Staps 2015/1 n° 107

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Article de revue

Faire du fitness pour ne pas vieillir ou pour bien vieillir et rester femme

Pages 45 à 61

Notes

Introduction

1Anglophone, le terme « fitness » renvoie aux notions de forme et de condition physique. Par la pratique d’une activité physique individuelle exercée au sein d’un collectif, le fitness vise alors à améliorer le bien-être et la forme, dans sa double acception de façonnage d’une silhouette et de développement d’une énergie, d’un dynamisme. À la mode depuis le milieu des années 1990, le fitness tire son origine de l’aérobic, inventé au début des années 1970. Il regroupe un ensemble d’activités diverses et variées, allant de la remise en forme à l’entretien corporel, en passant par le développement cardio-vasculaire, l’utilisation de matériel en tout genre ou, encore, des séances d’étirements et d’assouplissements de toute nature, jusqu’aux exercices en milieu aquatique. Si certaines de ces activités incluent un renforcement musculaire, de type séance « fesses/abdominaux/cuisses » (FAC), les pratiques de musculation, de type bodybuilding, en sont exclues avec l’émergence d’espaces de pratiques spécifiques, bien que souvent hébergées dans le même lieu.

2Le fitness se différencie a minima de trois façons des pratiques de musculation traditionnelles, puisqu’il s’agit d’une activité qui est essentiellement féminine ; qui vise le renforcement musculaire et non l’hypermusculation (purement de type concentrique) ; qui dissocie spatialement ses activités, séparant ainsi les pratiquant-e-s dans la structure.

3Il est une activité physique de loisir non sportive au sens de Parlebas : « Le sport est avant tout une situation motrice (ce critère éliminant les jeux non moteurs tels les échecs par exemple) ; cette tâche motrice est assujettie à des règles définissant une compétition (traits rejetant les activités libres et improvisées) ; enfin, et c’est là que gît une grande part de son identité sociologique, le sport est un fait institutionnel (trait excluant l’immense cohorte des jeux non reconnus par les instances officielles). Le sport représente donc la motricité ludique et compétitive approuvée par l’institution » (Parlebas, 1986, p. 26). Le fitness correspond certes à une situation motrice, mais n’a pas d’enjeu de compétition, il s’agit d’un loisir autonome (Corbin, 1995). Le fait de ne pas s’inscrire dans le registre de la compétitivité ne nie en rien la recherche d’objectifs et/ou de résultats de la part des pratiquantes.

4Le fitness s’organise dans des structures commerciales, plus communément connues sous l’appellation de salles de remise en forme. Ces institutions poursuivent des logiques mercantiles et tentent de s’établir durablement dans « le marché du bien-être », de nos jours en plein essor. Pour ce faire, elles démocratisent l’accès aux offres de pratiques (Bessy, 1990), l’apparition de salles low-cost en est un exemple. En baissant les prix, ces organisations rendent la pratique du fitness accessible à un plus grand nombre de classes sociales, mais surtout elles favorisent sa massification.

5Les pratiquantes y poursuivent, outre l’aspect ludique, plusieurs buts comme le fait de se sentir bien dans leurs corps. Elles y cherchent du bien-être autant qu’une plastique et une « meilleure » présentation d’elles. Dans l’effort, elles se forgent une apparence (Goffman, 1956). Mais ce discours générique cache d’autres raisons. Le corps métamorphosé par les effets du temps est, souvent, douloureusement vécu et ressenti. Ces femmes, adeptes des gymnastiques d’entretien, associent ces évolutions à la peur des maladies, d’un mauvais état de santé, du vieillissement, voire à la perte d’autonomie dans le futur. Cette altération physique n’est pas toujours liée à l’âge, mais interroge le modèle ternaire de l’identité des pratiquantes : identité pour soi, aux yeux des autres et sous le jugement des autres (Heinich, 1999). Subjective, abstraite, multiple, changeante, il est aujourd’hui difficile de distinguer l’identité individuelle de l’identité sociale. Même si cette distinction subsiste dans les approches psychologiques, la sociologie s’accorde sur la dialectique de ces deux notions (Kaufmann, 2004). Le système de normes et de valeurs de la société est constitutif de l’identité pour soi en tant que produit de socialisations diverses (Dubar, 1992). Il n’est pas possible de s’inscrire dans un groupe, de s’y insérer ou de s’y intégrer, sans intérioriser ce système. Pour Kaufmann, cette notion d’identité est cependant critiquable. Il s’agit tout à la fois d’un énoncé performatif, en ce que l’affirmation du mot suffit à la faire exister, et, également, d’une injonction simplificatrice. Ce n’est pas la définition en tant que telle qui est difficile, mais l’usage parfois abusif qui en est fait. Pour cerner l’identité, nous prendrons en compte la notion de « soi », constitutive de l’individu, c’est-à-dire ce qui lui permet de se positionner et de s’identifier au sein de la société dans laquelle il évolue. Cette notion peut renvoyer à l’identité individuelle, à l’image que l’individu a de lui-même, qu’il renvoie à l’autre ou que l’autre lui renvoie. Goffman (1974) parle de « face » pour exprimer l’idée que chacun – ou en l’occurrence chacune – doit présenter une image de lui-même aux yeux des autres dans une situation sociale donnée et être capable de l’adapter en permanence. Dans certaines circonstances, il doit ainsi « sauver la face », notamment lors de « situations de face-à-face » qui lui sont défavorables. Mais il ne peut le faire qu’avec des attributs sociétaux acquis. Limité dans ses premières interactions, ces expériences l’aident à développer en retour d’autres attributs sociétaux complémentaires. Ce concept de « face » reprend celui de « personnalité ». Pour Durkheim (1912, p. 23), la valeur du sacré est imposée à l’individu par la société du fait qu’il en est membre et/ou acteur. Ainsi, Goffman contextualise la notion durkheimienne en mettant en avant les interactions dans une situation sociale donnée. Cela renvoie à la dimension ternaire des identités et, plus particulièrement, à la question « de la visibilité », envisagée par Heinich (2012) comme un « fait social total » qui investit toutes les dimensions de la vie sociale, tant privée que publique, quel qu’en soit le secteur. L’identité individuelle, « visible », c’est-à-dire socialement exposée, « appréciée », « jaugée » ou « jugée » par d’autres, est ainsi mise en tension. C’est dans ce modèle ternaire, qui conjugue l’autoperception, la représentation de soi aux yeux des autres et la désignation, c’est-à-dire le « jugement » qu’ils nous renvoient, que se lit l’incohérence entre ces trois moments, mais aussi la crise des identités (Dubar, 2000 ; Ehrenberg, 1995). Dans les sociétés occidentales modernes, la présentation de soi et, plus particulièrement, le respect des normes de beauté et de présentation des corps sont forts (Amadieu, 1990), souvent synonymes de performance (Ehrenberg, 1991). Pour Héritier (2010, 2002), les femmes subissent, bien davantage que les hommes, ces injonctions, tant objectives que subjectives, relayées par la presse féminine et la mode. Laplantine (2005) parle ainsi de « corps sujet » pour exprimer l’idée que le corps est non seulement une représentation de l’individu (pour soi et aux yeux des autres), mais est aussi travaillé par ces injonctions qui, progressivement intégrées, conditionnent nos choix et nos conduites à l’intérieur de multiples interactions sociales. Dès lors, notre corps, s’il nous permet d’exister, s’il participe à construire et façonner nos identités, s’il contribue aux interactions sociales n’est-il pas l’objet d’un modelage et d’un travail ? Le fitness n’est-il pas un outil qui permet de le travailler pour soi, au regard des autres et sous le jugement des autres ? Dans ce cadre, le fitness pourrait-il s’avérer, en dehors d’un temps et d’un espace de partage, d’échange et de convivialité, être un moyen parmi d’autres de lutter contre le vieillissement ? Autrement dit, n’est-il pas une réponse aux injonctions sociales pour offrir une présentation de soi, pour soi et au regard des autres conformément aux injonctions et aux normes sociales. Il témoignerait ainsi, en matière de présentation de soi, du passage de la sociogenèse à la psychogenèse[1]. Le fitness, en tant qu’activité d’entretien, ne constituerait-il pas, auprès de la population féminine encline à sentir les premières incidences de l’âge, davantage qu’un moyen de prévention contre les stigmates du vieillissement, de préservation de la représentation pour « soi », de leur conformation à la norme sociale ?

