1 – Introduction
1Pourquoi certains élèves participent-ils activement au cours d’éducation physique, alors que d’autres font preuve de créativité pour en être dispensés ? Pourquoi certains élèves s’engagent-ils sans compter en prenant du plaisir dans l’activité physique pratiquée, alors que d’autres souffrent réellement ? Pourquoi certains élèves sont-ils motivés au cours d’éducation physique, alors que d’autres ont l’impression de perdre leur temps ? Ces questions obsèdent tous les intervenants de terrain mais aussi les chercheurs et les autorités qui considèrent, de plus en plus, le cours d’éducation physique comme un outil de santé publique (Fairclough, Stratton & Baldwin, 2002).
2Dans cette optique, les recherches qui visent à mieux comprendre la dynamique motivationnelle des élèves dans le contexte spécifique de l’éducation physique scolaire se sont multipliées. Ces études prennent appui sur plusieurs modèles théoriques identifiés comme « socio-cognitifs » ou « interactionnistes » qui conçoivent la motivation comme un « construit hypothétique utilisé afin de décrire les forces internes et/ou externes produisant le déclenchement, la direction, l’intensité et la persistance du comportement » (Vallerand & Thill, 1993, 18). Parmi ces modèles, la théorie de l’auto-détermination de Deci et Ryan (1985, 2002) et le modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque de Vallerand (1997) semblent particulièrement bien indiqués pour expliquer les effets du contexte social sur le comportement et le développement de l’élève dans le champ de l’éducation physique (Hagger & Chatzisarantis, 2007).
3Nous allons présenter, dans cet article, un état de la question des recherches qui étudient le concept de motivation auto-déterminée dans le contexte de l’éducation physique. L’objectif est de comprendre, d’une part, quels sont les facteurs contextuels et personnels qui renforcent ou qui affaiblissent la motivation auto-déterminée des élèves. D’autre part, la question des effets et des conséquences, pour les élèves, de l’adoption d’une motivation plus ou moins auto-déterminée sera également abordée dans cet article.
2 – Modèle de l’auto-détermination
4Le modèle de l’auto-détermination de Deci et Ryan (1985, 2002) cherche à comprendre et à expliquer la dynamique motivationnelle qui pousse un individu à s’engager ou non dans une activité. Il postule que chaque être humain est un organisme actif qui, de manière innée, cherche continuellement à augmenter son potentiel humain, à se développer psychologiquement par la découverte de nouvelles perspectives, par la maîtrise de nouveaux challenges et par la satisfaction de ses trois besoins psychologiques de base, à savoir un besoin de compétence, d’autonomie et d’appartenance sociale (Bryan & Solmon, 2007 ; Deci & Ryan, 2000, 2002).
5Le modèle de l’auto-détermination développe également l’idée que les raisons qui poussent quelqu’un à s’engager dans une activité sont multiples (Ryan & Deci, 2000). Les auteurs avancent qu’il existe différentes formes de motivation qui se différencient par leur degré d’auto-détermination, c’est-à-dire le degré avec lequel une activité est effectuée avec un sentiment de libre choix et de cohérence interne (Deci & Ryan, 2000 ; Ryan & Deci, 2000, 2002).
6Deci et Ryan (2002) conçoivent trois grands types de motivation organisés selon un continuum : la motivation intrinsèque, la motivation extrinsèque et l’amotivation. Chaque forme de motivation est associée à un niveau d’auto-détermination plus ou moins élevé. Ce continuum théorique de la motivation auto-déterminée a été confirmé par une méta-analyse réalisée sur le sujet dans le contexte de l’activité physique, du sport et de l’éducation physique par Chatzisarantis, Hagger, Biddle, Smith et Wang en 2003.
2.1 – Motivation intrinsèque
7À une extrémité du continuum, nous trouvons la motivation intrinsèque qui est inhérente aux activités qui sont réalisées pour l’intérêt qu’elles présentent en elles-mêmes et pour la satisfaction et le plaisir qui en découlent. La motivation intrinsèque se caractérise par un locus perçu de causalité interne (Ryan & Deci, 2000). Ce type de motivation implique que le sujet pratique une activité parce qu’il en retire du plaisir et une certaine satisfaction (Deci & Ryan, 2002).
8Selon Vallerand (1997), la motivation intrinsèque se déclinerait en trois sous-catégories : la motivation intrinsèque à la connaissance (p. ex. : « je participe parce que j’éprouve du plaisir et de la satisfaction à apprendre de nouvelles choses ») ; la motivation intrinsèque à la stimulation (p. ex. : « je participe parce que j’éprouve du plaisir et de la satisfaction à ressentir des sensations particulières ») ; et la motivation intrinsèque à l’accomplissement (p. ex. : « je participe parce que j’éprouve du plaisir et de la satisfaction à me surpasser et à relever des défis »).
9Le concept de motivation intrinsèque se rapproche du concept de flow (Biddle, Chatzisarantis & Hagger, 2001). Csikszentmihalyi définit le concept de flow comme étant « un état d’activation optimale dans lequel le sujet est complètement immergé dans l’activité » (cité par Demontrond & Gaudreau, 2008, 10). En d’autres termes, c’est le fait de s’engager dans une tâche en étant porté par l’activité, sans s’en rendre compte, sans avoir l’impression de faire des efforts. Le concept de flow est également qualifié d’autotélique, c’est-à-dire qui trouve sa fin dans l’activité en elle-même et qui n’exige pas de finalités ou de pressions extérieures (Demontrond & Gaudreau, 2008).
