer dans une organisation plus active.

44Un fois recrutés, ces hommes constituèrent le noyau actif de la future structure bataillonnaire. Au moment du débarquement, quatre compagnies furent constituées sur une base communale et confiées à des hommes ayant appartenu à l’armée de terre ou à la gendarmerie. Dans trois cas, à la 1ère compagnie du lieutenant Paul Bessière, à la 2e compagnie avec l’adjudant-chef Le Merdy et à la 4e compagnie du capitaine Laimé, les hommes furent placés sous le commandement d’individus qu’ils ne connaissaient pas ou peu. Seule la 3e compagnie, recrutée principalement parmi les cheminots d’Auray, conserva un cadre connu de ses hommes. Chef de bureau à la gare d’Auray, Émile Cosquer avait en effet exercé des responsabilités de niveau similaire au sein du mouvement Libération-Nord. Une 5e compagnie fut armée au cours du mois de juillet à partir de personnels recrutés dans la région de Baud. Implantée vingt kilomètres au nord du pays d’Auray, cette compagnie conservera une grande autonomie opérationnelle jusqu’au déclenchement de la guérilla généralisée en août.

45La montée en puissance sous égide de l’ORA débuta au mois de février 1944. La date correspond au rapprochement du commandant Le Garrec avec l’adjoint départemental de l’organisation, Paul Manceau. Prenant appui sur les acteurs clandestins antérieurs, Le Garrec structura ses unités en format bataillon au court des mois de juin et juillet 1944. Un premier travail fut effectué dans le massif de Lanvaux à Saint-Bily, entre le 9 et le 13 juin 1944. Il ne put être achevé, car le site de regroupement fut attaqué par une unité de cavaliers russes. Dans une grande confusion, les reliquats rejoignirent le maquis mobilisateur de Saint-Marcel et furent réarticulés en un bataillon à seulement trois compagnies. Chaque section bénéficia toutefois du renfort d’une équipe de trois à quatre parachutistes SAS. Commandée par Félix Guillas, la 3e section de la 1ère compagnie fut ainsi renforcée par deux hommes de troupe et un officier SAS, le lieutenant Alain de Kérillis. Il faudra ensuite attendre début août 1944 pour que Le Garrec puisse reconstituer son unité en format bataillon à trois, puis cinq et six compagnies. Au terme d’une montée en puissance de six mois, le 2e bataillon sera finalement devenu une unité d’infanterie légère qui conformément aux directives nationales FFI, adopta le modèle organisationnel du bataillon de fusiliers-voltigeurs version 1939.

Les hommes

Profil général du bataillon

46Avant le débarquement des alliés en Normandie, Le Garrec dirigea un volume de force très limité en nombre. Au mieux peut-on estimer qu’il exista par commune un noyau actif de dix à vingt personnes. Entre juin et août 1944, les effectifs du bataillon varièrent de 800 à 1 200 hommes. Le maximum fut, semble-t-il, atteint lors du regroupement de Saint-Bily. Dans une ambiance de kermesse, une multitude de volontaires affluèrent dans l’espoir de se faire armer. Les dislocations successives de Saint-Bily puis de Saint-Marcel freinèrent les ardeurs de bien des hommes. Au bilan, Le Garrec rencontrera les plus grandes difficultés pour regrouper, fin août, un effectif combattant apte à reprendre la lutte. Entre le 3 et le 7 août 1944, date d’arrivée des troupes américaines à Auray, trois compagnies réduites à un volume de deux sections chacune, soit environ 100 à 150 hommes, opéreront dans ou à proximité d’Auray. Seule la 5e compagnie de Baud sera capable de se regrouper au complet en forêt de Camors et de conduire des actions coordonnées de niveau compagnie à partir du 5 août.

47Afin de procéder à une rapide étude du bataillon, nous prendrons pour référence le document d’homologation [6], établi après la guerre au titre du 2e bataillon FFI du Morbihan. Loin d’être exhaustive, cette liste recense toutefois 724 noms. Du point de vue strictement administratif, la période d’activité FFI du bataillon Le Garrec fut comprise entre le 1er juin et le 11 août 1944. Seuls les cadres purent faire valoir des services plus anciens.

48Que révèlent ces données ? Un premier constat s’impose, le bataillon fut majoritairement composé d’hommes. 714 individus de sexe masculin firent homologuer leurs services. L’âge moyen était de 26 ans. Le cadet des volontaires masculins s’appelait Jules Mithouard. Né le 11 novembre 1927, il n’avait pas encore 17 ans lorsqu’il fut tué au combat avec son frère Marcel au retour du maquis de Saint-Marcel. Le doyen, Albert Barrau, avait quant à lui 58 ans en 1944.

49S’agissant des femmes, elles ne furent que sept à faire homologuer leurs services. L’âge moyen de ces agents de liaison était de 22 ans. Trois d’entre elles furent des filles de cadres, la fille du chef de bataillon, Maryse Le Garrec, et les deux filles jumelles du commandant Paul Manceau, Jacqueline et Claudie. Nées en août 1928, ces deux dernières furent les cadettes du bataillon.

50Au bilan, si l’âge moyen du bataillon fut proche des standards militaires de l’époque, les écarts entre les plus jeunes et les plus anciens furent très importants. Lorsque le bataillon sera intégré à l’armée d’active en août-septembre 1944, les hommes de plus de quarante ans seront par conséquent renvoyés dans leurs foyers.

51Par ailleurs, sur 724 personnes recensées, 631 (87 %) entrèrent en action à partir du 1er juin 1944. En complément de ce chiffre officiel, il convient de comptabiliser les individus dont l’engagement au titre du bataillon ne fut jamais reconnu officiellement. L’effectif peut donc être raisonnablement porté à quelque mille recrues, issues dans plus de 95 % des cas de communes limitrophes d’Auray. Rapporté à une population totale estimée à 60 000 habitants en 1944, moins de 2 % des alréens participèrent plus ou moins activement à l’action du bataillon Le Garrec.