6La beauté est une notion abstraite, difficile à définir puisqu’elle s’inscrit dans le culturel, invoquant des critères propres à chaque société. « Les critères de beauté, je me rappelle quand j’étais plus jeune ou même maintenant avec mon ami quand on a une soirée on dit : “ah, lui, il était beau, ha, elle était belle !”, et c’est rigolo parce qu’on a les mêmes critères, les mêmes goûts, que ce soit pour les hommes ou les femmes. Mais, quand j’étais jeune, on en parlait avec les copines et on n’avait pas les mêmes goûts. Donc, on ne s’arrête pas au corps, on regarde les vêtements ; c’est vrai qu’à l’adolescence, l’identité c’est l’appartenance à un groupe » (E8, 37 ans).

7Pour Vigarello, il n’y a « rien de plus culturel que la beauté physique » (Vigarello, 2004, p. 183). Il explique qu’à la fin du XIXe siècle et au début du XXe siècle, les rondeurs étaient requises. Elles étaient un indicateur de bonne santé. Puis, au cours du XXe siècle, apparaît la beauté démocratisée, où la norme de sveltesse et de souplesse pousse chacun(e) à s’y conformer. Aujourd’hui, la minceur est toujours de mise. Elle est confortée par des campagnes de sensibilisation contre l’obésité, devenue une maladie, assimilée à une forme de déviance (Becker, 1963). Émergent alors des tendances à la généralisation et à l’uniformisation des goûts en matière d’esthétique. En l’absence de critères formels, la beauté est donc appréciée à partir d’une idée de ce qui serait normal et, inversement, la laideur l’est à partir d’une conception du hors-norme. Cette explication n’est pas fondée sur des traits physiques précis et déterminés. Kaufmann, en s’intéressant aux critères de beauté des seins sur la plage, a montré que ceux-ci sont largement intériorisés et implicites. Il constate que le volume, la fermeté et la hauteur sont des critères fondamentaux pour juger de la beauté d’un sein : « Plus le sein pointe vers le haut, plus il est beau ; plus il tombe plus il est laid » (Kaufmann, 1995, p. 187). Amadieu (2005) explique que les critères esthétiques sont une construction sociale et qu’ils sont déterminés et imposés par les classes dominantes.

8Les multiples magazines et les publicités qu’ils contiennent deviennent ainsi autant de normes insidieuses qui induisent une seule ligne, celle de la minceur, tout en affirmant la suprématie des options personnelles, voire des caprices. Les « stars » et les « top-modèles » magnifient vertement cela. Les identités féminines semblent se construire dans cet espace particulier, à travers des pratiques singulières, a priori, choisies, mais, bien souvent, contraintes par le rapport hommes/femmes (Héritier, 1995). La domination masculine reste forte, fruit d’une longue construction sociale (de Beauvoir, 1949) qui perdure de manière feutrée (Bourdieu, 1998) à travers, notamment, les médias, malgré les transformations des sociétés. De Singly (2011) montre ainsi qu’avec l’augmentation du divorce et des séparations, le besoin de séduire, de nouveau ou encore, est fort. Vieillir et, surtout, ses effets sur le corps, l’apparence et la présentation de soi deviennent un souci auquel il faut remédier.

9Comme l’écrit de Beauvoir : « Avec gentillesse ou avec colère, un grand nombre de gens, surtout des gens âgés, m’ont abondamment répété que la vieillesse, ça n’existe pas ! Il y a des gens moins jeunes que d’autres, voilà tout. Pour la société, la vieillesse apparaît comme une sorte de secret honteux dont il est indécent de parler. […] En dehors des ouvrages spécialisés, les allusions à la vieillesse sont très rares. Quand je dis que je travaille à un essai sur la vieillesse, le plus souvent on s’exclame : “Quelle idée !… Mais vous n’êtes pas vieille !… Quel sujet triste…” » (de Beauvoir, 1970, p. 7).