2.2 – Motivation extrinsèque
10Dans les champs de l’éducation physique et de l’activité physique et sportive, même si la motivation intrinsèque est abondamment présente, il existe aussi des raisons extrinsèques qui motivent la pratique (Ryan & Deci, 2007). En effet, de nombreuses personnes pratiquent une activité physique et/ou sportive pour des motifs tels que la santé, la condition physique, la reconnaissance sociale ou encore pour gagner quelques euros ou des notes satisfaisantes. Par ailleurs, la pratique physique est souvent alimentée par des facteurs extérieurs proposés par le contexte, par l’entraîneur, par l’enseignant, par les parents ou encore par les pairs. S’intéresser à la motivation extrinsèque est donc essentiel si l’on veut comprendre la dynamique motivationnelle dans son ensemble.
11Les motivations extrinsèques se référent aux motivations habitées par un locus perçu de causalité qui tend à être plutôt externe, à savoir essentiellement dirigées par des facteurs externes (récompenses, obligations, pressions, etc.) (Biddle et al., 2001). Quatre formes de motivation extrinsèque peuvent être classées sur un continuum caractérisé par des degrés décroissants de motivation auto-déterminée. Les deux premières motivations extrinsèques présentent des motifs d’engagement plutôt internes, tandis que les deux dernières s’inscrivent davantage dans des motifs d’engagement externes.
12Ainsi, la première forme de motivation extrinsèque est la régulation intégrée où le sujet choisit librement de s’engager dans une activité parce qu’il perçoit une relative concordance entre l’activité et ses motifs internes (p. ex. : « je participe parce que c’est important pour moi »). L’importance accordée à l’activité va permettre à l’individu de s’y engager pleinement.
13La deuxième forme est la motivation extrinsèque à régulation identifiée. Elle implique que « le sujet s’engage parce qu’il juge l’activité valable et qu’il a identifié l’importance de son engagement » (Ryan & Deci, 2000, 62) (p. ex. : « je participe parce que ce que j’y apprends me sera utile pour plus tard »).
14La troisième forme est la motivation à régulation introjectée qui implique que l’individu s’engage dans une activité « pour éviter des sentiments négatifs, tels que la culpabilité, ou pour chercher l’approbation des autres » (Biddle et al., 2001, 29). Cette forme de motivation montre chez l’individu une intériorisation plus faible des facteurs qui influencent ses comportements et ses actions. Cette forme de motivation est dépendante de facteurs externes (p. ex. : « je participe parce que je me sentirais mal de ne pas y aller ») (Deci & Ryan, 2002).
15La dernière forme, où l’aspect auto-déterminé de la motivation est totalement absent, est une motivation extrinsèque à régulation externe qui caractérise l’individu qui est motivé « par des éléments extérieurs à l’activité comme des récompenses matérielles ou l’évitement de punitions » (Ryan & Deci, 2000, 61) (p. ex. : « je participe parce que j’aurais des ennuis si je n’y allais pas »). Dans ce cas, l’engagement est complètement dépendant de la présence de ces facteurs externes, dès qu’ils disparaissent, la participation s’estompe (Ryan & Deci, 2007).
Cette conception multidimensionnelle de la motivation extrinsèque met en évidence que le modèle de l’auto-détermination n’oppose pas simplement, de manière dichotomique, la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque. La motivation extrinsèque s’organise sur le continuum de sorte que certaines formes de motivations extrinsèques, à savoir la motivation à régulation intégrée et celle à régulation identifiée présentent un locus de causalité perçu plutôt interne par rapport aux motivations extrinsèque à régulation introjectée et à régulation externe. Les auteurs vont d’ailleurs rassembler les motivations intrinsèques et les deux formes de motivation extrinsèque à régulation intégrée et identifiée sous un même vocable, celui de motivation auto-déterminée (versus motivation non auto-déterminée).
2.3 – Amotivation
16Enfin, à l’autre extrémité du continuum, nous trouvons l’amotivation qui se définit comme « l’absence de toutes motivations chez l’individu » (Ryan & Deci, 2000, 61). Celle-ci apparaît lorsque l’individu ne fait pas ou plus de lien entre l’action qu’il entreprend et le résultat de cette action.
17Cette conception multidimensionnelle de la motivation s’accompagne d’une vision dynamique de la motivation en la présentant comme pouvant évoluer d’une extrémité à l’autre du continuum. Par ailleurs, la motivation est également composite, c’est-à-dire que les individus, lorsqu’ils s’engagent dans une activité, sont bien souvent animés simultanément par plusieurs formes de motivation avec des combinaisons de motivations intrinsèque et extrinsèque (Boiché, Sarrazin, Grouzet, Pelletier & Chanal, 2008).
18En se basant sur les fondements du modèle de l’auto-détermination de Deci et Ryan (1985, 2002), Vallerand (1997) a élaboré un modèle intégratif comprenant les différentes formes de motivation, leurs déterminants et leurs conséquences. Nous allons décrire brièvement ce modèle dans la partie suivante.