Les cadres

52Penchons-nous maintenant sur le profil des cadres du bataillon, en particulier son chef et ses six commandants d’unités.

53Âgé de 55 ans en 1944, le chef de bataillon Yves Le Garrec était né dans le Morbihan d’un père instituteur. En 1940, il acheva une carrière d’officier passée intégralement dans l’artillerie coloniale. Ancien combattant de la guerre de 1914-1918, il prenait le chemin d’une ultime mutation en Afrique Occidentale Française lorsque son navire fut torpillé en mai 1940 par un sous-marin allemand. Légèrement blessé, il retrouva son Morbihan natal pour s’installer à Larmor-Baden près d’Auray. Pendant sa convalescence, il intègre le réseau “Hector” sous les ordres d’un ingénieur agronome de Vannes. Au cours de l’année 1942, il cessa toute relation avec le réseau, jugeant que l’anti-communisme y était trop fort. Le Garrec débutera alors une activité de sabotage en constituant un groupe très actif entre Vannes et Auray à partir de septembre 1943. Proche du commandant Manceau, il est mis en contact avec Muller en février 1944 puis désigné pour prendre le commandement d’un des quatre bataillons constitués sous étiquette ORA dans le Morbihan. Agent de renseignement, saboteur de voie ferrée, commandant de bataillon, l’homme aimait l’action. Il connaîtra son heure de gloire à Saint-Marcel aux côtés des parachutistes SAS du 2e régiment de chasseurs parachutistes.

54Le commandement des compagnies fut véritablement attribué à des capitaines commandant d’unité au cours du mois de juin 1944. Cinq capitaines semblent avoir été désignés avant le Débarquement. Avec l’afflux des volontaires début août 1944, il faudra constituer une sixième compagnie. Quatre unités furent commandées par des cadres issus de l’armée de terre. Outre une expérience opérationnelle classique, trois de ces officiers furent membres d’organisations clandestines avant de rejoindre Le Garrec.

551ère compagnie – La 1ère compagnie fut dirigée jusque fin juin par le lieutenant Paul Bessières, puis à partir de juillet, par le capitaine Jean Le Pan de Ligny. Mobilisé comme officier de réserve au 4e bataillon du 265e RI, Jean de Ligny avait été fait prisonnier le 19 juin 1940 près d’Orléans. Libéré pour maladie en août 1941, il rentra chez lui près de Vannes et devint responsable départemental des équipes de volontaires de la Croix Rouge. Le 20 juin 1944, il entra dans la clandestinité sous les ordres du commandant Le Garrec. On lui confia la réorganisation de la 1ère compagnie dont l’éclatement avait été ordonné après la dislocation de Saint-Marcel. Il restera à la tête de sa compagnie jusqu’à la fin des hostilités et deviendra ensuite officier d’active.

563e compagnie – La 3e compagnie fut commandée par un ancien combattant de 1914-18, le capitaine Émile Cosquer. Officier de réserve au 137e RI, il s’était particulièrement distingué en juin 1940 dans la poche de Dunkerque. Fait prisonnier, il fut libéré comme son camarade de Ligny en août 1941. Cadre à la SNCF, il reprit alors ses fonctions à la gare d’Auray où il dirigea à partir de 1942 un équipe de sabotage liée au mouvement Libération-Nord. En juin 1944, il constituera sa compagnie à partir d’un personnel majoritairement originaire de la ville et du quartier de la gare d’Auray. À Saint-Marcel, il sera chargé de la défense du verrou sud du camp, le château des Hardy-Béhélec. Après avoir brillamment commandé la 3e compagnie lors de la libération d’Auray puis sur le front de Lorient, il prit le commandement de la 1ère compagnie en janvier 1945.

574e compagnie – Après son passage à la tête de la 1ère compagnie à Saint-Marcel, Paul Bessière fut chargé de réorganiser la 4e compagnie au début du mois d’août 1944. Lieutenant d’active, Paul Bessière avait effectué dans les rangs du 170e RI la campagne de France pour laquelle il avait été cité deux fois. Mis en congé d’armistice à sa demande, il fut contacté en décembre 1940 par des agents du réseau “Hector”. Resté en zone sud, c’est toutefois dans le réseau “Alliance” de Loustanau-Lacau qu’il débuta ses activités clandestines. Après s’être fait radier des cadres de l’Armée pour loyalisme douteux en 1941, il s’établit en Savoie où il poursuivit ses activités de Résistance dans le corps des gardes des communications. Inquiété à nouveau en février 1943, il quitta Chambéry pour la Bretagne. Devenu chef de secteur des gardes de communication à Vannes, il contribua au noyautage de l’organisation en intégrant au poste de garde auxiliaire plus de 600 réfractaires du Morbihan. À Saint-Marcel, il armera avec la 1ère compagnie, la réserve d’intervention du maquis mobilisateur. Fin juillet, il participera avec la 4e compagnie au nettoyage du secteur côtier situé entre Auray et Carnac. Après la guerre, il restera dans l’armée et sera tué en Indochine en septembre 1951.

586e compagnie – Fin août 1944, l’afflux massif de volontaires incita le commandement à créer une 6e compagnie. Composée de recrues issues des 3e et 4e compagnies, elle fut confiée à un médecin membre du mouvement Libé-Nord, le docteur Jaffré d’Etel, puis à un officier tout juste sorti de captivité, le capitaine Vandaele.

59Les autres unités élémentaires furent commandées par des instituteurs ou des gendarmes.

602e compagnie – L’adjudant-chef Le Merdy connut un court mais intense passage à la tête de la 2e compagnie. Affecté à la section de Lorient, il se retrouva à Auray lorsque les bombardements alliés imposèrent le regroupement en un lieu sûr des brigades de l’agglomération portuaire. Chargé par Le Garrec de constituer l’un des trois groupes d’action immédiate du bataillon, Méen Le Merdy prendra le commandement de sa compagnie lors du regroupement de Saint-Bily. Après un décrochage chaotique en direction de Saint-Marcel, il sera grièvement blessé à la tête son unité en contrôlant la partie ouest du périmètre défensif de Dingson[7]. Le chef de la brigade de Pluvigner, Louis Cosquéric, assurera un temps le commandement par intérim de la compagnie. Il sera remplacé par Prosper Le Bleis, officier de réserve d’infanterie qui travaillait comme instituteur dans un petit village de l’arrière-pays alréen.