10Depuis la fin du XXe siècle, la vieillesse est socialement rejetée, sous le masque du jeunisme. Faisant nôtres les propos de Châteaubriant (1848), les femmes voient la vieillesse comme un naufrage tandis que les hommes l’acceptent. Le problème n’est donc pas nouveau. Il est accentué par le culte de la performance et de la concurrence des sociétés occidentales modernes. Le fitness est un moyen de lutter contre ce vieillissement, mais cela reste intimement lié à la question de la beauté. L’équation « belle, femme et vieille » se révèle être un impensable pour le beau sexe. « Être belle » se conjugue souvent avec « être jeune », auprès de la population interrogée. L’expression de la jeunesse s’incarne dans un visage de fraîche jeunesse exhalée par le regard des autres au point de devenir une valeur de première importance dans la constitution de la norme sociale réelle ou perçue. Ce devoir d’effacement visible des ans s’apparente à une quête de beauté associée, parallèlement, à l’image de la minceur. La femme avançant en âge doit être/rester mince et tonique… comme une jeune. De nombreuses méthodes et techniques sont utilisées dans le but de rester svelte et, par association, paraître jeune. L’activité physique en fait partie au même titre que les régimes. La pratique d’une activité physique régulière, afin de garder et entretenir un corps ferme et souple, devient, pour ses adeptes, un des moyens de lutte contre les effets du temps qui provoquent des écarts à la norme corporelle en vigueur (Haissat & Travaillot, 2011).

Une méthodologie qualitative à « échelle multiple »

11Ce travail est issu d’une enquête réalisée de fin 2009 à fin 2013 dans deux structures commerciales rennaises spécialisées dans le fitness. Une méthodologie à « échelle multiple » (Bromberger, 1995, p. 10), intégrant, en ce qui concerne les données utilisées dans cet article, des observations participantes et des entretiens, a été mise en œuvre. L’objectif des observations participantes était, par une immersion totale, de saisir les particularités de pratiques, d’acquérir une « familiarité de membre » (Garfinkel, 1967), mais également de faire émerger les « non-dits ». Les temps de présence, au sein de ces structures, ont été multipliés à différents moments de la journée, du matin jusqu’au soir, de manière à pouvoir rencontrer des femmes de tous âges, actives professionnellement ou retraitées, venant seules ou en groupes. Les observations ont été menées dans la clandestinité (Peneff, 2009) jusqu’à la « campagne d’affichage » invitant les femmes à s’entretenir, si elles le désiraient, de leurs pratiques avec nous. Face au manque de temps libre des pratiquantes (injonctions professionnelles, familiales, etc.) et au caractère irrégulier de la présence de certaines, nous avons décidé de ne pas échantillonner nos interviewées. Une trentaine de pratiquantes (d’âges variés et issues de milieux sociaux divers) ont ainsi accepté de répondre à des entretiens semi-directifs. Il s’agissait de recueillir des expériences de pratiques singulières, leurs points de vue sur la façon dont elles appréhendent leurs pratiques du fitness, ainsi que leurs représentations respectives et mutuelles de cette activité physique de loisir.

12Les entretiens étaient structurés autour de trois thèmes principaux :

  1. La perception qu’elles avaient de la pratique.
  2. Les raisons du choix de cette pratique, en particulier, mais également des pratiques sportives en général.
  3. Le rapport qu’elles entretenaient avec leur corps et leur apparence.

13Il a été choisi de ne pas faire des thèmes une trame fixe, le but étant de laisser une marge de manœuvre aux interviewées pour libérer leurs paroles des « inhibitions » (Morin, 1984, p. 220).

14Les entretiens se sont déroulés en face-à-face, dans des lieux choisis par les pratiquantes. Le plus souvent à leur domicile ou dans des lieux publics. Cette liberté de choix a grandement facilité la liberté d’expression dans des domaines comme l’apparence, la santé, la vieillesse ou, encore, le rapport à la séduction, qui constituent des sujets tout à la fois sensibles et intimes.

15Pour Demazière, « les interviewés qui racontent leurs expériences, mettent en scène les épisodes de leur vie, donnent de la signification à ce qui leur arrive, justifient et argumentent de manière à convaincre […]. Or c’est précisément à l’engagement de la subjectivité de l’interviewé dans son discours que s’étalonne la validité de celui-ci, et c’est en cela que le discours relève de la subjectivité et non du témoignage […]. Le discours ainsi collecté apparaît alors particulièrement dépendant de ses conditions de production. Il ne peut être dissocié du contexte de l’énonciation » (Demazière, 2007, p. 13). La série d’entretiens a été arrêtée après avoir estimé le « point de “saturation” atteint [si bien] que l’on peut effectivement considérer la campagne d’entretiens comme close » (Blanchet & Gotman, 1992, p. 54).

16Ces discours ont été l’objet d’une analyse de contenu thématique dite « horizontale » (Ghiglione & Matalon, 1978 ; Blanchet & Gotman, 1992) ou « transversale » (Bardin, 1977), afin de chercher une logique inter-entretiens et de déconstruire ainsi la cohérence singulière du discours.

Résultats

1 – Vieillir et rester ferme avec et dans son corps

1.1 – Les rides, marques des années qui passent… entre autres

17L’apparition de rides fait partie du processus logique de vieillissement. Les pratiquantes l’acceptent difficilement, même si elles sont parfaitement conscientes de l’inexorabilité du processus. Leur corps change, commence à être marqué et à se flétrir. Ce corps changeant est difficile à voir, ressentir et accepter pour ces femmes : « Les rides, c’est quelque chose que je n’accepte pas […]. Je me dis merde […], moi les rides ça me fait chier ! » (E2, 62 ans). Cette femme ne supporte pas son visage qui porte le poids de son vécu. Elle exprime ne pas vouloir faire de chirurgie esthétique, non pas qu’elle soit en opposition à ces techniques, mais, davantage, par peur d’un échec de la chirurgie. Dans une logique de « choix rationnel », elle accepte de vieillir et d’en accepter les inconvénients et conséquences : « Ça, je peux te le dire, j’irai jamais […]. La chirurgie esthétique ça va bien et puis […]. Si je savais qu’il n’y a aucune chance de rater, tu vois je ferais bien quelque chose » (E2, 62 ans). Une autre dit accepter ses rides qui, cependant, la gênent, mais refuse de ressembler à « Mamie Nova » [2]. Un certain nombre de stéréotypes de leurs corps émerge. Entre autres, celui des femmes rondes qui seraient moins ridées par la vieillesse, leur peau étant plus tendue par la masse graisseuse. Pourtant, cette femme interrogée ne veut pas être grosse, prenant paradoxalement le risque dans sa quête de minceur de voir son visage se marquer plus facilement. Les rides symbolisent une perte de tonicité, synonyme du temps qui passe. Globalement, le discours tenu par les pratiquantes met en exergue l’idée qu’au-delà du simple aspect visible du vieillissement, les rides ne représentent que la partie immergée de leurs corps. Les chairs qui se flétrissent cachent une dégradation plus profonde de leur apparence, de leur fonctionnement, voire de leur utilité sociale : « Ah, si ça m’emmerde carrément. Tu vois bien le corps… le corps, il vieillit. Tu sais, la peau elle n’est plus la même ! Même si la ligne, tu sais, mes copines me disent tu ne fais pas 60 balais. Mais je dis oui, mais le corps, il est là… le corps, il vieillit » (E2, 62 ans). Le vieillissement leur donne une image négative d’elles-mêmes. Il s’agit ici d’un aspect, à la fois physique et psychique, qui n’est pas toujours lié à l’âge. Si « la jeunesse n’est qu’un mot » (Bourdieu, 1978, p. 143), il en est de même pour la vieillesse. Autrement dit, la frontière est si floue qu’elle n’est pas qu’une barrière d’évolution et/ou d’involution du corps.