3 – Modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque
19Vallerand (1997) postule dans son modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque que le type de motivation est déterminé par des facteurs sociaux. Par ce terme, il faut entendre « tout facteur humain et non humain rencontré dans l’environnement social » (Vallerand, 2007, 263). Cependant, l’impact des facteurs sociaux n’est pas direct, il est médiatisé par la satisfaction ou non de trois types de besoins fondamentaux qui sont innés et de même nature pour chaque individu indépendamment du genre, du groupe ou de la culture : la perception qu’a l’individu de sa compétence, de son autonomie et de son appartenance sociale. La satisfaction de ces trois besoins est essentielle pour chaque individu car elle détermine la nature de la motivation à l’origine des comportements et du bien-être général de la personne (Deci & Ryan, 2000).
Enfin, la motivation débouche sur des conséquences importantes. Ces conséquences sont nombreuses et peuvent être de nature comportementale, affective ou cognitive. Le type de motivation permettant de prédire la nature positive ou négative de ces conséquences. Ainsi, la motivation intrinsèque est associée aux conséquences les plus positives, suivie par la régulation intégrée et la régulation identifiée. La régulation introjectée et la régulation externe sont, quant à elles, associées à des conséquences négatives, tandis que l’amotivation prédit les conséquences les plus négatives (Vallerand & Grouzet, 2001).
4 – Motivation auto-déterminée en éducation physique
4.1 – Climats motivationnels
20De nombreuses études se sont appuyées sur le modèle de Vallerand (1997) afin de mieux comprendre ce qui détermine la motivation des élèves dans le contexte particulier de l’éducation physique scolaire. Les résultats montrent que la qualité de la motivation d’un élève dépend en grande partie du climat motivationnel instauré dans la classe par l’enseignant. Un climat motivationnel se définit comme « un environnement psychologique orientant les buts et les motivations d’un individu » (Ames, 1992 ; cité par Sarrazin, Tessier & Trouilloud, 2006, 149). C’est un facteur important qui soit facilite, soit entrave la motivation auto-déterminée des élèves.
21Les recherches mettent ainsi en évidence qu’un enseignant qui instaure un climat qui soutient l’autonomie des élèves aura une influence positive sur la motivation auto-déterminée des élèves car il facilite la satisfaction de leurs besoins d’autonomie, de compétence et d’appartenance sociale. Dans ce type de climat l’enseignant est décrit comme quelqu’un qui écoute beaucoup, perd très peu de temps en consignes organisationnelles, offre la possibilité aux élèves de faire des choix et de prendre des responsabilités, donne beaucoup de temps aux élèves pour travailler de manière autonome, ne donne pas la solution aux situations-problèmes rencontrées par les élèves, encourage ses élèves, se préoccupe des attentes des élèves et accepte que les élèves ressentent des émotions négatives envers l’activité proposée (Reeve, Deci & Ryan, 2004 ; Sarrazin, Tessier & Trouilloud, 2006).
22À l’opposé, les enseignants qui adoptent un climat plutôt contrôlant vont avoir tendance à mettre la pression, à abuser des expressions autoritaires de type « il faut », à imposer le contenu et les règles qui régissent le cours, à installer de la compétition entre les élèves, à prescrire les bonnes solutions et à poser des questions contrôlantes (Sarrazin, Tessier & Trouilloud, 2006). Ce type de climat est négatif pour la motivation auto-déterminée car l’élève se sent manipulé ou contrôlé par un levier extérieur.
23La tendance actuelle dans les études menées autour des déterminants de la motivation auto-déterminée est de chercher à davantage préciser les effets des différentes caractéristiques d’un climat soutenant l’autonomie ou contrôlant sur les trois besoins fondamentaux de manière différenciée. L’objectif étant d’affiner le grain d’analyse. Dans la suite de cet article, nous allons préciser les effets des différents facteurs sociaux pour chaque besoin psychologique, analysé de manière plus isolée.
4.2 – Besoin de compétence
24En se basant sur les théories de la compétence de White (1963) et de Harter (1982), Ryan et Deci (2002, 7) définissent le besoin de compétence comme un besoin inné « d’interagir efficacement avec son environnement social et d’atteindre les performances souhaitées ». Ce besoin de maîtriser l’environnement est considéré comme un des trois nutriments essentiels de la motivation auto-déterminée. Plus précisément, selon le modèle de l’auto-détermination de Deci et Ryan (2002) et le modèle de Vallerand (1997), la perception de la satisfaction de ce besoin de compétence a un effet positif sur la motivation auto-déterminée et un effet négatif sur la motivation non auto-déterminée.
De nombreuses recherches, menées dans le contexte de l’éducation physique, ont confirmé ces liens en mettant clairement en évidence que la satisfaction du besoin de compétence influence positivement les trois formes de motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque à régulation identifiée (piste 9a de la figure 1), et négativement la motivation extrinsèque à régulation introjectée, la motivation extrinsèque à régulation externe et l’amotivation des élèves en éducation physique (piste 9b de la figure 1) (Cox & Williams, 2008 ; Ferrer-Caja & Weiss, 2002 ; Li, Lee & Solmon, 2005 ; Ntoumanis, 2001, 2005 ; Standage, Duda & Ntoumanis, 2003, 2005, 2006 ; Wang & Liu, 2007).