615e compagnie – La 5e compagnie présentait l’originalité d’avoir été rattachée au bataillon au cours du mois de mai 1944. Constituée par des cadres de l’Armée secrète dans un secteur excentré du centre de gravité alréen, elle fut attribuée à un instituteur de la région de Baud, Charles Jacob. Mobilisé pendant la Grande Guerre au 2e régiment de chasseurs à cheval, il s’était porté volontaire pour l’aviation où il devint mécanicien mitrailleur. Affecté dans l’Armée d’Orient à Salonique, il fut intégré à l’aviation militaire serbe sous couvert d’un accord de coopération. En 1939, il était instituteur à Lorient. Patriote convaincu, il débuta dès 1940 des actions individuelles de sabotage dans cette agglomération. Comme beaucoup de ses semblables, il fut évacué dans les campagnes morbihannaises au moment des grands bombardements alliés de février 1943. Après maintes étapes, il s’installa à Pluméliau et entra dans le réseau “Action” de la gendarmerie.

62Ces quelques éléments donnent une vision concrète de l’équipe de commandement du 2e bataillon. À l’exception de Charles Jacob, tous ces hommes étaient militaires d’active ou de réserve avant le début de la guerre. Au moins trois d’entre eux étaient d’anciens combattants de la guerre de 1914-1918. Leur âge moyen était de 42 ans, ce qui était élevé pour un bataillon d’infanterie légère. Contrairement aux unités FTP du centre Bretagne, les capitaines commandant furent donc des hommes d’âge mûr, dont l’expérience opérationnelle permit d’obtenir au combat des succès tactiques indéniables.

Les modes d’action

63Entre 1940 et 1944, les hommes appelés à lutter sous les ordres du commandant Le Garrec vont à la fois appliquer des modes opératoires classiques et faire leurs les tactiques d’action immédiate du parti communiste. L’action s’articulera en trois phases : renseignement-subversion entre 1940 et 1942, désorganisation-sabotages entre 1942 et 1943, harcèlement-guérilla en 1944.

Renseignement-subversion

64Au plan opérationnel, le pays d’Auray fut assez représentatif des deux types d’activités largement pratiquées dans les zones proches des grands ports militaires bretons.

65Au sein du réseau “Hector” comme par la suite avec le réseau “Action” Cockle-Gendarmerie, la recherche du renseignement fut organisée selon les règles classiques de la clandestinité. Par un cloisonnement étanche, les groupes opérèrent dans quatre zones, Lorient, Vannes, Pontivy et Josselin. Une équipe pouvait toutefois agir dans un secteur autre que le sien. Bien qu’appartenant à l’antenne de Vannes, Yves Le Garrec fut ainsi chargé d’un travail aux abords de la base sous-marine de Lorient, secteur pourtant attribué à Muller. Pour “Hector”, au moins deux boîtes aux lettres existèrent. À Vannes, un aveugle titulaire de la Francisque centralisait une partie des informations avant que des agents venus du Mans ne les transmettent vers Vichy puis l’Angleterre. Un second point de contact exista à Pontivy. Le Garrec cite dans ses souvenirs la présence en ville d’un agent des services secrets anglais, au moins une partie de l’année 1942. Tout porte à croire qu’il n’y eut pas de moyens de transmission par radio avant fin 1943 et que les renseignements furent transmis vers l’Angleterre sous format papier.

66S’agissant de la subversion, le procédé fut appliqué par l’ensemble des groupes de Résistance quelle que soit leur obédience politique. Dans la région d’Auray, le travail de propagande connut toutefois une indéniable impulsion lorsque les trois cellules communistes du secteur entrèrent en activité à l’été 1941. La structure de base fut celle du triangle de trois hommes. Les groupes d’action immédiate seront ensuite articulés de façon similaire.

Désorganisation-sabotage

67Dans un deuxième temps, les actions anti-allemandes prirent une posture nettement plus agressive. La gare de marchandise d’Auray constituant un nœud ferroviaire de première importance, plusieurs entités vont concentrer leurs activités sur ce lieu. Sous le contrôle de la cellule communiste de la ville, de Louis Cosquer à Libération-Nord ou de Paul Manceau de l’ORA, des équipes vont travailler dans un même lieu à désorganiser le trafic ferroviaire allemand. Plusieurs méthodes furent appliquées : changement du lieu de destination des wagons de marchandises, détérioration des locomotives ou destruction de matériel par déraillement.

68Deux triangles opérèrent notamment tout au long de l’année 1942, en détournant les wagons de passage en gare d’Auray. Futur chef de groupe à la 2e compagnie du bataillon, Francis Massé appartenait à l’une de ces deux équipes. Surpris à trois reprises alors que s’effectuaient les changements de destination des wagons, le triangle Massé réussit à neutraliser les sentinelles et fit disparaître leurs corps dans les foyers des locomotives. Jusqu’en juillet 1943, les déraillements ne viseront que les trains de marchandises. La résistance cherchera ainsi à éviter des représailles contre la population.

Harcèlement ferroviaire-guérilla

69Conformément aux principes de base de l’action militaire, les deux premiers modes d’action permirent de façonner l’adversaire en vue de lui porter le coup décisif. En ce sens, l’été 1943 va marquer un tournant. À partir de cette période, les groupes ne vont plus hésiter à frapper directement l’ennemi. Reprenant la terminologie communiste, des groupes d’action immédiate vont être constitués à Auray et dans sa région sous le contrôle du parti communiste, du mouvement Libération-Nord et de l’ORA. Yves Le Garrec constituera lui-même trois groupes d’action immédiate aux abords nord, est et sud d’Auray. Selon toute vraisemblance, il agira épisodiquement avec un groupe au profit des Francs-Tireurs et Partisans (FTP) pendant l’hiver 1943-1944. L’un de ses plus proches adjoints sera même formé à l’usage des explosifs par le commissaire aux opérations (CO) des FTP du Morbihan, Émile Le Carrer. Cette exemple illustre combien l’interpénétration des organisations fut grande pendant la période clandestine.