18Les femmes interrogées ont effectivement des représentations différentes de la vieillesse. E4 se sent jeune dans sa tête, bonne vivante, mais elle voit tout de même son corps changer et montrer des limites. Elle n’est plus aussi souple qu’avant, ne retrouve pas la silhouette de ses 20 ans et ne récupère plus aussi bien des efforts physiques qu’auparavant. Même si « c’est dans la tête quand même. Je pense que si dans la tête tout se passe bien, on accepte son corps. On accepte son âge. On accepte de vieillir ou de ne pas vieillir. Moi, je suis incapable, je vous dis, j’arrive à 63. Moi, j’ai été longtemps sans connaître mon âge, tout au moins sans faire la soustraction parce que c’est mon corps d’abord, c’est ce qui me fait avancer » (E4, 63 ans). Soulignons aussi le fait que certaines de ces femmes, dont le discours est extrêmement fort sur cette question, ont eu un passé sportif. L’une est professeure d’EPS et volleyeuse, l’autre danseuse et pratiquante intensive de sports variés (tennis et golf). C’est aussi dans cette logique que doivent se comprendre les représentations qu’elles ont de la vieillesse. Leur corps est, ou a été, par l’activité physique, leur outil de travail. En fonction de l’usage qu’elles font ou souhaiteraient avoir de leurs corps, leurs représentations de la vieillesse diffèrent. Lorsque le corps est indispensable dans son travail (corps outil chez les agriculteurs, par exemple), son amoindrissement, sa fragilisation (blessures, douleurs) et sa perte de performance dérangent davantage. Celle qui est professeure d’EPS évoque des collègues qui, selon elle, se sont laissées aller et ne sont plus représentatives de sa profession, incapables aujourd’hui de faire des démonstrations physiques aux élèves. La déchéance professionnelle vient s’adosser aux autres stigmates négativement perçus de cette vieillesse. Elle parle ici de collègues qui ont pris du poids ou qui ont trop sollicité leur corps au point de l’avoir abîmé. Une autre interviewée, pour sa part, a subi de nombreuses blessures à cause d’une trop grande activité physique. Son corps est meurtri : « Oui, j’en faisais en gros 10 heures, 12 heures par semaine […]. Donc à 28 ans, j’ai arrêté la danse classique parce que je ne pouvais plus en faire, mais j’ai fait du volley et du tennis […]. Donc les déchirures musculaires… Le rhumatologue m’a dit un jour “le volley, c’est interdit”, mais vous pouvez continuer le tennis. Mais le tennis à 45 ou 46 ans, il faudrait peut-être arrêter parce que mes muscles et le tendon d’Achille étaient très fragiles » (E4, 63 ans).

19Ces explications révèlent que le rapport à l’autre change avec l’âge. Le fait de ne plus vouloir et/ou pouvoir séduire est une préoccupation redondante dans les discours. Si Huguette trouve déplacé de porter de « jolies » choses à son âge, elle n’en est pas moins nostalgique. Son sentiment d’inexistence, qui résulte du fait de ne plus être sifflée dans la rue, le signale. Vieillir, séduire et rester femme s’avère complexe, voire même incompatible selon les interviewées. Ceci semble clairement paradoxal avec leur engagement dans le fitness. Elles utilisent le fitness comme outil d’entretien et de maintien d’un corps féminin plus aisément incarné sous les traits de la jeunesse. C’est ce paradoxe qu’il est important de comprendre.

20Le portrait qu’elles dressent de la vieillesse les pousse à penser qu’elles ne sont plus désirables, qu’elles ne doivent plus chercher à séduire ou à prendre soin d’elles. Certaines justifient cela par le fait que le mariage, c’est-à-dire le fait d’« avoir un homme à la maison », implique inconsciemment qu’elles n’ont plus besoin de séduire leur compagnon. Sans le nommer ainsi, elles évoquent la routine qui s’est installée dans le couple. Le terme de compagnon est important, car dans nombre de discours elles définissent ainsi, très souvent, la personne avec laquelle elles vivent et non plus (ou moins) la relation affective/amoureuse qui pourrait les unir.

1.2 – Un corps qui se dégrade et met en cause l’identité personnelle

21La préoccupation du corps est redondante. Si le côté esthétique n’est pas toujours primordial de prime abord, l’angoisse du corps qui se dégrade est récurrente dans les appréhensions des pratiquantes. « Oui je lutte, je lutte contre le vieillissement interne, j’entends, car extérieurement, les rides, elles sont là malheureusement […]. Pour moi, c’est le plus sûr moyen d’éviter de vieillir, que son corps vieillisse en tout cas, donc la gym c’est un entretien » (E5, 60 ans).