Synthèse des facteurs et des effets de la perception de compétence en éducation physique
Synthèse des facteurs et des effets de la perception de compétence en éducation physique
Note : Les flèches pleines renseignent des liens positifs entre les variables concernées. Les flèches pointillées renseignent des liens négatifs entre les variables concernées.26La perception de compétence est notamment influencée par les réactions de l’enseignant aux prestations des élèves, en d’autres termes, par les feedbacks et, plus précisément, par la nature des feedbacks reçus par l’élève. Ainsi, Hein et Koka (2007) montrent que plus l’élève perçoit des feedbacks verbaux positifs de la part de son enseignant, plus sa perception de compétence sera élevée (piste 3a de la figure 1). D’autres chercheurs ont observé et confirmé ces résultats en précisant que les feedbacks verbaux devaient être positifs, précis et sincères pour avoir un effet positif sur le sentiment de compétence de l’élève en éducation physique (Mouratidis, Vansteenkiste, Lens & Sideridis, 2008 ; Nicaise, Bois, Fairclough, Amorose & Cogérino, 2007 ; Nicaise, Cogérino, Bois & Amorose, 2006).
27L’équipe de Sarrazin a approfondi et élargi ce lien entre feedbacks reçus et perception de compétence en mettant en évidence une certaine inégalité au niveau de la fréquence et de la nature des feedbacks reçus par les élèves en cours d’éducation physique (Sarrazin, Trouilloud, Tessier, Chanal & Bois, 2005). Certains élèves recevraient davantage des feedbacks négatifs du type « t’es vraiment bon à rien » et des feedbacks qui contrôlent et jugent leurs comportements (piste 3b de la figure 1). À l’opposé, d’autres élèves recevraient des feedbacks plutôt positifs qui apportent des informations claires et précises leur permettant de s’améliorer du type « termine bien ton geste par un mouvement de poignet » (ibid.).
28Cette différence de traitement serait due en partie aux attentes que l’enseignant formule envers chaque élève de sa classe, en début d’année, à propos des comportements, de la motivation et de l’engagement futurs de chacun dans son cours. Par exemple, l’enseignant s’attend à ce que certains élèves réussissent mieux certaines tâches que d’autres (Trouilloud & Sarrazin, 2002). Précisons que les attentes sont fondées sur des indices objectifs tels que les performances des élèves lors des premiers cours (piste 1a de la figure 1), mais aussi sur des indicateurs subjectifs tels que des stéréotypes sexuel, physique, ethnique ou socio-économique (piste 1b de la figure 1) (Trouilloud & Sarrazin, 2002).
29Ces attentes émises débouchent sur une différence de traitement, quantitative et qualitative, qui va être perçue et interprétée par l’élève et cela va affecter ou bonifier, selon le cas, sa perception de compétence et, in fine, sa motivation auto-déterminée envers le cours d’éducation physique (Trouilloud & Sarrazin, 2002). Ainsi, les élèves qui bénéficient d’attentes élevées, c’est-à-dire qui sont jugés comme compétents par leur professeur, vont avoir tendance à recevoir des feedbacks positifs et centrés sur leurs performances, ce qui va entraîner une perception de compétence et une motivation auto-déterminée élevées (piste 2a de la figure 1). À l’inverse, les élèves qui sont marqués par des attentes faibles vont recevoir des feedbacks davantage négatifs qui vont, à force, affaiblir leur sentiment de compétence et leur motivation auto-déterminée envers le cours d’éducation physique (piste 2b de la figure 1) (Trouilloud, Sarrazin, Bressoux & Bois, 2006).
30Cette différence de traitement ne se marque pas uniquement par les feedbacks émis mais aussi au niveau du climat motivationnel offert. Ainsi, les enseignants auraient tendance à adopter un climat contrôlant avec les élèves qu’ils perçoivent comme moins compétents et moins motivés. Inversement, les élèves « jugés » compétents et motivés bénéficient, eux, d’un climat soutenant l’autonomie (Sarrazin, Tessier, Pelletier, Trouilloud & Chanal, 2006 ; Trouilloud et al., 2006). Cela se traduit, pour les élèves bénéficiant d’attentes faibles, par des interventions fréquentes mais contrôlantes du type « il faut », par des critiques, par des contacts peu chaleureux et par de l’impatience face à l’échec. Inversement, les professeurs encouragent davantage les élèves bénéficiant d’attentes élevées, leur laissent davantage de temps de pratique et d’autonomie. Par ailleurs, les élèves à « attentes élevées » se voient offrir des challenges plus difficiles et plus diversifiés que les autres élèves avec qui on est moins exigeant (Trouilloud & Sarrazin, 2002).