70Outre le sabotage des voies ferrées, les premières attaques coordonnées contre les troupes allemandes vont avoir lieu en mars 1944. Ces actions furent objectivement peu nombreuses et ne dépasseront jamais le niveau du groupe de combat à dix hommes. Elles seront surtout le fait de quelques individus de la 2e compagnie, initialement recrutés par le Front national dans la commune de Brech. Sous la coupe d’un ancien fantassin du 32e régiment d’infanterie, François Moizan, une équipe de huit hommes va accrocher à deux reprises une patrouille de Feldgendarmes allemands le long de la voie ferrée Nantes-Quimper. Le 23 mars puis le 5 avril, Moizan et ses hommes se positionnèrent le long de la voie afin d’effectuer des tirs à l’arme automatique contre les trains de permissionnaires allemands. En complément des sabotages de voie effectués généralement par déboulonnage des rails, les groupes FN du secteur d’Auray prirent l’habitude de procéder à ces tirs de harcèlement contre les trains allemands. Simples au plan tactique, ces actions permettaient surtout d’éviter les dégâts collatéraux contre les civils car après minuit, seuls circulaient les trains de permissionnaires allemands.

71Les opérations de guérilla de niveau du bataillon furent lancées après le débarquement. Cependant, en dehors de Saint-Marcel et de la libération du pays d’Auray, le niveau d’engagement resta celui du groupe de combat. Dans une région quadrillée par les troupes allemandes, cette structure offrait toute la souplesse nécessaire à la conduite d’actions exigeant mobilité, agressivité et sens de l’initiative. Par rapport à la période antérieure, une évolution fut toutefois observée, le regroupement en maquis semi-permanents de niveau section. À Brech, Pluvigner et Baden, ces petites structures vont permettre aux individus les plus compromis d’échapper aux recherches allemandes. L’organisation du maquis de Treuroux à Brech-Plumergat montre que la structure et le lieu d’implantation pouvaient être pensés de manière cohérente. Capable d’accueillir 30 à 50 personnes, le site disposait d’un endroit pour les réunions, d’un dépôt de munitions, d’une zone de parachutage et d’une zone boisée tenant lieu de casernement de fortune. L’ensemble était dispersé sur une surface de près de 20 hectares et bénéficiait du soutien des familles de cinq hameaux voisins. En outre, une rivière traversait le maquis, permettant de limiter l’effet de surprise en cas d’attaque allemande. Au final, un parachutage s’y déroulera le 2 août 1944 et permettra le réarmement de deux compagnies du bataillon. Le lieu subira deux attaques en juillet et août 1944, mais ne sera jamais détruit.

Les activités opérationnelles

Le dispositif de lutte des Allemands

72Avant d’aborder le dispositif de lutte des autorités allemandes contre la résistance morbihannaise, il est bon de rappeler la structure d’occupation générale en France. L’occupation du territoire français fut réalisée par deux types de forces militaires, les troupes territoriales relevant du “Général commandant en France” le Militärbefehlshaber Frankreich (MBF) et les unités opérationnelles des trois armées, stationnées en France à titre temporaire pour une mission opérationnelle (ex : préparatifs de l’invasion de l’Angleterre en 1940-1941, positionnement en vue du débarquement allié en 1943-1944). L’une des tâches du MBF était d’assurer la protection des forces opérationnelles. Au niveau de chaque département, la Feldkommandantur (FK) représentait le MBF et disposait pour cela de troupes territoriales, les régiments de sécurité, des forces de sécurité issues de la Feldgendarmerie ou de la SS et, dans une certaine mesure, d’auxiliaires français provenant de la milice ou de la police de sûreté.

73Dans le Morbihan, la FK 750 assurait la sécurité des troupes opérationnelles dirigées par le XXVe Corps d’Armée dont le PC fut successivement implanté à La Baule, Redon puis Pontivy. Compte tenu de l’importance accordée à la défense de la péninsule bretonne par le haut commandement allemand, cet état-major fut le seul en France à exercer son autorité sur une même zone d’opération pendant toute la durée de la guerre, de juillet 1940 à août 1944.

74En juin 1944, le Morbihan était occupé par le volume global de deux divisions appartenant à diverses unités issues pour partie de trois divisions différentes (265e division d’infanterie, 275e division d’infanterie et 2e division parachutiste) et des services des trois armées présentes dans le département. Les envois successifs de renforts en Normandie réduiront cependant significativement ce potentiel de combat. À partir du 10 juillet, le bataillon Le Garrec ne sera plus opposé qu’à des reliquats de la 265e DI et à de l’infanterie armée par des unités les plus diverses. La base aérienne de Morlaix dans le nord de la Bretagne engagera ainsi une compagnie de marche dans le secteur de Pluvigner-Grand-Champ jusqu’au 15 juillet 1944. Les Allemands disposaient par ailleurs d’une multitude d’unités de sécurité, dont les Feldgendarmen, les hommes du SD établis à Locminé et Pontivy et enfin les auxiliaires de la formation Perrot. Le 21 juillet à Pluvigner, quelques-uns de ces éléments s’illustreront d’ailleurs par leur sauvagerie contre des membres de la 2e compagnie.

75La répression des actes de résistance contre l’armée d’occupation prit des formes diverses. Jusqu’en 1943, elle relevait plus de l’action de police que de l’opération militaire. Face à la montée de la violence début 1944, l’état-major de Pontivy va prendre une série de mesures destinées à améliorer l’efficacité de ses troupes. Deux directives vont être diffusées auprès de toutes les divisions du corps. La première eut pour objet la création d’une unité spécifique de lutte contre les “terroristes”. La seconde visait à décentraliser au niveau des divisions le contrôle judiciaire des individus condamnés pour faits de Résistance.