22La dégradation du corps est omniprésente chez les pratiquantes et interroge deux dimensions : l’une esthétique, l’autre hygiéniste. La dimension esthétique est ressentie à différents niveaux. Une pratiquante entretenue aime se sentir vivante et tonique. Elle a pour modèle Annie Cordy qui, pour elle, ne fait pas son âge. Elle parle de son esthétique en évinçant complètement son visage : « Je pense à vieillir aussi. Quand je vois Annie Cordy, je suis en admiration devant elle [rire] » (E6, 48 ans). Son corps est un indicateur. C’est en fonction de lui qu’elle voit les années passer. Celle-ci affectionne plus certaines parties de son corps que d’autres : ses fesses, ses cuisses, ses seins. Elles lui servent à mesurer l’effet du vieillissement. Contrairement à E6 qui évince la question du visage, E2 lui porte une grande importance. C’est une femme apprêtée et maquillée, aux ongles faits, contrairement à E2 qui ne se maquille qu’occasionnellement. Si E6 n’évoque pas son visage, c’est qu’elle considère le maquillage comme un subterfuge à la détérioration du corps. Elle cherche ainsi à dissimuler ce changement qu’elle refuse. L’attention portée à certaines parties de leur corps permet de dévoiler les préoccupations majeures que les pratiquantes peuvent avoir dans leur pratique/activité, mais aussi dans leur quotidien. Certaines cherchent la tonicité, d’autres à perdre du poids ou, encore, à éviter les effets du vieillissement de manière plus générale. Ce corps qui s’avachit amène les pratiquantes à s’interroger sur l’image qu’elles donnent à ceux qu’elles côtoient, que ce soit dans leurs cercles d’amis, dans le monde professionnel ou, simplement, dans le regard des personnes qu’elles croisent dans la rue. Cette population de la génération baby-boom semble prioritairement interroger sa féminité dans le rapport à l’autre, certainement grâce à un héritage maternel. Leurs propos sont éloquents et mettent en tension le modèle ternaire de leur identité (Heinich, 1999). Être « vieille » est assimilé à un état qui les coupe du rapport à la séduction. E5 déclare être gênée de ne plus pouvoir montrer ses jambes à cause d’imperfections comme des veines apparentes ou un flétrissement des cuisses. Elle relativise ce complexe en précisant sa situation matrimoniale. Cette justification laisse entendre que, finalement, elle peut se dispenser d’exposer gracieusement genoux et chevilles puisqu’elle est mariée et n’a plus besoin de séduire : « J’ai tout ce qu’il me faut à la maison, j’ai un homme, je ne vais pas être miss Ille-et-Vilaine demain à mon âge. Mais, oui, ça me gêne de ne plus paraître, de ne plus avoir d’aussi belles jambes qu’avant » (E5, 60 ans). Une autre exprime de manière plus explicite que vieillir se ressent à travers la perte du pouvoir de plaire : « Le fait de ne plus pouvoir séduire, alors que je n’ai jamais eu d’aventures ni rien, mais j’aimais séduire. Peut-être lorsque je serai dans une maison de retraite, je pourrai encore séduire » (E3, 73 ans).

23Ce corps changeant est assimilé par E3 à une perte de la capacité de séduction qui se lit dans le regard de l’autre. Amenuisement de la séduction et processus de vieillissement se conjuguent, voire se confondent. La nostalgie évoquée montre que ce double déclassement corporel porte directement atteinte à sa féminité. Même si elle ironise en parlant de la maison de retraite, une souffrance émerge de son discours. Cette pratique nouvelle que représente le fitness pour cette tranche d’âge semble faire résonner des valeurs de positionnement sexué relativement traditionnelles avec, cependant, un effet de contraste induit par l’importance du diktat du « paraître jeune ».

24La dimension hygiéniste occupe également les discours des pratiquantes. Beaucoup disent utiliser le fitness dans le but de se prémunir du vieillissement et de la dégradation du corps. « De le garder à peu près ferme. Quand on dépasse la trentaine, voilà, le vieillissement… Enfin bon, même si on est encore jeune en prévention du vieillissement et puis la santé surtout, c’est ça en fait » (E8, 37 ans). E8, ayant toujours eu un parcours sportif, explique qu’elle a repris le « sport » dans le but principal de retarder le vieillissement. À la salle, elle ne participe pas aux cours collectifs. Elle fait uniquement du « cardio » et un peu de musculation : « Le corps se modifie avec l’âge. On n’a plus du tout la même façon… de toute façon, on n’a plus les mêmes hormones, donc automatiquement […]. Que mon corps se modifie… ça… j’ai du mal à l’accepter » (E5, 60 ans). E5 met en évidence la perception qu’elle a de son corps. Outre l’évidence du changement physique, elle parle également des changements hormonaux, qui signent la période de la ménopause, mais qu’elle prend soin de ne pas citer, bien qu’elle l’évoque plus tard comme facteur de prise de poids. Cette période est un « seuil où tout bascule » (Héritier, 1996, p. 225). La perte de la fécondité est une preuve, parmi d’autres, du vieillissement. La dégradation de l’apparence physique avec, notamment, la prise de poids, agit comme un signal de danger contre lequel elles veulent lutter. Les risques liés à certaines pathologies comme l’ostéoporose les inquiètent au point de chercher des solutions. Si elle dit pratiquer la « gym » pour lutter contre les effets visibles de l’âge, elle complète ce discours par des arguments liés aux aspects physiologiques : « En plus j’ai une veine qui ne fonctionne plus, dont le reflux ne se fait plus, qu’il va falloir que je traite. Et j’ai plein de petites, comment on appelle ça ? Mais oui, ça me gêne de ne plus paraître, de ne plus avoir d’aussi belles jambes qu’avant […]. Maintenant, elles sont un peu abîmées justement. Il faut que j’accepte » (E5, 60 ans). Au-delà des soucis qui apparaissent avec l’âge, accepter ce corps qui change reste une difficulté majeure pour ces femmes. Elles sont lucides et conscientes de ce phénomène inévitable, mais ne le tolèrent pas. Elles s’y sentent contraintes et trouvent différents subterfuges pour y remédier. Le maquillage est le plus évident. Le fitness est d’abord énoncé comme un loisir et un moyen de se faire des amis avant que d’être assimilé à un moyen de préserver son intégrité corporelle. Il faut lire derrière cette hiérarchisation du discours une gêne à évoquer, de prime abord, ce qu’elles viennent réellement chercher dans la pratique du fitness. Tout cela n’est pas sans rappeler les propos de Morin (1997, pp. 219-220) pour qui « la fonction de l’entretien approfondi est de faire émerger la personnalité, les besoins essentiels, la conception de la vie de l’interviewé. L’entretien est réussi à partir du moment où la parole de l’interviewé est libérée des inhibitions. » Il a fallu du temps dans les entretiens pour qu’elles se révèlent davantage et qu’elles acceptent d’évoquer ce qui relève de l’intime et des craintes personnelles qu’elles se refusent d’évoquer, parfois, avec leurs « compagnons ». Celles qui, à un moment, constatent ne plus pouvoir freiner ce vieillissement autant qu’elles le voudraient se retranchent derrière les aspects biologiques qu’elles ne peuvent pas contrôler. Elles se sentent impuissantes. Souvent, ce constat les amène à arrêter l’activité. Pour notre population, la santé recherchée à travers le fitness survalorise le bien-être social sur le bien-être physique. La visibilité, ce qu’elles donnent à voir aux autres, constitue une valeur phare dans le sens où la lutte contre les affres du temps ne vaut que si elle est constatée par autrui.

1.3 – Tonicité corporelle et souplesse, synonymes de performance sociale ?