31Dans le même ordre d’idée, la nature intrinsèque ou extrinsèque des objectifs proposés aux élèves en éducation physique peut avoir un effet important sur leur sentiment de compétence, leur motivation auto-déterminée et leur performance. Vansteenkiste et ses collègues ont ainsi mis en évidence que la formulation par l’enseignant d’objectifs intrinsèques (santé, plaisir, progrès personnel, etc.) et la justification de l’importance de réaliser les tâches proposées entraînent une motivation auto-déterminée chez les élèves (piste 4a de la figure 1). À l’inverse, des objectifs extrinsèques (points, performance, apparence physique, etc.) sont associés à une motivation davantage extrinsèque (piste 4b de la figure 1) (Vansteenkiste, Lens & Deci, 2006 ; Vansteenkiste, Simons, Soenens & Lens, 2004). Ces auteurs ont également observé qu’une combinaison d’objectifs intrinsèques et extrinsèques pouvait déboucher, dans certains cas, sur une motivation intrinsèque élevée mais ne donnait pas de meilleurs résultats que la « simple » formulation d’objectifs intrinsèques (Vansteenkiste, Simons, Lens, Soenens, Matos & Lacante, 2004). Ces résultats s’expliquent par le fait que lorsque les élèves sont confrontés à des buts extrinsèques, de manière isolée ou en combinaison avec des buts intrinsèques, ils vont avoir tendance à focaliser leur attention uniquement sur les facteurs externes et les éventuelles performances à atteindre mais aussi sur l’image véhiculée aux autres élèves de la classe. Les enjeux sociaux prennent le dessus sur l’activité en elle-même et sur le processus d’apprentissage (Vansteenkiste, Matos, Lens & Soenens, 2007). À l’inverse, lorsque l’activité est réalisée pour des raisons intrinsèques, elle est perçue comme un moyen de progresser et de satisfaire son besoin de compétence mais aussi ses besoins d’autonomie et d’appartenance sociale.
Les expériences passées de l’élève peuvent également influencer leur perception de compétence actuelle. Li, Lee et Solmon (2005) mettent en évidence que les élèves qui ont accumulé une perception de compétence élevée lors d’expériences antérieures développent une perception de compétence plus élevée que les autres lorsqu’ils sont confrontés à une tâche similaire (piste 8 de la figure 1). Par conséquent, les auteurs insistent pour que les élèves soient confrontés au succès dans un maximum de situations les plus diversifiées possibles afin de nourrir largement leur besoin de compétence et favoriser les transferts entre les contextes.
Par ailleurs, le contexte plus ou moins compétitif de la classe peut avoir un effet non négligeable sur la perception de compétence des élèves (piste 5 de la figure 1) (Ryan & Deci, 2007). D’une part, le contexte compétitif apporte de l’information aux élèves quant à leur performance. Si le challenge offert est optimal et les feedbacks reçus sont positifs, alors le sentiment de compétence et la motivation auto-déterminée de l’élève tendront à augmenter (piste 3a de la figure 1). Inversement, si l’élève vit un échec et que les feedbacks apportés renforcent celui-ci, alors sa motivation auto-déterminée baissera (piste 3b de la figure 1). D’autre part, un environnement compétitif peut apporter une certaine pression de réussir, de gagner qui peut être accompagnée par un climat très contrôlant, ce qui est néfaste pour le sentiment de compétence et pour la motivation auto-déterminée (Standage et al., 2003). Malheureusement, cette pression est souvent présente dans les classes, dans les gymnases ou sur les terrains de sport. Ensuite, l’utilisation de récompenses « tangibles », qui fait partie également de ce type d’environnement, est néfaste pour le sentiment de compétence et la motivation auto-déterminée des élèves (Deci, Koestner & Ryan, 2001). Enfin, le contexte compétitif apporte inévitablement des comparaisons sociales qui vont avoir tendance à miner la motivation auto-déterminée des élèves (piste 6 de la figure 1). Pour être davantage précis, soulignons que l’impact des comparaisons sociales dépend en partie du cadre de référence proposé à l’élève. Ainsi, au cours d’éducation physique, les élèves auront une perception de compétence plus faible s’ils se trouvent dans une classe de niveau élevé que lorsqu’ils sont dans une classe de niveau plus faible (Chanal, Marsh, Sarrazin & Bois, 2005). Cet effet n’est véritablement visible que si la comparaison sociale se fait par rapport à des élèves qui sont considérés comme des « références » par les autres camarades de la classe.
Enfin, les résultats des recherches tendent à montrer que certaines différences existent entre les filles et les garçons en éducation physique (Flintoff & Scraton, 2007). Ces différences apparaissent notamment au niveau de la quantité et de la qualité des feedbacks reçus (Nicaise et al., 2007), au niveau de la perception de compétence (Nicaise et al., 2006) mais aussi au niveau du type de motivation. En effet, ces auteurs observent que les filles reçoivent significativement moins de feedbacks que les garçons, elles ont une perception de compétence significativement plus faible que les garçons et elles sont davantage motivées de manière extrinsèque que les garçons en éducation physique (piste 7 de la figure 1). Ces différences s’expliquent, en partie, par les phénomènes des attentes et du cadre de référence qui seraient plus importants chez les filles. Ces dernières faisant plus attention à l’image qu’elles véhiculent (Standage et al., 2005). Enfin, les stéréotypes sexuels n’arrangent rien. En effet, Chalabaev et Sarrazin (2009) montrent que la motivation intrinsèque est davantage présente pour les activités physiques et sportives qui véhiculent un stéréotype conforme à leur sexe que quand ce n’est pas le cas (p. ex. : football pour les garçons et danse pour les filles). Cette relation est médiatisée par la perception de compétence.