La constitution d’une unité spécifique de contre-guérilla

76Datée du 19 mai 1944, une note [8] du XXVe CA nous donne une idée de la première mesure, adoptée semble-t-il dès le mois de janvier. Bien que de nombreux bataillons originaires d’Union soviétique lui aient été affectés, le XXVe Corps souhaita se doter d’une unité spécifique de lutte contre les partisans. Confié au colonel Heinz, un Groupement Tactique (GT) de la valeur d’un régiment, soit environ 3 000 hommes, fut créé fin 1943 et opéra en Bretagne dès le mois de janvier 1944. Le GT Heinz “pacifia” notamment la région de Baud-Locminé en février-mars 1944. En mai, son poste de commandement était encore implanté à Locminé.

77Le GT Heinz opéra selon trois modes d’action principaux :

  • le ratissage de zone ;
  • les patrouilles en profondeur associées à des contrôles routiers de circonstance ;
  • l’emploi de commandos de chasse.

78S’agissant des opérations de ratissage, le rapport avance que le procédé ne donnait, en général, pas les résultats escomptés dans les grands massifs boisés. Contrairement aux partisans russes, les maquisards et réfractaires morbihannais cherchaient en effet très peu le refuge permanent des zones boisées. Si la forêt n’était jamais loin, ils logeaient plutôt dans des fermes isolées où le soutien domestique leur était assuré. Dans tous les cas, l’emploi de petites unités était préconisé.

79Le bilan des patrouilles en profondeur et des contrôles routiers fut, lui aussi, jugé peu satisfaisant. L’interpellation des maquisards était en effet difficile, dans la mesure où, la plupart du temps, ils étaient munis de faux papiers et ne portaient des armes que dans l’action. Membre du groupe de sabotage de la 1ère compagnie, René Le Mentec confirme qu’ils ne prenaient jamais d’armes pour réaliser un déraillement de train [9].

80Le troisième mode d’action, les commandos de chasse, fut jugé le plus efficace. L’engagement inopiné de commandos de chasse donna les meilleurs résultats. Les interventions avaient toujours lieu le matin ou le soir, sur renseignement précis et en connaissant l’adresse des individus ciblés. Systématiquement, ces opérations étaient réalisées en liaison avec les équipes spécialisées de la Feldgendarmerie et du SD. Le rapport souligne que le succès tant tactique que psychologique fut avant tout obtenu parce que la constitution de détachements ad hoc, de la valeur d’une section ou de plusieurs compagnies, permettait d’intervenir énergiquement et simultanément à des endroits très éloignés les uns des autres.

Le durcissement du dispositif législatif allemand

81Datée du 11 avril 1944, la seconde directive [10] visait à responsabiliser les divisions du XXVe CA dans la gestion et le contrôle des personnels arrêtés pour affaire de résistance. Alors que la directive de janvier envisageait le combat sous un angle militaire, ce second document abordait les choses sous un angle judiciaire. Précisons qu’elle venait compléter tout un arsenal juridique, dont l’un des premiers décrets concerna en septembre 1941 les mouvements insurrectionnels communistes dans les territoires occupés [11]. Il ordonna que soient prises trois séries de mesures contre les “terroristes”. La première visait à mettre en lieu sûr les suspects. La deuxième prévoyait de juger immédiatement les individus arrêtés. Enfin, en cas de complément d’enquête, il était demandé que les suspects soient éloignés, autrement dit déportés, de la zone du corps d’armée.

82Sur le premier point, l’autorité allemande déplorait que de nombreux résistants soient insuffisamment gardés dans les maisons d’arrêt de Quimper, Vannes et Nantes. Ayant perdu toute confiance dans l’administration pénitentiaire française, le général Fahrmbacher confia désormais cette tâche à l’autorité militaire. Trois divisons furent tenues de constituer un centre de détention sécurisé. Jusqu’à son jugement, le personnel arrêté devait être regroupé, pour la 265e DI au fort de Port-Louis près de Lorient et, pour la 275e DI, au fort de Penthièvre dans la presqu’île de Quiberon. Cette décision fut lourde de conséquences, car à partir de ce moment, les Allemands purent, en toute impunité, procéder à la liquidation des détenus. Près d’une dizaine de membres du bataillon seront notamment exécutés à Penthièvre en juillet 44.

La préparation du Débarquement

83Jusqu’à une date très proche du Débarquement, les opérations préparatoires furent conduites en mode décentralisé au sein des mouvements d’origine. Conformément à leurs principes d’action, les groupes recrutés par le FN dans les communes nord d’Auray vont se montrer les plus agressifs. En complément des sabotages ferroviaires, des opérations de harcèlement direct seront menées contre les forces d’occupation.

84Les sabotages de voies ferrées vont représenter la principale activité des groupes appelés ensuite à rejoindre le commandement de Le Garrec. Le premier grand sabotage de voie ferrée eut lieu près d’Auray le 11 juillet 1943. Selon toute vraisemblance, il fut réalisé par des cheminots alréens proches de l’ex-cellule communiste ou de Libération-Nord. À partir de septembre, Le Garrec va également commencer à saboter régulièrement la voie ferrée avec un groupe constitué d’hommes recrutés par un officier de marine marchande révoqué par Vichy, Félix Guillas. Accréditant la thèse selon laquelle l’action de ces groupes fut très tôt coordonnée par une structure AS-FTP, des secteurs de sabotage furent répartis au cours de l’automne 1943. À partir de cette date, Le Garrec va en effet se concentrer sur la partie de voie comprise entre Auray et Vannes, alors que les groupes FN-Libé Nord agiront plutôt en direction de l’est et du nord, sur les tronçons Auray-Landévant et Auray-Pluvigner. De cette manière, le nœud ferroviaire d’Auray sera totalement contrôlé par les résistants alréens entre juillet 1943 et août 1944. Deux périodes d’activité doivent toutefois être distinguées. Une première correspond globalement au second semestre 1943. Après quelques essais infructueux en septembre, Le Garrec sabotera son tronçon de voie ferrée à trois reprises entre octobre et novembre 1943. La partie est et nord sera quant à elle sabotée à au moins cinq reprises entre octobre 1943 et janvier 1944. Les représailles encourues par les auteurs de ces actes inciteront à plus de prudence. En janvier, des défaillances seront même observées parmi les saboteurs FTP de la gare d’Auray. Pour cela, le comité morbihannais sera menacé de sanctions par le comité militaire interrégional FTP implanté au Mans.