25La souplesse, qualité physique permettant d’accomplir des mouvements corporels avec la plus grande amplitude et aisance possibles, s’amenuise avec l’âge, alors que les sillons du visage, eux, accroissent leur empreinte. Ces femmes, pour la grande majorité d’entre elles, l’évoquent et parlent des articulations qui se raidissent, des gestes qui perdent de leur fluidité. Si chaque individu est doté de dispositions différentes, elles expliquent vouloir entretenir à leur niveau leur souplesse et leur tonicité pour lutter contre le ressenti, autant que sur la visibilité de ce vieillissement : « Enfin, voilà, c’est aussi dans un souci de prévention en fait […]. Bien se tenir droit quand on est vieux, ne pas être complètement refermé et puis garder une certaine souplesse, agilité… et puis un corps qui fonctionne » (E7, 40 ans). Ce désir ardent de « bien vieillir » et celui d’apprendre à vivre avec un corps qui change constituent autant de révélateurs d’une identité en tension. Les relations entretenues quotidiennement avec les autres obligent à forger une apparence pour soi, mais également pour « sauver la face » (Goffman, 1967). « Symbole de l’identité » (De Singly, 2005), le corps est la première chose visible et jugée lors d’une rencontre avec d’autres. Bien se présenter pour être bien jugée par les autres devient une injonction au risque de se voir rejetée si l’empâtement survient (Vigarello, 2010). Professionnelles, intimes, sociales, les femmes se parent et se présentent différemment, selon la situation, dans un « travail des apparences » perpétuel (Corbin et al., 2005). Modeler son corps en fonction des attentes de la société, de l’espace social et des autres est un impératif particulièrement bien incorporé chez ces femmes qui, paraphrasant le titre du livre d’Amadieu (2005), souhaitent conjuguer, amour, réussite et beauté. Les trois ne pouvant, selon leurs propos, pas être dissociés.

26Ce corps vieillissant stigmatise les individus en les renvoyant, d’abord, à l’idée de dégradation et, ensuite, à celle de mort symbolique dans une société occidentale où la jeunesse est mise en avant. Si dans les sociétés occidentales modernes tout est mis à disposition pour rester jeune et bien portante (crèmes anti-âge, chirurgie esthétique, régimes alimentaires, etc.), tout est vanté, mais également imposé, par la publicité ; celles qui ne suivent pas ces injonctions prennent le risque d’être déconsidérées, voire déclassées (Amadieu, 2005, p. 127). Cette tension entre injonctions et vécus (résultats acquis, comparaison sociale) n’est pas sans influence sur le choix de poursuivre ou non la pratique. « Avant, je faisais des cours collectifs, mais j’ai arrêté parce que vis-à-vis des jeunes, je voulais faire comme elles et comme je n’y arrivais pas, ça me stressait un peu plus. Je cherche un corps plus ferme, moins mollasson » (E3, 73 ans). Plutôt que d’accepter le vieillissement de son corps, E3 préfère arrêter les cours collectifs qui la confrontent à une population incarnant l’objet de sa quête et produisant, par effet de contraste, un sentiment d’inaccessibilité de cette dernière. Dans le cadre d’un second entretien, elle dit avoir arrêté le fitness à cause de son âge et souligne l’absence d’encadrement pour les « vieux ». En creux, à travers ses critiques sur la gestion de l’activité, se lit aussi l’intégration du sentiment de ne pas ou de ne plus pouvoir lutter contre le vieillissement. Il y a là une amorce de ce que Paugam (1991), dans un autre domaine (celui de la pauvreté), appelle l’autodisqualification qui conduit au repli sur soi. Les notions de « bien-vieillir » et « rester ferme » sont des contraintes qui s’imposent à ces femmes pour préserver leur identité. Les médias ne cessent de le leur rappeler, les magazines féminins surtout. La visibilité de leur aptitude à séduire passe alors, également, par une considération, même relative, de leur dynamisme.

27L’âge civil n’a pas toujours de rapport avec l’âge biologique ou physiologique. Il s’agit bien pour elles d’accepter et d’apprendre à vivre avec la vieillesse. Cette acceptation se fait grâce aux rencontres avec d’autres femmes de tous âges, mais aussi grâce à l’entretien par le fitness.

28Dans nos pays occidentaux, où le « culte de la performance » (Ehrenberg, 1991) est de rigueur et où l’individualisme s’est accru, l’avancée en âge est dévalorisante et dévalorisée, que ce soit au plan intellectuel ou physique (Kaufmann, 2007). Les injonctions sont nombreuses. Il faut rester jeune et beau/belle, c’est-à-dire productif et performant, au risque d’être écarté de la compétition sociale, que ce soit dans le domaine professionnel ou sentimental (Ehrenberg, 2010).

2 – Spectre d’une « déchéance »

2.1 – Ralentissement du geste et perte d’autonomie

29La vieillesse et le vieillissement du corps sont des évidences pour ces pratiquantes relativement conscientes de leur incapacité à lutter contre ce phénomène inexorable, mais qui, néanmoins, font tout ce qu’elles peuvent pour tenter d’endiguer ce qu’elles considèrent être une déchéance. Un autre champ lexical apparaît dans les entretiens : la perte d’autonomie. Il s’agit pour beaucoup d’entre elles d’une angoisse omniprésente. Mourir constitue un horizon bien présent, mais qui est bien secondaire devant le spectre de la dépendance aux autres : « J’ai vu mon mari… je l’ai conduit à l’hôpital. Ça a remis pas mal de choses en question. Moi, j’ai dit à mon mari, on prendra une pilule et hop ! De l’autre côté, ça me serait complètement égal » (E3, 73 ans). Le rapport à la vieillesse, pour cynique qu’il paraisse, est révélateur de la peur de vieillir. Le dépérissement lui semble intolérable. Le suicide n’est pas seulement révélateur d’une fuite, mais également de l’importance qu’elles accordent au fait de ne pas être une charge pour leur entourage. Dans le cadre de cet entretien, cette prise de conscience prend une réalité accrue depuis que son mari, plus âgé qu’elle, a rencontré des problèmes de santé. La situation l’a confrontée à la solitude, chose qu’elle n’avait jamais connue auparavant. E3, arguant d’être une séductrice jusqu’en maison de retraite, convoque implicitement une structure signifiante en termes de perte d’autonomie. Le fitness incarne, en miroir, un contre-modèle au ralentissement généré par l’âge, celui de la mobilité.