4.3 – Besoin d’autonomie
32La particularité de la théorie de l’auto-détermination est de postuler que la satisfaction du besoin d’autonomie est un nutriment aussi essentiel que le besoin de compétence dans la dynamique motivationnelle des individus (Deci & Ryan, 2000 ; Ryan & Deci, 2002, 2007). Ce postulat a été, à maintes reprises, observé dans la littérature consacrée au domaine de l’éducation physique où les chercheurs montrent, à la fois, une relation positive entre une perception d’autonomie élevée et une motivation auto-déterminée (piste 6a de la figure 2), et une relation négative entre celle-ci et la motivation non auto-déterminée des élèves (piste 6b de la figure 2) (Hagger, Chatzisarantis, Culverhouse & Biddle, 2003 ; Parish & Treasure, 2003 ; Standage et al., 2003, 2005, 2006 ; Ward, Wilkinson, Graser & Prusak, 2008).
33Néanmoins, ce besoin d’autonomie est au centre d’un débat qui occupe encore actuellement la communauté scientifique (Carver & Scheier, 2000 ; Sansone & Harackiewicz, 2000). La controverse porte, à la fois, sur la définition du concept mais aussi sur la notion transculturelle qui l’accompagne (Deci & Ryan, 2000). Tentons de présenter brièvement les arguments des uns et des autres tout en insistant également sur les facteurs clés qu’un enseignant d’éducation physique peut mobiliser pour satisfaire le besoin d’autonomie de ses élèves.
34Tout commence par la définition du concept d’autonomie et celle du besoin d’autonomie. Carver et Scheier (2000) dénoncent l’ambiguïté qui existe entre la définition proposée par les auteurs de référence et l’utilisation courante du concept d’autonomie. Ainsi, le dictionnaire Le Robert (1998) définit l’autonomie « comme la « faculté d’agir librement », « indépendance » et une personne autonome comme quelqu’un « qui ne dépend de personne, qui est indépendant, libre ». Ainsi, être autonome s’assimile à être libre de toutes contraintes extérieures, à être indépendant.
35À l’inverse, les tenants du modèle de l’auto-détermination définissent le besoin d’autonomie comme le besoin « de se sentir à la base de ses actions et d’avoir la possibilité de faire des choix entre plusieurs pistes d’action » (Guay, Vallerand & Blanchard, 2000, 177-178). C’est la perception d’être à l’origine de son propre comportement (Ryan & Deci, 2006). Les auteurs insistent, à la fois, sur le fait que l’autonomie est l’antonyme d’hétéronomie, qui caractérise tout comportement contrôlé par des forces vécues comme étrangères et/ou des pressions, qu’elles soient internes ou externes, mais aussi sur l’idée que l’autonomie n’est pas synonyme d’indépendance, dans le sens où les individus peuvent choisir librement de se contraindre, d’être dépendant de quelqu’un, pour se sentir à la base de ses actions (Ryan & Deci, 2007). L’autonomie n’implique pas automatiquement une absence d’influences externes.
36Selon Deci et Ryan (2000, 2002), la présence de ce besoin d’autonomie est théoriquement universelle. Cependant, ce postulat est également au centre du débat. D’un côté, certains chercheurs plutôt sceptiques nuancent l’idée en montrant que chez les femmes, dans un contexte oriental, le besoin d’autonomie n’a pas la même valeur que dans le contexte occidental (Ryan & Deci, 2007). Ainsi, dans la culture orientale, le besoin d’autonomie a peu de signification, ce qui implique que la motivation auto-déterminée des individus ne souffre pas d’une insatisfaction de leur besoin d’autonomie (piste 1 de la figure 2). D’un autre côté, d’autres chercheurs observent, à l’inverse, l’invariance transculturelle de la corrélation positive entre la satisfaction du besoin d’autonomie et une motivation auto-déterminée (Chirkov, Ryan, Kim & Kaplan, 2003). Ryan et Deci (2006, 2007) participent également au débat en affirmant que les « sceptiques » arrivent à des résultats opposés parce qu’ils assimilent notamment le concept d’autonomie à celui d’indépendance, ce qui n’est pas conforme à la définition de référence.
37En ce qui concerne les facteurs qui nourrissent le besoin d’autonomie en éducation physique, Prusak, Treasure, Darst et Pangrazi (2004) montrent, dans une étude quasi-expérimentale, que les adolescentes qui ont eu la possibilité de faire des choix, au niveau de l’activité physique pratiquée au cours d’éducation physique, sont davantage motivées de manière auto-déterminée et, à l’inverse, elles sont moins motivées de manière non auto-déterminée que les élèves qui n’ont pas eu la possibilité de faire des choix (piste 2 de la figure 2). Ward et al. (2008) confirment ces résultats en mettant en évidence, dans une étude expérimentale similaire, que si l’enseignant d’éducation physique offre la possibilité aux filles de choisir leur activité physique parmi une sélection, alors ces dernières développeront une perception d’autonomie, une motivation auto-déterminée et un engagement physique plus élevés que les autres élèves qui n’ont pas pu exprimer leurs préférences. A contrario, les enseignants qui mettent en place un climat contrôlant, qui se caractérise par l’usage de directives, d’imposition et de moyens de pressions et également par l’absence de choix, ne favorisent pas l’adoption d’une motivation auto-déterminée par leurs élèves (pistes 4 et 5 de la figure 2). Ntoumanis (2001) observe également une corrélation positive entre un environnement qui n’offre pas beaucoup de choix et une perception d’autonomie et une motivation auto-déterminée peu élevées. Par ailleurs, cet auteur déplore le fait que l’éducation physique reste une discipline où les élèves ont peu de choix à réaliser au niveau des activités et des comportements à adopter. Les enseignants d’éducation physique fonctionnant essentiellement sur un mode prescriptif qui ne permet pas suffisamment la prise d’initiative et de responsabilité.