85Après cette pause opérationnelle, les activités reprendront au début du printemps. Le mois d’avril sera notamment un mois très actif dans le pays d’Auray. Dès le 23 mars, une patrouille de Feldgendarmes fut attaquée près de Landaul au bord de l’étang de Cranic par un groupe de Brechois, futurs membres de la 2e compagnie [12]. Le 6 avril, une nouvelle attaque eut lieu au même endroit et se solda par deux morts et un blessé chez les Allemands. Vers la même date, un dépôt de munitions à Landévant et le camp allemand de PI Park près de la gare d’Auray furent attaqués par des hommes de la 2e compagnie. Près de là, à Etel, des sentinelles avaient été attaquées à deux reprises le 5 et le 10 avril. Le 7 avril, une attaque d’un détachement par trente hommes armés se produisit à Baud. La même semaine, un groupe de sous-officiers allemands attablés dans un café de Camors fut attaqué à la grenade. Le 13 enfin, quelques hommes de la future 2e compagnie du bataillon participèrent à l’attaque de Siviac contre un convoi effectuant un transfert de prisonniers vers Vannes. Face à cette série d’incidents, le 18 avril, les Allemands firent le constat suivant : “Le nombre extraordinairement élevé des agressions prouve le sérieux de la situation. Il serait vain de la dissimuler. Il faut répliquer aux terroristes sans ménagement et avec la plus grande rigueur” [13].

86Dès la fin avril, ce sera chose faite. Les affaires de Cranic et Camors-Baud en début de mois vont notamment inciter les Allemands à réagir. Aidés par des miliciens de la formation Perrot originaires de Baud, la région de Camors fit l’objet d’une première grande opération les 20 et 21 avril. À cette occasion, le capitaine du FN qui commandait les futurs membres de la 2e compagnie fut arrêté. Le 30 avril, ces hommes furent directement frappés dans un village de Brech qui leur servait de base opérationnelle. La ferme sera incendiée. Cinq hommes seront capturés. Ils seront menés au bourg voisin de Landaul où ils seront abattus sur la place de l’église devant une trentaine d’hommes rassemblés de force pour assister à l’exécution.

87À un mois du Débarquement, l’étau va se resserrer autour des cadres recrutés par l’ORA. Tout en poursuivant les sabotages de voies ferrées, la priorité va donc consister à bâtir en sécurité une structure de commandement pérenne. L’armement représentera le second défi. En mars 1944, un parachutage, organisé par Paul Manceau, a lieu dans les Landes de Lanvaux au profit de l’ORA. En février, Le Garrec avait déjà reçu une vingtaine d’armes automatiques du chef départemental, Jean Muller. Mais, même en tenant compte des armes détenues individuellement ou fournies par les mouvements après leur fusion au sein des FFI, le volume total disponible ne permettra pas d’équiper entièrement le bataillon au moment du débarquement. Compte tenu de la densité de troupes allemandes observées dans la région d’Auray, le déplacement du bataillon vers un lieu isolé s’imposera alors.

88En mai 1944, l’ORA du Morbihan fusionnera avec les FFI. Les quatre bataillons ORA seront alors subordonnés au chef départemental des FFI. Le 20 mai, celui-ci organisera une répétition du plan de paralysie du réseau ferroviaire, le plan Vert. Le trafic sera à nouveau interrompu par des sabotages réussis aux bords d’Auray ainsi que sur la voie ferrée de Pontivy. Cette action fut l’ultime répétition des opérations du débarquement. Le 1er juin, les officiers du bataillon sont mis en alerte. Au moins une compagnie, la première, est dès cette date prévenue de l’imminence d’une grande opération.

La libération du Morbihan

Le rassemblement de Saint-Bily

89Le 6 juin, le commandant Le Garrec reçut du chef départemental FFI l’ordre de mobilisation du bataillon. Celle-ci fut fixée au 10 juin. Conformément aux directives, quatre compagnies devaient constituer des détachements avancés en vue de rejoindre les bois de Saint-Bily pour y recevoir des armes. Ayant pu bénéficier d’un parachutage d’armes dans son secteur, la 5e compagnie de Baud fut maintenue en veille opérationnelle.

90Les commandants d’unités furent prévenus le jour même par l’adjoint du chef de bataillon, Yves Kerroux. Les consignes furent relayées les jours suivants par les cadres présents dans les communes. François Le Boulaire de Brech se souvient avoir été informé de la date et du point de rendez-vous par un responsable de Landaul se déplaçant à moto. Les gendarmes de Pluvigner utiliseront aussi la moto de la brigade pour prévenir les volontaires de leur circonscription. À Crach, c’est le vicaire de la commune, l’abbé Jégo, qui se chargea personnellement de prévenir les hommes de sa section. Ces exemples ne doivent toutefois pas laisser penser que la mobilisation fut parfaitement organisée. Dans bien des cas, seul le bouche à oreille permit aux recrues de se rendre au point de rassemblement.