2.2 – Représentation des parents vieillissants et image de soi

30Les représentations différentes de la vieillesse qu’ont ces femmes sont souvent construites en opposition à l’image vieillissante de leurs parents. Les pratiquantes évoquent sans difficulté les souvenirs de ceux-ci. Elles révèlent, toutes, en avoir une vision assez négative. Cela n’est pas illogique au regard des conditions de vie des générations précédentes. Deux niveaux sont repérables : la place d’un père souvent sportif et/ou l’image d’une mère souvent réduite à un rôle domestique : « Mon papa, horticulteur fleuriste, était un grand sportif. C’était un gymnaste, tu vois, gymnaste il a fait les championnats de France et tout. Donc papa pas très grand, 1,63 m, carrure… Non, mais c’est pour ça qu’on a de qui tenir ! Belle carrure, un bon buste, de beaux pectoraux, bien foutu quoi ! » (E2, 62 ans). Comme le montre ce discours, le rôle du père est important dans la pratique sportive des adhérentes. Il constitue un modèle. Elles ont souvent reçu une éducation sportive par celui-ci. La place qu’elles lui accordent dans le discours est assez révélatrice d’une forme d’héritage. Le choix d’une pratique d’entretien de salle, parfois dénommée « gymnastique », fait à ce titre étrangement écho à sa trajectoire. Ayant toujours fait du sport depuis leur enfance, toutes celles qui s’identifient à leurs pères en ont gardé l’habitude. En cela, si le fitness constitue une nouvelle pratique, les valeurs qu’elles leur assignent persistent.

31E1 raconte, pour sa part, qu’elle n’était pas sportive à l’école. Son père, cycliste de haut niveau, l’a poussée à pratiquer. Même si elle présente ces moments comme des instants privilégiés avec son père, un paradoxe demeure. Souvent dispensée de sport à l’école par sa mère, elle roule près de « 15 000 km » par an au côté de son père et ses amis cyclistes. Dans ce milieu masculin, elle s’est engagée à ne pas être un handicap, s’imposant des performances et des entraînements ardus. Elle poursuit cette activité en la reliant désormais aux normes préventives, marques d’une ascension sociale relatives à sa socialisation secondaire (son mari et ses études). Le fait de « prendre soin de soi » est évoqué à travers le milieu d’appartenance. Son cycliste de père a toujours entretenu et inculqué la notion de diététique à sa fille. Elle justifie ses pratiques actuelles à travers des éléments importants dans son milieu d’origine, comme le fait de « manger équilibré ». Elle s’autorise à tisser un lien entre cette origine et son activité actuelle à travers de « bonnes » pratiques de soin et de prévention auxquelles elle a été socialisée enfant. Celles-ci se sont renforcées sous l’effet d’un regard « plus scientifique » acquis lors de ses études et relayé par son époux cancérologue qui l’encourage à avoir une pratique physique pour prévenir les cancers. Sa trajectoire semble inscrite dans sa relation à la pratique. Le vélo demeure très important pour elle et, malgré sa connotation de sport « populaire », il est, pour elle, symbole d’efforts, d’abnégation, de souffrances physiques acceptées et de mélange social. On note ici sa nécessité de cautionner sa pratique par le biais de l’appartenance sociale. Malgré une mobilité sociale intergénérationnelle ascendante forte (Merlié, 1997), elle n’a pas abandonné cette pratique qui la relie à son ancien milieu et plus particulièrement à son père.

32Mais, si elles ont construit leur parcours parfois en harmonie avec les valeurs sportives familiales, elles l’ont aussi construit en opposition. Ainsi, la représentation que les pratiquantes de fitness peuvent avoir de leurs mères joue également un rôle important. Certaines évoquent une maman « féminine » et apprêtée tandis que d’autres en parlent comme d’une personne ne prenant pas soin d’elle. Aucune ne parle de mère sportive. Un certain nombre de femmes construisent leur féminité en opposition à la figure maternelle ou pour combler des manques implicites que l’image de celle-ci peut leur renvoyer. « Maman était quelqu’un qui passait son temps à travailler. […] Elle ne s’est jamais occupée d’elle-même » (E5, 62 ans). « Elle faisait attention à sa ligne ça, c’est sûr. Oui, oui, elle était toujours apprêtée, très féminine […]. Mais, par contre, pas de sport » (E9, 43 ans). La valeur de féminité traditionnelle est pleinement remise en cause sur l’ensemble de notre échantillon.

33À la différence du rapport au père, la féminité de la mère est un sujet complexe. E5 et E1 ont une vision très différente de leur maman. Les représentations des facteurs de féminité changent énormément d’une génération à l’autre. L’une a vu la déchéance de sa mère. L’autre ne l’a que très peu connue car décédée très jeune d’un cancer. Ces événements ne sont pas sans impact sur leur construction identitaire. Pour la première, l’absence d’une mère vieillissante comme modèle, l’incite à relativiser la vieillesse, à l’euphémiser, voire à la dénier. Elle dénigre la chirurgie esthétique des autres. Il s’agit d’un acte inutile selon elle. Elle n’a pas eu le temps de voir le corps de sa mère changer, que ce soit la peau ou les cheveux. Lorsqu’elle évoque son âge (bientôt 60 ans), elle en est heureuse. Elle souhaite conserver une trace du temps qui passe comme les taches qui constellent progressivement ses mains de leur auréole brunâtre. Loin de refuser le temps qui avance, elle souhaite au contraire pouvoir s’en assurer par des choses concrètes : les transformations de son corps, la naissance de ses petits-enfants et d’autres preuves encore. Elle veut conserver ses cheveux gris et ne pas les teindre. Sa mère n’a pas pu avoir ces marques de vieillesse et ces éléments lui rappellent ainsi qu’elle a dépassé l’âge de sa propre mère. Finalement, la place importante qu’elle accorde à ce corps qui vieillit est révélatrice d’un manque de représentation maternelle, ayant perdu sa maman très jeune.

34E5, qui a connu sa mère jusqu’à plus de 80 ans, évoque une représentation de la vieillesse et, surtout, de la femme vieillissante très particulière au point de déclarer clairement construire une féminité et son identité en opposition à ce modèle. « Alors, moi, j’ai pris le contre-pied. Je pense que c’est vrai. » En précisant prendre le contre-pied de sa mère, elle évoque le souvenir d’une mère soumise, mais dynamique. Ces souvenirs sont représentatifs d’une génération. Sa mère travaillait « aux Finances ». E5 le souligne d’un grand sourire qui traduit un sentiment de fierté. Cependant, le discours devient vite pessimiste, voire caricatural, dès lors que l’entretien se recentre sur le rapport à la pratique de loisir. Une fois la situation professionnelle et sociale de sa mère présentée, elle relate des faits révélateurs de ce corps qu’elle cherche à entretenir. En décrivant une mère soumise, peu préoccupée de son apparence, elle s’est construit une identité en opposition à celle de sa mère et, surtout, elle l’affirme. Les exemples sont multiples, entre le ménage et l’apparence physique de sa mère. E5 se révèle, mais surtout déclare vouloir, être tout le contraire de ce que sa mère a pu lui montrer. Il en est de même de son rapport aux enfants. Elle se dit complice avec ses enfants à l’inverse de sa mère.