Assor, Kaplan et Roth (2002) confirment ces résultats mais nuancent en précisant que si les enseignants sont invités à offrir des choix aux élèves, ils doivent surtout faire preuve d’empathie, de pertinence et de cohérence (piste 3 de la figure 2). Ainsi, il ne sert à rien d’offrir un environnement de choix aux élèves si les propositions formulées ne sont pas réalisées en fonction des attentes et des intérêts des élèves. Les enseignants sont invités à être à l’écoute de leurs élèves afin de pouvoir construire des compromis pertinents entre leurs obligations (le programme) et les aspirations des élèves. Enfin, les auteurs insistent sur l’idée qu’il est nécessaire d’aider les élèves à développer des compétences cognitives et sociales spécifiques afin de pouvoir assumer et profiter de cet espace de choix.
4.4 – Besoin d’appartenance sociale
38Le troisième besoin psychologique fondamental, le besoin d’appartenance sociale, se définit comme le besoin de se sentir appartenir à un groupe et d’être reconnu par celui-ci (Ryan & Deci, 2002). Ce besoin de créer des liens sociaux est considéré comme inné et universel : « les gens qui ont quelque chose en commun, qui partagent des expériences communes (même mauvaises), ou tout simplement qui sont exposés souvent les uns aux autres ont tendance naturellement à former des liens d’amitié » (Baumeister & Leary, 1995, 520).
Synthèse des facteurs et des effets de la perception d’autonomie en éducation physique
Synthèse des facteurs et des effets de la perception d’autonomie en éducation physique
Note : Les flèches pleines renseignent des liens positifs entre les variables concernées. Les flèches pointillées renseignent des liens négatifs entre les variables concernées.40Parmi les déterminants de ce besoin social, Ntoumanis (2001, 2005) montre que les élèves qui sont invités par l’enseignant à s’engager dans un apprentissage coopératif développent une satisfaction élevée de leur besoin d’appartenance sociale (piste 1 de la figure 3), qui influencera positivement, par la suite, l’adoption d’une motivation auto-déterminée pour l’activité pratiquée.
Enfin, les élèves qui sont confrontés à un environnement contrôlant qui a tendance à comparer les élèves entre eux, à miser sur l’individualisme et sur la performance développeront plus facilement une motivation non auto-déterminée (piste 2 de la figure 3) (Cox & Williams, 2008 ; Ferrer-Caja & Weiss, 2002 ; Ntoumanis, 2001, 2005 ; Standage et al., 2003, 2005, 2006 ; Standage & Gillison, 2007).
Synthèse des facteurs et des effets de la perception d’appartenance sociale en éducation physique
Synthèse des facteurs et des effets de la perception d’appartenance sociale en éducation physique
Note : Les flèches pleines renseignent des liens positifs entre les variables concernées. Les flèches pointillées renseignent des liens négatifs entre les variables concernées.4.5 – Conséquences
41En ce qui concerne les conséquences affectives, cognitives et comportementales de la motivation auto-déterminée, les recherches dans le contexte de l’éducation physique mettent en évidence qu’une motivation auto-déterminée est reliée positivement avec la sensation de prendre du plaisir (Standage et al., 2005 ; Wang & Liu, 2005), avec une haute estime de soi (Standage & Gillison, 2007 ; Hein & Hagger, 2007), avec une performance plus élevée (Boiché et al., 2008) et avec des affects positifs (Mouratidis et al., 2008).
42D’autres études observent qu’il existe une relation positive entre la motivation auto-déterminée envers le cours d’éducation physique et l’intention de pratiquer une activité physique de loisirs en dehors de l’école (Hagger et al., 2003 ; Hagger, Chatzisarantis, Barkoukis, Wang & Baranowski, 2005 ; Hein, Müür & Koka, 2004 ; Ntoumanis, 2001, 2005 ; Standage et al., 2003). Ainsi, plus un élève est motivé de manière auto-déterminée, plus il va avoir l’intention de débuter une pratique sportive régulière (Ryan & Deci, 2007). Par ailleurs, les chercheurs montrent que les élèves motivés de manière auto-déterminée persisteront plus longtemps et plus facilement dans leur pratique sportive que ceux animés par une motivation non auto-déterminée (Hagger et al., 2003).