91Trois points de rassemblement principaux furent établis en campagne dans des hameaux isolés de Brech et Plougoumelen. Deux détachements précurseurs furent envoyés à Saint-Bily par véhicules. Ailleurs, la mise en place vers le lieu de regroupement se fera à pied, de façon échelonnée par petits groupes, dans le temps. Les quelques armes disponibles furent données aux éléments véhiculés. Afin de ne pas attirer l’attention des Allemands, l’état-major départemental monta une manœuvre de déception en faisant diffuser la rumeur d’un bombardement de la ville de Vannes, le 10 juin 1944. La panique jeta sur les routes une partie importante de la population vannetaise et permit ainsi au 2e mais aussi au 1er bataillon FFI de réaliser leur rassemblement dans les landes de Lanvaux. Parallèlement, les groupes d’action immédiate de la 1ère et de la 2e compagnies vont procéder à des sabotages de voie ferrée dans leur secteur respectif. Le trafic sera temporairement interrompu les 6 et 7 juin entre Auray et Vannes, mais le succès le plus spectaculaire sera obtenu par la 2e compagnie le 8 juin. Par un sabotage audacieux, elle réussira à bloquer complètement la voie Auray-Pontivy pendant une période de trois semaines, isolant ainsi le PC du XXVe corps des secteurs défensifs de la côte sud.

La bataille de Saint-Marcel

92Le rassemblement de Saint-Bily va engendrer un afflux incontrôlé de volontaires. Très vite, il apparaîtra que l’armement ne se fera pas sur place. Des problèmes de sécurité vont aussi se poser et conduire à l’attaque du bataillon par une unité de Russes blancs ou de Géorgiens à l’aube du 13 juin. Quelques tirs seront échangés. Ils suffiront à intimider un ennemi peu enclin à engager le combat avec un adversaire camouflé dans les bois. Dans l’immédiat, l’ordre d’éclatement fut ordonné. Une partie du bataillon réussit à rejoindre le 1er bataillon FFI au maquis de Botségalos tandis que d’autres prendront directement la direction de Saint-Marcel où se trouvaient déjà l’état-major départemental FFI et les parachutistes SAS du commandant Bourgoin.

93Les arrivées à Saint-Marcel s’étaleront jusqu’au 17 juin. Les défections furent nombreuses et seules trois compagnies à effectif réduit seront reconstituées. À partir du 15, le bataillon Le Garrec sera toutefois capable d’assurer la défense est et sud-est du camp. En raison de son isolement, Saint-Marcel avait été choisi pour réceptionner l’armement venu d’Angleterre et armer les FFI du Morbihan. Le site disposait d’une zone de parachutage homologuée depuis 1943 par le BOA de la France Libre. Lorsque le bataillon Le Garrec arriva à partir du 13, il découvrit un vaste camp militaire dont la protection imposa son maintien sur place quelques jours supplémentaires. Un engagement en soutien d’un second débarquement des Alliés en baie de Quiberon fut aussi envisagé. Toutes ces hypothèses s’effondrèrent lorsque le 18 juin au matin, une patrouille pénétra dans le périmètre du camp et donna l’alerte à la garnison allemande voisine.

94Trois attaques vont ensuite avoir lieu entre 8 heures et 19 heures. Composé d’une à deux compagnies du 2e régiment de la 2e division parachutiste et de deux groupements tactiques de la 275e DI et du 17e régiment de forteresse, l’ennemi va successivement porter son effort sur la partie nord-est, est puis sud-est du camp. Le nord et l’ouest ne seront jamais menacés ce qui permettra un repli dans des conditions satisfaisantes à la tombée de la nuit. La première attaque visera le point d’appui défendu par les parachutistes du capitaine Larralde. La seconde sera portée contre la 2e compagnie du capitaine Le Merdy. Celui-ci sera grièvement blessé à la gorge et devra céder sa place à son adjoint, le lieutenant Cosquéric. L’attaque la plus dangereuse sera menée en fin d’après-midi contre le point d’appui de la 3e compagnie du capitaine Cosquer. Entre-temps, Bourgoin réussira à obtenir un appui de l’aviation alliée montrant ainsi aux Allemands que l’adversaire auquel ils étaient opposés n’était pas constitué de simples “terroristes”. Après une journée complète de combats, le bataillon va se retirer en profitant d’une nuit d’encre accentuée par la grande dépression météorologique qui balaiera quelques jours plus tard les ports artificiels alliés de Normandie.

95Le retour vers le secteur d’Auray va s’effectuer dans des conditions pour le moins cahotiques. Après une nuit d’exfiltration la majorité des hommes vont se regrouper au château de Callac. La dissolution sera alors ordonnée. Beaucoup abandonneront leurs armes dans le parc du château. De petits groupes isolés vont rentrer chez eux en deux ou trois étapes. Ils seront souvent accompagnés de SAS qui agiront ensuite à partir de quatre communes, Baden, Baud, Plumergat et Sainte-Hélène. Bourgoin rejoindra notamment ce dernier refuge. Il y bénéficiera du soutien des hommes de la 3e compagnie. Mais, contrairement à l’aller, les Allemands mèneront cette fois une chasse impitoyable. Au bilan, le bataillon Le Garrec rentrera de Saint-Marcel en ayant subi la perte de près de vingt des siens. L’armement de l’unité aura échoué mais en tenant tête aux Allemands pendant toute une journée, les hommes de Le Garrec auront réussi à prendre un ascendant moral indéniable.

La Libération

96Alors qu’une répression impitoyable s’abattait sur tout le département, le mois de juillet fut consacré à la restructuration du bataillon. Lors d’une réunion de coordination organisée au maquis de Treuroux en Brech, le chef de bataillon manqua d’ailleurs de se faire arrêter. Quelques jours plus tôt, Muller avait également échappé de peu à une arrestation chez lui à Crach. Par contre, Paul Manceau ainsi que sa jeune fille Claudie furent moins chanceux. Arrêtés à Auray, ils seront transférés à Pontivy où le commandant sera sauvagement torturé. Lui et sa fille ne devront leur salut qu’au départ précipité des Allemands le 4 août, devant l’arrivée des premiers Américains en ville.

97Après la dislocation de Saint-Marcel, les hommes vécurent reclus chez eux ou isolés dans de petit maquis. Quelques groupes restèrent cachés dans les landes de Lanvaux. Le 9 juillet, la 4e compagnie subira ainsi des pertes. Avec l’assistance des parachutistes SAS présents dans le secteur, le bataillon va toutefois bénéficier de parachutages à Baud, Pluvigner, Landévant et Brech pour son réarmement.