35Ces affirmations révèlent deux aspects de la construction de la féminité et de l’identité des pratiquantes interrogées. Certaines construisent une identité féminine en opposition à un modèle inculqué et/ou attendu alors que d’autres veulent prolonger des étapes non connues et/ou incarnées. La féminité ne peut être uniforme et encore moins universelle. Il n’existe pas une féminité, mais des féminités. Ce jeu se double d’une chambre d’écho que constituerait la masculinité d’un père sportif. « L’activité de fitness à la bascule du demi-siècle investit un champ de valeurs d’une modernité toute relative puisque le rapport à l’activité et à l’effort demeure sensiblement le même que celui qui gravitait dans les pratiques de Gymnastique Volontaire dans les années 1970-1980 » (Lebecq, 2013, p. 104).

Conclusion : construction d’un corps attendu et/ou désiré isolé de l’impact du temps

36Le portrait que dressent les pratiquantes de fitness sur la vieillesse semble évident pour elles. Elles vieillissent. Elles ne seraient plus désirables et ne devraient plus chercher à plaire. Certaines pensent même ne plus pouvoir charmer. D’autres justifient leur opinion par le fait d’être mariées, de ne plus avoir besoin de séduire leur compagnon. Parfois, elles disent que c’est une perte de temps, « les rides sont là et on ne peut rien y faire ». D’autres encore se cachent derrière le statut de grand-mère pour effacer leur statut de femme : « Je ne peux plus me permettre, maintenant je suis grand-mère. » Il s’agit ici d’une vision fataliste de la vieillesse, une perception essentialisée de la vie comme fuite du temps. Elles ne s’autorisent même plus d’infléchir sur sa trajectoire comme si les jalons de la posture sociale cristallisaient le champ de leur possible.

37Ces discours et perspectives sont pourtant en totale opposition avec leur pratique, souvent motivée par la quête de la jeunesse, par le fait de garder la ligne, d’être bien dans leurs corps, d’offrir une image positive d’elles aux autres. En creux, dans leurs discours, se lit l’importance du regard de l’autre, qu’il existe dans un rapport supposé de séduction ou, au contraire, n’existe plus. Pour la plupart de ces femmes, il s’agit de répondre, à travers la pratique assidue du fitness, à des normes qui caractérisent leur identité. Celle-ci doit être consensuelle (Kaufman, 2004), c’est-à-dire construite en interaction avec autrui par les regards ou l’intérêt portés, par le jeu de la séduction ou de l’ignorance, dans un désir de plaire ou, à l’inverse, de progressivement se replier hors vie sociale. En revendiquant un statut d’« épouse de » ou de grand-mère, elles se positionnent inconsciemment par rapport à l’autre et affichent des marqueurs temporels de distinctions sexuelles presque dépassés, désuets, mais sauvegardent leur image du corps « d’avant ». En ce sens, le rapport au père, assez consensuel dans l’échantillon, s’articule avec un rapport à la mère extrêmement variable. Ce qui renvoie à leurs origines – plutôt immuables – doit se compléter de ce qui renvoie à une trajectoire de référence, maternelle, positive ou négative. Le consensus n’est pas simple car, en fonction de l’environnement fréquenté, la revendication identitaire n’est pas la même. L’intériorisation des normes et valeurs diffère d’un milieu à l’autre (Bourdieu, 1979). L’identité individuelle est façonnée par le cadre social dans une « transaction » (Dubar, 1998) entre une identité pour soi et une identité pour autrui. Le rapport qu’entretiennent les pratiquantes avec la féminité vieillissante et le fitness interroge autant l’identité pour soi que l’identité pour autrui. Quand elles parlent d’elles, de l’image qu’elles ont d’elles-mêmes, elles parlent de l’image qu’elles veulent avoir pour elles, mais aussi qu’elles veulent donner aux autres, de l’image que les autres leur renvoient d’elles. Cette quête de la jeunesse, sous-entendu de la beauté éternelle, donne une sorte de consistance spécifique au social dans lequel le corps et la présentation de soi trouvent un ancrage particulier au point de devenir le vecteur principal de l’être (Eco, 2002). En effet, le paradoxe mis en évidence précédemment ne fait que révéler que la vieillesse met en danger l’identité pour autrui, le modèle de la femme séductrice comme illustration phare. Les pratiquantes se centrent alors davantage sur elles-mêmes et leur corps. Si le fitness peut être, pour elles, un outil de lutte contre le vieillissement récemment investi, les valeurs véhiculées par cette activité ne le sont pas. Les valeurs de bien-être, d’entretien du corps, de santé sont des héritages issus d’institutions déjà existantes telles que la gymnastique volontaire. On observe, aujourd’hui, une grande demande de personnalisation de cette pratique avec l’apparition de nouveaux services, parfois optionnels, comme un diagnostic propre et un plan d’entraînement individuel suivi par un interlocuteur privilégié au sein de la salle. Avec l’accès au fitness d’une population vieillissante, la pratique évolue. La façon de l’aborder, les demandes, les attendus se veulent nouveaux et pourtant les valeurs restent les mêmes, cristallisées qu’elles sont sur l’importance accordée au regard porté par autrui (Heinich, 1999). L’identité primaire s’arc-bouterait face aux assauts des identités secondaire et ternaire. Mais à l’heure où le corps ne connaîtrait qu’une évolution perçue comme dégradante, les luttes menées par ces femmes semblent n’affecter que la périphérie et la « couche » superficielle du rapport aux autres. Les fondamentaux restent les mêmes. Cette génération semble au milieu du gué d’une transformation entière de la représentation de la femme sportive.

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Mots-clés éditeurs : beauté, bien-être, vieillissement, vieillesse, activité physique

Date de mise en ligne : 16/10/2015

https://doi.org/10.3917/sta.107.0045

Notes

Domaines

Sciences Humaines et Sociales

Sciences, techniques et médecine

Droit et Administration

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