5 – Conclusion
5.1 – Perspectives pour le terrain
43Le modèle de l’auto-détermination de Deci et Ryan (1985, 2002) et le modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque de Vallerand (1997), présentés dans cet article, postulent que les élèves viennent au cours d’éducation physique avec des attentes et des besoins singuliers qui débouchent sur des raisons diverses de s’engager ou pas. Certains élèves, animés par une motivation intrinsèque, y participent pour l’activité en elle-même et, plus précisément, pour le plaisir qu’ils en retirent. Pour d’autres, la régulation identifiée domine. Ils s’engagent parce qu’ils perçoivent le cours d’éducation physique comme important, par exemple, pour la santé, la condition physique, le défoulement, les relations sociales. D’autres élèves, contraints par une motivation introjectée et/ou à régulation externe, participent parce qu’ils se sentent obligés de le faire et/ou parce que des pressions externes sont perçues. Enfin, des élèves présentent une amotivation qui les empêche de réellement s’engager. Cette conception multidimensionnelle et composite de la motivation s’accompagne également d’une vision dynamique. Ainsi, la motivation des élèves peut rapidement évoluer dans un sens ou dans l’autre sur le continuum motivationnel en fonction de la situation et de la présence ou de l’absence de facteurs contextuels et/ou personnels spécifiques.
44Connaître cette possibilité de combiner, en éducation physique, des motivations intrinsèques et des motivations extrinsèques et d’être capable d’agir sur ces combinaisons est intéressant pour les intervenants. Appréhender les motivations par cet abord multidimensionnel et dynamique permet en effet de sortir du fatalisme que l’on peut encore entendre dans la bouche de certains enseignants parlant de l’amotivation de leurs élèves : « ils ne sont pas motivés ! », « rien ne les intéresse ! ». Les enseignants doivent prendre conscience qu’il est possible d’actionner une série de leviers pour favoriser les formes de motivations positives et lutter contre les phénomènes de régulation externe et d’amotivation.
45Les recherches menées dans le contexte de l’éducation physique mettent en évidence que l’environnement mis en place par l’enseignant peut jouer un rôle dans le processus motivationnel des élèves. Les résultats montrent qu’un environnement qui satisfait les besoins de compétence, d’autonomie et d’appartenance sociale des élèves est nécessaire pour favoriser chez eux une motivation auto-déterminée.
46Les élèves ont besoin pour satisfaire leur besoin de compétence de recevoir des feedbacks positifs, sincères et précis, d’agir dans un environnement dépourvu de comparaison sociale et de compétition et de se trouver en interaction avec un enseignant qui justifie ses choix et qui propose des buts intrinsèques. De même, la satisfaction du besoin d’autonomie des élèves, c’est-à-dire le besoin de se sentir à la base de ses actions, est facilitée lorsque les élèves sont en présence d’un enseignant qui fait preuve d’empathie et qui offre aux élèves la possibilité de s’exprimer, de faire des choix, de prendre des responsabilités, de négocier tout en étant soutenu. Enfin, l’utilisation de l’apprentissage coopératif permet l’intégration des élèves dans le groupe-classe, synonyme d’une satisfaction du besoin d’appartenance sociale qui anime également chaque élève en éducation physique.
L’adoption d’une motivation plus ou moins auto-déterminée est importante car elle déterminera la nature positive ou négative des conséquences comportementales, affectives et cognitives qui toucheront les élèves. Parmi les effets bénéfiques, on retrouve un lien positif entre les motivations auto-déterminées et l’intention de pratiquer une activité physique et sportive en dehors de l’école. Comprendre ce qui pousse les élèves à participer apparaît ainsi être un enjeu capital pour chaque intervenant parce que cela a des répercussions importantes, à court terme, sur l’engagement dans le cours d’éducation physique mais aussi, à moyen et à long termes, sur la future vie active de l’élève.
5.2 – Perspectives pour la recherche
47Selon Vallerand et Grouzet (2001, 87), « pouvoir décrire, expliquer et prédire la nature et les processus des déterminants motivationnels nous rend plus à même d’agir sur le terrain en induisant certains changements dans la motivation pour rendre l’expérience sportive et physique des plus agréables et des plus efficaces ». L’intérêt des recherches sur la problématique de la motivation est de plus en plus important dans la communauté scientifique mais également auprès des entraîneurs, des éducateurs et des enseignants de terrain.
48Les recherches qui s’appuient sur le modèle de l’auto-détermination et le modèle hiérarchique de la motivation intrinsèque et extrinsèque sont encore amenées à se multiplier à l’avenir dans le champ du sport, des activités physiques et de l’éducation physique scolaire. À partir de designs quasi-expérimentaux, les futures recherches viseront à préciser davantage l’effet des différentes caractéristiques des climats motivationnels sur la satisfaction des trois besoins fondamentaux, d’une part, et sur la motivation auto-déterminée, d’autre part.
Parmi les autres pistes possibles, nous voudrions également insister sur le développement de programmes de recherche centrés sur les liens pouvant exister entre la participation au cours d’éducation physique et la pratique sportive en dehors de l’école. Identifier les facteurs déterminants sur lesquels les professionnels peuvent jouer pour donner aux élèves le goût de la pratique sportive en dehors de l’école demeure un réel enjeu de santé publique.
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Mots-clés éditeurs : éducation physique, auto-détermination, motivation
Mise en ligne 07/07/2010
https://doi.org/10.3917/sta.088.0007