98Fin juillet, les opérations vont reprendre. Entre le 31 et le 1er août 1944, les SAS vont parachuter un détachement précurseur puis des renforts motorisés dans le secteur de la 2e compagnie. Quatre jeeps appartenant à l’escadron motorisé du 2e RCP seront notamment mises à terre sur la commune de Pluvigner. Protégés par des hommes de la 3e compagnie dont Léon Le Nabat, les suivantes arriveront par planeur le 5 août. Le 3 août, l’ordre de la guérilla généralisée fut reçu par Le Garrec alors qu’il se trouvait à Sainte-Anne d’Auray. Le lendemain, les Allemands quittèrent les villes de Vannes et Auray en direction des camps retranchés de Saint-Nazaire et Lorient. Devant l’évolution rapide de la situation, la 1ère, la 2e et la 3e compagnies vont se reconstituer dans des conditions globalement satisfaisantes. La 5e compagnie réussira une montée en puissance exemplaire. Elle participera aux réductions de résistance isolées dans la région de Camors. Elle sera ensuite engagée à Erdeven le 12 août dans une opération interarmes combinant chars américains et parachutistes SAS. La conquête de ce village visait à rompre le cordon littoral reliant le Festung de Lorient au môle défensif de Quiberon. Isolée au sud d’Auray, la 4e compagnie ne réussira pas à se réarticuler avant l’arrivée des Américains le 7 août. La défaillance de son chef à Saint-Bily quelques semaines plus tôt expliqua en partie le manque de cohésion de cette unité.

99Avec ces troupes, Le Garrec décida de reprendre le contrôle de la ville d’Auray et de ses communes environnantes. Saint-Anne d’Auray va ainsi faire l’objet de combats les 4 et 5 août 1944. Mais les plus durs accrochages auront lieu à Auray les 5, 6 et 7 août. Comprenant que la zone de Vannes-Auray contrôlait les liaisons entre les villes retranchées de Lorient et Saint-Nazaire, les Allemands renvoyèrent des troupes à Auray le lendemain de leur départ. Harcelées par le bataillon, ces unités lanceront quand même une attaque contre Vannes le 6 au matin. Dès le milieu de matinée, l’échec fut patent. L’intervention d’une unité de chars américains acheva de détruire les derniers espoirs allemands. L’effectif d’un régiment sera neutralisé. Les reliquats tenteront de rejoindre Lorient par groupes isolés et traverseront jusqu’au 8-10 août la zone d’action du bataillon. Ils seront harcelés en permanence par trois des compagnies du bataillon. Le 8 août, la 2e compagnie fera encore 47 prisonniers à Pluvigner. Aidé en cela par les SAS de l’escadron motorisé du 2e RCP, le nettoyage se poursuivra tout au long de la première quinzaine d’août.

100Au terme de cette période, le bataillon aura contribué à cloisonner les Allemands dans la presqu’île de Quiberon et dans la poche de Lorient. Il aura soutenu les blindés américains en jouant le rôle d’infanterie d’accompagnement. Enfin, sous les ordres du lieutenant Zalay, le corps franc fut engagé dans l’est du département où il participa à la libération de La Gacilly. La phase clandestine sera achevée.

101* * *

102Parce qu’elle offre une vision représentative de ce que put être l’évolution de la résistance dans une région clef du dispositif allemand en Atlantique, l’action du 2e bataillon FFI-ORA mérite que l’on y consacre quelques lignes.

103Ce portrait dévoile que le bataillon n’eut en définitive qu’une courte existence opérationnelle, en fin de période clandestine. Comprendre l’action du bataillon Le Garrec, c’est donc d’abord connaître l’action des mouvements, avant leur fusion au sein de l’ORA puis des FFI au début du printemps 1944.

104L’étude montre ainsi que de telles structures n’existèrent que grâce à l’expérience acquise depuis le début de l’occupation dans des organisations clandestines aussi différentes que le FN ou le réseau “Hector”. La génération Le Garrec fut par conséquent tout sauf une génération spontanée.

105Enfin, elle révèle toute la difficulté qu’il y eut à préparer puis à conduire des opérations complexes dans un environnement interallié avec des hommes résolus à se battre mais souvent peu enclins à supporter une discipline trop militaire.

106Dans la pure tradition de la Chouannerie, le bataillon Le Garrec va, malgré ces handicaps, jouer un rôle tactique indéniable dans la libération du Morbihan. En ce sens, il constitue un bel exemple d’adaptation opérationnelle à la guerre irrégulière.

Implantation compagnies du 2e bataillon

tableau im2

Implantation compagnies du 2e bataillon

Notes

  • [1]
    Nom donné aux habitants d’Auray.
  • [2]
    Bro Erec, nom du comté, créé au vie siècle par les Bretons cornouaillais aux dépens de l’ancienne cité gallo-romaine des Vénètes dans la région de Vannes-Auray.
  • [3]
    Archives nationales, 7AJ166, Dossier “Panier de cerises”.
  • [4]
    Service Historique de la Défense, division Gendarmerie, 56E106, Brigade territoriale de Pluvigner, registre de correspondance courante au départ (R/2), 4 janvier 1939 au 6 février 1942, p. 310.
  • [5]
    Idem.
  • [6]
    SHD-DIMI Résistance-xP56-1 2e bataillon FFI.
  • [7]
    Nom de baptême du maquis de Saint-Marcel.
  • [8]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, pp. 274-275.
  • [9]
    Témoignage de René Le Mentec, septembre 2009.
  • [10]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, p. 267.
  • [11]
    Décret “Keitel Befehl” du 16 septembre 1941.
  • [12]
    SHD, DIMI Résistance, dossier FFI André Kergosien, cote 16P 318404.
  • [13]
    SHD, Traduction du commandant Even, Rapport d’activité du XXVe Corps d’Armée allemand, 1978, cote 4-8284, p. 265.
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